Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site internet du Sénat et sur Facebook.

J'espère que mon appel au respect des uns et des autres et à celui du temps de parole ne sera pas un voeu pieux.

Conséquences de la sécheresse

Mme Josiane Costes .  - Si l'épisode de grande sécheresse qui dure depuis le printemps dernier prend fin, ses conséquences se feront sentir encore plusieurs mois sur nos agriculteurs. De nombreuses exploitations sont en difficulté, avec un effet domino pour les producteurs de fromage. Dans le Cantal, beaucoup d'éleveurs ont dû acheter prématurément du foin ; le niveau habituel de production de salers ne sera pas atteint, faute de pâturage de qualité.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé des mesures complémentaires aux aides européennes la semaine dernière. Nos exploitants ont besoin d'un soutien rapide et efficace.

Comment agir en amont pour limiter les effets des sécheresses, qui seront récurrentes ? Quel regard portez-vous sur les retenues d'eau, qui doivent à mon avis être encouragées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ; quelques applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Merci d'abord pour le travail de la Haute Assemblée sur ces sujets. L'État est au rendez-vous de la sécheresse. Des mesures ont été annoncées, telle l'exonération de taxe foncière. Trois comités des calamités agricoles seront réunis en décembre, janvier et février. Nous répondons à la détresse des exploitations.

Plus largement, nous ne pouvons pas continuer à regarder l'eau tomber pendant six mois et à en chercher les six mois suivants. J'étais sur le terrain dans la Meuse et dans les Vosges la semaine dernière. Nous travaillons avec M. de Rugy et Mme Wargon pour étudier les projets d'investissement. Des études précises sur les ressources en eau et les réserves seront lancées dès janvier 2019, territoire par territoire ; puis nous verrons, avec la deuxième phase des Assises de l'eau, comment répondre à ce défi majeur de manière concrète et pragmatique, micro-territoire par micro-territoire.

En tout cas, les grandes retenues d'eau, c'est fini. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe RDSE ; M. Pierre-Yves Collombat, Mme Pascale Gruny et M. Jean-Paul Émorine applaudissent également.)

Mme Josiane Costes.  - Merci. Les agriculteurs souffrent. Protégeons les productions qui sont les fleurons de notre gastronomie. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs du groupe UC ; M. David Assouline applaudit également.)

Réforme de l'État

M. le président.  - La parole est à Mme Cécile Cukierman, qui est quand même arrivée au Sénat ! (Sourires)

Mme Cécile Cukierman .  - Monsieur le Premier ministre, vous venez de présenter un vaste plan de destruction de la fonction publique. (On s'amuse à droite.) Vous poursuivez le vieux rêve d'un État faible face aux intérêts privés. Cinquante mille fonctionnaires en moins, après la diminution de 11 % depuis vingt ans, casse du statut et recours massif aux contractuels, réduction de 70 000 postes dans la fonction publique territoriale, c'est un non-sens, alors que les collectivités locales compensent les défaillances de l'État. Les points de contact que vous préconisez existent déjà : ce sont les mairies !

Monsieur le Premier ministre, votre voie est sans issue. La casse du service public brise le lien social et territorial au sein de la République. C'est une voie sans issue. Nous attendons de votre part un sursaut républicain pour stopper la saignée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - (Marques de déception à gauche) Je me réjouis que vous ayez pu rejoindre Paris malgré la neige, madame la sénatrice, et saisis l'occasion de saluer le travail des fonctionnaires. (Exclamations sur les bancs du groupe CRCE)

C'est justement parce que nous sommes attachés au service public que nous menons une réforme de transformation. Nous allons simplifier le dialogue social, tout en garantissant les droits des agents, pour donner plus d'opportunités de mobilité, plus de réactivité à l'administration. Nous allons mieux reconnaître l'engagement des agents via un intéressement, individuel ou collectif. Nous allons donner aux employeurs publics plus de liberté dans le recrutement, sans remettre en cause le principe de l'occupation des emplois par des agents titulaires.

Une voix sur le banc du groupe CRCE.  - On ne comprend rien !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Nous allons mieux accompagner les transitions professionnelles, améliorer la transparence sur les emplois publics, former les agents pour leur offrir un avenir, des perspectives d'emploi dans la fonction publique, voire, pour ceux qui le souhaitent, dans le secteur privé.

Le Premier ministre a donné la priorité à la proximité dans la réorganisation territoriale, autour du département. Les trésoreries de la Loire, par exemple, seront préservées. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

Mme Cécile Cukierman.  - Cette nuit, dans mon département, nous avons manqué de fonctionnaires ! Certains sont restés bloqués dans leur voiture sans que personne ne vienne les secourir. Vous voulez faire une fonction publique sans fonctionnaires comme vous voulez faire un Parlement sans parlementaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs des groupes SOCR et Les Républicains)

Fiscalité

M. Martial Bourquin .  - Les augmentations des taxes sur le gasoil, le fioul, l'essence et le gaz entament dramatiquement le pouvoir d'achat des familles. (On renchérit à droite.) Cette taxation violente et aveugle est un véritable poison !

M. Julien Bargeton.  - C'est le diesel, le poison !

M. Martial Bourquin.  - Ces taxes sur l'énergie rapportent 23 milliards à l'État, et servent à boucher les trous laissés par vos cadeaux fiscaux aux plus riches... (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE) Cette fiscalité est injuste, punitive ; elle frappe indistinctement les plus fragiles, qui n'ont d'autre mode de déplacement que la voiture. Renoncerez-vous aux prochaines augmentations prévues en janvier ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et Les Républicains) Envisagez-vous une taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) flottante ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et Les Républicains)

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Je croyais, monsieur le sénateur, que votre famille politique - comme la mienne, comme le Sénat, comme les Français qui vous ont élus (Vives exclamations) - était pour que l'on agisse avec détermination contre le dérèglement climatique.

M. François Grosdidier.  - Pas comme ça !

M. François de Rugy, ministre d'État.  - Ce n'est pas une action facile à mener.

M. François Grosdidier.  - Faites payer le transit international !

M. François de Rugy, ministre d'État.  - Le climatologue Jean Jouzel, auteur de Planète, climat, réveillez-vous ! m'a alerté sur la dégradation de nos conditions de vie, y compris la destruction de valeur agricole, si nous n'agissons pas. (Protestations à droite et à gauche)

Tout le monde dit être pour la fiscalité écologique, mais quand nous la mettons en oeuvre vous dites : « C'est violent, c'est du poison ». Mais le dérèglement climatique, n'est-il pas violent ? N'est-il pas un poison pour les Français qui en subissent les conséquences ? (Huées à gauche et à droite ; applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe RDSE)

M. Martial Bourquin.  - Ce n'est pas parce qu'on peint un matraquage fiscal en vert qu'il devient écologique ! (Vifs applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux des groupes LaREM et RDSE) Nous n'avons pas de leçons à recevoir en matière d'écologie. Quelle part des 23 milliards va à la transition écologique ? Qu'est-ce que 2 000 euros, quand il faut remplacer sa voiture ? C'est du matraquage fiscal, pas de la fiscalité écologique. (Vifs applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux des groupes LaREM et RDSE)

Lutte contre l'antisémitisme

M. Jean-Pierre Decool .  - Samedi 27 octobre à Pittsburgh, un terroriste a vidé le chargeur de sa kalachnikov dans une synagogue en appelant à la mort de tous les juifs. Deux jours plus tard, une étudiante en médecine à Paris 13 a porté plainte contre des camarades voulant baptiser leur week-end d'intégration « Auschwitz 2019 » ou « Rafle 2019 », l'illustrant de la photo d'un étudiant juif brûlant dans les flammes. Souvenons-nous encore d'Ilan Halimi, de Mireille Knoll, de Sarah Halimi, de l'école Oza Hatorah à Toulouse, de l'Hyper Cacher... Les mots manquent pour répondre à la haine meurtrière qui se déverse sur notre sol et fait trembler les remparts de la démocratie.

Depuis plus de dix ans, une nouvelle vague d'antisémitisme sévit en France et notre pays reste impuissant. Les marches blanches ne suffisent plus, le devoir de mémoire s'essouffle, alors que cette honte sème le deuil et l'horreur au pays des droits de l'homme. Que faire, monsieur le ministre ? (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur .  - L'antisémitisme n'a pas de frontière, et tue. L'attaque abjecte de Pittsburgh en est l'illustration. À la demande du Premier ministre, Laurent Nunez et moi-même serons demain aux côtés de la communauté juive, respectivement à la synagogue du mouvement libéral et à celle de la Victoire, pour manifester le soutien du Gouvernement.

Personne n'oublie les attentats, les violences, les insultes ; personne n'oublie le bien-nommé gang des barbares !

Nous sentons ces vents mauvais qui soufflent sur la France. Dès samedi, j'ai donné des instructions aux préfets pour mieux protéger les synagogues mais aussi les différentes manifestations. À la suite de cet incident inacceptable, Mme Vidal a reçu le président de Paris 13 et plainte a été déposée. Trop souvent, les victimes ne le font pas. C'est pourquoi des pré-plaintes en ligne seront bientôt possibles et les effectifs de la plateforme Pharos seront doublés.

Comptez sur l'engagement total du Gouvernement. Même si, pour citer Hannah Arendt, « De tous les maux qui ont ravagé le XXe siècle, l'antisémitisme est le seul qui demeure incurable », nous mènerons un combat permanent pour le faire reculer. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes UC, Les Républicains et SOCR)

Diplomatie française

Mme Sophie Primas .  - Dans un monde en proie aux tensions, la diplomatie est l'art de jeter des ponts, de dialoguer au-delà des différences. Cela devrait nous conduire à bannir les propos inutilement blessants pour des interlocuteurs à la légitimité démocratique incontestable. Est-il constructif de dire de deux dirigeants européens, comme l'a fait le président de la République : « Ils ont raison de me désigner comme leur principal opposant » ou de se demander tout haut : « Que font ces esprits fous ? »

Un président ne devrait pas dire ça.

Depuis quelques mois, nos relations avec nos voisins européens se sont dégradées, les tensions avec la Russie se multiplient et les relations avec l'Amérique de Donald Trump s'avèrent bien différentes de ce qu'elles furent à l'origine.

Monsieur le ministre, le Breton que vous êtes sait qu'il faut contrôler ses émotions si l'on veut être respecté. La voix de la France a beaucoup à perdre si elle se laisse trop souvent aller à l'anathème de la bouche même de son Président. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - En septembre, à l'Assemblée générale des Nations unies, il y a eu deux grands discours : celui du président Trump, qui a prôné la destruction du multilatéralisme au profit du rapport de forces bilatéral ; et celui du président Macron, qui a appelé à refonder le multilatéralisme et à privilégier la coopération à la confrontation.

M. Bruno Retailleau.  - Reste à agir ainsi !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Non, la diplomatie française n'est pas isolée. C'est à l'initiative du président Macron que les sommets de réactivation des accords de Paris et de Dakar sur l'éducation se sont tenus, c'est à son initiative que se tiendra le forum de la paix qui se réunira 70 chefs d'État et de gouvernement à Paris. C'est son discours de la Sorbonne qui sert aujourd'hui de base aux propositions sur l'Europe. (Protestations à droite)

M. Bruno Retailleau.  - Des discours, toujours des discours !

M. Roger Karoutchi.  - À quand des actes ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - C'est aussi à l'initiative du président Macron qu'a été lancée l'initiative contre le financement du terrorisme. C'est encore la présence du président Macron qui a été requise par MM. Poutine et Erdogan pour établir la feuille de route pour la Syrie.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - La France est écoutée, attendue et respectée. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; huées à droite)

Mme Sophie Primas.  - Le président de la République est très bon pour faire des discours. Mais il faudra des actes pour refonder l'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Interprètes afghans

M. Jacques Le Nay .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) J'associe Nathalie Goulet à cette question. Le 20 octobre dernier, Qader Daoudzai, ancien interprète de l'armée française, était tué dans un attentat à Kaboul. Il s'apprêtait à demander un visa pour la France dans le cadre de la procédure dite de relocalisation, se sachant menacé de mort par les talibans du fait de son travail pour la France. Il répétait : « Si je ne vais pas en France, je vais mourir ». En 2015, comme 151 autres personnes dans son cas, il avait vu sa demande de visa refusée. Ses enfants de 2, 3 et 4 ans se trouvent dans un pays en guerre.

Plus de 600 auxiliaires de nos forces armées dans le monde risquent leur vie pour la France. Avant de quitter l'Afghanistan, la France avait promis de les protéger. Elle les a manifestement oubliées...

Quand allez-vous accueillir la famille de Qader Daoudzai ? Qu'allez-vous faire pour les auxiliaires locaux des forces françaises ? (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Qader Daoudzai était un ancien interprète pour l'armée française mais aussi et surtout pour l'armée américaine. Il n'a pas été ciblé personnellement mais a malheureusement été victime d'un attentat visant les opérations électorales à Kaboul.

En 2015, la France avait mis en place un dispositif dont certains interprètes afghans ont bénéficié.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Combien ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - La demande de M. Daoudzai avait été rejetée pour des raisons de sûreté nationale. Le président de la République a récemment décidé de rouvrir une procédure ; nous réinstruirons la demande pour que la famille de M. Daoudzai puisse bénéficier, si toutes les conditions sont remplies, de cette aide. La situation nouvelle créée par le décès de M. Daoudzai va nous permettre d'accélérer la procédure, si les critères sont remplis.

Deux voix à gauche.  - Lamentable !

Allocation logement accession en outre-mer

M. Michel Dennemont .  - Madame la ministre des outre-mer, vous avez annoncé le 23 octobre dernier, à l'Assemblée nationale, des mesures sur l'allocation logement accession qui ont suscité des espoirs à La Réunion. Vous avez précisé que tous les dossiers allocation logement validés mais non menés à terme seraient soldés ; et qu'à compter de 2020, un dispositif « au moins équivalent » financera l'accession sociale à la propriété et la rénovation de logements pour les propriétaires occupants, sous condition de ressources. Vous êtes venue à La Réunion : vous avez vu l'urgence de la situation des logements et insisté sur la recherche de solutions innovantes et concrètes.

Pouvez-vous nous donner des gages sur le rétablissement de l'allocation logement accession, nous confirmer que les dossiers validés seront repris - et qu'entendez-vous par « sous condition de ressources » ? Le seuil retenu sera-t-il le même que dans l'actuel dispositif, ou même en deçà ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM)

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Merci pour votre question. Je salue votre engagement pour le logement dans les outre-mer. Nous avons discuté de longues heures ici de la situation des territoires ultramarins. Je salue la présidente Primas et la rapporteure Estrosi Sassone pour la qualité des solutions trouvées et du texte voté par le Sénat il y a quelques semaines. (On s'en félicite à droite.)

Oui, les quelque mille dossiers en souffrance seront repris dans le cadre de l'allocation logement accession, il y va de la lutte contre l'insalubrité du logement outre-mer.

Nous savons cependant qu'il faudra trouver des solutions plus pérennes. Une mission a été confiée à cette fin au Conseil général de l'environnement et du développement durable, à laquelle vous serez associé. Je vous confirme que nous poursuivons le même objectif : trouver des solutions innovantes et efficaces pour l'habitat. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Pénurie de médicaments

M. Éric Gold .  - Depuis quelques jours, la pénurie de médicaments et de vaccins fait la une des journaux. Les associations de malades de Parkinson ont lancé un appel le 28 octobre à un programme d'urgence - elles ne sont pas les seules à s'inquiéter. Depuis dix ans, les alertes de pénuries ont décuplé : il y en a eu 530 en 2017 !

Un rapport du Sénat du 27 septembre dernier sur le sujet fait trente propositions. Les causes sont à chercher dans la perte d'indépendance : 40 % des médicaments sont fabriqués hors de France, 80 % des matières premières proviennent de pays extérieurs à l'Union européenne. Nous pâtissons de procédures trop longues de mise sur le marché. Les pénuries de médicaments jugés nécessaires mettent évidemment en jeu la vie de nombreux patients.

Nous avons une expertise de pointe en France ; quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement pour nous rendre notre indépendance en matière de médicaments ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et UC)

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - En effet, de nombreux pays dont la France sont touchés par des ruptures d'approvisionnement en médicaments, aussi bien à l'hôpital qu'en ville. Alors que les signalements étaient 44 en 2008, ils ont décuplé aujourd'hui - 453 en 2016 déjà. Vous l'avez dit, les causes sont nombreuses - il suffit, aussi, qu'une usine ferme aux États-Unis pour qu'un médicament fasse défaut pendant un certain temps.

La France a engagé des actions au niveau européen, grâce à la nouvelle obligation incombant aux acteurs de la fabrication et de la distribution.

Nous souhaitons nous appuyer sur le rapport sénatorial en lien avec les autres ministères et les industriels pour travailler sur trois axes : renforcer la coordination entre les acteurs nationaux et internationaux ; rétablir la confiance entre les acteurs de la filière et les usagers ; travailler en interministériel sur le désengagement de la fabrication de médicaments peu rémunérateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Fiscalité verte

M. Jacques Genest .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) M. Griveaux n'est pas là pour répondre : courage, fuyons !

Je roule en diesel, je fume des Gauloises, je me chauffe au fioul, j'habite à la campagne - je ne peux plus me faire soigner et je vais bientôt payer tout plus cher à cause de la taxe sur les camions que vous allez instaurer, sachant qu'il n'y a pas d'autres moyens que la route pour apporter des marchandises près de chez moi. Je paie, je paie toujours et je paie encore. Qui suis-je ? (Rires et vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC)

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Étant donné que vous avez gardé presque tout votre temps de parole, je gage que vous répondrez à votre question après moi ! Car je ne vois pas qui paie à la fois la taxe sur le carburant des poids lourds et celle sur les voitures, qui n'est pas la même. Il y a peu de gens qui paient les deux... (Vives protestations sur les bancs du groupe Les Républicains)

Merci d'avoir fait le parallèle avec la cigarette. Car, je le suppose, nous sommes tous ici pour lutter contre le tabagisme, qui est un problème majeur de santé publique. Et contre le tabagisme, vous conviendrez avec moi qu'il faut une action déterminée, rigoureuse, constante ; c'est la même chose face au dérèglement climatique, il faut agir avec constance, sur tous les leviers. C'est un changement profond, nécessairement difficile, car je ne connais pas de changement qui ne soit pas difficile. Et nous accompagnons les Français, nous leur donnons des moyens... (Vives exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains)

De nombreuses voix.  - Lesquels ?

M. Alain Fouché.  - C'est du racket !

M. François de Rugy, ministre d'État.  - 30 % de subvention pour changer sa cuve de fioul : voilà du concret, voilà comment on économise en préservant la planète ! (Vives exclamations et quelques huées sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Jacques Genest.  - Je fais partie de la France qui fume et qui roule au diesel, que M. Griveaux méprise... Quelle arrogance envers le peuple, de la part d'un technocrate devenu ministre ! L'environnement, nous qui vivons avec la nature, nous le respectons et le défendons. Ne nous prenez pas pour des imbéciles de culs-terreux, une infime partie de la taxe sur le carburant va à l'écologie. Arrêtez de nous faire les poches pour remplir celles des super-riches !

Mme Éliane Assassi.  - Mais c'est ce que vous avez fait pendant des décennies !

M. Jacques Genest.  - Rendez-vous le 17 novembre avec le tiers état ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC)

Chiffres du chômage et chômeurs longue durée

Mme Frédérique Puissat .  - Monsieur le Premier ministre, le nombre de demandeurs d'emplois a encore augmenté au troisième trimestre : 6,6 millions de nos concitoyens seront inscrits à Pôle Emploi, toutes catégories confondues ; 2,8 millions d'entre eux sont tombés dans le piège du chômage de longue durée.

Ce n'est pas un chômage volontaire, comme certains disent... C'est d'autant plus préoccupant que la France est le seul pays de l'Union européenne dans lequel le nombre de chômeurs ne baisse pas depuis un an. En Espagne, le taux de chômage a baissé de 44 % depuis 2014. La France est 24e sur 28 en Europe... Les chiffres sont têtus et le président de la République ne saurait camper sur une politique inefficace. Nous devons retrouver une compétitivité obérée par une dépense publique hors norme. Rien d'intangible là-dedans : ce sont des choix politiques qui nous maintiennent loin de 7 % de chômeurs visés par le président de la République à l'horizon 2022, puisque nous sommes à 9,21 %. N'est-il pas temps de changer de cap ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Le chômage de longue durée est un problème qui retient toute l'attention du Gouvernement (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains). Le chômage de longue durée est passé de 4,3 à 3,6 %. La tendance est à la baisse, même si on ne saurait se satisfaire de ce résultat. Le chômage de longue durée alimente la perte de confiance et freine l'employabilité : pour l'employeur, c'est en effet un signal négatif - et trop nombreux sont ceux qui, alors, proposent de l'emploi.

Nous y apportons une réponse structurelle : le plan de compétences permettra de former un million de chômeurs non qualifiés. Une garantie d'activité pour ceux qui reçoivent le RSA et les aides à l'insertion qui bénéficieront à 100 000 personnes de plus, voilà notre réponse innovante. Enfin, nous lançons l'appel à projet « 100 % inclusion », dont les lauréats seront annoncés dans les tout prochains jours.

Il faut prendre en compte la diversité des parcours, des territoires. Il n'y a pas de personnes inemployables. Nous faisons confiance aux acteurs et aux territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit aussi.)

Suppression de postes à l'AFPA

Mme Maryvonne Blondin .  - Avec 2 milliards d'euros en moins, le ministère du travail est la grande victime de ce budget. L'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) aura supprimé 938 postes à la fin 2020 et fermera 38 centres, sur 206. Le Gouvernement prétend investir dans les compétences, mais il réduit les moyens du premier organisme de formation, du service public de la formation : où est la cohérence ?

Un audit récent a souligné les atouts de l'AFPA - en particulier pour la prise en charge individualisée, le savoir-faire élevé des équipes, le fort taux de retour à l'emploi en particulier dans l'industrie et le BTP.

Le précédent gouvernement avait voulu faire entrer l'AFPA dans le service public de l'emploi, avec une agence nationale : vous ne prenez pas ce chemin. Que comptez-vous faire pour assurer la pérennité de l'AFPA ? Le plus gros organisme français de formation ne peut être sacrifié. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe CRCE)

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - L'AFPA connaît des difficultés depuis plusieurs années. Le rapport de l'IGF et de l'IGAS a montré qu'elle avait perdu 700 millions d'euros entre 2012 et 2016. Elle a encore perdu 78 millions d'euros cette année. Le problème, c'est que l'AFPA a cédé des parts de marché, en particulier avec les régions : 20 % des formations en six ans. Dans la région Pays de la Loire, l'AFPA a même perdu l'intégralité des formations dans l'industrie et le BTP ! Au Puy-en-Velay, pour 23 formateurs, il y a 8 stagiaires... (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains)

L'objectif est d'assurer l'avenir de l'AFPA en la transformant ; elle accompagnera 1 000 réfugiés, 30 000 demandes d'emploi parmi les plus fragiles. Ce plan supprime certes 1 541 postes, mais dans des conditions exemplaires, en concertation avec les organisations représentatives du personnel et 600 nouveaux postes sont créés. La fermeture des sites répond à une logique d'efficacité. Les demandeurs d'emploi seront ainsi rendus plus mobiles et plus innovants. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Maryvonne Blondin.  - La formation professionnelle est un droit, non une variable d'ajustement. Et, ne vous en déplaise, il ne suffit pas de traverser la rue pour trouver un emploi, il faut être bien formé. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Modes d'abattage des animaux

Mme Claudine Kauffmann .  - Notre pays se distingue par l'information rigoureuse de sa population sur les questions alimentaires. Or, les cas de Escherichia coli se multiplient à cause des abattages rituels, où le poste d'abattage n'est pas désinfecté après l'opération.

Mme Éliane Assassi.  - Cela faisait longtemps !

Mme Claudine Kauffmann.  - Escherichia coli peut provoquer des malaises et aller jusqu'à tuer les consommateurs dans l'ignorance du mode d'abattage. En cas d'infection dans une cantine scolaire, la responsabilité pénale des maires serait engagée. Les cas d'infections sont de plus en plus nombreux.

Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin rendre obligatoire l'indication du mode d'abattage ? (M. Stéphane Ravier applaudit.)

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Votre question n'est en rien polémique, mais inspirée par une préoccupation de la santé de nos concitoyens. (Sourires) Ce qui ne vous empêche pas de viser une certaine catégorie de population, voire une religion...

Les abattoirs, tous les abattoirs sont surveillés et contrôlés par les services de l'État - ils ne l'ont jamais été autant.

M. Alain Fouché.  - Pas suffisamment !

M. Didier Guillaume, ministre.  - Vous dites qu'il y a de plus en plus d'infections, je n'ai pas de données mais je pense que vous exagérez. Depuis la loi Egalim, il y a plus de contrôles, inopinés et réguliers. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Claudine Kauffmann.  - Je m'attendais à ce genre de réponse.

La séance, suspendue à 17 h 45, reprend à 17 h 55.