Lutte contre les violences sexuelles et sexistes (Procédure accélérée - Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLES ADDITIONNELS APRÈS L'ARTICLE 2
M. le président. - Amendement n°131, présenté par le Gouvernement.
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 222-24 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 15° Lorsqu'une substance a été administrée à la victime, à son insu, afin d'altérer son discernement ou le contrôle de ses actes. »
II. - L'article 222-28 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 11° Lorsqu'une substance a été administrée à la victime, à son insu, afin d'altérer son discernement ou le contrôle de ses actes. »
III. - L'article 222-30 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 8° Lorsqu'une substance a été administrée à la victime, à son insu, afin d'altérer son discernement ou le contrôle de ses actes. »
IV. - Après l'article 222-30 du même code, il est inséré un article 222-30-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-30-1. - Le fait d'administrer ou de tenter d'administrer à son insu à une personne une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle est puni de cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.
« Lorsque les faits sont commis sur un mineur de quinze ans ou une personne particulièrement vulnérable, les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende. »
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes. - Cet amendement fait de l'usage de la drogue dite du violeur une circonstance aggravante. Un délit obstacle doit par ailleurs être institué pour sanctionner le fait d'administrer ou de tenter d'administrer à son insu à une personne une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle.
M. le président. - Sous-amendement n°140 à l'amendement n°131 du Gouvernement, présenté par Mme M. Mercier, au nom de la commission.
Amendement n° 131
A. - Alinéa 10
Supprimer les mots :
ou de tenter d'administrer
B. - Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
... - À l'article 222-31 du même code, la référence : « 222-30 » est remplacée par la référence : « 222-30-1 ».
Mme Marie Mercier, rapporteur de la commission des lois. - Sous-amendement rédactionnel.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Avis favorable.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement ainsi sous-amendé.
Mme Laurence Rossignol. - Je partage l'objectif du Gouvernement mais me demande si son amendement n'est pas satisfait par l'amendement n°58 rectifié adopté hier. Peut-être le Gouvernement pourrait-il retirer le sien et pour une fois défendre le nôtre d'ici à la CMP !
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Ils ne sont pas identiques : l'amendement du Gouvernement crée un délit autonome.
Le sous-amendement n°140 est adopté.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Il s'agit d'une circonstance aggravante : j'aimerais comprendre en quoi l'amendement n'est pas utile.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Non, il s'agit bien d'un délit particulier, qui s'ajoute au code pénal : c'est utile.
L'amendement n°131, sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°106 rectifié, présenté par Mme Cohen, M. Collombat et Mme Prunaud.
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 225-12-1 du code pénal, il est inséré un article 225-12-... ainsi rédigé :
« Art. 225-12-... - La prostitution doit être entendue comme tout acte de nature sexuelle réalisé, à titre personnel et exclusif, sur sa personne ou celle d'autrui, moyennant rémunération financière, matérielle ou en nature, ou en contrepartie de tout autre avantage, afin de satisfaire les désirs sexuels d'autrui. »
Mme Laurence Cohen. - Le code pénal ne définissant pas la prostitution, c'est la jurisprudence qui la définit comme le fait de se prêter, moyennant rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui. Cette définition, qui date d'il y a plus de vingt ans, est largement dépassée ; il faut y inclure les nouvelles formes de prostitution, souvent déguisées, qui pullulent sur Internet. L'appât de l'argent facile met grandement en danger, ces jeunes filles, ces jeunes garçons, qui ne réalisent pas toujours les impacts physiques et psychologiques de leurs actes. À l'heure où nous légiférons sur les violences sexuelles et sexistes et entendons protéger les mineurs, il faut tenir compte de l'usage des sites de prostitution par webcam. Ouvrons les yeux - la procureure générale de la Cour d'appel de Paris nous en alerte, le préfet de mon département me l'a confirmé : la prostitution des mineurs augmente très fortement. Quelque 6 000 à 10 000 mineurs se prostitueraient en France, jusque dans les toilettes de leur collège !
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Une définition n'apparaît pas utile pour réprimer un phénomène qui a donné lieu à une abondante jurisprudence. Les tribunaux n'ont aucun mal à agir en l'état actuel des choses. Avis défavorable.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Avis défavorable pour les mêmes raisons.
Mme Michelle Meunier. - Les formes changent mais la prostitution reste une violence sexuelle et sexiste, que nous devons combattre, dans la lignée de la loi de lutte contre le système prostitutionnel.
Mme Laurence Rossignol. - Cet amendement est utile, même si la jurisprudence n'a pas été entravée par l'absence de définition légale ! Il est tout à fait légitime de définir dans ce texte la prostitution, car elle est une violence, qu'il s'agisse de filles ou de garçons. Et la prostitution des mineurs augmente de manière spectaculaire : d'après les services de police, les faits de prostitution ont été multipliés par quatre ces dernières années. La formation du personnel et la création de parcours de sortie de la prostitution dans les préfectures devraient être des priorités du Gouvernement.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - La jurisprudence est certes une source du droit, mais pourquoi ne pas définir la prostitution dans la loi ? Je ne comprends pas le refus de la rapporteure et du Gouvernement. Cet amendement indique clairement ce qu'est l'infraction.
M. Arnaud de Belenet. - Je comprends le souci de prophylaxie du code pénal, mais il y a un biais dans le raisonnement : les jeunes filles qui s'exhibent sur Internet n'ont pas nécessairement conscience de se livrer à la prostitution, aussi ne suis-je pas convaincu de l'efficacité de l'amendement. (Exclamations sur les bancs du groupe CRCE)
Mme Esther Benbassa. - Nous avons très largement débattu de la prostitution il y a deux ans. À part la sanction des clients, rien n'a été fait pour prévenir la prostitution ou accompagner les personnes. La pénalisation du client a été votée. S'il s'agit de prohiber pour prohiber, je m'abstiendrai. Nous sommes partagés sur ce sujet au sein du groupe CRCE. Ce texte n'est pas le bon véhicule pour rouvrir le débat.
Mme Annick Billon. - Je le voterai. Il n'est pas question de prohiber, mais de protéger. Adaptons la loi aux nouvelles pratiques.
Mme Victoire Jasmin. - Les auditions au sein de la délégation aux droits des femmes m'ont convaincue qu'il fallait cette définition, je ne comprends pas que la rapporteure et la ministre balaient le sujet d'un revers de main.
Mme Dominique Vérien. - Cet amendement précise ce qu'est la prostitution. Si cela va sans dire, cela va mieux en le disant !
De plus, on ne parle plus de besoins sexuels, comme dans la jurisprudence, mais de désir sexuel des clients. C'est très important. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
À la demande de la commission des lois, l'amendement n°106 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°197 :
Nombre de votants | 332 |
Nombre de suffrages exprimés | 312 |
Pour l'adoption | 101 |
Contre | 211 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. le président. - Amendement n°107 rectifié, présenté par Mme Cohen, M. Collombat et Mme Prunaud.
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 225-5 du code pénal est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « quiconque » est remplacé par les mots : « toute personne physique ou morale, ou tout prestataire de services » ;
2° Au 2°, les mots : « d'en partager » sont remplacés par les mots : « de partager ».
Mme Laurence Cohen. - Je ne me fais guère d'illusion puisqu'il est dans la même veine que le précédent ! L'article 225-5 du code pénal définit le proxénétisme comme l'aide, le profit tiré de la prostitution ou l'entraînement à s'y livrer. Or les nouvelles formes prostitutionnelles n'entrent pas dans ces catégories. Actualiser la définition aiderait les services de policeet de gendarmerie : ajoutons-y la responsabilité des services et hébergements numériques. Alors que l'un des plus gros sites vient de fermer sa rubrique de petites annonces, après avoir été mis en cause pour proxénétisme, ce serait un progrès conforme aux objectifs du Gouvernement.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Votre amendement est satisfait pas la rédaction de l'article 225-5 du code pénal : « quiconque » inclut déjà toutes les personnes physiques ou morales et la notion de prestataire de services est incluse dans celle de « personne morale ». Avis défavorable.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Même avis.
Mme Laurence Cohen. - Soit.
L'amendement n°107 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°25 rectifié, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 706-52 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « d'un mineur victime » sont remplacés par les mots : « d'une victime » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « du mineur » sont remplacés par les mots : « de la victime ».
Mme Martine Filleul. - Seules 11 % des victimes d'agressions sexuelles et de viols déposent plainte et la plupart disent ressentir un profond malaise au cours du processus. C'est dire à quel point nous devons progresser dans l'aide et l'accompagnement des victimes. Cet amendement généralise la possibilité d'enregistrement audiovisuel, obligatoire pour les mineurs, technique qui allège le dépôt de plainte en évitant de redire plusieurs fois l'expérience traumatisante vécue par la victime.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Nous partageons l'objectif et l'idée est excellente. Mais la police n'a pas toujours les moyens de le faire ! Et lorsque ce sera impossible, une telle disposition entraînerait la nullité de la procédure. Retrait ?
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Avis défavorable pour les mêmes raisons. C'est vrai, peu de victimes vont jusqu'à la plainte. C'est pourquoi nous devons les encourager à aller jusqu'au commissariat et à y rester. Beaucoup en partent car elles ne s'y sentent pas à l'aise ou parce que la procédure est trop longue - un détail peut leur faire rebrousser chemin, il faut améliorer l'accueil des victimes.
Mme Maryvonne Blondin. - Je comprends que les commissariats puissent rencontrer des difficultés pour disposer de locaux adaptés. Mais dans les départements, il y a souvent des conventions entre la police, les hôpitaux, tous les autres acteurs pour accueillir dans de bonnes conditions, avec des locaux adaptés, les victimes - et l'audition, ensuite, est consultable aux différents stades de la procédure. C'est une question de volonté politique.
L'amendement n°25 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°17 rectifié, présenté par Mmes Lepage, Rossignol, Monier, Blondin, Jasmin, M. Filleul, Meunier, Conway-Mouret, Ghali et Guillemot, MM. Cabanel, Antiste, Mazuir, Duran et Madrelle, Mme Tocqueville et M. Devinaz.
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant la mise en place d'une chambre spécialisée dans le jugement des infractions sexuelles au sein de tous les tribunaux de grande instance.
Mme Claudine Lepage. - Suivant les recommandations du rapport d'information de la commission des lois, « Protéger les mineurs victimes d'infractions sexuelles », mais également les recommandations du Haut Conseil à l'égalité, cet amendement prévoit un rapport du Gouvernement évaluant l'impact de la mise en place de chambres spécialisées pour juger des infractions sexuelles. La formation des magistrats est essentielle. Vous nous disiez, Madame la secrétaire d'État, qu'1 % seulement des violences sexuelles étaient punies, il faut aller plus loin.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Les rapports que nous demandons au Gouvernement ne sont jamais remis ! Aucun des rapports prévus par les textes que nous avons voté en 2016-2017 sur lesquels la commission des lois a été saisie n'a été remis dans les délais. Avis défavorable.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Avis défavorable. Le projet de loi sur la justice proposera la création de tribunaux criminels dans les départements, composés de cinq magistrats qui jugeront en première instance, à la place de la Cour d'assises, surchargée, les faits de viols, pour éviter leur correctionnalisation.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Je ne comprends pas la position de notre rapporteure. Les rapports contribuent à la bonne information du Parlement et à son contrôle. De plus, la rapporteure a elle-même modifié le texte pour demander un rapport : la demande est donc recevable quand elle vient de la commission, mais pas des autres bancs ? Attention, nous devrons en reparler lors de la révision constitutionnelle - dont l'un des enjeux est bien le pouvoir de contrôle du Parlement...
Ensuite, il ne faut pas confondre le nombre de chambres dans une juridiction et leurs attributions.
Mme Annick Billon. - Le fait que les rapports ne soient jamais remis ne justifie pas que l'on cesse d'en demander.
L'égalité hommes/femmes est une des grandes causes du quinquennat, mais nous ne savons pas quels moyens sont mis en oeuvre : il faudra bien que les actes suivent, et que nous puissions les évaluer !
Incidemment, la délégation aux droits des femmes aurait ainsi aimé entendre Mme Schiappa sur son budget...
M. Jacques Bigot. - On aurait aimé que la ministre nous dise cela hier, au lieu de l'entendre uniquement de la secrétaire d'État. Si je comprends bien, l'article 2 est vidé de son sens puisque les viols seront jugés par des magistrats professionnels et non par des jurés populaires qui se prononcent en conscience...
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Je suis toujours à la disposition de la délégation aux droits des femmes... L'égalité hommes/femmes est effectivement une grande cause du quinquennat - dont il ne vous aura pas échappé que nous n'avons franchi qu'une année ; le président de la République l'a déclarée grande cause le 25 novembre dernier, je vous présenterai un bilan de la première année avant le 25 novembre prochain et je pourrai en faire de même chaque année.
Mon budget, lui, est en hausse et nous l'avons sanctuarisé.
Monsieur Bigot, la garde des Sceaux a évoqué ces questions hier, lors de la discussion générale. Nous avons répondu sur la forme : nous nous relayons dans ce débat, mais pour défendre les mêmes positions. J'apprécierais que nous en restions au débat de fond...
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - Demander un rapport est souvent un aveu d'impuissance pour le Parlement. Le Gouvernement, qui plus est, n'a aucune obligation de rendre le rapport, car le Parlement ne peut faire d'injonction au Gouvernement, et il n'y a pas de sanction. Chacun le sait... Vous pouvez voter tous les rapports que vous voulez, c'est un vote nul. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. le président. - Amendement n°101, présenté par M. de Belenet et les membres du groupe La République En Marche.
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots:
et de leurs aidants
M. Arnaud de Belenet. - Nous proposons d'ouvrir aux aidants de personnes handicapées, les actions de sensibilisation, de prévention et de formation mentionnées à l'article L. 114-3 du code de l'action sociale et des familles concernant les violences, notamment sexuelles, à destination des professionnels et des personnes en situation de handicap.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Avis favorable.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Les aidants ont effectivement une connaissance très précise des personnes en situation de handicap, de leurs conditions de vie dans leur environnement : avis favorable.
L'amendement n°101 est adopté.
L'article 2 bis A, modifié, est adopté.
ARTICLE 2 BIS B (Supprimé)
M. le président. - Amendement n°69 rectifié, présenté par MM. Poadja, Détraigne et Canevet et Mmes Goy-Chavent, Guidez, Tetuanui et Vullien.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en oeuvre dans les territoires ultramarins des dispositifs de protection et d'accès au droit des victimes de violences conjugales.
M. Gérard Poadja. - Le CESE a montré, dans un rapport de mars 2017, que les violences faites aux femmes sont encore plus nombreuses outre-mer - en Nouvelle-Calédonie, sept fois plus ! La cohabitation du droit commun et du droit coutumier y rend encore plus difficiles les poursuites.
L'outre-mer n'est pas assez pris en compte par les politiques publiques. Ainsi, le téléphone « grave danger » n'est pas encore déployé outre-mer. Le sera-t-il bientôt ? C'est une question d'égalité entre les femmes métropolitaines et ultramarines.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - C'est une demande de rapport. Le plus pertinent serait de questionner le Gouvernement à l'occasion de la loi de finances. Retrait ?
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Le président de la République a indiqué la nécessité d'adapter les politiques à l'outre-mer. Avec Mme Girardin nous avons mis en oeuvre certaines des recommandations du CESE : ainsi une campagne de communication a été menée en 2017 en Martinique ; des dispositifs avec les associations pour mieux prendre en charge les violences ont été prévus. La réflexion sur la création d'un Observatoire de l'égalité se poursuit.
S'agissant du téléphone « grand danger », 10 ont été déployés en Guadeloupe, 10 en Martinique, 15 à La Réunion et 20 en Polynésie française ; nous voulons aller plus loin en facilitant les règles de déploiement.
L'égalité hommes/femmes outre-mer est essentielle. La présence d'équipes territoriales aux droits des femmes est une avancée majeure. Sept territoires d'outre-mer se sont déjà dotés d'une direction régionale aux droits des femmes : la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion, Wallis et Futuna, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie.
Avis défavorable à cet amendement.
L'amendement n°69 est retiré.
L'article 2 bis B demeure supprimé.
L'article 2 bis C est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°1 rectifié quater, présenté par MM. Milon, Lefèvre, Panunzi, Mouiller, Rapin, Savary et Cardoux, Mmes Imbert, Deseyne, Gruny, Lassarade et Lavarde, MM. Morisset et Chaize, Mme Puissat, MM. Sol et Bazin, Mmes Deroche et Estrosi Sassone, MM. Gilles, Cambon, Pierre, H. Leroy et Bouchet, Mme Micouleau, M. Kennel, Mme A.M. Bertrand, M. Bonne, Mmes L. Darcos et Malet, M. Savin, Mmes F. Gerbaud, Deromedi, Eustache-Brinio, Dumas et Procaccia, M. Laménie, Mme Garriaud-Maylam, M. Revet, Mmes Bonfanti-Dossat et de Cidrac, MM. Dufaut, Buffet, L. Hervé, Huré, Sido, Brisson et Paul et Mme Keller.
Après l'article 2 bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les 1° à 3° de l'article 226-14 du code pénal sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :
« 1° Dans les cas où la loi impose d'alerter le procureur de la République :
« Tout professionnel désigné au présent alinéa qui, dans l'exercice de ses fonctions, suspecte des violences physiques, psychologiques ou sexuelles de toute nature, y compris les mutilations sexuelles à l'encontre d'un mineur ou d'une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ou d'un état de grossesse, est tenu, sans avoir à recueillir l'accord de quiconque, d'en informer sans délai le procureur de la République. Les professionnels désignés pour une obligation de signaler au procureur de la République sont tous les médecins ;
« 2° Dans les cas où la loi autorise d'alerter les autorités compétentes :
« Tout autre professionnel ou toute personne qui suspecte ou acquiert la connaissance de violences physiques, psychologiques ou sexuelles de toute nature, y compris les mutilations sexuelles, à l'encontre d'un mineur, d'une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ou d'un état de grossesse, ou d'un adulte, informe sans délai le procureur de la République. Lorsqu'il s'agit d'un mineur ou d'une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ou d'un état de grossesse, l'auteur du signalement n'a pas à recueillir l'accord de quiconque ;
« 3° A tout professionnel ou toute personne qui suspecte ou acquiert la connaissance qu'un mineur est en danger ou qui risque de l'être. Il informe sans délai la cellule départementale de recueil, de traitement et d'évaluation mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles, des informations préoccupantes définies par le décret n° 2013-994 du 7 novembre 2013 organisant la transmission d'informations entre départements en application de l'article L. 221 - 3 du code de l'action sociale et des familles. »
M. Alain Milon. - Un enfant sur cinq serait victime de violences psychologiques ; un quart de violences physiques. Les enfants handicapés sont encore plus exposés à la maltraitance. L'obligation de signalement de l'article 40 du code pénal est limitée aux fonctionnaires - par exemple les médecins hospitaliers, les médecins scolaires et les médecins territoriaux des PMI. Les médecins libéraux sont confrontés à un dilemme : soit ils signalent et rompent le secret professionnel, soit ils ne le font pas et s'exposent aussi à des poursuites pour non-dénonciation. Cet amendement propose de généraliser l'obligation de signaler ; il est conforme aux recommandations de nombreux organismes internationaux.
M. le président. - Amendement identique n°13 rectifié bis, présenté par Mme Meunier, MM. Roger, Bérit-Débat et Iacovelli, Mme Jasmin, MM. Courteau, Duran et Mazuir, Mmes Conway-Mouret, Ghali, M. Filleul et Lienemann, MM. Vaugrenard, Antiste et Daudigny, Mmes Tocqueville, Blondin, Préville, Bonnefoy et Van Heghe, M. Lalande, Mme Guillemot, MM. P. Joly et Madrelle, Mme S. Robert, M. Manable et Mmes Féret, Lepage et Perol-Dumont.
Mme Michelle Meunier. - D'après une étude américaine, grâce à l'obligation de signalement par les médecins, l'on pourrait multiplier par quatre le taux de signalement et diminuer par trois le risque de décès. L'on réduirait également le long parcours de souffrance des victimes et l'on romprait le cycle de la violence le plus tôt possible en évitant la récidive par une prise en charge des auteurs. Pédiatres, pédopsychiatres et médecins généralistes approuvent ce dispositif. À l'heure actuelle, seulement 2 % des signalements sont effectués par des médecins. Cette obligation s'accompagnerait de mesures de protection pour les médecins signalant des mauvais traitements.
M. le président. - Amendement n°141, présenté par Mme M. Mercier, au nom de la commission.
Après l'article 2 bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 226-14 du code pénal est ainsi modifié :
1° Les 1° et 2° sont ainsi rédigés :
« 1° Au médecin, à tout autre professionnel de santé et à toute autre personne qui informe le procureur de la République ou toute autre autorité judiciaire, ou toute autorité médicale ou administrative, des sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles, ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ; cette information peut être faite sans l'accord de la victime ; lorsqu'elle concerne un mineur, cette information peut être faite à la cellule de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être, mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles ;
« 2° Hors les cas mentionnés au 1° , au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République ou de toute autre autorité judiciaire, ou toute autorité médicale ou administrative, les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises ; »
2° Après le mot : « établi », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : « que la personne a agi de mauvaise foi en connaissant l'inexactitude des faits signalés. »
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Cet amendement modifie un dispositif devenu illisible à force de réformes. Il clarifie les compétences et les facultés de chaque personnel soumis au secret professionnel pour alerter le procureur de la République ou les cellules de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger. Surtout, il réaffirme l'irresponsabilité des professionnels de bonne foi, dont les médecins, pour les encourager à dénoncer davantage les mauvais traitements.
M. le président. - Amendement n°27 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 2 bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 2° de l'article 226-14 du code pénal est complété par les mots : « et le signalement est obligatoire ».
Mme Laurence Rossignol. - Cet amendement va dans le même sens ; sa rédaction est un peu plus simple. Nous avons abordé cette question lors de la discussion de la loi du 14 mars 2016 et de la proposition de loi Giudicelli. Les médecins généralistes sont les mieux à même d'identifier des mauvais traitements. Or une légende urbaine court dans le corps médical selon laquelle un signalement fait courir le risque d'être traîné devant les tribunaux pour diffamation. Le moment est venu d'être un peu plus injonctif et de dire aux médecins que nous ne pouvons pas nous passer d'eux pour protéger les enfants.
M. le président. - Amendement n°2 rectifié quater, présenté par MM. Milon, Lefèvre, Panunzi, Mouiller, Rapin, Savary et Cardoux, Mmes Imbert, Bonfanti-Dossat, Deseyne, Gruny, Lassarade et Lavarde, MM. Morisset et Chaize, Mme Puissat, MM. Sol et Bazin, Mmes Deroche et Estrosi Sassone, MM. Gilles, Cambon, Pierre, H. Leroy et Bouchet, Mme Micouleau, M. Kennel, Mme A.M. Bertrand, M. Bonne, Mmes de Cidrac, L. Darcos et Malet, M. Savin, Mmes F. Gerbaud, Deromedi, Eustache-Brinio, Dumas et Procaccia, M. Laménie, Mme Garriaud-Maylam, MM. Revet, Dufaut, Buffet, Huré, Sido, Brisson et Paul et Mme Keller.
Après l'article 2 bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l'article 226-14 du code pénal est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Aucune action en responsabilité civile, pénale, disciplinaire et administrative ne peut être intentée à l'encontre de tout professionnel ou toute personne qui a appliqué les dispositions du présent article de bonne foi.
« Nul ne peut dévoiler ou être contraint de dévoiler l'identité ou tout autre élément permettant l'identification d'un professionnel ou de toute personne qui a appliqué les dispositions du présent article sans son consentement. »
M. Alain Milon. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°14 rectifié bis, présenté par Mme Meunier, MM. Roger, Bérit-Débat et Iacovelli, Mme Jasmin, MM. Courteau, Duran et Mazuir, Mmes Conway-Mouret, Ghali, M. Filleul et Lienemann, MM. Vaugrenard, Antiste et Daudigny, Mmes Tocqueville, Blondin, Préville, Bonnefoy et Van Heghe, M. Lalande, Mme Guillemot, MM. P. Joly et Madrelle, Mme S. Robert, M. Manable et Mmes Féret, Lepage et Perol-Dumont.
Mme Michelle Meunier. - Défendu.
M. Philippe Bas, président de la commission. - Tous ces amendements vont dans la bonne direction. Si j'osais, je dirais toutefois qu'aucun ne semble abouti. J'ai néanmoins une préférence pour celui de la commission. Puisqu'il n'y aura pas de navette en raison de la procédure accélérée, je propose aux auteurs des autres amendements de les retirer et d'engager un travail d'ici la CMP pour faire progresser la rédaction.
Deux cas sont à distinguer. Dans le premier, le médecin constate, avec certitude, des sévices ; il a déjà l'obligation de signaler les faits au procureur et se rendrait coupable par son abstention. Dans le second, le médecin ne sait pas interpréter les signes qu'il observe, il a une suspicion de maltraitance ; il peut alors contacter la cellule départementale de recueils des informations préoccupantes et le président du conseil départemental pourra ultérieurement, sur la base des informations que la cellule lui aura fournies, saisir le procureur de la République. Gendarmeris et police reçoivent trop de plaintes, elles ne parviennent plus à traiter les dossiers.
La sanction doit être attachée à l'absence de signalement. Les amendements de M. Milon et de Mme Meunier vont dans ce sens.
Retrait des amendements nos1 rectifié quater, 13 rectifié bis, 27 rectifié, 2 rectifié quater et 14 rectifié bis au profit de l'amendement n°141 de la commission.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Avis favorable à l'amendement n°141, qui réaffirme l'irresponsabilité des professionnels de bonne foi et distingue bien le cas des signalements d'infractions des autres où l'accord de la victime doit être recueilli. Créer une obligation, pour les médecins, de saisine du procureur de la République pourrait avoir des effets pervers. Les parents seraient dissuadés de faire soigner leurs enfants... (On se récrie sur les bancs du groupe SOCR.) Avis défavorable aux autres amendements.
M. Alain Milon. - L'amendement de la commission des lois n'apporte pas, selon moi, la clarification nécessaire : il ne comporte pas d'obligation de signalement. Réaffirmer l'irresponsabilité du médecin, soit ; mais lorsque le médecin effectue un signalement, il engage sa responsabilité envers l'enfant, et c'est le plus important. Il a le droit de se tromper de bonne foi. La Haute autorité de santé l'a noté dans une recommandation de mai 2011 : le médecin n'a pas à être certain de la maltraitance pour effectuer un signalement, il n'a pas non plus à en apporter la preuve.
M. René-Paul Savary. - Signaler n'est pas dénoncer, il faut le dire et le faire comprendre à tous. Je me rallie à la position de M. Milon. Monsieur le Président Bas, vous avez évoqué deux cas mais neuf fois sur dix, c'est un troisième cas qui se présente : l'enfant est amené chez le médecin, non pour les sévices subis, mais pour tout autre chose !
M. Philippe Bas, président de la commission. - Le médecin les constate néanmoins...
M. René-Paul Savary. - Comme pour la suspicion d'un handicap, le médecin n'a jamais de preuves formelles ; il sent que quelque chose ne va pas, il doit aborder le sujet, ce qui est particulièrement complexe. Il faut donc que la loi soit simple : l'enfant doit être protégé, comme le médecin.
Mme Laurence Rossignol. - L'amendement n°141 de la commission oblige à recueillir l'accord de la victime en cas de soupçon : cela me semble très dangereux. Au reste, si l'enfant acceptait de dénoncer ses parents, il l'aurait fait avant d'aller chez le médecin !
Madame la Ministre, les parents maltraitants, aussi étrange que cela puisse paraître, emmènent leurs enfants chez le médecin : invoquer l'effet pervers de notre amendement n'est pas convaincant.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - L'obligation de consentement de la victime ne vaudrait que pour les majeurs.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - L'amendement de la commission des lois a un défaut majeur : il ne prévoit pas d'obligation. Le mécanisme est déjà assez compliqué - puissent les ordres professionnels indiquer aux médecins comment procéder... Nous voterons les amendements identiques Meunier-Milon.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Madame Rossignol, je n'ai pas la même expérience que vous. Dans la Sarthe, les parents de la petite Marina déménageaient régulièrement, changeaient de médecin et d'école, pour fuir les services sociaux et éviter un signalement. Le Gouvernement a le sentiment que ces amendements auraient des effets contraires à ceux recherchés.
Mme Laurence Rossignol. - Votre subjectivité ne fait pas une vérité !
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Relions l'article R. 4127-44 du code de la santé publique précise les responsabilités des médecins dans un tel cas de figure : « Lorsqu'un médecin discerne qu'une personne auprès de laquelle il est appelé est victime de sévices ou de privations, il doit mettre en oeuvre les moyens les plus adéquats pour la protéger en faisant preuve de prudence et de circonspection. Lorsqu'il s'agit d'un mineur ou d'une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique, il alerte les autorités judiciaires ou administratives, sauf circonstances particulières qu'il apprécie en conscience. » L'obligation d'alerter les autorités administratives ou judiciaires si le médecin constate un sévice ou une maltraitance sur un mineur existe déjà !
Mme Michelle Meunier. - J'aime, moi aussi, les lois claires. L'amendement que M. Milon et moi présentons est inspiré du travail de professionnels de la petite enfance et de médecins qui ont cosigné une tribune dans L'Express. Je rappelle que seulement 2 % des signalements proviennent des médecins. La HAS, en mai 2011, a publié une fiche mémo « maltraitance chez l'enfant : repérages et conduite à tenir » ; elle a été mise à jour en octobre 2014 puis réactualisée en juillet 2017. Elle précise que le signalement n'implique pas d'apporter des preuves, c'est au procureur de la République de faire son travail.
Mme Laurence Cohen. - Les amendements Milon-Meunier me semblent plus précis : ils instituent une obligation d'information. Il est difficile pour les professionnels de santé, je le sais pour être orthophoniste, d'évoquer des sévices physiques mais aussi psychiques et moraux. Cadrons bien les choses pour aider les professionnels à effectuer des signalements.
Mme Françoise Laborde. - N'étant ni juriste ni médecin mais professionnel de l'éducation, je sais qu'il y a dans la décision de faire un signalement une grande part de subjectivité. On hésite à faire des signalements, on a peur de le regretter si on se trompe. Le groupe RDSE votera aussi les amendements Milon-Meunier, en espérant que leur rédaction sera parfaite avant la CMP.
M. Yannick Vaugrenard. - Je rappellerai seulement le serment d'Hippocrate : « Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J'interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité ». Tout est dit !
Mme Françoise Gatel. - Le code de la santé publique fait déjà obligation au médecin, soit. Toutefois, je voterai les amendements Milon-Meunier. Vous connaissez le proverbe africain : il faut un village pour élever un enfant ; je crois qu'il faut aussi toute une société pour les protéger. L'enfant est souvent muet parce qu'il est violenté dans le cercle familial ou par des proches. Il faut briser la chape du silence et encercler les prédateurs.
Les amendements identiques nos1 rectifié quater et 13 rectifié bis sont adoptés et deviennent un article additionnel.
L'amendement n°141 n'a plus d'objet, non plus que l'amendement n°27 rectifié.
Les amendements identiques nos2 rectifié quater et 14 rectifié bis sont adoptés et deviennent un article additionnel.
ARTICLE 2 BIS D
M. le président. - Amendement n°142, présenté par Mme M. Mercier, au nom de la commission.
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
L'amendement de cohérence n°142, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 2 bis D, modifié, est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°5 rectifié bis, présenté par Mme L. Darcos, MM. Milon et Cambon, Mme Lavarde, MM. Hugonet, Kennel, Paul, Lefèvre et Bascher, Mmes Gruny et Garriaud-Maylam, MM. Paccaud, B. Fournier et Vogel, Mme Duranton, M. Mayet, Mme de Cidrac, MM. Brisson, Gilles, Bonhomme, Rapin, Revet et Charon, Mme Dumas, MM. Sido et Mandelli, Mme Boulay-Espéronnier, M. Le Gleut et Mmes Bonfanti-Dossat et Keller.
Après l'article 2 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 3° de l'article 222-24 et à l'article 222-29 du Code pénal, après les mots : « physiques ou psychiques », sont insérés les mots : « , à sa situation économique ».
Mme Laure Darcos. - Qui n'a pas été ému par le témoignage d'Anne Lorient dans Mes années barbares ? Elle a été violée 70 fois durant les dix-sept années qu'elle a passées dans la rue. Son témoignage dit l'extrême vulnérabilité des femmes qui vivent en marge de la société, sans domicile fixe. En 2012, 38 % des sans-abri étaient des femmes. Cet amendement aggrave les peines en cas d'agression sexuelle sur des personnes en détresse économique.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Merci pour cet amendement qui apporte une précision utile : avis favorable.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Sagesse.
L'amendement n°5 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°31 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 2 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l'article 55 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque sont constatées des violences sexuelles, le médecin est habilité à mettre sous scellé les preuves desdites violences sexuelles. »
Mme Laurence Rossignol. - Cet amendement est inspiré des préconisations du groupe de travail relatif à l'amélioration et à la simplification de la procédure pénale dans le cadre des chantiers de la justice. Il s'agit de faire en sorte qu'une victime de violences sexuelles ne souhaitant pas porter plainte dans l'immédiat puisse le faire plus tard, sans que les preuves matérielles des violences sexuelles subies ne soient détruites. On sait combien le dépôt de plainte chez les victimes d'agressions sexuelles est aléatoire, différent, compliqué ; il n'y a pas de schéma.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Retrait. Les dispositions de la future loi sur la justice permettront au médecin légiste de mettre les preuves sous scellés pour toutes les infractions. Retrait ?
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Même avis.
Mme Laurence Rossignol. - Puisque cela est prévu dans quelques mois, adoptons dès à présent cette disposition pour les agressions sexuelles. Ce sera un acquis.
L'amendement n°31 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°30 rectifié, présenté par Mme Jasmin et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 2 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 1434-2 du code de santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...°D'un programme régional relatif à la prévention des violences sexuelles et à l'accès aux soins des victimes de ces violences. »
Mme Victoire Jasmin. - Madame la Ministre, le Tour de France de l'égalité doit aussi passer par l'outre-mer. Nous attendons toujours votre visite.
Les projets régionaux de santé, créés par la loi HPST, sont un outil important mais sous-utilisé. Ils devraient comporter un volet sur la prévention des violences sexuelles, l'accès aux soins et le suivi médical des victimes de violences sexuelles. L'on pourrait ainsi co-construire des actions concrètes de santé au plus près des populations.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Avis favorable.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Madame Jasmin, j'ai prévu un déplacement outre-mer à la rentrée. Le Tour de France de l'égalité y est passé ; des ateliers y ont été organisés par les délégués territoriaux.
Avis défavorable, non sur le fond, mais parce que le président de la République a annoncé, le 25 novembre dernier, dix centres de soin psychotraumatiques, le dépôt de la plainte dans les structures d'accueil en CHU avec recueil des preuves à l'hôpital, des référents police dans les structures d'aide aux victimes et la généralisation d'intervenants sociaux dans les commissariats.
L'amendement n°30 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°32 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 2 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant la part de responsabilité des violences sexuelles ou sexistes (viols et autres agressions sexuelles, violences conjugales et intrafamiliales, harcèlement sexuel et sexiste, violences sexuelles et sexistes commises dans l'espace numérique) sur la commission d'un suicide, ou d'une ou plusieurs tentatives de suicides, par les victimes desdites violences.
Mme Laurence Rossignol. - Encore un rapport, me dira-t-on mais un rapport peut être utile. Celui que je demande concerne les décès liés aux violences faites aux femmes. Environ 120 femmes meurent chaque année sous les coups de leur compagnon ou ex-compagnon, j'ai la conviction que ce chiffre est sous-évalué ; des femmes se suicident pour échapper à ces violences. Il est temps d'en savoir plus sur ce phénomène. Je propose la méthodologie suivante : une convention avec des SDIS et des parquets dans quelques départements de manière que les pompiers, lorsqu'ils interviennent sur un suicide, recherchent s'il n'y a pas eu auparavant des mains courantes déposées, des faits de violences ou des témoins de violences dans l'entourage de la personne.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Madame Rossignol, le Parlement a déjà les moyens de se saisir et de contrôler le Gouvernement pour évaluer les politiques publiques...
Mme Laurence Rossignol. - Il ne s'agit pas d'évaluer une politique publique !
Mme Marie Mercier, rapporteur. - ...sans lui demander un rapport qui ne sera pas remis - comme les précédents... (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - L'avis n'est guère favorable sur la forme car il s'agit d'une demande de rapport. Sagesse sur le fond, toutefois, car je partage votre conviction qu'il y a un lien entre suicides et violences sexuelles. Un travail d'étude et de quantification et est en cours.
Mme Laurence Rossignol. - Madame la Rapporteure, le Parlement n'a pas les moyens de réaliser une telle mission d'évaluation, vous le savez bien. C'est un sujet nouveau qui ne fait pas l'objet d'une politique publique. Si le Parlement pouvait se lancer dans ce travail, vous pensez bien que je serais volontaire !
M. David Assouline. - J'ai été le premier à mettre le doigt sur le problème des rapports, en tant que président de la commission de contrôle de l'application des lois. La demande de rapport est souvent un moyen de contourner l'article 40 de la Constitution, d'aborder un sujet par la bande. Ce n'est pas le cas de celui-ci. Quant à la doctrine « pas de rapport », elle pose problème car elle est à géométrie variable. La commission ne se prive pas de demander des rapports, on le verra plus tard.
M. Jacques Bigot. - Mme la ministre a donné un avis de sagesse. Dès lors, on ne voit pas pourquoi la rapporteure s'oppose à cette demande.
Mme Françoise Laborde. - Je remercie la ministre pour son avis de sagesse. J'ai en tête le cas à Toulouse d'une femme qui s'est suicidée en présence de son mari. Son mari a juste été condamné pour non-assistance à personne en danger.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Sagesse, à titre personnel.
Mme Marta de Cidrac. - Nous avons tous en tête des cas similaires. Je suivrai la position de la commission des lois. Au fond, que 120 ou 200 femmes meurent par an à cause de ces violences n'est pas la question ; l'essentiel, c'est d'agir et de s'en donner les moyens. Ne perdons pas de temps avec des rapports.
L'amendement n°32 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°48 rectifié, présenté par Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 2 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant la mise en oeuvre de l'éducation à la sexualité dans le cadre scolaire, à l'école primaire, au collège et au lycée.
Mme Claudine Lepage. - Au risque de décevoir certains, cet amendement, qui reprend une recommandation du rapport du groupe de travail sur la verbalisation du harcèlement de rue, consiste également en une demande de rapport sur l'évaluation de l'éducation sexuelle apportée aux élèves durant leur scolarité. La lutte contre les violences sexuelles et sexistes ne peut se limiter au volet répressif. Une école primaire sur quatre ne remplit pas son obligation d'organiser des séances d'éducation à la sexualité. Demander un bilan de cette politique n'est pas incongru.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Avis défavorable.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Avis défavorable. Ce rapport existe déjà : l'inspection générale de l'Éducation nationale rendra un rapport à la rentrée. Je m'engage à venir devant la délégation pour en partager les conclusions.
Mme Esther Benbassa. - Un rapport sur l'éducation, c'est très bien. Mais nous savons ce que deviennent les rapports. Heureusement qu'ils sont dématérialisés !
Un groupe de réflexion sur la révision des manuels scolaires s'impose, en suivant l'exemple des pays nordiques, pour bien indiquer aux jeunes que la sexualité n'est pas l'abus. Mais surtout, il est temps de passer à l'action ! (M. Philippe Bas, président de la commission, applaudit.)
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Je partage votre avis. Nous sommes dans l'action : Jean-Michel Blanquer a adressé aux recteurs une circulaire recensant les associations agréées pour intervenir en milieu scolaire afin que la loi, qui prévoit deux séances annuelles d'éducation à la vie affective et sexuelle, soit enfin mise en oeuvre. En complément, la « mallette des parents » informe ces derniers des propos qui seront tenus à leurs enfants pendant le temps scolaire, afin de s'assurer de leur adhésion et éviter les fantasmes.
Mme Catherine Deroche. - Je ne voterai pas cet amendement. Madame la Ministre, vous avez dit que vous présenteriez ce rapport devant la délégation aux droits des femmes mais ce rapport concerne l'éducation : il intéresse tous les sénateurs.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Je le présenterai à tout sénateur qui le souhaite. Par exemple, devant la commission de la culture et de l'éducation, si elle souhaite m'entendre.
L'amendement n°48 rectifié n'est pas adopté.
ARTICLE 2 BIS E (Supprimé)
M. le président. - Amendement n°76 rectifié, présenté par Mmes Billon et Vullien, MM. Henno, Laugier, Bockel, Janssens, Longeot et Delahaye, Mme de la Provôté, M. Canevet, Mme Goy-Chavent, M. Cazabonne, Mmes Dindar et Guidez, MM. Louault, Delcros, Moga et Médevielle, Mmes Tetuanui, Létard, Joissains, Garriaud-Maylam, Vérien et Jasmin et M. Cadic.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les dispositifs locaux d'aide aux victimes d'agressions sexuelles, permettant à ces victimes d'être accompagnées et de réaliser les démarches judiciaires au sein même des centres hospitaliers universitaires.
Mme Annick Billon. - Cet amendement rétablit l'article 2 bis E, introduit à l'Assemblée nationale, qui prévoit un rapport sur les dispositifs locaux d'aide aux victimes d'agressions sexuelles. Faut-il généraliser les conventions conclues entre le parquet et le CHU, sur le modèle de la Cellule d'accueil d'urgences des victimes d'agressions (Cauva) à Bordeaux qui offre, dans un même lieu, aide médicale, psychologique, sociale et juridique, et permet d'amorcer une procédure judiciaire ?
M. le président. - Amendement identique n°90 rectifié, présenté par Mmes Laborde et M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Léonhardt et Menonville.
Mme Françoise Laborde. - Nous avons adopté le rapport sur les statistiques, la ministre en annonce un sur l'éducation... Disons que cet amendement est défendu !
M. le président. - Amendement identique n°111, présenté par Mmes Cohen, Benbassa et Assassi, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et MM. Savoldelli et Watrin.
Mme Laurence Cohen. - Demander un rapport reste l'un des rares moyens d'échapper à l'article 40 et d'attirer l'attention du Gouvernement ! En tant que membre de la commission des affaires sociales, je suis sceptique sur la mise en place des centres psycho-traumatiques : jusqu'à preuve du contraire, les moyens ne sont pas au rendez-vous...
Mme Marie Mercier, rapporteur. - La commission des lois est attachée à l'accompagnement des victimes, qu'elle préconisait dans son rapport d'information. Un récent rapport de l'IGAS recense déjà les dispositions existantes. Nous avons besoin d'actes à présent, pas d'un énième rapport qui ne sera jamais remis, ou dans trois ans ! Avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Sagesse.
Les amendements identiques nos76 rectifié, 90 rectifié et 111 ne sont pas adoptés.
L'article 2 bis E demeure supprimé.
ARTICLE ADDITIONNEL
M. le président. - Amendement n°54 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'article 2 bis E
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase de l'article L. 121-1 du code de l'éducation nationale est complétée par les mots : « ainsi qu'une obligation de sensibilisation des personnels enseignants aux violences sexistes et sexuelles et à la formation au respect du non-consentement ».
M. Yannick Vaugrenard. - Ce n'est pas une demande de rapport... (M. Ladislas Poniatowski s'en félicite.)
L'environnement social des établissements scolaires n'est malheureusement pas épargné par les violences sexistes et sexuelles. Depuis la loi pour la refondation de l'école du 8 juillet 2013, l'égalité filles-garçons fait partie intégrante de la formation initiale des personnels d'éducation ; plusieurs circulaires indiquent qu'elle est également intégrée à la formation continue. Or cette formation à l'égalité ne bénéficie qu'à une minorité des 900 000 enseignants et non-enseignants et reste optionnelle dans les ESPé. D'où cet amendement qui rappelle l'obligation d'une formation des professeurs, notamment au respect du non-consentement.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Avis favorable à cette précision utile et normative.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - J'ai déjà parlé du grand plan de formation de toute la fonction publique au repérage et à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles ; il devrait vous donner satisfaction. Avis défavorable.
L'amendement n°54 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
ARTICLE 2 BIS (Supprimé)
M. le président. - Amendement n°33 rectifié bis, présenté par Mme de la Gontrie et les membres du groupe socialiste et républicain.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur les dispositifs locaux d'aide à la mobilité des victimes de violences sexuelles destinés à leur permettre de se déplacer, notamment pour un examen auprès d'un médecin légiste ou une audience, et de poursuivre leurs démarches de judiciarisation.
Mme Laurence Rossignol. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°77 rectifié bis, présenté par Mmes Billon et Vullien, MM. Henno, Laugier, Bockel, Janssens et Delahaye, Mme de la Provôté, M. Canevet, Mme Goy-Chavent, M. Cazabonne, Mmes Dindar et Guidez, MM. Louault, Delcros, Moga et Médevielle, Mmes Tetuanui, Létard, Joissains, Garriaud-Maylam et Vérien et M. Cadic.
Mme Annick Billon. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°91 rectifié, présenté par Mmes Laborde et M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Jouve et MM. Léonhardt et Menonville.
Mme Françoise Laborde. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°112, présenté par Mmes Cohen, Benbassa et Assassi, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et MM. Savoldelli et Watrin.
Mme Laurence Cohen. - Défendu.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Avis défavorable.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Sagesse.
Les amendements identiques nos33 rectifié bis, 77 rectifié bis, 91 rectifié et 112 ne sont pas adoptés.
L'article 2 bis demeure supprimé.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°37 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
I. - Après l'article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 15-3 du code de procédure pénale, il est inséré un article 15-3-... ainsi rédigé :
« Art. 15-3-... - Les victimes mineures comme majeures des infractions listées aux articles 222-1 à 222-5, 222-9 à 222-14, 222-22 à 222-33 et 227-25 à 227-27-2-1 du code pénal ont le droit, si elles en manifestent la volonté, de témoigner des faits subis dans un local leur garantissant intimité et discrétion. »
II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre ...
Dispositions relatives à la répression des violences sexuelles et à la protection des victimes majeures et mineures de violences sexuelles
Mme Martine Filleul. - Cet amendement garantit aux victimes d'infractions sexuelles le droit à l'intimité lorsqu'elles viennent témoigner de l'agression subie. Devoir décrire les sévices subis devant quantité de personnes à l'accueil du commissariat renforce le traumatisme. Résultat, de nombreuses victimes de viol hésitent à porter plainte...
Mme Marie Mercier, rapporteur. - Nous avions demandé que l'amendement soit rectifié pour figurer à l'annexe... À défaut, avis défavorable.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Mais favorable sur le fond !
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Nous partageons cet objectif. Un vaste plan est en cours de déploiement avec l'appui de la mission interministérielle de protection des femmes.
Le président de la République a annoncé, le 25 novembre dernier, un dispositif de recueil des preuves dans des unités médico-judiciaires, la possibilité de porter plainte à l'hôpital, des référents police et gendarmerie dans les structures d'accueil des femmes victimes de violences, des intervenants sociaux dans les commissariats ou encore le lancement d'une plateforme de signalement.
Policiers et gendarmes ont déjà l'obligation de recevoir les plaintes et les victimes peuvent déjà être entendues dans des locaux adaptés garantissant la discrétion. L'enjeu réside dans la formation et la sensibilisation. Il faut une politique volontariste pour appliquer les textes, le Gouvernement s'y emploie depuis novembre. Avis défavorable.
L'amendement n°37 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°38 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
I. - Après l'article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 15-3 du code de procédure pénale, il est inséré un article 15-3-... ainsi rédigé :
« Art. 15-3-... - Lorsqu'une victime, majeure ou mineure, de faits semblant constitutifs des infractions listées aux articles 222-1 à 222-5, 222-9 à 222-14, 222-22 à 222-33 et 227-25 à 227-27-2-1 du code pénal, dénonce la ou les infractions devant les autorités judiciaires, la prise d'une plainte est obligatoire sauf refus exprès de la victime. »
II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre ...
Dispositions relatives à la répression des violences sexuelles et à la protection des victimes majeures et mineures de violences sexuelles
Mme Maryvonne Blondin. - J'ai constaté dans mon département les améliorations apportées à l'accueil des femmes victimes dans les commissariats, mais les refus de prise de plainte restent trop nombreux, ce qui décourage les victimes. Ces refus, bien que prohibés par le code de procédure pénale, renforcent l'idée que la justice ne sera pas rendue et empêchent la reconstruction. La transformation d'une plainte en inscription sur le registre des mains courantes n'est pas plus acceptable. Renforçons le droit au dépôt de plainte.
Mme Marie Mercier, rapporteur. - L'article 15-3 du code de procédure pénale dispose déjà que l'officier de police judiciaire est tenu de recevoir les plaintes, ce que rappelle également l'article 5 de la Charte d'accueil du public et des victimes affichée dans les commissariats... Une disposition supplémentaire, qui plus est limitée aux infractions sexuelles, n'est pas nécessaire. Il ne suffit pas de changer la loi pour éradiquer certaines mauvaises pratiques... Retrait.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Même avis.
Mme Élisabeth Doineau. - C'est en effet un problème sur le terrain. Il faudrait renforcer les moyens des commissariats, notamment. Dans mon département, cela fait dix ans que des intervenants sociaux sont présents dans les commissariats. Or les dotations de l'État diminuent alors qu'il faudrait plutôt abonder le fonds d'intervention pour permettre un accompagnement des victimes au moment où elles déposent plainte. (Mmes Laure Darcos, Martine Filleul et Annick Billon applaudissent.)
L'amendement n°38 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°40 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.
I. - Après l'article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article 371-1 du code civil est complété par les mots : « et à l'exclusion de tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux punitions et châtiments corporels ».
II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :
Titre ...
Dispositions renforçant la protection des mineurs contre toutes les violences
Mme Laurence Rossignol. - Cet amendement inscrit, dans le code civil, que l'autorité parentale s'exerce à l'exclusion de tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux punitions et châtiments corporels.
Les spécialistes s'accordent : les enfants à qui l'on a dit que personne n'avait le droit de porter la main sur eux, de toucher à leur corps, sont plus forts pour résister aux agressions sexuelles, ou pour les dénoncer. Les punitions corporelles ont des conséquences psychologiques durables, elles désarment l'enfant dans sa capacité à exiger que son corps soit respecté par l'adulte.
La ministre de la Santé comme la garde des Sceaux, aux Assises de la protection de l'enfance à Nantes, ont dit leur soutien à cette disposition. Il est important que ce projet de loi la sanctuarise.
Mme Michelle Meunier. - Très bien.
M. Philippe Bas, président de la commission. - Vous auriez pu avoir cette idée quand vous étiez ministre de la famille...
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Nous l'avons proposé. Mauvaise pioche !
M. Philippe Bas, président de la commission. - Je suis révulsé par tout châtiment corporel sur les enfants et serais bien marri si j'apprenais que la République les autorise.
L'article 222-13 du code pénal punit de trois ans d'emprisonnement toutes les violences sur mineurs : gifles, fessées sont interdites en France, je tiens à vous le rappeler ! Ces pratiques, autrefois tolérées, sont insupportables et font l'objet de poursuites.
Votre amendement pose une interdiction mais ne l'assortit pas de sanctions, c'est un coup d'épée dans l'eau.
Celui qui présente un tel amendement a l'avantage : il défend une noble cause. Celui qui en souligne la vacuité a l'air d'être favorable aux châtiments corporels ! Je le redis : je suis radicalement hostile à tout châtiment corporel, et soulagé que le code pénal les poursuive. Reste que je suis contre cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) J'assume cette position et demande l'avis du Gouvernement.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État. - Il me semble que Mme Rossignol avait proposé cette mesure quand elle était ministre mais s'était heurtée à des difficultés de procédure...
Le Gouvernement est favorable à l'inscription dans la loi de l'interdiction des châtiments corporels. À titre personnel, c'est un combat que je mène depuis longtemps. Néanmoins, ce texte n'est pas le bon véhicule ; une loi de protection de l'enfance autonome serait plus adéquate. Retrait, pour une raison de forme uniquement.
Mme Laurence Rossignol. - Je suis au regret de relever deux erreurs, Monsieur le Président Bas ! Lorsque j'étais aux responsabilités, j'avais soumis ce même amendement à la commission spéciale sur la loi Égalité et citoyenneté. Mme Gatel, le qualifiant de cavalier, lui avait opposé l'article 44 du Règlement. L'Assemblée nationale l'adopta pourtant mais le Conseil constitutionnel, invoquant l'entonnoir, le censura. Ne dites pas que je ne me suis pas préoccupée du sujet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)
J'aimerais que vous ayez raison et que les adultes aient conscience qu'il est interdit de frapper un enfant. Malheureusement, en vertu d'un droit de correction napoléonien et jurisprudentiel, les parents sont convaincus du contraire. Un homme battant sa femme ou son chien sur la voie publique trouvera des gens pour s'y opposer, mais pas s'il corrige son enfant car, opposera-t-il, « il en a le droit, c'est le sien ! » C'est justement pour cela que mon amendement vise le code civil et non le code pénal car je n'imagine pas que les enfants puissent menacer de traîner leurs parents devant le tribunal.
M. Philippe Bas, président de la commission. - Je vous donne acte de vos tentatives pour faire adopter cet amendement quand vous étiez ministre ; ce n'est pas le Sénat qui vous a bloquée, mais le Conseil constitutionnel.
Le « droit de correction » dont vous parlez n'existe pas. Heureusement ! Discutons sereinement, sur des bases claires.
Mme Françoise Gatel. - Historiquement, Mme Rossignol a raison : cette proposition était inscrite dans le projet de loi Égalite et citoyenneté - texte que j'avais qualifié de cabinet de curiosités, tant ses dispositions hétéroclites ressemblaient à une grande opération de soldes d'idées généreuses. Pour aboutir à un texte qui ait du sens, j'avais en effet repoussé ces cavaliers.
En l'espèce, le sujet relève, comme l'a dit la ministre, d'une loi de protection de l'enfance.
M. Arnaud de Belenet. - Tous les élus connaissent l'article 371-1 du code civil, ils le lisent à chaque fois qu'ils célèbrent un mariage. L'autorité parentale a pour finalité l'intérêt de l'enfant : tout est dit. Il n'est pas opportun de traiter de manière partielle la question des droits de l'enfant dans un texte sur les violences sexuelles et sexistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. - Précisément, lorsque nous célébrons des mariages, les époux sont très attentifs à la lecture de ces obligations. Évoquer l'interdiction des châtiments corporels à ce moment solennel serait plus pédagogique qu'un article dans le code pénal.
Nous savons tous que l'interdiction des mauvais traitements n'est pas toujours respectée. Les petites violences sur les enfants perdurent, or elles portent atteinte à leur intégrité et les rendent vulnérables. Il y a un lien avec les violences sexuelles.
Le Gouvernement renvoie à un autre véhicule législatif ? Aucun n'a été annoncé. Ne reportons pas sine die une mesure aussi importante.
À la demande de la commission des lois et du groupe socialiste, l'amendement n°40 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°198 :
Nombre de votants | 334 |
Nombre de suffrages exprimés | 312 |
Pour l'adoption | 110 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La séance est suspendue à 13 h 20.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 15 heures.