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Table des matières
Allocution du Président du Sénat à l'occasion des soixante ans de la Ve République
Demande de prérogatives attribuées aux commissions d'enquête
Commission spéciale(Candidatures)
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale
Mise au point au sujet d'un vote
Réforme du baccalauréat (Suite)
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont
Ordre du jour du mardi 9 octobre 2018
Nominations au sein d'une commission spéciale
SÉANCE
du mercredi 3 octobre 2018
2e séance de la session ordinaire 2018-2019
présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires : M. Yves Daudigny, M. Joël Guerriau.
La séance est ouverte à 14 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Allocution du Président du Sénat à l'occasion des soixante ans de la Ve République
M. Gérard Larcher . - Demain, nous célébrerons le soixantième anniversaire de la Ve République. « Rendre la République forte et efficace », telle fut la volonté du général de Gaulle.
Le 4 septembre 1958, place de la République, il souhaita « que le pays puisse être effectivement dirigé par ceux qu'il mandate, qu'il existe au-dessus des luttes politiques un arbitre national, qu'il existe un gouvernement qui soit fait pour gouverner, que le Parlement et le gouvernement collaborent mais demeurent séparés quant à leurs responsabilités. Telle est la structure équilibrée que doit revêtir le pouvoir. »
En soixante années, marquées par des crises économiques, sociales et politiques, nos institutions ont toujours résisté aux chocs. Après quatre alternances politiques et trois cohabitations, notre Constitution a fait la démonstration de sa solidité. Je pense également à la fin du processus de la décolonisation, à la crise de mai 1968, ou encore, si près de nous, aux terribles événements qui frappent notre pays depuis janvier 2015.
À l'heure où certaines des grandes démocraties européennes fondatrices de l'idée d'Union européenne, connaissent l'instabilité, notre Constitution est une chance pour notre pays.
En 1958, en pleine crise institutionnelle, il fallait remédier à l'instabilité gouvernementale de la IVe République, qui paralysait le pays alors qu'il était confronté à des défis majeurs. La nouvelle Constitution allait donc renforcer le pouvoir exécutif et rompre avec ce qui était qualifié de « régime des partis » pour rendre l'action publique plus efficace.
Le président de la République devient un arbitre, tel que défini par le discours de Bayeux, au-dessus des partis politiques, et dispose de compétences propres. Après la révision constitutionnelle de 1962, il aura la légitimité du suffrage universel direct.
À vingt-quatre reprises, notre Constitution a été révisée pour renforcer l'État de droit avec l'élargissement des modalités de saisine du Conseil constitutionnel en 1974, pour se conformer à nos engagements européens et internationaux - je pense au Traité de Maastricht en 1992, pour consacrer le caractère décentralisé de notre République et les libertés locales en 2003 ou encore pour marquer notre attachement à certaines valeurs, je pense à la constitutionnalisation de l'abolition de la peine de mort en 2007.
Au fil du temps, avec la pratique mais aussi le passage au quinquennat et l'inversion du calendrier électoral, les équilibres de la Ve République ont évolué.
Pour reprendre la célèbre citation du sage Solon à laquelle le général de Gaulle faisait référence à Bayeux : « Quelle est la meilleure Constitution ? Dites-moi, d'abord, pour quel peuple et à quelle époque ?». Il s'est donc avéré nécessaire d'adapter notre système institutionnel pour rééquilibrer les pouvoirs. La meilleure illustration de cette adaptation est la loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République, issue des travaux de la commission dite « Balladur » : un pouvoir exécutif mieux contrôlé, un Parlement renforcé, des droits nouveaux pour les citoyens.
Mes chers collègues, renforcer les prérogatives du Parlement est en réalité indispensable à notre démocratie. Un gouvernement qui ne rend pas de comptes aux représentants du peuple, un gouvernement qui n'est pas régulé dans sa production législative, est un gouvernement contestable. Montesquieu le disait : « Pour qu'on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. ».
Préserver les pouvoirs du Parlement, c'est préserver les fondements de la démocratie représentative. Affaiblir le bicamérisme, c'est affaiblir tout le Parlement.
L'un des fondements de la Ve République, par-delà les vicissitudes de l'Histoire, c'est le bicamérisme, il est au coeur du discours de Bayeux où le général de Gaulle déclarait : « Il est entendu que le vote définitif des lois et des budgets revient à une assemblée élue au suffrage universel et direct. Mais le premier mouvement d'une telle assemblée ne comporte pas nécessairement une clairvoyance et une sérénité entières. Il faut donc attribuer à une deuxième assemblée, élue et composée d'une autre manière, la fonction d'examiner publiquement ce que la première a pris en considération, de formuler des amendements, de proposer des projets. ».
Le dialogue bicaméral et la navette parlementaire auxquels je suis très attaché, comme à la commission mixte paritaire, sont des conditions de la qualité de la loi. (Applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux du groupe LaREM)
Nous devons nous employer à ce que le Sénat, représentant les collectivités territoriales de la République, continue à incarner, par sa composition, l'ensemble des territoires de notre pays. Au prétexte de la réduction du nombre de parlementaires, on ne doit pas condamner au quasi-silence certains territoires français à faible démographie. (Applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux du groupe LaREM)
Ce lien avec les territoires confère aussi au Sénat un autre atout : la proximité avec les élus locaux, tous les élus locaux qui, à l'heure de la mondialisation, constituent un des socles fondamentaux de la cohésion nationale.
« Il n'est pas de République forte sans institutions puissantes » : je partage ce constat fait par le président de la République devant le Congrès en juillet 2017. La révision constitutionnelle devra s'inscrire dans la continuité de celle de 2008. Elle doit avoir pour objectif de mieux faire la loi, de réconcilier nos compatriotes avec leurs parlementaires et de préserver la représentation des territoires.
Le pouvoir constituant appartient au Parlement. Le Sénat a des propositions solides à faire, il sera au rendez-vous. Réformer la France est difficile, réviser la Constitution ne l'est pas moins. Il n'est pas facile de distinguer l'intangible de ce qui doit être modernisé, de résister à la pression de l'opinion publique tout en tenant compte de son aspiration au changement.
Le général de Gaulle, lors de sa conférence de presse du 31 janvier 1964, expliquait « qu'une Constitution, c'est un esprit, des institutions, une pratique », il est primordial de se souvenir de ce triptyque pour replacer au coeur du contrat républicain le renforcement indispensable de la confiance de nos concitoyens dans la République.
La place du Parlement au sein de nos institutions n'est pas un sujet mineur. Elle engage toute notre conception de l'équilibre entre les pouvoirs. Un anniversaire, c'est l'occasion de réfléchir à nos fondamentaux, à leur nécessaire évolution lorsque la société change, mais sans rien céder à l'esprit qui, il y a soixante ans, a inspiré la réforme de nos institutions. (Applaudissements sur tous les bancs ; Mmes les sénatrices et MM. les sénateurs des groupes Les Républicains, UC, Les Indépendants et RDSE se lèvent, suivis par ceux des groupes SOCR et CRCE)
Demande de prérogatives attribuées aux commissions d'enquête
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen d'une demande de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable tendant à obtenir du Sénat, en application de l'article 5 ter de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, qu'il lui confère les prérogatives attribuées aux commissions d'enquête, pour une durée de six mois, afin de mener sa mission d'information sur la sécurité des ponts, chacun se souvient du drame italien de cet été.
Il a été donné connaissance de cette demande au Sénat lors de sa séance du mardi 25 septembre 2018.
La commission des lois a déclaré cette demande conforme aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958
La demande, mise aux voix, est adoptée.
En conséquence, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable se voit conférer, pour une durée de six mois, les prérogatives attribuées aux commissions d'enquête pour mener cette mission d'information.
Commission spéciale(Candidatures)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la désignation des onze membres de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.
En application de l'article 8, alinéas 3 à 11, et de l'article 103 bis de notre Règlement, les listes des candidats présentés par les groupes ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.
Réforme du baccalauréat
M. le président. - L'ordre du jour appelle le débat sur la réforme du baccalauréat.
Nous allons procéder au débat sous la forme d'une série de questions réponses dont les modalités ont été fixées par la Conférence des présidents.
Je vous rappelle que l'auteur du débat, disposera d'un temps de parole de huit minutes puis le Gouvernement répondra pour une durée équivalente.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture . - Monsieur le Ministre, vous avez présenté un projet ambitieux de réforme du baccalauréat et, partant, du lycée général et technologique. Il s'est traduit par un décret et plusieurs arrêtés signés le 16 juillet dernier. Les élèves rentrant au lycée cette année seront les premiers à passer les épreuves finales dans leur nouveau format, en 2020 et 2021.
Comme l'a souligné Max Brisson, auteur avec Mme Laborde d'un rapport sur le métier d'enseignant, il est regrettable que, de par le caractère restrictif du domaine de la loi en matière d'éducation, le législateur soit mobilisé sur l'interdiction du téléphone portable, et non sur des questions de fond comme celle-là. D'où ce débat pour obtenir des réponses aux questions que nos rapporteurs, Jacques Grosperrin et Laurent Lafon, ainsi que tous nos collègues, se posent.
Vous avez eu le courage, Monsieur le Ministre, de vous attaquer à un sujet d'envergure, là où vos prédécesseurs avaient échoué ou renoncé. « Monument national », rite initiatique pour les jeunes lycéens, le baccalauréat, sous sa forme actuelle, soulève de nombreuses questions, à commencer par celle de sa finalité. Lourdeur excessive entraînant la perte de nombreuses semaines de cours, entretien d'une hiérarchie stérile entre les filières de l'enseignement général, tendance des élèves au bachotage, je ne m'étendrai pas sur ses défauts qui sont bien connus. Nous partageons votre ambition d'un baccalauréat plus simple sans être moins exigeant, avec moins d'épreuves terminales mais sans renoncer à un tronc commun qui est le garant d'une culture générale nécessaire à une citoyenneté éclairée. À cet égard, l'enseignement de la philosophie, unique en Europe, doit être préservé ; il doit être repensé pour en faire un apprentissage au débat d'idées.
La fin des séries dans la voie générale est une très bonne chose, les combinaisons d'enseignements de spécialité proposées donneront aux élèves une plus grande liberté de choix. Ces choix devront être réversibles pour être ajustés au cours de la scolarité. Le maintien des séries dans la voie technologique pose question : n'a-t-on pas manqué l'occasion d'une plus grande perméabilité entre les voies générales et technologiques ?
La mise en avant de l'expression orale par l'introduction d'une épreuve orale terminale inspirée du colloquio italien est à saluer de même que l'allégement des emplois du temps, l'accompagnement renforcé à l'orientation dès la classe de seconde ou encore la prise en compte, à hauteur de 40 % de la note finale, des notes obtenues tout au long de l'année, pour récompenser la constance et la rigueur dans le travail.
Si nous soutenons les principes et les orientations de la réforme, on peut s'interroger sur ses modalités. Les trois-quarts de la note de contrôle continu proviendront d'épreuves communes, organisées au cours des années de première et de terminale ; elles prendront appui sur une banque nationale de sujets, les copies seront anonymes et corrigées par d'autres professeurs que ceux de l'élève. Allégera-t-on réellement l'organisation avec ces mini-baccalauréats ?
Quelle articulation entre le futur baccalauréat et Parcoursup ? Les notes de contrôle continu me semblent devoir être prises en compte pour l'affectation dans l'enseignement supérieur. Or cela n'est pas compatible avec des épreuves terminales organisées au retour des vacances de printemps mais il semblerait que la discussion sur le calendrier soit encore en cours. Pouvez-vous nous donner des précisions, Monsieur le Ministre ?
Quid de l'offre de formation, enfin ? Les douze spécialités offertes ne le seront pas dans tous les lycées, ni même dans tous les bassins de formation - sept le seront « dans un périmètre raisonnable, avez-vous dit. Il serait regrettable que les élèves de territoires ruraux et périurbains où il n'existe qu'un lycée de secteur ne puissent pas avoir le même choix que les autres. Notre assemblée, vous le savez, est attachée à l'équité territoriale. La ruralité ne doit pas être oubliée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)
Vous l'aurez compris, Monsieur le Ministre, nous portons sur cette réforme un regard bienveillant mais vigilant et critique. Puisse ce débat apporter des réponses aux inquiétudes qui se font jour sur le terrain. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)
présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale . - C'est avec grand plaisir que je viens échanger avec vous sur la réforme du baccalauréat, un sujet que nous avons déjà abordé et pour lequel nous nous étions fixé ce rendez-vous.
Travailler sur le baccalauréat, c'est en réalité travailler sur l'ensemble du système scolaire, du lycée jusqu'à la petite section de maternelle. Un seul exemple : le grand entretien de fin d'année est un signal fort envoyé à l'ensemble du système scolaire. Nous voulons des élèves qui aient confiance en eux-mêmes, qui soient capables de s'exprimer, d'utiliser des arguments rationnels et cela se prépare dès les petites classes.
L'objectif de cette réforme se résume en une formule : les élèves, en préparant le bac, doivent préparer ce qui les fera réussir après le bac. Le langage courant, avec le terme péjoratif de bachotage, atteste ce que ce diplôme est devenu : un exercice artificiel. Nous voulons, nous, en faire un tremplin vers la réussite dans l'enseignement supérieur.
Oui, le nouveau baccalauréat aura plus de sens car les notes seront prises en compte au moment de l'admission dans l'enseignement supérieur. La question du calendrier sera réglée en conséquence.
Le Premier ministre, dès sa déclaration de politique générale, avait expliqué que la réforme entrerait en vigueur en 2021, pour les élèves entrant en seconde en 2018 donc. Le président de la République, lors de la campagne, avait pris des engagements sur sa structure - épreuves anticipées et contrôle continu. Après une consultation conduite par Pierre Mathiot et la large concertation que j'ai menée avec tous les partenaires de l'Éducation nationale, j'ai présenté, en février dernier, une réforme que je veux rappeler ici. Le baccalauréat 2021 comprendra une épreuve anticipée de français en première puis quatre épreuves terminales, comptant pour 60 % de la note finale. Le point d'orgue sera l'épreuve de philosophie, qui sort revigorée de cette réforme à plus d'un titre puisque les élèves à profil scientifique auront une heure de cours de plus et que les élèves qui veulent approfondir cette matière pourront choisir la nouvelle spécialité « Littérature, philosophie et humanité ». Ce sera aussi le grand entretien qui permettra à l'élève d'exercer sa capacité d'argumentation.
Pour en finir avec le bachotage, le contrôle continu représentera 40 % de la note finale. Le lycéen sera régulièrement évalué lors d'épreuves communes, qui représenteront 30 % de la note finale, dans trois à cinq disciplines qui ne seront pas évaluées dans les épreuves terminales. L'objectif n'est évidemment pas de créer de nouvelles lourdeurs. Ces épreuves épousent une pratique qui existe déjà : les bacs blancs. La banque de sujets est là pour garantir l'équité, de la souplesse sera donnée aux établissements dans l'organisation. Avec ces épreuves, le mois de juin ne sera plus exclusivement consacré au baccalauréat dans les lycées. C'est un vrai changement sociétal. Sur les 40 % de contrôle continu, 10 % correspondront aux bulletins scolaires.
Le bac 2021 sera donc pleinement national, pleinement juste et pleinement porteur de réussite. À partir de la rentrée 2019, le lycée commencera à se métamorphoser - nous en avons un avant-goût dès cette année avec les 54 heures d'orientation et le test de positionnement en seconde.
En 2019, les spécialités seront implantées. Elles devront répondre à un principe d'équité et même de compensation territoriales. Sur les douze spécialités, sept seront présentes dans tous les lycées, sauf cas très particuliers liés à la taille des lycées. En plus de ces sept spécialités, une ou plusieurs parmi les cinq autres spécialités seront proposées et nous implantons ces spécialités précisément dans les lycées qui ont besoin de renforcer leur attractivité qu'ils soient urbains ou ruraux.
Clarifier, moderniser, faire en sorte que les élèves entrent pleinement dans le XXIe siècle avec une ouverture sur l'Europe et le monde, tel est le but de la réforme. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, RDSE, Les Indépendants et UC, ainsi que sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
Mise au point au sujet d'un vote
Mme Claudine Lepage. - Lors du scrutin n°1 du 2 octobre, M. Bernard Jomier souhaitait voter contre et je souhaitais m'abstenir.
Mme la présidente. - Dont acte. Cette mise au point sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.
Réforme du baccalauréat (Suite)
M. Pierre Ouzoulias . - Si l'on ne se contente pas du bilan comptable et lénifiant que la ministre de l'enseignement supérieur a dressé de Parcoursup et que l'on tente une analyse qualitative, il faut entendre les demandes des candidates et des candidats. Ils souhaitent que les résultats du baccalauréat soient mieux pris en compte. Ce diplôme a l'avantage d'être national et anonyme ; il donne les mêmes droits à tous les candidats, quelles que soient leurs origines. Mme Vidal semble avoir entendu cette requête mais elle a annoncé, sans doute à l'issue d'une concertation interministérielle intense, que le calendrier de Parcoursup serait resserré pour que les inscriptions administratives soient réalisées avant la fin juillet. Cela rend matériellement très difficile l'intégration de tous les résultats du baccalauréat dans Parcoursup.
Quel rôle pédagogique et légal le Gouvernement veut-il donner à ce diplôme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Le socle consensuel, c'est que le nouveau bac est conçu comme un tremplin pour la réussite dans l'enseignement supérieur ; nous avons clairement tranché en ce sens. Les notes obtenues au baccalauréat auront un sens pour la suite du parcours, celles obtenues en contrôle continu mais aussi les notes de spécialités qui devront intervenir tôt dans l'année. Nous travaillons sur l'hypothèse d'épreuves au retour des vacances de printemps, cela laisse un délai suffisant pour les prendre en compte dans Parcoursup.
Le désaccord porte sur Parcoursup. Je crois, moi, qu'il représente un progrès incontestable et l'on voit bien toute sa cohérence avec la réforme du bac.
M. Pierre Ouzoulias. - Je vous sais défenseur des langues anciennes. Aussi je vous dirai : Festina lente ! Hâtez-vous lentement ! Il aurait été préférable de penser ensemble réforme du baccalauréat et Parcoursup plutôt que de traiter les dossiers les uns après les autres au risque de l'incohérence. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)
M. Jacques-Bernard Magner . - À la place des séries S, L et ES qui disparaissent, les lycéens choisiront trois matières principales, appelées « spécialités », puis deux seulement en terminale, qui feront l'objet d'épreuves écrites finales.
Tous les lycées proposeront-ils toutes les combinaisons ou y aura-t-il des triplettes contraintes ? Je crains un décalage entre les ambitions généreuses et la pratique.
Comment informer et conseiller les jeunes dans leur orientation si l'on ne connaît pas le contenu des disciplines que le Conseil supérieur des programmes doit finaliser avant le début de l'année 2019 ? À moins que ce ne soit une pseudo-concertation et que le ministère ait les programmes... Comme l'a bien dit mon collègue Ouzoulias, n'a-t-on pas mis la charrue avant les boeufs en mettant au point Parcoursup avant le nouveau bac ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Nous allons de l'aval vers l'amont. Nous avons, Mme Vidal et moi, une vision complémentaire. Il y a eu une grande consultation. Sept spécialités sont garanties dans chaque lycée. Leur combinaison est plus large que les séries actuelles. Nous éviterons à la fois la contrainte totale, qui serait une reconduction déguisée des séries actuelles, et la fragmentation complète des choix. La présence de plusieurs lycées sur un même territoire permettra un partage d'options, comme aujourd'hui. (M. François Patriat applaudit.)
Mme Françoise Laborde . - Le ministre de l'agriculture a-t-il pris toute sa place dans la réforme « Blanquer » ? L'enseignement agricole est inquiet. L'agronomie devient une option facultative, alors qu'elle était un enseignement de spécialité obligatoire. Or les titulaires d'un bac S obtenu en lycée agricole se destinent souvent à devenir ingénieurs agronomes.
Le choix de deux spécialités seulement en terminale est également problématique puisque les études supérieures en nécessitent trois. En prépa agro-véto, il faut un niveau élevé en mathématiques, en physique et en SVT.
En outre, la réforme annoncée du bac STAV, seul bac technologique de l'enseignement agricole, ne risque-t-elle pas de s'accompagner d'une baisse des horaires ?
Certes, la double tutelle de l'enseignement agricole ne facilite pas les choses mais comment prendre en compte sa spécificité ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)
Mme Françoise Férat. - Très bien !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je ne rate jamais l'occasion de le dire : l'enseignement agricole est un modèle pour l'enseignement général. Il n'y a donc aucune volonté de l'affaiblir ou de le concurrencer. La spécialité « biologie et écologie » est inspirée des séries actuelles des lycées agricoles. Ce nouveau bac, plus modulaire, sera plus souple et plus interconnecté.
La prépa véto est un cas extrême, nous y avons aussi pensé. Les options « Mathématiques expertes » et « Mathématiques complémentaires » permettront aux élèves d'avoir le niveau requis qui est attendu d'eux dans les trois disciplines.
Nous avons travaillé de sorte qu'il n'y ait pas d'angle mort dans le continuum entre lycée et enseignement supérieur.
Mme Françoise Laborde. - Je connais votre attachement à l'enseignement agricole. Merci de vous assurer qu'aucune filière n'a été oubliée et que tous les élèves y auront accès.
Mme Colette Mélot . - Nous ne pouvons que saluer l'objectif de cette réforme. Aujourd'hui, le taux de réussite au bac est de 90 %, mais bien des élèves échouent ensuite dans l'enseignement supérieur. Le convoité « Très bien » est le sésame pour franchir la porte des établissements les plus prestigieux. La vérité est qu'il n'existe plus un bac, mais des bacs.
Il fallait réformer cet examen antique tel que décrit par Sartre. C'est le rôle du grand oral, qui prépare les élèves à des compétences utiles dans leur vie future. Mais il faut y mettre les moyens : formation des enseignants aux techniques oratoires ou encore valorisation de la parole de l'élève pendant les cours. Comment faire pour que le grand oral soit véritablement républicain ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - La réforme du bac aura un impact sur l'ensemble des programmes, jusqu'à la maternelle. Sur le grand oral, la capacité à s'exprimer, lors des dernières assises de la maternelle, l'accent a été mis sur la confiance en soi et la capacité à s'exprimer. L'éducation artistique et culturelle mettra à l'honneur le théâtre. En troisième, il y aura trente minutes de plus de français pour consacrer plus de temps à la maîtrise de l'argumentation. Nous attendons les programmes pour la fin octobre - qui n'ont pas été pré-écrits. J'aurais bien été incapable de rédiger ces centaines de pages ! (Sourires) Si l'oral est discriminant, il faut préparer cette épreuve au plus tôt pendant la scolarité.
M. Stéphane Piednoir . - Le bac est une institution bicentenaire que chaque famille s'est appropriée depuis la massification des années 80. Chacun a ainsi un avis sur sa réforme.
Nous devons aussi écouter la parole des professeurs. Le niveau baisse-t-il ? Nous ne pouvons pas ne pas entendre leur désarroi face à l'échec dans le supérieur des élèves titulaires de ce diplôme.
Les enseignants s'inquiètent de la fin des séries. Si demain les séries S et ES disparaissent, que se passera-t-il pour les classes préparatoires aux grandes écoles de management, dites ECE et ECS, organisées en fonction des baccalauréats obtenus ? Les fusionnerez-vous, pour réaliser au passage de substantielles économies d'échelle, au risque de créer des classes de soixante élèves ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Nos réformes visent l'élévation du niveau général et la justice sociale - deux faces d'une même médaille, pour que chacun maîtrise les fondamentaux à l'entrée du supérieur. Ainsi le dédoublement des classes dans les REP visait-il les deux à la fois.
Le test de positionnement de début de seconde a été passé par tous les élèves de seconde - les résultats remontent en ce moment même de la France entière - afin de repérer les failles à combler et de déclencher l'aide personnalisée.
Les professeurs d'université et de classes préparatoires nous signalaient un affaissement du niveau, notamment en sciences. C'est ce qui a inspiré nos réformes. Il y a donc une hausse du niveau attendu, une hausse du plaisir et du désir aussi, par des choix plus nombreux et plus ouverts.
M. Stéphane Piednoir. - Vous n'avez pas répondu à ma question sur la fusion des filières. Il importe de préserver la diversité des profils en classes préparatoires et dans les écoles de management et de garantir le niveau des élèves en mathématiques ou en sciences humaines.
Mme Françoise Cartron . - La réforme du bac : on en parle, depuis si longtemps... Enfin, la voici lancée !
Le lycée doit être un tremplin vers la réussite. Aujourd'hui, seuls quatre enfants d'ouvriers non qualifiés sur dix sont bacheliers, et si 80 % des enfants de cadres supérieurs obtiennent un bac scientifique, ce n'est le cas que de 5 % des enfants d'ouvriers non qualifiés. On l'a vu avec la carte scolaire : la vigilance s'impose sur les stratégies des familles, qui peuvent renforcer les inégalités. Le secteur sera le garant de l'équité sur son territoire. Quel budget, quels outils le Gouvernement mobilisera-t-il pour éviter que certains enfants soient défavorisés ou victimes d'un déficit d'information ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - La question est dense. Elle me permet de préciser, pour faire suite à la question précédente, que les enseignants de classes préparatoires réfléchissent à la modernisation du bac. La Conférence des grandes écoles se réunit demain et après-demain.
Nous voulons simplifier et clarifier. Dès la seconde, 54 heures seront spécifiquement consacrées à l'orientation pour éclairer les élèves et les familles. Nous voulons associer les enseignants pour éviter le fonctionnement en silo. La réforme aura l'avantage de supprimer la hiérarchie des filières et d'ouvrir des passerelles pour corriger les erreurs d'orientation.
Mme Sonia de la Provôté . - La question de l'orientation, centrale, doit permettre à chacun de réussir, de choisir son parcours en fonction de ses appétences.
La question de l'information sur les parcours, les options, les filières, leurs débouchés professionnels est donc cruciale. Or un jeune ne sait pas toujours en seconde ce qu'il veut faire après. L'appétence ne suffit pas.
Réformer le bac n'aura de sens que si l'orientation est réformée vite et sans demi-mesure. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UC ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Vous me demandez de faire vite et bien, monsieur Ouzoulias, de me hâter lentement... Le Gouvernement tient la ligne de crête. Il réfléchit à cette réforme depuis un an : il était difficile de faire mieux.
Vous avez raison : l'orientation est centrale. Dès la sixième, l'orientation sera au coeur. L'instauration d'un second professeur principal au lycée va dans ce sens. J'ai déjà parlé des 54 heures d'accompagnement. Nous travaillons en outre avec les régions et développons des outils numériques. Le site maseconde2018-2019.fr aide aussi les lycéens.
Mme Sonia de la Provôté. - Il faut garantir une information et un accompagnement renforcés pour les deux ou trois générations de bacheliers qui essuieront les plâtres de la réforme.
Mme Maryvonne Blondin . - Le bac est un lieu de mémoire de l'identité française, selon l'historien Pierre Nora.
Nous sommes inquiets face à cette réforme. Les chefs d'établissement n'ont aucune visibilité sur ses modalités pratiques et d'organisation. Quelles seront les modalités de correction ? Les correcteurs seront-ils extérieurs ?
La liberté de choisir des spécialités sera très limitée dans certaines zones, notamment rurales, avec des difficultés de transport. Ne risque-t-on pas de recréer un lycée à deux vitesses ? L'élève deviendra entrepreneur de son parcours. Il devra choisir des spécialités, au risque de pénaliser les élèves des familles les moins favorisées, moins informés sur leur avenir.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Comme toute évolution, celle-ci suscite des questions. Mais entretenir les inquiétudes n'est pas constructif. Faisons preuve d'optimisme, dans l'intérêt général, et ne faisons pas semblant de croire qu'il n'y a pas de réponses à ces questions qui sont aussi égrenées par certains syndicats.
Les proviseurs seraient dans le brouillard ? Nous tenons actuellement des réunions d'information très régulières avec eux ; je les rencontre à chacun de mes déplacements, dans toutes les régions de France. Je le fais avec une inspectrice générale qui m'accompagne aujourd'hui au banc des commissaires du Gouvernement Dès janvier, la carte des spécialités sera connue. Beaucoup de choses changent, certes, et c'est heureux, puisque chacun le souhaitait.
L'objectif, je le redis, est de renforcer l'équité territoriale. Les implantations nouvelles constitueront des valeurs ajoutées par rapport à la situation actuelle.
M. Laurent Lafon . - La création des modules de « droit » et d'informatique pose la question de la formation des enseignants. En l'absence de Capes et d'agrégation dans ces matières, les lycées pourront-ils recruter librement dans la société civile des professeurs, qui n'a pas moins de ressources que le Conseil supérieur des programmes ?
Deuxième marge de manoeuvre à offrir aux établissements : le temps de travail. Les horaires des enseignants sont calculés sur une base strictement hebdomadaire. Le temps n'est-il pas venu d'instaurer une annualisation, ce qui serait facteur de souplesse et d'innovation pédagogique ?
Enfin, les établissements ont besoin de souplesse d'organisation, pour s'adapter aux spécificités des territoires. Vous avez repris la proposition de réseau du rapport Mathiot, mais quid de la liberté pédagogique au dernier trimestre ?
Raymond Barre disait qu'il faut « faciliter l'action des autres plutôt que décider à leur place ». Je ne sais si vous feriez vôtre cette citation... La réforme du baccalauréat n'est-elle pas l'occasion de donner plus d'autonomie aux lycées ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Les citations sont toujours des enrichissements. Raymond Barre, qui était lui-même universitaire, est une bonne référence, et pertinente en l'occurrence.
De la maternelle au collège, les élèves acquerront un socle commun à tous les élèves, de compétences, de connaissance, et de culture. À partir de la seconde, et jusqu'à l'enseignement supérieur, les élèves passent à une autre étape, plus autonome, fondée sur des choix responsables, en étant accompagnés. C'est le sens de la réforme.
Je rencontre régulièrement les enseignants, les proviseurs. Je les ai vus hier à Nancy, je les vois demain à Angers. Il appartient aux lycées de construire leur projet éducatif, afin d'accroître les choix des lycéens. Il est vrai que l'introduction de nouvelles disciplines pose la question des ressources humaines. Leur développement sera progressif.
M. Jacques Grosperrin . - À l'époque de Napoléon, qui l'a créé en 1808, le taux de réussite au bac n'était que de 1 %. L'épreuve orale - de latin et grec - existait déjà. Je suis un farouche défenseur du cycle commun. Je me réjouis de cette réforme qui s'inscrit dans le schéma « bac moins trois, bac plus trois », car on ne peut plus accepter l'échec massif à l'université.
Mais j'ai peur que l'on maintienne des filières déguisées. Il faut aller vite sur Parcoursup. Attention aussi à la proximité des élections professionnelles et aux instrumentalisations, au moment où des suppressions de postes sont annoncées.
Comment comptez-vous rassurer la communauté éducative ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je ne veux pas seulement rassurer la communauté éducative mais aussi l'enthousiasmer ! Comme j'ai coutume de le dire aux proviseurs que j'ai rencontrés, cette réforme n'est pas de l'huile de foie de morue mais de la vitamine C ! (Sourires) Elle a été nourrie de nombreux travaux dont les vôtres, précédée d'une vaste consultation, impliquant 40 000 lycéens, puis largement approuvée.
Nous offrons aux lycéens un lycée plus ouvert, avec plus de choix, préparant mieux à l'enseignement supérieur. D'ailleurs les plus déçus sont les élèves de première et de terminale qui ne bénéficient pas de la réforme.
Les professeurs seront sensibles à l'approfondissement des programmes. Nous informons et mobilisons aussi tous les proviseurs. Le rythme de notre action est rapide mais serein.
Mme Claudine Lepage . - La réforme concernera aussi le baccalauréat des Français de l'étranger, dont le taux de réussite est supérieur à 90 %. Il n'est pas rare que les élèves du réseau AEFE maîtrisent trois voire quatre langues à l'issue de leur scolarité. L'enseignement des langues sera-t-il renforcé ?
Ensuite ces élèves ne disposent toujours pas d'un numéro INE - identifiant national des élèves - ce qui les empêche de faire leurs démarches de préinscription depuis l'étranger. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Damien Regnard applaudit également.)
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Les lycées français de l'étranger sont très attractifs. Il faut le souligner.
Le rapport Manes-Bonnisseau et Taylor sur l'enseignement des langues vient de m'être remis. Nous voulons aller dans votre sens pour que chaque élève maîtrise deux langues au bac.
La réforme du baccalauréat est une occasion de modernisation. Nous nous inspirons de plusieurs pays, pas seulement de l'Angleterre ou de l'Italie. Le nouveau système modulaire facilitera en conséquence les interactions avec d'autres baccalauréats et valorisera nos baccalauréats binationaux.
À la rentrée 2019, tous les élèves à l'étranger auront un INE.
Mme Claudine Lepage. - Merci pour votre réponse, mais l'absence d'INE sera encore un problème cette année, en attendant la rentrée 2019.
M. Max Brisson . - L'introduction du contrôle continu dans la notation finale aurait pu être considérée comme positive, mais les 40 % dévolus à ce contrôle seront composés aux trois quarts d'épreuves partielles. Il est à craindre que la réforme ne conduise à un étalement du bachotage tout au long de l'année en lieu et place de contrôle continu et ne freine l'innovation pédagogique. Lors de votre audition devant la commission de la culture, le 4 juillet dernier, vous aviez déclaré : « le risque de bachotage est réel, il a été identifié et un travail est fait pour l'éviter. » Quels travaux avez-vous conduits pour le réduire ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Les dispositions prises garantissent l'objectivité - avec les banques de sujets nationaux - et la simplicité - avec la souplesse laissée aux établissements.
Cette organisation des épreuves n'est pas du bachotage continu, qui est d'ailleurs un oxymore : c'est comme la ville à la campagne ! Il s'agit bien d'un travail continu, étant entendu que l'évaluation régulière garantit l'acquisition des connaissances. C'est ce que nous voulons en première et en terminale : un travail continu et serein tout au long de l'année.
Cela n'exclut pas l'innovation pédagogique, au contraire. J'attends à ce titre que le Conseil supérieur des programmes donne du sens à cette structuration trimestrielle.
M. Max Brisson. - Une épreuve toutes les sept semaines, c'est bien du bachotage continu ! Vous avez reculé devant les organisations syndicales et repoussé, hélas, les propositions du rapporteur Mathiot. Vous n'avez pas répondu à ma question sur la liberté pédagogique et l'autonomie des professeurs !
Mme Laure Darcos . - Nul ne nie que le baccalauréat soit à bout de souffle. Tout plaidait pour une réforme de grande ampleur. Elle appelle une refonte des programmes, vous avez d'ailleurs saisi le Conseil supérieur des programmes. J'ai confiance en Souad Ayada, sa présidente. Mais le processus est long et j'espère que les tensions internes au Conseil ne ralentiront pas le rétro-planning.
Nul n'ignore en effet l'enjeu du livre scolaire, premier outil de mise en oeuvre de la réforme. Or les manuels scolaires papier sont financés par les régions. Le coût total de la réforme sera élevé : pour l'équipement complet des élèves des voies générale et technologique sur deux ans (2019 et 2020) et trois niveaux (seconde, première et terminale) il s'élèverait à plus de 300 millions d'euros. Par exemple, la région Ile-de-France devrait débourser 30 millions d'euros !
À quelle date les programmes définitifs seront-ils connus et les ressources pédagogiques communes des éditeurs, parents, élèves ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Je tiens à préciser, pour M. Brisson, que si je reculais devant les organisations syndicales, cela se verrait et se saurait ; nous ne serions pas là pour débattre de la réforme du baccalauréat ! Le rapport Mathiot ne recommandait pas 40 % de contrôle continu sur le bulletin. La part de contrôle continu que nous avons introduite marque une avancée très intéressante.
Quant aux manuels scolaires, il y a des problèmes structurels qui ne sont pas liés à la réforme du baccalauréat. Mais le rythme de la réforme sera tenu et le Conseil supérieur des programmes fait bien son travail ; c'est peut-être ce qui agace certaines personnes. Fin octobre, les programmes élaborés par les groupes de travail seront rendus publics et feront l'objet d'une consultation. Les éditeurs sont déjà en contact avec le Conseil supérieur des programmes. Certaines équipes sont au travail. Cela oblige à une certaine rapidité, mais pas davantage que lors de réformes précédentes.
Le financement est aussi transformé. Les dépenses régionales devront être considérées comme un investissement et l'occasion d'innover - tant pour les ressources numériques que papier.
Mme Vivette Lopez . - Si la réforme du bac va dans le sens de la modernité, il faut reconnaître que le bac reste considéré comme une garantie de réussite. Or la politique des 80 % de réussite est allée de pair avec une baisse de la valeur du diplôme. Un bac plus sélectif lui rendrait sa vocation première. Les pratiques de notation du bac ne sont pas étrangères à sa démonétisation, non plus que les phénomènes de triche.
Michel Fize, dans Le Bac inutile, a raison de dire que les bacheliers sont les grands bernés de la République. Le bac est couteux pour la nation et, dans de nombreux pays, les entreprises recrutent sur des tests psychotechniques, on admet à l'enseignement supérieur sans conditions de diplôme et cela se passe très bien ensuite...
Mme la présidente. - Votre question ?
Mme Vivette Lopez. - Comment rendre à l'examen son exigence ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - La réforme vise à répondre à ces interrogations. Il s'agit, pour les lycéens, de combiner le sens de l'effort et le plaisir, le désir d'apprendre. Nous prenons la voie de la sincérisation du bac, de l'authenticité. On le sort de l'artificialité, celle des séries et du bachotage.
Nous l'objectivons aussi, en renforçant la cohérence entre le diplôme et les attendus de l'enseignement supérieur. Les corrections ont dès lors vocation à être plus sincères à compter de 2021.
M. Olivier Paccaud . - Un nouveau bac va donc s'extraire de la chrysalide que vous avez façonnée... Quelques esprits anciens auront peut-être la nostalgie d'un âge d'or, ce temps pas si lointain où bien peu de nos concitoyens pouvaient accéder à cette acropole lycéenne. Certains estiment que le bac est quasiment donné, ce qui est difficile à entendre pour les néo-bacheliers qui ont travaillé avec coeur et abnégation pour l'obtenir.
L'harmonisation de la notation, opaque, voire obscure, suscite des interrogations. Les inspecteurs de l'Éducation nationale donneraient des consignes d'harmonisation à la hausse ! Plus de transparence serait souhaitable. Le sénateur Jacques Legendre écrivait dans un rapport il y a dix ans que ces pratiques affaiblissaient la valeur du bac ! Donnerez-vous des consignes de clarté, monsieur le ministre ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. - Nous allons, je le répète, dans le sens de l'authenticité et de la sincérité. Nous verrons lorsque le nouveau bac sera mûr ; ne caricaturons pas pour autant les pratiques actuelles. Une harmonisation est nécessaire pour créer de l'objectivité et plus de justice entre les différents jurys. Il peut y avoir parfois des phénomènes ascensionnels qui n'ont jamais recueilli pleinement mon assentiment.
Les 80 % incluent tous les baccalauréats, généraux, technologiques, professionnels. Il est souhaitable que la plus grande part possible de nos enfants accède au bac. C'est même normal dans un pays moderne comme le nôtre. Sans céder à la nostalgie, souhaitons qu'au XXIe siècle, le plus grand nombre obtienne un des multiples bacs existants.
Renforcer le contrôle continu crée une objectivité, une authenticité de terrain : on peut s'attendre à une remontée du niveau.
M. Olivier Paccaud. - Monument historique, le bac est délicat à réformer. En cas de baisse du taux de réussite, on ne sait jamais, j'espère que vous ne retomberez pas dans ces travers. Nos enfants ont besoin d'être bien formés, pas d'être bercés par de fausses vérités.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture . - Merci à tous de vous être pliés aux contraintes de l'exercice, par nature frustrant - deux minutes, c'est bref.
Nous défendons tous la réussite de nos enfants et sommes, particulièrement au Sénat, soucieux d'équité territoriale en métropole comme en outre-mer.
Nous restons attentifs aux questions de calendrier. Nous l'approfondirons avec Mme Vidal, que nous auditionnerons le 9 octobre pour un bilan de Parcoursup.
D'autres points sont restés en suspens : les conséquences pour les classes prépas, l'autonomie des établissements.... Nous vous adresserons les questions complémentaires, monsieur le ministre.
Ce débat aurait dû se tenir avant la prise des décrets, si l'agenda parlementaire n'avait pas été si contraint...
Nous reviendrons également sur les enjeux budgétaires, la scolarisation des tout-petits, et la réflexion sur les enseignements, qui doivent être approfondis. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, Les Républicains et LaREM ; M. Martial Bourquin applaudit également.)
Politique industrielle
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle le débat sur la politique industrielle et l'avenir de notre industrie.
Nous allons procéder au débat sous la forme d'une série de questions réponses dont les modalités ont été fixées par la Conférence des présidents.
Je vous rappelle que les auteurs du débat disposeront d'un temps de parole de huit minutes, puis le Gouvernement répondra pour une durée équivalente.
M. Alain Chatillon, président de la mission d'information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays . - Notre industrie est un élément fort de notre pays, rappelons-le. M. Bourquin et moi-même avons, après celui de 2011, effectué un nouveau travail important sur Alstom et l'industrie, fondé sur une dizaine de déplacements et une cinquantaine d'auditions.
Comment améliorer la situation actuelle ? Voilà l'enjeu.
De 5,4 millions dans les années 80, nous sommes passés à 2,4 millions d'emplois dans l'industrie. L'Allemagne a quatre fois plus d'entreprises de taille intermédiaire que la France : pourquoi ? Comment se fait-il que la France, premier pays exportateur dans l'agro-alimentaire il y a dix ans - 11 milliards d'euros d'excédent - ne soit plus que le troisième après l'Allemagne et l'Italie ? La digitalisation et la concurrence n'y sont pas étrangères, mais n'expliquent pas tout.
Face au géant chinois qui représente 30 % du marché mondial, et à son second américain qui pèse 17 %, il faut assurément constituer un géant européen, nous y sommes favorables. Mais pourquoi le faire au détriment d'Alstom ? Ce sera l'objet de notre débat.
Qu'en est-il de la réindustrialisation ? Surtout, comment se fait-il que nous ayons autant perdu ? Nos cuisines n'ont plus un seul appareil français : pourquoi ? Il faudra examiner les mesures à prendre pour limiter la concurrence qui s'affranchit des normes.
Sur les vingt-sept propositions que nous avions formulées avec Martial Bourquin, il y a sept ans, très peu ont été suivies. J'espère que nos 45 propositions actuelles rencontreront un écho plus large, grâce à vous, Madame la Ministre, à l'occasion de la loi Pacte.
Nous proposons en particulier un PEA totalement défiscalisé pour les PME-PMI...
Mme la présidente. - Veuillez conclure.
M. Alain Chatillon. - Allons plus loin, Madame la Ministre !
M. Martial Bourquin, rapporteur de la mission d'information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays . - C'est à la suite du rapprochement entre Alstom et Siemens que nous avons lancé notre étude, car il était manifestement déséquilibré. Nous avons donné la majorité à Siemens sur un groupe qui a eu 7 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2017 et qui vient de remporter le métro à Ryad, à Bombay, à Francfort, à Shanghai, le TGV de nouvelle génération en Italie. Pour cinq ans, la commande publique française seule garantissait son avenir.
Nous étions pour un accord mais équilibré, sur le modèle d'Airbus. Pourquoi avoir ainsi laissé un grand groupe sous la coupe étrangère, comme cela a été fait pour d'autres groupes vendus à la découpe ? C'est d'autant plus absurde que l'industrie du futur est une extraordinaire opportunité. Mais il sera bientôt trop tard. Il ne nous reste que cinq ans pour construire cette industrie du futur, ou bien tout nous échappera.
Or la question industrielle est sous-estimée en France, quel que soit le gouvernement, c'est culturel. Il faut que la France croie de nouveau à l'industrie. Nous ne devons pas accepter ce que disait Michel Houellebecq : une France vidée de ses usines et de ses ouvriers, où ne subsisteraient plus que des stations de ski et des hôtels de charme. Pour cela, il faut favoriser les territoires français, notre tissu industriel - c'est le sens du suramortissement, que nous avons voté à l'unanimité. L'Allemagne pense d'abord à l'Allemagne, l'Italie, à l'Italie ; la France, elle, a trop tendance à voir le développement de ses grandes entreprises à l'étranger. Or ce n'est qu'en réindustrialisant la France qu'on fera baisser le chômage.
Alstom, douze sites en France, 8 500 employés, 4 500 sous-traitants, doit être rééquilibré.
La France ne restera une grande puissance qu'en conservant un socle industriel puissant. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances . - J'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt de vos propositions ; je partage votre sentiment d'urgence.
Malgré les chiffres positifs sur l'investissement étranger ou le solde entre les fermetures et les créations de sites industriels, nous sommes conscients de ce que l'effort doit être soutenu. L'industrie est notre héritage et notre futur. C'est ce qui garantit notre souveraineté. Dès le premier jour du quinquennat, nous avons agi pour améliorer l'environnement des entreprises : suppression de l'ISF, prélèvement fiscal unique, loi Travail, transformation du CICE en baisses de charges, autant de mesures au service de la production industrielle.
Nous allons continuer. Nous voulons faire de la France la première puissance d'innovation en Europe. Il faut pour cela investir et réformer la formation et l'apprentissage. Le fonds pour l'innovation et l'industrie, doté de 11 milliards d'euros, plutôt que d'immobiliser des capitaux dans des entreprises, préparera l'avenir du pays. C'est pourquoi nous sommes défavorables à la proposition 31 : l'État ne doit pas se transformer en gestionnaire financier.
Nous avons créé 16 filières structurantes, dans des domaines très variés, de l'automobile à la santé.
L'association entre les pouvoirs publics et l'industrie automobile est indispensable pour développer les véhicules hybrides.
Même chose pour l'industrie pharmaceutique, avec une banque de données médicales qui sera la plus riche du monde.
Nous réduisons les délais pour mener des essais cliniques et obtenir les autorisations de mise sur le marché. Je suis aussi engagée pour ancrer l'innovation dans les territoires. La démarche de relabellisation des pôles de compétitivité est lancée. Nous ne sommes pas naïfs : nous devons rester maîtres de nos innovations.
Avec la loi Pacte, l'État pourra intervenir dans plus de secteurs stratégiques, notamment l'espace, le stockage de données, l'intelligence artificielle et les semi-conducteurs.
La fusion entre Alstom et Siemens a été faite pour réagir à l'arrivée d'un géant chinois. Des engagements ont été pris pour maintenir le siège et la gestion en France. C'est un mariage entre égaux mais avec une structure actionnariale asymétrique. Le Gouvernement veillera à ce que cela ne change pas et à préserver l'équilibre franco-allemand - et que les engagements pris soient tenus, en particulier celui de préserver le niveau d'emploi pendant quatre ans.
Notre plan d'action pour la croissance porte une priorité sur les PME, trop souvent freinées, trop petites et n'innovant pas assez.
Deuxième défi : la digitalisation et la robotisation de l'industrie. Le Premier ministre a pris des engagements sur ce point récemment : investissements massifs de base, suramortissement, plateforme numérique pour la digitalisation filière par filière.
Autre défi, les territoires, avec l'initiative « Terre d'industries », qui constitue un kit pour leur donner les outils dont ils ont besoin.
Je salue le travail de votre commission et vos 45 propositions. Nombreuses sont celles qui trouveront leur place dans la loi Pacte. Restez mobilisés : votre parole compte pour que l'industrie attire les meilleurs talents. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur le banc de la commission)
M. Franck Montaugé . - La mission d'information appelle l'État à renouveler sa politique industrielle. La vente d'ADP, d'Engie et de la Française des jeux génèrera un gain médiocre. Ce n'est pas 10 milliards d'euros qui seront affectés, mais les dividendes générés par vos cessions. Vous escomptez un rendement de 250 millions d'euros alors que les dividendes de ces entreprises ont oscillé entre 850 millions en 2007 et 1,5 milliard en 2012.
Comment justifiez-vous de céder des placements qui généraient un rendement de 10 % pour passer à 2,5 % ? Où est la belle affaire pour l'État ? S'agit-il simplement d'éviter de passer le cap symbolique de la dette publique à 100 % du PIB ? À qui profitera cette véritable spoliation des Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Notre logique, c'est l'État stratège plutôt que l'État gestionnaire. Nous voulons investir dans l'industrie de demain plutôt que dans des entreprises - si profitables soient-elles, même si je n'ai pas les chiffres précis en tête.
La Française des jeux continuera à générer de la recette fiscale, bien plus importante que les dividendes. Ces cessions seront sécurisées du point de vue de la régulation. Notre choix d'un placement en obligations d'État donne de la stabilité, de la visibilité.
M. Franck Montaugé. - L'État se privera de ressources précieuses. Pour éviter de revivre la tragédie de la cession des autoroutes de 2009, il faudrait que le produit soit au moins égal à la somme actualisée des dividendes auxquels vous renoncerez. Nous y serons vigilants.
M. Jean-Pierre Corbisez . - Le Nord-Pas-de-Calais a encore perdu 1 400 emplois industriels entre 2017 et 2018, alors que l'hémorragie est continue depuis vingt ans - en dix ans, le recul est de 70 000 emplois.
L'entreprise Balsan, à Calais, spécialisée dans la fabrication des tenues des grands corps de l'armée, est titulaire du marché de l'Armée de terre ; elle détient un savoir-faire unique, qui n'est guère valorisé dans la passation des marchés. Le général Lecointre a déchiré sa veste d'apparat le dernier 14 Juillet : l'entreprise calaisienne l'a remplacée en vingt-quatre heures.
De même pourquoi priver l'entreprise Protécop d'un marché de 300 000 gilets pare-balles pour l'armée et le confier à un concurrent irlandais qui produit en Asie ?
Que dire aussi de l'aciérie Ascoval menacée par l'insuffisance du tarif d'achat de l'acier proposé par Vallourec, actionnaire principal, qui menace ainsi le modèle économique même d'Ascoval ? L'État détient 16% du capital : les salariés peuvent-ils dormir sur leurs deux oreilles ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Vous citez deux entreprises, Balsan et Protécop, qui ont su évoluer vers le sur-mesure. La perte des marchés est bien sûr une mauvaise nouvelle. La direction des achats du ministère de la Défense veille à ce que les modalités de choix prennent le plus en compte les spécificités des fournisseurs et maximisent le recours aux producteurs nationaux.
Ascoval est concerné par des projets de reprise qui doivent être solides et durables, nous y veillons.
M. Jean-François Longeot . - Le véhicule électrique passera de 1 à 30 % du marché - véritable révolution comparable au passage au moteur à explosion. Les équipements et les pétroliers devront s'adapter. Le temps de travail de la fabrication des hybrides sera supérieur à celui d'un véhicule actuel. Surtout, il faut encore créer des filières de réutilisation des batteries. Même chose pour les téléphones portables, dont seulement 15 % sont collectés. La mission d'information que j'avais présidée en 2016 a fait des propositions, qui mobilisent l'économie sociale et solidaire : madame la ministre, comptez-vous soutenir la constitution d'une filière du recyclage ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Vous avez raison. Le recyclage des batteries est un enjeu majeur. Elles contiennent des métaux rares comme le lithium ou le cobalt. La France est très active dans le domaine.
Les compétences nationales en matière de recyclage sont nombreuses, le Gouvernement examine un projet de filière.
L'État soutient la recherche et le développement, tant en amont qu'en aval, l'éclosion-création d'un cluster performant.
M. Dany Wattebled . - Force est de constater que la France a perdu une part de sa souveraineté avec la perte des turbines, du matériel de santé, et maintenant des trains : Alstom a été bradé à Siemens au nom de l'amitié franco-allemande alors qu'on nous parlait d'un Airbus du rail équilibré. C'est une occasion ratée. L'enseignement est que nous devons veiller à ces cessions. L'État ne risque-t-il pas de se priver d'outils indispensables à sa souveraineté ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Les cessions prévues dans la loi Pacte s'accompagnent d'une régulation des intérêts des consommateurs. Nous réinvestissons les produits des cessions dans les innovations de rupture. Le Fonds pour l'innovation et l'industrie financera à hauteur des deux tiers les entreprises de demain dans l'intelligence artificielle ou le stockage de l'énergie par exemple, et un tiers soutiendra les startups innovantes. C'est un choix stratégique.
M. Dany Wattebled. - Ce n'est pas en bradant des fleurons industriels que l'on soutiendra l'industrie et qu'on fera reculer le chômage.
Mme Sophie Primas . - Vu le contexte budgétaire contraint, notre mission a estimé qu'il ne fallait pas se priver de revoir le portefeuille d'actions de l'État. Mais cette réorientation de l'actionnariat public ne doit pas priver l'État d'une manne financière, ni aboutir à se dessaisir de secteurs stratégiques au profit d'acteurs étrangers. Une régulation doit être mise en place. Ensuite, les fonds obtenus ne doivent pas être uniquement réinvestis dans les startups mais aussi dans toutes les autres industries. Dans tous les cas, enfin, le Parlement doit être associé à la politique actionnariale de l'État.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Je comprends que vous n'êtes pas défavorable à une modification du portefeuille de l'État. Nous avons aussi cette vision sélective. L'État doit être présent dans les entreprises stratégiques, de défense, ou du futur. Les cessions de la loi Pacte s'accompagnent d'une régulation ferme et un droit de regard de l'État, avec un dispositif d'actions enrichi dans certains cas.
Enfin, le Parlement sera associé. C'est l'objet même du chapitre 2 de la loi Pacte.
Mme Sophie Primas. - ADP a une dimension stratégique forte. En matière de participation de l'État, l'agilité doit primer. Quant au Parlement, il faut l'associer régulièrement aux décisions de privatisation. M. Chatillon, qui représente le Parlement dans ce dossier, n'est pas assez informé.
M. Richard Yung . - Le constat est clair, nous le partageons tous : depuis vingt ans, la France n'a pas su protéger son industrie. Nous pourrions nous inspirer de l'exemple italien, qui a défendu son industrie, et dont le PIB industriel est aujourd'hui le double du nôtre - alors que l'État italien n'a pas mené de politique particulièrement ambitieuse. Nous avons pourtant beaucoup d'outils : les pôles de compétitivité, la BPI, etc.
Que comptez-vous faire pour les harmoniser, renforcer la cohérence de l'action publique ? Comment faire aussi pour obtenir l'ouverture des marchés publics américains ? Enfin, quelles seront les propositions françaises pour la politique industrielle européenne, mise à l'ordre du jour du prochain Conseil européen ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Vous avez raison : il faut que les leviers d'action dont on dispose soient cohérents. Nous devons aussi associer les régions. C'est ce que nous faisons dans le cadre des filières. De même, le Comité national de l'industrie est organisé de manière matricielle et par filière.
Nous manquons d'outil de réciprocité avec les États-Unis. Le sujet est sur la table - mais je ne vous cache pas que ce dossier est difficile.
Enfin, nous avons fait des propositions sur la politique industrielle européenne en vue du prochain Conseil européen.
M. Fabien Gay . - Alstom, même réduit à la portion congrue, représente encore des sites nombreux en France, des milliers de salariés et de sous-traitants. La part d'Alstom dans la commande publique est forte mais l'opacité règne sur la répartition de la production entre la France et l'étranger. Ainsi un sous-traitant métallurgique a-t-il fait faillite cet été, l'externalisation se développe au profit de moins-disants sociaux. Et le contrat de 22 locomotives prévu pour l'usine de Belfort n'a toujours pas été attribué ! La commande publique joue un rôle majeur. L'absorption d'Alstom par Siemens est remise en cause par certaines autorités de la concurrence, hors de France.
L'État n'entrera pas au capital alors qu'il le pourrait. Comment justifier cette fusion ? Beaucoup de questions restent sans réponse pour le plan de charge de tous les sites concernés. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Un montant de commande publique important a été octroyé à Alstom pour de nombreuses années. Dans ce cadre, nous veillons à ce que ces commandes bénéficient à l'écosystème industriel en France. C'est au coeur de notre stratégie. Des plateformes numériques ont été créées et garantissent la transparence sur les plans de charge.
Quant à la commande de 22 locomotives, l'appel d'offres est en cours : je ne peux vous en dire davantage.
Mme Viviane Artigalas . - Dans les Hautes-Pyrénées, l'usine de Tarbes compte 630 salariés. Elle participera à la construction des trains à hydrogène et au TGV du futur. Le PDG d'Alstom m'a confirmé que le site de Tarbes, d'importance industrielle, ne serait pas menacé. C'est sans doute vrai, mais la question de la commande publique est posée. Ainsi c'est l'Allemagne qui commande le train à hydrogène.
Quelle stratégie comptez-vous mettre en oeuvre pour développer la commande publique en France, associer les régions, et pérenniser nos sites industriels ?
La séance est suspendue quelques instants.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Nous avons tous été frappés par la commande allemande de trains à hydrogène. La France réfléchit aussi et travaille aux mobilités décarbonées car elles sont l'avenir.
Le site de Tarbes sera pérennisé, l'accord avec Siemens prévoyant le maintien de l'emploi, des sites et du volume de la recherche et développement en France. C'est la volonté française de préserver nos sites.
Je suis persuadée que l'excellence de nos ingénieurs et de nos ouvriers sera le gage de la pérennité de nos sites.
Mme Viviane Artigalas. - Vous n'avez pas répondu sur la commande publique plus généralement. L'actionnariat public est le gage de l'ancrage des industries sur le territoire.
Mme Valérie Létard . - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Dans les Hauts-de-France, l'industrie emploie 300 000 personnes. L'industrie évolue avec des bonnes nouvelles comme la modernisation de l'usine Toyota ou les commandes pour le site d'Alstom de Petite Forêt.
Mais l'aciérie Ascoval est en difficulté. Pourtant le président de la République a reconnu son excellence, lors de la visite qu'il y a faite. Or l'usine est en procédure de redressement judiciaire.
Altifort propose de reprendre 280 salariés et de développer le site avec un train à fil. Seule condition : l'engagement de Vallourec pendant dix-huit mois. Bruno Le Maire soutient le projet et a réuni les acteurs. L'État en effet est actionnaire de Vallourec.
L'offre d'Artifort doit être remise pour le 19 octobre. Où en est-on ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Nous n'avons pas le sentiment que le marché du Grand Paris Express pose problème. Si vous avez des éléments à votre connaissance, je serai ravie d'en discuter avec vous.
L'État et la Région ont accompagné la reprise d'Ascométal, qui a laissé de côté Ascoval. Notre rôle est d'accompagner les repreneurs pour construire un projet viable et donner des perspectives crédibles aux salariés.
Entre retournements de conjoncture et instabilité de l'environnement international, le secteur de la sidérurgie est complexe. Le TGI de Strasbourg a accordé un délai supplémentaire de quatre semaines pour donner le temps aux repreneurs potentiels d'affiner leurs projets pour Ascoval, sachant que les deux candidats ne disposent pas pour l'heure des financements nécessaires. Nous recevrons les parties prenantes la semaine prochaine.
Depuis la CECA, on ne saurait faire n'importe quoi en matière d'aides publiques. Nous travaillons très sérieusement sur ce dossier compliqué, croyez-moi.
M. Cédric Perrin . - La Haute Assemblée se penche sur l'organisation de la filière industrielle ferroviaire. Cette filière d'excellence a besoin de visibilité pour la planification des besoins et la programmation des projets. La puissance publique, arbitre de la commande publique, est au coeur de l'écosystème ; il faut une visibilité à quatre ou cinq ans. Quelles initiatives de programmation pour soutenir l'activité ?
Comment être plus offensif pour faire insérer des clauses de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) dans les appels d'offres ? Avec les contraintes budgétaires, le prix devient l'unique critère d'attribution. Il faut lutter contre le choix du moins-disant en valorisant les critères de RSE pour ancrer les projets en France et préserver l'emploi. La France et l'Europe doivent s'engager dans des démarches responsables. Comment le Gouvernement compte-t-il agir ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Nous avons bien conscience de l'importance de la commande publique pour les grands donneurs d'ordres, qui en dépendent à 75 %. Nous cherchons à leur donner une visibilité à quatre ou cinq ans et mettons en place des outils de prévisibilité partagés, transparents, entre donneurs d'ordre, sous-traitants et pouvoirs publics.
Le code des marchés publics permet d'inclure des clauses sociales et environnementales. Le ministère de l'économie aide les acheteurs et les entreprises à les comprendre, via des guides pratiques ; des groupes de travail européens veillent à l'homogénéité.
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont . - Comme de nombreux territoires ruraux, la Haute-Vienne n'est guère connue pour son industrie ; elle abrite toutefois, dans des unités de production de petite taille, des savoir-faire pointus. Au-delà de la porcelaine, citons l'habillement haut de gamme - Weston, France Confection, peausseries de Saint-Junien... Les élégantes chaussettes Archiduchesse sont réalisées par les 50 employés de l'entreprise Broussaud aux Cars, commune de 630 habitants. Peret Industrie, entreprise métallurgique limougeaude, a rénové les grilles du Sénat et de l'Opéra de Paris et travaille actuellement sur le chantier de la Samaritaine.
Le made in France, ou plutôt la « fabrication française »...
M. Jean-François Husson. - Très bien !
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. - ... est un argument pour séduire les consommateurs, et cette dynamique s'amplifie.
Pour autant, ces entreprises sont fragilisées par une fiscalité inadéquate et les difficultés de recrutement. Le maintien d'une politique industrielle territorialisée passe par une meilleure coordination de l'action des pouvoirs publics mais aussi par une revalorisation des métiers et des formations industrielles, en créant des classes d'excellence dans l'apprentissage ou en faisant des métiers de l'industrie un axe du plan d'investissement dans les compétences. L'exposition « L'usine extraordinaire » au Grand Palais pourrait être une occasion ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Vous avez évoqué de nombreuses thématiques qui sont au coeur de nos efforts. La visibilité de l'exposition « L'usine extraordinaire » permettra, je l'espère, de changer l'image parfois poussiéreuse des métiers de l'industrie aux yeux des jeunes. Avec Mme Pénicaud, nous sommes mobilisées pour que la réforme de l'apprentissage bénéficie à l'industrie, et les filières industrielles du Conseil national de l'industrie se sont engagées à augmenter de 40 % le nombre d'apprentis.
Les savoir-faire spécifiques dans le haut de gamme sont bien en ligne de mire du Comité stratégique de filière (CSF) Mode et Luxe, avec un focus sur les façonniers pour les aider à rayonner à l'international, préserver la tradition - via le label « entreprise du patrimoine vivant » - tout en tirant le meilleur parti des nouvelles technologies.
M. Jean-François Husson . - En Meurthe-et-Moselle, on sait ce que désindustrialisation signifie. L'industrie française a d'abord perdu des parts de marché dans le bas et moyen-de-gamme ; désormais, elle est aussi menacée dans le haut de gamme. Les rapports de force mondiaux se transforment : les États-Unis mènent une politique fiscale agressive, la Chine devient leader dans le spatial, l'aéronautique, le ferroviaire, et l'intelligence artificielle.
La part des exportations françaises ne cesse de baisser. Nos handicaps sont connus : fiscalité, investissement insuffisant dans la recherche et développement.
L'innovation est la clé de l'industrie du futur. Notre modèle industriel doit s'adapter aux mutations, à la robotique, aux enjeux environnementaux. Quelles stratégies de reconquête industrielle et commerciale le Gouvernement compte-t-il déployer, en favorisant la qualification et la formation ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Il s'agit bien, en effet, de stratégie de reconquête. En matière de compétitivité, nous avons agi, avec la réforme fiscale, les ordonnances Travail, l'investissement dans les compétences. L'industrie et les filières sont mobilisées sur les nouveaux marchés, la transformation numérique via le plan Industrie du futur - suramortissement, centres d'accélération de l'industrie du futur déployés sur le territoire, etc... La dimension européenne, enfin, est indispensable pour identifier les chaînes de valeur stratégiques et les ancrer en Europe.
M. Jean-François Husson. - Un document de travail du ministère d'avril 2018 indique que les prélèvements obligatoires sur le secteur industriel pénalisent la France : 72 milliards en 2016, soit 3,2 % de la richesse nationale, le double de ce qui a cours dans la zone euro. À l'inverse, les investissements dans le numérique représentaient 0,5 % du PIB, contre 1,2 % dans la zone euro et 1,4 % aux États-Unis. Le secteur industriel a un effet multiplicateur exceptionnel en termes d'emploi et de création de valeur. Il y a urgence à agir !
M. Bernard Fournier . - Depuis le début des années 90, notre industrie connaît une chute sans fin : près d'1,5 million d'emplois perdus en 25 ans ! Sa part dans l'activité est passée de 20 % en 1989 à 12 %. Des centaines d'entreprises industrielles ont disparu et nous avons été consternés par le rachat de nombreux fleurons français - Alcatel, Alstom, Péchiney...
Sans parler de l'effondrement de notre compétitivité, de l'affaiblissement durable de notre tissu productif et de notre incapacité à trouver notre place dans le commerce international, entre le haut de gamme allemand et la production des pays à bas coût de main-d'oeuvre.
Nous avons cru aux chimères de l'économie désindustrialisée, qui devait conserver les emplois de recherche et d'ingénierie tout en externalisant la fabrication. Quel manque de clairvoyance ! Aujourd'hui, ce sont les pays en développement qui sont en capacité de nous racheter ! Il n'y a pas de grands pays sans grandes industries. Comment protéger nos grands groupes des prédateurs ? Allez-vous enfin mettre en oeuvre une politique industrielle digne de ce nom ?
M. Daniel Laurent. - Bravo !
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État. - Je vous rejoins : il n'y a pas d'économie puissante s'il n'y a plus d'usines. Bruno Le Maire et Gérald Darmanin le pensent aussi. Les maux français - perte de compétitivité, déficit commercial et chômage de masse - doivent trouver des réponses fortes. Nous nous employons à redonner confiance aux investisseurs nationaux et internationaux pour qu'ils s'engagent en France.
Cette vision de long terme s'incarne dans le fonds pour l'innovation et l'industrie, car c'est grâce à l'innovation et à la recherche que nous sortirons de l'entre-deux dans lequel nous sommes enfermés, que nous monterons en gamme, que nous ancrerons l'industrie dans l'avenir. Il s'agit de tirer profit de notre excellence en matière de recherche et développement pour que l'innovation aille vers la création de valeur et d'activité, et fasse rayonner la France industrielle.
M. Alain Chatillon, président de la mission d'information. - Madame la Ministre, nous travaillons, toutes sensibilités confondues, dans un état d'esprit positif et ouvert. J'espère que nous serons entendus sur la loi Pacte.
Une durée minimale de cinq ans de présence sur le territoire national après avoir touché le crédit impôt recherche, sous peine de devoir le rembourser, serait bienvenue. Cela aurait permis de sauvegarder mille emplois en France cette année.
Si les entreprises de taille intermédiaire sont si nombreuses en Allemagne, c'est qu'elles bénéficient d'une large défiscalisation grâce aux fondations. J'ai proposé à Bruno Le Maire un PEA entièrement défiscalisé, à condition d'être investi à 100 % dans les petites entreprises. Je regrette que cela ne figure pas dans la loi Pacte car 1 % de l'assurance vie, c'est 17 milliards d'euros !
Plus globalement, la fiscalité sur les entreprises représente 3,6 % du PIB, soit 80 milliards d'euros, bien plus que chez nos voisins européens. Il faut réagir ! Nous serons à vos côtés lors de l'examen de la loi Pacte. Merci au rapporteur et aux intervenants. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et SOCR)
M. Martial Bourquin, rapporteur de la mission d'information. - Octobre est le dernier mois de validité de l'accord entre General Electric et l'État français ; or il lui doit 34 millions d'euros ! Nous souhaitons que cette somme soit réinvestie dans la vallée de l'énergie, à Grenoble, pour la transition énergétique. Une entreprise de Belfort s'est mise en grève pour obtenir six emplois, avec succès. General Electric devait en créer mille ; nous n'en sommes pas même à quatre cents.
Il se pourrait, ensuite, que des sites soient exclus de l'accord entre Alstom et Siemens. Attention à ce qu'ils ne soient pas vendus à l'encan, n'importe comment, à des groupes chinois, japonais ou canadiens...
Enfin, vous disiez que la loi Pacte entraînerait le désengagement capitalistique de nos grandes entreprises. L'Amérique de Trump, la Chine se désengagent-elles de leurs entreprises ? Non, bien au contraire ! En laissant faire le marché, nous faisons fausse route.
La France doit jouer un rôle de premier plan dans le concert européen. L'industrie, ce n'est pas que des intentions, ce sont des actes. Commençons par rééquilibrer l'accord Alstom-Siemens. Notre fleuron mérite mieux qu'une absorption pure et simple ! (Applaudissements)
Prochaine séance mardi 9 octobre 2018, à 14 h 30.
La séance est levée à 18 heures.
Jean-Luc Blouet
Direction des comptes rendus
Annexes
Ordre du jour du mardi 9 octobre 2018
Séance publique
À 14 h 30 et le soir
1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude.
2. Projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (procédure accélérée) (texte de la commission, n°13, 2018-2019) et projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions (procédure accélérée) (texte de la commission n°12, 2018-2019).
3. Examen des propositions de création de commissions spéciales sur le projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures de préparation du retrait du Royaume?Uni de l'Union européenne et sur le projet de loi portant suppression des surtranspositions des directives en droit français.
4. Examen d'une proposition de création d'une commission spéciale sur le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises.
Nominations au sein d'une commission spéciale
MM. Claude Bérit-Débat, François-Noël Buffet, Emmanuel Capus, Thierry Carcenac, Pierre Charon, André Gattolin, Charles Guené, Laurent Lafon, Pascal Salvodelli, Raymond Vall et Michel Vaspart sont devenus membres de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.