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Table des matières



Croissance et transformation des entreprises (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 40

M. Richard Yung

Mme Catherine Fournier, présidente de la commission spéciale

ARTICLE 41

M. Pierre Ouzoulias

ARTICLE 41 BIS

ARTICLE 42

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur de la commission spéciale

ARTICLE 42 BIS A

ARTICLE 42 BIS

M. Philippe Adnot

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 43

ARTICLE 43 BIS (Supprimé)

Hommage aux victimes de l'incendie de la rue Erlanger

Questions d'actualité

Traité sur les forces nucléaires de portée intermédiaire

M. Joël Guerriau

Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes

Référendum (I)

M. Roger Karoutchi

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice

Référendum (II)

M. Hervé Marseille

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Prélèvement à la source

M. Richard Yung

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Tabagisme en zone frontalière

Mme Véronique Guillotin

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Débat national et pluralisme dans les médias

M. Pierre Laurent

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Coopératives agricoles

M. Henri Cabanel

M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Niches fiscales

Mme Claudine Thomas

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Programmation pluriannuelle de la recherche

M. André Gattolin

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Décentralisation

M. André Reichardt

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Liberté de la presse et indépendance de la justice

Mme Marie-Pierre de la Gontrie

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice

Protoxyde d'azote

Mme Valérie Létard

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Croissance et transformation des entreprises (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 43 QUINQUIES

ARTICLE 44

M. Jean-François Husson, rapporteur de la commission spéciale

M. Fabien Gay

M. Martial Bourquin

M. Michel Vaspart

Mme Viviane Artigalas

M. Olivier Jacquin

M. Patrick Kanner

Mme Marie-Noëlle Lienemann

M. David Assouline

M. Richard Yung

Mme Sophie Taillé-Polian

M. Vincent Capo-Canellas

Mme Éliane Assassi

M. Yves Daudigny

M. François Bonhomme

M. Philippe Dominati

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Cécile Cukierman

M. Pascal Savoldelli

Mme Sophie Primas

M. Pierre Laurent

M. Claude Bérit-Débat

Mme Christine Lavarde

Mme Catherine Fournier, présidente de la commission spéciale

M. Bruno Le Maire, ministre

Rappel au Règlement

M. Gérard Longuet

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 44 (Suite)

Mise au point au sujet d'un vote

Discussion des articles (Suite)

Mme Catherine Fournier, présidente de la commission spéciale

ARTICLE 45

Mme Viviane Artigalas

Mme Marie-Noëlle Lienemann

M. Fabien Gay

ARTICLE 46

ARTICLE 47

ARTICLE 48

ARTICLE 48 BIS

ARTICLE 49

ARTICLE 50

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 51 (Supprimé)

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 51 BIS (Supprimé)

Annexes

Ordre du jour du mercredi 6 février 2019

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mardi 5 février 2019

56e séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de Mme Valérie Létard, vice-présidente

Secrétaires : Mme Agnès Canayer, M. Joël Guerriau.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Croissance et transformation des entreprises (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 40

M. Richard Yung .  - Rétablissons une vérité : le brevet français est un titre fort ; sa force découle de son intégration dans le système européen des brevets.

Le choix de déléguer la recherche d'antériorité au niveau européen, il y a une quarantaine d'années, permet aux déposants de bénéficier d'un rapport de recherche et d'un avis sur la brevetabilité qui porte sur la nouveauté mais aussi sur l'activité inventive, neuf mois environ après le dépôt, à moindre coût. Il faut dire que la France avait apporté en dot l'Institut international des brevets de La Haye.

Lors de l'extension européenne de leurs brevets, les déposants français bénéficient d'une réduction significative de taxe de recherche. Le taux d'extension à l'Office européen des brevets (OEB) des brevets français s'élève à 75 %, contre 45 % en moyenne : preuve que les brevets français sont suffisamment solides pour être déposés à l'étranger. Enfin, le taux d'annulation des brevets français par décision du tribunal de grande instance de Paris s'élève à 20 %, contre 40 % pour les autres pays.

Mme Catherine Fournier, présidente de la commission spéciale .  - L'innovation est la condition sine qua non du développement de nos entreprises. Cela suppose qu'on lui offre un environnement juridique propice. L'innovation a un coût, et une entreprise sera plus encline à investir, à valoriser son capital immatériel, si elle sait que son innovation sera protégée.

L'article 42 du projet de loi permettra à une entreprise de contester plus facilement un brevet via une procédure administrative d'opposition.

L'article 42 bis permet à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) de s'assurer que les conditions de brevetabilité d'une invention sont réunies avant d'accorder le brevet. Jusqu'ici, les entreprises n'étaient pas obligées de respecter les critères fixés par la loi... Loin d'affaiblir le brevet français au profit du brevet européen, cet article le rend plus compétitif en améliorant sa qualité tout en garantissant son moindre coût.

Hélas, la commission spéciale l'a supprimé sans véritable débat. À titre personnel, je ferai confiance à notre rapporteur, qui a beaucoup travaillé sur ce sujet.

Mme la présidente.  - Amendement n°641, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

M. Fabien Gay.  - Le droit de la propriété intellectuelle vise un juste équilibre entre protection du créateur et préservation de l'intérêt général. Hélas, réforme après réforme, cet équilibre se rompt au profit d'une privatisation croissante des inventions, au point que la jurisprudence a dû rappeler que le droit de la propriété ne saurait primer sur les droits fondamentaux.

Certes, un inventeur doit pouvoir jouir un temps de l'exclusivité de son invention mais les abus se multiplient, notamment dans l'industrie pharmaceutique. Un simple ajout de vitamine justifie une nouvelle demande de brevet ! Médecins du Monde et Médecins sans frontières ont ainsi attaqué devant l'OEB le brevet contestable d'un médicament contre l'hépatite C...

Le certificat d'utilité est particulièrement adapté aux inventions à cycle de vie court, comme les prototypes. C'est un outil de protection qui stimule la recherche. Doubler sa durée de vie ne répond à aucune logique économique, et reviendrait à renforcer les mauvaises pratiques.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur de la commission spéciale.  - Il semble au contraire utile d'allonger cette durée pour se caler sur l'Allemagne ou la Chine et donner ainsi plus de visibilité à ce titre de protection. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances.  - Même avis.

L'amendement n°641 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°171 rectifié ter, présenté par MM. Le Gleut et Bascher, Mmes Bories et de Cidrac, M. Darnaud, Mmes Deromedi et Dumas, M. Frassa, Mme Garriaud-Maylam et MM. Grosdidier, Lefèvre, Mandelli, Mouiller, Piednoir et Rapin.

I.  -  Après l'alinéa 4

Insérer six alinéas ainsi rédigés :

...° Après l'article L. 612-3, il est inséré un article L. 612-3-... ainsi rédigé :

« Art. L. 612-3-...  -  Le déposant d'une demande de brevet peut indiquer dans la requête en délivrance que ce dépôt vaut également demande d'un certificat d'utilité portant sur la même invention.

« Dans le cas prévu à l'alinéa précédent, le déposant doit acquitter la redevance de dépôt correspondant à la demande de brevet et la redevance de dépôt correspondant à la demande de certificat d'utilité.

« Les demandes de rectification ou de modification dans les pièces de la demande de brevet adressées par le déposant doivent être accompagnées des mêmes demandes de rectification ou de modification pour la demande de certificat d'utilité déposée conjointement à la demande de brevet, le cas échéant.

« Le présent article n'affecte pas la possibilité de déposer en application de l'article L. 612-13 de nouvelles revendications, indépendamment de celles de la demande de brevet correspondante.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. » ;

M. Ronan Le Gleut.  - Un certificat d'utilité se différencie d'un brevet par une durée de protection plus courte, une procédure d'examen plus légère, une délivrance plus rapide et un coût moins élevé.

Près de 90 pays disposent d'un titre de ce type, le plus souvent appelé « modèle d'utilité ». Les modèles d'utilité allemand ou chinois ont fait leurs preuves : champ d'application, système judiciaire, possibilité de déposer une demande de brevet concomitante sur une même invention.

L'amendement renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de préciser les modalités d'application de tels instruments.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Le dépôt simultané n'est pas souhaitable : brevet et certificat d'utilité n'ont pas vocation à protéger les mêmes inventions, il existe une progressivité dans la protection. Le transfert en cours d'instruction de la demande d'utilité à la demande de brevet et vice versa est en outre déjà possible. Retrait ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°171 rectifié ter est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°823, présenté par M. Yung et les membres du groupe La République En Marche.

Alinéas 10 à 14

Supprimer ces alinéas.

M. Richard Yung.  - Rédactionnel.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Ces dispositions concernant l'application à Wallis et Futuna n'apparaissent pas ailleurs dans le texte. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Retrait ?

L'amendement n°823 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°392 rectifié, présenté par Mme Boulay-Espéronnier, M. Bonhomme, Mme Duranton, MM. Vogel, Kennel et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Lefèvre, Regnard, Laménie et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Revet, Daubresse, Rapin et Gremillet et Mme Garriaud-Maylam.

I.  -  Après l'alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

6° L'article L. 614-24 est abrogé. 

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le 6° du I entre en vigueur après un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi.

M. François Bonhomme.  - Depuis l'entrée en vigueur du traité de coopération en matière de brevets (PCT) en 1978, la France ne permet pas aux déposants d'une demande internationale d'entrer en procédure française : ce n'est que par un brevet européen qu'ils peuvent obtenir la protection de leur invention en France.

D'autres n'imposent pas une telle restriction : les déposants du PCT peuvent demander un brevet directement auprès des offices allemand et britannique, confortant ainsi le rôle international de ces derniers.

Abandonner cette restriction confortera la procédure et les juridictions françaises compétentes en matière de brevets dans le contexte du futur brevet européen à effet unitaire.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - La question s'est déjà posée plusieurs fois. Laissons le temps à l'INPI d'absorber les évolutions que lui impose déjà le projet de loi. Retrait ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°392 rectifié est retiré.

L'article 40 est adopté.

ARTICLE 41

M. Pierre Ouzoulias .  - Cet article procède du rapport commandé par Thierry Mandon, à l'époque secrétaire d'État chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Devant l'Assemblée nationale, la ministre de la recherche l'a jugé fondamental. Mais depuis vendredi dernier, le contexte politique a changé. À l'occasion du 80e anniversaire du CNRS, le Premier ministre a annoncé un grand débat sur la recherche française, autour de trois questions : le financement des projets novateurs, la compétitivité à l'échelle internationale, la conversion des découvertes scientifiques en innovation. Le débat doit durer six mois et aboutir à un projet de loi en 2020.

« Nous avons besoin du doute et du raisonnement scientifique », a dit le Premier ministre à la communauté scientifique. En conséquence, il serait de bonne politique de surseoir à la discussion de cet article, pour laisser les scientifiques débattre sans restriction de tous les sujets.

Mme la présidente.  - Amendement n°642, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

M. Pierre Ouzoulias.  - Les dispositions de la loi Allègre concernent à peine 1 % des chercheurs. Faut-il pour autant modifier le dispositif ?

Dans son rapport de mars 2018, la Cour des comptes estime que l'intéressement ne suffit pas à développer le lien entre recherche et valorisation et suggère d'autres outils non financiers pour lever les freins. C'est pourquoi il faut associer les chercheurs à la réflexion. C'est l'objet du grand débat lancé par le Premier ministre. Rendons la parole aux chercheurs !

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Le bilan concret de la loi Allègre reste, il est vrai, mitigé. Il s'agit de la réformer pour permettre à la recherche de soutenir l'innovation, pierre angulaire de la compétitivité des entreprises. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis. Nous pouvons avancer sans attendre le grand débat national, qui n'abordera pas ces questions.

Limiter la faculté pour nos chercheurs de travailler en entreprise, c'est limiter la capacité d'innovation de ces dernières. Notre avenir économique, industriel, écologique se jouera sur notre capacité à investir dans les technologies de rupture. Si nous cloisonnons la recherche de l'entreprise, nous nous ferons doubler par nos concurrents chinois, américains ou indiens.

M. Pierre Ouzoulias.  - Je ne discute pas sur le fond, mais sur la méthode. J'étais au premier rang vendredi dernier lorsque le Premier ministre a engagé ce grand débat sur la recherche ! Il a posé cette question aux chercheurs : comment convertir les découvertes scientifiques en innovation ? Il serait de mauvaise politique que le Gouvernement referme aussitôt la porte qu'il vient d'ouvrir. Laissons la parole aux scientifiques sans restreindre la portée du débat. Doit-on sinon douter de la sincérité du grand débat national ?

Je vous demande de respecter les chercheurs et de les laisser discuter librement de ces choix fondamentaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et SOCR)

Mme Sylvie Robert.  - Cette annonce du Premier ministre a en effet été un moment important, car le rapprochement de l'entreprise et de la recherche est un enjeu majeur.

Ces articles arrivent en conséquence un peu tôt ; ils risquent de parasiter le débat qui vient d'être ouvert. Laissons les chercheurs discuter librement pour trouver les meilleurs leviers.

L'amendement n°642 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°643, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéa 9

Remplacer les mots :

est tenue informée

par les mots :

ainsi que la commission mentionnée à l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 décembre 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires sont tenues informées

II.  -  Alinéa 15

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le contrat est transmis pour avis à la la commission mentionnée à l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 décembre 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

III.  -  Alinéa 23

Supprimer cet alinéa.

IV.  -  Alinéa 32

Supprimer cet alinéa.

V.  -  Alinéa 36

Après le mot :

fonctionnaire

insérer les mots :

après avis de la commission mentionnée à l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 décembre 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires

VI.  -  Alinéa 42

Supprimer cet alinéa.

VII.  -  Alinéa 44, seconde phrase

Après le mot :

autorité

insérer les mots :

ainsi que la commission mentionnée à l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 décembre 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires

VIII.  -  Alinéa 45

Supprimer cet alinéa.

M. Pierre Ouzoulias.  - La commission spéciale de l'Assemblée nationale a reconnu dans son rapport qu'en favorisant le partage du temps des chercheurs entre privé et public, on augmentait le risque de conflit d'intérêts. Or vous abrogez l'article qui rend obligatoire l'avis de la commission de déontologie.

Dans le cadre de l'Opecst, Pierre Médevielle et moi-même avons rencontré à Parme la direction de l'Agence européenne de sécurité des aliments qui a dû écarter la moitié de ses experts pour cause de conflits d'intérêts. Elle demande aux États membres de préserver une expertise scientifique indépendante, indispensable à la crédibilité scientifique de ses avis. La commission de déontologie y participe.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Les organismes de recherche pourront toujours saisir la commission de déontologie. Sur les 1 571 dossiers qui lui ont été soumis entre 2000 et 2015, 1 426, soit 91 %, ont reçu un avis favorable. Faisons confiance aux organismes de recherche, qui peuvent juger au plus près du terrain du risque de conflit d'intérêts. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

M. Pierre Ouzoulias.  - La pratique m'incite à ne pas confondre l'intérêt des établissements publics et celui de l'État... Si les avis de la commission de déontologie sont généralement favorables, en quoi sont-ils un frein à la mobilité des chercheurs ? J'estime que cette commission est un pare-feu essentiel.

L'amendement n°643 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°86 rectifié, présenté par M. Adnot, Mme Imbert, MM. Savary, Cuypers et Rapin et Mme Lavarde.

Alinéa 27, première phrase

Remplacer, deux fois, le taux :

20 %

par le taux :

32 %

M. Philippe Adnot.  - Rapporteur spécial du budget de l'enseignement supérieur et de la recherche, j'ai publié de nombreux rapports sur la valorisation de la recherche et animé pendant quinze ans la manifestation Tremplin Entreprises qui présente des start-up à des financeurs. Cet amendement milite pour une plus grande participation des chercheurs au capital des start-up, en portant le plafond de 20 % à 32 % afin de continuer à les intéresser.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je comprends l'idée mais la participation d'un agent public au capital social d'une entreprise est dérogatoire au droit commun. Le plafond a été rehaussé de 5 % à 20 %, ce qui me paraît raisonnable. Sagesse.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Sagesse.

L'amendement n°86 rectifié est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°833 rectifié, présenté par MM. Gabouty, Artano et Collin, Mmes N. Delattre et Guillotin et MM. Menonville, Mézard, Requier et Vall.

Alinéa 44, première phrase

Supprimer les mots :

dans la limite de 49 % du capital

M. Jean-Marc Gabouty.  - La limite de détention de 49 % du capital de l'entreprise pour les chercheurs siégeant aux conseils d'administration ou de surveillance peut être aisément contournée avec la détention d'actions complémentaires par des membres de la famille, d'amis ou de personnes de confiance. Nous la supprimons dans un souci de simplification.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Cette limitation a pour but d'empêcher le chercheur d'être actionnaire majoritaire, donc en position de diriger l'entreprise, ce qui pourrait être source de conflits. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable car cet amendement pose un problème de principe. Un chercheur revenu dans la fonction publique tout en étant actionnaire majoritaire d'une entreprise privée ? Cela serait déraisonnable et expose à des conflits d'intérêts. D'autant qu'il peut toujours se mettre en disponibilité...

M. Jean-Marc Gabouty.  - La limite est théorique : à moins d'instaurer une réglementation aussi stricte que pour les parlementaires, rien n'empêche les membres de la famille d'être actionnaires !

L'amendement n°833 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°85 rectifié, présenté par M. Adnot, Mme Imbert, MM. Savary, Cuypers et Rapin et Mme Lavarde.

Après l'alinéa 49

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Le I est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette dernière dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de ladite déclaration, pour lui faire part de son intention ou non de valoriser l'invention déclarée, son silence gardé à l'issue de ce délai valant renonciation. » ;

M. Philippe Adnot.  - Actuellement, tout est question de rapidité, il faut aller très vite. Cet amendement vise à réduire les délais...

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Je souscris à l'objectif, mais les dossiers complexes nécessitent une analyse détaillée afin d'analyser la brevetabilité de l'invention.

En outre, le délai d'un mois serait incompatible avec le droit de préemption des copropriétaires de l'invention.

Attention à ne pas fragiliser une valorisation efficace des titres de propriété intellectuelle plus complexes. Retrait, sinon rejet.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - C'est un vrai sujet mais la réponse n'est pas la bonne. Le Gouvernement s'engage à y travailler. Retrait ?

M. Philippe Adnot.  - Je me suis appuyé sur le rapport sur les aides à l'innovation remis au Gouvernement par Jacques Lewiner. Si le Gouvernement s'engage à y travailler, je le retire.

L'amendement n°85 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°898 rectifié, présenté par MM. Mézard, Artano et A. Bertrand, Mmes M. Carrère et N. Delattre et MM. Gabouty, Gold, Guérini, Labbé, Menonville, Requier, Roux et Vall.

Alinéa 51

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

« V.- En cas de copropriété entre personnes publiques investies d'une mission de recherche sur une ou plusieurs inventions, connaissances techniques, logiciels, bases de données protégeables par le code de la propriété intellectuelle, ou savoir-faire protégés, une convention détermine l'organisation de la copropriété, dont la répartition des droits.

« Un mandataire unique est désigné pour exercer des missions de gestion et d'exploitation des droits co-détenus. La convention de copropriété mentionnée au premier alinéa du présent V lui est notifiée.

« Les règles de gestion de la copropriété, les modalités de désignation du mandataire unique, ses missions et ses pouvoirs sont définis par décret. Ces dispositions réglementaires valent règlement de copropriété au sens de l'article L. 613-32 du code de la propriété intellectuelle. » ;

M. Jacques Mézard.  - Cet amendement étend le champ d'action du mandataire unique à d'autres actifs de propriété intellectuelle que les inventions - logiciel, obtention végétale ou savoir-faire.

La conclusion d'un règlement de copropriété est nécessaire pour procéder au dépôt et à la valorisation des résultats de la recherche. Cette information doit être portée à la connaissance du mandataire unique dans des délais compatibles avec la valorisation des inventions et leur exploitation par des industriels.

Mme la présidente.  - Amendement n°84 rectifié, présenté par M. Adnot, Mme Imbert, MM. Savary, Cuypers et Rapin et Mme Lavarde.

Alinéa 51

Compléter cet alinéa par les mots :

, en s'attachant à la réduction des délais de décision des personnes publiques susvisées

M. Philippe Adnot.  - Le ministre s'étant engagé à travailler sur cette question des délais, je le défends - et le retire.

L'amendement n°84 rectifié est retiré.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Favorable sur le principe à l'amendement n° 898 rectifié mais je n'ai pas eu le temps de l'expertiser ni de rencontrer les organismes de recherche. Je m'en remets donc à l'avis du Gouvernement.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis très favorable !

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Avis favorable donc.

L'amendement n°898 rectifié est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°645, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéas 57 à 59

Supprimer ces alinéas.

M. Pierre Ouzoulias.  - La commission a ajouté aux critères d'évaluation de la recherche publique celui de la contribution au développement de l'innovation, celle-ci étant comprise comme uniquement industrielle et commerciale.

Or en latin, innovatio désigne le changement, le renouvellement, y compris politique et philosophique.

Les collègues qui viennent exposer leurs recherches devant nos commissions participent à cette innovation qui change notre façon d'appréhender le monde. Il faut reconnaître cet apport fondamental, philosophique, politique et culturel, dans leur carrière.

Cum grano salis, je ne suis pas opposé à ce qu'on encourage les relations entre chercheurs et entreprises, mais pourquoi cette paroi étanche entre mandat parlementaire et carrière scientifique ? J'ai moi-même dû me placer en disponibilité du CNRS, et ma carrière en subit le préjudice ! Pourquoi cet hémicycle serait-il frappé d'indignité ? (Sourires)

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Certes, le critère d'innovation est moins opportun pour les chercheurs en sciences humaines et sociales. Toutefois, le code de la recherche précise déjà que les critères d'évaluation sont adaptés en fonction des disciplines. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

M. Pierre Ouzoulias.  - Les codes internationaux d'évaluation sont ceux de la bibliométrie, loin de l'intérêt général. Il faut remettre à plat le système d'évaluation, avec les chercheurs, dans le cadre du débat lancé par le Premier ministre. Mieux vaudrait reporter l'examen de ces articles !

L'amendement n°645 n'est pas adopté.

L'article 41, modifié, est adopté.

ARTICLE 41 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°646, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

M. Pierre Ouzoulias.  - Je regrette que le Gouvernement refuse le dialogue. Il serait plus correct vis-à-vis des chercheurs de leur dire qu'ils ne pourront discuter de certains points, déjà tranchés !

Cet article traite des statuts. Or les chercheurs s'inquiètent surtout de la baisse drastique des recrutements au CNRS sur des emplois fixes. Le Premier ministre - je le cite à nouveau car son discours de vendredi m'a emporté ! - a dit que la science devait se détourner de l'événementiel et s'inscrire dans le temps long : j'y ai vu une ouverture vers des carrières longues de chercheur... De tout cela, nous devons discuter dans le cadre du grand débat, en laissant la parole aux chercheurs ! (Marques d'approbation sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Avis défavorable : les contrats visés à cet article permettent un recrutement pour une durée plus longue, une garantie en matière de formation et lors de la rupture du contrat de chantier. Ils sont plus protecteurs pour le salarié.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ces contrats sécurisent en effet les chercheurs. La ferveur avec laquelle vous soutenez le Premier ministre, monsieur Ouzoulias, illumine mon mardi ! (Sourires)

Chercheur moi-même à mes débuts, attaché à la durée puisque je travaillais sur Marcel Proust, je reconnais bien volontiers la nécessité d'offrir du temps long, mais comme ministre de l'Économie, je pense aussi que les Français sont impatients d'avoir des résultats dans le temps court. Nous concilions les deux : d'un côté, le débat ouvert par le Premier ministre, notamment sur le CNRS, de l'autre, des mesures pour faire tomber les murs entre la recherche et l'entreprise.

M. Pierre Ouzoulias.  - Monsieur le ministre, vous me tendez une perche : c'est la recherche du temps perdu ! (Sourires) L'archéologue que je suis connaît bien le télescopage entre temps long et temps court.

Les chercheurs veulent un dialogue sincère, ils veulent savoir sur quoi le débat annoncé va porter. Je regrette qu'on aborde ici à la sauvette des sujets tels que le statut et le cadre d'emploi.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Ce qui fait le succès sur le temps long, c'est l'adéquation de la recherche et d'une stratégie industrielle. Tous nos Prix Nobel le disent : ils ont dû leur réussite à leur inscription dans une unité de recherche garantissant leur travail dans la durée, sans finalité obligée. Bref, à leur statut. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

L'amendement n°646 n'est pas adopté.

L'article 41 bis est adopté.

ARTICLE 42

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur de la commission spéciale .  - Ces articles modernisent le système de protection des titres de propriété afin d'adapter le niveau de protection et de faciliter la défense par les PME de leurs titres.

Nous avons été nombreux à être interpellés par les opposants à la réforme. On nous assure que le brevet français n'est pas si faible : c'est faux. Depuis 2000, le taux d'annulation des brevets français est de 41 % contre 23 % pour les brevets européens.

L'examen au fond découragerait les entreprises françaises de se tourner vers le brevet national, car il serait long et coûteux ? Tout cela est faux : les délais sont maîtrisés par toutes les entreprises qui jouent le jeu, et le coût n'est que de 636 euros pour une grande entreprise et de 318 euros pour une PME, contre 5 000 euros devant l'OEB.

En réalité, le système actuel est défendu par les entreprises, souvent grosses, qui tentent de bloquer la concurrence en déposant de nombreux brevets de peu d'intérêt... Loin d'inciter à innover, un brevet faible et peu cher pénalise les PME et les start-up.

Mme la présidente.  - Amendement n°447 rectifié bis, présenté par M. Segouin, Mme de Cidrac, MM. Panunzi, Brisson, Pointereau, de Nicolaÿ, Bonhomme, Regnard, Vaspart et Laménie, Mme Ramond, M. Pellevat, Mme Deromedi, MM. D. Laurent, Lefèvre, Daubresse, Rapin et Poniatowski, Mme Bories et MM. B. Fournier, Duplomb et J.M. Boyer.

Supprimer cet article.

M. Vincent Segouin.  - L'article 42 crée un droit d'opposition aux brevets d'invention délivrés par l'INPI, ouverts aux tiers, et dont les modalités seront précisées par ordonnance.

Il fragiliserait le système de brevet français : risque d'opposition systématique et sans filtre, coûts administratifs importants, frein potentiel à la recherche et à la valorisation des innovations françaises.

Notre système est simple et financièrement attractif. Il fait déjà l'objet d'un examen approfondi et d'une éventuelle procédure d'opposition. Ce dispositif pourrait conduire certaines entreprises à abuser de ce système d'opposition. Par ailleurs, un droit d'opposition judiciaire existe déjà en France.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Vous craignez, d'un côté, que cette procédure d'opposition soit utilisée de manière systématique et, de l'autre, que son coût décourage les entreprises de protéger leurs innovations... Je constate, moi, qu'il n'existe aujourd'hui qu'une procédure devant le juge et qu'elle avantage les grands groupes. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Effectivement, qu'il faille passer par la justice pour faire annuler un brevet constitue un frein à l'innovation. Avec une indication plus rapide, l'on pourra nettoyer l'économie française des brevets qui sont infondés. Ce système est d'ailleurs appliqué dans la plupart des pays européens.

M. Jean Louis Masson.  - L'expérience le montre, quand nous donnons au Gouvernement délégation pour décider par ordonnance, l'administration est à l'oeuvre. Elle propose des solutions extravagantes qui ne seraient jamais passées dans l'hémicycle. Par principe, je suis contre.

M. Richard Yung.  - Il est très lourd de contester la validité d'un brevet délivré par l'INPI dans le système français. Il faut aller devant la justice, prendre un avocat... La proposition est positive, même si elle comporte un risque d'abus. Des entreprises américaines ne se gênent pas pour déposer des oppositions partout où elles le peuvent, on les appelle des patents trolls. Il y aura également une augmentation des coûts puisqu'il faudra former des chambres d'opposition composées de quatre à cinq ingénieurs.

L'amendement n°447 rectifié bis n'est pas adopté.

L'article 42 est adopté.

ARTICLE 42 BIS A

Mme la présidente.  - Amendement n°824, présenté par M. Yung et les membres du groupe La République En Marche.

Supprimer cet article.

M. Richard Yung.  - Cet article crée une procédure d'opposition sur les dessins et modèles. Il s'agit, par exemple, de dessins de mode, de tissus ; plus généralement, de produits d'une durée de vie d'un ou deux ans. Or il faut du temps pour rechercher la nouveauté. J'ajoute que la Commission européenne a engagé des travaux sur ce sujet ; attendons ses conclusions.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Vous vous inquiétez de la capacité de l'INPI à gérer ses nouvelles missions. Nous lui laissons suffisamment de temps puisque nous avons ménagé un délai de deux ans.

Anticiper les évolutions législatives européennes est opportun. Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Une fois n'est pas coutume, je ne suivrai pas Mme le rapporteur. Mieux vaut attendre l'aboutissement de la réflexion de la Commission européenne. Avis favorable.

L'amendement n°824 n'est pas adopté.

L'article 42 bis A est adopté.

ARTICLE 42 BIS

M. Philippe Adnot .  - Aujourd'hui, contrairement à ses homologues étrangers, l'INPI ne peut pas déclarer irrecevable une innovation au motif de l'absence d'activité inventive.

Cette exception française date des années 1960, une époque où l'innovation n'était pas aussi centrale qu'aujourd'hui. Elle pénalise nos entreprises qui, pour innover, et cela coûte cher, ont besoin d'un cadre juridique protecteur.

Soyons sérieux ! Si le système des brevets français était performant, nous aurions plus d'innovations. Le renforcement de la qualité de nos brevets facilitera l'accès de nos entreprises au brevet européen. Le refuser, c'est ouvrir grand la porte à un déferlement de brevet chinois et cela sera aux dépens de nos entreprises.

Mme la présidente.  - Amendement n°38 rectifié bis, présenté par Mme Estrosi Sassone, M. Longuet, Mmes Deroche et Primas, M. Pellevat, Mme Deromedi, M. de Legge, Mme Di Folco, M. Daubresse, Mme L. Darcos, M. Morisset, Mme Duranton, M. Lefèvre, Mmes Micouleau, Lavarde et Gruny, MM. Pillet, Cuypers, Danesi et Calvet, Mme Lherbier, MM. Panunzi, Sol, Revet, Vial, Mouiller, Milon, Savary, Priou, Piednoir, Kennel et Poniatowski, Mmes M. Mercier et Imbert, MM. Paccaud et Regnard, Mmes Canayer et Chauvin, MM. Rapin, Dallier et B. Fournier, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Mandelli, Perrin, Raison et Leleux, Mme Lopez, MM. Chatillon, Hugonet, D. Laurent et Vaspart, Mme Ramond, MM. Dufaut, Savin, Bouloux et Gilles, Mmes Chain-Larché, Thomas, Raimond-Pavero et Dumas, MM. Ginesta, Laménie, Grand, Darnaud, Genest et Pierre, Mme de Cidrac, M. Gremillet et Mme Renaud-Garabedian.

Supprimer cet article.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, freinera l'innovation, en particulier dans le domaine numérique. Le contrôle a priori du critère de l'activité inventive constituera une lourdeur administrative pour les entreprises, du temps et des coûts supplémentaires. Sans compter qu'il suppose un renforcement substantiel des moyens de l'INPI, ce à quoi notre déficit public record ne se prête pas - -  la Cour des comptes l'avait fait remarquer dans son référé du 20 octobre 2014.

L'adoption de cette mesure au détour d'un amendement, sans étude d'impact, est critiquable. Le comité innovation et recherche, qui représente officiellement les ingénieurs et scientifiques de France, se plaint de ne pas avoir été consulté.

Enfin, l'Espagne a fait un choix identique à ce que propose cet article 42 bis en 2017. Le résultat, c'est une chute de 30 % du nombre de dépôts de brevets en 2018.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°111, présenté par M. Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Marc Daunis.  - Oui, monsieur Adnot, nous sommes sérieux ! Que Mme Estrosi-Sassonne et moi-même déposions un amendement identique en témoigne, cela est suffisamment rare pour être souligné. C'est qu'en tant qu'élu des Alpes Maritimes et ancien vice-président de la communauté d'agglomération Sophia Antipolis, premier technopôle d'Europe, j'ai été confronté directement à la question des brevets. Le dispositif actuel mérite d'être amélioré pour que recherche, industrie et commercialisation soient mieux articulées. La France s'y emploie d'ailleurs, en créant des incubateurs, pour accélérer le passage de l'innovation à sa traduction industrielle. Le dispositif est donc à consolider mais pas de cette façon ! Cet article est contraire à l'objectif de la loi, simplifier la vie des entreprises. Mme Estrosi-Sassone a cité, à juste titre, l'exemple de l'Espagne. Supprimons l'article et engageons un travail de fond pour des brevets déposés plus nombreux en France et plus sécurisés.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°150 rectifié ter, présenté par MM. Delahaye et Henno, Mmes de la Provôté, Vullien et Vermeillet, M. Longeot, Mmes Loisier et Férat, MM. Moga, Mizzon, Cadic, Médevielle, Détraigne et L. Hervé et Mme Gatel.

M. Vincent Delahaye.  - Cet article a peut-être été ajouté par l'Assemblée nationale un peu rapidement. L'absence d'étude d'impact nous rend soupçonneux sur l'efficacité du dispositif. Le système actuel n'est peut-être pas parfait mais un travail de fond s'impose avant de prendre une position définitive sur ce sujet de fond. Beaucoup d'entreprises, grandes et petites, sont venues nous voir pour nous alerter. Prudence ! (Mme Michèle Vullien applaudit.)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°448 rectifié ter, présenté par MM. Segouin, Brisson, Pointereau, de Nicolaÿ et Bonhomme, Mme Bories et MM. Duplomb et J.M. Boyer.

M. Vincent Segouin.  - Au risque de répéter ce qui a été dit, le critère d'activité inventive est très difficile à apprécier, puisqu'il s'agit de déterminer si l'invention que l'examinateur a sous les yeux est évidente. L'INPI sera dans l'obligation de créer des services d'examen de plusieurs centaines d'examinateurs.

Cette procédure va complètement à l'encontre de l'objectif poursuivi : améliorer l'attractivité du système français.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°841 rectifié, présenté par MM. Menonville, Artano et A. Bertrand, Mme N. Delattre et MM. Gabouty, Requier et Vall.

M. Jean-Marc Gabouty.  - L'examen a priori de l'activité inventive représente des coûts et des délais supplémentaires pour les entreprises, elle freinera leur accès aux brevets.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Le renforcement de la qualité du brevet sera un atout majeur pour les PME. Le système choisi par la France, il y a plus de 50 ans, constitue une exception mondiale.

Nos grands concurrents européens disposent d'un brevet national fort et de la possibilité d'opter pour le brevet européen, sans que le premier n'ait été délaissé pour le second.

J'avais donné un avis défavorable à ces amendements de suppression en commission, laquelle ne m'a pas suivi.

Mme la présidente.  - Donc avis favorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable. Beaucoup de grandes entreprises vous ont expliqué que cette mesure leur causerait du tort. C'est sûr ! Mais c'est au détriment des PME. Il n'y a pas d'étude d'impact ? Mais elle est faite depuis 30 ans : pas moins de 43 % des brevets français sont annulés par la justice, contre 23 % des brevets européens. Le temps a tranché : le dispositif français n'est pas efficace.

La plupart de nos concurrents certifient l'inventivité de leurs entreprises au préalable. Pourquoi ? Parce que cela donne de la crédibilité à l'innovation.

Les sénateurs Les Républicains qui s'opposent à cet article devraient se souvenir que le député Daniel Fasquelle en a fait son combat.

M. Vincent Delahaye.  - Je regrette que Mme le rapporteur n'ait pas prononcé l'avis favorable de la commission avec conviction. Nous avons trente ans de recul, dit le ministre. Si le Gouvernement est si convaincu de l'importance de cette mesure, pourquoi ne figurait-elle pas dans le texte initial ?

Les PME et les start-up ne sont pas toutes opposées au système actuel. La prudence s'impose.

M. Philippe Adnot.  - Nous avons tous été saisis de demandes contradictoires : certains par Amadeus, moi par les chercheurs et les scientifiques qui ont écrit le rapport sur l'innovation. Le danger, c'est que les grands groupes multiplient les dépôts de brevet aux dépens des PME et des start-up.

Face à l'accroissement du nombre des dépôts chinois, nous devons nous protéger. Nous déposons 16 000 brevets en France ; les Chinois sont capables d'en déposer 50 000.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Très juste !

M. Philippe Adnot.  - Ne supprimons pas cet article. (Mme Élisabeth Doineau et M. Pierre Louault applaudissent.)

M. Richard Yung.  - Cela ne fait pas trente ans, mais cinquante puisque la loi qui a mis en place le système de brevet français date de 1968. Nous déposons chaque année 17 000 brevets en France. Quelle conséquence aura l'examen de l'activité inventive ? Sa définition n'est pas limpide : est inventif ce qui n'est pas évident pour l'homme de l'art.

L'INPI devra disposer d'un corps substantiel d'examinateurs formés pour examiner environ 8 000 demandes de brevets par an selon ce critère.

Enfin, je rappelle que le choix français a été celui de l'intégration dans le système européen.

M. Marc Daunis.  - Il n'y a pas, d'un côté, les défenseurs des grands groupes et, de l'autre, ceux des petites entreprises.

Monsieur Adnot, nous avons été sollicités par des chefs d'entreprise de toute taille, puis nous avons fait notre travail de parlementaire qui consiste à se documenter, à examiner toutes les demandes au regard de notre expérience de terrain. J'ai créé un incubateur, je connais un peu le sujet.

Monsieur le ministre, je me souviens avoir entendu dans votre bouche que la tenue d'un compte bancaire séparé pour les autoentrepreneurs leur coûtait un argent de dingue alors qu'il y a des offres bancaires gratuites ! Je me méfie donc de vos affirmations péremptoires...

Dire que le dispositif actuel n'est pas satisfaisant est une évidence. Pour autant, étudions de beaucoup plus près la procédure avant de la rendre plus complexe, plus longue et plus coûteuse pour nos entreprises.

M. Alain Richard.  - Nous voici devant un débat de méthode législative, il n'y a pas radicalement de bonne ou de mauvaise solution. (M. Gérard Longuet approuve.) J'entends l'objection de M. Delahaye : il faut du temps avant de créer une nouvelle sécurité pour les brevets car c'est de cela qu'il s'agit, de la sécurité des brevets. Cependant, d'expérience, nous savons que manquer l'occasion d'un véhicule législatif représente une erreur ; elle se fait rare à mesure que la législature avance. Ne serait-il pas préférable de retravailler cet article avec l'Assemblée nationale plutôt que de l'écarter ?

M. Jean Louis Masson.  - Si le sujet est si important, pourquoi le Gouvernement ne l'a-t-il pas inscrit dans le texte initial ?

Pour le reste, j'ai pris note des observations du ministre. Un député Les Républicains a défendu cette proposition à l'Assemblée nationale. Dans une chambre ou dans l'autre, les parlementaires Les Républicains font donc triompher leur point de vue. Trouvons une solution synthèse comme le préconise Alain Richard. Je m'aligne sur la position de Philippe Adnot.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ce qui m'importe, ce n'est pas le fait que la proposition émane des parlementaires Les Républicains, socialistes ou communistes, c'est que l'intérêt général l'emporte. (Marques d'ironie à droite et sur les bancs des groupes CRCE et SOCR)

J'ai montré dans les deux assemblées que j'étais ouvert à toutes les propositions d'amélioration. (On en doute sur les bancs des groupes SOCR.) Drôle de critique que celle consistant à me reprocher de reprendre une proposition parlementaire...

Monsieur Daunis, je maintiens que si un autoentrepreneur ouvre un compte, la banque le lui fait payer à un moment ou à un autre. Je vous prie de revenir au débat de fond et d'éviter les remises en cause personnelles.

Enfin, les faits sont têtus. La France a le taux d'annulation de brevet le plus élevé d'Europe. Cela prouve que la bataille reste à mener en matière de technologie : 43 % de nos brevets sont annulés par la justice, contre 23 % dans les autres pays européens. Toutes les autres nations ont fait le choix d'un brevet en amont pour garantir l'inventivité de leurs entreprises. Pourquoi ne pas nous inspirer de nos voisins pour renforcer l'innovation française ?

Enfin, je salue la proposition d'Alain Richard. Trouvons un compromis sur le critère d'inventivité. Cela suppose le retrait de ces amendements.

Les amendements identiques nos38 rectifié bis, 111, 150 rectifié ter, 448 rectifié ter et 841 rectifié sont adoptés et l'article 42 bis est supprimé.

(Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Les amendements nos984, 39 rectifié, 868, 172 rectifié ter et le sous-amendement n°985 n'ont plus d'objet.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°467 rectifié, présenté par MM. Le Gleut et Bascher, Mmes A.M. Bertrand et de Cidrac, M. Darnaud, Mmes Deromedi et Dumas, M. Frassa, Mme Garriaud-Maylam et MM. Grosdidier, Lefèvre, Mandelli, Mouiller, Piednoir et Rapin.

Après l'article 42 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° de l'article L. 422-7 du code de la propriété intellectuelle est rétabli dans la rédaction suivante :

« 2° Les personnes mentionnées au premier alinéa détiennent plus de la moitié du capital social et des droits de vote ; ».

M. Ronan Le Gleut.  - Les conseils en propriété industrielle exercent des missions conjointement avec les avocats et, parfois, au sein de sociétés pluri-professionnelles d'exercice depuis l'ordonnance du 31 mars 2016. Or ils ne présentent pas les mêmes garanties d'indépendance. D'où cet amendement.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement qui supprime un risque.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°467 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°470 rectifié, présenté par MM. Le Gleut et Bascher, Mmes A.M. Bertrand et de Cidrac, M. Darnaud, Mmes Deromedi et Dumas, M. Frassa, Mme Garriaud-Maylam et MM. Grosdidier, Lefèvre, Mandelli, Mouiller, Piednoir et Rapin.

Après l'article 42 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 422-11 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase, après le mot : « avocat, », sont insérés les mots : « à l'exception pour ces deux dernières de celles portant la mention "officielle", » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le présent article s'applique à une correspondance professionnelle échangée entre un conseil en propriété industrielle et un avocat, ce dernier est tenu vis-à-vis de cette correspondance aux mêmes obligations que celles que l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques lui impose en matière de secret des correspondances professionnelles. »

M. Ronan Le Gleut.  - Dans le même esprit, il s'agit de garantir la confidentialité de la correspondance pour les conseils en propriété industrielle.

L'amendement n°470 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°896 rectifié, présenté par MM. Mézard, Artano et A. Bertrand, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier, Roux et Vall.

Après l'article 42 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° L'article L. 521-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3.  -  L'action civile en contrefaçon se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l'exercer. » ;

2° Après l'article L. 521-3-1, il est inséré un article L. 521-3-... ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3-...  -  L'action en nullité d'un dessin ou modèle n'est soumise à aucun délai de prescription. » ;

3° L'article L. 615-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 615-8.  -  Les actions en contrefaçon prévues par la présente section sont prescrites par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l'exercer. » ;

4° Après l'article L. 615-8, il est inséré un article L. 615-8-... ainsi rédigé :

« Art. L. 615-8-...  -  L'action en nullité d'un brevet n'est soumise à aucun délai de prescription. » ;

5° Au premier alinéa de l'article L. 622-7, après la référence : « L. 615-8 » est insérée la référence : « L. 615-8-1, » ;

6° L'article L. 623-29 est ainsi rédigé :

« Art. L. 623-29.  -  Les actions civiles prévues par le présent chapitre, à l'exception de celle prévue par l'article L. 623-23-1, se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l'exercer. » ;

7° Après l'article L. 623-29, il est inséré un article L. 623-29-... ainsi rédigé :

« Art. L. 623-29-...  -  L'action en nullité d'un certificat d'obtention végétale n'est soumise à aucun délai de prescription. » ;

8° Après l'article L. 714-3, il est inséré un article L. 714-3-... ainsi rédigé :

« Art. L. 714-3-...  -  Sans préjudice du troisième alinéa de l'article L. 714-3 et de l'article L. 714-4, l'action en nullité d'une marque n'est soumise à aucun délai de prescription. » ;

9° Le troisième alinéa de l'article L. 716-5 est complété par les mots : « à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaitre le dernier fait lui permettant de l'exercer ».

II.  -  À l'article L. 152-2 du code de commerce, les mots : « des faits qui en sont la cause » sont remplacés par les mots : « du jour où le détenteur légitime du secret des affaires a connu ou aurait dû connaître le dernier fait qui en est la cause. »

III.  -  Les 2°, 4°, 5°, 7°et 8° du I du présent article s'appliquent aux titres en vigueur au jour de l'entrée en vigueur de la présente loi. Ils sont sans effet sur les décisions ayant force de chose jugée.

IV.  -  Les articles 12 et 13 et le II de l'article 23 de l'ordonnance n° 2018-341 du 9 mai 2018 relative au brevet européen à effet unitaire et à la juridiction unifiée du brevet sont abrogés.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Il s'agit, d'abord, de clarifier les règles de prescription des actions en contrefaçon et d'atteinte au secret des affaires. Le point de départ du délai de prescription des actions en contrefaçon serait le jour où le requérant a eu connaissance ou avait raisonnablement lieu d'avoir connaissance du dernier fait justifiant l'action, conformément à l'esprit du code civil et des textes européens. Cette disposition, qui allongera le délai pour agir, renforcera la lutte contre la contrefaçon et améliorera l'indemnisation des préjudices. La même modification est apportée dans le code de commerce en ce qui concerne la prescription de l'action relative à une atteinte au secret des affaires dans un souci de cohérence.

Ensuite, il s'agit de rendre imprescriptible l'action en nullité des titres de propriété industrielle. Cela permettra d'assainir la concurrence en éliminant les titres nuls et de faire disparaître à tout moment un titre qui occupe sans droit le domaine public.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Nous avons déjà accepté le principe de l'imprescriptibilité de l'action en nullité d'un brevet à l'article 109 de la loi Justice du XXIe siècle. Avis favorable même si je regrette qu'une réforme aussi fondamentale passe par un amendement.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°896 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 43

Mme la présidente.  - Amendement n°383 rectifié, présenté par Mme L. Darcos, MM. Milon, Karoutchi et Rapin, Mme Dumas, M. Bonnecarrère, Mme Garriaud-Maylam, MM. Henno, Magras, Savin, Lefèvre et Médevielle, Mme Deromedi, MM. Chatillon, Longeot, Lafon, Grosdidier, D. Laurent et Danesi, Mme A.M. Bertrand, MM. Le Gleut et Regnard, Mme Duranton, M. Bonhomme et Mme M. Mercier.

I. - Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Par exception au premier alinéa, sur des itinéraires routiers fixés par décret et préalablement aménagés à cet effet, la circulation à des fins expérimentales d'un véhicule à délégation partielle ou totale de conduite est subordonnée à la délivrance d'une autorisation simplifiée et à la souscription par le demandeur de l'expérimentation d'une assurance couvrant les conséquences financières des risques entraînés par cette expérimentation. » ;

II. - Après l'alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article 2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les expérimentations situées sur les itinéraires routiers mentionnés au troisième alinéa de l'article 1er, cette autorisation est accordée par le ministre chargé des transports dans un délai de trois mois après dépôt du dossier. Au terme de ce délai, l'absence de réponse vaut délivrance de l'autorisation. » ;

III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...° Après l'article L. 173-3 code de la voirie routière, il est inséré un article L. 173-3-... ainsi rédigé :

« Art. L. 173-3-...  -  Sur les autoroutes et les voies express définies aux articles L. 121-1 et L. 151-1, l'autorité chargée de la police de la circulation peut réserver une partie de la chaussée non utilisée par les voies de circulation pour constituer une voie auxiliaire.

« Une voie auxiliaire peut être autorisée à la circulation routière certains jours ou à certaines heures aux fins de réduire la congestion de l'autoroute ou de la voie express.

« L'autorité chargée de la police de la circulation peut restreindre la circulation routière sur une voie auxiliaire aux bus, aux taxis, aux véhicules assurant un service de covoiturage tel que défini à l'article L 3132-1 du code des transports ou aux véhicules à délégation de conduite sur les voies publiques définis par l'ordonnance n° 2016-1057 du 3 août 2016 relative à l'expérimentation de véhicules à délégation de conduite. »

Mme Laure Darcos.  - On connaît l'expérimentation de la circulation des transports en commun sur la bande d'arrêt d'urgence sur l'autoroute A4 à Joinville-le-Pont. Mon but est de favoriser les nouveaux usages de la route mais mon amendement n'est peut-être pas bien rédigé. Faut-il que je le retire ?

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Le nombre de voitures autonomes, encore modeste, ne justifie pas une voie réservée. En outre, cet amendement aurait plus sa place dans la loi Mobilités. Retrait.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°383 rectifié est retiré.

L'article 43 est adopté.

ARTICLE 43 BIS (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°864 rectifié bis, présenté par MM. Jomier et Cabanel, Mme Conway-Mouret, MM. Manable, Féraud et Mazuir, Mme Perol-Dumont, MM. P. Joly et Tourenne, Mmes Tocqueville et Harribey et MM. Daudigny et Devinaz.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À la fin de la première phrase de l'article L. 315-2 du code de l'énergie, les mots : « sont situés en aval d'un même poste public de transformation d'électricité de moyenne en basse tension » sont remplacés par les mots : « respectent un critère de proximité géographique défini par arrêté du ministre chargé de l'énergie, après avis de la Commission de régulation de l'énergie ».

M. Bernard Jomier.  - Lors de la première lecture de la loi ELAN, nous avions adopté un amendement sur l'autoconsommation solaire collective, supprimé en CMP. Notre amendement simplifie le périmètre de l'autoconsommation en adoptant un critère géographique. Pour l'instant, six projets seulement ont vu le jour, loin de l'objectif que nous nous sommes fixé. De nombreux acteurs appellent à une simplification du cadre juridique. De nombreux maires, par exemple, ne comprennent pas qu'un bâtiment municipal ne puisse pas alimenter un autre bâtiment à cause du critère de partage du poste de transformation électrique.

Mme la présidente.  - Amendement n°262, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I.  -  À titre expérimental, pour une durée de cinq ans à compter de la publication de la présente loi, le chapitre V du titre Ier du livre III du code de l'énergie est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase de l'article L. 315-2, les mots : « en aval d'un même poste public de transformation d'électricité de moyenne en basse tension » sont remplacés par les mots : « sur le réseau basse tension et respectent les critères, notamment de proximité géographique, fixés par arrêté du ministre chargé de l'énergie, après avis de la Commission de régulation de l'énergie » ;

2° À la fin de l'article L. 315-3, les mots : « , lorsque la puissance installée de l'installation de production qui les alimente est inférieure à 100 kilowatts » sont supprimés.

II.  -  Avant le 31 décembre 2023, le ministère chargé de l'énergie et la Commission de régulation de l'énergie dressent un bilan de l'expérimentation.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Cet amendement reprend les propositions de l'amendement précédent en ajoutant des critères d'évaluation de l'autoconsommation. M. Jomier retirerait-il son amendement au profit du nôtre ?

M. Jean-François Husson, rapporteur de la commission spéciale.  - Cet amendement rétablit l'article 43 bis que la commission a supprimé mais celle-ci n'a pas changé d'avis. Le cadre législatif et tarifaire de l'autoconsommation collective est fixé depuis moins d'un an. Pourquoi y revenir avec si peu de recul ? Les échanges entre bâtiments sont déjà possibles à une échelle raisonnable.

Évitons de tendre à l'individualisme énergétique, pour ne pas dire au communautarisme énergétique. Avis défavorable aux deux amendements.

M. Bernard Jomier.  - Six projets : voilà le résultat d'un cadre trop restrictif. Le critère actuel de partage du poste de transformation électrique n'est pas pertinent. Il faudrait le remplacer par un critère de proximité géographique.

Monsieur le ministre, vous réservez l'autoconsommation au réseau basse tension. Or une mairie avec une cantine scolaire est sur un réseau de moyenne tension. Pourquoi ne pourrait-elle pas faire bénéficier un autre bâtiment de ce réseau ?

M. Roland Courteau.  - Quelles conséquences aurait l'amendement du Gouvernement pour les consommateurs et le réseau ? La personne morale n'est pas soumise aux obligations d'informations précontractuelles, ni à celle de vendre l'électricité à un prix identique à tous... Le consommateur a-t-il le droit de résilier son contrat sans frais à tout moment ? Pourra-t-il utiliser le chèque énergie ? Il y a trop peu de retours - seules dix opérations existent, en janvier 2019, pour 47 consommateurs. Monsieur le ministre, n'est-il pas préférable de lancer des extensions ciblées de périmètre ? Je suis favorable à l'autoconsommation, mais toutes ces interventions me troublent. Attendons d'avoir suffisamment de retours d'expérience avant de décider des obligations applicables aux opérations d'autoconsommation collective. N'allons pas trop vite !

Mme Sophie Primas.  - Très bien !

Mme Christine Lavarde.  - Je suis pour une fois totalement en accord avec M. Courteau, qui pose les bonnes questions, à savoir : quelles sont les conséquences de l'autoconsommation sur les consommateurs et sur le réseau ? La personne morale qui organise l'autoconsommation n'a pas, aujourd'hui, à équilibrer l'offre et la demande, cet équilibre étant reporté sur d'autres acteurs du système électrique. Le cadre est très récent : attendons.

L'amendement n°864 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°262.

L'article 43 bis reste supprimé.

L'article 43 ter demeure supprimé, de même que l'article 43 quater.

La séance est suspendue à 16 h 35.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 h 45.

Hommage aux victimes de l'incendie de la rue Erlanger

M. le président.  - Je viens d'adresser à Mme la maire de Paris et à M. le maire du XVIe arrondissement les pensées du Sénat après le drame de la rue Erlanger, pensées que nous partageons tous et auxquelles j'associe particulièrement nos collègues parisiens.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

J'appelle au respect du temps de parole et au respect de chacun, tout au long de cette séquence.

Traité sur les forces nucléaires de portée intermédiaire

M. Joël Guerriau .  - Les États-Unis ont décidé vendredi dernier de suspendre leur participation au traité sur les forces nucléaires de portée intermédiaire (FNI) au motif que les Russes seraient sur le point d'en faire autant. Or le traité s'origine dans la crise des euromissiles, créée sur notre continent, crise qui n'a été finie qu'en 1987.

Vladimir Poutine vient d'indiquer, via un vice-ministre, que le traité de réduction des arsenaux nucléaires (START) qui arrive à expiration en 2021 pourrait également ne pas être reconduit.

L'Histoire bégaie : comment éviter de reproduire les erreurs du passé ? La défense européenne s'éparpille en projets et reste incapable de s'organiser face aux menaces.

Alors que notre allié américain est imprévisible et que la Russie multiplie les coups de force, quelles initiatives comptent prendre la France et ses alliés européens, pour éviter une nouvelle course aux armements nucléaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes .  - Vous l'avez dit, l'Europe a été le théâtre de la guerre froide avec la crise des missiles qui a donné lieu au traité dit « FNI », aujourd'hui menacé par le retrait des Russes et des Américains. Le risque de retour de la course aux armements est réel, de même que celui de la fin du multilatéralisme. Oui, il faut rappeler la Russie à ses engagements et il faut construire une véritable autonomie stratégique européenne. L'Europe de la défense a plus progressé ces deux dernières années qu'en six décennies : le fonds pour la défense est créé, la coopération structurée permanente est lancée et rassemble 25 États, nous avons aussi besoin d'une initiative européenne d'intervention pour créer une culture stratégique commune entre les États les plus capables et les plus volontaires. Mais prenons garde de croire que les traités de maîtrise des armements sont dépassés : nous appelons la Russie à prolonger le traité New Start.

Force doit rester à la loi si l'on veut éviter le triomphe de la loi du plus fort. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes Les Indépendants et RDSE)

Référendum (I)

M. Roger Karoutchi .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; Mme Sylvie Goy-Chavent et quelques-uns de ses collègues du groupe UC applaudissent également.) Monsieur le Premier ministre, un référendum le jour des élections européennes... lesquelles n'avaient rien demandé ! (Murmures et sourires sur divers bancs) Pour sortir du grand débat et répondre à des manifestants qui disent « trop de règlements, trop d'impôts, trop de taxes, trop de dépenses publiques, pas assez de pouvoir d'achat », on va proposer un référendum sur le Parlement, qui posera la question : trop de parlementaires, trop de mandats ?

Monsieur le Premier ministre, vous êtes un homme de raison : est-ce une fake news ? (Sourires) La démentez-vous ? Pouvez-vous dire aux Français vers quoi nous allons pour sortir du grand débat ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs des groupes UC, RDSE, SOCR et CRCE)

(Tandis que Mme Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ministre de la Justice, se lève pour répondre, de vives protestations fusent des bancs du groupe Les Républicains, d'où l'on manifeste que la question s'adressait au Premier ministre.)

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Aux abris !

M. François Patriat.  - C'est très élégant !

M. le président.  - Madame la garde des Sceaux a la parole !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - C'est effectivement une idée évoquée dans la presse depuis quelques jours. La Constitution prévoit à l'article 11 que le président de la République puisse soumettre à référendum des projets de loi.

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Pas dans n'importe quelles conditions !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet article a été utilisé huit fois depuis 1958.

Le grand débat national voulu par le président de la République a permis à nos concitoyens de se saisir de questions importantes pour l'avenir du pays, sur la fiscalité, l'organisation de l'État, la démocratie, la citoyenneté. J'y ai moi-même participé dans le Tarn. Au moment où nous parlons, plus de 4 000 réunions ont eu lieu et plus de 700 000 contributions ont été enregistrées sur le site. (On ironise bruyamment sur les bancs du groupe Les Républicains.) Ce sont des chiffres réels, incontestables ! (Vigoureuses dénégations sur les mêmes bancs) Il faut laisser les débats se dérouler... (Interruptions)

Dans le Tarn, j'ai vu des gens débattre dans le calme et la fermeté. (Murmures croissants) Vous le savez, le président de la République et le Gouvernement sont à l'écoute des Français. (Rires et exclamations à droite ; MMRachid Temal et David Assouline ironisent.) Il faudra, le moment venu, tirer les conclusions de ce grand débat : il appartiendra au chef de l'État et au chef du Gouvernement de le faire.

Monsieur Karoutchi, je connais trop votre engagement gaulliste et votre attachement aux institutions de la Ve République pour croire que vous le critiquiez... (Rires à droite)

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - À l'heure actuelle, cette question n'est pas à l'ordre du jour. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Roger Karoutchi.  - Je n'avais aucune appréhension face à un référendum. Le président de la République en aurait davantage, mais là n'est pas le sujet...

M. Roger Karoutchi.  - Si vous voulez vraiment réviser la Constitution avec l'article 89, et non pas bricoler avec l'article 11, il y a un Parlement pour cela. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, SOCR et RDSE, ainsi que sur quelques bancs du groupe CRCE) Oui, la démocratie représentative, cela compte ! Oui, 348 sénateurs, 577 députés, 925 parlementaires, élus de manière directe et indirecte, et non pas seulement 925 citoyens, c'est la France ! (Applaudissements nourris sur tous les bancs, à l'exception de ceux du groupe LaREM)

Référendum (II)

M. Hervé Marseille .  - (Applaudissements prolongés sur les bancs des groupes UC, Les Républicains et RDSE) Je ne sais plus à qui s'adressent ces ovations ; j'en suis ému. (Applaudissements sur les mêmes bancs)

Mon collègue Karoutchi vient de le dire : le grand débat se poursuit jusqu'au 15 mars. Il faudra que le président de la République et le Premier ministre en discernent les conclusions pour proposer des réponses. Le Parlement est disponible pour y travailler ; il ne s'use que si l'on ne s'en sert pas ! (Sourires) Le chef de l'État et celui du Gouvernement peuvent aussi avoir recours - c'est légitime - au référendum, prévu par la Constitution, comme vient de le rappeler la garde des Sceaux.

Il n'est pas souhaitable qu'une telle consultation populaire ait lieu le jour des élections européennes. (Applaudissements sur tous les bancs à l'exception de ceux du groupe LaREM) D'autant, qu'à l'évidence, nous n'avons pas eu de débat approprié lors des élections présidentielles. (M. Charles Revet renchérit.) Il est indispensable que nous ayons un vrai débat sur cette question : Brexit, taxation des GAFA, migrations, l'Europe est en crise, l'Europe est malade...

M. le président. - Votre question ?

M. Hervé Marseille.  - Monsieur le Premier ministre, afin que la France retrouve son rôle moteur, évitons d'avoir un autre débat le jour des élections européennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - (« Ah ! » sur les bancs des groupes Les Républicains et UC ; on marque aussi sa satisfaction sur plusieurs autres bancs.) Je me suis dit qu'il était utile que j'intervienne lors de la deuxième question sur le référendum pour compléter notre réponse...

M. Marc-Philippe Daubresse.  - Il a de la chance monsieur Marseille !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Le grand débat a commencé. Bonne nouvelle, nous constatons une très grande appétence de nos concitoyens pour y participer. C'est un moment important, utile, passionnant. Beaucoup s'interrogent sur les solutions ou les instruments qui seront mis en oeuvre pour concrétiser les solutions.

Le débat n'a pas produit tous ses effets et il est trop tôt pour répondre à de telles interrogations. Cependant, je ne crois pas qu'un instrument unique suffira à répondre à toutes les questions soulevées dans le débat. Le recours au référendum est le droit le plus strict du président de la République. Pour autant, un seul référendum ne suffira pas à prendre en compte les questions formulées et les questions sous-jacentes.

Les organisations patronales et les associations d'élus ont mentionné la possibilité d'une élaboration collective d'instruments de réponse. N'ayons pas peur d'explorer cette voie.

Quant à l'idée d'organiser le référendum le jour des élections européennes, j'entends votre argument. Rien n'est décidé pour l'instant, même si dans notre monde une hypothèse se transforme rapidement en un fait. Le scrutin du 26 mai est d'une importance considérable pour la construction européenne et pour notre pays. Nos concitoyens doivent pouvoir exprimer clairement leurs souhaits à ce sujet. Référendum ou pas, les élections européennes sont depuis longtemps le moment où l'on parle assez peu d'Europe et beaucoup de questions nationales.

Mme Laurence Cohen.  - Ah ! Ça...

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Nous l'avons tous vécu. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, ainsi que sur quelques bancs des groupes Les Indépendants et UC)

Prélèvement à la source

M. Richard Yung .  - (« Allô ! » à droite) Quittons les rives souriantes du grand débat pour des sujets moins heureux de fiscalité : le prélèvement à la source instauré au 1er janvier.

Les premiers bulletins de paie arrivent en effet dans les foyers. Nous en avions longuement débattu en commission des finances il y a deux ans déjà ; la majorité du Sénat y était opposée... Mais il s'applique, soit. Des questions nombreuses se posent - sur le rôle des employeurs, les aspects techniques. Je salue d'ailleurs l'accompagnement qui a été déployé. Rappelons que le prélèvement à la source existe depuis 1920 dans beaucoup de pays et depuis 1945 partout en Europe. Il n'y a que la Suisse qui ne l'a pas adopté... (Murmures croissants sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Loïc Hervé.  - Sauf pour les transfrontaliers !

M. le président. - Votre question ?

M. Richard Yung.  - La voici : (« Ah ! » sur les bancs du groupe Les Républicains) monsieur le ministre, quel bilan en tirez-vous ? (Exclamations sur les mêmes bancs) Le taux moyen a-t-il été utilisé ? Quelles perspectives se dessinent ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Je vous confirme que la mise en oeuvre se passe bien. Il n'y a pas de bug, ni systémique ni technique. La décision de le reporter d'un an a été heureuse, pour régler certaines questions concernant les particuliers employeurs et décider du versement d'un acompte de 60 % pour les crédits d'impôts.

Nous le faisons pour les Français, qui sont 7 millions à connaître une variation de leur revenu de 30 % d'une année sur l'autre. Divorce, naissance, changement de situation... Ce système s'adapte désormais immédiatement à la vie de nos concitoyens.

Cette réforme est conduite par les 40 000 agents de la DGFiP formés à cet effet. Pas moins de 1 000 agents ont été en charge de répondre aux appels téléphoniques et 110 000 personnes ont été accueillies pour information dans les 1 500 points de contact.

Le prélèvement à la source est une réussite technique, que l'on doit aux agents. Nous avons modifié les taux de plusieurs centaines de milliers de contribuables pour mieux tenir compte de la réalité de leurs revenus. Cette réforme fonctionne bien aussi avec les entreprises qui constatent que son coût est bien moindre que ce qu'elles pouvaient craindre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Rachid Temal.  - Merci, Christian Eckert !

Tabagisme en zone frontalière

Mme Véronique Guillotin .  - Ma question s'adresse à la ministre des solidarités et de la santé. Alors que la consommation de tabac baisse en général, certaines zones échappent à cette tendance. Ainsi, PACA, Occitanie, Hauts-de-France et Grand Est sont les régions où l'on fume le plus, à cause de la proximité des pays où le tabac est moins cher, en premier lieu, le Luxembourg, où le paquet coûte 5,40 euros en moyenne. L'augmentation du prix du tabac en France, mesure que j'ai soutenue et qui a fait la preuve de son efficacité, a hélas encore renforcé le différentiel entre les zones frontalières et le reste du territoire.

Face à ce constat, la région Grand Est a lancé un programme de lutte contre le tabac en ciblant les publics les plus à risque.

Mais le Gouvernement doit prendre en compte la situation chez nos voisins. Le tabac restant de loin le premier facteur de risque de cancers évitables en France, quelles actions compte prendre le Gouvernement, y compris à l'échelle européenne ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et Les Indépendants)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Mme Buzyn est fortement impliquée dans la lutte contre le tabac. Mais votre question porte davantage sur le trafic et la contrebande. Dans le cadre de la loi relative à la lutte contre la fraude, nous avons abaissé de 10 à 4 le nombre de cartouches pouvant être importées d'un pays de l'Union européenne : au-delà, il y a présomption de contrebande. L'amende maximale a été doublée, de 2 500 euros à 5 000 euros. Depuis trois ans, 1 500 tonnes de tabac ont été saisies - et une tonne encore à Saint-Avold le 27 septembre dernier, à l'occasion d'un contrôle inopiné.

Nous contrôlons aussi des lieux de vente choisis au-delà de nos frontières.

Nous avons appelé nos partenaires européens à une plus grande harmonisation fiscale, par la modification de la directive de 2011. La directive de 2018 doit également être modifiée afin que les quantités pouvant être échangées ne soient plus indicatives mais prescriptives. Nous travaillons enfin en pleine coopération avec les buralistes pour ne pas mettre en danger leur activité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Véronique Guillotin.  - Je parlais plutôt de santé ; c'est la raison pour laquelle je reposerai ma question à Mme Buzyn. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et Les Indépendants)

Débat national et pluralisme dans les médias

M. Pierre Laurent .  - Ma question porte sur les conditions d'exercice du pluralisme politique dans le débat national : vous voulez restreindre la liberté de manifester et la liberté de la presse est mise à mal, comme on le voit avec la tentative de perquisition chez Médiapart et la situation de L'Humanité, laquelle appelle une plus grande solidarité.

S'il est impossible de mettre le couvercle sur la marmite qui bout des demandes des Français, la part du lion médiatique est laissée aux shows du président de la République.

Un grand débat national est-il autre chose qu'une campagne présidentielle de rattrapage dans laquelle il n'y aurait qu'un seul candidat ? Rien ne s'arrangera, avec les élections européennes puisque les temps de parole seront répartis, selon, la loi que vous avez votée, de manière inégale. Il serait d'ailleurs bon que le CSA s'en préoccupe dès maintenant.

Comment le Gouvernement et les garants du débat national entendent-ils favoriser une plus grande égalité du temps de parole politique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs des groupes SOCR, UC et Les Républicains)

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - (Exclamations sur les bancs du groupe CRCE) Ce grand débat est bien celui des Français, avec 4 000 réunions, 700 000 contributions sur la plateforme. (Mme Cécile Cukierman proteste vigoureusement.) La quasi- intégralité des réunions se passe entre les Français. (Protestations sur les bancs du groupe CRCE)

M. David Assouline.  - Pourquoi la télé ne vient que lorsque le président de la République est là ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.  - La presse est libre et le CSA contrôlera cela. Nous sommes en contact avec les cinq garants qui nous aident à respecter le principe de transparence, (On crie sur les bancs du groupe CRCE.) mais aussi celui de l'exhaustivité dans la prise en compte des contributions. Le débat est parfaitement libre. Il est une opportunité pour prendre les décisions qui s'imposent, sous le contrôle du président de la République et du Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; sourires ironiques à droite, vives protestations à gauche)

M. François Bonhomme.  - C'est de la limonade !

M. Vincent Éblé.  - Pourquoi les sénateurs ne sont-ils pas invités ? Ils sentent le gaz ?

Coopératives agricoles

M. Henri Cabanel .  - La loi dite EGalim devait rendre plus juste la rémunération des agriculteurs. L'encre est à peine sèche mais les membres des coopératives craignent la remise en cause de ces structures qui seraient assimilées à des entreprises privées. Or la coopérative est la continuité de l'exploitation, pas une entreprise commerciale ! Une coopérative n'achète pas de produits mais en vend ! Il peut certes y avoir des abus dans les grandes coopératives. Corrigeons-les sans remettre en cause le modèle coopératif, fondé sur l'humain et la solidarité. (Marques d'approbation) Les coopératives font vivre les territoires avec une activité saine. Beaucoup d'exploitations sont de taille modeste, notamment en Occitanie, comme me le souffle mon collègue du Gers, Franck Montaugé. (Sourires)

Bercy ambitionnerait de taxer deux fois les coopératives. Quelles preuves de soutien les ordonnances à venir donneront-elles au modèle coopératif agricole ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe Les Républicains ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Veuillez excuser M. Guillaume, retenu en Lozère.

Le Gouvernement soutient fortement le modèle coopératif de solidarité, de mise en valeur de tous les territoires et de répartition juste de la valeur ajoutée. Le prix abusivement bas est une notion juridique qui peut entrer en contradiction avec le prix coopératif. Le Haut Conseil à la coopération agricole et son médiateur sont compétents pour résoudre les litiges. Nous préserverons le modèle coopératif, qui regroupe les trois quarts des agriculteurs de notre pays et qui est effectivement un modèle d'avenir. (On applaudit sur les bancs du groupe LaREM.)

Niches fiscales

Mme Claudine Thomas .  - Le Gouvernement a annoncé une réduction des niches fiscales afin, dit-il, « qu'elles profitent aux classes moyennes plutôt qu'aux plus aisés ». La fiscalité française est toujours un objet de curiosité car notre pays est écrasé par l'impôt. Les niches fiscales sont une bouffée d'oxygène. Aujourd'hui, la crise des gilets jaunes et le besoin de ressources supplémentaires vous incitent à montrer du doigt comme des privilégiés ceux qui en bénéficient. Soudain, l'emploi à domicile et les dons aux associations ne sont plus utiles ! Vous créez tout bonnement de nouvelles hausses d'impôt à l'encontre des classes moyennes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UC, ainsi que sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Plusieurs voix à droite.  - Eh oui !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Je vous rassure : aucune décision n'a été prise. (« Ah ! » à droite) La dépense fiscale peut être utile pour promouvoir des comportements vertueux, pour inciter à certains investissements, encourager la création d'emplois ou appuyer telle ou telle politique publique. Mais leur accumulation a conduit à vider de leur substance certaines impositions, à élever des taux de prélèvements et peut nourrir l'optimisation : la superposition de certaines niches peut privilégier certains contribuables.

Nous travaillerons avec deux impératifs en la matière : diminuer les prélèvements obligatoires, comme nous l'avons fait...

M. Philippe Dallier.  - Allons !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - ... sans taxer les classes moyennes, et introduire plus d'équité, car 10 % des contribuables les plus aisés bénéficient de 50 % des 14 milliards d'euros de niches fiscales. (On se récrie sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Dans Les Echos, le 9 janvier, quelqu'un disait qu'il fallait tout remettre à plat en matière fiscale, et revoir complètement ces niches fiscales accumulées et illisibles, propos frappés au coin du bon sens... signés Laurent Wauquiez ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Loïc Hervé.  - Les grands auteurs !

Mme Claudine Thomas.  - Déficit commercial record attendu cette année, à 65 milliards d'euros ; déficit public annoncé à 3,3 %, au-dessus des 3 % ; taux de prélèvements obligatoires, prévu à 44,3 % dans la loi de programmation, mais qui devrait rester à 45 % : pas de quoi pavoiser ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UC et Les Républicains)

Programmation pluriannuelle de la recherche

M. André Gattolin .  - Dans un monde en pleine transformation technologique, l'investissement dans la recherche est capital. La France s'était fixée d'y consacrer, en 2020, 3 % de son PIB ; en 2017, elle peinait à atteindre 2,2 %, loin derrière l'Allemagne, les États-Unis ou les pays scandinaves.

L'annonce par le Premier ministre d'une future loi de programmation pluriannuelle pour la recherche souligne la volonté de notre pays de passer à la vitesse supérieure, en articulation avec le plan Europe 2020.

La mise en oeuvre d'une politique volontariste de la France aux côtés de l'Union européenne ne peut que contribuer au renouveau industriel, à la compétitivité de nos entreprises et à notre souveraineté numérique.

Quelles seront les priorités de la programmation ? Comment seront-elles articulées avec le prochain cadre pluriannuel financier européen ? Comment mobiliser la communauté scientifique, les industriels et l'ensemble de nos concitoyens sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Vendredi dernier, pour les 80 ans du CNRS, le Premier ministre a annoncé cette future loi de programmation pluriannuelle. Cela faisait longtemps, trop longtemps qu'un chef de Gouvernement n'avait ainsi réaffirmé sa confiance envers nos scientifiques, à la fois pour améliorer l'avenir de notre pays mais aussi pour produire une connaissance qui est à la base de toute innovation, source de croissance et d'emploi.

C'est une décision d'importance que cette loi de programmation. Il n'y en a eu que trois en quarante ans !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Ça ne sert à rien !

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Nous travaillerons autour de trois axes...

M. Éric Kerrouche.  - Moins de chercheurs, moins de chercheurs et moins de chercheurs ?

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Il s'agira de sortir des oppositions stériles entre recherche privée et publique, entre financement compétitif et financement récurrent.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Les conflits d'intérêts, cela n'existe pas ?

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Partout, il faut soutenir le financement de la recherche.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. - C'est raté !

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Trois groupes de travail seront mis en place, sur le financement d'une recherche compétitive de qualité, sur l'attractivité des carrières scientifiques, sur le soutien à la recherche partenariale. Nous remettons la recherche au coeur de nos priorités, car elle est au coeur de l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; M. Daniel Dubois applaudit également.)

Décentralisation

M. André Reichardt .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Les conseils départementaux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin ont voté hier une même délibération demandant la création d'une collectivité européenne d'Alsace. Quelles compétences lui seront dévolues ? Le projet de loi prévu ne décline pas même le contenu de la déclaration de Matignon...

Or 84 %, puis 83 % des Alsaciens ont dit vouloir retrouver une collectivité territoriale alsacienne de plein exercice. Les maires en ont assez de la recentralisation rampante. Ils veulent plus de liberté, de souplesse, et dénoncent des périmètres déconnectés des réalités sociales et économiques.

La loi NOTRe ne satisfait personne ! Le président de la République s'est dit prêt à la « rouvrir ». C'est une perspective, quoique floue. En la matière, faisons plutôt confiance à la démocratie représentative ! (On approuve sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Nous vous avons alerté sur la grogne des maires. Le Sénat a des propositions : êtes-vous prêt à les écouter, et à engager l'acte III de la décentralisation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - S'il est un domaine où le Gouvernement partage vos préoccupations, c'est bien le cas de l'Alsace. Nous avons entendu l'expression, par les élus locaux et les parlementaires, de leur insatisfaction devant l'organisation résultant de décisions passées.

Ayant fixé comme limite, pendant la campagne, la non remise en cause des périmètres régionaux, nous avons essayé de travailler en bonne intelligence avec les élus locaux et les parlementaires. Je salue tout particulièrement le travail de Mme Gourault. C'est dans ce cadre que nous sommes parvenus à une déclaration commune du conseil régional, des deux conseils départementaux et de nombreux parlementaires, signée à Matignon, qui a lancé le processus poursuivi par le vote d'hier : sur les 80 conseillers départementaux, 74 votes positifs. Nous avons écouté, discuté, permis aux collectivités territoriales de s'entendre.

Le processus va se poursuivre au Parlement, qui aura l'occasion de se prononcer sur ce bel exemple de coopération intelligente. Je ne dis pas que la déclaration commune règle tout ; certains voudraient aller plus loin, d'autres moins loin. Nous avons avancé et trouvé une solution qui peut faire consensus.

Il est aisé de dénoncer les irritants de la loi NOTRe - je l'ai fait moi-même. Il est plus difficile de les corriger car les collectivités ont des intérêts contradictoires ; des équilibres, des habitudes se sont installés partout sur le territoire. C'est la complexité de notre vie politique, administrative et territoriale.

Nous devrons améliorer les dispositions de la loi NOTRe, certes, mais en veillant à ne pas satisfaire à l'appétit de match retour. Cela exige finesse et délicatesse. Je suis sûr que le Sénat et le Gouvernement sauront y travailler ensemble. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, RDSE et sur certains bancs du groupe UC)

Liberté de la presse et indépendance de la justice

Mme Marie-Pierre de la Gontrie .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Notre pays traverse une période troublée qui alerte sur la fragilité de notre démocratie. Pourtant, vous en attaquez les fondements : le bicamérisme, ouvertement remis en cause dans la lettre du président de la République, la liberté d'aller et venir et le droit de manifester, avec la loi anticasseurs, la liberté d'information, avec la loi sur le secret des affaires puis la loi sur les fake news.

Le président de la République voudrait maintenant créer des structures subventionnées chargées de veiller à la neutralité de l'information, au parfum de Pravda ou d'ORTF.

Ces mesures font système. Hier, on assistait à une tentative de perquisition dans les locaux de Mediapart, inédite car touchant au secret des sources. Cela rappelle votre attention particulière à la nomination du Procureur de Paris, votre refus de l'indépendance du parquet...

Vous jouez un jeu dangereux qui inquiète même dans les rangs de votre majorité, monsieur le Premier ministre ; voyez le vote de la loi anticasseurs. Quand cesserez-vous de fragiliser nos libertés fondamentales? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Je ne vois nul « système » portant atteinte à la liberté d'expression et à la protection des sources. En tant que garde des Sceaux, il m'est interdit de commenter des procédures judiciaires en cours : je m'y astreins, car je suis attachée à l'indépendance de la justice et au respect de la loi.

Je rappelle les circonstances de l'affaire que vous citez. Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour atteinte à la vie privée. Deux magistrats se sont rendus dans les locaux de Mediapart pour se faire remettre les enregistrements sonores de conversations entre MM. Benalla et Crase. Dans le cadre non coercitif de l'enquête préliminaire, Mediapart a refusé de les remettre, puis les a communiqués à la justice, ce qui permettra de faire toute la lumière sur cette affaire.

Je suis attachée à la liberté de la presse et à la protection du secret des sources des journalistes, pierres angulaires de la démocratie. Je souhaiterais aussi que la justice ne soit pas l'objet d'attaques incessantes qui la paralysent. C'est indispensable pour qu'elle fonctionne dans la sérénité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Je regrette que le Premier ministre n'ait pas souhaité me répondre.

Madame la garde des Sceaux, je ne vous ai pas demandé de vous exprimer sur une affaire judiciaire en cours. Ayant signé une tribune en septembre afin de tenter de dissuader la commission d'enquête du Sénat d'auditionner M. Benalla, vous avez à l'évidence une conception variable de la séparation des pouvoirs ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, CRCE, ainsi que sur de nombreux bancs des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

Je vous invite à méditer cette phrase, elle est de vous : « Toute privauté prise avec les principes essentiels de notre République ne peut que contribuer au discrédit de l'action publique. » (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, CRCE, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

Protoxyde d'azote

Mme Valérie Létard .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le protoxyde d'azote est le troisième produit psychoactif le plus consommé par les étudiants français. Dans le Nord, le sol des espaces publics est jonché de ces capsules grises, signe d'une banalisation par détournement de son usage conventionnel, cartouches de gaz pour siphon à chantilly ou bonbonnes médicales dédiées aux anesthésies.

Nouvelle drogue tendance et récréative, ce gaz hilarant fait fureur chez les jeunes, avec une véritable dépendance à son effet euphorisant. D'autant qu'il est en vente libre, à coût modique, sans restriction ni pictogramme d'aucune sorte. Or les dangers sont bien réels ; le protoxyde d'azote n'étant pas métabolisé par l'organisme, ses utilisateurs croient être dans leur état normal. Pourtant, il peut avoir des effets graves sur la santé : on compte déjà dix-sept victimes au Royaume-Uni, deux en France. L'Observatoire des drogues et de la toxicomanie évoque des séquelles pour la moelle osseuse, le système nerveux, des troubles respiratoires.

Quelles dispositions comptez-vous prendre ? Des propositions de loi ont été déposées tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. Allez-vous agir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains ; M. Patrick Kanner applaudit également.)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Mme la ministre de la Santé étant aphone, je répondrai en son nom. Nous avons conscience de ce problème sanitaire dans votre territoire et comprenons votre malaise.

Le protoxyde d'azote est un gaz à usage médical utilisé pour les anesthésies, mais aussi à usage commercial, utilisé dans les bombes à chantilly. La réglementation qui s'applique est celle des produits de consommation courante. Vu le détournement qui en est fait, il serait vain de modifier la loi : seule la prévention sera efficace.

Certains préconisent l'interdiction de la vente aux mineurs. Or c'est l'inhalation qui est nocive, non le produit. En outre, les intoxications concernent également les jeunes adultes. Enfin, on le sait, ces interdictions sont insuffisamment respectées.

Le mieux est de communiquer sur les pratiques à risque auprès des jeunes et de mettre en oeuvre des actions de prévention dans les écoles, les universités, mais aussi grâce aux 47 000 étudiants du service sanitaire. Le ministère est pleinement engagé aux côtés des élus locaux.

La séance est suspendue à 17 h 50.

présidence de Mme Valérie Létard, vice-présidente

La séance reprend à 18 heures.

Croissance et transformation des entreprises (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 43 QUINQUIES

Mme la présidente.  - Amendement n°904 rectifié, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 1

Après les mots :

l'accès aux ressources génétiques

insérer les mots :

prélevées sur des micro-organismes

II.  -  Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

L'expérimentation prévue par le présent article n'est pas applicable aux ressources génétiques mentionnées au 3° de l'article L. 1413-8 du code de la santé publique.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Cet amendement exclut du champ d'application de l'expérimentation celui des ressources génétiques collectées par les laboratoires au titre de la prévention et la maîtrise des risques graves pour la santé humaine.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.  - Avis favorable.

L'amendement n°904 rectifié est adopté.

L'article 43 quinquies, modifié, est adopté.

ARTICLE 44

M. Jean-François Husson, rapporteur de la commission spéciale .  - Nous abordons la privatisation d'Aéroports de Paris (ADP), actif stratégique unique pour notre développement économique et touristique. Créé en 1945 sous la forme d'un EPIC, transformé en 2005 en société anonyme, ADP a pour mission d'aménager, d'exploiter et de développer les plateformes franciliennes.

En 2017, les aéroports de Roissy-Charles-de-Gaulle et d'Orly ont franchi la barre des 100 millions de passagers. Roissy-CDG est à lui seul le dixième aéroport mondial, le deuxième d'Europe. Si l'on ajoute Orly, le trafic passagers est aussi élevé qu'à Atlanta, premier aéroport mondial. C'est la principale frontière de la France, première destination touristique mondiale, la voie d'accès privilégiée à Paris et à l'Île-de-France.

La capacité d'ADP à fournir un service public de très haut niveau aux compagnies aériennes et aux passagers est cruciale pour l'attractivité du pavillon français : Air France-KLM réalise 50 % de l'activité d'Orly et 62 % de CDG, son hub.

Les aéroports ont un fort impact sur l'économie francilienne : plus de 122 000 personnes y travaillent, plus de 570 000 emplois en dépendent, soit 8 % des emplois salariés franciliens.

Avec la quatrième piste, la fréquentation de CDG pourrait atteindre à terme 140 à 160 millions de passagers par an, sachant que nombre d'aéroports européens sont saturés, comme Heathrow ou Francfort.

Mme la présidente.  - Il faut conclure.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Que la privatisation se fasse ou non, l'État devra conserver un contrôle étroit sur l'entreprise et les infrastructures critiques. C'est un enjeu de souveraineté ! (M. Charles Revet approuve.)

M. Fabien Gay .  - Nous attendions cet article avec impatience, car vous n'avez pas réfuté les arguments que nous vous opposions lors de la question préalable.

Vous espérez 8 à 10 milliards d'euros de la cession des actifs, dont il faut soustraire 1 à 2 milliards pour la compensation des actionnaires minoritaires, parmi lesquels Vinci. La BPI placera les 6 à 8 milliards restants sur les marchés financiers, à 2,5 % nous dit-on. Vous attendez du futur fonds d'innovation environ 200 millions d'euros - sachant que les dividendes actuellement versés par ADP s'élèvent à 180 millions, et ne feront qu'augmenter... C'est une poule aux oeufs d'or !

Mieux vaut vendre car on ne sait pas quelle sera la rémunération des dividendes demain, dites-vous. C'est pourtant l'État qui la fixe ! Placer ces sommes sur les marchés financiers serait plus sûr ? Monsieur le ministre, si vous connaissez un produit financier qui rapportera à coup sûr, sur soixante-dix ans, plus que les dividendes actuellement versés par ADP, je vous confie mon PEL ! (Sourires et applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et SOCR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains)

M. Martial Bourquin .  - Après le désastre de la privatisation des autoroutes, après la cession ratée de l'aéroport de Toulouse, vous proposez de privatiser ADP, un actif stratégique, bien géré, un monopole d'État qui lui assure une rente...

À quand une vraie réflexion sur ces privatisations qui ne marchent pas ? Que l'on fasse des erreurs, c'est une chose ; qu'on les perpétue, c'est plus grave !

ADP est un monopole qui produit des dividendes importants, qui pourraient entièrement payer le fonds d'innovation !

En 2008, les entreprises du CAC 40 ont versé 43 milliards d'euros à leurs actionnaires ; en 2018, elles redistribuaient 57,4 milliards d'euros ! Devons-nous céder à des intérêts purement financiers un tel actif ? ADP est aménageur national et international, c'est la porte de la France sur le monde ; il est au coeur des grands projets franciliens. Il doit rester public ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Michel Vaspart .  - Je suis résolument opposé à la privatisation d'ADP et de la Française des Jeux. Non par dogme, puisque j'ai soutenu la privatisation de Engie, mais au vu de l'expérience catastrophique de la privatisation des autoroutes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Mme Éliane Assassi.  - Exactement !

M. Michel Vaspart.  - Les conclusions de la commission d'enquête du Sénat en attestent.

On vendrait au privé un actif qui verse des dividendes à l'État, qui est notre porte d'entrée, notre frontière ?

Ce n'est pas à l'État de gérer les hôtels et les boutiques de luxe, dit le Gouvernement. Or l'État gère des plateformes aéroportuaires !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Et non !

M. Michel Vaspart.  - L'aéroport est un tout. Il faut revoir le principe des deux caisses, pour proposer des redevances plus raisonnables aux compagnies aériennes.

Monsieur le ministre, vous nous avez proposé un chantage que j'ai mal reçu : nous sommes favorables au fonds pour l'innovation alimenté par des économies de fonctionnement sur les dépenses publiques, pas par la vente des actifs rentables de l'État. (« Bravo » et applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ainsi que sur quelques bancs à gauche)

Mme Viviane Artigalas .  - Souvenons-nous de la privatisation de l'aéroport de Toulouse : l'État n'ayant conservé que 10,01 % et les actionnaires publics locaux, région, département, métropole et CCI, 40 %, ils n'ont pu s'opposer à l'actionnaire privé qui voulait maximiser le versement des dividendes au détriment de l'investissement. La Cour des comptes avait d'ailleurs critiqué le manque d'expérience et de transparence de l'acquéreur chinois. Il a finalement décidé de revendre sa participation, mais la situation est ambiguë et instable. Est-ce le sort qui attend ADP ?

Le 8 mars dernier, devant la mission d'information du Sénat sur Alstom, le ministre déclarait que l'État actionnaire devait être présent dans les secteurs stratégiques où la souveraineté est en jeu. Le rôle de l'État actionnaire est de garder une capacité d'intervention pour répondre à des déséquilibres manifestes, disait-il encore. N'est-ce pas contradictoire avec votre volonté de privatiser ADP ? Aux États-Unis, les aéroports sont publics ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Olivier Jacquin .  - Au vu de ce que rapporte ADP, vous feriez mieux, pour financer le fonds d'innovation de rupture, de renationaliser la totalité d'ADP ! Le motif affiché n'est ni sérieux ni rationnel. Vous avez besoin d'argent, et vendez donc les bijoux de famille. Vous obéissez aussi sans doute au dogme libéral.

Mais comment un libéral peut-il envisager de privatiser un monopole naturel ? Vous allez constituer une rente : c'est le pire du capitalisme, le capitalisme de rente, pour ne pas dire de copinage.

De retour de Davos, endossant un gilet jaune, vous déclariez à France Inter : « Le capitalisme doit mettre fin aux inégalités criantes qui tuent la cohésion de la société ; le capitalisme des inégalités est mort, il ne nous mènera à rien, il est injuste. »

Privatiser ADP, c'est aberrant, et c'est créer le capitalisme des inégalités de demain. (Applaudissements à gauche)

M. Patrick Kanner .  - Les faits sont têtus, dites-vous ; les chiffres aussi. Il vous faut 47 milliards d'euros pour financer la dette de la SNCF, 9 milliards pour supprimer la taxe d'habitation des plus aisés, 11 milliards pour financer les mesures d'urgence votées fin décembre... Bref, il vous faut beaucoup de cash. Alors que la croissance est fragile, on renfloue ainsi les caisses asséchées, mais c'est du one-shot. Mieux vaudrait garder publiques ces entreprises florissantes et continuer à engranger les bénéfices !

Les exemples du passé sont édifiants. Les sociétés autoroutières se positionnent désormais sur les aéroports car elles anticipent la fin de leur concession ! Doit-on faire une nouvelle erreur pour pallier la fin d'une autre erreur ?

L'État doit continuer à gérer les infrastructures stratégiques, pour des raisons de sécurité et de souveraineté.

Entendez nos arguments, qui viennent de tous les bancs. Vous ne pouvez pas avoir raison tout le temps contre tout le monde. Pour une fois, écoutez le Sénat ! Ne bradez pas le patrimoine des Français ! (Applaudissements à gauche et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Je ne crois pas à l'alibi du pseudo-fonds d'innovation. Ce n'est pas la première fois qu'on nous le sert. Il faut préparer l'avenir, nous dit-on. Les recettes liées au capital public fondent comme neige au soleil. On se prive de recette à moyen et long terme pour du cash à court terme. Quand on voit les sommes consacrées au crédit d'impôt recherche, sans parler des 21 milliards d'euros du CICE, comment croire qu'on ne saurait trouver 250 millions pour soutenir l'innovation ?

ADP, c'est le hub d'Air France, c'est la porte d'entrée sur notre territoire. Si l'aéroport n'est pas organisé pour faciliter son activité à un coût abordable, la compagnie nationale sera fragilisée. Si KLM est si performante, c'est qu'elle bénéficie de la faiblesse des frais aéroportuaires de Schiphol.

Croyez-moi, le propriétaire privé sera plus tenté d'accommoder les compagnies du golfe, et l'intérêt national passera après...

Mme la présidente.  - Veuillez conclure.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Seul l'État peut garantir l'écosystème de la compagnie. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

M. David Assouline .  - Ce débat est très politique. Nous parlons de la principale frontière de la France. C'est dire son importance pour notre souveraineté, dans un contexte d'insécurité internationale.

Pour Paris, pour le tourisme, la maîtrise publique est un enjeu politique. La privatisation d'ADP serait un très mauvais signe. L'instabilité des marchés financiers n'est plus à prouver et pour ma part, je ne vous confierai pas mes économies ! La crise financière qui menace risque d'être pire qu'en 2008.

Les risques d'une privatisation sont connus : gestion à l'économie, hausse des taxes aéroportuaires, pressions pour baisser les exigences environnementales, ouvrir les vols de nuit... Un contrôle renforcé ne suffira pas ; le bras de fer tourne court quand on a cédé le capital. Rompez donc avec la religion du libéralisme, sortez du dogme de la privatisation. Il en va de notre souveraineté ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Richard Yung .  - Il est intéressant de voir ce débat revenir.

Sous le Gouvernement Jospin, on avait privatisé Air France en partie, Autoroutes du Sud, Crédit lyonnais, France Télécom...

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Pas étonnant qu'il ait été battu !

M. Richard Yung.  - ... Eramet, GAN, Thomson Multimédia, CIC, EADS. Sous le Gouvernement Villepin, en partie EDF et en partie ADP. Sous le Gouvernement Ayrault, Safran, EADS, ADP partiellement. Sous le Gouvernement Valls, trois aéroports de province...

Alors, je comprends mal les préventions de certains dans ce contexte... (On se récrie sur les bancs des groupes CRCE et SOCR.)

Ce n'est pas la peine de crier, chers collègues, quand je fais un peu d'histoire...

M. François Bonhomme.  - C'est une querelle de famille !

M. Richard Yung.  - La raison qui emporte mon adhésion, ce sont les financements qu'il faut trouver pour financer les activités futures d'ADP. L'État actionnaire, pardon de le dire, n'est pas si pécunieux.

L'État garde les moyens de contrôle, notamment sur la fixation des péages avec une révision non pas ad libitum, un choix mauvais qui avait été fait pour les autoroutes, mais tous les cinq ans.

Enfin, un mot sur le monopole, il n'est qu'apparent. Déplacer les activités à Bruxelles ou à Amsterdam n'a rien de compliqué.

Mme Sophie Taillé-Polian .  - L'unique but de ces privatisations est le désendettement de façade de l'État, pour ne plus frôler la barre des 3 % de déficit.

Les Français ne sont pas d'accord avec les privatisations car ils ont vu les conséquences de celle des autoroutes. Vous avez le droit juridique de procéder ainsi, mais pas le droit politique, le droit moral.

Le président de la République cherche une question pour un référendum, posez celle-là : voulez-vous privatiser nos aéroports ?

M. Charles Revet.  - Pourquoi pas en effet !

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Cette question est dans le grand débat national, ce débat éclairera les Français.

En plus, cette privatisation est pour 70 ans. Le transport aérien est stratégique, mais aussi le plus polluant. Quand il faudra modifier notre empreinte écologique que ferons-nous si l'État a perdu la main ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Vincent Capo-Canellas .  - Ce débat est légitime. Rapporteur spécial de la commission des finances sur ce sujet, je voudrais revenir sur la gestion aéroportuaire. Qu'attendent les passagers ? De la connectivité, une meilleure qualité de service, des prix raisonnables. Maintenant que le Gouvernement a pris sa décision et que l'Assemblée nationale s'y est ralliée, le Sénat doit apporter sa pierre au développement du transport aérien. Les deux modes de gestion, publique et privée, coexistent déjà. Il y a des privatisations bien menées et d'autres mal menées, comme à Toulouse où la privatisation de l'aéroport par la gauche ne s'est pas bien passée, c'est indéniable.

M. Martial Bourquin.  - C'était Macron !

M. Vincent Capo-Canellas.  - C'était le projet Montebourg. Macron a privatisé Lyon et Nice et il n'y a pas eu de problème.

La notion de monopole est très relative. Elle vaut pour les destinations à moins de trois heures de Paris. Pour le reste, les voyageurs regardent sur internet quel hub leur offre la meilleure connectivité : Paris, Bruxelles, Amsterdam. Depuis l'ouverture du capital d'ADP, la qualité des installations a beaucoup progressé.

Les compagnies se plaignent du niveau de la redevance et demandent de la régulation. Discutons-en, ce sera l'apport du Sénat.

Mme Éliane Assassi .  - La maire de Mitry-Mory voit des camions et des engins de chantier arriver sur le site des travaux du CDG Express. Personne n'ignore que la ministre des transports a engagé une concertation sur l'opportunité de cette infrastructure que beaucoup, comme nous, contestent pour son coût exorbitant. Le Gouvernement investit 1,7 milliard d'euros dans un équipement qui sera offert gratuitement au futur acquéreur d'ADP. Ce coup de force est inacceptable pour les usagers du RER B, dont je suis, et de la ligne 4 ; les élus et les associations engagés dans la concertation et l'ensemble de nos concitoyens dont les impôts financeront un équipement qui profitera à une entreprise privée. Nous porterons leurs voix en demandant la suppression du CDG Express et en refusant la privatisation d'ADP. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et quelques bancs du groupe SOCR)

M. Yves Daudigny .  - Je veux dire mon opposition frontale à ces privatisations, et d'abord celle d'ADP. L'argument du fonds destiné à l'innovation de rupture ne tient pas au regard des dividendes. Celui consistant à considérer qu'une gestion par le privé sera meilleure est idéologique. Puisqu'il y a monopole, cela revient à remettre une forme de rente au futur acquéreur, et l'exemple des autoroutes devrait nous alerter.

ADP a enregistré un chiffre d'affaires de 3,6 milliards d'euros l'an passé. Les locations d'espace pour la restauration et le commerce en représentent un tiers. L'avenir de l'entreprise est prometteur. Pourquoi s'en séparer ? C'est une folie ultralibérale qui conduit à une aberration économique, à une erreur stratégique et à une faute politique majeure.

La Cour des comptes a relevé en 2018 que l'ouverture du capital ne s'est pas accompagnée des bénéfices escomptés à Toulouse, à Lyon et à Nice. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. François Bonhomme .  - La privatisation d'ADP au débotté aurait justifié un texte à part entière plutôt qu'un article dans cette loi fourre-tout.

Le parallèle avec les autoroutes a déjà été établi, il devrait vous alerter. Et le contrôle des frontières ? Et puis, il y a le précédent fâcheux de Toulouse : après quatre ans, les investisseurs chinois veulent revendre leurs parts avec une plus-value de 200 millions d'euros.

Je ne voterai pas cette privatisation qui nous mènerait dans une zone de turbulence.

M. Philippe Dominati .  - Moi qui suis un libéral considère que ce projet de cession de parts d'ADP n'a rien à voir avec le libéralisme : c'est la cession d'un monopole. Un acteur qui détiendrait 50 % du parc d'autoroutes, 50 % des parkings municipaux, de la ligne de TGV Lyon et un aéroport national, cela s'appelle une situation dominante et ce n'est pas une vision libérale des choses. Dans le pays le plus libéral au monde, les États-Unis, la souveraineté existe et l'État conserve ses aéroports. L'État défend mal ses intérêts.

On ne connaît pas même le prix de cette cession. Le patron d'ADP estime que l'investissement initial sera remboursé en 30 ans. Or vous parlez d'une concession de 70 ans ! Le déséquilibre est flagrant. Le trafic explosera, et vous n'avez pas prévu de clause de révision du prix...

Et je ne parle pas de l'indemnisation, des 7 000 hectares de foncier et de l'intérêt de l'entreprise... Personne ne veut cette privatisation, sauf le Gouvernement. M. Yung évoque les besoins de financement pour développement futur de l'aéroport mais le directeur d'ADP lui-même dit que la privatisation n'est pas nécessaire.

Bref, sur ce dossier politique, le Gouvernement risque d'être bien seul ! Je voterai contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs des groupes CRCE et SOCR)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Les redevances seront négociées tous les ans et l'État aura le dernier mot, dites-vous monsieur le ministre. Il faut plus que des mots ! Quels critères figureront au cahier des charges ? Quelles garanties avons-nous ? D'ailleurs, où est le cahier des charges ? Nous ne vous donnerons pas carte blanche pour brader notre patrimoine. J'ai ici l'actuel cahier des charges de Roissy qui date de 2005 : dites-nous ce qui va changer !

Mme Cécile Cukierman .  - Ce débat n'est pas hors sol. Il arrive à un moment où les Français s'interrogent sur leurs mobilités et à quelques semaines de la discussion d'un projet de loi sur le sujet.

Monsieur le ministre, vous comptez confier à quelques groupes, dont Vinci pour ne pas les citer, la maîtrise de nos déplacements. Selon vous, l'enjeu de la privatisation d'ADP se résumerait à la gestion des boutiques. Vraiment ? À moins que ces boutiques deviennent des arènes de combat pour rappeurs en mal de sensation. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) Et l'aménagement du territoire ? ADP, plus qu'un bijou de famille, est une entreprise stratégique en termes d'emplois et de développement.

Monsieur Yung, après toutes ces privatisations que vous avez citées, le Front national est arrivé au deuxième tour des élections présidentielles. Tuer la démocratie à coups de privatisation n'est pas la solution.

M. Pascal Savoldelli .  - La vente d'ADP est contraire à la Constitution. Le constituant avait prévu ce risque en 1946, protégeant les monopoles naturels. De nombreux juristes pensent comme nous : considérer qu'un service public ne peut être national au regard d'un critère géographique, comme l'a fait le Conseil d'État, n'a aucun sens. ADP joue un rôle considérable pour le territoire national, pas seulement pour l'Ile-de-France. C'est aussi un monopole de fait puisque les secteurs d'activité sur lesquels ADP détient une position exclusive ou prépondérante occupent une place importante et non substituable dans l'économie nationale. Comme d'autres l'ont dit ici, c'est un choix politique et idéologique que vous faites, monsieur le ministre. Il suffit de relire le Préambule de la Constitution de 1946 pour s'en convaincre. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Sophie Primas .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Vous êtes sans doute surpris, monsieur le ministre, par les réticences qui se manifestent sur les bancs de la droite sénatoriale. Nous avons surtout des questions : quel sera le processus de cession des parts : en un bloc, en plusieurs blocs ? Le prix sera-t-il le seul facteur de choix comme le veut la jurisprudence ? Comment protégera-t-on l'aéroport dans le temps d'une éventuelle OPA ?

Vous invoquez la maîtrise, préservée, des compétences régaliennes et du foncier. Mais quel opérateur privé se plierait à ces contraintes alors qu'il a les siennes propres ? Je ne comprends pas les réponses d'Augustin de Romanet sur la double caisse. Pourquoi les profits de la partie commerciale ne financeraient-ils pas les investissements d'infrastructures ?

Enfin, un certain nombre de départements franciliens ont souhaité répondre à l'appel d'offres : quelle suite donnerez-vous à leur proposition ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Pierre Laurent .  - Nous sommes très divers sur ces bancs et nous n'avons pas toujours été d'accord sur les privatisations, y compris au sein de la gauche. Le consensus sur ADP mérite réflexion. Le sujet est majeur, car d'intérêt national. Le Gouvernement n'avance que des arguments d'une totale légèreté. Les arguments financiers ne tiennent pas la route, on peut craindre une spoliation dans la durée d'un bien national stratégique. S'entêter dans cette aventure serait une faute. Il y a tant d'enjeux, y compris en termes de sécurité nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et quelques bancs du groupe SOCR)

M. Claude Bérit-Débat .  - Je veux aussi dire toute mon opposition à la privatisation d'ADP. Je fais miens les arguments de mes collègues socialistes. Richard Yung a cité les gouvernements qui ont procédé à des privatisations, ce n'est pas parce qu'on a commis une erreur qu'il faut poursuivre dans cette voie. L'exemple des autoroutes et celui de l'aéroport de Toulouse devraient nous donner à réfléchir.

ADP n'est pas un équipement ordinaire, c'est la porte d'entrée dans notre pays. C'est aussi une entreprise qui génère des profits importants. Pourquoi céder les bijoux de famille alors que les dividendes de l'entreprise suffiraient à financer le fonds pour l'innovation ?

Enfin, mettre aux mains d'une seule entreprise les autoroutes et les aéroports pourrait se révéler dangereux. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Christine Lavarde .  - L'intérêt de cette privatisation serait 10 milliards d'euros dont les rendements financeraient, à hauteur de 200 à 250 millions d'euros, des innovations de rupture. C'est quatre fois moins que les investissements d'avenir.

Les outils de ce fonds seraient, pour une première enveloppe, des aides individuelles, sous forme de subventions ou d'avances remboursables ; pour une seconde enveloppe, des financements pour des programmes répondant à des défis à fort enjeu technologique : l'intelligence artificielle pour 100 millions d'euros par an, la nanoélectronique pour 25 millions d'euros. Or un certain nombre d'investissements d'avenir ont déjà été fléchés vers l'intelligence artificielle. Quelle cohérence entre ces deux politiques au service de l'innovation ?

Ensuite, on a observé des réorientations dans les investissements d'avenir : le programme Grand défi, notamment, servira à financer la rénovation du Grand Palais. Comment être certain que l'argent du fonds d'innovation financera effectivement les technologies de rupture, et non autre chose ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Catherine Fournier, présidente de la commission spéciale .  - Le débat est animé, à juste titre, au vu de l'enjeu. La loi Pacte est au centre de la transformation et de la croissance des entreprises.

Il y aura 2,4 milliards de passagers en plus d'ici 2020 et un doublement du trafic d'ici vingt ans. L'entreprise aura besoin de capitaux pour rester concurrentielle et compétitive. L'État français affiche davantage un besoin de financement qu'une capacité à abonder les capitaux d'ADP pour son développement futur.

Ce texte fait l'objet d'une procédure accélérée. Le Sénat s'est toujours réservé la possibilité d'enrichir substantiellement le texte. Qu'adviendra-t-il en CMP ? Gardons-le à l'esprit.

Mme Éliane Assassi.  - Quel est le rapport ?

Mme Catherine Fournier, présidente de la commission spéciale  - Une fusée sans carburant pour activer les réacteurs n'ira pas loin. (Marques de protestations sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Je me montre pragmatique et serai respectueuse du débat. Il doit être l'occasion pour tous de s'exprimer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Bruno Le Maire, ministre .  - Je remercie M. Husson pour son remarquable travail qui renforce considérablement les garanties et Mme Fournier pour ses propositions solides et son ouverture d'esprit.

Certaines interventions ne manquent pas de piquant. Mme Lienemann s'oppose avec ardeur aux privatisations alors que le gouvernement auquel elle a appartenu, le Gouvernement Jospin, a privatisé en masse.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - J'ai toujours été contre !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Certains sénateurs du groupe Les Républicains dénoncent avec vigueur les privatisations. « Reprendre les privatisations et les capitaux immobilisés dans des entreprises commerciales où [l'État] a gardé des participations. » était pourtant le programme du candidat Fillon en 2016. (Protestations sur les bancs des groupes Les Républicains) Finalement, le seul à être cohérent est le sénateur Gay, dont je gérerai volontiers le PEL s'il me le confie. (Sourires) Ces interventions montrent que nous ne sommes pas au bout des surprises que nous offre la recomposition politique actuelle...

Encore une fois, il ne s'agit pas d'une privatisation sèche d'ADP, mais une délégation de service public de 70 ans au terme de laquelle l'État reprendra possession de la totalité de cet actif stratégique. (Protestations sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Laurence Cohen.  - On sera tous morts !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ce n'est pas le cas aujourd'hui, aux termes de la loi de 2005.

À quoi cette opération servira-t-elle ? À financer le fonds pour l'innovation de rupture, à désendetter notre pays et à construire un champion mondial aéroportuaire.

Personne n'a rappelé la situation actuelle. L'État n'a pas 100 % des actifs d'ADP mais 50,6 %. Les actionnaires ont donc 49,4 % des actifs, ce qui signifie que l'État ne fait pas la pluie et le beau temps. Comment pouvez-vous vous résigner à ce qu'un actif stratégique appartienne à 49,4 % à des acteurs privés ? La solution que nous vous proposons permet d'en sortir.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Vous pratiquez la politique du pire !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Vous donnez le sentiment que les 174 millions d'euros de dividendes d'ADP en 2017 sont en progression stable et continue. Ce serait la poule aux oeufs d'or. Or c'est faux : les dividendes étaient de 110 millions d'euros en 2010, ils sont tombés à 70 millions d'euros en 2011 ; ils sont remontés à 157 millions d'euros en 2015 pour revenir à 130 millions d'euros en 2016.

M. Philippe Dominati.  - C'est l'État qui fixe les dividendes !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Monsieur Dominati, la régularité des dividendes n'existe pas.

Mme Annie Guillemot.  - C'est n'importe quoi !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Non, ce sont les faits. Seulement 26 % du résultat opérationnel courant résulte des fameuses activités aéroportuaires, contre 74 % qui relèvent des hôtels, des boutiques et du développement international.

M. Rachid Temal.  - Et alors ?

M. Pierre Laurent.  - Cela ne se découpe pas en tranches !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Regardons la nature du chiffre d'affaires d'ADP avant de faire de grandes déclarations. Le choix qui vous est proposé est de déléguer cette partie des actifs à un acteur privé.

Certains nous ont dit qu'aucun autre aéroport privatisé n'existait dans le monde.

M. Marc Daunis.  - Personne n'a dit ça !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - D'autres ont cité l'exemple des États-Unis. Avez-vous vu l'état des aéroports américains ? Nous sommes capables de faire mieux.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Comme à Toulouse ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Osaka, Rome, Londres, Édimbourg, Amsterdam, Glasgow, Southampton, Vienne, Brisbane, Melbourne, tous les aéroports portugais et j'en passe sont privatisés.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Rien à voir !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Autre critique, ce ne serait pas respectable et mieux vaudrait compter sur les recettes des dividendes pour alimenter le fonds. Or l'opération est parfaitement rentable. Monsieur Gay, les 8 à 10 milliards d'euros ne seront pas placés en bourse mais au Trésor avec un rendement de 2,5 % pour une recette de 2,5 milliards d'euros disponibles pour l'innovation de rupture sur 10 ans. Ce fonds préfigure un fonds pour l'innovation européen où collaboreront les Allemands.

La troisième critique consiste à faire la comparaison avec la privatisation des autoroutes.

M. Alain Fouché.  - À l'époque, la privatisation des autoroutes était présentée comme formidable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Cela n'a rien à voir, car dans le cadre d'ADP, la loi Pacte prévoira une révision tous les 5 ans des redevances aéroportuaires. Ce contrôle sera plus sûr avec des dispositions législatives qu'avec le simple contrat qui régit la situation d'aujourd'hui.

M. Alain Fouché.  - Vous vous êtes trompés !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Préférez-vous une disposition contractuelle à une disposition législative ? À vous de choisir. Je n'ai jamais dit cela, je sais qu'on progresse en reconnaissant ses erreurs. Cependant, la comparaison ne tient pas car il y a le contrôle de l'autorité indépendante des redevances aéroportuaires que votre rapporteur propose de renforcer à bon escient. Ce sera une deuxième garantie du contrôle de l'État sur les tarifs aéroportuaires.

Quant au cahier des charges qu'on me réclame à cor et à cri, je l'ai transmis au rapporteur et le tiens à votre disposition. (On proteste à gauche en faisant valoir que c'est trop tard.) Vous pourrez constater que le contrôle de l'État sortira plus fort de la loi Pacte, notamment sur les investissements du futur concessionnaire, par exemple sur le terminal 4, mais aussi sur les nuisances sonores ou sur l'emploi, grâce à des ajouts des députés dans le cahier des charges. Votre rapporteur a proposé qu'il fasse l'objet d'une clause de revoyure tous les dix ans. Je suis ouvert à cette proposition.

Telles sont les garanties substantielles que je vous donne pour sécuriser l'opération. Rien ne changera sur les missions régaliennes de l'État qui continueront d'être exercées par la police aux frontières et par les douanes.

Cette opération permet, au bout du compte, à l'État de récupérer cet actif stratégique. Elle est assortie de trois verrous sûrs : une autorité indépendante renforcée, le contrat de régulation économique, le cahier des charges que je mets à votre disposition et que je suis prêt à revoir dans dix ans. Ce sont des garanties sérieuses.

J'en viens à chacune de vos interventions. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SOCR)

Monsieur Gay, sans revenir sur votre PEL, il y a d'un côté des dividendes qui varient de 10 % à 17 %, de l'autre un placement sûr à 2,5 %.

Monsieur Bourquin, ADP n'est pas un monopole d'État, ce n'est pas même un monopole. Le secteur a été libéralisé, ADP est en concurrence avec Londres, Francfort et Amsterdam pour les longs courriers. Il est de même en concurrence avec Beauvais, dont le nombre de passagers a été multiplié par dix-sept en vingt ans...

M. Rachid Temal.  - Ce n'est pas du tout la même chose !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Monsieur Vaspart, je souscris aux arguments d'Augustin de Romanet en faveur de la double caisse. C'est un principe fondamental, sans lequel les vases communicants empêchent de faire les économies nécessaires dans les secteurs les moins rentables. Londres a une caisse unique, pour son malheur...

M. Rachid Temal.  - Il y aura un cahier des charges qui permet à l'État de tout contrôler !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Quant aux compagnies aériennes, les redevances ne pèsent que 3 % à 4 % de leur chiffre d'affaires. La situation d'Air France - qui s'améliore - n'est pas due à celles-ci.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - En partie, si ! Tous les rapports parlementaires le disent !

M. Bruno Le Maire, ministre.   - Madame Artigalas, les résultats de l'aéroport de Toulouse sont clairs : plus 27 % de fréquentation et de résultats financiers en trois ans...

Mme Viviane Artigalas.  - Et combien d'investissements ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ils correspondent aux engagements de l'investisseur privé...

M. Rachid Temal.  - Non !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Reste la question - d'actualité ! - des 10 % de l'État. Je recevrai les élus nationaux et locaux pour qu'ils me disent ce qu'ils souhaitent. Nous prendrons notre décision en fonction de cela.

Monsieur Jacquin, nous ne faisons pas cela par besoin, mais par choix : 74 % des activités sont commerciales. Quand le président chinois annonce des percées fondamentales dans l'intelligence artificielle, le spatial, la gestion de données, les véhicules électriques ou autonomes ou les nanotechnologies, je me dis que le choix fondamental est là : l'État continue-t-il à gérer des activités commerciales, ou à investir dans le futur ? (Mme Sophie Taillé-Polian mime un violoniste.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Éric Kerrouche.  - Qu'il investisse dans la recherche publique !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Monsieur Kanner, les faits, les chiffres sont têtus en effet. Je ne vous ferai pas l'affront de rappeler dans quel état vous avez laissé la France en 2017... (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Rachid Temal.  - Et en 2012 ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Madame Lienemann, vous proposez de récupérer de l'argent sur le CIR ou sur le CICE.

Des économistes me disent : à partir de 2,5 Smic, le CICE n'est pas efficace. Si je devais réduire ce dernier, je profiterais de cette rentrée pour baisser les impôts des entreprises...

M. Rachid Temal.  - Oh là là !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Elles n'en ont pas besoin !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Les slots des compagnies étrangères sont décidés par la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) pas par ADP ; n'agitez pas de telles craintes infondées !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je parlais des commissions d'accueil, pas des slots !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - M. Assouline me parle de la crise financière, pire que celle de 2008... De grâce, sachant ce que cette dernière a coûté de souffrances aux Européens, aux Grecs, aux Espagnols, aux Portugais, aux Français en particulier, ne jouez pas ainsi avec les peurs ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe LaREM)

Vous me parlez de la religion du libéralisme...

M. Rachid Temal.  - La vôtre, monsieur le ministre !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - ... - elle n'a guère de fidèles dans cet hémicycle !

Je partage votre conviction, monsieur Yung. (Sourires)

M. Marc Daunis.  - Un nouveau converti !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Les trois régulations proposées par le Sénat ont été acceptées par le Gouvernement. À vous de faire votre choix du texte qui sortira du Sénat. Opposition frontale - et on sait ce qui en sortira... (Marques de protestations à gauche)

Ou propositions d'améliorations, qui seront reprises !

Madame Assassi, il est indispensable de doter l'Île-de-France du CDG Express...

Mme Éliane Assassi.  - Plus personne n'en veut !

M. Fabien Gay.  - Et le RER B ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - L'un n'est pas exclusif de l'autre.

M. Fabien Gay.  - Ben voyons !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - La comparaison entre Toulouse et les autoroutes n'est pas valable, je l'ai montré.

ADP dispose de 1 310 hectares de foncier bâti et d'une réserve foncière de 411 hectares sur une emprise foncière totale de 6 990 hectares. Dans le cahier des charges, qui vous sera remis, je le répète à l'attention de Mme Apourceau-Poly, il est prévu que toute modification dépend de l'accord de l'État. Dans 70 ans, ces hectares appartiendront intégralement à l'État. Actuellement, ils appartiennent pour moitié à des actionnaires privés.

Mme Cukierman m'a parlé de lien entre privatisation et montée du FN. Argument inédit ! Je ne le vois pas. Je le vois nettement, en revanche, avec la désindustrialisation, contre laquelle le fonds d'innovation est la meilleure solution.

Monsieur Savoldelli, le Conseil d'État n'a pas jugé que ADP était un monopole naturel ni n'avait vocation à être un service public national.

Madame Primas, nous avons le choix : soit nous cédons par blocs et si l'un des blocs cédés dépasse 30 %, il y a une OPA ; soit nous faisons un appel d'offres.

Le débat qui s'offre à vous, c'est soit l'affrontement, soit la coopération sur les modalités de l'opération. Je préfère la seconde possibilité, mais votre choix est souverain. Il vous appartient. Je suis ouvert à une participation des départements franciliens, et même à ce que la région soit représentée comme censeur au conseil d'administration. Voyez ce que je vous propose. Ces gestes d'ouverture devraient nous permettre de bâtir une position commune.

Monsieur Laurent, je crois vous avoir prouvé, avant le dîner, que mes arguments, que vous disiez légers, pouvaient être assez lourds quand c'est nécessaire.... (Sourires) J'ai répondu à M. Bérit-Débat sur les autoroutes.

Madame Lavarde, outre les investissements d'avenir, nous manquons de fonds sur des technologies très sensibles sur lesquelles il faut investir parfois longtemps à fonds perdu, les biais de sélection des algorithmes par exemple. Comment l'algorithme a choisi de vous faire parvenir une information plutôt qu'une autre, par exemple. Ce choix, à l'heure de la crise des gilets jaunes, est tout sauf anodin, mais ne peut être rentable pour une entreprise. C'est pourquoi nous le financerons grâce au fonds pour l'innovation de rupture, le programme d'investissements d'avenir ne correspondant pas à ce type de recherche très difficile et très pointue.

J'ai répondu à toutes les questions ; cette opération est l'occasion de redéfinir les rôles respectifs de l'État et de l'entreprise. Notre Nation a besoin d'un État qui protège et qui investit. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants, ainsi que sur quelques bancs du groupe UC)

Rappel au Règlement

M. Gérard Longuet .  - La seule personne qui n'ait pas pu s'exprimer jusqu'au bout est notre rapporteur. C'est regrettable. Beaucoup d'entre nous, qui ne connaissons pas le sujet mais qui avons des idées tranchées sur l'économie, auraient aimé l'écouter !

Ceux qui ont des réserves parmi Les Républicains, tout le groupe CRCE et une bonne partie des socialistes se sont exprimés. Et c'est bien normal. Mais pas celui qui est le chef de file de la commission, qui n'a eu que deux minutes et demie, et ce n'est pas tout à fait normal. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RDSE, LaREM et UC)

Mme la présidente.  - Il faudrait, pour répondre à votre préoccupation, revoir notre Règlement que j'essaie simplement, pour l'heure, de faire respecter, en veillant de mon mieux aux temps de parole qu'il impartit à chacun. Je rappelle qu'il autorise le ministre à s'exprimer sans limitation, conformément à la Constitution. Cela dit, il vous est loisible de proposer des modifications.

Acte est donné de votre rappel au Règlement, monsieur Longuet.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 44 (Suite)

Mme la présidente.  - Amendement n°177 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Allizard, Mme Berthet, MM. Bonhomme, Bonne, Brisson, Cambon, Charon, Chatillon et Chevrollier, Mme Ramond, MM. Cuypers, Darnaud et Daubresse, Mme de Cidrac, MM. de Legge et de Nicolaÿ, Mmes Deromedi et Deseyne, M. P. Dominati, Mme Dumas, MM. Ginesta, Gremillet, Grosdidier, Houpert, Kennel et Laménie, Mme Lassarade, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mmes Lherbier, Malet et M. Mercier, M. Meurant, Mme Micouleau, MM. Panunzi et Pellevat, Mme Procaccia et MM. Regnard, Revet, Sido, Vaspart, Vial et Segouin.

Supprimer cet article.

M. Roger Karoutchi.  - Je ne suis pas fanatique ni de la privatisation, ni de la nationalisation. Il faut regarder, tout se discute, selon la situation de l'entreprise.

Sauf qu'ADP a beaucoup changé la donne, travaillé avec la région, les départements et a bénéficié de beaucoup d'infrastructures réalisées par les collectivités. Il ne s'est jamais plaint d'une incapacité à faire. Je ne parlerai pas des 250 millions d'euros du fonds...car un redéploiement de la dépense publique devrait permettre de les trouver...

M. Olivier Jacquin.  - Évidemment !

M. Roger Karoutchi.  - Autant je comprends les privatisations lorsqu'une entreprise ne peut pas fonctionner avec les règles publiques, autant je ne vous comprends pas. Vous dites que toutes les règles publiques demeureront. Alors, en ce cas, pourquoi privatiser ? C'est une entreprise stratégique qui fonctionne : gardez-la ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes UC, SOCR et CRCE)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°224 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Fabien Gay.  - Parlons-nous franchement : est-ce Vinci qui veut racheter les parts ? Il sera indemnisé comme actionnaire minoritaire, puis pour Notre-Dame-des-Landes. Dites-le, monsieur le ministre ! Les citoyens ont besoin de savoir si ce sera avec leur argent.

Mme la présidente Primas s'est interrogée à juste titre : qu'adviendra-t-il alors de la CMP ?

Si nous faisons le choix ensemble de refuser cette privatisation, vous devrez entendre la voix du Sénat, monsieur le ministre.

Les citoyens se scandaliseraient du contraire. Chacune et chacun est assez grand pour voter en son âme et conscience ! (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et SOCR)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°348 rectifié bis, présenté par M. Hugonet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Cardoux et Danesi, Mme Lopez et MM. Paccaud, Retailleau, Mandelli, Mouiller et Piednoir.

M. Jean-Raymond Hugonet.  - Je reprends à mon compte les arguments financiers et politiques déjà évoqués à l'unisson sur l'ensemble de nos bancs. J'en ajoute un qui ne l'a guère été jusqu'à présent. Une partie de la plateforme d'Orly est en Essonne ; il faut aussi parler des enjeux environnementaux.

Ne parlons pas de la privatisation des autoroutes, d'Alsthom et de sa fusion avec General Electric... Chacun sait quelles erreurs elles ont été !

Quand, pendant 20 ans, vous êtes en sandwich entre ADP et la DGAC pour des affaires de survol, vous savez que, contrat par contrat, si vous perdez la main, vous la perdez définitivement ! (Plusieurs applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE)

M. Marc Daunis.  - C'est vrai !

Mme la présidente.  - Amendement identique n°393 rectifié, présenté par M. M. Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin.  - Une question n'a pas été abordée : l'avis des compagnies aériennes. Par la voix de M. de Juniac, elles se sont déclarées contre la privatisation qui entraîne souvent la hausse des tarifs. Vinci n'a pas eu Notre-Dame des Landes, ce n?est pas une raison pour lui faire un cadeau aussi gros !

Vous avez cité, monsieur le ministre, des exemples étrangers. Or nous avons des statistiques exhaustives, qui montrent que 57 % des plus grands aéroports du monde sont publics ! ADP fonctionne bien et rapporte des dividendes... Ce n'est certes pas une fin en soi, reste à savoir ce qu'on en fait.

Retirons ces dispositions de la loi Pacte et ayons un vrai débat ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - (« Ah ! » sur les bancs du groupe SOCR) La commission spéciale a émis un avis de sagesse.

Certaines positions sont un peu excessives. Tout le monde a gouverné ces 20 dernières années ; chacun devrait s'adresser des reproches - les Français ne manquent pas de le faire. J'étais naguère, en 2005, contre la privatisation des autoroutes. Mais alors que les Français s'interrogent à voix haute sur le bicamérisme, que je défends avec énergie, je voudrais insister sur le rôle du Sénat, efficace et utile, qui a proposé un aménagement sur la double caisse et renforcé la régulation, à laquelle je suis très attaché. Il m'importe à prévenir tout risque de libéralisme sauvage. Les entreprises, dont Air France, demandent dans cet esprit un cadre d'action bien défini. Tel est aussi le sens de l'intérêt général que nous défendons, et de la démocratie représentative, où notre assemblée joue un rôle décisif. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable. Le débat a permis d'écarter des comparaisons infondées - avec la cession des autoroutes par exemple - et de montrer que le contrat de régulation économique apportera toutes les garanties d'encadrement par l'État tous les 10 ans. Et ADP reviendra dans le giron de l'État dans 70 ans !

Innovation et technologie du futur sont les défis principaux que nous devons relever, (protestations sur les bancs du groupe SOCR) et je suis convaincu que le rôle de l'État n'est pas de gérer à 75 % des boutiques et des hôtels, (Protestations et marques de lassitude à droite) mais de se centrer sur ses missions essentielles, à savoir la protection des Français et de leurs enfants.

M. Arnaud Bazin.  - Je m'étonne avec François Bonhomme qu'un sujet aussi important soit abordé au détour d'un amendement sur un texte examiné en procédure accélérée...

Nous n'avons pas parlé des riverains des aéroports, alors que le trafic est amené à doubler...Rendez-vous compte des conséquences ! Évoquer la privatisation, alors que la concertation sur la construction du quatrième terminal de CDG a à peine commencé, c'est osé !

Arguer enfin du désendettement de l'État, alors que le Gouvernement a gonflé l'addition des quelque 100 milliards de déficit budgétaire de 10 à 12 milliards d'euros, en 13 minutes d'un beau soir de décembre, c'est gros ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Rachid Temal.  - Je remercie le ministre pour sa leçon de libéralisme assumé. Le fonds d'innovation représente 250 millions d'euros, soit deux années de dividendes d'ADP. Songez au nombre de fonds que l'on pourrait créer avec les recettes de l'ISF...

ADP n'a pas de problème de fonds pour son développement, et l'Association des compagnies aériennes est opposée à la privatisation. Sur les six aéroports les plus efficaces en matière de services cinq sont publics... Élu du Val-d'Oise, je rejoins M. Bazin sur les riverains. Rien ne nous garantit qu'ils seront protégés des nuisances dues à l'augmentation du nombre de vols et en la matière, je préfère parler à l'État plutôt qu'à un opérateur privé tenté par la politique du chiffre !

Bref, vous nous faites payer deux additions : Notre-Dame-des-Landes qui ne s'est pas fait et l'imprécision de votre politique économique et sociale que vous financez en vendant les bijoux de famille. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Mme Nelly Tocqueville.  - Pour que l'État puisse vendre ADP à un très bon prix, il faudra qu'il dérégule les tarifs, ce qui pénaliserait Air France.

Ben Smith, nommé directeur général d'Air France, a exprimé en août dernier une inquiétude polie - il ne pouvait faire autrement. Alexandre de Juniac, lui, est fortement opposé à la privatisation.

Mme Angèle Préville.  - Ne permettons pas à une entreprise privée d'exercer un monopole sur une ressource stratégique. Celles-ci doivent demeurer publiques !

Nous avons voté dans la loi de finances 2018 la priorité pour les véhicules prioritaires d'intervention sur autoroute. Le décret n'a pas été pris, aussi ai-je posé une question : on m'a répondu que ce serait une rupture d'égalité devant le péage. La perte serait estimée à plusieurs dizaines de millions d'euros pour les concessionnaires. Voilà un bel exemple d'effets pervers des privatisations, chers collègues : le décret ne sera jamais pris ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Mme Laurence Cohen.  - Je rassure le rapporteur : nous jouons très bien notre rôle de parlementaire dans ce débat de fond sur les dangers de la privatisation.

Monsieur le ministre, pourquoi ne pas utiliser les dividendes pour financer l'innovation de rupture ?

Les parlementaires ne sont pas les seuls à s'opposer à la privatisation. La Cour des comptes a rappelé que les aéroports étaient des investissements peu risqués et très rentables, à court, moyen et long termes !

Nous n'avons pas parlé d'emploi. Or ADP représente 5 % du PIB régional, 1,4 % du PIB national, et 8 % de l'emploi salarié de l'Île-de-France. Les syndicats dénoncent une envolée de la sous-traitance, une perte de valeur de l'emploi et la précarisation de leurs conditions de travail.

Élue du Val-de-Marne, je m'inquiète aussi pour l'environnement.

M. Jean-Michel Houllegatte.  - La motivation première reste la recherche de financement. C'est louable, mais quelle vision du trafic aéroportuaire ? Est-ce la course au gigantisme comme à Istanbul ? Un certain nombre d'États sont en train de reprendre la main : le gouvernement Trudeau au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande également.

Hong Kong, Séoul, Singapour, Dubaï, Schiphol, bref, les aéroports les plus efficaces du monde, sont publics ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Éric Kerrouche.  - M. le ministre nous renvoie à nos responsabilités ; il est vrai que tout le monde n'a pas vécu une évolution idéologique aussi rapide que la sienne.

Le volume du fonds permettra-t-il vraiment de concurrencer la fondation Alphabet de Google sur l'intelligence artificielle ? Mieux vaudrait renforcer la recherche publique qui, elle, trouve !

Le dernier mot sera trouvé, de toute façon, à l'Assemblée nationale, nous dites-vous, non sans dogmatisme ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Mme Anne Chain-Larché.  - Je regrette le manque d'ambition de l'État pour ADP. Augustin de Romanet nous a dit que son entreprise pouvait financer ses investissements !

Quelles garanties pouvons-nous apporter pour prévenir les spéculations foncières ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Dominique de Legge.  - M. Longuet a raison. Ce débat aurait mérité une loi à part entière. Monsieur le ministre, il est grand temps que vous compreniez que le Parlement est là pour légiférer, et non seulement pour vous écouter ! Cessez avec ces lois trop longues !

Vous nous dites que vous écoutez le Sénat. Si vous souhaitez qu'il joue son rôle, permettez que la navette fonctionne. La procédure accélérée ne le permet pas, car vous n'êtes pas en CMP.

Il faut investir, préparer l'avenir ? Vous seriez plus crédible si le budget 2019 se traduisait par une moindre dépense publique et une moindre augmentation de la dette.

Vous voyez loin, à 70 ans. Mais dans 70 ans, monsieur le ministre, vous aurez 120 ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. René-Paul Savary.  - L'important est d'avoir des équipes capables de gérer un aéroport stratégique. Comment équilibrer la DSP sur 70 ans ? Il peut y avoir un accident, une valise qui explose. Avec la double caisse, l'État paiera pour assurer l'équilibre en cas de drame, tandis que le concessionnaire continuera à toucher les dividendes. Je voterai contre cette privatisation. (Applaudissements à gauche et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains)

M. Vincent Capo-Canellas.  - Je voterai contre les amendements de suppression car je souhaite que le débat sur les conditions de la cession ait lieu. La commission a réalisé un travail considérable et le ministre a évolué, ce dont je le remercie. Nous notamment beaucoup travaillé sur la régulation : il serait dommage que cet apport majeur du Sénat, que le ministre accepte, passe à la trappe.

La position d'Alexandre de Juniac est claire : certaines pratiques du privé ne lui conviennent pas. Pour autant, il n'a pas dit qu'il refusait le privé, mais qu'il fallait l'encadrer.

Quant à Ben Smith, il a dit devant la commission du développement durable qu'il invitait le Sénat à encadrer la privatisation et à installer un régulateur fort. Les amendements de la commission aménagent le principe de la double caisse, de sorte qu'une partie des profits des commerces servira à financer les infrastructures.

M. Daniel Chasseing.  - L'État a besoin de capitaux pour développer ADP car le nombre de passagers va doubler. M. le ministre et la commission nous ont rassurés. Il y aura un cahier des charges qui sera évalué tous les dix ans. La DSP n'est pas une privatisation, mais une cession du contrôle de l'État sur ce monopole stratégique pour 70 ans. Cela semble beaucoup à certains, malgré le travail fructueux de la commission spéciale.

Nous comprenons que l'État a besoin de financer l'innovation. Notre groupe est partagé : certains voteront l'amendement de suppression, d'autres suivront la commission. (M. Joël Guerriau applaudit.)

M. Olivier Jacquin.  - La France pêche par sa faiblesse en matière de contrôle et de régulation. Le droit du contrat prévaut sur l'intérêt général en ce qui concerne les autoroutes ; l'accord obtenu par Mme Borne n'est que le produit d'une négociation commerciale. Le Conseil constitutionnel rend régulièrement des décisions en faveur du droit d'entreprendre. Notre culture administrative n'est pas celle des économies libérales anglo-saxonnes où le régulateur est puissant : en Grande-Bretagne, l'on a recruté des centaines d'agents pour assurer le contrôle effectif au moment de la privatisation du rail.

Nous n'avons ni le contrat de régulation, ni le cahier des charges. Vous nous demandez un blanc-seing, je n'ai pas confiance. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Yves Daudigny.  - Une indemnité préalable partielle d'expropriation de 1 milliard d'euros sera versée aux actionnaires minoritaires concomitamment à la privatisation. Ne s'agit-il pas d'un tour de passe-passe baroque, un détournement légal de fonds publics qui permettrait à Vinci, acquéreur potentiel, de recevoir une aide substantielle de la part du vendeur ?

M. Pascal Savoldelli.  - Prévoir 250 millions d'euros pour l'innovation, ce n'est pas sérieux. Il faudrait 1 milliard d'euros rien que pour remettre à flot nos universités.

Quant à l'innovation, vous n'avez aucun projet. Vous êtes en rupture d'innovation de rupture ! Apple vient de verser 500 millions d'euros d'arriérés d'impôts : si nous taxions vraiment les Gafam, nous aurions des milliards pour financer l'innovation !

L'État, en vendant ses parts, ne créerait-il-pas un avantage indu au futur concessionnaire privé ? Je n'en suis pas certain.

On vient d'investir 1 milliard d'euros à Orly pour deux nouveaux terminaux. J'ai beau être communiste, je me réjouis que l'aéroport d'Orly relie Saclay à San Francisco comme à Sao Paulo et à Shanghai. (Applaudissements à gauche)

À la demande des groupes CRCE et SOCR, les amendements identiques nos177 rectifié, 224 rectifié, 348 rectifié bis et 393 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°48 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 324
Pour l'adoption 246
Contre 78

Le Sénat a adopté.

L'article 44 est supprimé.

(Vifs applaudissements à gauche et sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains)

Les amendements nos716 rectifié bis, 520 rectifié, 521 rectifié et 522 rectifié n'ont plus d'objet.

La séance est suspendue à 20 h 45.

présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente

La séance reprend à 22 h 20.

Mise au point au sujet d'un vote

M. Jean-Paul Émorine.  - Lors du scrutin public n°48, je souhaitais m'abstenir, et non voter pour.

Mme la présidente.  - Acte est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.

Discussion des articles (Suite)

Mme Catherine Fournier, présidente de la commission spéciale .  - Un mot après la suppression de l'article 44. Les articles 45, 46, 49 et 50 devraient connaître le même sort, par cohérence. En revanche, les articles 47, 48 et 48 bis, que la commission spéciale a améliorés, pourraient servir de base de discussion avec les députés sur la régulation économique des aéroports et le rééquilibrage du partage de la valeur entre les compagnies aériennes, dont Air France, et ADP.

M. Roger Karoutchi.  - Il revient à la séance de nous dire quels articles restent en discussion. Discuter du cahier des charges d'une privatisation qui n'est plus serait surréaliste !

Mme la présidente.  - Les articles ne tombent pas.

Mme Catherine Fournier, présidente de la commission spéciale.  - Par cohérence, j'ai proposé de supprimer les articles qui ne présentent plus d'intérêt.

ARTICLE 45

Mme Viviane Artigalas .  - La privatisation d'ADP, théoriquement, générerait 10 milliards d'euros, investis théoriquement dans un fonds pour l'innovation de rupture. (Marques de lassitude sur les bancs du groupe Les Républicains) Au vu de ce qu'il s'est passé avec les recettes de la taxe carbone dont tout le monde savait qu'elles seraient affectées non pas à la transition énergétique mais au budget de l'État, on peut s'interroger.

Le 8 mars 2018, monsieur le ministre, vous avez déclaré que le rôle de l'État n'est pas de recevoir régulièrement des dividendes mais d'investir dans l'avenir des Français. Justement, ces dividendes ne pourraient-ils pas servir à investir dans des services publics en zone rurale par exemple ?

M. Roger Karoutchi.  - Cette prise de parole est insensée !

Mme Viviane Artigalas.  - C'est l'une des multiples revendications qu'ont exprimée nos concitoyens à l'occasion du grand débat national.

Si vous ne revenez pas sur la suppression d'ADP, vous devrez assumer la responsabilité de votre vision à court terme de l'État stratège.

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Je comprends mal pourquoi nous discutons de cet article, après notre refus de la privatisation d'ADP.

M. Fabien Gay .  - En effet ! Et pour aller plus vite, le groupe CRCE renoncera à ses prises de parole sur tous ces articles dont il votera la suppression. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Mme la présidente.  - Amendement n°178 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Allizard, Mme Berthet, MM. Bonhomme, Bonne, Brisson, Cambon, Charon, Chatillon et Chevrollier, Mme Ramond, MM. Cuypers, Darnaud et Daubresse, Mme de Cidrac, MM. de Legge et de Nicolaÿ, Mmes Deromedi et Deseyne, M. P. Dominati, Mme Dumas, MM. Ginesta, Gremillet, Grosdidier, Houpert, Kennel et Laménie, Mme Lassarade, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mmes Lherbier, Malet et M. Mercier, M. Meurant, Mme Micouleau, MM. Panunzi, Pellevat et Piednoir, Mme Procaccia et MM. Regnard, Revet, Sido, Vaspart, Vial et Segouin.

Supprimer cet article.

M. Roger Karoutchi.  - Défendu. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et SOCR)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°225 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Fabien Gay.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°394 rectifié, présenté par M. M. Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin.  - Défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Par cohérence, avis favorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je m'en remettrai à la sagesse du Sénat tout en répétant que la privatisation est stratégique pour ADP et l'avenir de notre pays mais nous y reviendrons à l'Assemblée nationale...

M. Patrick Kanner.  - Je retire nos demandes de scrutin public sur les articles à supprimer par cohérence.

Les amendements identiques nos178 rectifié, 225 rectifié et 394 rectifié sont adoptés et l'article 45 est supprimé.

Les amendements nos523 rectifié, 21 rectifié ter, 183 rectifié bis, 524 rectifié, 885, 525 rectifié, 981, 526 rectifié, 528 rectifié, 721 rectifié bis, 454, 529 rectifié, 530 rectifié et 531 rectifié n'ont plus d'objet.

ARTICLE 46

Mme la présidente.  - Amendement n°226 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

M. Fabien Gay.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°395 rectifié, présenté par M. M. Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin.  - Défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Avis favorable, toujours par cohérence.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Sagesse.

Les amendements identiques nos226 rectifié et 395 rectifié sont adoptés et l'article 46 est supprimé.

Les amendements nos3 rectifié ter, 532 rectifié et 533 rectifié n'ont plus d'objet.

ARTICLE 47

Mme la présidente.  - Amendement n°227 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

M. Fabien Gay.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°396 rectifié, présenté par M. M. Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin.  - Défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Cet article porte sur la double caisse... Je suis défavorable à sa suppression car le texte de la commission spéciale apporte des aménagements utiles. Nous proposons un système mixte ; les activités de commerce, qui frisent le milliard d'euros, doivent pouvoir financer les infrastructures dans la limite de 20 %. Cela pourrait alléger le poids des redevances aériennes, qui pèsent sur les compagnies, d'après ce que nos auditions tant de la compagnie Air France que des syndicats du personnel ont révélé. Attention à ne pas céder à l'euphorie de la suppression...

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable. À mon sens, la double caisse est une bonne chose, Augustin de Romanet y est également favorable ; Jean-François Husson propose un renforcement de la régulation intelligent. Je regrette que son travail soit réduit à néant et que le débat tourne court.

Mme Sophie Primas.  - Cet article doit être amendé comme la commission spéciale le propose. L'idée que les commerces contribuent aux infrastructures est intéressante. Je voterai contre les amendements de suppression.

M. Arnaud Bazin.  - Je rejoins Mme Primas. Qu'ADP soit privatisé ou reste public n'empêche pas d'améliorer la régulation. Cette possibilité limitée d'ajuster le principe de la double caisse sera un progrès pour la gestion de l'aéroport.

M. Vincent Capo-Canellas.  - La question de la double caisse est technique, difficile mais essentielle. Le rapporteur propose un aménagement limité qui ne met pas en cause le modèle.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Il y aurait beaucoup à dire sur la double caisse. En quelques mots, tout ce qui peut être valorisé, le foncier, les commerces, est isolé tandis que les éléments coûteux, les infrastructures, sont moins bien financés. Le texte que propose M. Husson est meilleur, soit. Rien n'empêche le Gouvernement de convaincre la majorité de l'Assemblée nationale de le reprendre. En revanche, le Sénat, s'il l'adoptait, donnerait le sentiment de l'incohérence politique.

M. Roger Karoutchi.  - C'est un peu schizophrénique de discuter de ces articles après la suppression de la privatisation d'ADP ou, alors, c'est un débat entre nous. Il faudrait que le ministre s'engage à tenir compte de l'excellentissime travail de notre rapporteur (Sourires), sinon, il ne sert pas à grand-chose de discuter.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Que chacun assume ses responsabilités. Une curieuse alliance de communistes, de socialistes et de républicains... (Protestations sur les bancs des groupes CRCE, SOCR et Les Républicains)

M. Rachid Temal.  - Démagogie !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - ... a voté la suppression de la privatisation d'ADP. Dans ces conditions, je ne vois pas l'utilité de poursuivre le débat ; que chacun prenne ses responsabilités.

Plusieurs voix sur les bancs du groupe CRCE.  - C'est ce que nous faisons !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - J'ai passé trois heures à vous dire que j'étais prêt à reprendre l'intégralité des apports du Sénat pour encadrer la privatisation. Vous avez fait un autre choix, dont acte.

Mme Sophie Primas.  - Ce n'est pas comme cela que ça marche !

Mme Éliane Assassi.  - On ne veut pas de la privatisation !

M. Rachid Temal.  - C'est dur, la démocratie !

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Certaines dispositions sont utiles pour ADP quoi qu'il arrive et je maintiens les propositions, utiles à mon sens, de la commission spéciale. (M. René-Paul Savary et Mme Sophie Primas le confirment.) Empruntons la troisième voie : le débat entre nous. Si les députés décident de tout balayer d'un revers de main,...

MM. Arnaud Bazin et François Bonhomme.  - ... cela sera leur responsabilité ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Martial Bourquin.  - Je comprends mal ce débat mais, tant pis, je vous donne l'avis du groupe socialiste : nous sommes favorables à ce que les bénéfices commerciaux puissent financer les infrastructures. Mais si ADP reste public, ce sera un débat interne aux actionnaires du groupe...

M. Pierre Louault.  - La double caisse est expérimentée depuis plusieurs années ; elle permet notamment la bonne gestion des différents personnels et la réussite financière de l'entreprise.

Je rappelle que l'Assemblée nationale aura le dernier mot. Espérons qu'elle montre un peu de sagesse...

Mme Sophie Primas.  - Ce n'est pas gagné !

M. Pierre Louault.  - Il serait bon qu'elle reprenne des amendements du Sénat pour une privatisation plus réussie d'ADP.

M. René-Paul Savary.  - Je suis contre la double caisse. À entendre le ministre, on comprend que l'affaire sera bouclée à l'Assemblée nationale.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - C'est votre choix, pas le mien !

M. René-Paul Savary.  - Nous sommes en démocratie, monsieur le ministre. Si vous aviez davantage tenu compte de notre avis avant d'augmenter la taxation des carburants, nous n'en serions pas là ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE)

Donner un rôle de censeur aux élus d'Île-de-France, c'est s'en moquer !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - C'est leur demande !

M. René-Paul Savary.  - La régulation est indépendante du statut d'ADP. Votons cet article de régulation.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Monsieur le sénateur, c'est une question de cohérence. Je vous ai tendu la main, vous n'avez pas voulu la saisir. (Protestations sur les bancs des groupes CRCE et SOCR) Vous aviez le choix entre refuser tout et tenir compte du travail remarquable de la commission...

Mme Éliane Assassi.  - Ce n'est pas bien ce que vous faites monsieur le ministre !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ici, c'est le Sénat, et pas un atelier de surréalisme.

M. Rachid Temal.  - On nous tape sur les doigts ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ce sont les élus d'Île-de-France eux-mêmes qui ont demandé à être censeurs dans le conseil d'administration d'ADP.

M. Fabien Gay.  - J'ai du mal à comprendre la leçon que nous sommes en train de prendre. Monsieur le ministre, vous êtes contrarié par notre vote. Nous avons supprimé l'article 44 et, par cohérence, les articles 45 et 46. Mais ce n'est pas la même chose pour l'article 47. Je ne suis pas d'accord avec le rapporteur sur la double caisse mais il faut en débattre. Je pense que les infrastructures doivent profiter des bénéfices des commerces.

Le PDG d'ADP nous a dit que, avec cette logique, ce sera le communisme en France. (Rires) Je propose donc la suppression de l'article 47 pour instaurer le communisme en France ! (Rires, applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

M. Olivier Jacquin.  - En consacrant 20 % des profits des activités commerciales aux infrastructures, cet article constitue un progrès. Reste que le principe de la double caisse est une mécanique terrible, je crains une jurisprudence pour toutes les infrastructures, gares et ports. Si les commerces génèrent du profit, c'est bien sûr grâce aux flux de voyageurs que génèrent les infrastructures.

Mme Sophie Primas.  - Rappel au Règlement. Ici, c'est le Parlement et aucun chantage n'est toléré. Le Parlement s'exprime, débat et décide. Je vous remercie, monsieur le ministre, d'être resté 3 heures à débattre avec nous sur la privatisation d'ADP. Vous êtes contrarié, je le comprends, mais ne nous interdisez pas de débattre du reste. (Quelques applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et SOCR)

Mme Patricia Schillinger.  - Le ministre n'a pas du tout dit ça !

Mme Sophie Primas.  - Cet état d'esprit n'est pas bon pour la démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; quelques applaudissements sur les bancs des groupes UC et SOCR)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ce n'est pas bon non plus, pour la démocratie, d'accuser un ministre de chantage ! Il en faut plus pour me contrarier. Je ne faisais que répondre à M. Karoutchi : le Gouvernement ne se sent pas lié par les conséquences d'une décision que vous n'avez pas voulu prendre. Ce n'est pas du chantage, c'est de l'honnêteté.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Le débat sur l'article 47 est indépendant de la privatisation. On peut faire le choix de tout repousser ; ce serait ni responsable ni raisonnable. Nous pensons qu'il y a un intérêt à ce que les activités commerciales participent à une partie du financement des infrastructures. Pour les infrastructures ferroviaires, c'est à hauteur de 50 %. Ce que nous proposons n'est donc pas un modèle unique, cela est tiré d'une expérience. Les économistes que nous avons auditionnés ont trouvé l'idée pertinente.

Dans la vie, il ne faut jamais se résigner, il faut défendre ses idées jusqu'au bout. (Quelques applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Mme Sophie Primas.  - Très bien !

M. Pascal Savoldelli.  - Monsieur le ministre, votre réponse à Mme Primas ne va pas. C'est un manque de respect pour le Parlement.

Quand je vous écoute, monsieur le ministre, je songe à cette citation : « Tu ne sais jamais à quel point tu es fort, jusqu'au jour où être fort reste ta seule option. » C'est votre seule option, monsieur le ministre.

À la demande du groupe SOCR, les amendements identiques nos227 rectifié et 396 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin n°49 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l'adoption   90
Contre 251

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Arnaud Bazin.  - Bravo !

Mme la présidente.  - Amendement n°801, présenté par M. Yung et les membres du groupe La République En Marche.

Alinéas 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

M. Martin Lévrier.  - Même si la logique me paraît un peu schizophrénique, défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Avis défavorable. Vous revenez sur une proposition de la commission que l'ensemble des partenaires auditionnés, économistes, Air France, assises du transport aérien, ont trouvée pertinente. Ayons un minimum de cohérence. En dehors de l'hémicycle, on nous regarde !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis favorable.

L'amendement n°801 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°951, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

L'amendement de coordination n°951, accepté par la commission, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°189 rectifié, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, M. Karoutchi, Mme Deromedi, M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Regnard et Bonhomme, Mme L. Darcos, MM. Lefèvre, Chatillon et Charon, Mme M. Mercier, MM. Laménie, Mandelli, Daubresse, Darnaud, Genest et Bonne, Mmes Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Rapin, Revet, Dufaut, Babary et Segouin et Mme Lassarade.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Au troisième alinéa de l'article L. 6325-1 du même code, après le mot : « infrastructures », sont insérés les mots : « garantir l'exercice de la vie associative en préservant la présence des aéroclubs constitués sous forme d'association à but non-lucratif et disposant d'un lien statutaire avec une association reconnue d'utilité publique ».

M. Arnaud Bazin.  - Cet amendement garantit la pérennité des aéroclubs. Les privatisations des aérodromes ont engendré une hausse des redevances aéroportuaires, qui a provoqué la disparition de certaines de ces structures. La modulation des redevances doit garantir l'exercice de la vie associative aéroportuaire, critère d'intérêt général reconnu par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 16 juillet 1971.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Sagesse bienveillante.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°189 rectifié est adopté.

L'article 47, modifié, est adopté.

ARTICLE 48

Mme la présidente.  - Amendement n°228 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

M. Fabien Gay.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°397 rectifié, présenté par M. M. Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin.  - Défendu.

Les amendements identiques nos228 rectifié et 397 rectifié, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°1022, présenté par le Gouvernement.

A.  -  Au début de cet article

Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

I.  -  L'article L. 6325-1 du code des transports est ainsi modifié :

1° La première phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : « , appréciée au regard du coût moyen pondéré du capital estimé à partir du modèle d'évaluation des actifs financiers, des données financières de marché disponibles et des paramètres considérés pour les entreprises exerçant des activités comparables » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les éléments financiers servant de base de calcul des tarifs des redevances prévues au présent article sont déterminés à partir des états financiers, le cas échéant prévisionnels, établis conformément aux règles comptables françaises. »

II.  -  L'article L. 6325-2 du code des transports est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour déterminer les conditions de l'évolution des tarifs, le respect des principes mentionnés aux deuxième et quatrième alinéas de l'article L. 6325-1 est apprécié de manière prévisionnelle sur la période couverte par ces contrats. Au cours de l'exécution de ces contrats, dès lors que les tarifs des redevances aéroportuaires évoluent conformément aux conditions qui y sont prévues, ces principes sont réputés respectés et le niveau du coût moyen pondéré du capital, y compris en l'absence de stipulation expresse, ne peut, pendant la période couverte par le contrat, être remis en cause. »

B. Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

III.  -  Le premier alinéa de l'article L. 6325-2 du code des transports, dans sa rédaction résultant du II du présent article, est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

C.  -  Alinéa 2

Supprimer la mention :

Art. L. 6325-2. -

D.  -  Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

IV.  -  Le deuxième alinéa de l'article L. 6325-2 du code des transports, dans sa rédaction résultant du II du présent article, s'applique à tous les contrats prévus au même article L. 6325-2, y compris ceux qui sont en vigueur à la date de promulgation de la présente loi.

V.  -  Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai de 3 mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi afin d'ériger en une autorité mentionnée au 1er alinéa de l'article 1er de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes, ou d'intégrer à l'une de ces autorités, l'autorité de supervision indépendante au sens de la directive 2009/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2009 sur les redevances aéroportuaires, chargée d'homologuer les tarifs des redevances aéroportuaires mentionnées à l'article L. 6325-1 code des transports, et de rendre un avis conforme au ministre chargé de l'aviation civile sur les contrats régis par l'article L. 6325-2 du même code, en ce compris sur le coût moyen pondéré du capital mentionné dans ce contrat.

Ces mesures fixent les aérodromes relevant de la compétence de l'autorité, sa composition, les modalités d'exercice de ses attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à son organisation et à son fonctionnement. 

Pour l'ordonnance mentionnée premier alinéa présent V, un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Cet amendement renforce le statut de l'autorité administrative indépendante.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Avis favorable. Nous avons trouvé des voies de convergence avec le Gouvernement autour de l'idée que la régulation était indispensable.

Une économie qui fonctionne bien, c'est une économie qui laisse de la liberté mais qui encadre. Ces dispositions sont utiles, qu'ADP soit privatisé ou non.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Je salue cet amendement qui fait considérablement évoluer le droit. Merci au Gouvernement et à la commission. Je me réjouis que le Gouvernement, avec sa force et sa technicité, marche dans les traces du Sénat. Beaucoup d'acteurs du transport aérien attendent un régulateur.

L'amendement n°1022 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°950, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 2

a) Première phrase

Supprimer les mots :

après avis conforme de l'autorité de supervision indépendante des redevances aéroportuaires

b) Deuxième phrase

Supprimer les mots :

ces investissements et

II.  -  Alinéas 3 à 6

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« En l'absence d'un contrat pluriannuel déterminant les conditions de l'évolution des tarifs des redevances aéroportuaires, ces tarifs sont déterminés sur une base annuelle dans des conditions fixées par voie réglementaire. Dans le cas d'Aéroport de Paris, le cahier des charges de la société précise les conditions dans lesquelles le ministre chargé de l'aviation civile peut fixer les tarifs, après proposition d'Aéroports de Paris, sans préjudice des pouvoirs de l'autorité de supervision indépendante des redevances aéroportuaires, de manière à garantir, conformément à l'article L. 6323-4-1 du présent code la rémunération des capitaux investis par Aéroports de Paris au regard du coût moyen pondéré du capital. »

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Cet amendement supprime la notion de contrat de régulation unilatérale.

L'amendement n°950, repoussé par la commission, n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°190 rectifié, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, M. Karoutchi, Mme Deromedi, M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Regnard et Bonhomme, Mme L. Darcos, MM. Lefèvre, Chatillon et Charon, Mme M. Mercier, MM. Laménie, Mandelli, Daubresse, Darnaud, Genest et Bonne, Mmes Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Rapin, Revet, Dufaut, Babary et Segouin et Mme Lassarade.

Alinéa 2, première phrase

Après le mot :

publics

insérer les mots :

notamment en garantissant l'exercice de la vie associative assurée par les aéroclubs constitués sous forme d'association à but non lucratif et disposant d'un lien statutaire avec une association reconnue d'utilité publique

M. Arnaud Bazin.  - Même objet que l'amendement n°189 rectifié : garantir la pérennité des aéroclubs.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Sagesse bienveillante, même si je ne crois pas qu'il soit indispensable.

L'amendement n°190 rectifié, repoussé par le Gouvernement, est adopté.

L'article 48, modifié, est adopté.

ARTICLE 48 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°231 rectifié, présenté par M. Gay, Mmes Apourceau-Poly, Assassi et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cohen, M. Collombat, Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Gréaume, M. P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

Supprimer cet article.

M. Fabien Gay.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°715, présenté par M. M. Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°1021, présenté par le Gouvernement.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Amendement de coordination.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Avis favorable puisque nous avons adopté l'amendement n°1022.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis favorable aux autres.

Les amendements identiques nos231 rectifié, 715 et 1021 sont adoptés et l'article 48 bis est supprimé.

ARTICLE 49

Mme la présidente.  - Amendement n°182 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Allizard, Mme Berthet, MM. Bonhomme, Bonne, Brisson, Cambon, Charon, Chatillon et Chevrollier, Mme Ramond, MM. Cuypers, Darnaud et Daubresse, Mme de Cidrac, MM. de Legge et de Nicolaÿ, Mme Deromedi, M. P. Dominati, Mme Dumas, MM. Ginesta, Gremillet, Houpert, Kennel et Laménie, Mme Lassarade, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mmes Lherbier, Malet et M. Mercier, M. Meurant, Mme Micouleau, MM. Panunzi, Pellevat et Piednoir, Mme Procaccia, MM. Regnard, Revet, Sido, Vaspart, Vial et Segouin et Mme Deseyne.

Supprimer cet article.

M. Roger Karoutchi.  - Défendu. Mais notre débat, dois-je constater non sans lassitude, ne ressemble à rien. (Sourires) J'espère que personne ne nous regarde. (M. Martin Lévrier applaudit.)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°229 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Fabien Gay.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°398 rectifié, présenté par M. M. Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin.  - Défendu. 

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Avis favorable, par cohérence.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Sagesse.

Les amendements identiques nos182 rectifié, 229 rectifié et 398 rectifié sont adoptés et l'article 49 est supprimé.

Les amendements nos557 rectifié, 455, 719 rectifié bis et le sous-amendement n°920 n'ont plus d'objet.

ARTICLE 50

Mme la présidente.  - Amendement n°230 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

M. Fabien Gay.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°399 rectifié, présenté par M. Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin.  - Défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Sagesse.

Les amendements identiques nos230 rectifié et 399 rectifié sont adoptés et l'article 50 est supprimé.

Les amendements nos534 et 1023 n'ont plus d'objet.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°736, présenté par Mme Taillé-Polian.

Après l'article 50

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 571-11 du code de l'environnement, il est inséré un article L. 571-11-... ainsi rédigé :

« Art. L. 571-11-...  -  L'utilisation de nuit de l'aéroport d'Orly est ainsi limitée :

« 1° Aucun atterrissage d'aéronef ne peut être programmé entre 23 heures 30 et 6 heures 15, heure locale d'arrivée sur l'aire de stationnement ;

« 2° Aucun atterrissage pour retard accidentel ne peut être admis après 23 heures 30. Cette disposition ne s'étend pas aux situations susceptibles de mettre en cause la sécurité de l'aéronef, réservées à la seule appréciation du commandant de bord, sous réserve d'une justification a posteriori ;

« 3° Aucun décollage d'aéronef ne peut être programmé entre 23 heures 15 et 6 heures, heure locale de départ de l'aire de stationnement ;

« 4° Aucun décollage pour retard accidentel ne peut être admis après 23 h 30 ;

« 5° Les aéronefs effectuant des atterrissages entre 23 heures 15 et 6 heures 30, heure du toucher des roues, sont manoeuvrés au tracteur sur les voies de circulation ;

« 6° L'utilisation des dispositifs de freinage au moyen des groupes moteurs est interdite entre 22 heures 15 et 6 heures 30, sauf raisons particulières mettant en jeu la sécurité et dont le bien-fondé est apprécié à postériori sur un rapport du commandant de bord.

« Toute dérogation exceptionnelle au régime défini aux 1° à 4°, au bénéfice d'aéronefs commerciaux, ne peut être accordée que par le secrétaire général à l'aviation civile.

« Les restrictions définies aux mêmes 1° à 4° ne s'appliquent pas aux aéronefs d'État ni aux aéronefs effectuant des missions de caractère humanitaire, réserve faite pour ces derniers d'une justification a posteriori. »

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Cet amendement et l'amendement n°737 visent à garantir les droits des riverains d'Orly, qui bénéficient d'un couvre-feu entre 23 h 30 et 6 h 15.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Cela relève d'un arrêté du ministre des Transports... Retrait ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°736 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°737, présenté par Mme Taillé-Polian.

Après l'article 50

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 1er du titre VII du livre V du code de l'environnement est complété par une section ... ainsi rédigée :

« Section ...

« Dispositions particulières pour l'aérodrome Paris-Orly

« Art. L. 571-...  -  Le nombre maximal de créneaux horaires attribuables par le coordonnateur de l'aéroport d'Orly est fixé à 250 000 sur deux périodes de planification horaire consécutives, en été et en hiver.

« Dans la période comprise entre 6 heures et 7 heures locales, et entre 22 heures et 23 heures 30 locales, le nombre de créneaux horaires attribuables par le coordonnateur de l'aéroport d'Orly ne peut dépasser la moitié de la capacité disponible au sens de l'article 6 du règlement (C.E.E.) n° 95/93 du Conseil du 18 janvier 1993 fixant les règles communes en ce qui concerne l'attribution des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté. »

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Je l'ai défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Même avis que précédemment.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Idem.

L'amendement n°737 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°718 rectifié bis, présenté par M. P. Dominati, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Brisson, Cardoux et Chatillon, Mme de Cidrac, MM. Danesi et Daubresse, Mme Deromedi, MM. Grosdidier, Karoutchi, Lefèvre, Mandelli, Meurant, de Nicolaÿ, Panunzi et Piednoir, Mmes Procaccia et Puissat et MM. Rapin, Revet, Schmitz et Vaspart.

Après l'article 50

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le livre Ier de la première partie du code des transports est complété par un titre ainsi rédigé :

« Titre...

« Lutte contre la concentration du transport public

« Art. L. 1121-...  -  Afin de prévenir les atteintes à la liberté de circulation sur le plan national, une même personne physique ou morale agissant seule ou de concert ne peut se trouver dans plus de deux situations suivantes :

« 1° Détenir ou assurer l'exploitation de plus de 20 % du réseau autoroutier national ;

« 2° Détenir ou assurer l'exploitation de plus de 20 % du parc de stationnement réglementé en voirie et hors voirie sur l'ensemble du territoire national ;

« 3° Détenir ou assurer l'exploitation de plus de dix aérodromes mentionnés aux articles L. 6321-1, L. 6323-1 et suivants et L. 6324-1 ;

« 4° Détenir ou assurer l'exploitation de plus de 200 kilomètres d'infrastructures ferrées.

« Article L. 1121-...  -  Lorsqu'une opération de concentration a fait l'objet d'un examen approfondi par l'Autorité de la concurrence en application du dernier alinéa du III de l'article L. 430-5 du code de commerce, L'État peut, par arrêté conjoint des ministres chargés des transports, de l'économie et du budget, mettre fin intégralement ou partiellement à la mission confiée. »

II.  -  Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.

M. Roger Karoutchi.  - Défendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°718 rectifié bis n'est pas adopté.

ARTICLE 51 (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°266, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I.  -  L'exploitation des jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne ainsi que des jeux de pronostics sportifs commercialisés en réseau physique de distribution est confiée pour une durée limitée à une personne morale unique faisant l'objet d'un contrôle étroit de l'État.

II.  -  La société La Française des jeux est désignée comme la personne morale unique mentionnée au I du présent article à compter de la publication de la présente loi.

III.  -  Le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société La Française des jeux est autorisé. Le décret décidant le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société La Française des jeux entre en vigueur après le dépôt du projet de loi de ratification de l'ordonnance mentionnée au IV du présent article.

IV.  -  Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi ayant pour objet :

1° De préciser le périmètre des droits exclusifs mentionnés au I, avec une définition juridique des catégories de jeux autorisés, et les contreparties dues par la personne morale unique mentionnée au même I au titre de leur octroi ;

2° De définir les conditions dans lesquelles sont exercés les droits exclusifs mentionnés au I, notamment la durée limitée d'exercice de ces droits, qui ne pourra excéder vingt-cinq ans ;

3° De définir les conditions d'organisation et d'exploitation des droits exclusifs mentionnés au I ainsi que les modalités du contrôle étroit sur la personne morale unique mentionnée au même I en prévoyant la conclusion d'une convention entre l'État et la personne morale unique mentionnée audit I ou le respect par cette même personne d'un cahier des charges défini par l'État ;

4° De définir les modalités de l'agrément de l'État requis en cas de franchissement de seuils du capital ou des droits de vote de la société mentionnée au II ;

5° De redéfinir et préciser les modalités d'exercice du pouvoir de contrôle et de police administrative de l'État sur l'ensemble du secteur des jeux d'argent et de hasard ainsi que les modalités de régulation de ce secteur, notamment les dispositions applicables à l'autorité mentionnée à l'article 34 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, dans l'optique de la mise en place d'une autorité de surveillance et de régulation présentant des garanties d'indépendance adaptées à ses missions. Ces modalités de régulation incluent le contrôle des engagements pris par les opérateurs pour répondre aux objectifs définis aux 1° à 3° du I de l'article 3 de la même loi, notamment en ce qui concerne les communications commerciales en faveur des jeux d'argent et de hasard et les messages de prévention à destination des joueurs, ainsi que le renforcement des moyens de lutte contre les activités illégales, notamment les offres illégales de jeux d'argent ;

6° De modifier ou renforcer les sanctions administratives et pénales existantes et prévoir de nouvelles sanctions en cas de méconnaissance des règles applicables au secteur des jeux d'argent et de hasard ;

7° De rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, avec les adaptations nécessaires, les dispositions résultant des 1° à 6°, pour celles qui relèvent de la compétence de l'État, d'une part, et de procéder aux adaptations nécessaires de ces dispositions en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, d'autre part ;

8° D'abroger les dispositions obsolètes, inadaptées ou devenues sans objet et d'apporter aux autres dispositions législatives en vigueur toutes autres modifications rendues nécessaires pour la mise en oeuvre des dispositions résultant des 1° à 7°.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance mentionnée au présent IV.

V.  -  Les frais de gestion prélevés par les opérateurs de jeux ou de paris en ligne et par la personne morale unique mentionnée au I du présent article sur les sommes qu'ils mettent en réserve conformément aux dispositions des quatrième et septième alinéas de l'article 17 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne et du dernier alinéa de l'article 66 de la même loi sont limités à un montant par compte forfaitaire défini par voie règlementaire, prélevé trois mois avant l'expiration du délai de six ans. Aucun autre type de prélèvement ne peut être effectué par l'opérateur sur les comptes clôturés et dont les avoirs sont mis en réserve.

VI -  Au plus tard à l'issue d'un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, La Française des jeux et le Pari mutuel urbain s'assurent périodiquement que les personnes réalisant des opérations de jeux dans les points de vente au moyen d'un compte client ne sont pas inscrites au fichier des interdits de jeux, géré par le ministère de l'intérieur. Tout compte joueur dont le titulaire est interdit de jeu est clôturé. Les modalités d'application du présent VI sont définies par arrêté.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Cet amendement me vaudra, j'imagine, un succès d'estime...(Sourires) Il rétablit le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la Française des jeux (FDJ) supprimé par la commission spéciale. Le cas est différent de celui d'ADP.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Les inquiétudes sont fortes sur la privatisation de la FDJ, très ancrée dans nos territoires et dont l'activité soulève des enjeux de santé publique. La commission spéciale a le sentiment que le Gouvernement n'y est pas même prêt lui-même, compte tenu du peu d'éléments qui ont été fournis, de l'imprécision du périmètre de la régulation. Nous ne légiférons pas les yeux bandés, ni ne signerons de chèque en blanc ou en bois. Avis défavorable.

M. Martial Bourquin.  - Le groupe socialiste rejoint le rapporteur. Sur la lutte contre les addictions, le blanchiment et la fraude, le Gouvernement n'est pas très disert. La FDJ finance en outre les installations sportives et distribue des dividendes à l'État.

Mme Marie-Pierre Monier.  - De nombreux défenseurs du patrimoine s'inquiètent en outre de l'avenir du loto du patrimoine si cette privatisation était actée. La commission de la culture a auditionné M. Bern à ce sujet. Ce loto a été un succès. Sur 15 euros, 1,07 euro revenait à l'État et 1,5 euro à la Fondation du patrimoine !

La FDJ finance en outre le sport, au moment où, chacun le sait, l'État s'en désengage. Comment garantir que le nouvel acteur privé s'investira autant dans la défense du patrimoine et dans le sport, si l'État, n'étant plus majoritaire, ne fait plus pression sur lui ? Ne portons pas un mauvais coup à la régulation républicaine des jeux d'argent !

Mme Sophie Primas.  - Je le dis à titre personnel, et non au nom de la commission ou de mon groupe : cette privatisation de la FDJ ne me choque pas. Je sais qu'il peut exister une régulation. Je ne fais pas de confusion entre les dividendes et la fiscalité des jeux, sans commune mesure - cette dernière représentant près de 3,5 milliards d'euros par an. Mais les conditions de la cession restent floues, et je n'ai pas eu de réponses sur les enjeux d'équité entre les jeux. L'amendement à venir, peu équitable, sur la fiscalité, semble avoir pour rôle « d'habiller la mariée » pour un éventuel acheteur... Faute de précision, je ne puis donner quitus à cette privatisation, mais je ne demande qu'à être convaincue !

M. Jean-Michel Houllegatte.  - La FDJ s'appuie sur un réseau de plus de 30 000 points de vente répartis dans plus de 11 000 communes. Ce sont plus de 780 millions d'euros qui sont ainsi redistribués. Le complément de chiffre d'affaires lié à cette activité pour les petits commerces, parfois les derniers en zone rurale, atteint près de 25 000 euros par point de vente et par an.

Le développement des nouvelles technologies ne va-t-il pas menacer ce maillage territorial ?

M. Fabien Gay.  - Les problèmes d'addiction sont un premier motif de s'opposer à cette privatisation. N'entraînera-t-elle pas une espèce de western ?

L'association d'anciens combattants Les Gueules cassées, remarquable par son rayonnement et actionnaire de la FDJ à hauteur de 9,23 %, craint en outre de voir ses dividendes baisser. Nous ne voterons pas cet amendement.

M. Jean Pierre Vogel.  - Si la FDJ était privatisée, le GIE PMU pourrait être cannibalisé. Or on sait qu'il a déjà perdu un milliard d'euros d'enjeux en huit ans, dont la FDJ a bénéficié, et qu'il reverse 800 millions d'euros par an, à la filière équine.

Or les buralistes gagnent deux fois et demie plus avec les jeux de la FDJ qu'avec le PMU. On a entendu dire qu'ils auraient aussi des droits de souscription préférentielle au capital de la FDJ. D'où la crainte d'une politique agressive de la compagnie privatisée, au détriment du GIE PMU et de l'ensemble de la filière équine.

M. Jérôme Durain.  - Il faut être prudent. Je partage les réserves exprimées. Pourquoi vendre un opérateur si différent par son histoire et son activité ? Pourquoi vendre un opérateur si rentable ? Et si important en matière de prévention ? L'on peut craindre une évolution vers un business model nettement moins vertueux, tel qu'on le voit chez certains de nos voisins, notamment en Italie. Sur toutes ces questions, sur la régulation et la fiscalité des jeux, le Gouvernement est flou. Ce n'est pas un jeu à somme nulle !

Je comprends mal de plus où il veut en venir en matière de régulation, et je conteste le recours aux ordonnances.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Le jeu n'est pas une marchandise comme les autres. L'Observatoire des jeux et beaucoup d'associations qui luttent contre les addictions, avec beaucoup de pugnacité, nous alertent sur le nombre de joueurs à risque excessif, au nombre de 300 000, et sur l'augmentation des joueurs à risque modéré - qui seraient un million. On peut estimer qu'une progression du chiffre d'affaires de 1 % représente environ un millier de joueurs à risque pathologique ou modéré, en plus. Or un actionnaire privé, tenté de maximiser sa rentabilité et d'accroître son chiffre d'affaires, mènera une politique commerciale plus agressive. En 2014, le Rapido, extrêmement addictif, a ainsi pu être interdit par la FDJ, entreprise publique. En aurait-il été de même avec un opérateur privé ?

Mme Anne-Catherine Loisier.  - Pourquoi, monsieur le ministre, vouloir, comme le dit l'objet de votre amendement, « libérer les capacités d'ouverture au monde... » concernant le jeu ? Le Gouvernement ignore la loi de 2010 qui évoquait les équilibres économiques des filières concernées, telle l'équine, représentant de nombreux emplois dans nos territoires.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Ce débat est étrange. Soit les jeux de hasard sont dangereux et il faut nationaliser le PMU et les casinos...

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Et pourquoi pas ?

M. Bruno Le Maire, ministre.  - ... soit l'on y voit une activité commerciale, qui doit être exercée par des acteurs privés. Je le crois profondément, comme je crois qu'il n'est pas du rôle de l'État de s'occuper de boutiques et d'hôtels d'aéroports. Notre politique vise à assurer une telle cohérence.

Cela ne retire aucune compétence à l'État régulateur. C'est même plus cohérent ainsi, car l'État qui commercialise des jeux et se soucie de santé publique est juge et partie. Je demande à chacun de bien réfléchir à cet argument.

Merci à M. Gay d'avoir fait la différence entre les dividendes - inférieurs à 100 millions d'euros - et les revenus qu'apporte la fiscalité à l'État - supérieurs à 3 milliards. Ministre de l'Économie et des Finances, je préfère toujours 3 milliards d'euros à 100 millions d'euros... Nous veillons aux intérêts de l'association Les Gueules cassées ; l'État restera actionnaire à hauteur de 20 % pour garantir la stabilité des dividendes qui leur reviennent.

Nous faisons attention au lien entre les buralistes et la FDJ. Ils pourront souscrire, mais ils n'auront pas de droit de souscription préférentiel. Les Français sont attachés au loto du patrimoine comme à Stéphane Bern dont nous voulons éviter les réactions parfois énergiques...

Nous garantissons que le loto du patrimoine sera maintenu.

C'est une bonne affaire pour la Française des jeux - le nouvel actionnaire souhaitera certainement le conserver - mais nous le garantirons noir sur blanc dans la convention signée avec l'État.

La lutte contre les addictions n'est pas satisfaisante actuellement, car l'État, schizophrène, à la fois juge et partie, a intérêt à l'addiction et veut lutter contre.

Si la Française des jeux est privatisée, il n'y aura qu'une seule régulation pour cette entreprise, le PMU et les paris en ligne. Elle reviendra à une autorité administrative indépendante dotée d'une compétence générale sur ces sujets, qui contrôlera les points de vente en second niveau, c'est-à-dire le sérieux des contrôles des opérateurs de premier niveau sur les points de vente. L'autorité disposera à cette fin de tous les rapports et résultats des inspections des points de vente, et devra informer les ministères compétents des abus ou manquements des détaillants.

Madame Primas, les catégories de jeux exploitables par les deux opérateurs resteront déterminées par décret et les taux de retour aux joueurs seront déterminés par arrêté, dans le respect des gammes définies par le pouvoir réglementaire. L'autorité autorisera ou non les jeux nouveaux, dans le cadre ainsi fixé. Tout ce qui conditionne l'addiction, le taux de retour aux joueurs, et le type de jeu, singulièrement, reste donc dans les mains des pouvoirs publics. Cela devrait vous rassurer.

M. Jean-Louis Tourenne.  - L'alibi de la simplification et de l'alignement sert souvent à déréglementer les secteurs. Votre raisonnement sur l'alignement du PMU et des casinos est à cet égard un peu juste...

Vous nous dites, et je pourrais vous rejoindre, qu'il est difficile d'être juge et partie. Mais l'État n'aurait-il plus aucun intérêt à l'augmentation du chiffre d'affaires de la FDJ, via la fiscalité par exemple ? Vous nous apportez des garanties certes, mais orales. La commission spéciale a jugé qu'elles étaient insuffisantes. La sagesse ordonne au minimum de surseoir à la décision.

Mme Françoise Gatel.  - Le PMU n'est pas un opérateur de même nature que les casinos : ses bénéfices financent une filière particulièrement performante en France, qui structure nos territoires. Comment garantissez-vous qu'elle sera préservée ?

L'amendement n°266 n'est pas adopté.

L'article 51 demeure supprimé.

Mme la présidente. - Il est minuit passé. Je vous propose de continuer jusqu'à minuit et demi. (Assentiment)

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°901 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 51

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  A.  -  Il est institué un prélèvement sur le produit brut des jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne mentionnés au I de l'article 51 de la présente loi.

Le prélèvement est dû par la personne morale chargée de l'exploitation des jeux de loterie mentionnés au premier alinéa du présent I.

Le prélèvement est assis sur le produit brut des jeux, constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants. Les sommes engagées par les joueurs à compter du 1er janvier 2020 sont définies comme des sommes misées à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, y compris celles apportées par l'opérateur à titre gracieux. Les sommes versées ou à reverser aux gagnants sont constituées de l'ensemble des gains en numéraire ou en nature versés ou à reverser aux joueurs à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, à l'exclusion des sommes en numéraire ou en nature attribuées à titre gracieux à certains joueurs dans le cadre d'actions commerciales.

Le taux du prélèvement est fixé à 54,5 % pour les jeux de tirage traditionnels dont le premier rang de gain est réparti en la forme mutuelle et à 42 % pour les autres jeux de loterie.

L'exigibilité du prélèvement est constituée par la réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu. Pour les jeux de loterie pour lesquels l'intervention du hasard est antérieure à la mise à disposition du support de jeu, l'exigibilité du prélèvement est constituée par l'affectation au jeu des mises engagées par le joueur.

Le produit du prélèvement est déclaré et liquidé par la personne morale chargée de l'exploitation des jeux de loteries mentionnés au I de l'article 51 de la présente loi sur une déclaration mensuelle dont le modèle est fixé par l'administration. Elle est déposée, accompagnée du paiement, dans les délais fixés en matière de taxe sur le chiffre d'affaires.

Dans le cas où le produit brut des jeux calculé au titre d'un mois est négatif, celui-ci vient en déduction du produit brut des jeux calculé au titre des mois suivants.

Le prélèvement est recouvré et contrôlé selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes. 

B.  -  Le prélèvement mentionné au A du présent I donne lieu au versement, au comptable public compétent, d'un acompte au titre du mois de décembre effectué chaque année au mois de décembre dans des conditions fixées par décret.

Le montant de cet acompte est égal au montant du prélèvement dû au titre du mois de novembre de la même année.

Si l'acompte versé est inférieur au prélèvement dû au titre du mois de décembre, le complément est acquitté au mois de janvier qui suit le versement de l'acompte dans des conditions fixées par décret.

Si l'acompte versé est supérieur au prélèvement dû au titre du mois de décembre, l'excédent est déduit des versements suivants.

II.  -  A.  -  Il est institué un prélèvement au profit de l'État sur les sommes misées par les joueurs dans le cadre des jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne ainsi que des jeux de paris sportifs commercialisés en réseau physique de distribution mentionnés au I de l'article 51 de la présente loi.

Ce prélèvement est dû par la personne morale chargée de l'exploitation des jeux de loterie et de paris sportifs mentionnés à l'alinéa précédent.

Pour les jeux autres que les jeux instantanés, la fraction prélevée est constituée des lots et gains non réclamés par les gagnants à l'expiration des délais de forclusion fixés par les règlements de ces jeux. Pour les jeux instantanés, elle est constituée par le solde de la part des mises allouées aux joueurs sous la forme de lots et gains, après déduction des lots payés à l'expiration des délais de forclusion fixés par les règlements de ces jeux.

La fraction prélevée est également constituée des lots et gains non réclamés dans les conditions fixées à l'alinéa précédent afférents à des prises de jeux syndiquées entre joueurs et groupes de joueurs, après déduction des parts sur lesquelles les joueurs n'ont pas engagé de mise, ainsi que de ceux afférents à ces dernières.

Ce prélèvement est recouvré chaque année, pour les jeux et événements dont le paiement est forclos, dans des conditions fixées par décret. Il est contrôlé selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes.

B.  -  Le A du présent II s'applique aux lots et gains versés à compter du 1er janvier 2020, à l'exception des lots et gains de premier rang de répartition et mis en jeu dans le cadre des jeux de paris sportifs organisés en la forme mutuelle et de tirage traditionnel, ainsi que des lots et gains de premier rang des jeux de tirage additionnels. La personne morale mentionnée au A du même II remet en jeu les lots et gains de premier rang mentionnés au A du même II dans le cadre de jeux ou opérations promotionnelles organisés ultérieurement.

III.  -  Le code général des impôts est ainsi modifié :

A.  -  L'article 302 bis ZH est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Les mots : « l'article 42 de la loi de finances pour 1985 (n° 84-1208 du 29 décembre 1984) » sont remplacés par les mots : « le I de l'article 51 de la loi n°        du       relative à la croissance et la transformation des entreprises » ;

b) Après le mot : « sur », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « le produit brut des jeux, constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants. » ;

2° Au second alinéa, les mots : « l'article 42 de la loi de finances pour 1985 » sont remplacés par les mots : « le I de l'article 51 de la loi n°      du       relative à la croissance et la transformation des entreprises ».

B.  -  Le premier alinéa de l'article 302 bis ZJ est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les prélèvements mentionnés aux articles 302 bis ZG et 302 bis ZI sont assis sur le montant des sommes engagées par les joueurs. Les gains réinvestis par ces derniers sous forme de nouvelles mises sont également assujettis à ces prélèvements.

« Le prélèvement mentionné à l'article 302 bis ZH est assis sur le produit brut des jeux, constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants. Les sommes engagées par les joueurs à compter du 1er janvier 2020 sont définies comme des sommes misées à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, y compris celles apportées par l'opérateur à titre gracieux. Les sommes versées ou à reverser aux gagnants sont constituées de l'ensemble des gains en numéraire ou en nature versés ou à reverser aux joueurs à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, à l'exclusion des sommes en numéraire ou en nature attribuées à titre gracieux à certains joueurs dans le cadre d'actions commerciales. ».

C.  -  Le deuxième alinéa de l'article 302 bis ZK est ainsi rédigé :

« 31,5 % du produit brut des jeux au titre des paris sportifs commercialisés en réseau physique de distribution et 38 % du produit brut des jeux au titre des paris sportifs en ligne ; ».

D.  - L'article 1609 novovicies est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Un prélèvement de 5,1 % est effectué sur le produit brut des jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne mentionnés au I de l'article 51 de la loi n°       du        relative à la croissance et la transformation des entreprises. Le produit brut des jeux est constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants. Les sommes engagées par les joueurs à compter du 1er janvier 2020 sont définies comme des sommes misées à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, y compris celles apportées par l'opérateur à titre gracieux. Les sommes versées ou à reverser aux gagnants sont constituées de l'ensemble des gains en numéraire ou en nature versés ou à reverser aux joueurs à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, à l'exclusion des sommes en numéraire ou en nature attribuées à titre gracieux à certains joueurs dans le cadre d'actions commerciales. »

2° Le troisième alinéa est supprimé ;

3° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé : 

« L'exigibilité du prélèvement est constituée par la réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu. Pour les jeux de loterie pour lesquels l'intervention du hasard est antérieure à la mise à disposition du support de jeu, l'exigibilité du prélèvement est constituée par l'affectation au jeu des mises engagées par les joueurs. »

E.  -  L'article 1609 tricies est ainsi rédigé :

« Art. 1609 tricies.  -  Il est institué, pour les paris sportifs, un prélèvement assis sur le produit brut des jeux, constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants. Les sommes engagées par les joueurs à compter du 1er janvier 2020 sont définies comme des sommes misées à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, y compris celles apportées par l'opérateur à titre gracieux. Les sommes versées ou à reverser aux gagnants sont constituées de l'ensemble des gains en numéraire ou en nature versés ou à reverser aux joueurs à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, à l'exclusion des sommes en numéraire ou en nature attribuées à titre gracieux à certains joueurs dans le cadre d'actions commerciales.

« Ce prélèvement est dû par la personne morale chargée de l'exploitation des jeux de paris sportifs commercialisés en réseau physique de distribution mentionnée au I de l'article 51 de la loi n°       du       relative à la croissance et la transformation des entreprises et par les personnes devant être soumises, en tant qu'opérateur de paris sportifs en ligne, à l'agrément mentionné à l'article 21 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard.

« Le taux de ce prélèvement est fixé à 7,5 % du produit des jeux pour les paris sportifs commercialisés en réseau physique de distribution et à 12 % pour les paris sportifs en ligne.

« Le produit de ce prélèvement est affecté à l'Agence nationale du sport chargée de la haute performance sportive et du développement de l'accès à la pratique sportive dans la limite du plafond fixé au I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.

« L'exigibilité du prélèvement est constituée par la réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu. »

IV.  -  Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

A.  -  Le I de l'article L. 136-7-1 est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Il est institué une contribution sur le produit brut des jeux dans le cadre des jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne mentionnés au I de l'article 51 de la loi n°       du        relative à la croissance et à la transformation des entreprises. Cette contribution est assise sur le produit brut des jeux, constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants. Les sommes engagées par les joueurs à compter du 1er janvier 2020 sont définies comme les sommes misées à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, y compris celles apportées par l'opérateur à titre gracieux. Les sommes versées ou à reverser aux gagnants sont constituées de l'ensemble des gains en numéraire ou en nature versés ou à reverser aux joueurs à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, à l'exclusion des sommes en numéraire ou en nature attribuées à titre gracieux à certains joueurs dans le cadre d'actions commerciales. » ;

2° Au second alinéa, après les mots : « et sanctions que », la fin de la phrase est ainsi rédigée : « le prélèvement prévu au I de l'article... de la loi n°       du      relative à la croissance et la transformation des entreprises. »

B.  -  Au 3° du I de l'article L. 136-8, le taux : « 8,6 % » est remplacé par le taux : « 6,2 % » ;

C.  -  L'article L. 137-21 est ainsi rédigé :

« Art. L.137-21.  -  Il est institué, pour les paris sportifs, un prélèvement assis sur le produit brut des jeux, constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants. Les sommes engagées par les joueurs à compter du 1er janvier 2020 sont définies comme des sommes misées à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, y compris celles apportées par l'opérateur à titre gracieux. Les sommes versées ou à reverser aux gagnants sont constituées de l'ensemble des gains en numéraire ou en nature versés ou à reverser aux joueurs à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, à l'exclusion des sommes en numéraire ou en nature attribuées à titre gracieux à certains joueurs dans le cadre d'actions commerciales.

« Ce prélèvement est dû par la personne morale chargée de l'exploitation des jeux de paris sportifs commercialisés en réseau physique de distribution mentionnée au I de l'article 51 de la loi n°       du      relative à la croissance et à la transformation des entreprises et par les personnes devant être soumises, en tant qu'opérateur de paris sportifs en ligne, à l'agrément mentionné à l'article 21 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard.

« Le taux de ce prélèvement est fixé à 7,5 % du produit des jeux pour les paris sportifs commercialisés en réseau physique de distribution et à 12 % pour les paris sportifs en ligne.

« L'exigibilité du prélèvement est constituée par la réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu. »

V.  -  L'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

A.  -  Le I de l'article 18 est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Il est institué une contribution sur le produit brut des jeux dans le cadre des jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne mentionnés au I de l'article 51 de la loi n°       du       relative à la croissance et à la transformation des entreprises. Cette contribution est assise sur le produit brut des jeux, constitué par la différence entre les sommes misées par les joueurs et les sommes versées ou à reverser aux gagnants. Les sommes engagées par les joueurs à compter du 1er janvier 2020 sont définies comme des sommes misées à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, y compris celles apportées par l'opérateur à titre gracieux. Les sommes versées ou à reverser aux gagnants sont constituées de l'ensemble des gains en numéraire ou en nature versés ou à reverser aux joueurs à compter de la date de réalisation du ou des événements sur lesquels repose le jeu, à l'exclusion des sommes en numéraire ou en nature attribuées à titre gracieux à certains joueurs dans le cadre d'actions commerciales. » ;

2° Après le mot : « que », la fin du second alinéa est ainsi rédigée : « le prélèvement prévu au I de l'article... de la loi n°       du       relative à la croissance et la transformation des entreprises. ».

B.  -  À la seconde phrase de l'article 19, le taux : « 3 % » est remplacé par le taux : « 2,2 % ».

VI.  -  Les fonds mentionnés aux articles 13 et 14 du décret n° 78-1067 du 9 novembre 1978 relatif à l'organisation et à l'exploitation des jeux de loterie autorisés par l'article 136 de la loi du 31 mai 1933 et de l'article 48 de la loi n° 94-1163 du 29 décembre 1994 sont clos à compter du 1er janvier 2020.

Les sommes déposées sur les fonds mentionnés au premier alinéa du présent VI sont versées à l'État avant une date fixée par décret qui ne peut être postérieure au 31 décembre 2025.

VII.  -  Le troisième alinéa de l'article 42 de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984 de finances pour 1985, l'article 6 de la loi n° 86-824 du 11 juillet 1986 de finances rectificative pour 1986 et l'article 88 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 sont abrogés.

Dans toutes les dispositions législatives en vigueur, les mots « à l'article 88 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 » sont remplacés par les mots « au I de l'article... de la loi n°       du        relative à la croissance et la transformation des entreprises ».

VIII.  -  Le présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2020.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Cet amendement, dans la perspective de cette privatisation, met en place une fiscalité qui sécurise les prélèvements publics en reposant sur une assiette unique.

L'activité a été segmentée, distinguant les paris sportifs en ligne, les paris sportifs en point de vente, les jeux de tirage traditionnels et les loteries. Tout cela sans baisse des recettes ni hausse des prélèvements, mais en garantissant la stabilité du retour fiscal pour l'État de l'activité des jeux de hasard.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°1030 à l'amendement n°901 rectifié du Gouvernement, présenté par M. de Montgolfier.

Amendement n° 901

I.  -  Après l'alinéa 14

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

C.  -  Les jeux dédiés au patrimoine organisés par la personne morale chargée de l'exploitation des jeux de loterie mentionnés au premier alinéa du présent I ne sont pas soumis :

1° À la contribution sociale généralisée prévue par les articles L. 136-7-1 et L. 136-8 du code de la sécurité sociale ;

2° À la contribution instituée par l'article 18 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale ;

3° Au prélèvement institué par l'article 1609 novovicies du code général des impôts ;

4° À la taxe sur la valeur ajoutée au taux en vigueur applicable en vertu du 2° de l'article 261 E du même code.

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet amendement par trois paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée pour les jeux dédiés au patrimoine est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de l'exonération de la contribution sociale généralisée et de la contribution relative au remboursement de la dette sociale pour les jeux dédiés au patrimoine est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour l'Agence nationale du sport chargée de la haute performance et du développement de l'accès à la pratique sportive de l'exonération de prélèvement pour les jeux dédiés au patrimoine est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Albéric de Montgolfier.  - Ce sous-amendement a déjà été voté par le Sénat, dans le projet de loi de finances de 2019, qui n'a malheureusement pas été suivi par l'Assemblée nationale. Il exonère le loto du patrimoine de toute fiscalité. Stéphane Bern le disait devant la commission de la culture : 86 % des Français y sont favorables et les ventes de tickets ont crû de 30 %. Ces joueurs supplémentaires ne viennent pas pour être taxés, mais pour aider le patrimoine. Chaque année, 22 % du produit de la loterie royale britannique - le modèle en la matière - va, sans taxation, à différentes causes, dont le patrimoine.

Dans un contexte où il y a beaucoup d'interrogations sur l'emploi, sur l'animation des territoires les plus ruraux, il est bon de soutenir le tourisme, y compris dans les zones les plus reculées, particulièrement en ce moment.

M. Philippe Mouiller.  - Très bon amendement !

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°1034 à l'amendement n°901 rectifié du Gouvernement, présenté par M. Husson, au nom de la commission.

Amendement n° 901

I.  -  Alinéas 29, 39 et 51

1° Deuxième phrase

Après les mots :

sur lesquels repose le jeu

supprimer la fin de cette phrase.

2° Dernière phrase

Après les mots :

sur lesquels repose le jeu,

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

y compris les gains résultant de sommes apportées par l'opérateur, à condition que le joueur puisse en demander le versement en numéraire ou sur son compte de paiement.

II.  -  Alinéa 31

Remplacer le taux : 

31,5 %

par le taux :

27,9 %

et le taux :

38 %

par le taux :

33,7 %

III.  -  Alinéas 41 et 53

Remplacer le taux : 

7,5 %

par le taux :

6,6 %

et le taux :

12 %

par le taux :

10,6 %

IV.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant des I à III, compléter cet amendement par trois paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État de la prise en compte des sommes apportées par l'opérateur dans les gains ainsi que de la diminution du taux du prélèvement sur le produit brut des jeux est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de la prise en compte des sommes apportées par l'opérateur dans les gains ainsi que de la diminution du taux du prélèvement sur le produit brut des jeux est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour l'Agence nationale du sport chargée de la haute performance et du développement de l'accès à la pratique sportive de la prise en compte des sommes apportées par l'opérateur dans les gains ainsi que de la diminution du taux du prélèvement sur le produit brut des jeux est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-François Husson, rapporteur.   - L'amendement n°901 rectifié du Gouvernement propose de modifier la fiscalité des jeux offerts par la Française des jeux sous droits exclusifs.

Ce sous-amendement adapte la réforme aux réalités du marché des jeux en ligne, en opérant trois modifications. Il tient compte des gratifications commerciales proposées par les opérateurs de paris sportifs. Il définit le prélèvement par cohérence au taux de retour joueur moyen constaté au cours des quatre dernières années. Il maintient l'écart actuel de fiscalité entre les paris sportifs distribués en points de vente et les partis sportifs en ligne, en ajustant le taux du prélèvement sur les paris sportifs en réseau physique de distribution.

Comme pour ADP, le Sénat a rejeté la privatisation ; cela ne l'empêche pas de travailler à la rénovation de la fiscalité sur les jeux - aujourd'hui archaïque, puisque déterminée par arrêté du ministre du Budget.

Ce changement d'assiette est vertueux du point de vue de la lutte contre les addictions. Avis favorable sous réserve de l'adoption du sous-amendement n°1034. Avis favorable à l'amendement n°1030, évidemment.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Sagesse pour le sous-amendement n°1034, qui met le doigt sur un problème important.

La fiscalité du loto du patrimoine est un long débat...

M. Albéric de Montgolfier.  - Tranchez-le ce soir !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je connais les positions de Stéphane Bern - elles sont respectables...

La part de prélèvement est habituellement de 17 %. Dans le cas d'espèce, ramené à 7 %, nous ne gardons que la TVA, la CSG et la CRDS et le financement du sport. Avis défavorable.

Mme Laure Darcos.  - Pourquoi le loto sportif ne pourrait-il pas soutenir aussi le patrimoine ?

Stéphane Bern est revenu nous voir car il a senti une adhésion de la chambre haute, qui représente les territoires. Les projets qui dépendaient de la réserve parlementaire ne vivent aujourd'hui que grâce au loto du patrimoine. Comment forcerez-vous un opérateur privé dont il ne détiendra que 20 % à le conserver en l'état ?

Mme Marie-Pierre Monier.  - Je suis d'accord. Je voterai le sous-amendement de M. de Montgolfier. Stéphane Bern nous l'a dit, avec brio et humour, cela n'a pas été facile de défendre le fait qu'une bonne partie des taxes aillent au patrimoine, après moult gels, dégels, regels...

M. François Bonhomme.  - Le loto du patrimoine suscite un engouement sans pareil des Français, qui ont eu le sentiment de savoir vers quoi était fléché leur argent.

À la dernière loi de finances, vous semblez revenir sur le projet en prélevant 7 %. L'État, par « une argutie de la technostructure » - pour reprendre les propos de Stéphane Bern - parasite le loto pour se refaire la cerise...

Je ferai appel à votre amour de la littérature, monsieur le ministre : parmi les 269 sites retenus, figurent la maison de Pierre Loti à Rochefort, l'hôtel de Polignac à Condom, le château de Bussy-Rabutin à Bussy-le-Grand et la maison d'Aimé Césaire à Fort-de-France. Nul doute que l'écrivain que vous êtes aussi y sera sensible !

Mme Françoise Gatel.  - Le patrimoine n'est pas la contemplation nostalgique du passé, mais la source de toute une économie touristique, vitale pour nos territoires ! L'association des petites cités de caractère de France que je préside en porte témoignage : certaines des communes adhérentes n'ont que 300 habitants et y maintiennent une activité économique grâce à la préservation et à l'entretien de leur patrimoine.

Bravo au Gouvernement qui a accepté que les Français - dans une démarche participative - exercent ainsi une compétence de l'État.

Vous ne m'avez pas répondu sur l'équilibre de la filière équine.

Quel dommage de racketter la bonne volonté de nos concitoyens !

M. Martial Bourquin.  - L'amendement du Gouvernement ne règle pas le problème du plafonnement des taxes, qui abondent le CNDS et ont été réduites de moitié entre 2017 et 2018.

Tous les investissements dans le sport, dans nos villes, nos quartiers, nos villages, seront-ils maintenus ? Aujourd'hui, beaucoup de dossiers n'avancent pas.

Je ne suis pas sûr que la FDJ privatisée continuera à financer le loto du patrimoine. Or plusieurs milliers de monuments attendent d'être rénovés, qui en ont besoin !

M. Olivier Paccaud.  - Je soutiendrai le sous-amendement n°1030 et j'insiste à mon tour sur la problématique de la ruralité. Le loto du patrimoine abondera les travaux de près de 300 sites, ruraux pour la plupart, souvent pour de petites sommes, entre 10 euros et 50 000 euros. Jadis, la réserve parlementaire y pourvoyait...

M. Roland Courteau.  - Eh oui !

M. Olivier Paccaud.  - Ces 20 millions sont à mettre en regard des 500 millions d'euros consacrés à la rénovation du Grand Palais. S'il faut naturellement valoriser nos fleurons, abandonner la mosaïque de vieilles pierres de nos territoires serait une erreur colossale. (On approuve sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je soutiens le sous-amendement de M. de Montgolfier. Le loto du patrimoine a été un succès auprès de nos concitoyens qui pensaient ainsi, en toute bonne foi, contribuer à la restauration d'un patrimoine souvent rural. Annoncer au dernier moment que ces sommes seront taxées est d'une mesquinerie sordide !

Rien n'est trop beau pour les impatriés, on supprime l'exit tax, mais quand il s'agit de notre patrimoine culturel commun, on grappille le moindre euro ! Tout cela tue la confiance en la politique et en l'État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Anne-Catherine Loisier.  - Monsieur le ministre, pourquoi ne faire bénéficier que la FDJ des prélèvements sur les jeux ? Un opérateur comme le PMU pourrait en faire bénéficier les territoires.

Le sous-amendement n°1030 est adopté.

(Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, SOCR et UC)

Mme la présidente.  - Monsieur le ministre, vous avez émis un avis de sagesse sur le sous-amendement n°1034. Levez-vous le gage ? (Le ministre y est encouragé sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je lève le gage, et je veux redire au Sénat mon attachement à notre patrimoine. (Marques de satisfaction) Le maintien du loto du patrimoine, qui a été un vrai succès, figurera noir sur blanc dans la convention entre l'État et le futur opérateur.

Monsieur Bonhomme, je vous accompagnerai avec plaisir visiter l'hôtel de Polignac à Condom, où j'ai des attaches familiales.

Mme la présidente.  - Ce sera le sous-amendement n°1034 rectifié.

Le sous-amendement n°1034 rectifié est adopté.

L'amendement n°910 rectifié, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 51 BIS (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°267, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

 L'article 5 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation des jeux d'argent et de hasard est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Il est interdit de vendre ou d'offrir gratuitement à des mineurs des jeux d'argent et de hasard sur les hippodromes et dans les points de vente autorisés à commercialiser des jeux de loterie, des jeux de pronostics sportifs ou des paris sur les courses hippiques proposés au public conformément aux dispositions de l'article 136 de la loi du 31 mai 1933 portant fixation du budget général de l'exercice 1933, de l'article 42 de la loi de finances pour 1985 (n° 84-1208 du 28 décembre 1984) et de la loi du 2 juin 1891 ayant pour objet de réglementer l'autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux.

« La personne physique qui commercialise directement auprès du client les jeux d'argent et de hasard dans les lieux mentionnés à l'avant-dernier alinéa du présent article peut exiger du client qu'il établisse la preuve de sa majorité. »

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Il s'agit de rétablir le contrôle sur les mineurs afin de protéger ces derniers des risques liés au jeu.

M. Jean-François Husson, rapporteur.  - Avis défavorable. Nous partageons l'objectif mais cette disposition n'a pas de lien avec l'objet du projet de loi Pacte.

M. Philippe Mouiller.  - C'est vrai, mais le sujet est important : c'est une question de santé publique. Je voterai cet amendement.

M. Fabien Gay.  - Nous le voterons également, par cohérence.

L'amendement n°267 est adopté et l'article 51 bis est rétabli.

L'amendement n°713 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Nous avons examiné 91 amendements ; il en reste 223.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi février 2019, à 14 h 30.

La séance est levée à minuit et demi.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Annexes

Ordre du jour du mercredi 6 février 2019

Séance publique

À 14 h 30 et le soir

Présidence : M. David Assouline M. Vincent Delahaye

Secrétaires : Mme Catherine Deroche - M. Victorin Lurel

- Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises (texte de la commission n° 255, 2018-2019).

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°48 sur l'amendement n°177 rectifié, présenté par M. Roger Karoutchi et plusieurs de ses collègues, l'amendement n°224 rectifié, présenté M. Fabien Gay et les membres du groupe CRCE, l'amendement n°348 rectifié bis, présenté par M. Jean-Raymond Hugonet et plusieurs de ses collègues et l'amendement n°393 rectifié, présenté M. Martial Bourquin et les membres du groupe SOCR, tendant à supprimer l'article 44 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises

Résultat du scrutin :

Nombre de votants :343

Suffrages exprimés :324

Pour :246

Contre :78

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques :

Groupe Les Républicains (145)

Pour : 124

Contre : 10 - Mme Agnès Canayer, MM. Patrick Chaize, Édouard Courtial, Charles Guené, Jean-François Husson, Alain Joyandet, Ronan Le Gleut, Gérard Longuet, Jean-François Mayet, Albéric de Montgolfier

Abstentions : 10 - M. Philippe Bas, Mmes Marie-Thérèse Bruguière, Dominique Estrosi Sassone, M. Bruno Gilles, Mmes Fabienne Keller, Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Cyril Pellevat, Cédric Perrin, Michel Raison

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe SOCR (74)

Pour : 74

Groupe UC (51)

Pour : 5 - M. Bernard Delcros, Mmes Françoise Férat, Sophie Joissains, Anne-Catherine Loisier, M. Jean-Marie Mizzon

Contre : 37

Abstentions : 8 - M. Vincent Delahaye, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Jocelyne Guidez, MM. Laurent Lafon, Jean-Claude Luche, Mmes Sonia de la Provôté, Nadia Sollogoub, Michèle Vullien

N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Valérie Létard, Président de séance

Groupe LaREM (23)

Contre : 23

Groupe RDSE (22)

Pour : 20

Contre : 1 - Mme Véronique Guillotin

Abstention : 1 - M. Jean-Marc Gabouty

Groupe CRCE (16)

Pour : 16

Groupe Les Indépendants (12)

Pour : 5 - MM. Alain Fouché, Joël Guerriau, Jean-Louis Lagourgue, Alain Marc, Dany Wattebled

Contre : 7

Sénateurs non inscrits (5)

Pour : 2

N'ont pas pris part au vote : 3 - Mme Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier

Scrutin n°49 sur l'amendement n°227 rectifié, présenté M. Fabien Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et l'amendement n°396 rectifié, présenté M. Martial Bourquin et les membres du groupe socialiste et républicain, tendant à supprimer l'article 47 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises.

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 343

Suffrages exprimés : 341

Pour : 90

Contre : 251

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (145)

Contre : 141

Abstentions : 2 - MM. Philippe Dominati, Roger Karoutchi

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, président du Sénat, Mme Catherine Troendlé, président de séance

Groupe SOCR (74)

Pour : 74

Groupe UC (51)

Contre : 51

Groupe LaREM (23)

Contre : 23

Groupe du RDSE (22)

Contre : 22

Groupe CRCE (16)

Pour : 16

Groupe Les Indépendants (12)

Contre : 12

Sénateurs non inscrits (5)

Contre : 2

N'ont pas pris part au vote : 3 - Mme Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier