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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Éloge funèbre de François Fortassin

M. Gérard Larcher, président du Sénat

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

Rappel au Règlement

Mme Éliane Assassi

M. Philippe Bas, président de la commission des lois

Discussion des articles du projet de loi

ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article premier

ARTICLE PREMIER

ARTICLE PREMIER BIS

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 2

Questions d'actualité

Libération de Mossoul

M. Jeanny Lorgeoux

Mme Florence Parly, ministre des armées

Taxation des poids lourds

Mme Anne-Catherine Loisier

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Réforme de la taxe d'habitation (I)

M. Pierre Cuypers

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics

Réforme de la taxe d'habitation (II)

M. Philippe Esnol

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics

Plan climat et mix énergétique

Mme Delphine Bataille

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Réforme de la taxe d'habitation (III)

Mme Cécile Cukierman

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics

Situation de l'entreprise GM&S

M. Jean-Jacques Lozach

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement

Situation politique à Montpellier

M. Jean-Pierre Grand

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur

Ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse

Mme Brigitte Micouleau

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Canal Seine-Nord

Mme Catherine Génisson

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Demande d'avis sur une nomination

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 2 BIS

Commission (Candidature)

Commission (Nomination)

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 2 bis

ARTICLE 2 QUATER

ARTICLE ADDITIONNEL

TITRE III (Dispositions relatives à l'interdiction de l'emploi de membres de la famille des élus et des membres du Gouvernement)

ARTICLE 3

Mme Catherine Génisson

ARTICLES ADDITIONNELS

Éloge funèbre de François Fortassin

M. Gérard Larcher, président du Sénat

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée)

Rappel au Règlement

Mme Éliane Assassi

M. Philippe Bas, président de la commission des lois

Discussion des articles du projet de loi

ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article premier

ARTICLE PREMIER

ARTICLE PREMIER BIS

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 2

Questions d'actualité

Libération de Mossoul

M. Jeanny Lorgeoux

Mme Florence Parly, ministre des armées

Taxation des poids lourds

Mme Anne-Catherine Loisier

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Réforme de la taxe d'habitation (I)

M. Pierre Cuypers

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics

Réforme de la taxe d'habitation (II)

M. Philippe Esnol

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics

Plan climat et mix énergétique

Mme Delphine Bataille

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Réforme de la taxe d'habitation (III)

Mme Cécile Cukierman

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics

Situation de l'entreprise GM&S

M. Jean-Jacques Lozach

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement

Situation politique à Montpellier

M. Jean-Pierre Grand

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur

Ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse

Mme Brigitte Micouleau

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Canal Seine-Nord

Mme Catherine Génisson

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Demande d'avis sur une nomination

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 2 BIS

Commission (Candidature)

Commission (Nomination)

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 2 bis

ARTICLE 4

Mme Catherine Tasca

M. Maurice Antiste

ARTICLES ADDITIONNELS

Ordre du jour du mercredi 12 juillet 2017

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mardi 11 juillet 2017

5e séance de la session extraordinaire 2016-2017

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Jean-Pierre Leleux, M. Philippe Nachbar.

La séance est ouverte à 14 h 15.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Éloge funèbre de François Fortassin

M. Gérard Larcher, président du Sénat .  - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent ainsi que M. le ministre de la cohésion des territoires.) C'est une voix du Sénat écoutée, tolérante qui s'est éteinte avec François Fortassin. C'est une figure charismatique et chaleureuse de la Bigorre qui s'en est allée.

II luttait, nous le savions, depuis de longs mois, avec beaucoup de courage, contre la maladie qui l'avait affaibli mais qui ne l'empêchait pas d'être toujours présent au Sénat, de participer aux travaux de notre Bureau avec la simplicité, l'accessibilité et la chaleur qui étaient sa marque.

François Fortassin nous a quittés trop tôt et cet amoureux de la vie, de son pays et de son territoire, nous manque.

Oui, c'est avec émotion que nous avons appris sa disparition le 15 mai dernier, au lendemain même de la cérémonie d'installation du président de la République, dont il avait parrainé la candidature et qu'il avait soutenu, mais son état de santé ne lui a pas permis d'être présent à l'Élysée.

Nous lui avons rendu un dernier hommage en votre nom, le 19 mai, à l'occasion d'une émouvante cérémonie au coeur de sa commune natale de Sarp au milieu de ses proches et de ceux qui lui étaient chers.

J'étais accompagné de plusieurs membres du Bureau du Sénat dont François Fortassin était membre depuis 2008 - nos collègues Françoise Cartron et Frédérique Espagnac - et de deux présidents de groupes politiques - Didier Guillaume et Jacques Mézard, depuis quelques jours alors membre du Gouvernement.

Cet hommage trouve aujourd'hui, après la reprise de nos travaux en séance publique, son prolongement dans notre hémicycle.

François Fortassin représentait le département des Hautes-Pyrénées au sein de notre assemblée depuis le 3 mars 2001, date du décès de François Abadie. Il en était le suppléant depuis 1983, quelques mois avant les élections sénatoriales.

François Fortassin était un humaniste. Ses convictions républicaines et laïques trouvaient leur expression dans les valeurs du radicalisme qu'il portait haut et fort avec un mélange de douceur, de sens de l'écoute, mais aussi de force.

Il restera toujours fidèle à ces valeurs, qu'il retrouva au Sénat au sein du groupe du Rassemblement démocratique social et européen, et sur la scène politique parmi les Radicaux de gauche.

C'est, disait-il, « le parti qui correspond le mieux à ma sensibilité : on y privilégie l'humanisme et l'épanouissement individuel. J'ai été influencé lors de mes études d'histoire par les figures d'Alain, de Clemenceau, de Pierre Mendès-France, et plus tard par celle de Maurice Faure, René Billères, Michel Crépeau et bien sûr François Abadie ».

François Fortassin était professeur certifié d'histoire et géographie. Né dans cette commune de Sarp, dans la vallée de la Barousse qui lui était si chère, il avait, après des études secondaires au lycée de Saint-Gaudens et des études universitaires à Toulouse, enseigné au lycée Théophile Gautier, puis au collège Victor Hugo de Tarbes.

Après quelques engagements syndicaux, sa formation historique, ses convictions républicaines, son attachement à la laïcité et son lien viscéral au terroir bigourdan le conduisirent naturellement à l'engagement politique.

Élu conseiller municipal en mars 1971, il devient six ans plus tard maire de sa commune natale, mandat qu'il exercera jusqu'en 2001, durant 24 ans, avant d'être contraint d'y renoncer pour respecter la loi sur la limitation du cumul des mandats, tout en conservant les fonctions de premier adjoint.

Il fut, en tant que maire de Sarp, le principal artisan de la création de la communauté de communes de la vallée de la Barousse. Le défenseur inlassable de son territoire qu'il était s'investit aussi fortement dans le syndicat des eaux de la Barousse et du Comminges.

Sa carrière d'élu local conduisit François Fortassin à exercer le mandat de conseiller général du canton de Mauléon-Barousse.

Il fut aussi, durant près de vingt ans, membre du conseil régional de Midi-Pyrénées où il présida le groupe des radicaux de gauche.

Il fut enfin, d'avril 1992 à mars 2008, président du conseil général des Hautes-Pyrénées, fonction qu'il marqua durablement de son empreinte.

À la tête de l'assemblée départementale, il s'engagea, durant seize ans, sur tous les grands dossiers concernant les Hautes-Pyrénées avec le souci premier de maintenir un aménagement équilibré et harmonieux des territoires, notamment entre les territoires ruraux et l'agglomération tarbaise.

Il se battit pour donner une nouvelle impulsion au développement économique du département, créa un « fonds d'aménagement rural » et un « fonds d'équipement urbain » pour soutenir financièrement les communes du département. En matière scolaire, le Conseil général réalisa sous son impulsion la réhabilitation des collèges et soutint le développement d'un pôle universitaire à Tarbes.

Mais ce qui tenait tout particulièrement à coeur à François Fortassin était la reconversion du Pic du Midi en un haut lieu touristique, le « Vaisseau des étoiles ». Il fit de ce symbole majeur, avec Lourdes - voyez la diversité républicaine dans ce département -, de l'attractivité et du rayonnement des Hautes-Pyrénées, une priorité qu'il assuma en présidant le syndicat mixte. Celui qui n'a pas passé avec François Fortassin une ascension puis une soirée au haut du Pic du Midi entre terre et étoiles, gastronomie et chants montagnards, n'a pas connu la quintessence de la vie et de l'air pur partagé. Je peux vous en porter un témoignage, plus lucide à la montée qu'à la descente. (Sourires)

François Fortassin, disait-il, n'avait pas prévu cette carrière nationale. Je le cite : « je ne m'étais pas fixé d'objectifs mais, à un moment donné, François Abadie a vu en moi son successeur. Cela s'est fait comme ça, simplement. Ce mandat national n'a pas été une préoccupation majeure, mais je l'ai assumé avec beaucoup de bonheur ».

François Fortassin était un sénateur heureux, qui portait un regard personnel et aiguisé par l'expérience sur le mandat sénatorial : « le Sénat est une chambre de réflexion très utile. Ce que je déplore le plus dans la période actuelle, c'est la dégradation du politique à laquelle on aboutit à travers les réseaux sociaux. Il est bon d'avoir une chambre où puisse s'engager la réflexion et qui ne soit pas dans la précipitation ou l'émotion de l'instant ». À méditer collectivement.

C'est le message que François Fortassin nous délivra constamment, avec le sens du rassemblement, de l'écoute et du dialogue qui le caractérisaient, à l'occasion de chacune des réunions du Bureau du Sénat où ses interventions justes et de bon sens emportaient bien souvent l'adhésion.

Notre collègue était un républicain modéré mais n'était pas modérément républicain. Il portait au Sénat les valeurs qui étaient les siennes, qu'il s'agisse de la construction européenne pour laquelle il réclamait inlassablement - même quand ce n'était pas du tout la mode...- , « plus d'Europe et mieux d'Europe », ou de la laïcité pour laquelle il s'est toujours battu, considérant qu'il fallait affirmer constamment et avec vigueur les valeurs que la République porte.

Dans l'hémicycle sénatorial, François Fortassin, à titre personnel ou au nom de son groupe du RDSE, s'intéressait à tous les sujets. Membre successivement des commissions des affaires culturelles, des affaires économiques, où j'ai travaillé avec lui, des finances, puis des affaires sociales, ses prises de parole furent innombrables, et toujours utiles.

J'ai en mémoire ses dernières interventions à la fin de l'année dernière sur le projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté ou sur deux textes législatifs relatifs aux activités sportives, autre sujet qui le passionnait.

Il déposa encore au début de cette année deux propositions de loi visant à garantir le principe de l'indépendance de la justice et à rétablir les critères de classement des communes situées en zone de revitalisation rurale.

Homme de convictions, François Fortassin était aussi un homme de passions. Il partageait avec ses concitoyens bigourdans celles de la montagne, de la chasse, de la tauromachie et du rugby, sans oublier bien sûr les plaisirs de la table auxquels l'épicurien jovial qu'il était ne demeurait pas insensible...

Je ne saurais enfin oublier la passion de François Fortassin pour le Tour de France. Celui qui accueillait, il y a quelques mois, l'organisateur de l'épreuve en vue de l'édition 2017 qui se déroule en ce moment même y voyait, je le cite : « quelque chose de magique, un miracle permanent et 3 500 kilomètres de sourires... ». Il en fit ainsi un instrument de promotion des Hautes-Pyrénées à l'occasion du passage annuel de l'épreuve sur les routes et les cols mythiques de son département.

François Fortassin a voué l'essentiel de son existence et de son énergie à son travail d'élu et de parlementaire.

Je souhaite redire notre sympathie attristée aux membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen du Sénat et à ses collègues de la commission des affaires sociales.

Je souhaite aussi exprimer à chacun des membres de sa famille, à ses six enfants et à tous les habitants de Sart avec qui j'ai partagé un moment entre l'esplanade de l'église - symbole de laïcité assumée - et la salle des fêtes, les condoléances très sincères de l'ensemble des sénatrices et des sénateurs, auxquelles j'ajoute ma peine et ma tristesse personnelles.

François Fortassin, dont le visage est ici présent sur son fauteuil, portait une parcelle vivante de République. (Applaudissements)

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires .  - Le 15 mai dernier, nous avons tous appris avec tristesse que François Fortassin venait de nous quitter. Quatre jours plus tard, à Sarp, dans la vallée de la Barousse à laquelle il tenait tant, nous étions nombreux à lui rendre hommage : vous, monsieur le président du Sénat, son successeur Michel Pélieu, son ami et successeur dans « notre » assemblée, allais-je dire, le président Didier Guillaume, l'ensemble de ses collègues du groupe RDSE et d'autres encore. Oui, nous étions nombreux à Sarp, aux côtés de sa famille et de ses amis, pour une journée de recueillement et pour rendre à François Fortassin l'hommage qu'il méritait. Je ne l'oublierai pas (M. le ministre s'interrompt un instant.) - vous comprendrez mon émotion. Je n'oublierai pas cette journée, parce qu'elle fut riche en émotions, mais aussi parce que c'était mon premier déplacement en tant que ministre de l'agriculture.

Mon ami François et moi n'aurons jamais eu l'occasion d'échanger dans une relation de parlementaire à ministre. Ces échanges auraient été riches, constructifs, pleins d'humour et d'amitié. Il aurait su faire remonter ses analyses du terrain avec ce « bon sens », expression que vous avez employée à juste titre à son propos, monsieur le président, qui le caractérisait, ce pragmatisme qui lui a permis de tracer une trajectoire politique remarquable.

Le pyrénéiste François Fortassin a ainsi gravi tous les échelons du cursus honorum politique grâce à sa passion pour les autres et pour son territoire.

Élu conseiller municipal de Sarp en 1971, puis maire en 1977, réélu constamment jusqu'en 2001, car la confiance ne s'efface pas. Conseiller général de 1979 jusqu'en 2015, président du conseil général des Hautes-Pyrénées de 1992 à mars 2008, il a succédé à François Abadie au Sénat, dont il était le suppléant, élu sénateur quelques mois plus tard, puis réélu dix ans plus tard, en 2011, dès le premier tour, preuve que les grands électeurs des Hautes-Pyrénées savaient que François Fortassin était un ardent défenseur de leur territoire mais aussi un fantassin de la République.

C'était un homme de fidélité aux valeurs républicaines, à son territoire, à la Haute Assemblée, au parti radical.

Pour avoir souvent parlé avec lui de ses responsabilités politiques, celle qu'il a le plus appréciée était celle de président de l'institution départementale qui lui donnait directement prise sur le réel, pour mener à bien des projets concrets en faveur de son territoire et de ses concitoyens. Il a mis toute son énergie au service du développement de son département, en maintenant constamment l'équilibre entre les territoires ruraux et l'agglomération tarbaise, ce qui n'est pas toujours facile : fonds d'aménagement rural, fonds d'équipement urbain pour soutenir financièrement les communes du département dans leurs opérations d'aménagement : ce fut plus qu'une réussite, un exemple.

En matière touristique, la reconversion du Pic du Midi, fut une priorité à laquelle il fut très attaché, nous sommes ici plusieurs à pouvoir en témoigner, il mit en place une réserve internationale du ciel étoilé dont il était très fier.

L'eau et l'irrigation étaient une autre de ses priorités, enjeu fondamental pour nos territoires et notre agriculture.

François Fortassin était d'abord un élu de terrain, soucieux d'efficacité, d'amélioration de la situation de ses concitoyens des Hautes-Pyrénées. Il s'exprimait au Sénat dans une totale liberté, chère au RDSE, où nous avons été collègues, inhérente à son caractère. Homme de terrain, libre, pragmatique, loin des dogmes et des postures, respectueux, il était tout simplement un sénateur utile à la fabrique de la loi et à la République.

Je n'oublie pas son accueil amical dans cette Haute Assemblée où il était particulièrement attachant, atypique, reconnu et apprécié. Rares étaient les semaines où il ne prenait pas l'avion de Tarbes ou de Pau pour rejoindre ce Sénat qu'il aimait tant. À ne plus le voir dans nos réunions de groupe, ni dans l'hémicycle, ni au restaurant du Sénat, ces derniers temps, nous avions deviné qu'il menait son dernier combat, si difficile, dans la plus grande dignité.

François était un ardent défenseur des valeurs républicaines. J'étais ainsi à ses côtés, lors d'une séance de questions au Gouvernement, lorsqu'il priait le garde des sceaux de respecter l'indépendance de la justice et la séparation des pouvoirs. Ce fut sa dernière expression publique.

Profondément épris de liberté, de solidarité et de tolérance, Il se battait aussi pour la laïcité qu'il associait à l'école où il avait exercé. Il pratiquait ces valeurs au quotidien dans le sport, notamment le rugby qu'il pratiquait et je ne vous dévoilerai pas ici son surnom dans la mêlée... C'était aussi un vrai passionné de cyclisme, autre sport enraciné dans ses Pyrénées, en particulier du Tour de France. Je puis vous annoncer que ce jeudi 13 juillet, quand le Tour de France passera dans la vallée de la Barousse, il y aura un moment d'émotion. Je puis vous révéler que durant les chaudes sessions extraordinaires de juillet, il multipliait les allers-retours entre l'hémicycle et son bureau, tout proche de celui de son président de groupe ; il se peut que lors de certaines échappées ou arrivées au sprint, deux ou trois amendements n'aient pu être défendus... (Sourires)

C'était aussi un aficionado de tauromachie.

Un amendement dont il était très fier, dont il parlait souvent, lui valant un franc succès dans son département, et dont il obtint l'adoption à la quasi-unanimité au Sénat, fut inséré ici au projet de loi résultant du Grenelle de l'environnement : « Les herbivores doivent manger de l'herbe ». Selon ses propres propos, illustrant son bon sens légendaire, « si l'on avait fait manger de l'herbe aux vaches, on n'aurait jamais eu la vache folle ».

Cette voix pragmatique et sincère d'un authentique républicain qui savait toujours ramener les débats à l'essentiel, à savoir, l'utilité de la loi, sa perception par les citoyens et ses effets véritables sur le quotidien des Français, cette voix s'est éteinte et nous manquera.

Homme de passion, homme de son territoire, ayant la République chevillée au corps, François Fortassin restera une grande figure du radicalisme, un grand élu local du sud-ouest, un parlementaire assidu, utile et toujours libre dans son expression comme dans ses votes.

Ceux qui le connaissent savent qu'il a désormais trouvé sa place dans le ciel étoilé au-dessus des Hautes-Pyrénées, quelque part au-dessus du Pic du Midi.

Au nom du Gouvernement de la République, j'adresse à sa famille, à ses proches, à ses administrés, mes condoléances les plus sincères et les plus attristées. (Applaudissements)

M. le président. - Observons ensemble un moment de recueillement.

(Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que le ministre observent un moment de recueillement.)

La séance est suspendue à 14 h 45.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

La séance reprend à 15 heures.

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l'action publique.

Rappel au Règlement

Mme Éliane Assassi .  - Le débat qui va s'ouvrir est fondamental. Les dernières campagnes électorales, la place des médias dans la vie publique ont mis en exergue l'exaspération face au rôle de l'argent dans la vie politique.

Des affaires d'enrichissement personnel et de corruption ont rythmé l'actualité en masquant le dévouement, la probité et le sens de l'intérêt général de l'immense majorité des élus.

Comment, dans ces conditions, ne pas débattre ici de la représentativité des élus, de la place des médias, de leurs rapports avec puissance d'argent et forces politiques, mais aussi des instituts de sondages aux mains des grands groupes privés ?

Le Parlement doit demeurer un lieu de débat alternatif. Où aura-t-il lieu sinon ? Au Conseil des ministres ?

De nombreuses, trop nombreuses irrecevabilités ont été décrétées pour refuser d'emblée l'examen d'amendements. La plupart au motif qu'ils n'auraient pas, comme l'exige l'article 45 de la Constitution, de lien direct voire indirect avec le projet de loi.

Monsieur le président de la commission des lois, la réforme de 2008 avait pourtant pour objet d'élargir le droit d'amendement, non de le restreindre. Dois-je lire des extraits du rapport de M. Hyest, votre prédécesseur, et de ses interventions en séance publique dans ce sens ?

Le Parlement doit défendre ses prérogatives avec fermeté face à un Conseil constitutionnel dont la légitimité pose question et qui restreint ainsi le champ du droit d'amendement dans l'un de ces revirements de jurisprudence dont il a le secret.

Le renforcement du pouvoir exécutif décidé et mis en oeuvre très rapidement par M. Macron doit nous faire réfléchir. Le droit d'amendement est crucial pour respecter l'équilibre des pouvoirs. L'utilisation habile de l'article 45 donne au Gouvernement la clé du droit d'amendement. Monsieur le président de la commission des lois, je vous recommande la plus grande prudence dans l'utilisation de cet article qui met en péril les prérogatives du Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois .  - Les auteurs de certains amendements, sur tous nos bancs, ont eu à déplorer l'irrecevabilité appliquée à leurs textes, car ils n'étaient pas en rapport avec le projet de loi examiné. Ce fut également le cas dans une période récente, notamment sur le projet de loi relatif à la justice du XXIe siècle et sur le projet de loi de lutte contre la corruption, présenté par Michel Sapin. Le Conseil constitutionnel eut alors l'occasion de réaffirmer sa jurisprudence.

La commission des lois est le gardien de la procédure législative définie par la Constitution dont le Conseil constitutionnel reste le seul interprète.

Ce n'est pas le titre d'un projet de loi qui détermine le champ des amendements possible. C'est le contenu même des dispositions proposées par le Gouvernement qui définit l'irrecevabilité de certains amendements. En tout état de cause, le Conseil constitutionnel aura sans doute une nouvelle fois l'occasion de dire le droit s'il est saisi.

M. le président.  - Acte est donné de vos interventions.

Discussion des articles du projet de loi

ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°107, présenté par M. Cabanel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 44, il est inséré un article L. 44-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 44-1.  -  Ne peuvent faire acte de candidature les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes :

« 1° Les crimes ;

« 2° Les délits prévus aux articles 222-27 à 222-31, 222-33 et 225-5 à 225-7 du code pénal ;

« 3° Les délits traduisant un manquement au devoir de probité prévus à la section 3 du chapitre II du titre III du livre IV du même code ;

« 4° Les délits traduisant une atteinte à la confiance publique prévus aux articles 441-2 à 441-6 dudit code ;

« 5° Les délits de corruption et de trafic d'influence prévus aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 du même code ;

« 6° Les délits de recel, prévus aux articles 321-1 et 321-2 dudit code, ou de blanchiment, prévus aux articles 324-1 et 324-2 du même code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;

« 7° Les délits prévus aux articles L. 86 à L. 88-1, L. 91 à L. 100, L. 102 à L. 104, L. 106 à L. 109, L. 111, L. 113 et L. 116 du présent code ;

« 8° Le délit prévu à l'article 1741 du code général des impôts.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. » ;

2° Le 3° de l'article L. 340 est ainsi rétabli :

« 3° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions mentionnées à l'article L. 44-1. » ;

3° Au premier alinéa de l'article L. 388, les mots : « loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats » sont remplacés par les mots : « loi n° ... de ... pour la régulation de la vie publique » ;

4° Au dernier alinéa de l'article L. 558-11, après la référence : « L. 203 », sont insérés les mots : « ainsi que le 3° ».

II.  -  Le a du 3° du I de l'article 15 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales est ainsi rédigé :

« a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« ?I.  -  Le titre Ier du livre Ier du présent code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales, à l'exception des articles L. 15, L. 15-1, L. 46-1 et L. 66, est applicable à l'élection :? ; ».

III.  -  Les I et II du présent article s'appliquent :

1° S'agissant des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers de Paris, à compter du premier renouvellement général des conseils municipaux suivant la promulgation de la présente loi ;

2° S'agissant des conseillers départementaux, à compter du premier renouvellement général des conseils départementaux suivant sa promulgation de la présente loi ;

3° S'agissant des conseillers régionaux, des conseillers à l'Assemblée de Corse, des conseillers à l'assemblée de Guyane et des conseillers à l'assemblée de Martinique, à compter du premier renouvellement général des conseils régionaux suivant la promulgation de la présente loi.

M. Henri Cabanel.  - Les Français attendent des actes qui illustrent l'exemplarité et l'équité qu'ils exigent désormais de leurs responsables politiques. L'amendement obligeant à fournir un casier judiciaire vierge a pour but de répondre à cette double exigence, qui est conforme au programme d'Emmanuel Macron.

Plus de 300 professions exigent un casier judiciaire vierge pour toute candidature. Comment un élu pourrait-il s'en exonérer ?

On objecte l'anticonstitutionnalité de la mesure ? Le texte a pourtant été voté à l'Assemblée nationale. Je vous demande de considérer la nécessité de changer de pratiques.

M. le président.  - Amendement identique n°197 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mme Archimbaud.

M. Joël Labbé.  - Je souscris aux explications de M. Cabanel. Seul un souci technique m'a empêché de signer son amendement. Il répond à la crainte d'une inéligibilité à vie. Il oublie toutefois de répondre à un certains nombres de préoccupations. Par exemple, des faucheurs volontaires d'OGM, que je salue, seraient écartés... (Rires sur des bancs du groupe Les Républicains) ou encore celles des résistants à la ferme des mille vaches... (M. Alain Bertrand applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°232 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Bertrand et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mme Jouve et M. Requier.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 44, il est inséré un article L. 44-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 44-1.  -  Ne peuvent faire acte de candidature les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes :

« 1° Les crimes ;

« 2° Les délits prévus aux articles 222-27 à 222-31, 222-33 et 225-5 à 225-7 du code pénal ;

« 3° Les délits traduisant un manquement au devoir de probité prévus à la section 3 du chapitre II du titre III du livre IV du même code ;

« 4° Les délits traduisant une atteinte à la confiance publique prévus aux articles 441-2 à 441-6 dudit code ;

« 5° Les délits de corruption et de trafic d'influence prévus aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 du même code ;

« 6° Les délits de recel, prévus aux articles 321-1 et 321-2 dudit code, ou de blanchiment, prévus aux articles 324-1 et 324-2 du même code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;

« 7° Les délits prévus aux articles L. 86 à L. 88-1, L. 91 à L. 100, L. 102 à L. 104, L. 106 à L. 109, L. 111, L. 113 et L. 116 du présent code ;

« 8° Le délit prévu à l'article 1741 du code général des impôts.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. » ;

2° Le 3° de l'article L. 340 est ainsi rétabli :

« 3° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions mentionnées à l'article L. 44-1. » ;

3° Au premier alinéa de l'article L. 388, la référence : « loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats » est remplacée par la référence : « loi n°     du      pour la régulation de la vie publique » ;

4° Au dernier alinéa de l'article L. 558-11, après la référence : « L. 203 », sont insérés les mots : « ainsi que le 3° ».

II.  -  Le a du 3° du I de l'article 15 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales est ainsi rédigé :

« a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« ?I.  -  Le titre Ier du livre Ier du présent code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales, à l'exception des articles L. 15, L. 15-1, L. 46-1 et L. 66, est applicable à l'élection :? ; ».

Mme Françoise Laborde.  - La conformité aux lois de la République est l'une des premières qualités que nos concitoyens recherchent chez leurs élus. La solution proposée dans cet amendement n'est pas satisfaisante à cause du principe d'individualisation des peines. D'autant que la liste des crimes et délits mentionnés n'est pas exhaustive. À l'heure actuelle, les magistrats disposent de suffisamment de possibilités. D'où notre souhait de revenir au texte examiné en février dernier à l'Assemblée nationale.

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois.  - Avis défavorable à ces trois amendements qui, paradoxalement, semblent plus sévères que le texte de la commission, alors qu'ils le sont moins. En effet, l'effacement d'une mention sur le bulletin n°2 peut se faire dans un délai de six mois après la condamnation. La règle s'appliquerait de manière très aléatoire, selon que le candidat ait pris ses précautions ou non.

Le Sénat doit protéger les droits fondamentaux. Or quoi de plus fondamental pour un citoyen que de pouvoir se présenter à une élection. Cela concerne tout de même 1,6 million de Français qui se présentent aux élections, y compris municipales. C'est loin d'être anecdotique. Ne pas prévoir l'intervention d'un juge pour décider d'une inéligibilité est choquant.

Nous prévoyons une règle plus sévère, égale pour tous, en évitant une application rétroactive. Avis fermement défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice.  - Le Gouvernement est défavorable aux amendements car s'il partage le souhait de renforcer la probité des candidats, cette mesure pourrait s'analyser comme une peine automatique, contraire au principe d'individualisation des peines. Nous avons donc fait le choix d'une peine d'inéligibilité obligatoire mais expressément prononcée par le juge, qui pourra l'écarter par une décision spécialement motivée.

M. Joël Labbé.  - Je retire mon amendement au profit de l'amendement n°107 de M. Cabanel.

Mme Françoise Laborde.  - Je retire aussi le mien.

Les amendements nos197 rectifié bis et 232 rectifié bis sont retirés.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Pour restaurer la confiance dans la vie publique, commençons par tenir nos promesses. Le président de la République a annoncé à plusieurs reprises qu'il rendrait impossible la candidature aux élections parlementaires et présidentielle à celui qui n'a pas un casier judiciaire vierge. Il est vrai que le président de l'Assemblée nationale lui-même avait promis de soutenir le vainqueur des primaires de la gauche et ne l'a pas fait... (Exclamations amusées à droite)

M. Alain Gournac.  - Hors sujet !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - L'argument constitutionnel sera vite levé. Lorsqu'il a examiné la loi Sapin 2, le Conseil constitutionnel a considéré qu'une telle mesure relevait d'une loi organique. Eh bien, vous ne pourrez pas vous dérober quand nous examinerons le projet de loi organique !

Notre amendement est complémentaire de la mesure voulue par le Gouvernement, car celle-ci ne s'appliquera qu'aux infractions perpétrées après la promulgation de la loi, alors que les délits antérieurs sont consignés au casier judiciaire.

Nos concitoyens ne veulent plus de passe-droits ni de combines. (M. Joël Labbé applaudit.)

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'argument du respect des promesses est important. J'en ajouterai d'autres. Dans sa décision du 18 novembre 1982, le Conseil constitutionnel a considéré que « la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont pas exclus pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité, ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu ». C'est bien ce dont il s'agit avec notre amendement, qui ne concerne que les comportements malhonnêtes prouvés et condamnés lors d'un procès régulier et contradictoire.

En outre, l'inscription d'une condamnation au bulletin numéro deux n'est pas une peine complémentaire, mais une conséquence de plein droit de cette condamnation - à laquelle le juge peut cependant déroger.

La jurisprudence constitutionnelle a évolué, comme Mme la ministre le sait bien, puisqu'elle n'écarte plus le principe des peines obligatoires, à condition que le principe d'individualisation des peines soit respecté. C'est le cas ici, puisque le juge peut à tout moment ordonner l'omission de la mention d'une condamnation au casier judiciaire.

Enfin, il y a un lien manifeste entre l'absence d'inscription au casier de condamnations pour atteinte à la probité et l'exercice d'un mandat électif. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent aussi.)

L'amendement n°107 n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°108 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles 222-33 et 222-33-2 du code pénal ;

Mme Laurence Rossignol.  - Les élus sont aussi des employeurs. Leur comportement vis-à-vis de leurs collaborateurs peut faire l'objet de condamnations pénales. Songeons à un maire condamné pour agression sexuelle envers une subordonnée et qui continue néanmoins d'exercer son mandat. La victime est, elle, totalement détruite.

Il s'agit par cet amendement de garantir l'exemplarité des élus, mais aussi de protéger leurs salariés, dans le cadre de ce lien de subordination très particulier, en étendant l'inéligibilité aux condamnations pour harcèlement moral et sexuel.

M. le président.  - Amendement n°234 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Collombat, Mme Costes, M. Guérini et Mme Jouve.

Après l'alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles 222-7 à 222-16-3, 222-33, 222-33-2 à 222-33-2-2 et 223-13 du présent code.

Mme Françoise Laborde.  - Ce amendement part du même principe que l'amendement précédent, en allant plus loin.

L'article premier réserve la peine complémentaire obligatoire d'inéligibilité aux crimes et à une liste de délits. Le problème des listes est qu'elles sont rarement exhaustives... Pourquoi les délits financiers seraient-ils plus sévèrement traités que les atteintes aux personnes ? Le comportement des élus doit être irréprochable dans leur rapport aux autres comme en matière financière.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La rédaction de l'amendement de Mme Rossignol atteint, Madame Laborde, vos objectifs. Retrait de l'amendement n°234 rectifié au profit de l'amendement n°108 rectifié ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Vous soulevez une question à laquelle le Gouvernement est très attentif. Avec Mme Schiappa, nous avons engagé un travail dans ce domaine et espérons avancer très rapidement. Nous sommes néanmoins soucieux de la cohérence du texte et du respect de la Constitution. Vous proposez d'étendre la peine obligatoire d'inéligibilité aux cas de harcèlement sexuel et moral, mais non à toutes les violences et agressions sexuelles - l'exposé écrit de l'amendement semant un léger doute à ce sujet. Le Gouvernement propose de la réserver aux infractions contre la probité - entendue en un sens très large - ainsi qu'aux crimes. Attention à ne pas l'étendre au-delà du contrôlable, d'autant qu'il faut respecter les principes de proportionnalité et de nécessité des peines.

Restons-en là pour le moment. Nous continuerons à travailler à l'élaboration d'une liste cohérente et pertinente.

Mme Laurence Rossignol.  - J'ai moi-même dû composer avec les réticences de la Chancellerie à l'égard des listes... Mais faut-il vous lire celles que dresse l'article premier ? Le harcèlement moral ou sexuel, surtout dans le cadre de fonctions publiques, n'est pas dissociable des atteintes à la probité. Il n'est pas moins grave.

En outre, un signal important doit être envoyé à la société française. Les femmes qui subissent un rapport hiérarchique intrusif doivent savoir que la loi les protège. Je regrette vivement l'opposition du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et communiste républicain et citoyen ; Mmes Françoise Laborde et Corinne Bouchoux ainsi que M. Joël Labbé applaudissent également.)

Mme Françoise Cartron.  - J'adhère totalement à ce qui vient d'être dit. Depuis plus d'un an, à la suite de la révélation de faits malheureux dans une autre assemblée, un travail a été entrepris à ce sujet au Sénat. Un code de déontologie sera distribué à tous les nouveaux sénateurs. Puisque ce projet de loi a pour objet de rendre confiance dans les élus, cet amendement doit être voté. Nous avons besoin d'un signe fort. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et communiste, républicain et citoyen)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Je suis stupéfaite de la réponse du Gouvernement. L'amendement n°108 rectifié prolonge le travail entrepris par la délégation aux droits des femmes depuis plusieurs années pour la reconnaissance des atteintes dont sont victimes les femmes dans les relations hiérarchiques. L'argument de la liste nous est régulièrement servi... Je soutiens l'amendement avec chaleur et enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent également.)

Mme Nathalie Goulet.  - Le groupe de l'Union centriste votera cet amendement qui envoie un signal fort. Ne décourageons pas le président Bas lorsqu'il émet un avis favorable ! (Applaudissements au centre et à gauche)

Mme Éliane Assassi.  - Les hommes aussi peuvent intervenir !

Mme Françoise Laborde.  - Je retire mon amendement n°234 rectifié au profit de l'amendement n°108 rectifié. Ce serait dommage d'éparpiller les voix. (Applaudissements à gauche et au centre)

L'amendement n° 234 rectifié est retiré.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Entendons-nous bien, le Gouvernement partage pleinement votre objectif. Nous avons seulement le souci de la sécurité juridique et de la cohérence. (Protestations à gauche)

M. Alain Bertrand.  - Ce n'est pas le Conseil constitutionnel qui fait la loi !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Nous devons veiller, cependant, à ce que la loi votée soit conforme à la Constitution. Je crains, sinon, les déceptions...

L'amendement n°108 rectifié est adopté.

(Vifs applaudissements à gauche et au centre)

M. le président.  - Amendement n°233 rectifié quater, présenté par MM. Collombat, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mme Jouve et M. Requier.

Après l'alinéa 5

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

«  -  les délits prévus aux articles 313-1 et 313-2 du code pénal, lorsqu'ils sont commis en bande organisée ;

«  - les délits d'association de malfaiteurs prévus à l'article 450-1, lorsqu'ils ont pour objet la préparation des délits mentionnés au troisième alinéa du présent article ;

M. Pierre-Yves Collombat.  - L'article premier dresse une liste à trous, y compris dans le domaine qu'elle est censée traiter, les délits financiers. Un oubli, sans doute...

Je propose d'y ajouter au moins l'association de malfaiteurs et la grande délinquance économique et financière. J'aurais souhaité étendre encore la liste aux délits mentionnés à l'article 704 du code de procédure pénale, mais on m'a convaincu que c'était trop compliqué - comme souvent en matière financière...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Contrairement à ce qu'a laissé entendre Mme Goulet, la commission a émis nombre d'avis favorables, comme ici.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable pour des raisons de cohérence. Trop élargir la liste des infractions y nuirait. En outre, la rédaction de l'amendement n'est pas satisfaisante, car le code pénal ne connaît que l'abus de confiance, sans distinguer selon qu'il porte ou non sur la TVA.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La cohérence, la beauté du texte l'emportent sur toute autre considération... À quoi servons-nous donc ?

M. Henri de Raincourt.  - M. Collombat est lucide. (Rires)

M. Roger Karoutchi.  - Il est réaliste !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Votre objection, madame la garde des sceaux, tombe car l'amendement a été rectifié.

Si l'on est disqualifié en raison d'une mauvaise gestion des deniers publics, on doit l'être aussi lorsqu'on se rend coupable d'infractions relevant de la grande délinquance, même s'il s'agit de deniers privés.

L'amendement n°233 rectifié quater est adopté.

M. le président.  - Amendement n°88, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles L. 241-3 et L. 242-6 du code du commerce ;

M. Christian Favier.  - Le printemps a mis en lumière la défiance de nos concitoyens. Ce projet de loi est nécessaire. Les élus doivent être irréprochables, y compris dans leur vie professionnelle. C'est pourquoi nous proposons d'ajouter à la liste dressée par l'article premier l'abus de bien social, appropriation illégale voisine de l'abus de confiance. Comment des élus qui s'en seraient rendus coupables pourraient-ils gérer correctement le bien commun ?

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable en remerciant nos collègues de l'excellence de leur travail.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment. Le Gouvernement a déjà adopté une liste très large, dont il souhaite préserver la cohérence d'ensemble. Jusqu'où irons-nous, sinon ?

L'amendement n°88 est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER BIS

M. le président.  - Amendement n°205, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - La commission des lois a modifié la rédaction du délit de prise illégale d'intérêts au motif que la jurisprudence retient une acception trop imprécise de la notion d'intérêt. Il en résulterait pour les élus locaux une forte exposition au risque de condamnations pénales pour des manquements purement formels.

Le Gouvernement conteste cette analyse et souhaite rétablir le texte initial. Il faut pouvoir sanctionner des personnes dépositaires de l'autorité publique qui interviennent dans des décisions qui intéressent directement leurs proches : ainsi lorsqu'un élu intervient dans l'attribution d'un immeuble appartenant à la commune à un membre de sa famille, au prix du marché, en écartant d'autres candidats. Si la collectivité n'en subit aucun préjudice, l'élu n'en a pas moins manqué à l'impartialité.

Soulignons que les juridictions font une application particulièrement limitée de ces dispositions : le nombre de condamnations annuelles pour des faits de prise illégale d'intérêts oscille autour d'une quarantaine. Une modification de l'incrimination diminuerait encore ce nombre.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je suis navré de devoir émettre un avis défavorable. Le Sénat, représentant des collectivités territoriales, a constaté des excès de sévérité dans la condamnation d'élus, pour avoir subventionné des associations auxquelles ils appartenaient à la demande même de la collectivité territoriale, par exemple. La notion d'« intérêt quelconque » est trop floue. Nous avons donc retenue la proposition équilibrée de M. Collombat. L'intérêt en question est défini comme un intérêt personnel distinct de l'intérêt général : cela reste très large, mais cela évitera que la Cour de cassation se croie obligée de confirmer des condamnations qui ne se justifient pas. Faisons entrer un peu de pragmatisme et de bon sens dans ce débat.

M. Charles Revet.  - On en a bien besoin.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La façon dont est libellé l'article 432-12 du code pénal aboutit à des situations ubuesques. Dans le Var, un maire a été condamné pour avoir participé à la délibération révisant le plan d'occupation des sols, pour la seule raison qu'il est propriétaire d'un terrain concerné par ce plan, sans que la révision ait rien changé à son statut. Les juges appliquent la jurisprudence, plus que la loi d'ailleurs, mais en prononçant des peines qui disent le contraire : en l'espèce, il a été condamné à une amende avec sursis. Il arrive que les élus soient dispensés de peine.

Tout cela est aberrant. Nous proposons une solution simple. Le juge sera assez perspicace pour sanctionner les comportements qui le méritent.

L'amendement n°205 n'est pas adopté.

L'article premier bis est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

L'amendement n°167 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°41, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, les mots : « Sous peine d'irrecevabilité », sont remplacés par les mots : « Hors les cas de connexité avec d'autres infractions faisant l'objet d'une procédure judiciaire ou de découverte incidente dans le cadre d'une procédure pénale, ».

M. Éric Bocquet.  - Cent fois sur le métier, remettez votre ouvrage ! Nous proposons une nouvelle fois de supprimer le verrou de Bercy.

La constitution d'un Parquet financier fut un progrès significatif. Mais celui-ci demeure confronté à l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, qui soumet le dépôt des plaintes à l'avis conforme de la commission des infractions fiscales, véritable « juge d'instruction » en la matière. Il est temps de lever cet obstacle, afin que les administrations ayant repéré des faits de fraude fiscale puissent engager des poursuites, quitte à prévoir des mesures conservatoires - saisie de sommes illégalement en transit...- et l'information de l'administration fiscale au plus haut niveau. Un mémorandum du Premier président de la Cour des comptes soulignait déjà en août 2013 la nécessité d'une meilleure coopération entre la DGFip et les douanes.

Vous me répondrez, je le sais, que les procédures judiciaires sont longues et incertaines et qu'il vaut mieux faire pression sur les fraudeurs pour qu'ils rendent l'argent qu'ils doivent...

M. le président.  - Amendement n°203 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° L'article L. 228 est ainsi modifié :

a) À la fin du premier alinéa, les mots : « sur avis conforme de la commission des infractions fiscales » sont remplacés par les mots : « dans les conditions de droit commun » ;

b) Les deuxième à dernier alinéas sont supprimés ;

2° Les articles L. 228 A et L. 228 B sont abrogés.

II.  -  L'article 1741 A du code général des impôts est abrogé.

III.  -  Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après le mot : « République », la fin de l'article L. 711-21 est supprimée ;

2° Après le mot : « République », la fin du VI de l'article L. 725-3 est supprimée.

M. Joël Labbé.  - Pour l'écologiste non inscrit que je suis (sourires), la justice est un élément clé pour la restauration de la confiance dans l'action publique. Cet amendement supprime le verrou de Bercy, qui empêche les poursuites pour fraude sans l'accord de l'administration fiscale. (M. Éric Bocquet applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°68, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Par exception, les plaintes concernant les personnes soumises à une obligation de déclaration au sens de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique sont directement déposées par l'administration sans avis de la commission des infractions fiscales. »

Mme Nathalie Goulet.  - Espérons que ces amendements feront l'effet des trompettes de Jéricho et que le verrou de Bercy sera levé au septième jour !

Ma proposition diffère légèrement des autres pour passer sous les fourches caudines de la navette parlementaire : lever le verrou uniquement pour les personnes soumises à l'obligation de déclaration par la loi relative à la transparence de la vie publique. Avec notre collègue Anziani, nous dénoncions déjà en 2013 l'opacité la plus complète qui entoure le nombre de procédures traitées par la commission des infractions fiscales et les montants en jeu - on les dit extraordinairement élevés.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mme Lienemann.

I.  -  Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 5° de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa, lorsqu'il apparaît qu'un indice laissant supposer qu'une fraude fiscale a été commise dans l'une des conditions prévues aux 1° à 5°, l'agent en charge du contrôle qui le constate en informe directement le procureur financier et transmet à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :

Titre ...

Dispositions relatives à la lutte contre la fraude fiscale

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - J'invite le Sénat, qui a voté la suppression du verrou de Bercy en avril 2016, à confirmer sa position. On ne convaincra pas nos concitoyens que nous voulons la transparence si l'on traite différemment puissants et misérables, si l'on donne le sentiment que certains peuvent négocier et passer entre les gouttes. C'est une question de morale, de vertu comme on dit en République, mais aussi d'efficacité. Tout l'intérêt d'une procédure judiciaire réside dans l'ouverture de l'enquête judiciaire grâce à laquelle on parvient à caractériser le délit. Souvenez-vous des difficultés qui ont été rencontrées pour poursuivre ceux qui ont recouru à la technique dite du carrousel de TVA.

Mon amendement autorise un agent à solliciter directement le juge, il ne lève pas totalement le verrou de Bercy.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Me voici embarrassé par ces propositions qui relèvent davantage de la commission des finances que de celle des lois.

Le 22 juillet 2016, le Conseil constitutionnel a jugé constitutionnel le fait de confier à l'administration fiscale la lutte contre la fraude. Le but est, non de faire rendre gorge au contribuable fraudeur, mais de lui faire rendre l'argent. Le verrou de Bercy est dans l'intérêt de la Nation. J'ajoute qu'il ne fait nullement obstacle à une procédure judiciaire pour fraude fiscale. Par prudence, donc, avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je partage l'avis de votre rapporteur. D'autant que ces quatre amendements sont un peu éloignés de l'objet de la loi.

La saisine de la Commission des infractions fiscales est une garantie procédurale pour les contribuables. On ne peut pas dire que la suppression du verrou de Bercy est de nature à garantir l'égalité de traitement des citoyens. Ce serait laisser entendre que la pratique de l'administration fiscale n'est pas guidée par l'intérêt général. Le Gouvernement ne partage bien évidemment pas ce soupçon. Il est nécessaire de définir une politique pénale ad hoc pour ne pas surpénaliser la fraude fiscale.

La plupart du temps, l'application des pénalités fiscales suffit à réparer les torts. La procédure judiciaire, cela est fixé dans la jurisprudence constitutionnelle, doit être réservée aux fraudes les plus graves. Retrait, sinon rejet.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Parler de « surpénalisation de la fraude fiscale » ne manque pas de sel... Un traitement particulier est réservé à la délinquance financière : tout ce qui concerne l'argent se négocie. Si donner aux citoyens l'assurance que la même justice s'applique dans tous les cas n'est pas de nature à rétablir leur confiance, qu'est-ce qui le sera ?

M. Alain Anziani.  - Merci à Mme Goulet d'avoir rappelé le combat que je mène depuis des années pour lever le verrou de Bercy et, en particulier, à l'occasion de la loi de 2013 dont j'étais le rapporteur.

L'initiative des poursuites appartient au Parquet, sinon en matière fiscale. Les professionnels du droit condamnent cette exception. La Cour des comptes, également, ne s'est pas montrée tendre sur le sujet ; elle a rappelé qu'il vaut mieux être un fraudeur millionnaire qu'un maçon portugais. Le second aura tôt fait de se retrouver devant le tribunal quand le premier pourra négocier en mettant des millions sur la table.

Mme Nicole Bonnefoy.  - Très bien !

M. Alain Anziani.  - Selon Bercy, grâce au verrou, l'État récupérerait plus d'argent. C'est dire la confiance en la justice... Enfin, si ces amendements n'ont rien à voir avec la confiance, la transparence et la moralisation, je ne sais quelles propositions y ont trait. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, communiste républicain et citoyen, La République en marche, Union centriste et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Philippe Dominati.  - Ces amendements, que je ne voterai pas, me semblent néanmoins utiles. Si le Gouvernement veut conserver un système différencié, il faudra le perfectionner et faire en sorte que l'administration fiscale traite des cas semblables en suivant la même approche.

M. André Reichardt.  - Je voterai ces amendements pour les mêmes raisons que M. Anziani. Ils sont de bonne politique, nous sommes dans une période de moralisation. En revanche, je ne voterai pas la proposition de Mme Goulet : pourquoi créer une exception ? Il y en a assez de ces atteintes régulières aux personnes soumises à l'obligation de déclaration par la loi relative à la transparence.

M. Éric Bocquet.  - Pour éclairer nos débats, un exemple : Google doit 1,1 milliard d'euros à la République française ; que la firme américaine ne paiera pas, a-t-on annoncé le 14 juin dernier. Il y a de quoi s'inquiéter... (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste et républicain)

M. le président.  - L'amendement de M. Bocquet est adopté. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen, socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent également.)

L'amendement n°41 est adopté et devient un article additionnel.

Les amendements nos203 rectifié bis, 68 et 7 rectifié sont sans objet.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°92, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 2

Après les mots :

déontologie parlementaire

insérer les mots :

et avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

Mme Éliane Assassi.  - Il s'agit d'associer la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique à la prévention des conflits d'intérêts au Parlement. Je le dis d'autant plus tranquillement que je suis membre du comité de déontologie du Sénat.

Des progrès ont été accomplis. Dès 2011, la Haute Assemblée a prévu un dispositif de déclaration. Pour autant, il faut sortir de l'entre-soi. La Haute Autorité, par son expérience et son statut indépendant, nous sera une ressource précieuse.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable : ce n'est pas le rôle de la Haute Autorité. Sauvegardons l'autonomie des assemblées.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. Le Gouvernement a la plus grande confiance dans les assemblées.

M. Alain Fouché.  - Très bien !

L'amendement n°92 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°141, présenté par M. Marie, Mme S. Robert, M. Botrel, Mmes Perol-Dumont et Lepage et MM. Daudigny, Lalande, Carcenac et Montaugé.

Mme Sylvie Robert.  - Cet amendement rétablit la définition édictée à l'article 2 de la loi de 2013. Sur le fond, il serait problématique que les conflits d'intérêts public-public soient écartés de cette loi. Un parlementaire siégeant, y compris au titre de son mandat parlementaire, dans un établissement public ou une société d'aménagement peut se retrouver en situation de conflit d'intérêts public-public.

M. le président.  - Amendement identique n°182 rectifié, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

M. Joël Labbé.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Il n'y a pas de conflit d'intérêts entre intérêts publics : l'essence même de notre mission est de les concilier.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Des conflits entre un intérêt public et un intérêt public ? C'est se tromper lourdement sur la nature de notre mission. Comme l'a dit le rapporteur, nous passons notre temps à arbitrer entre des intérêts publics. L'intérêt général naît de la confrontation des points de vue, de notre débat collectif.

Je vous félicite, madame la garde des sceaux, de ne pas avoir repris la définition de la loi de 2013. Avec de telles idées, les personnes qui s'y connaissent un tant soit peu sur un sujet ne pourront plus s'exprimer dessus. (Mme Sophie Primas applaudit.)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet amendement, déposé dans un but louable, aboutirait à une contradiction perpétuelle. Nous sommes tous élus d'un département. On pourrait nous accuser d'utiliser notre mandat national au profit d'un intérêt local parce que nous avons défendu tel projet d'aménagement ou évoqué une entreprise en difficulté...

Élus de la République, il nous appartient de délibérer entre des intérêts publics pour trouver l'intérêt de la Nation.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Excellent !

Les amendements identiques nos141 et 182 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°228 rectifié ter, présenté par Mme Aïchi, MM. Delcros, Longeot, Luche, Capo-Canellas, Médevielle et Kern et Mme Doineau.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, notamment à l'égard de la composition et du fonctionnement des groupes interparlementaires d'amitié

Mme Leila Aïchi.  - Cet amendement, comme l'amendement n°226 rectifié ter, vise à éviter toute dérive au sein des groupes d'amitié parlementaires. J'y suis très attachée, valorisons-les en prévoyant que les assemblées adoptent un ensemble de règles pour y prévenir les conflits d'intérêts.

M. le président.  - Amendement n°226 rectifié ter, présenté par Mme Aïchi, MM. Delcros, Longeot, Luche, Médevielle, Kern, Bonnecarrère et Gabouty et Mme Doineau.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque assemblée parlementaire définit les conditions dans lesquelles les députés ou les sénateurs souhaitant devenir membres d'un groupe interparlementaire d'amitié déclarent les intérêts qu'ils détiennent dans le pays entrant dans le champ de ce groupe, ainsi que ceux de leurs familles.

Mme Leila Aïchi.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Conseil constitutionnel détermine ce qui figure dans le règlement des assemblées. Les dispositions que vous proposez relèvent de leur autonomie et engagent la compétence de leur bureau, non celle du législateur.

Exiger d'un parlementaire ayant de la famille à l'étranger que celle-ci décline ses intérêts représenterait une atteinte à la vie privée. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Cela relève de la compétence des bureaux des assemblées.

L'amendement n°228 rectifié ter n'est pas adopté.

L'amendement n°226 rectifié ter est retiré.

La séance est suspendue à 16 h 30.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 h 45.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. La séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.

Libération de Mossoul

M. Jeanny Lorgeoux .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Richard Yung applaudit également.) Après plusieurs mois de combats acharnés, le Premier ministre irakien, M. Haïder al-Abadi, a annoncé la libération de Mossoul, l'ancienne Ninive, berceau des civilisations assyriennes et chaldéennes qui a brillé de tant de feu et suscite tant de convoitises.

C'est le fruit de l'engagement sans faille des forces irakiennes et des Peshmergas kurdes, qui ont subi de lourdes pertes, mais aussi de la coalition internationale, dont la France.

C'est un coup fatal porté à l'État islamique et à sa folie destructrice, un pas vers la reconstruction d'un Moyen-Orient qui a soif de paix et de stabilité. Mossoul est libérée, mais c'est un champ de ruines ; sa population sort de l'enfer. Comment sauver ces vies hagardes, réenclencher la vie et l'économie ?

La reconquête de Raqqa semble en bonne voie et ouvre un horizon nouveau pour la Syrie. Je salue l'action de nos forces armées.

N'y a-t-il pas là une opportunité pour relancer un processus politique régional aujourd'hui enlisé ? Comment la France, dont la position a évolué, compte-t-elle y prendre sa part ?

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Jeanny Lorgeoux.  - Quels partenariats régionaux et diplomatiques devons-nous nouer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain, sur plusieurs bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs des groupes Union Centriste et Les Républicains)

Mme Florence Parly, ministre des armées .  - Le Premier ministre irakien a annoncé dimanche la nouvelle de la libération de Mossoul, occupée par l'État islamique depuis la proclamation d'un soi-disant califat à l'été 2014. Même s'il reste des poches de résistance, c'est une grande victoire que nous devons à la ténacité et au courage des forces irakiennes, accompagnées par les Peshmergas et par la coalition internationale à laquelle participait la France : nous les avons appuyées grâce à notre aviation basée en Jordanie et dans les Émirats arabes unis, à notre artillerie en périphérie de Mossoul, fourni du matériel, des renseignements et contribué à la formation des unités.

Je rends hommage aux militaires français déployés au Levant. Mais beaucoup reste à faire. Daech continue de contrôler de nombreux territoires en Irak et en Syrie. Tous les efforts portent sur la reconquête de Raqqa, qui est en bonne voie.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Florence Parly, ministre.  - La reconquête ne sera pas seulement militaire : un processus politique et un accompagnement économique devront être organisés sous l'égide de la coalition. (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain)

Taxation des poids lourds

Mme Anne-Catherine Loisier .  - Le Gouvernement a affiché sa volonté de voir les poids lourds participer davantage au financement des infrastructures, sans pour autant raviver la polémique de l'écotaxe, abandonnée en 2014.

Expérimentation dans les régions volontaires, péages sur les routes nationales, taxe spécifique dédiée aux besoins en équipement, telles sont les pistes évoquées. Je soutiens ces propositions qui permettent de financer l'entretien du réseau et de soulager les collectivités propriétaires, mais j'attire votre attention sur les milliers de riverains qui subissent les nuisances liées au transfert des poids lourds vers les voies non payantes. Nombre de nos voisins ont mis en place des taxes en ce sens. Comment comptez-vous mettre en oeuvre cette politique, et dans quels délais ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union centriste)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Il ne s'agit pas de revenir à l'écotaxe, mais de répondre au problème du juste financement des infrastructures. Le réseau de transport se dégrade, tout comme la qualité de l'environnement des villes et villages traversés par ces infrastructures. La priorité est à l'entretien et à la rénovation du réseau, il en va de la sécurité. Votre commission de l'aménagement du territoire en a parlé en février lors de sa table ronde.

M. Michel Raison.  - C'est vrai.

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - Nous sommes face à une impasse financière de 10 milliards d'euros, addition des engagements pris par les précédents gouvernements.

Des solutions innovantes peuvent être mises en place, comme au sud de Bordeaux ou sur la route Centre-Europe Atlantique : le long transit est soumis à péage, pas les trajets du quotidien. Autre solution : les vignettes, sur le modèle britannique ou allemand. L'objectif est de dégager de nouvelles ressources tout en encourageant les comportements les plus vertueux. Tous ces points seront à l'ordre du jour des Assises de la mobilité en septembre prochain. (Applaudissements sur quelques bancs au centre)

Réforme de la taxe d'habitation (I)

M. Pierre Cuypers .  - Monsieur le Premier ministre, alors que certaines promesses en faveur du pouvoir d'achat ont disparu, telle la défiscalisation des heures supplémentaires, il a été précisé hier, après de nombreux revirements, que l'exonération de 80 % des contribuables de la taxe d'habitation entrerait en vigueur progressivement dès 2018.

Le président de la République y voit un impôt lourd, inéquitable, dont le calcul obsolète est injuste. Où est donc la justice pour les 20 % de contribuables qui y resteront assujettis ? Où est la justice alors que la taxe foncière s'appuie sur les mêmes valeurs locatives ?

Certes, son mode de calcul est obsolète car les valeurs cadastrales n'ont pas été actualisées depuis 1970, et les taux d'imposition varient énormément d'une commune à l'autre.

Ne faudrait-il pas préférer une réforme structurelle ? La taxe d'habitation constitue la ressource principale de bien des petites communes ; l'État devra compenser une perte évaluée à 10 milliards d'euros. Où trouverez-vous cette somme dans votre budget ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Des exonérations, il y en a déjà pour douze millions de foyers - jusqu'à 10 500 euros de revenu annuel, pour lesquels l'État compense le manque à gagner aux communes.

Le Premier ministre a indiqué que la Conférence des territoires, qui réunira les élus locaux au Sénat le 17 juillet, discutera d'une compensation à l'euro près. Nous commencerons demain le débat d'orientation budgétaire : ce sera l'occasion de préciser le calendrier de cette suppression qui sera progressive, sur trois ans. Enfin, le coût n'est pas de 10 milliards d'euros, mais de 5 milliards d'euros ! (On fait mine d'être soulagé sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Philippe Dallier.  - Ouf !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - L'État interviendra sur la révision des valeurs locatives. Si c'était si facile, on l'aurait déjà fait depuis longtemps. (Mouvements divers) Nous allons nous y atteler, avec le renouveau de la fiscalité locale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe La République en marche)

Réforme de la taxe d'habitation (II)

M. Philippe Esnol .  - Nous sommes nombreux à être interpellés par des élus inquiets de la réforme de la taxe d'habitation. Votre discours de politique générale, monsieur le Premier ministre, laissait penser que vous alliez prendre le temps de la concertation, indispensable pour trouver à terme des recettes pérennes pour les collectivités. La semaine dernière, M. Darmanin répondait à Bernard Delcros que les maires pouvaient être rassurés...

Dans les Yvelines, la taxe d'habitation représente 30 à 50 % du budget pour une vingtaine de communes, dont Conflans-Sainte-Honorine. Certes, il faudra réformer cet impôt inéquitable, mais sans pénaliser les collectivités qui ont déjà largement pris leur part dans le redressement des comptes publics.

Quelles mesures de compensation prévoyez-vous pour assurer la prévisibilité et donner aux communes des garanties à long terme ? Comment comptez-vous associer les élus locaux qui doivent financer les services publics de proximité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Vous avez raison, cette fiscalité locale est injuste. Les communes ne sont pas toutes dans la même situation, selon qu'elles sont rurales ou urbaines, riches ou pauvres : selon l'AMF, la taxe d'habitation représente 36 % des recettes des communes ; dans la mienne, 16 %, dans d'autres, 50 %...

L'injustice vaut aussi entre citoyens : un avocat libéral aisé peut très bien payer moins qu'un salarié en logement social. Il faut recalculer en tenant compte du pouvoir d'achat.

Les communes garderont-elles une autonomie fiscale ? Auront-elles les moyens de financer les services publics de proximité ? Deux fois oui. Le Premier ministre, qui lancera lundi 17 juillet la Conférence des territoires, m'a confié le soin de gérer le pacte financier avec M. Mézard et le ministre de l'intérieur. (Applaudissements sur certains bancs du groupe RDSE)

Plan climat et mix énergétique

Mme Delphine Bataille .  - L'Europe est en passe d'atteindre ses objectifs pour 2020 en matière d'émissions de gaz à effet de serre, d'efficacité énergétique et de production d'énergies renouvelables, nous rassure la Commission européenne dans son dernier rapport. Mais des difficultés demeurent. Malgré les objectifs ambitieux de la loi de transition énergétique, la France peinera à atteindre son objectif de 23 % d'énergies renouvelables en 2020. L'Allemagne ne parviendra pas à réduire ses émissions de CO2 de 40 % et a repoussé à 2040 la sortie du charbon.

Dans ce contexte, il faut encourager l'innovation pour faire face aux changements climatiques.

Ramener à 50 % la part du nucléaire d'ici 2025, comme le prévoit la loi, suppose de fermer dix-sept réacteurs, a dit hier le ministre de la transition écologique. Or le programme de rénovation de notre parc nucléaire vise à allonger la durée de vie des centrales et générera des retombées pour nos entreprises.

Quelle est votre vision du mix énergétique dans la lutte contre le réchauffement climatique ? Comment assurer la complémentarité des énergies de base et des énergies renouvelables ?

Il faudra aussi trouver un équilibre entre innovation et précaution et éviter tout attentisme.

Comment contribuer à cet objectif et valoriser la connaissance du scientifique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche et sur plusieurs bancs du groupe RDSE)

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Rien ne se fera dans la brutalité et le dogmatisme. (On apprécie.) J'ai souhaité ouvrir hier le débat sur le nucléaire : il doit être serein, cohérent et transparent. Il n'y a qu'un cadre, celui de la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui prévoit la consultation de tous les acteurs. Il doit être cohérent avec l'horizon fixé par la loi pour la transition énergétique, que nous avons reçue en héritage et qui est fort ambitieuse.

Il faut mettre tous les scénarios sur la table pour éclairer la décision, avec comme critères l'exigence de sûreté - qui suppose l'indépendance de l'ASN - et le potentiel de toutes les énergies, pour retrouver notre souveraineté énergétique.

Nous renforcerons le dialogue avec tous les acteurs, syndicats, industriels, associations. Les Français ont leur mot à dire. Nous proposerons des contrats de transition aux salariés comme aux territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche ; Mme Corinne Bouchoux, MMJoël Labbé et Jean Desessard applaudissent également.)

M. Jean Desessard.  - Bravo !

Réforme de la taxe d'habitation (III)

Mme Cécile Cukierman .  - Les communes, premier échelon de la démocratie vivante, vont voir la taxe d'habitation transformée, pour 80 % des redevables, en dotation d'État. Cet impôt est injuste et les contribuables concernés seront, dans un premier temps, satisfaits. Or il s'agit clairement de faire passer la pilule amère de la hausse de la CSG et du gel du Smic, de la hausse des taxes sur l'essence et le tabac - et surtout de l'indécente exonération de l'ISF pour les fortunes mobilières. Avec la taxe d'habitation, vous donnez 3 milliards d'euros, à partager entre 28 millions de contribuables. Avec l'ISF, 3 à 4 milliards d'euros, à partager entre 330 000 contribuables !

Comment assurer aux collectivités territoriales les ressources qu'elles vont perdre, et qui assurent leur autonomie fiscale ? Ne serait-il pas préférable de prolonger et renforcer les abattements et dégrèvements actuels ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - En effet, certains contribuables doivent consentir un gros effort fiscal : dans votre commune, la taxe d'habitation est à 13,67 %, contre 9 % en moyenne dans votre département ; à Aubervilliers, ville gérée par votre famille politique, elle a augmenté de 7 % rien que l'an dernier. (Protestations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen) Tous les contribuables ne sont pas égaux devant l'utilisation de l'argent public !

Le 17 juillet, ici au Sénat, aura lieu la Conférence des territoires ; ce sera le lieu de la concertation avec les élus locaux.

Mme Éliane Assassi.  - Nous n'avons aucune information pour l'instant.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Nous devrons lier l'autonomie fiscale et la responsabilité des élus, le service public et la réforme territoriale. On ne peut continuer à renforcer les exonérations de taxe d'habitation sans revalorisation des valeurs locatives. (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche)

Mme Nicole Bricq.  - Bravo, bonne réponse !

Mme Cécile Cukierman.  - Il est urgent d'apporter des réponses sur la compensation, dont on sait qu'elle ne sera pas intégrale, au grand dam des élus locaux des villes et des campagnes, qui ne sont pas invités lundi, que je sache ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Situation de l'entreprise GM&S

M. Jean-Jacques Lozach .  - Le 6 juillet dernier, le ministre de l'économie a assuré qu'une solution était proche pour la reprise de l'équipementier automobile creusois GM&S Industry, en liquidation judiciaire. Or la confirmation des engagements de commandes de PSA et de Renault se fait toujours attendre.

La disparition de cette entreprise serait dramatique pour La Souterraine, cité de 5 000 habitants, et affecterait tout un bassin de vie à cheval sur trois départements. Espérons que votre optimisme se concrétisera : après trois redressements judiciaires en moins de huit ans, les salariés sont à bout, d'où des réactions virulentes.

À quel stade en sont les discussions ? Une réunion de la dernière chance se tient aujourd'hui même à Bercy - à laquelle les sénateurs du département n'ont pas été conviés.

Je salue la mobilisation de la région Nouvelle-Aquitaine dans ce dossier ainsi que l'implication de l'État. Ces efforts ne sauraient rester vains. Que fait l'État pour assurer un avenir pérenne à ce site ? Quelle sortie de crise pour ses salariés, leurs familles et le territoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et sur plusieurs bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement .  - En effet : face à un troisième plan de redressement judiciaire, la colère des salariés est légitime. L'objectif est celui d'une reprise pérenne pour le site. Ce n'est pas une question d'optimisme, mais de volontarisme.

Bruno Le Maire et Benjamin Griveaux réunissent en ce moment à Bercy les acteurs du dossier : les représentants des salariés, la CGT-FO, les clients Renault et PSA, le repreneur GMD et les collectivités. Il s'agit, dans un esprit de dialogue constructif, de chercher les solutions les plus favorables possibles pour les salariés, dont je salue l'esprit de responsabilité.

Nous avons déjà obtenu que Peugeot et Renault renforcent leurs engagements, à 22 millions d'euros. Il nous faut également obtenir des engagements d'investissements sur le site par le repreneur.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État.  - S'agissant de la dépollution du site comme des salariés qui ne seront pas retenus dans l'offre, il faudra mobiliser tous les moyens d'accompagnement et de formation professionnelle pour que ce site retrouve de l'espérance. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche)

Situation politique à Montpellier

M. Jean-Pierre Grand .  - Mercredi dernier à Montpellier, un conseil de métropole extraordinaire était convoqué pour remplacer sept vice-présidents. Ces élus d'expérience, six maires et un premier adjoint, de toutes sensibilités, représentaient les principales villes de notre intercommunalité. Ils ont été destitués au seul motif qu'ils ont refusé de s'inscrire au groupe En marche ! constitué par le président de la métropole. (Vives exclamations à droite)

M. Henri de Raincourt.  - Quelle honte !

M. Jean-Pierre Grand.  - Nos concitoyens découvrent horrifiés ces méthodes d'un autre temps et le doute s'installe sur ce nouveau parti politique...

M. Henri de Raincourt.  - C'est la dictature !

M. Jean-Pierre Grand.  - D'autant que le président de la métropole revendique à tout propos le soutien du chef de l'État !

Mes convictions gaullistes, ma conception de l'intercommunalité ne sauraient s'accommoder de ce mépris de la démocratie locale. Je veux croire qu'il ne s'agit là que de la dérive d'un homme. La confiance dans la vie politique impose aux élus le respect de la démocratie, sur tout le territoire et dans toutes les instances. Cette affaire est suffisamment grave pour que le Gouvernement rassure le Sénat sur sa volonté de faire respecter partout les valeurs de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Union centriste ; M. Henri Cabanel applaudit également.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Union centriste) Le conseil de Montpellier Méditerranée Métropole a en effet partiellement renouvelé son exécutif. (Sourires)

Le code général des collectivités territoriales régit les délégations de fonction par le président de la métropole à des vice-présidents et encadre les conditions dans lesquelles elles peuvent être retirées. La composition des exécutifs s'efforce en général de refléter la pluralité des communes membres, gage d'un fonctionnement harmonieux des métropoles, auquel le Gouvernement est attaché.

Cependant, il n'appartient pas à celui-ci de se prononcer en opportunité sur un cas particulier. (On ironise à droite.) La libre administration des collectivités territoriales est un principe consacré par la Constitution, à l'article 72 alinéa 3, auquel la Haute Assemblée veille scrupuleusement. La régularité juridique d'une modification au sein d'un exécutif local relève du contrôle de légalité, voire du juge administratif. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union centriste et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains)

Ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse

Mme Brigitte Micouleau .  - Depuis le 1er juillet, Rennes n'est plus qu'à une heure vingt-cinq de Paris, Bordeaux à deux heures. Mais lors des festivités en gare de Bordeaux, vos déclarations ambiguës sur le prolongement de la LGV jusqu'à Toulouse ont jeté un froid.

Malgré l'avis négatif rendu par la commission d'enquête en mars 2015 pour les LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax, le Gouvernement s'était engagé à poursuivre ces projets et signait, le 5 juin 2016, le décret de déclaration d'utilité publique (DUP) de ces lignes.

L'annulation de la DUP par le tribunal administratif de Bordeaux, le 28 juin dernier, était fondée principalement sur la fragilité du financement. Or un comité de financeurs, regroupant toutes les collectivités concernées, a été lancé il y a un an pour répondre à cet enjeu. Il a mandaté un cabinet indépendant qui fera bientôt des propositions innovantes de financement : le motif d'annulation de la DUP n'aura plus objet.

Comment Toulouse, première métropole de France en termes de croissance, pourrait-elle être exclue du réseau à grande vitesse ? Le candidat Macron avait d'ailleurs affirmé son plein soutien à cette LGV.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Brigitte Micouleau.  - Pouvez-vous confirmer la volonté de l'État de poursuivre ce projet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ainsi que sur plusieurs bancs des groupes Union centriste et RDSE)

M. Éric Doligé.  - Il n'y a plus d'argent !

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Je tiens à vous rassurer. L'État et SNCF Réseau vont faire appel de l'annulation de la DUP. Depuis le 1er juillet, Bordeaux est à deux heures de Paris et Toulouse à quatre heures dix. Je mesure les attentes des Toulousains.

Mais voilà, la branche Bordeaux-Toulouse nécessite 6 milliards d'euros, alors même qu'il manque 10 milliards d'euros pour assurer la pérennité du réseau et honorer les engagements du précédent gouvernement, dont 7 milliards pour les nouvelles infrastructures.

C'est pourquoi le président de la République a annoncé une pause afin de rechercher une trajectoire financière soutenable pour ce projet, dans la concertation.

Je sors d'une réunion avec le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine et rencontrerai bientôt la présidente du conseil régional d'Occitanie. Je ne doute pas que nous arrivions ensemble à une solution raisonnable.

Canal Seine-Nord

Mme Catherine Génisson .  - J'associe à cette question mes collègues des départements du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme.

Le calendrier du canal Seine-Nord a déjà fait l'objet d'une question de notre collègue Jean-François Rapin qui a jeté un pavé dans la mare - ou dans le canal... Ce projet structurant a été relancé lors du Grenelle de l'environnement en 2007-2008 ; après un rapport de 2012, une mission de reconfiguration en 2013, l'Union européenne a annoncé en 2015 une participation d'1,8 milliard d'euros - soit 42 % du coût. Les acteurs institutionnels s'étaient engagés pour un début des travaux fin 2017. Gérald Darmanin, alors premier vice-président du conseil régional des Hauts-de-France, plaidait pour un démarrage rapide.

En mars 2017, le président de la République, alors candidat, confirmait les trois grands projets en cours : Bordeaux-Toulouse, Lyon-Turin et canal Seine-Nord. Ce dernier ne peut plus attendre. Le Gouvernement doit passer à l'action. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Éric Bocquet applaudit également.)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Je mesure pleinement les interrogations que suscite la pause annoncée par le président de la République. Je sais l'attachement des élus des Hauts-de-France à ce projet et les attentes qu'il a fait naître. Mais des engagements ont été pris sans vision d'ensemble : ils représentent une impasse de 10 millions d'euros. (On s'indigne sur les bancs du groupe socialiste et républicain.)

Mme Valérie Létard.  - Il s'agit de 25 000 emplois !

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - L'État ne dispose pas aujourd'hui des ressources nécessaires.

En organisant les Assises de la mobilité, qui associeront l'ensemble des acteurs, nous identifierons les besoins de chaque territoire afin d'élaborer une vision d'ensemble adaptée aux ressources mobilisables.

M. Didier Guillaume.  - Il faudra aller le dire aux habitants.

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - Cette approche ne peut qu'être partagée par le Sénat, si j'en crois ses nombreux rapports... Nous ne doutons pas que nous parviendrons à une solution soutenable financièrement.

M. Didier Guillaume.  - Très mauvaise réponse, qui n'est pas à la hauteur des enjeux.

La séance est suspendue à 17 h 35.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

La séance est reprise à 17 h 45.

Demande d'avis sur une nomination

M. le président.  - Conformément aux dispositions de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 relatives à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution et en application de l'article L. 621-2 du code monétaire et financier, M. le Premier ministre, par lettre en date du 11 juillet 2017, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l'avis de la commission du Sénat compétente en matière d'activités financières sur le projet de nomination de M. Robert Ophèle aux fonctions de président de l'Autorité des marchés financiers.

Cette demande d'avis a été transmise à la commission des finances.

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons l'examen du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l'action publique.

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

M. le président.  - Amendement n°192 rectifié bis, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elle désigne un déontologue pour l'assister.

M. Joël Labbé.  - L'article 4 quater de l'ordonnance du 17 novembre 1958 énonce que : « le Bureau de chaque assemblée, après consultation de l'organe chargé de la déontologie parlementaire, détermine des règles en matière de prévention et de traitement des conflits d'intérêts. Il veille à leur respect et en contrôle la mise en oeuvre. »

Je propose d'y ajouter la nomination d'un déontologue.

Lors de la consultation citoyenne encore en cours, un grand nombre de participants se sont étonnés que les parlementaires, juges et parties, soient en charge de déterminer les règles de déontologie.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le comité déontologique du Sénat est remarquablement présidé par un collègue qui a toutes les qualités d'indépendance et l'élévation morale requises. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis, au nom du principe d'autonomie des assemblées.

M. Joël Labbé.  - Je ne remets pas en question le comité de déontologie. Il s'agit de rétablir la confiance en apportant une garantie supplémentaire. N'oublions pas que nos concitoyens nous regardent.

L'amendement n°192 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°109, présenté par Mme S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

veille à

par les mots :

est tenu de

Mme Sylvie Robert.  - Amendement rédactionnel.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission ne croit pas qu'il le soit. Selon l'article 27 de la Constitution, « tout mandat impératif est nul ». On ne peut nier ainsi l'autonomie d'appréciation des parlementaires. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je partage l'avis de la commission.

M. Charles Revet.  - Très bien.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Que signifie ici, madame la garde des Sceaux, le verbe « veiller à » ? S'il y a un conflit d'intérêts avéré, il faut y mettre fin, le parlementaire est tenu de le faire - sans qu'il s'agisse d'une obligation immédiate.

L'amendement n°109 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°110, présenté par Mme S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elle peut, après avis de l'organe chargé de la déontologie parlementaire, saisir la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, en cas de manquement répété.

Mme Sylvie Robert.  - Le texte est muet sur le cas où un parlementaire demeurerait en situation de conflit d'intérêts. Le comité de déontologie de chaque assemblée pourrait saisir la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique lorsqu'il constate des irrégularités en la matière.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Ce n'est pas le rôle de la Haute Assemblée de porter une appréciation sur les conflits d'intérêts. Elle n'est pas composée à cet effet. Il appartient au Bureau de chaque assemblée, après avis du comité de déontologie parlementaire, de mettre en oeuvre les procédures précises et efficaces de son Règlement.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable, car la Haute Autorité n'est pas l'organe pertinent. Il appartient aux assemblées de prévoir les sanctions appropriées en cas de conflit d'intérêts.

L'amendement n°110 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°184 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mmes Archimbaud et Bouchoux.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Le bureau de chaque assemblée prévoit, après consultation de l'organe chargé de la déontologie parlementaire, les conditions dans lesquelles les cadeaux, avantages et invitations en France et à l'étranger, de valeur supérieure à 150 euros, d'un organisme extérieur au Sénat acceptés par un parlementaire sont rendus publics. »

M. Joël Labbé.  - L'instruction générale du Bureau du Sénat prévoit déjà une certaine transparence pour les invitations de valeur de plus de 150 euros reçus par les sénateurs. Toutefois, si les cadeaux doivent faire l'objet d'une déclaration, aucune mesure de publicité n'est explicitement prévue, à la différence des invitations à l'étranger. Cet amendement tend à combler cette lacune.

Nous devrons avoir une réflexion plus large à l'occasion du prochain renouvellement du Sénat, pour introduire plus de transparence et de démocratie dans notre fonctionnement.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Des règles existent déjà. Laissons notre assemblée, pionnière dans ce domaine, continuer d'assumer sa fonction sans créer de procédure redondante. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - L'instruction générale du bureau du Sénat prévoit déjà des mesures. Nul besoin d'en ajouter. Avis défavorable.

M. Alain Fouché.  - Les sociétés de lobbying comme Boury & Co s'agitent et passent leur temps à inviter des parlementaires dans les plus grands restaurants de Paris, aux frais de fédérations et parfois du Gouvernement. Mettons fin à ce marchandage qui coûte trop cher tant aux sociétés qu'aux ministères.

L'amendement n°184 rectifié bis n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous allons débattre toute la semaine de démocratie, de confiance et de transparence. L'amendement que j'avais présenté, et qui retirait de la liste des documents non communicables au public les comptes rendus des délibérations ministérielles et réunions interministérielles, méritait d'être débattu. Il faut aussi faire la transparence sur les décisions de l'exécutif !

Or cet amendement a été déclaré irrecevable, sous prétexte qu'il s'agirait d'un cavalier. Je rappelle pourtant que l'article 48 de notre Règlement déclare recevables les amendements présentant un lien même indirect avec le texte en discussion. Hélas, la plus grande opacité entoure les décisions d'irrecevabilité dans notre assemblée... Cette autocensure empêche les parlementaires de mener à bien leur mission. Je demande que l'article 48 soit, à l'avenir, appliqué à la lettre. Lorsque le Gouvernement oublie une disposition essentielle pour la cohérence de son projet, nous ne pouvons pas nous taire, sinon c'est la confiance que nos concitoyens déclareront irrecevable.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain)

L'article 2, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°187 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa et Archimbaud.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 4 quinquies de l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il détermine également les règles de transparence appliquée aux documents transmis par des représentants d'intérêts, ainsi que les rencontres et rendez-vous pris ou organisés avec ces représentants. »

M. Joël Labbé.  - On nous dit souvent : « Vous avez de belles idées, mais vous ne faites pas le poids face aux lobbies. » C'est inacceptable. Il nous faut prendre des mesures pour garantir la transparence. L'article 4 quinquies de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires prévoit que « le Bureau de chaque assemblée parlementaire détermine les règles applicables aux représentants d'intérêts entrant en communication » avec les parlementaires et les organes des assemblées. Cet amendement renforce la transparence sur les documents fournis par les représentants d'intérêts, comme sur les rencontres organisées par ces mêmes représentants. C'est essentiel pour dissiper suspicions et fantasmes.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Bureau de chaque assemblée tient de la Constitution et non de la loi le pouvoir de réglementer le travail des parlementaires. C'est ce que fait le Bureau du Sénat depuis longtemps, il lui est loisible de préciser encore les règles. La loi Sapin 2 vient d'ailleurs de créer un registre des représentants d'intérêts. Attendons un peu ! Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. La loi de décembre 2016 a mis en place un répertoire numérique qui rend publiques les relations entre lobbies et parlementaires, et le Bureau des assemblées prend les mesures nécessaires.

Mme Nathalie Goulet.  - Il suffirait que nos collaborateurs refusent systématiquement ces liasses d'amendements prérédigés, voire prédigérés ! C'est simple.

M. Joël Labbé.  - C'est un amendement d'appel à l'intention du futur Bureau du Sénat. Même si des textes existent, l'influence des lobbies persiste.

L'amendement n°187 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°186 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa, Bouchoux et Archimbaud.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le chapitre IX du titre II du livre I du code électoral, il est inséré un chapitre ... ainsi rédigé :

« Chapitre ...

« Fin de mandat

« Art. L. 178-...  -  L'exercice d'une activité de conseil au cours des douze mois suivant la fin de mandat d'un député est soumis à une autorisation de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

« Lorsque la Haute Autorité estime ne pas disposer de toutes les informations lui permettant de statuer sur la demande, elle invite l'intéressé, dans un délai maximum d'une semaine à compter de la réception de sa demande, à la compléter.

« En l'absence de décision expresse écrite contraire dans un délai de quinze jours, l'intéressé est réputé autorisé à exercer l'activité de conseil ».

M. Joël Labbé.  - Cet amendement soumet à autorisation, pendant un délai d'un an, les activités de conseil exercées à l'issue d'un mandat parlementaire afin d'éviter tout soupçon. Cette durée correspond à celle de l'indemnité différentielle de fin de mandat à taux plein des parlementaires. Le parlementaire concerné ne subirait donc pas de perte de revenu si le conseil était son activité principale avant sa prise de fonction.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable car l'amendement est inconstitutionnel.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. La persistance d'une règle d'incompatibilité au-delà de la fin du mandat serait difficile à justifier. D'ailleurs, tout risque de conflit d'intérêt disparaît au terme du mandat.

M. Joël Labbé.  - Soit.

L'amendement n°186 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°195 rectifié, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les trois derniers alinéas de l'article 18-2 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique sont supprimés.

M. Joël Labbé.  - L'article 25 de la loi Sapin 2 définit les représentants d'intérêts mais prévoit un certain nombre d'exceptions : organisations syndicales de fonctionnaires et de salariés, organisations professionnelles d'employeurs, associations cultuelles et associations d'élus. Cet amendement supprime ces exceptions, sauf le cas des élus dans l'exercice de leur mandat et des partis et groupements politiques dans le cadre de leur mission.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je ne partage pas cet idéalisme parlementaire selon lequel tout contact avec la société civile nous contaminerait. Cela frise la fausse dévotion, la tartufferie. Nous menons de nombreuses auditions, nous avons besoin d'entendre les représentants des intérêts économiques et sociaux.

M. Charles Revet.  - Bien sûr !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Les organisations en question ont été exclues à dessein au terme d'un travail parlementaire approfondi qui ne date que de six mois. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. Le législateur a trouvé un équilibre dans la loi de décembre 2016.

M. Joël Labbé.  - J'ai beau m'appeler Labbé, je ne crois pas qu'on puisse me taxer de puritanisme. Bien sûr, nous devons avoir des rapports avec la société civile. Mais il s'agit ici du lobbying organisé. Nous devons rendre confiance à nos concitoyens.

Cela dit, je retire mon amendement.

L'amendement n°195 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°150, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 5° de l'article 18-3 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les projets d'amendement, de proposition de loi, de proposition de résolution transmis à des membres du Parlement. »

Mme Françoise Férat.  - Cet amendement impose aux représentants d'intérêts, dans le cadre prévu par la loi Sapin 2 de déclarer à la HATVP les projets d'amendements, de proposition de loi ou de résolution transmis à des parlementaires.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable à regret. Je ne veux pas que nous fassions de la HATVP un Léviathan alors que sa seule vocation est d'enregistrer nos déclarations d'intérêts et de patrimoine comme celle des présidents d'exécutifs locaux, et de vérifier que nous ne nous sommes pas enrichis pendant notre mandat. (Marques d'approbation sur de nombreux bancs) Il lui a été difficile de réunir les moyens nécessaires, même si elle a désormais atteint un régime de croisière.

Je reconnais toutefois qu'il serait intéressant de rendre publics les amendements des groupes d'intérêts. Je forme le voeu que nous trouvions une rédaction appropriée lorsque ce texte reviendra au Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable, ce n'est pas la mission de la HATVP.

M. Alain Marc.  - On n'arrivera jamais à déterminer la provenance d'un amendement. Mais on veut se faire plaisir...

L'amendement n°150 est retiré, de même que l'amendement n°227.

M. le président.  - Amendement n°193 rectifié, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 18-4 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il ne peut être attribué aux représentants d'intérêts une habilitation permanente pour l'accès aux enceintes des assemblées parlementaires. »

M. Joël Labbé.  - La police des assemblées relève de la compétence de leur président depuis le coup d'État du 18 brumaire an VIII. C'est lui qui fixe les règles d'accréditation et d'entrée au sein de l'assemblée.

Cet amendement a pour but d'inciter le Sénat et l'Assemblée nationale à prohiber, dans leur Règlement, l'attribution d'un accès permanent à des représentants d'intérêts. Il n'est pas justifiable qu'ils se promènent dans nos couloirs lorsqu'ils n'ont pas rendez-vous avec un parlementaire, pour glaner des informations ou exercer des pressions. Seuls les groupes influents ont d'ailleurs les moyens de le faire, quand d'autres, qui auraient aussi des choses à dire, ne le peuvent pas.

Nous devons pouvoir prendre nos décisions en notre âme et conscience, après être allés chercher les informations que nous souhaitons.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Mon âme et ma conscience ne sont pas exposés au moindre risque lorsque je rencontre le représentant d'un groupe d'intérêts.

M. Charles Revet.  - Heureusement !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Si les groupes d'intérêt sont licites - et vous ne proposez pas de les interdire - il faut bien qu'ils servent à quelque chose !

L'organisation du travail parlementaire relève non de la loi mais du Bureau des assemblées. Nous admettons en certains lieux du palais la présence de représentants d'intérêts, afin de pouvoir les rencontrer. Chacun en France doit pouvoir approcher les parlementaires ! Ce que la loi interdit, c'est la corruption, la prévarication, le conflit d'intérêts. Je suis donc très hostile à l'amendement sur le fond. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Pierre-Yves Collombat applaudit aussi.)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Le Gouvernement estime que les règles de prévention des conflits d'intérêts sont suffisantes. En outre, cela relève de la compétence des assemblées.

Mme Catherine Tasca.  - La loi n'a pas à intervenir sur ce terrain. Les amendements, malgré leurs excellentes intentions, empiètent sur un champ qui relève de la responsabilité propre de chaque assemblée. On a déjà trop tendance à le rogner ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain, au centre et à droite)

M. Marc Laménie.  - On peut comprendre les inquiétudes de M. Labbé, mais laissons à chacun une marge d'initiative et de liberté. Les séances de l'Assemblée nationale et du Sénat sont publiques. Ne ficelons pas tout, conservons de la souplesse. (« Très bien ! » à droite)

M. Joël Labbé.  - Je dois m'expliquer davantage. Que les questions agricoles ou alimentaires suscitent le débat entre nous, c'est normal. Mais est-il normal qu'un syndicat agricole, que je ne veux pas stigmatiser, dispose d'un collaborateur spécialement chargé du lobbying ?

M. Rémy Pointereau.  - Vous stigmatisez bel et bien !

M. Alain Fouché.  - Il y a aussi des lobbies écologistes !

M. Joël Labbé.  - Un autre syndicat, qui a aussi des arguments à faire valoir, n'est que trop peu entendu des parlementaires. C'est, une fois encore, un amendement d'appel au futur Bureau.

L'amendement n°193 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°235 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Arnell et Castelli, Mme Costes, M. Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La liste des déplacements en France et à l'étranger des parlementaires dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions est publiée par chaque assemblée.

M. Alain Bertrand.  - Je souhaite qu'on publie chaque année la liste des voyages des parlementaires dans le cadre des groupes d'étude ou d'amitié, missions, etc...

Mme Nathalie Goulet.  - C'est déjà fait !

M. Alain Bertrand.  - Il arrive qu'on dise que les élus se promènent aux frais de la princesse, ou du prince. Pour ma part, je ne suis pas très favorable à ces voyages dans tous les sens.

M. Alain Fouché.  - C'est l'inquisition !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. Une telle disposition, inutilement complexe, serait disproportionnée et ne relève pas de la loi.

Mme Nathalie Goulet.  - Cette obligation existe depuis longtemps, la liste des voyages que nous effectuons est consultable en ligne.

L'amendement n°235 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Je salue la présence dans les tribunes de notre ancien collègue Daniel Hoeffel, qui fut longtemps vice-président du Sénat. (Applaudissements chaleureux)

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par Mme Lienemann et M. Leconte.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les emplois et fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce dans les conditions fixées au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution sont incompatibles avec le fait d'exercer ou d'avoir exercé, au cours des trois dernières années, les fonctions de dirigeant, de salarié ou de conseiller d'une société contrôlée, supervisée, subordonnée ou concernée par l'institution, l'organisme, l'établissement ou l'entreprise auquel cet emploi ou fonction se rattache.

II.  -  Aucune personne exerçant les emplois et fonctions mentionnés au I ne peut participer à une délibération concernant une entreprise ou une société contrôlée, supervisée, subordonnée ou concernée par l'institution, l'organisme, l'établissement ou l'entreprise dans laquelle elle a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat.

Les personnes exerçant les emplois et fonctions mentionnés au I ne peuvent, directement ou indirectement, détenir d'intérêts dans une société ou entreprise mentionnée au I.

L'article 432-13 du code pénal est applicable aux personnes visées au I, après la cessation de leur emploi ou de leur fonction.

Le non-respect de cet article est passible des sanctions prévues à l'article 432-13 du code pénal.

Un décret en Conseil d'État fixe le modèle de déclaration d'intérêts que chaque personne doit déposer au moment de sa désignation.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - J'ai plaisir à saluer à mon tour le président Hoeffel, qui avait accompagné le président Mitterrand en visite à Athis-Mons, dont j'étais maire.

Les conflits d'intérêts concernent aussi les hauts fonctionnaires, notamment ceux qui sont nommés en Conseil des ministres. Certains, après avoir travaillé dans une grande banque, rejoignent l'organisme chargé de la contrôler. C'est très fréquent, et très préjudiciable. La Hadopi, la Commission de régulation de l'énergie se sont dotées de règles, mais ce n'est pas le cas partout, et notamment pas dans la haute finance.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet amendement soulève une série de questions délicates. Il interdit de nommer à une fonction relevant de la procédure de l'article 13 de la Constitution une personne qui aurait travaillé dans une société, un organisme ou un établissement public se rattachant à cet emploi puis il prévoit qu'une personne ne pourrait pas participer aux délibérations si elle a, au cours des trois années précédentes, exercé des fonctions ou détenu un mandat dans la société, l'organisme ou l'établissement public concerné par la décision. Cela est parfaitement contradictoire. Surtout, si l'on quitte la théorie pour se pencher sur des cas pratiques, cela empêcherait la nomination à la tête de la Caisse des dépôts et des consignations d'une personne ayant auparavant dirigé une de ses filiales. Nous serions contraints de prendre un fonctionnaire de Bercy ou quelqu'un qui n'y connaît rien. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable également.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je maintiens mon amendement. Je veux bien en admettre l'imperfection technique mais il est un copié-collé de la loi Hadopi... On n'interdit pas, on empêche pour trois ans. Ces dispositions valent pour beaucoup de secteurs, dont l'énergie. Bien évidemment, ça ne vaudrait pas pour la banque et la finance ; comme par hasard !

M. Alain Vasselle.  - Je rappelle que nous avons légiféré dernièrement sur la déontologie des fonctionnaires. Je proposerai de fondre la Commission de déontologie et la HATVP pour traiter du pantouflage. Les préoccupations de Mme Lienemann sont légitimes.

Où s'arrêtera-t-on de légiférer ? Le président de la République l'a lui-même dit à Versailles : nous légiférons trop. Mieux aurait valu prendre le temps de la réflexion. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Pierre-Yves Collombat.  - « Une série de questions délicates » ? Et pour cause, cet amendement met en cause le système qui croît et embellit depuis trente ans : il est bâti sur la consanguinité, la porosité et les passages entre le public et le privé. La cogestion du pays par les intérêts financiers, les intérêts politiques les plus importants et ceux de la haute administration, c'est ça la France !

L'influence des milieux financiers passe par ce canal, bien plus que par la transmission de prospectus ou de propositions d'amendements aux parlementaires...

Certes, on ne réglera pas ce problème par un amendement. Pour autant, combien de temps encore allons-nous laisser perdurer cette confusion générale qui creuse le fossé entre les électeurs et nous !

M. Éric Doligé.  - Au risque d'en étonner certains - de toute façon il n'y a plus de frontières politiques dans cet hémicycle ! -, cet amendement me plaît. Nous allons délibérer durant quatre jours pour clouer les élus au pilori en restant silencieux sur les très hauts fonctionnaires. Je voterai l'amendement de Mme Lienemann, même si sa rédaction est imparfaite.

D'ailleurs, une question : ne va-t-on pas bientôt nous demander de nous déporter sur tous les textes de loi concernant l'avenir des élus ? (Sourires) Madame Lienemann, je me ferai un plaisir de voter votre proposition. (M. Yves Pozzo di Borgo et Mme Evelyne Yonnet applaudissent.)

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°4 rectifié, mis aux voix par assis et levé, est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et Union centriste)

ARTICLE 2 BIS

M. le président.  - Amendement n°206, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement supprime le registre « de déport » pour les membres du Gouvernement. Ce serait méconnaître le principe de séparation des pouvoirs, dont le Conseil constitutionnel a jugé qu'il s'applique à l'égard du président de la République et du Gouvernement.

L'article 2 de la loi de 2013 a renvoyé au pouvoir réglementaire les règles de prévention des conflits d'intérêts concernant les membres du Gouvernement.

En précisant que le registre doit mentionner les cas dans lesquels un membre du Gouvernement s'abstient de participer à la délibération du Conseil des ministres, cet article, introduit par votre commission, prétend imposer au Gouvernement de rendre publics certains éléments de la délibération du Conseil des ministres, ce qui constitue une atteinte au secret des délibérations.

Enfin, le Gouvernement dispose déjà des instruments de protection suffisants. L'article premier de la loi du 11 octobre 2013 dispose que les membres du Gouvernement « exercent leurs fonctions avec dignité, probité et intégrité ».

M. Charles Revet.  - Ne faudrait-il pas rappeler qu'il en est de même pour les parlementaires ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je ne dis pas autre chose depuis hier.

Lorsqu'un ministre estime se trouver en situation de conflit d'intérêts, il en informe le Premier ministre qui juge les responsabilités qu'il doit reprendre.

Ce système, qui respecte la séparation des pouvoirs, est suffisant et effectif. À titre d'exemple, Agnès Buzyn, ministre de la santé, n'intervient pas sur l'Inserm dirigé par son époux.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission s'en tient à son texte. Il est singulier que le Gouvernement, si prompt à intervenir sur le travail parlementaire, se montre si frileux vis-à-vis du travail gouvernemental... (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Les Républicains et Union centriste)

La séparation des pouvoirs ? Le Sénat est loin de l'opposer systématiquement au Gouvernement sur les sujets qui le concernent.

Quant au secret des délibérations en Conseil des ministres, nous demandons seulement un signalement des déports dans le compte rendu. Cela se pratique dans les conseils municipaux où la décision est pareillement collégiale car, de la base au sommet, la République fonctionne de la même façon.

Je souhaite la symétrie dans les exigences de transparence. Pourquoi le travail gouvernemental serait-il au-dessus de tout soupçon quand le travail parlementaire ne le serait pas ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Union centriste ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le Gouvernement ne cherche pas à s'éviter des règles déontologiques qu'il imposerait aux assemblées. Cet article, s'il demeurait dans la loi, constituerait une injonction au Gouvernement.

Mme Annie Guillemot.  - Et nous, alors ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Vous, parlementaires, examinez une loi qui vous concerne et qui sera soumise à votre vote ; cela est différent. (Marques de désapprobation)

Mme Éliane Assassi.  - C'est tout de même un projet de loi, un texte proposé par le Gouvernement !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le Conseil des ministres ne peut être comparé au conseil municipal : ce n'est pas une assemblée, c'est un organisme constitutionnel.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Ayant siégé dans les deux, je peux me prévaloir d'une certaine expérience. Le fait qu'ils ne sont pas de même nature n'empêche pas que les règles puissent être communes pour prévenir les conflits d'intérêts. Du reste, le Conseil constitutionnel n'a rien trouvé à redire à la loi de 2013 ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Union centriste)

M. Bruno Sido.  - Très bien !

M. Jean-Pierre Sueur.  - En effet, la loi de 2013, dont j'étais l'un des rapporteurs, prévoyait des dispositions sur l'exécutif. Tous les pouvoirs sont soumis à la loi. Si nous acceptions le contraire, nous nous empêcherions de légiférer sur toute matière relevant de l'exécutif ! La commission des lois a bien fait de suivre son rapporteur. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes socialiste et républicain, Union centriste et Les Républicains)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Pardonnez-moi de faire référence encore une fois au Conseil constitutionnel... En 2011, il a précisé que le législateur ne peut intervenir dans l'organisation du Gouvernement et, donc, sur le Conseil des ministres. (Protestations sur tous les bancs)

M. Jean-Pierre Sueur.  - La mesure concerne l'exercice du pouvoir exécutif, et non l'organisation du Gouvernement !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Vous avez parfaitement raison, madame la ministre, mais nous ne touchons pas là à l'organisation du Gouvernement. Croyez bien que je veille au respect scrupuleux de la Constitution. (Applaudissements)

L'amendement n°206 n'est pas adopté.

L'article 2 bis est adopté.

Commission (Candidature)

M. le président.  - J'informe le Sénat que le groupe RDSE a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.

Cette candidature a été publiée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du Règlement.

La séance est suspendue à 19 heures.

présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président

La séance reprend à 21 heures.

Commission (Nomination)

M. le président.  - Je rappelle au Sénat que le groupe RDSE a présenté une candidature pour la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.

Le délai prévu par l'article 8 du Règlement est expiré. La présidence n'a reçu aucune opposition. En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Raymond Vall membre de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la suite de la discussion du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l'action publique.

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 2 bis

M. le président.  - Amendement n°278, présenté par MM. Baroin, Bonhomme, Bouchet et Calvet, Mme Canayer, MM. Cantegrit et Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Cuypers, Danesi et Darnaud, Mmes Deroche, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, M. Doligé, Mme Estrosi Sassone, MM. Forissier, Fouché, Frassa, Frogier et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, M. Guené, Mme Hummel, M. Husson, Mme Kammermann, MM. Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. Lefèvre, de Legge, Longuet, Malhuret et Mandelli, Mme Mélot, MM. Morisset, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pierre, Pointereau et Portelli, Mme Procaccia et MM. de Raincourt, Rapin, Revet, Savary, Savin, Vasselle et Vogel.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre Ier du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :

« Titre Ier

« Les conditions de la délivrance de l'attestation fiscale aux membres du Parlement et aux représentants au Parlement européen

« Art. L. 1.  -  Dans le cadre de la délivrance de l'attestation prévue à l'article L. O. 136-4 du code électoral et à l'article 5-3 de la loi n°77-729 du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen, les membres du Gouvernement ne peuvent adresser à l'administration des impôts aucune instruction dans des affaires individuelles. »

M. François Bonhomme.  - Cet amendement interdit aux membres du Gouvernement d'adresser à l'administration des impôts des instructions dans des affaires individuelles, dans le cadre de la délivrance de l'attestation fiscale prévue par le présent projet de loi.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable. Cela devrait aller sans dire ; cela va mieux en le disant.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Puisque cela va sans dire, c'est inutile. Ce type d'instructions n'existe pas, attention au risque d'contrario. Avis défavorable.

L'amendement n°278 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°91, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au second alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale, après le mot : « tenu », sont insérés les mots : « sous peine de sanction pénale ».

Mme Éliane Assassi.  - Tout fonctionnaire ayant connaissance d'un crime ou d'un délit doit les signaler au procureur de la République, mais les manquements à cette obligation ne sont pas sanctionnés.

Cet amendement d'appel demande au Gouvernement de mieux définir le régime de sanction pénale. Rien n'est dit par ailleurs sur les risques sociaux et environnementaux. Il s'agit de mieux protéger les lanceurs d'alerte du secteur public, pour rétablir la confiance...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - C'est un amendement d'appel : quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Un manquement à l'obligation prévue à l'alinéa 2 de l'article 40 du code de procédure pénale expose l'agent public à des poursuites disciplinaires voire pénales en cas de complicité.

Un tel amendement pourrait inciter les fonctionnaires à tout dénoncer pour ne prendre aucun risque. Il est en outre difficile de démontrer que la personne ne peut ignorer le caractère frauduleux du comportement qu'elle devrait dénoncer... Avis défavorable.

L'amendement n°91 n'est pas adopté.

L'amendement n°158 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°194 rectifié bis, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 33 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un article 33 ... ainsi rédigé :

« Art. 33 ...  -  Les instances de rencontres régulières entre parlementaires et représentants d'intérêts, non prévues par les règlements des assemblées, doivent être constituées sous forme d'une association définie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.

« Ces instances de rencontres :

« 1° ne peuvent utiliser le terme de « parlementaire » ou « sénatorial » dans leur dénomination ;

« 2° ne peuvent utiliser le logo du Sénat ou de l'Assemblée nationale ;

« 3° ne peuvent utiliser le terme de « parlementaire » ou « sénatorial » dans l'organisation de colloques, manifestations, réunions ou dans les documents produits.

« Le non-respect de ces dispositions, après injonction de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique restée sans effet dans un délai d'un mois, est passible d'une amende de 15 000 euros. »

M. Joël Labbé.  - Le comité de déontologie du Sénat s'est penché sur les clubs parlementaires dès 2015. Saisie par le président de l'Assemblée nationale en 2016, la HATVP a souligné l'hétérogénéité de leurs statuts et l'absence d'encadrement juridique. Cet amendement définit donc les clubs et encadre leur fonctionnement.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Vous avez tellement raison que ces règles s'appliquent déjà ! Il n'est pas souhaitable d'inscrire dans la loi des règles qui relèvent du fonctionnement interne des assemblées. Retrait ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Joël Labbé.  - Si vous m'assurez en face que les mots « parlementaire » et « sénatorial » ne sont pas utilisés par ces clubs, je le retire sur parole.

M. Gérard César.  - Les yeux dans les yeux !

L'amendement n°194 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°162 rectifié, présenté par MM. Vasselle, Allizard, G. Bailly, Bonhomme, Bouchet et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cuypers et Danesi, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, M. Doligé, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, Frassa, Frogier et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Guené et Houpert, Mme Hummel, MM. Huré et Husson, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Magras, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pierre, Pointereau et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Retailleau et Revet, Mme de Rose et MM. Savin, Vaspart et Vogel.

A.  -  Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 25 octies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est abrogé.

II.  -  Après l'article 23 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un article 23 bis ainsi rédigé :

« Art. 23 bis.  -  I.  -  La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique est chargée d'apprécier le respect des principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique.

« Elle est chargée :

« 1° De rendre un avis lorsque l'administration la saisit, préalablement à leur adoption, sur les projets de texte élaborés pour l'application des articles 6 ter A, 25 à 25 ter, 25 septies, 25 nonies et 28 bis de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

« 2° D'émettre des recommandations sur l'application des mêmes articles ;

« 3° De formuler des recommandations lorsque l'administration la saisit sur l'application desdits articles à des situations individuelles.

« Les avis et les recommandations au présent I ainsi que, le cas échéant, la réponse de l'administration sont rendus publics.

« II.  -  La Haute Autorité est chargée d'examiner la compatibilité du projet de création ou de reprise d'une entreprise par un fonctionnaire sur le fondement du III de l'article 25 septies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 précitée avec les fonctions qu'il exerce.

« III.  -  Le fonctionnaire cessant définitivement ou temporairement ses fonctions ou, le cas échéant, l'autorité dont il relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine saisit à titre préalable la Haute Autorité afin d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou de toute activité libérale, avec les fonctions exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité.

« Pour l'application du premier alinéa du présent III, est assimilé à une entreprise privée tout organisme ou toute entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé.

« À défaut de saisine préalable par le fonctionnaire ou l'administration, le président de la Haute Autorité peut saisir celle-ci dans un délai de trois mois à compter de l'embauche du fonctionnaire ou de la création de l'entreprise ou de l'organisme privé.

« La Haute Autorité apprécie si l'activité qu'exerce ou que projette d'exercer le fonctionnaire risque de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité du service, de méconnaître tout principe déontologique mentionné à l'article 25 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ou de placer l'intéressé en situation de commettre l'infraction prévue à l'article 432-13 du code pénal.

« IV.  -  La Haute Autorité peut demander au fonctionnaire ou à l'autorité dont il relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine ou dans les corps, cadres d'emplois ou emplois dans lesquels il a été précédemment détaché ou a exercé des fonctions toute explication ou tout document nécessaire à l'exercice des missions de la Haute Autorité.

La Haute Autorité peut recueillir auprès des personnes publiques et privées toute information nécessaire à l'accomplissement de sa mission. Elle peut entendre ou consulter toute personne dont le concours lui paraît utile.

« La Haute Autorité est informée par la ou les autorités dont relève le fonctionnaire dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine des faits relatifs à une situation de conflit d'intérêts qui ont été relatés ou ont fait l'objet d'un témoignage en application de l'article 6 ter A de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983, dès lors que ces faits concernent les fonctions exercées ou ayant été exercées au cours des trois années antérieures par ce fonctionnaire.

« V.  -  Lorsqu'elle est saisie en application des II ou III du présent article, la Haute Autorité rend, dans un délai de deux mois à compter de sa saisine, un avis :

« 1° De compatibilité ;

« 2° De compatibilité avec réserves, celles-ci étant prononcées pour une durée de deux ans lorsque l'avis est rendu en application du II et de trois ans suivant la cessation des fonctions lorsque l'avis est rendu en application du III ;

« 3° D'incompatibilité.

« La Haute Autorité peut rendre, au nom de celle-ci, un avis de compatibilité, assorti éventuellement de réserves, dans le cas où l'activité envisagée est manifestement compatible avec les fonctions antérieures ou actuelles de l'intéressé.

« Elle peut également rendre un avis d'incompétence, d'irrecevabilité ou constatant qu'il n'y a pas lieu à statuer.

« VI.  -  Les avis rendus au titre des 2° et 3° du V lient l'administration et s'imposent à l'agent. Lorsque l'un de ces avis est rendu en application du III, la Haute Autorité peut, lorsqu'elle rend un avis d'incompatibilité ou un avis de compatibilité assorti de réserves, et après avoir recueilli les observations de l'agent concerné, le rendre public. L'avis ainsi rendu public ne contient aucune information de nature à porter atteinte à la vie privée de la personne concernée, au secret médical, au secret en matière commerciale et industrielle ou à l'un des secrets mentionnés au 2° de l'article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration.

« L'autorité dont le fonctionnaire relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine peut solliciter une seconde délibération de la Haute Autorité, dans un délai d'un mois à compter de la notification de son avis. Dans ce cas, la Haute Autorité rend un nouvel avis dans un délai d'un mois à compter de la réception de cette sollicitation.

« Lorsque le fonctionnaire ne respecte pas l'avis rendu au titre des mêmes 2° et 3°, il peut faire l'objet de poursuites disciplinaires.

« Lorsque le fonctionnaire retraité ne respecte pas l'avis rendu au titre desdits 2° et 3° , il peut faire l'objet d'une retenue sur pension dans la limite de 20 % pendant les trois ans suivant la cessation de ses fonctions.

« Lorsque l'agent est titulaire d'un contrat de travail et qu'il ne respecte pas l'avis rendu au titre des mêmes 2° et 3° le contrat prend fin à la date de notification de l'avis, sans préavis et sans indemnité de rupture. »

III.  -  Le I et II entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2019.

B.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre IV

Dispositions relatives à la déontologie des fonctionnaires

M. Bruno Retailleau.  - Cet amendement fusionne la Commission de déontologie de la fonction publique et la HATVP, dans un objectif de rationalisation et d'homogénéisation : le traitement doit être équivalent entre membres du Gouvernement, du Parlement et de la haute administration.

M. le président.  - Amendement n°259 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa du III de l'article 25 octies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq ».

M. Pierre-Yves Collombat.  - Selon l'enquête « Que sont les énarques devenus », les chiffres du pantouflage sont éloquents : 75,5 % des inspecteurs généraux des finances ont pantouflé, dont 34 % durablement ; 45,3 % des auditeurs de la Cour des comptes, dont 20 % durablement ; 37,70 % pour le Conseil d'État, dont 11,5 % durablement. Le phénomène n'est pas marginal : 22 % des énarques ont pratiqué cette technique sportive de promotion.

Cet amendement allonge de trois à cinq ans le délai incompressible pour présenter une demande à la Commission de déontologie.

M. le président.  - Amendement n°239 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La deuxième phrase du premier alinéa du VI de l'article 25 octies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi rédigée :

« Lorsque l'un de ces avis est rendu en application du III, après avoir recueilli les observations de l'agent concerné, la commission le rend public. »

M. Pierre-Yves Collombat.  - Même objectif, par des moyens moins drastiques, à savoir la publication des avis de la Commission.

M. le président.  - Amendement n°185 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mme Archimbaud.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 51 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État et l'article 72 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Un fonctionnaire ne peut être placé en position de disponibilité pour exercer une activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou toute activité libérale, que pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois. »

II.  -  Après le deuxième alinéa de l'article 62 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Un fonctionnaire ne peut être placé en position de disponibilité pour exercer une activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou toute activité libérale, que pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois. »

III.  -  Les 1° et 2° du VII de l'article 25 octies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« 1° Un conseiller d'État ou son suppléant, conseiller d'État ;

« 1° bis Deux conseillers maîtres à la Cour des comptes ou leurs suppléants, conseillers maîtres à la Cour des comptes ;

« 2° Deux magistrats de l'ordre judiciaire ou leurs suppléants, magistrats de l'ordre judiciaire ; ».

M. Joël Labbé.  - Cet amendement limite la durée pendant laquelle un fonctionnaire peut être placé en disponibilité pour exercer dans le privé à trois ans, renouvelable une fois, contre dix ans actuellement.

Il assure également aux magistrats siégeant à la Commission de déontologie une majorité de sièges par rapport aux personnalités qualifiées et aux représentants des administrations.

M. le président.  - Amendement n°237 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 51 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le nombre de fonctionnaires admis annuellement en disponibilité sous réserve des nécessités de service ne peut dépasser 5 % de leurs corps d'origine respectifs. La disponibilité sous réserve des nécessités de service ne peut durer plus de trois ans sauf en cas d'études ou recherches présentant un intérêt général. Tout fonctionnaire qui ne réintègre pas le service de l'État au terme de cette période est considéré comme démissionnaire. »

M. Pierre-Yves Collombat.  - Toujours la même chanson : pour éviter la fuite des fonctionnaires dans le privé, nous limitons à 5 % des effectifs du corps le nombre de fonctionnaires en disponibilité.

M. le président.  - Amendement n°258 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 51 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le nombre de fonctionnaires admis annuellement en disponibilité sous réserve des nécessités de service ne peut dépasser 10 % de leurs corps d'origine respectifs. La disponibilité sous réserve des nécessités de service ne peut durer plus de trois ans sauf en cas d'études ou recherches présentant un intérêt général. Tout fonctionnaire qui ne réintègre pas le service de l'État au terme de cette période est considéré comme démissionnaire. »

M. Pierre-Yves Collombat.  - Même chose : 90 % des fonctionnaires d'un corps travailleraient à ce pour quoi ils ont été formés et embauchés. Ce n'est pas excessif.

M. le président.  - Amendement n°257 rectifié, présenté par MM. Collombat, Arnell, Bertrand, Collin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le VII de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les deux occurrences des mots : « conseiller d'État » sont remplacés par les mots : « magistrat de l'ordre administratif » ;

2° Au 1°, les deux occurrences des mots : « conseiller maître à la Cour des comptes » sont remplacés par les mots : « membre des juridictions financières ».

M. Pierre-Yves Collombat.  - Cet amendement étend le recrutement des membres de la Commission de déontologie aux magistrats administratifs et financiers de premier et deuxième degré, non énarques.

M. le président.  - Amendement n°89 rectifié bis, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifiée :

1° Après le cinquième alinéa de l'article 20, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Elle se prononce, en application de l'article 23 bis, sur la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ou toute activité libérale, avec les fonctions effectivement exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité par tout agent cessant ses fonctions. » ;

2°  Après l'article 23, est inséré un article 23 bis ainsi rédigé :

« Art. 23 bis.  -  I.  -  Au regard des exigences prévues à l'article 1er, la Haute Autorité se prononce sur la compatibilité de l'exercice d'une activité libérale ou d'une activité rémunérée au sein d'un organisme ou d'une entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles du droit privé avec des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales énumérées au 2° du I de l'article 11 exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité. Lorsque ces fonctions sont exercées par un agent public, la Haute Autorité est seule compétente pour assurer ce contrôle.

« Afin d'assurer ce contrôle, la Haute Autorité est saisie :

« 1° Soit par la personne concernée, préalablement au début de l'exercice de l'activité envisagée ;

« 2° Soit par son président, dans un délai d'un mois à compter de la connaissance de l'exercice non autorisé d'une activité exercée dans les conditions prévues au premier alinéa du présent I. La Haute Autorité rend son avis dans un délai d'un mois à compter de sa saisine. Elle met la personne concernée en état de présenter ses observations, sauf lorsqu'elle rend un avis de compatibilité sur saisine de la personne concernée.

« II.  -  Les avis de compatibilité peuvent être assortis de réserves dont les effets peuvent s'imposer à la personne concernée pendant une période maximale expirant trois ans après la fin de l'exercice des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales.

« Lorsque la Haute Autorité rend un avis d'incompatibilité, la personne concernée ne peut pas exercer l'activité envisagée pendant une période expirant trois ans après la fin de l'exercice des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales.

« La Haute Autorité notifie sa décision à la personne concernée et, le cas échéant, à l'organisme ou à l'entreprise au sein duquel celle-ci exerce d'ores et déjà ses fonctions en violation du premier alinéa du I. Les actes et contrats conclus en vue de l'exercice de cette activité :

« 1° Cessent de produire leurs effets lorsque la Haute Autorité a été saisie dans les conditions fixées au 1° du I ;

« 2° Sont nuls de plein droit lorsque la Haute Autorité a été saisie dans les conditions fixées au 2° du I.

« Lorsqu'elle est saisie en application du même 2° et qu'elle rend un avis d'incompatibilité, la Haute Autorité le rend public.

« Elle peut rendre un avis d'incompatibilité lorsqu'elle estime ne pas avoir obtenu de la personne concernée les informations nécessaires.

« III.  -  Par délégation de la Haute Autorité et dans les conditions prévues par son règlement général, le président de la Haute Autorité peut rendre un avis de compatibilité, dans le cas où l'activité envisagée est manifestement compatible avec les fonctions antérieures de l'intéressé, ou un avis d'incompétence, d'irrecevabilité ou constatant qu'il n'y a pas lieu à statuer.

« IV.  -  Lorsqu'elle a connaissance de l'exercice, par une personne mentionnée au I, d'une activité exercée en violation d'un avis d'incompatibilité ou d'une activité exercée en violation des réserves prévues par un avis de compatibilité, et après que la personne concernée a été mise en mesure de produire des explications, la Haute Autorité publie au Journal officiel un rapport spécial comprenant l'avis rendu et les observations écrites de la personne concernée.

« Elle transmet au procureur de la République le rapport spécial mentionné au premier alinéa du présent IV et les pièces en sa possession relatives à cette violation de son avis.

« V.  -  Ces dispositions sont applicables :

« 1° Aux fonctionnaires placés ou devant être placés en cessation définitive de fonctions, disponibilité, détachement, hors-cadre, mise à disposition ou exclusion temporaire de fonctions ;

« 2° Aux agents non titulaires de droit public employés par l'État, une collectivité territoriale ou un établissement public ;

« 3° Aux membres du cabinet de la Présidence de la République ;

« 4° Aux membres d'un cabinet ministériel ;

« 5° Aux collaborateurs de cabinet des autorités territoriales ;

« 6° Aux agents contractuels de droit public ou de droit privé des établissements mentionnés aux articles L. 1142-22, L. 1222-1, L. 1323-1, L. 1336-1, L. 1413-2, L. 1418-1 et L. 5311-1 du code de la santé publique ;

« 7° Aux agents contractuels de droit public ou de droit privé d'une autorité administrative indépendante.

« Ces dispositions ne s'appliquent aux agents non titulaires de droit public mentionnés aux 2° et 7° que s'ils sont employés de manière continue depuis plus d'un an par la même autorité ou collectivité publique.

« VI.  -  La Haute Autorité est également chargée d'examiner la compatibilité du projet de création ou de reprise d'une entreprise par un fonctionnaire sur le fondement de l'article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires avec les fonctions qu'il exerce. Elle examine en outre la compatibilité entre la poursuite de son activité privée par le dirigeant d'une société ou association sur le même fondement.

« La Haute Autorité donne son avis sur les autorisations demandées par les personnels de la recherche en vue de participer à la création d'entreprise et aux activités des entreprises existantes.

« VII.  -  La saisine de la Haute Autorité est obligatoire au titre du I pour les agents chargés soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer des décisions relatives à des opérations effectuées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de telles décisions.

« Pour l'application du premier alinéa du présent VII, est assimilée à une entreprise privée toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé. »

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Il s'agit, en fusionnant HATVP et Commission de déontologie, de renforcer le contrôle de compatibilité dont les lacunes nourrissent la défiance de nos concitoyens. Si les élus doivent être exemplaires, les hauts fonctionnaires aussi ! De plus en plus d'énarques et de polytechniciens vont pantoufler dans le privé avant même d'avoir rempli leur engagement décennal, ce qui s'apparente à une forme blanche de corruption. Ce mélange des sphères privée et publique, source de conflit d'intérêts, pose un vrai problème d'éthique.

Notre amendement n°90 sanctionne le non-respect de l'engagement décennal.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - L'amendement n°162 rectifié avait été adopté par le Sénat dans la loi relative à la déontologie des fonctionnaires avant d'être écarté en CMP. En effet, il transforme radicalement les missions de la HATVP, qui se borne à recevoir des déclarations d'intérêt et de patrimoine et à vérifier l'absence d'enrichissement illicite, en la chargeant de contrôler toute mobilité de fonctionnaires, y compris de catégorie B et C. Si vous voulez réformer la Commission de déontologie, il faut procéder autrement. Retrait ?

Avis défavorable à l'amendement n°259 rectifié ainsi qu'à l'amendement n°239 rectifié : nous avons tranché il y a un an à peine dans la loi sur la déontologie des fonctionnaires. En outre, la Commission de déontologie peut déjà publier ses avis.

Avis défavorable aux amendements nos185 rectifié bis et 257 rectifié. Retrait de l'amendement n°89 rectifié bis.

Défavorable enfin aux amendements nos237 rectifié et 258 rectifié : les modalités de disponibilité varient d'un corps à l'autre et le statut est aussi utilisé pour des années sabbatiques.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Si je peux partager les objectifs qui animent ces amendements, des dispositions qui s'attachent à la fonction publique ou à la magistrature n'ont pas de lien avec le texte. Ce sont à mes yeux des cavaliers. Retrait ou avis défavorable.

M. Bruno Retailleau.  - Le président Bas nous a convaincus : nous retirons l'amendement n°162 rectifié, dans la douleur. (Sourires)

L'amendement n°162 rectifié est retiré.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Moi, il ne m'a pas convaincu ! Pourquoi ne pourrait-on revenir sur des dispositions récentes ? On le fait bien pour la définition du conflit d'intérêts !

Je constate que le pantouflage a de beaux jours devant lui, et de solides amis. Tant qu'on refusera de s'attaquer à cette plaie, on ne pourra rétablir la confiance dans les institutions : c'est le conflit d'intérêts permanent ! Le problème n'est pas le déport du gouverneur de la Banque de France sur tel ou tel dossier - c'est que des hauts fonctionnaires confondent l'intérêt des banques et des entreprises avec celui de la France.

Mme Éliane Assassi.  - Très bien !

M. Joël Labbé.  - Oui, le pantouflage est une plaie ! Pour rétablir la confiance dans l'action publique, il faut des signes forts. Il est anormal de retrouver dans les services du ministère de l'agriculture des anciens des grandes firmes agricoles, et vice-versa.

Il faut entendre ces amendements qui régulent un peu les choses.

L'amendement n°259 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos239 rectifié, 185 rectifié bis, 237 rectifié, 258 rectifié, 257 rectifié et 89 rectifié bis.

M. le président.  - Amendement n°163 rectifié ter, présenté par MM. Genest, Allizard, G. Bailly, Bonhomme, Bouchet et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cuypers et Danesi, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deroche, Deromedi et Deseyne, M. Doligé, Mme Duchêne, MM. Dufaut et Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. Frassa et Frogier, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, M. Guené, Mme Hummel, M. Huré, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pierre et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Retailleau et Revet, Mme de Rose et MM. Savin, Vaspart, Vasselle, Vogel et Perrin.

I.  -  Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 25 decies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un article 25 ... ainsi rédigé :

« Art. 25-...  -  Il est interdit à tout ancien fonctionnaire ou agent public d'exercer une activité de conseil qui a trait directement ou indirectement aux missions de service public attachées à ses anciennes fonctions pendant un délai de trois ans. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre VI

Dispositions relatives à la déontologie des fonctionnaires

M. Jacques Genest.  - Cet amendement prévoit qu'un ancien fonctionnaire ne peut exercer une activité de conseil liée à ses anciennes missions de service public pendant un délai de trois ans.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. (On s'en offusque à droite.) De mon point de vue, ces dispositions, dont je ne préjuge nullement l'intérêt, sont des cavaliers.

L'amendement n°163 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°164 rectifié bis, présenté par MM. Genest, Allizard, G. Bailly, Bonhomme, Bouchet et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cuypers et Danesi, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deroche, Deromedi et Deseyne, M. Doligé, Mme Duchêne, MM. Dufaut et Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. Frassa et Frogier, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, M. Guené, Mme Hummel, M. Huré, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Magras, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Nègre, de Nicolaÿ, Panunzi, Paul, Pierre et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Retailleau et Revet, Mme de Rose et MM. Savin, Vaspart, Vasselle, Vogel et Perrin.

I.  -  Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 25 decies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un article 25 ... ainsi rédigé :

« Art. 25 ...  -  Il est interdit à tout ancien fonctionnaire ou agent public en disponibilité et ayant exercé des fonctions pour le compte d'une entreprise publique ou privée ou pour une société de conseil d'occuper une fonction impliquant une mission de service public ou l'exercice de prérogatives de puissance publique directement ou indirectement liés aux secteurs d'activités dans lesquels il est intervenu pendant un délai de trois ans. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre VI

Dispositions relatives à la déontologie des fonctionnaires

M. Jacques Genest.  - La moralisation vaut autant pour les fonctionnaires que pour les élus.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Il ne s'agit pas d'une loi de moralisation mais de règles d'éthique ; de mon point de vue, ces dispositions sont hors du champ de la loi.

M. Éric Doligé.  - « Confiance dans l'action publique », dit l'intitulé du projet de loi. La fonction publique relève de l'action publique : on est pleinement dans le cadre du texte.

M. Jean-François Husson.  - Très bien !

M. Éric Doligé.  - Sans doute faudrait-il changer l'intitulé - nous allons vous le proposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Pour rétablir la confiance dans l'action publique, il ne faudrait s'attacher qu'au comportement des élus, pas des fonctionnaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) C'est un choix politique. Je défends pour ma part une fonction publique indépendante, soucieuse de l'intérêt général, dont le statut est le garant.

Avec un spoil system à l'américaine, les hauts fonctionnaires venus du privé, sans doute très efficaces et compétents mais qui n'auront pas de garantie pour l'avenir, se soucieront surtout de leur prochain poste, après l'alternance. Dès lors, leur indépendance aura moins de prix...

Le choix du Gouvernement d'étanchéifier les politiques taxés de corruption mais d'épargner la haute administration rompt avec la tradition républicaine. Nous n'y prêterons pas main forte. Oui, le pantouflage est une plaie ! (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et Les Républicains ; Mme Corinne Bouchoux, M. Joël Labbé et M. Jean Desessard applaudissent également.)

L'amendement n°164 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°165 rectifié bis, présenté par MM. Genest, Allizard, G. Bailly, Bonhomme, Bouchet et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Cuypers et Danesi, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deroche, Deromedi et Deseyne, M. Doligé, Mme Duchêne, M. Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. Fouché, Frassa et Frogier, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, M. Guené, Mme Hummel, M. Huré, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Magras, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Nègre, de Nicolaÿ, Panunzi, Paul, Pierre et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Retailleau et Revet, Mme de Rose et MM. Savin, Vaspart, Vasselle, Vogel et Perrin.

I.  -  Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 9° de l'article 18-5 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie politique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° S'abstenir d'exercer toute action pour le compte ou auprès d'une personne morale de droit public dont il aurait été le fonctionnaire ou l'agent public dans les trois dernières années. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre VI

Dispositions relatives à la déontologie des fonctionnaires

M. Jacques Genest.  - Ce délai de carence de trois ans vise à prévenir les situations potentielles conduisant à des prises illégales d'intérêts.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable, pour les mêmes raisons. (On s'offusque à droite.)

Le Gouvernement ne dit pas que la fonction publique est hors du champ éthique dont nous parlons. Le titre de la loi est une chose ; ce qui importe, c'est la cohérence des articles du projet de loi initial. (Mme Marie-Noëlle Lienemann et les membres du groupe Les Républicains protestent.) Or celui-ci ne comprend aucune disposition relative à la fonction publique.

Mme Éliane Assassi.  - Et les droits du Parlement ?

M. Michel Raison.  - Cette cohérence existe-t-elle dans l'intitulé même du texte ? Titre prétentieux d'ailleurs : redonner confiance dans l'action publique, c'est une addition de choses incommensurable. Par exemple, commencer par tenir, une fois élu, les promesses faites en tant que candidat ! Ou encore, des règles identiques pour les élus et les fonctionnaires. Quand j'étais maire, je disais toujours à mes agents que si nous n'avions pas le même statut, nous avions la même mission. (Marques d'approbation) Les fonctionnaires appliquent les décisions des élus - même si on observe parfois l'inverse... (Sourires)

Ce n'est pas la loi qui rétablira la confiance, mais notre comportement à tous. (Marques d'approbation à droite). La morale, l'honnêteté, cela ne se décrète pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Michel Raison.  - Bref, il va falloir changer ce texte incohérent. Nul doute que vous serez d'accord, madame la ministre, puisque vous prêchez la cohérence !

M. Bruno Retailleau.  - Le Gouvernement veut restreindre le texte aux seuls parlementaires, nous souhaitons pour notre part qu'il englobe l'ensemble du champ de l'action publique, membres du Gouvernement et fonctionnaires compris.

Madame la ministre, tolérez que nous exercions notre droit d'amendement. Ce n'est pas parce que le Gouvernement présente un texte que les parlementaires sont obligés de se plier à sa logique. C'est notre liberté que de le modifier quand nous le jugeons nécessaire. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, marques d'approbation sur de nombreux bancs à gauche)

Mme Éliane Assassi.  - Exactement !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je n'ai ni le désir, ni le pouvoir de restreindre le droit d'amendement du Parlement. Je fais simplement part d'une réticence juridique : indépendamment de leur pertinence, ces dispositions n'ont pas leur place dans ce texte-ci. (On le conteste sur plusieurs bancs.)

M. Alain Vasselle.  - M. Retailleau a parlé d'or.

Lors de la récente loi sur la déontologie des fonctionnaires, j'avais veillé, en tant que rapporteur, au parallélisme des formes entre membres du Gouvernement et parlementaires, d'une part, et fonctionnaires, d'autre part. Nous avions considéré qu'il était trop tôt pour fusionner Commission de déontologie et HATVP ; c'est encore le cas.

Il n'y a rien de choquant à ce que nous prenions des dispositions sur les fonctionnaires. C'est vous qui avez levé le lièvre...

M. Jean Desessard.  - Maintenant, il court ! (Sourires)

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je ne prétends pas être juge de paix en la matière, mais il appartient à la commission des lois de trancher sur la recevabilité des amendements au titre de l'article 45. Bien des collègues jugent la commission trop sévère...

Mme Éliane Assassi.  - En effet !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous savons que le Conseil constitutionnel a des règles très précises en matière de recevabilité, qu'il applique d'office.

Nous avons estimé que ces amendements avaient un lien indirect suffisant avec le texte car ils ne portent pas sur la fonction publique mais sur les conflits d'intérêts - ils ont donc leur place ici.

M. Jean Desessard.  - Bien dit !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - En outre, en vertu de la règle de l'entonnoir, la recevabilité est plus large en première lecture...

M. Jean Desessard.  - C'est cohérent !

L'amendement n°165 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°238 rectifié, présenté par MM. Collombat, Bertrand, Castelli et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mmes Laborde, Jouve et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport présentant les mesures mises en oeuvre pour obtenir le remboursement du montant des traitements et indemnités perçues lors de leur scolarité par les anciens élèves de l'École normale supérieure, l'École nationale d'administration et l'École Polytechnique bénéficiant d'une mise en disponibilité et n'ayant pas souscrit à l'engagement de rester au service de l'État pendant la durée minimum prévue par décret.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Il semble que le remboursement des traitements perçus par les fonctionnaires pantoufleurs soit aléatoire, que le tarif varie en fonction des circonstances... D'où l'utilité d'un rapport sur le sujet.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Habituellement nous n'aimons pas beaucoup les rapports. Sagesse.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le Gouvernement n'aime pas non plus les rapports. Avis défavorable.

M. Jean Desessard.  - On change de Gouvernement mais pas de réponses ! (Rires)

L'amendement n°238 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°90, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 24 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifié :

1° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Du non-respect de l'engagement à servir l'État pendant une durée minimale de dix ans pour les élèves diplômés de l'École nationale d'administration ou de l'École Polytechnique. » ;

2° À la première phrase du septième alinéa, les mots : « des sommes fixées par la réglementation applicable, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d'État » sont remplacés par les mots : « de la somme de 100 000 euros ».

M. Michel Le Scouarnec.  - Le pantouflage pose des problèmes éthiques et déontologiques liés au mélange entre sphères privées et publiques, entre intérêt général et intérêts particuliers. Il est source de situation de conflits d'intérêts. Nous proposons que le non-respect de l'engagement décennal soit assorti de la radiation de la qualité de fonctionnaire et du remboursement d'une partie des frais de scolarité, sachant qu'un élève de l'ENA coûte en moyenne 168 000 euros à l'État.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Supprimons-la !

M. Michel Le Scouarnec.  - Pour moraliser l'action publique, il faut parfois des dispositions pragmatiques. Avec une telle mesure, les hauts fonctionnaires motivés par l'appât du gain y réfléchiront à deux fois.

Autrefois, il fallait signer un engagement avant même de passer le concours de l'École normale d'instituteurs ! (M. Joël Labbé applaudit.)

M. Roland Courteau.  - De dix ans !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Attendons donc le rapport dont nous venons de voter le principe. De telles dispositions sont en outre discriminatoires, car il existe bien d'autres écoles donnant accès à la fonction publique. Pourquoi ne viser qu'une catégorie, qui n'est pas moins honorable que les autres ? Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Michel Le Scouarnec.  - Je veux bien attendre le rapport, mais il est prévu pour quelle date ? (Rires)

M. Jean Desessard.  - J'aurais aimé que vous nous donniez votre position morale, madame la ministre. Nous attendons beaucoup du nouveau Gouvernement, d'En Marche, en matière de morale...

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Moi je n'attends rien du tout !

M. Jean Desessard.  - J'aurais aimé que vous disiez qu'il n'est pas normal que des gens qui s'engagent à servir l'État pendant dix ans ne le fassent pas, et que l'État n'applique pas les règles. Or vous nous opposez des arguments technocratiques. J'attends de la ministre chargée de moraliser la vie publique qu'elle nous donne son point de vue. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, Union centriste, communiste républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Sans doute n'ai-je pas été assez claire. Je ne parle pas ici de morale, mais de règles de droit. La morale est propre à chacun d'entre nous. (Protestations)

Oui, je pense comme vous qu'un fonctionnaire qui manque à ses obligations de servir dans la fonction publique pendant dix ans devrait rembourser les traitements perçus pendant sa scolarité. Mais je ne pense pas que cela ait sa place dans cette loi. Cela relève du pouvoir réglementaire ; d'ailleurs, un décret en Conseil d'État a été pris sur le sujet il y a quelques semaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche)

M. Michel Raison.  - Peut-être une mission d'information pourrait-elle se pencher sur la question ? Cela vaut aussi pour les études de médecine...

L'amendement n°90 n'est pas adopté.

L'article 2 ter est adopté.

ARTICLE 2 QUATER

M. le président.  - Amendement n°207, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 6 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifié :

1° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :

a) La première phrase est complétée par les mots : « , à l'exception des informations mentionnées au huitième alinéa » ;

b) À la seconde phrase, les mots : « Ces informations » sont remplacés par les mots : « Les informations demandées à l'administration fiscale » ;

2° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :

« L'autorité judiciaire et les juridictions financières peuvent rendre la Haute Autorité destinataire de toute information relative au patrimoine ou aux intérêts d'une personne mentionnée aux articles 4 ou 11 de la présente loi.

« La Haute Autorité peut se faire communiquer tout document ou renseignement utile à l'exercice de sa mission de contrôle, par les établissements ou les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article 1649 A du code général des impôts ainsi que par les entreprises, personnes morales, institutions et organismes mentionnés au I de l'article 1649 ter du même code, sans que ceux-ci puissent lui opposer le secret professionnel.

« Le droit prévu au huitième alinéa s'exerce sur place ou par correspondance, y compris électronique, et quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents. Les agents de la Haute Autorité peuvent prendre copie des documents dont ils ont ainsi connaissance.

« Le refus de communication des documents et renseignements mentionnés au huitième alinéa ou tout comportement faisant obstacle à leur communication entraîne l'application d'une amende de 5 000 euros. Cette amende s'applique pour chaque demande, dès lors que tout ou partie des documents ou renseignements sollicités ne sont pas communiqués. »

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement adapte le droit de communication propre à la HATVP dans l'exercice de ses missions à ses besoins réels.

Il prévoit ainsi que la Haute Autorité pourra être informée par l'autorité judiciaire et les juridictions financières de toute information pertinente dans l'exercice de ses missions. Ce n'est actuellement que partiellement possible.

La HATVP pourra exercer son droit de communication auprès des établissements bancaires et des entreprises d'assurance-vie. Elle disposera d'un accès direct aux fichiers rassemblant ces informations, tels le fichier des comptes bancaires (Ficoba), le fichier des contrats d'assurance vie (Ficovie), ainsi que des bases nationales de données comme Patrim, recensant les prix de cession des biens immobiliers.

Il s'agit de donner à la HATVP des pouvoirs importants dans le cadre d'une augmentation raisonnable de ses compétences, sans les rendre équivalents à ceux du Parquet, en lui permettant de faire directement ce que la DGFip fait pour son compte.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission des lois souhaite que la HATVP ne soit pas obligée de faire appel à l'administration fiscale pour demander des renseignements à diverses administrations.

Il n'est pas rare en effet, que l'administration fiscale ait en quelque sorte la puce à l'oreille en recueillant les demandes de la HATVP, qui concernent le plus souvent des parlementaires, et lance à cette occasion ses propres investigations.

J'ajoute que l'administration fiscale ne peut de toute façon pas refuser de donner à la Haute Autorité ces informations.

La commission des lois souhaite donc aller plus loin que le Gouvernement, qui laisse subsister deux régimes de communication d'informations. Avis défavorable.

M. Pierre-Yves Collombat.  - C'est une bonne idée. Le président de la HATVP a reconnu des rapports fâcheux entre son autorité et les services fiscaux, qui profitaient des demandes de la première pour poursuivre de tout autres buts. Il est sain que la HATVP ait les moyens de vérifier directement les renseignements dont elle a besoin.

M. René-Paul Savary.  - Mme la ministre, vous êtes sur la mauvaise voie, la voie de la sagesse étant celle du président de la commission des lois.

J'ajoute un argument supplémentaire à ceux qu'il vient d'exposer. L'administration fiscale dispose des informations sur un foyer fiscal quand la HATVP se penche sur le cas d'un individu. Les chiffres sont différents. Passer par l'administration fiscale, c'est accroître le nombre de fonctionnaires nécessaires pour procéder aux recoupements rendus indispensables pour pouvoir établir des comparaisons, alors même que vous voulez en réduire le nombre...

L'amendement n°207 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°281, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  Le début du quatrième alinéa du V de l'article L. 4122-8 du code de la défense est ainsi rédigé :

« La Haute Autorité exerce le droit de communication prévu... (le reste sans changement). »

...  -  Le début du quatrième alinéa du V de l'article 25 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi rédigé :

« La Haute Autorité exerce le droit de communication prévu... (le reste sans changement). »

L'amendement n°281, de coordination, repoussé par le Gouvernement, est adopté.

L'article 2 quater, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°139, présenté par M. Grand.

Après l'article 2 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 3512-7 du code de la santé publique est abrogé.

M. Jean-Pierre Grand.  - Cet amendement supprime un doublon.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet amendement pose une question juridique. Je ne suis pas certain qu'il faille pour autant l'adopter. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Cet amendement n'a pas de rapport avec l'objet de la loi.

M. Jean-Pierre Grand.  - Je le retire.

L'amendement n°139 est retiré.

TITRE III (Dispositions relatives à l'interdiction de l'emploi de membres de la famille des élus et des membres du Gouvernement)

M. le président.  - Amendement n°42, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Intitulé du titre III

Rédiger ainsi cet intitulé :

Dispositions relatives aux emplois de collaborateur parlementaire, de collaborateur de groupe parlementaire à l'Assemblée nationale et au Sénat, de collaborateur de ministre et de collaborateur d'élu local

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Le projet de loi « rétablissant la confiance dans l'action publique » n'aborde la question des collaborateurs parlementaires que par le biais de la suppression de ce qu'il est convenu d'appeler les « emplois familiaux ».

Cette interdiction ne réglera pas la crise de confiance dans la politique. L'absence de cadre légal pour cette profession laisse la porte ouverte aux dérives telles que la rémunération par les lobbies ou les emplois fictifs. C'est l'image des parlementaires mais aussi celle des collaborateurs qui nous accompagnent quotidiennement qui est écornée.

Cet amendement étend en conséquence les dispositions du texte aux collaborateurs parlementaires, aux collaborateurs des groupes politiques de l'Assemblée nationale et du Sénat, de ministres et d'élus locaux.

M. le président.  - Amendement identique n°58 rectifié, présenté par Mme Bouchoux, MM. Desessard et Labbé, Mmes Archimbaud et Benbassa et MM. Dantec, Poher et Cabanel.

Mme Corinne Bouchoux.  - Au Parlement européen, le contrôle peut être efficace. À l'Assemblée nationale et au Sénat, ni la loi ni le règlement ne définissent ce qu'est un collaborateur parlementaire. Nous ne pouvons continuer sans clarification. La définition ne peut être négative, en se limitant à la suppression des emplois familiaux. Ces dispositions ne remettent pas en cause l'indépendance des assemblées ni le libre choix des collaborateurs. (MM. Jean Desessard et Joël Labbé applaudissent.)

M. le président.  - Amendement identique n°168 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Delahaye, Longeot et Capo-Canellas, Mme Férat et MM. Luche, Kern et L. Hervé.

Mme Françoise Férat.  - Il est identique. Il faut encadrer ce métier.

M. le président.  - Amendement identique n°247 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Bertrand, Castelli et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et M. Requier.

Intitulé du titre III

M. Guillaume Arnell.  - La fonction existe depuis plus de quarante ans, pourtant le statut de collaborateur n'est défini nulle part. Le temps est venu de combler ce vide juridique.

M. le président.  - Amendement n°291, présenté par MM. Sueur, Leconte et Assouline, Mme Bonnefoy, M. Botrel, Mmes Campion et Conway-Mouret, MM. Durain et Duran, Mmes Féret, Génisson, Jourda, Lepage et Lienemann, MM. Lozach, Marie et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, MM. Roger, Roux et Tourenne, Mme Tasca, M. Vaugrenard, Mme Yonnet et M. Vandierendonck.

Intitulé du titre III

Rédiger ainsi cet intitulé :

Dispositions relatives aux emplois de collaborateur parlementaire, de groupe parlementaire à l'Assemblée nationale et au Sénat, de ministre et d'élu local

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le président de la République a déclaré qu'il fallait cesser de légiférer en fonction de l'actualité immédiate. S'il n'avait pas été question de Pénélope Fillon, personne ne parlerait aujourd'hui des emplois familiaux...

M. Alain Fouché.  - Et M. Le Roux ?

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il en a tiré les conséquences ! Nous sommes en train de légiférer à partir d'un évènement. Détachons-nous de cet événement, pour prendre le temps de la réflexion et de la législation.

Je regrette à ce propos que la procédure accélérée devienne la norme. Cessons donc de coller à l'évènement !

Enfin, prendre la question des collaborateurs parlementaires par le prisme des seuls emplois familiaux n'est pas sérieux. Il faut d'abord définir un statut.

Madame la ministre, il serait positif que vous souscriviez à certaines positions du Sénat dans un souci de dialogue. Le Gouvernement doit comprendre que c'est la mission du Sénat d'enrichir le texte. (Applaudissements sur la plupart des bancs)

M. le président.  - Amendement n°69 rectifié, présenté par MM. Raison, Perrin et Maurey, Mme Imbert, MM. Vasselle, Mandelli et de Raincourt, Mme Mélot, MM. Luche et Joyandet, Mme Morhet-Richaud, MM. Longuet, Pierre et Rapin, Mme Primas, M. Husson, Mme Doineau et MM. Longeot et Pointereau.

Intitulé du titre III

Rédiger ainsi cet intitulé :

Dispositions relatives aux emplois de collaborateur parlementaire à l'Assemblée nationale et au Sénat, de collaborateur de ministre et de collaborateur d'élu local

M. Cédric Perrin.  - Nos collaborateurs souffrent de l'image qui est donnée d'eux dans la presse. Ce projet aborde la profession de collaborateur parlementaire sous l'unique angle des collaborateurs familiaux. Il faut d'abord définir un statut spécifique à cette profession.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable aux amendements nos42, 58 rectifié, 168 rectifié, 247 rectifié et 291.

Avis favorable à l'amendement n°69 rectifié qui ne vise pas les collaborateurs de groupes parlementaires, contrairement aux autres.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - La ministre que je suis ne saurait résister aux appels du coeur de M. Sueur. Avis favorable à l'amendement n°69 rectifié de M. Raison, contrairement aux autres.

Voix à droite.  - C'est le coeur et la raison ! (Sourires)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Oui ! L'intitulé ne doit pas être stigmatisant.

M. Christian Cambon.  - Je souhaite rectifier des propos entendus. Certes il n'y a pas de statut au sens où on l'entend généralement, ce terme étant habituellement utilisé pour la fonction publique. Pour autant, les collaborateurs parlementaires ne sont pas dans un vide statutaire, sans encadrement. Une réglementation extrêmement développée fixe un salaire minimum, bien au-dessus du Smic, et maximum, en fonction de leur qualification, afin de garantir une certaine équité de traitement aux collaborateurs qui se trouvent dans la même situation.

Il existe également le treizième mois, le complément salarial ancienneté ou jeune enfant, les chèques vacances, la mutuelle, la retraite complémentaire, entre autres.

Il faudra ensuite réfléchir à un statut, fonctionnaire ou pas...

Mme Stéphanie Riocreux.  - Très bien !

M. Jean-Pierre Grand.  - J'ai une vraie solidarité avec les collaborateurs parlementaires. J'ai été pendant vingt et un ans celui de Jacques Chaban-Delmas. Les collaborateurs subissent un préjudice moral de ces affaires... Il faut faire un geste.

L'interdiction du cumul des mandats m'oblige à licencier un collaborateur et je découvre qu'il n'a pas de garanties réelles. Cette affaire est sérieuse. Il faut un statut des assistants, mais aussi des élus locaux. Des gens jeunes qui auront consacré quinze à dix-huit ans de leur vie à une collectivité territoriale ne pourront plus retrouver leur emploi antérieur. Il faut y réfléchir. (Plusieurs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et au centre ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent également.)

M. Hervé Maurey.  - L'interdiction des emplois familiaux est médiatiquement la mesure phare de ce projet de loi si important pour le président de la République que c'est le premier que nous examinons. Une fois de plus on légifère dans l'urgence.

Les gouvernements passent mais les mauvaises manières de légiférer continuent.

Ce qui a choqué dans ces affaires, ce n'est pas le caractère familial mais le doute sur la réalité du travail et le niveau de rémunération. Plutôt que d'abattre tout le troupeau pour une brebis galeuse, effectuons plutôt un réel contrôle.

Ce dispositif est tout à fait excessif et discriminatoire pour des gens qui ont fait correctement leur travail. (Plusieurs applaudissements sur les bancs des groupes Union centriste et Les Républicains, ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Michel Raison.  - Il serait trop restrictif de ne se pencher que sur les emplois familiaux. C'est l'occasion ou jamais de faire mieux que l'existant pour améliorer la situation de nos collaborateurs.

M. Jackie Pierre.  - Très bien !

Mme Maryvonne Blondin.  - Nos collaborateurs font un travail remarquable. Je rappelle que nous avons au Sénat une Association de gestion des collaborateurs de sénateurs (Agas) qui n'existe pas à l'Assemblée nationale. Tout l'accompagnement est assuré par l'Agas.

Le dialogue social a débuté il y a trois ans pour faire progresser les choses. Nous sénateurs n'en sommes pas suffisamment informés. Il faut améliorer ce statut mais nous ne partons pas de rien.

M. Alain Fouché.  - Cette stigmatisation est regrettable. Les choses peuvent se faire doucement. Il faut un contrôle, suivi dans le temps.

Il demeure des incohérences : un parlementaire ne peut pas embaucher sa nièce mais peut embaucher le mari de celle-ci.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous maintenons notre amendement, qui prend en compte les collaborateurs des groupes.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Nous aussi !

Les amendements identiques nos42, 58 rectifié, 247 rectifié ne sont pas adoptés.

L'amendement n°168 rectifié est retiré.

L'amendement n°291 n'est pas adopté.

L'amendement n°69 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 3

Mme Catherine Génisson .  - Je me réjouis de la modification de l'intitulé du titre III. Nous sortons d'une approche conjoncturelle pour adopter une démarche d'élaboration d'un statut.

Mieux vaut une attitude positive que défensive.

La définition de la famille est délicate. Prenons l'exemple d'un couple de parlementaires en union libre n'ayant aucun lien juridique : l'embauche d'un enfant de l'autre est-il permis, alors qu'existent entre eux des liens affectifs aussi forts qu'au sein d'un couple en concubinage, pacsé ou marié ?

Le périmètre de la famille change beaucoup aujourd'hui.

La commission des affaires sociales aborde régulièrement ce sujet, en matière d'information des proches pour les dons d'organes ou d'application des directives anticipées pour la fin de vie.

M. le président.  - Amendement n°208, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 1 à 9

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

I.  -  Le fait, pour un membre du Gouvernement, de compter une personne de sa famille parmi les membres de son cabinet en méconnaissance de la réglementation applicable est puni d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

Le membre du Gouvernement est tenu de rembourser les sommes qui ont été versées à son collaborateur dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le décret du 14 juin 2017 a fixé la règle de l'interdiction des emplois familiaux pour les cabinets du président de la République et les emplois familiaux.

La commission des lois a ajouté à cet article une incrimination pénale, en cas de violation de cette interdiction par un membre du Gouvernement. L'objectif est louable mais méconnaît le principe de la séparation des pouvoirs qui s'impose au législateur en vertu de l'article 34 de la Constitution.

Certes la loi prévoit les incriminations pénales, fixe le cadre général de la réflexion, mais le Conseil constitutionnel considère possible qu'elle renvoie à une norme inférieure. Le Gouvernement estime en conséquence que le pouvoir réglementaire peut définir les modalités d'application.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Notre raisonnement est strictement juridique. Un juge ne peut prononcer une condamnation pénale que sur la base d'une définition établie dans une loi et non dans un décret. L'amendement mentionne la famille sans la définir. Pour fonder la possibilité d'une sanction pénale, cette définition ne peut que figurer dans la loi.

Une décision de 2011 du Conseil constitutionnel a ainsi censuré une définition trop imprécise de la famille dans la loi réprimant l'inceste.

Madame la ministre, j'aurais préféré que vous retiriez votre amendement. Retrait ou avis défavorable. On ne peut pas invoquer la séparation des pouvoirs en cette matière.

M. Alain Fouché.  - Très bien !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je maintiens l'amendement. Nous avons une divergence d'appréciation.

L'amendement n°208 n'est pas adopté.

L'amendement n°209 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°210, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 11, seconde phrase

Supprimer les mots : 

pour faire cesser la situation de conflit d'intérêts dans laquelle se trouve le collaborateur

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - L'article 3 issu de la rédaction de la commission des lois procède d'une interprétation erronée.

En application de l'article 10 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, « lorsqu'elle constate qu'un membre du Gouvernement se trouve en situation de conflit d'intérêts, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique lui enjoint de faire cesser cette situation ».

Il y a lieu de supprimer l'ajout inutile du membre de phrase « pour faire cesser la situation de conflit d'intérêts dans laquelle se trouve le collaborateur », puisque ce n'est pas lui qui est concerné par le conflit d'intérêts mais le membre du Gouvernement.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission des lois a un avis contraire. Il y a de bonnes raisons parfois pour que la HATVP intervienne y compris à l'égard du collaborateur. Je suis désarmé par la position du Gouvernement. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°210 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°83, présenté par M. Richard et les membres du groupe La République en marche.

Alinéa 11

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette information est rendue accessible au public.

M. François Patriat.  - Cet amendement assure la publication de la déclaration de parenté concernant un collaborateur ministériel dès lors qu'elle a été enregistrée à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis favorable.

(Exclamations ironiques sur plusieurs bancs à droite)

Les arguments nous semblent pertinents. (Même mouvement sur de nombreux bancs à gauche et à droite)

L'amendement n°83 est adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Lors de la discussion générale, j'avais indiqué que le Gouvernement serait prêt à engager des discussions constructives sur certains sujets, dont celui des collaborateurs parlementaires, sujet central pour les sénateurs.

Je vous demande lors de nos discussions de ne pas perdre de vue les interrogations de nos concitoyens sur le rôle des collaborateurs parlementaires. Je sais qu'il est capital. Je rends hommage aux assistants qui ne comptent ni leur temps ni leur énergie.

Sur l'ensemble des amendements touchant au statut des collaborateurs, le Gouvernement a souhaité répondre aux attentes en retirant son amendement supprimant l'ajout de la commission des lois relatif au licenciement des collaborateurs.

Attention à ne pas voter des mesures qui ne seraient pas comprises par d'autres salariés licenciés, pour motif économique, dans des secteurs industriels en déclin ou à faible niveau de qualification.

M. Cédric Perrin.  - Il ne faudrait plus indemniser les salariés qualifiés licenciés ?

Mme Éliane Assassi.  - Quel rapport ?

M. Jean-Yves Leconte.  - C'est totalement hors sujet !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Conservons à l'esprit ces éléments sans quoi nous donnerions le sentiment de créer à façon un statut particulier.

Le Gouvernement estime qu'il appartient aux assemblées de se concerter au mieux pour parvenir à un statut.

De nombreux amendements ont été déposés. Le Gouvernement souhaite s'en remettre à la sagesse du Sénat pour trouver une solution satisfaisante pour les collaborateurs, compréhensible par les Français.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Merci pour nos collaborateurs, membres de notre famille ou non, très engagés dans une activité sans horaires. Ils méritent que l'on prenne en compte leur situation avec beaucoup d'attention.

Que ceux qui n'ont commis aucune faute - les collaborateurs familiaux - ne soient pas sanctionnés. Nous souhaitons qu'ils accèdent aux contrats de sécurisation professionnelle.

J'exprime ici notre gratitude. La sévérité initiale était injustifiée. Il y a sur ce sujet de nombreux amendements qui se recoupent souvent.

Après la présentation de vos amendements, acceptez, chers collègues, que je demande qu'on vote en priorité sur celui que je présente au nom de la commission, où j'ai tenté une synthèse.

Je rends hommage à Mme Cartron, présidente de l'Agas, d'avoir développé le dialogue social avec nos collaborateurs que leur dispersion empêche de se constituer en véritable collectif de travail.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°252 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell et Bertrand, Mme Costes, M. Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les assemblées parlementaires déterminent le montant du budget mis à disposition de chaque parlementaire, dont l'usage exclusif est la rémunération de leurs collaborateurs parlementaires.

Chaque parlementaire dispose d'une autonomie de recrutement de ses collaborateurs parlementaires dans les limites des crédits qui lui sont alloués.

Les collaborateurs parlementaires sont des salariés de droit privé dont les missions sont d'assister les parlementaires dans l'exercice de leur mandat.

II.  -  Les assemblées parlementaires déterminent le montant du budget mis à disposition des groupes parlementaires dont l'usage exclusif est la rémunération de leurs collaborateurs de groupe.

Chaque groupe parlementaire, constitué en association, est l'employeur des collaborateurs de groupe.

Les collaborateurs de groupes parlementaires sont des salariés de droit privé dont les missions sont d'assister les groupes parlementaires dans le travail de préparation et d'élaboration de la loi.

III.  -  Le règlement de chaque assemblée parlementaire comporte le recueil réglementaire intégral des décisions prises par toutes leurs instances régissant les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupes parlementaires.

IV.  -  Chaque assemblée parlementaire s'assure de la mise en oeuvre d'un dialogue social, conforme au code du travail, entre les représentants parlementaires employeurs et les représentants des collaborateurs parlementaires.

Le dialogue social porte, notamment, sur les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupes parlementaires, les grilles de salaire, les conditions de recrutement, les obligations déontologiques, le temps de travail et la sécurité et la santé au travail.

Il détermine la négociation d'accords collectifs.

Ces derniers sont rendus publics sur le site internet de chaque assemblée.

V.  -  Le collaborateur parlementaire informe la Haute Autorité de la transparence de la vie publique en cas de signature de tout contrat de travail avec un parlementaire.

Il l'informe aussi en cas de rupture de son contrat de travail, quel qu'en soit le motif.

Mme Françoise Laborde.  - Merci, madame la ministre, pour vos propos conciliants.

Le projet de loi du Gouvernement n'abordait la question des collaborateurs parlementaires que par le biais de la suppression de ce qu'il est convenu d'appeler les « emplois familiaux ». Or, depuis des années, les collaborateurs parlementaires ne bénéficient d'aucun cadre juridique, ce qui rend possible des dérives telles que révélées durant la campagne présidentielle. Cette situation met à mal l'image de l'ensemble des parlementaires et de la profession des collaborateurs parlementaires. Elle a heurté les citoyens soucieux de transparence quant à l'usage de l'argent public mis à disposition des parlementaires dans l'exercice de leur mandat.

La moralisation de la vie publique passe par la définition d'un statut des collaborateurs parlementaires, inscrivant des règles déontologiques et des garanties sociales répondant aux très nombreuses spécificités de la vie parlementaire.

M. le président.  - Amendement n°114 rectifié, présenté par MM. Sueur, Leconte et Assouline, Mme Bonnefoy, M. Botrel, Mmes Campion et Conway-Mouret, MM. Durain et Duran, Mmes Féret, Génisson, Jourda, Lepage et Lienemann, MM. Lozach, Marie et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, MM. Roger, Roux et Tourenne, Mme Tasca, M. Vaugrenard, Mme Yonnet et M. Vandierendonck.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. -  Les assemblées parlementaires déterminent le montant du budget mis à disposition de chaque parlementaire dont l'usage exclusif est la rémunération de leurs collaborateurs parlementaires. Ces crédits ne peuvent être transférés aux groupes parlementaires.

Chaque parlementaire dispose d'une autonomie de recrutement de ses collaborateurs parlementaires dans les limites des crédits qui lui sont alloués.

Les collaborateurs parlementaires sont des salariés de droit privé dont la mission est d'assister les parlementaires dans l'exercice de leur mandat.

II.  -  Les assemblées parlementaires déterminent le montant du budget mis à disposition des groupes parlementaires dont l'usage exclusif est la rémunération de leurs collaborateurs de groupe.

Chaque groupe parlementaire, constitué en association, est l'employeur des collaborateurs de groupe. Il dispose d'une autonomie de recrutement de ces collaborateurs dans les limites des crédits qui lui sont alloués.

Les collaborateurs de groupes parlementaires sont des salariés de droit privé dont la mission est d'assister les groupes parlementaires dans le travail de préparation et d'élaboration de la loi.

III.  -  Le règlement de chaque assemblée parlementaire comporte le recueil réglementaire intégral des décisions prises par toutes leurs instances régissant les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupes parlementaires.

IV.  -  Chaque assemblée parlementaire s'assure de la mise en oeuvre d'un dialogue social, conforme au code du travail, entre les représentants parlementaires employeurs et les représentants des collaborateurs parlementaires.

Le dialogue social porte notamment sur les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupes parlementaires, les grilles de salaire, les conditions de recrutement, les obligations déontologiques, le temps de travail et la sécurité et la santé au travail.

Il détermine la négociation d'accords collectifs.

Ces derniers sont rendus publics sur le site internet de chaque assemblée.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Vous avez annoncé pour la première fois, madame la ministre, que vous vous en remettriez sur ce sujet à la sagesse du Sénat. Persévérez dans cette voie !

Cet amendement, signé par trente sénateurs socialistes, mais pas par le groupe, doit beaucoup à Françoise Cartron et à son travail à l'Agas. Il est plus complet que celui de M. le président de la commission des lois.

Je regrette qu'à cause d'une application rigoriste de l'article 40, l'assimilation du licenciement du collaborateur parlementaire en cas de non-réélection à un licenciement économique ait été déclaré irrecevable. Nous précisions pourtant que les articles L. 1233-4 et L. 1233-4-1 du code du travail ne s'appliqueraient pas.

M. le président.  - Amendement n°170 rectifié bis, présenté par MM. Détraigne, Delahaye, Longeot et Capo-Canellas, Mme Férat et MM. Luche, Kern et L. Hervé.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 bis ainsi rédigé :

« Art. 8 bis.  -  I.  -  Les assemblées parlementaires déterminent le montant du budget mis à disposition de chaque parlementaire, dont l'usage exclusif est la rémunération de leurs collaborateurs parlementaires. Ces crédits ne peuvent être transférés aux groupes parlementaires.

« Chaque parlementaire dispose d'une autonomie de recrutement de ses collaborateurs parlementaires dans les limites des crédits qui lui sont alloués.

« Les collaborateurs parlementaires sont des salariés de droit privé dont les missions sont d'assister les parlementaires dans l'exercice de leur mandat.

« II.  -  Les assemblées parlementaires déterminent le montant du budget mis à disposition des groupes parlementaires dont l'usage exclusif est la rémunération de leurs collaborateurs de groupe.

« Chaque groupe parlementaire, constitué en association, est l'employeur des collaborateurs de groupe. Il dispose d'une autonomie de recrutement de ces collaborateurs dans les limites des crédits qui lui sont alloués.

« Les collaborateurs de groupe parlementaire sont des salariés de droit privé dont les missions sont d'assister les groupes parlementaires dans le travail de préparation et d'élaboration de la loi. »

Mme Françoise Férat.  - Cet amendement donne une définition précise du métier de collaborateur parlementaire, tout en indiquant que les parlementaires et les groupes recrutent librement leurs collaborateurs et que les crédits alloués à cet effet y servent exclusivement.

M. le président.  - Amendement n°59 rectifié, présenté par Mme Bouchoux, MM. Desessard et Labbé, Mmes Archimbaud et Benbassa et MM. Dantec, Poher et Cabanel.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8... ainsi rédigé :

« Art. 8 ...  -  Chaque assemblée parlementaire détermine le montant du budget mis à disposition de chaque parlementaire, dont l'usage exclusif est la rémunération de leurs collaborateurs parlementaires. Ces crédits ne peuvent être transférés aux groupes parlementaires.

« Chaque parlementaire dispose d'une autonomie de recrutement de ses collaborateurs parlementaires dans les limites des crédits qui lui sont alloués.

« Les collaborateurs parlementaires sont des salariés de droit privé dont les missions sont d'assister les parlementaires dans l'exercice de leur mandat. »

Mme Corinne Bouchoux.  - Saluons la réactivité et la souplesse du président Bas, qui a essayé de tirer la substantifique moelle de nombreux amendements. Un statut, ce sont des droits et des devoirs. Or le texte du Gouvernement parlait seulement d'interdictions.

L'utilisation de l'article 40 est ici tirée par les cheveux. Un amendement semblable à celui de M. Sueur a récemment passé sans encombre l'examen de recevabilité.

Que toutes les familles politiques ici réunies tombent d'accord pour défendre le statut des collaborateurs parlementaires est significatif. Merci à Mme la ministre d'en avoir tenu compte et d'avoir renoncé à son amendement fatal.

M. le président.  - Amendement n°64 rectifié, présenté par Mme Bouchoux, MM. Desessard et Labbé, Mmes Archimbaud et Benbassa et MM. Dantec, Poher et Cabanel.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 ... ainsi rédigé :

« Art. 8 .....  -  Chaque assemblée parlementaire détermine le montant du budget mis à disposition des groupes parlementaires dont l'usage exclusif est la rémunération de leurs collaborateurs de groupe.

« Chaque groupe parlementaire, constitué en association, est l'employeur des collaborateurs de groupe. Il dispose d'une autonomie de recrutement de ces collaborateurs dans les limites des crédits qui lui sont alloués.

« Les collaborateurs de groupes parlementaires sont des salariés de droit privé dont les missions sont d'assister les groupes parlementaires dans le travail de préparation et d'élaboration de la loi. »

Mme Corinne Bouchoux.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°282, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 bis A ainsi rédigé :

« Art. 8 bis A.  - I.  -  Les députés et les sénateurs peuvent employer sous contrat de droit privé des collaborateurs qui les assistent dans l'exercice de leurs fonctions et dont ils sont les employeurs directs.

« II.  -  Les députés et les sénateurs bénéficient, à cet effet, d'un crédit affecté à la rémunération de leurs collaborateurs.

« III.  -  Le bureau de chaque assemblée s'assure de la mise en oeuvre d'un dialogue social entre les représentants des parlementaires employeurs et les représentants des collaborateurs parlementaires. »

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet amendement s'explique par son texte même.

M. le président.  - Sous-amendement n°290 à l'amendement n°282 de M. Bas, au nom de la commission des lois, présenté par Mme Bouchoux et MM. Desessard et Labbé.

Amendement n°282

I. - Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ce crédit ne peut être transféré aux groupes parlementaires.

II. - Alinéa 6

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Le dialogue social porte sur les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires, les grilles de salaire, les conditions de recrutement, les obligations déontologiques, le temps de travail, la sécurité et la santé au travail. Il détermine la négociation d'accords collectifs qui sont rendus publics sur le site internet de chaque assemblée.

Mme Corinne Bouchoux.  - Cela peut paraître symbolique, mais il semble nécessaire d'affirmer que les crédits alloués pour le recrutement de collaborateurs parlementaires ne servent qu'à cela, et de mieux organiser le dialogue social entre leurs représentants et ceux des parlementaires. Compléter le statut des collaborateurs parlementaires, définir une déontologie de ce que nous sommes en train de caractériser comme un métier réduira les risques de conflits d'intérêts et d'emplois fictifs - qui peuvent exister même en dehors de la famille.

M. le président.  - Amendement n°70 rectifié, présenté par MM. Raison, Perrin, Maurey et Vasselle, Mme Imbert, M. Mandelli, Mmes Keller et Duchêne, MM. Nougein, Fouché, D. Laurent, Mouiller, Laménie, Bouchet, G. Bailly et Gabouty, Mme F. Gerbaud, MM. Malhuret et de Raincourt, Mme Mélot, M. Luche, Mme Morhet-Richaud, MM. Longuet, Joyandet, Pierre et Rapin, Mme Primas, M. Husson, Mme Doineau et MM. Longeot, Pointereau, Gremillet, de Nicolaÿ, J.P. Fournier, Chaize, Genest et Darnaud.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 7 bis de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, insérer un article 7... ainsi rédigé :

« Art. 7...  -  Chaque parlementaire peut être assisté de collaborateurs parlementaires dont il est personnellement l'employeur, dans les limites d'un montant budgétaire définit par le règlement de chaque assemblée et exclusivement affecté à la rémunération de ces personnels.

« Le bureau de chaque assemblée parlementaire détermine les conditions d'emploi et les missions des collaborateurs parlementaires. Les collaborateurs parlementaires sont des salariés contractuels de droit privé dont les missions consistent à assister les parlementaires dans l'exercice de leur mandat. 

« Une ou plusieurs fiches de poste, rédigées en partenariat avec les représentants de ces professions, précisent l'éventail des tâches professionnelles qui peuvent leur être confiées. Ces dernières figurent dans le règlement de chaque assemblée. » 

M. Michel Raison.  - Sans définition d'un emploi, il ne peut y avoir d'emploi fictif. Merci au président Bas de son amendement, auquel nous nous associons. Peut-être pourra-t-il y associer nos noms...

M. le président.  - Amendement n°19 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel, Labbé, Manable, Tourenne et Duran, Mme Yonnet, MM. Marie, Labazée et Botrel, Mme Perol-Dumont, M. Carcenac, Mmes Jourda et Benbassa, M. Desessard, Mmes Archimbaud et Bouchoux et M. Dantec.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 4 quater de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 4 ... ainsi rédigé :

« Art. 4 ...  -  Le bureau de chaque assemblée définit les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires ainsi que leurs droits et obligations. Il précise les principales clauses que doit contenir le contrat conclu avec le collaborateur en ce qui concerne l'intitulé du poste, la nature des tâches à accomplir et les compétences requises, en fonction des différentes situations possibles. »

M. Henri Cabanel.  - Collaborateur, assistant, attaché, ces trois termes maintiennent le flou. Il faut au contraire jouer la carte de la transparence, en identifiant les rôles et les compétences grâce à des fiches de poste, à une évaluation annuelle et à un intitulé de poste clair.

M. le président.  - Amendement n°78, présenté par MM. Raison et Perrin.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le bureau de chaque assemblée définit le cadre d'emploi et les missions des collaborateurs parlementaires dans les conditions définies aux articles L. 2231-1, L. 2231-2, L. 2232-12, L. 2232-16 à L. 2232-20 du code du travail.

M. Michel Raison.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°172 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Delahaye, Longeot et Capo-Canellas, Mme Férat et MM. Luche, Kern et L. Hervé.

Mme Françoise Férat.  - Cet amendement met en place les conditions de création d'un statut de la profession de collaborateur parlementaire au sein de chaque assemblée, conformément aux dispositions du code du travail relatives au dialogue social, qui doit porter notamment sur les conditions d'emploi des collaborateurs de parlementaires et de groupes, les grilles de salaire, les conditions de recrutement, les obligations déontologiques, le temps de travail, la sécurité et la santé au travail. Les accords collectifs seraient rendus publics sur le site Internet de chaque assemblée.

M. le président.  - Amendement identique n°262, présenté par Mme Laborde.

Mme Françoise Laborde.  - C'est le même, qui va dans le sens de la clarification et de la transparence.

M. le président.  - Amendement n°60 rectifié, présenté par Mme Bouchoux, MM. Desessard et Labbé, Mmes Archimbaud et Benbassa et MM. Dantec et Poher.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 ... ainsi rédigé :

« Art. 8 .... Le règlement de chaque assemblée parlementaire comporte le recueil réglementaire intégral des décisions prises par toutes leurs instances régissant les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupes parlementaires. »

Mme Corinne Bouchoux.  - Les décisions éparses des instances des assemblées concernant les collaborateurs méritent d'être consolidées et rationalisées pour être intégrées dans un recueil réglementaire accessible et public.

M. le président.  - Amendement n°249 rectifié, présenté par Mme Laborde.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement de chaque assemblée parlementaire comporte le recueil réglementaire intégral des décisions prises par toutes leurs instances régissant les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupe parlementaire.

Mme Françoise Laborde.  - Il est très bien défendu.

M. le président.  - Amendement n°171 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Delahaye, Longeot et Capo-Canellas, Mme Férat et MM. Luche et Kern.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement de chaque assemblée parlementaire comporte le recueil réglementaire intégral des décisions prises par toutes leurs instances régissant les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires.

Mme Françoise Férat.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°43 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 4 quater de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 4 ... ainsi rédigé :

« Art. 4 ...  -  Chaque assemblée parlementaire s'assure de la mise en oeuvre d'un dialogue social, conforme au code du travail, entre les représentants parlementaires employeurs et les représentants des collaborateurs parlementaires.

« Le dialogue social porte notamment sur les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs des groupes parlementaires, les grilles de salaire, les conditions de recrutement, les obligations déontologiques, le temps de travail et la sécurité et la santé au travail.

« Il détermine la négociation d'accords collectifs, rendus publics sur le site internet de chaque assemblée. »

Mme Laurence Cohen.  - Mme la ministre a été attentive à nos interventions, je l'en remercie. On s'inquiète que nos décisions ne soient interprétées comme du favoritisme. Encore faudrait-il que nos collaborateurs aient un statut. J'espère que le Gouvernement sera aussi sensible aux souffrances des salariés lorsqu'il s'agira de réformer le code du travail...

Merci au président Bas qui s'est efforcé de prendre en compte nos propositions, et qui a rappelé la nécessité du dialogue social entre les collaborateurs parlementaires et les parlementaires employeurs.

M. le président.  - Amendement n°61 rectifié, présenté par Mme Bouchoux, MM. Desessard et Labbé, Mmes Archimbaud et Benbassa et MM. Dantec, Poher et Cabanel.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 ... ainsi rédigé :

« Art. 8 ... - Chaque assemblée parlementaire s'assure de la mise en oeuvre d'un dialogue social, conforme au code du travail, entre les représentants parlementaires employeurs et les représentants des collaborateurs parlementaires.

« Le dialogue social porte sur les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupe parlementaire, les grilles de salaire, les conditions de recrutement, les obligations déontologiques, le temps de travail et la sécurité et la santé au travail.

« Il détermine la négociation d'accords collectifs.

« Ces derniers sont rendus publics sur le site internet de chaque assemblée. »

Mme Corinne Bouchoux.  - À l'heure où l'on parle de renforcer le dialogue social, le Parlement peut-il rester un îlot où celui-ci n'est pas pratiqué systématiquement et méthodiquement ?

M. le président.  - Amendement n°250 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Bertrand, Castelli et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Pélieu et Requier.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Chaque assemblée parlementaire s'assure de la mise en oeuvre d'un dialogue social, conforme au code du travail, entre les représentants parlementaires employeurs et les représentants des collaborateurs parlementaires.

Le dialogue social porte, notamment, sur les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupes parlementaires, les grilles de salaire, les conditions de recrutement, les obligations déontologiques, le temps de travail et la sécurité et la santé au travail.

Il détermine la négociation d'accords collectifs.

Ces derniers sont rendus publics sur le site internet de chaque assemblée.

Mme Françoise Laborde.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°251 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Bertrand, Castelli et Collin, Mmes Costes et Jouve, M. Guérini, Mme Malherbe et M. Requier.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'effectivité des emplois de collaborateur parlementaire et de groupe parlementaire est assurée par la mise en application du règlement de chaque assemblée parlementaire qui doit comporter le recueil réglementaire intégral des décisions prises par toutes leurs instances régissant les conditions d'emploi des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupes parlementaires.

Le dialogue social entre représentants des parlementaires employeurs et représentants des collaborateurs parlementaires doit permettre également de fixer des règles complémentaires sur les conditions d'emploi de ces collaborateurs, les grilles de salaire, les conditions de recrutement, les obligations déontologiques, le temps de travail et la sécurité et la santé au travail.

Mme Françoise Laborde.  - Pour rétablir la confiance de nos concitoyens envers l'institution parlementaire, il importe de mettre un terme aux soupçons d'emplois fictifs qui, bien que rares, défraient régulièrement la chronique, causant un tort majeur à nos assemblées, aux parlementaires, à leurs collaborateurs et plus généralement à la démocratie représentative.

Cet amendement dote nos institutions des outils pour garantir l'effectivité des emplois de collaborateurs parlementaires et de groupe parlementaire. Le Conseil constitutionnel considère que la HATVP ne peut au titre de la séparation des pouvoirs exercer ce rôle. D'ici le débat autour du projet de loi constitutionnelle annoncé, l'inspection du travail et la commission commune aux assemblées et à la Cour des comptes paraissent les outils les plus pertinents.

M. le président.  - Amendement n°44 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 4 quater de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 4 ... ainsi rédigé :

« Art. 4 ...  -  Chaque assemblée parlementaire définit et établit, après négociation avec les organisations syndicales des collaborateurs parlementaires désignées en leur sein, une convention collective. »

Mme Laurence Cohen.  - Je souhaite insister sur la forte précarité des collaborateurs parlementaires. Plus de 1 000 parlementaires ont été licenciés après les élections législatives, et d'autres licenciements auront lieu après les sénatoriales et avec la fin du cumul des mandats. La moyenne des salaires est de 2 800 euros bruts, mais cela ne rend pas compte de la forte hétérogénéité. Il faut une convention collective régissant notamment les missions des collaborateurs, leur régime salarial et leur temps de travail, comme le réclament leurs syndicats.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Merci pour votre travail, dont les résultats sont convergents. J'aimerais que mon amendement n°282 soit le vôtre, autant que celui de la commission des lois. Je vous demande de l'adopter de préférence aux autres, auxquels mon avis ne peut donc être favorable, non plus qu'au sous-amendement n°290 dont les précisions ne me paraissent pas utiles. Je demande le vote par priorité de l'amendement n°282.

La priorité, acceptée par le Gouvernement, est de droit.

M. le président.  - Je retiens de l'intervention de Mme la ministre qu'elle s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement de la commission. Quel est son avis sur le sous-amendement n°290 ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Défavorable.

Mme Corinne Bouchoux.  - S'il disait exactement la même chose que l'amendement du président Bas, nous ne l'aurions pas déposé. Nous nous rallions à sa position, tout en regrettant que le Sénat s'arrête à mi- chemin.

Le sous-amendement n°290 est retiré.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je voterai l'amendement de M. Bas, qui nous fera franchir une étape décisive. Mais j'insiste : que notre amendement assimilant le licenciement en fin de mandat à un licenciement économique ait été déclaré irrecevable repose sur une lecture erronée de l'article 40, car cette proposition n'avait pas d'impact financier majeur. Nos collaborateurs et nous-mêmes payons aujourd'hui leurs cotisations à Pôle emploi. La commission des lois devrait être plus attentive à la portée réelle des amendements.

Mme Françoise Cartron.  - Je voterai l'amendement n°282. Depuis un an et demi, les collaborateurs ont à leur disposition un recueil de textes réglementaires qui constitue un statut. Leurs noms ont été rendus publics. Nous leur avons aussi transposé la réforme de la formation professionnelle.

L'emploi de collaborateur est lié au mandat. Pour mettre fin à cette précarité inhérente au métier, il faudrait s'aligner sur le statut de la fonction publique.

Un dialogue social a été mis en place de façon informelle au Sénat. L'amendement de la commission reconnaît ce qui existe, tant mieux, cela rassurera tout le monde.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je salue les efforts du président Bas. Mais lorsqu'un mandat s'achève, c'est comme lorsqu'une entité économique disparaît, et ne peut plus employer. Personne ne demande la création d'un corps de fonctionnaires.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - En effet !

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous souhaitions assimiler le licenciement en fin de mandat au licenciement économique, avec les mêmes possibilités de reclassement. Ces derniers mois, jusque dans leur famille, les collaborateurs se sont fait traiter de Pénélope, alors qu'ils sont indispensables. Les Français ne sont pas des enfants. On peut leur dire la vérité, ils la méritent.

Il est heureux, madame la ministre, que vous ayez retiré votre amendement. J'espère qu'il ne reviendra pas à l'Assemblée nationale. Certains propos m'ont choqué : le licenciement économique ne concerne pas seulement les salariés non qualifiés et les secteurs en déclin. Souvent des start-up échouent et doivent licencier ! Il est vrai que le Parlement, en déléguant au Gouvernement son pouvoir de légiférer sur le droit du travail, montre qu'il est un secteur en déclin...

M. Didier Marie.  - Merci au Gouvernement de son esprit d'ouverture. Nos collaborateurs se voient reconnus dans leurs fonctions, et il est rappelé à nos concitoyens que les parlementaires ne peuvent travailler seuls. Merci au président Bas, grâce à qui nous avançons. Je regrette toutefois que son amendement ne concerne pas les collaborateurs de groupe, comme celui de M. Sueur.

Mme Laurence Cohen.  - Ces amendements doivent beaucoup à la mobilisation de nos collaborateurs eux-mêmes qui se sont organisés syndicalement. Tout en remerciant le président Bas de sa synthèse, je regrette que la notion de licenciement économique n'ait pas été retenue. Si l'article 40 s'y oppose, que le Gouvernement s'empare du sujet, puisqu'il se dit sensible au sort des personnes licenciées !

Je m'inquiète aussi que l'amendement du président Bas ne reprenne pas l'exigence d'une convention collective. Il ne s'agit pas de donner l'aumône à nos collaborateurs, mais de reconnaître leurs droits !

M. Philippe Dominati.  - Je m'associe à l'hommage rendu à M. Bas. Une fois n'est pas coutume, je partage l'avis de Mme Lienemann. (Sourires) La non-réélection s'apparente en effet à une cessation d'activité économique. Le Gouvernement doit reprendre urgemment cette idée qui réunit des parlementaires de tout bord.

M. Marc Laménie.  - Ces débats témoignent de la forte attente des sénateurs et des collaborateurs, dont le travail de l'ombre est si utile. Merci à la présidente de l'Agas, qui nous est d'un grand secours pour établir les contrats, organiser les ruptures conventionnelles, etc., ainsi qu'au président de la commission des lois dont l'amendement répond à nos attentes.

M. Cédric Perrin.  - Merci au président Bas. Mais je dois réagir aux propos de la ministre. Nos collaborateurs ne sont pas des sous-salariés. Il n'y a pas d'un côté ceux qui ne sont rien et de l'autre ceux qui réussissent - d'autant que la réussite est une notion subjective. Ce soir, vous avez trouvé une solution pour l'assurance chômage : les Bac+3 ou Bac+5 n'auraient plus besoin d'être indemnisés puisqu'ils seraient censés retrouver rapidement un emploi ? Nous ne réclamons pas de privilège pour nos collaborateurs, mais un statut semblable à celui de tous les salariés.

Mme Éliane Assassi.  - Très bien.

M. Charles Revet.  - Ce moment est très important. Nous avons la chance d'avoir à nos côtés des personnes disponibles et attentives. Le texte initial était d'une dureté incroyable - je dirais presque irresponsable - que l'amendement de la commission atténue grandement, même s'il faudra sûrement aller plus loin. Les collaborateurs parlementaires ont droit à ce que leur travail soit respecté.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Notre amendement n°114 avait des vertus ; mais nous nous rallions à l'amendement n°282.

Madame la ministre, vous avez trouvé la voie de la sagesse. Vous pouvez aller plus loin, en nous aidant à mettre en oeuvre l'assimilation du licenciement en cas de non-réélection au licenciement économique, sachant que les articles 1233-4 et 1233-4-1 ne s'appliqueraient pas.

Mme Catherine Génisson.  - Contrairement à ce que j'ai entendu, il est très difficile pour un collaborateur parlementaire de retrouver un emploi, quel que soit son bagage.

M. Daniel Gremillet.  - Votre proposition rassemble, monsieur le président de la commission des lois. Même si le Sénat ne part pas de rien, nous comblons ici une énorme lacune. Un vote unanime en première lecture au Sénat inciterait l'Assemblée nationale à prendre en compte notre travail.

M. Éric Doligé.  - J'admire toujours la maîtrise du président Bas et sa capacité à trouver des solutions aux cas les plus difficiles.

Les récentes élections législatives ont entraîné des centaines de licenciements, auxquels s'ajouteront bientôt des dizaines d'autres au Sénat. Le changement peut paraître positif, mais on ne pense jamais aux conséquences... Se retrouver au chômage est toujours très difficile. Si des centaines d'emplois étaient supprimés dans une entreprise, on en parlerait, et le président de la République viendrait en visite !

M. Jean-Claude Requier.  - Bravo pour votre synthèse, monsieur le président de la commission des lois. Avec Philippe Bas, ce n'est pas du bla-bla ! (Rires)

L'amendement n°282 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - C'est l'unanimité ! (Vifs applaudissements)

Les amendements nos252 rectifié bis, 114 rectifié, 170 rectifié bis et 59 rectifié n'ont plus d'objet.

L'amendement n°64 rectifié est retiré.

L'amendement n°70 rectifié n'a plus d'objet.

Les amendements nos19 rectifié bis, 78, 172 rectifié, 262, 60 rectifié, 249 rectifié et 171 rectifié sont retirés.

Les amendements nos43 rectifié, 61 rectifié et 250 rectifié bis n'ont plus d'objet.

L'amendement n°251 rectifié est retiré.

L'amendement n°44 rectifié n'a plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°229, présenté par Mme Laborde.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 ... ainsi rédigé :

« Art. 8 ...  -  Le parlementaire peut détacher un collaborateur parlementaire qu'il emploie auprès d'un groupe parlementaire, dans les conditions prévues par les règlements des assemblées. »

Mme Françoise Laborde.  - Cet amendement organise le détachement auprès d'un groupe parlementaire d'un collaborateur parlementaire employé par un élu pendant une période donnée selon l'activité du groupe parlementaire.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Mme Bouchoux a déposé tout à l'heure un sous-amendement qui s'oppose à ces pratiques... Retrait : cela relève de l'organisation de chaque assemblée. Gardons-nous de mettre ce genre de choses dans la loi.

L'amendement n°229 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°18 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Manable, Tourenne et Duran, Mme Yonnet, M. Labazée, Mme Perol-Dumont et M. Carcenac.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 4 quater de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 4 ... ainsi rédigé :

« Article 4 ...  -  Chaque assemblée parlementaire définit les conditions dans lesquelles chaque député ou sénateur fait réaliser au cours de son mandat une évaluation indépendante du fonctionnement de son équipe de collaborateurs parlementaires. »

M. Henri Cabanel.  - Connaissant le sort de cet amendement, je le dépose malgré tout. Il propose une évaluation du travail du cabinet parlementaire par un tiers indépendant qui favoriserait la transparence de ses activités et contribuerait à la responsabilisation des élus envers les citoyens. Cette évaluation porterait sur l'adaptation du salaire à la mission et donnerait lieu à la mise en place de process, de fiches et d'intitulés de postes, sur le modèle du management des entreprises ou des administrations.

L'audit de mon cabinet par l'Afnor a permis de constater son efficience et de dessiner des pistes d'amélioration. Cela prouve au demeurant que ces emplois ne sont pas fictifs.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Bravo à M. Cabanel pour sa pratique innovante. Chacun peut toutefois évaluer ses collaborateurs comme il l'entend. Avis défavorable mais bienveillant...

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Sagesse, cette fois très réservée...

L'amendement n°18 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié ter, présenté par Mme Lienemann, MM. Godefroy et Leconte et Mme Yonnet.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8... ainsi rédigé :

« Art. 8...  -  Le bureau de chaque assemblée étudie les conditions dans lesquelles est mise en place une portabilité de l'ancienneté entre deux contrats et entre les deux assemblées. »

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - La portabilité de l'ancienneté des collaborateurs parlementaires et des collaborateurs de groupe parlementaire entre deux contrats existe déjà au Sénat, mais pas à l'Assemblée nationale ni entre les deux assemblées. C'est dommage, car il importe d'assurer à nos collaborateurs une évolution de carrière. Mon amendement ne remet pas en cause la souveraineté des assemblées.

M. le président.  - Amendement identique n°46 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Selon le bilan social de l'Agas en 2015, l'ancienneté moyenne de nos collaborateurs est de 3,7 ans et la médiane de 2 ans. Elle décroît. Il est essentiel d'assurer la portabilité de cette ancienneté dans un métier intense et souvent enrichissant.

L'amendement n°276 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°62 rectifié, présenté par Mme Bouchoux, MM. Desessard et Labbé, Mmes Archimbaud et Benbassa et MM. Dantec, Poher et Cabanel.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 ... ainsi rédigé :

« Art. 8 .... Le bureau de chaque assemblée étudie les conditions dans lesquelles est mise en place une portabilité de l'ancienneté des collaborateurs parlementaires entre deux contrats et entre les deux assemblées. »

Mme Corinne Bouchoux.  - Il faut envisager la portabilité de l'ancienneté des collaborateurs parlementaires entre les deux assemblées, ou entre un contrat avec un parlementaire et avec un groupe. Il serait de bon aloi que cet avantage social qui existe au Sénat s'applique à tous.

M. le président.  - Amendement n°65 rectifié, présenté par Mme Bouchoux, MM. Desessard et Labbé, Mmes Archimbaud et Benbassa et MM. Dantec, Poher et Cabanel.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 ... ainsi rédigé :

« Art. 8 ... Le bureau de chaque assemblée étudie les conditions dans lesquelles est mise en place une portabilité de l'ancienneté des collaborateurs de groupe parlementaire entre deux contrats et entre les deux assemblées. »

Mme Corinne Bouchoux.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Ces amendements sont en partie satisfaits puisque nos collaborateurs perçoivent une prime d'ancienneté, qui est reprise lors de changement de contrat entre sénateurs ou entre sénateurs et groupe politique du Sénat. Pour le reste, avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Sagesse.

M. Jean-Yves Leconte.  - La portabilité existe au Sénat mais pas à l'Assemblée nationale. Un député qui devient sénateur bénéficie de la portabilité de l'ancienneté, mais pas son collaborateur ! Cette disposition n'est peut-être pas du domaine de la loi, mais le problème est réel. Si nous conduisons l'Assemblée nationale à évoluer, dans le respect de son autonomie, nous aurons fait oeuvre utile.

Les amendements identiques nos2 rectifié ter et 46 rectifié ne sont pas adoptés, non plus que les amendements nos62 rectifié et 65 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°48 rectifié bis, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le 2° de l'article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État est ainsi modifié :

1° Après la première phase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Ces concours sont également ouverts aux collaborateurs de député et de sénateur ainsi qu'aux collaborateurs de groupe parlementaire. » ;

2° Au deuxième alinéa, après le mot : « intergouvernementales », sont insérés les mots : « ainsi que les services accomplis auprès des députés, des sénateurs et des groupes parlementaires ».

II.  -  Le premier alinéa du 2° de l'article 36 de loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifié :

1° Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Ces concours sont également ouverts aux collaborateurs de député et de sénateur ainsi qu'aux collaborateurs de groupe parlementaire. » ;

2° À la dernière phrase, après le mot : « intergouvernementales », sont insérés les mots : « ainsi que les services accomplis auprès des députés, des sénateurs et des groupes parlementaires ».

III.  -  Le premier alinéa du 2° de l'article 29 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est ainsi modifié :

1° Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Ces concours sont également ouverts aux collaborateurs de député et de sénateur ainsi qu'aux collaborateurs de groupe parlementaire. » ;

2° À la dernière phrase, après le mot : « intergouvernementales », sont insérés les mots : « ainsi que les services accomplis auprès des députés, des sénateurs et des groupes parlementaires ».

Mme Éliane Assassi.  - Il s'agit de prendre en compte l'ancienneté des collaborateurs parlementaires dans les conditions d'accès aux concours internes de la fonction publique territoriale. Avec une moyenne de 3,7 ans en poste, ils ont besoin d'évoluer dans leur carrière. Une forme de passerelle avec la fonction publique territoriale serait cohérente.

Le rapporteur a estimé que le débat devait avoir lieu en séance publique, nous nous en félicitons, l'accès au concours administratifs via la troisième voie n'est pas sans intérêt.

M. le président.  - Amendement identique n°149 rectifié bis, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste.

M. Jean-François Longeot.  - Certes, les assistants parlementaires et secrétaires de groupes peuvent présenter le troisième concours, mais les postes sont rares - huit en moyenne à l'ENA ces dix dernières années. Et le troisième concours n'existe ni au Sénat ni à l'Assemblée.

Même s'ils ont un contrat de droit privé, les assistants sont rémunérés sur fonds publics, assistent les parlementaires dans des fonctions énumérées par la Constitution, font vivre le pluralisme, ont une activité exclusive de tout intérêt économique ou commercial. Ce sont les critères retenus par le Conseil d'État pour constater une activité de service public entraînant un régime assimilable à celui d'un fonctionnaire.

Cet amendement offre une solution de compromis en leur ouvrant des opportunités de reconversion et de valorisation d'un engagement fondé sur un attachement certain à l'intérêt général.

Mardi 11 juillet 2017

Bas sommaire

Sommaire

Éloge funèbre de François Fortassin1

M. Gérard Larcher, président du Sénat1

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires2

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée)2

Rappel au Règlement2

Mme Éliane Assassi2

M. Philippe Bas, président de la commission des lois2

Discussion des articles du projet de loi2

ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article premier2

ARTICLE PREMIER2

ARTICLE PREMIER BIS2

ARTICLES ADDITIONNELS2

ARTICLE 22

Questions d'actualité2

Libération de Mossoul2

M. Jeanny Lorgeoux2

Mme Florence Parly, ministre des armées2

Taxation des poids lourds2

Mme Anne-Catherine Loisier2

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports2

Réforme de la taxe d'habitation (I)2

M. Pierre Cuypers2

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics2

Réforme de la taxe d'habitation (II)2

M. Philippe Esnol2

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics2

Plan climat et mix énergétique2

Mme Delphine Bataille2

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire2

Réforme de la taxe d'habitation (III)2

Mme Cécile Cukierman2

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics2

Situation de l'entreprise GM&S2

M. Jean-Jacques Lozach2

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement2

Situation politique à Montpellier2

M. Jean-Pierre Grand2

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur2

Ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse2

Mme Brigitte Micouleau2

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports2

Canal Seine-Nord2

Mme Catherine Génisson2

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports2

Demande d'avis sur une nomination2

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)2

Discussion des articles du projet de loi (Suite)2

ARTICLES ADDITIONNELS2

ARTICLE 2 BIS2

Commission (Candidature)2

Commission (Nomination)2

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)2

Discussion des articles du projet de loi (Suite)2

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 2 bis2

SÉANCE

du mardi 11 juillet 2017

5e séance de la session extraordinaire 2016-2017

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Jean-Pierre Leleux, M. Philippe Nachbar.

La séance est ouverte à 14 h 15.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Éloge funèbre de François Fortassin

M. Gérard Larcher, président du Sénat .  - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent ainsi que M. le ministre de la cohésion des territoires.) C'est une voix du Sénat écoutée, tolérante qui s'est éteinte avec François Fortassin. C'est une figure charismatique et chaleureuse de la Bigorre qui s'en est allée.

II luttait, nous le savions, depuis de longs mois, avec beaucoup de courage, contre la maladie qui l'avait affaibli mais qui ne l'empêchait pas d'être toujours présent au Sénat, de participer aux travaux de notre Bureau avec la simplicité, l'accessibilité et la chaleur qui étaient sa marque.

François Fortassin nous a quittés trop tôt et cet amoureux de la vie, de son pays et de son territoire, nous manque.

Oui, c'est avec émotion que nous avons appris sa disparition le 15 mai dernier, au lendemain même de la cérémonie d'installation du président de la République, dont il avait parrainé la candidature et qu'il avait soutenu, mais son état de santé ne lui a pas permis d'être présent à l'Élysée.

Nous lui avons rendu un dernier hommage en votre nom, le 19 mai, à l'occasion d'une émouvante cérémonie au coeur de sa commune natale de Sarp au milieu de ses proches et de ceux qui lui étaient chers.

J'étais accompagné de plusieurs membres du Bureau du Sénat dont François Fortassin était membre depuis 2008 - nos collègues Françoise Cartron et Frédérique Espagnac - et de deux présidents de groupes politiques - Didier Guillaume et Jacques Mézard, depuis quelques jours alors membre du Gouvernement.

Cet hommage trouve aujourd'hui, après la reprise de nos travaux en séance publique, son prolongement dans notre hémicycle.

François Fortassin représentait le département des Hautes-Pyrénées au sein de notre assemblée depuis le 3 mars 2001, date du décès de François Abadie. Il en était le suppléant depuis 1983, quelques mois avant les élections sénatoriales.

François Fortassin était un humaniste. Ses convictions républicaines et laïques trouvaient leur expression dans les valeurs du radicalisme qu'il portait haut et fort avec un mélange de douceur, de sens de l'écoute, mais aussi de force.

Il restera toujours fidèle à ces valeurs, qu'il retrouva au Sénat au sein du groupe du Rassemblement démocratique social et européen, et sur la scène politique parmi les Radicaux de gauche.

C'est, disait-il, « le parti qui correspond le mieux à ma sensibilité : on y privilégie l'humanisme et l'épanouissement individuel. J'ai été influencé lors de mes études d'histoire par les figures d'Alain, de Clemenceau, de Pierre Mendès-France, et plus tard par celle de Maurice Faure, René Billères, Michel Crépeau et bien sûr François Abadie ».

François Fortassin était professeur certifié d'histoire et géographie. Né dans cette commune de Sarp, dans la vallée de la Barousse qui lui était si chère, il avait, après des études secondaires au lycée de Saint-Gaudens et des études universitaires à Toulouse, enseigné au lycée Théophile Gautier, puis au collège Victor Hugo de Tarbes.

Après quelques engagements syndicaux, sa formation historique, ses convictions républicaines, son attachement à la laïcité et son lien viscéral au terroir bigourdan le conduisirent naturellement à l'engagement politique.

Élu conseiller municipal en mars 1971, il devient six ans plus tard maire de sa commune natale, mandat qu'il exercera jusqu'en 2001, durant 24 ans, avant d'être contraint d'y renoncer pour respecter la loi sur la limitation du cumul des mandats, tout en conservant les fonctions de premier adjoint.

Il fut, en tant que maire de Sarp, le principal artisan de la création de la communauté de communes de la vallée de la Barousse. Le défenseur inlassable de son territoire qu'il était s'investit aussi fortement dans le syndicat des eaux de la Barousse et du Comminges.

Sa carrière d'élu local conduisit François Fortassin à exercer le mandat de conseiller général du canton de Mauléon-Barousse.

Il fut aussi, durant près de vingt ans, membre du conseil régional de Midi-Pyrénées où il présida le groupe des radicaux de gauche.

Il fut enfin, d'avril 1992 à mars 2008, président du conseil général des Hautes-Pyrénées, fonction qu'il marqua durablement de son empreinte.

À la tête de l'assemblée départementale, il s'engagea, durant seize ans, sur tous les grands dossiers concernant les Hautes-Pyrénées avec le souci premier de maintenir un aménagement équilibré et harmonieux des territoires, notamment entre les territoires ruraux et l'agglomération tarbaise.

Il se battit pour donner une nouvelle impulsion au développement économique du département, créa un « fonds d'aménagement rural » et un « fonds d'équipement urbain » pour soutenir financièrement les communes du département. En matière scolaire, le Conseil général réalisa sous son impulsion la réhabilitation des collèges et soutint le développement d'un pôle universitaire à Tarbes.

Mais ce qui tenait tout particulièrement à coeur à François Fortassin était la reconversion du Pic du Midi en un haut lieu touristique, le « Vaisseau des étoiles ». Il fit de ce symbole majeur, avec Lourdes - voyez la diversité républicaine dans ce département -, de l'attractivité et du rayonnement des Hautes-Pyrénées, une priorité qu'il assuma en présidant le syndicat mixte. Celui qui n'a pas passé avec François Fortassin une ascension puis une soirée au haut du Pic du Midi entre terre et étoiles, gastronomie et chants montagnards, n'a pas connu la quintessence de la vie et de l'air pur partagé. Je peux vous en porter un témoignage, plus lucide à la montée qu'à la descente. (Sourires)

François Fortassin, disait-il, n'avait pas prévu cette carrière nationale. Je le cite : « je ne m'étais pas fixé d'objectifs mais, à un moment donné, François Abadie a vu en moi son successeur. Cela s'est fait comme ça, simplement. Ce mandat national n'a pas été une préoccupation majeure, mais je l'ai assumé avec beaucoup de bonheur ».

François Fortassin était un sénateur heureux, qui portait un regard personnel et aiguisé par l'expérience sur le mandat sénatorial : « le Sénat est une chambre de réflexion très utile. Ce que je déplore le plus dans la période actuelle, c'est la dégradation du politique à laquelle on aboutit à travers les réseaux sociaux. Il est bon d'avoir une chambre où puisse s'engager la réflexion et qui ne soit pas dans la précipitation ou l'émotion de l'instant ». À méditer collectivement.

C'est le message que François Fortassin nous délivra constamment, avec le sens du rassemblement, de l'écoute et du dialogue qui le caractérisaient, à l'occasion de chacune des réunions du Bureau du Sénat où ses interventions justes et de bon sens emportaient bien souvent l'adhésion.

Notre collègue était un républicain modéré mais n'était pas modérément républicain. Il portait au Sénat les valeurs qui étaient les siennes, qu'il s'agisse de la construction européenne pour laquelle il réclamait inlassablement - même quand ce n'était pas du tout la mode...- , « plus d'Europe et mieux d'Europe », ou de la laïcité pour laquelle il s'est toujours battu, considérant qu'il fallait affirmer constamment et avec vigueur les valeurs que la République porte.

Dans l'hémicycle sénatorial, François Fortassin, à titre personnel ou au nom de son groupe du RDSE, s'intéressait à tous les sujets. Membre successivement des commissions des affaires culturelles, des affaires économiques, où j'ai travaillé avec lui, des finances, puis des affaires sociales, ses prises de parole furent innombrables, et toujours utiles.

J'ai en mémoire ses dernières interventions à la fin de l'année dernière sur le projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté ou sur deux textes législatifs relatifs aux activités sportives, autre sujet qui le passionnait.

Il déposa encore au début de cette année deux propositions de loi visant à garantir le principe de l'indépendance de la justice et à rétablir les critères de classement des communes situées en zone de revitalisation rurale.

Homme de convictions, François Fortassin était aussi un homme de passions. Il partageait avec ses concitoyens bigourdans celles de la montagne, de la chasse, de la tauromachie et du rugby, sans oublier bien sûr les plaisirs de la table auxquels l'épicurien jovial qu'il était ne demeurait pas insensible...

Je ne saurais enfin oublier la passion de François Fortassin pour le Tour de France. Celui qui accueillait, il y a quelques mois, l'organisateur de l'épreuve en vue de l'édition 2017 qui se déroule en ce moment même y voyait, je le cite : « quelque chose de magique, un miracle permanent et 3 500 kilomètres de sourires... ». Il en fit ainsi un instrument de promotion des Hautes-Pyrénées à l'occasion du passage annuel de l'épreuve sur les routes et les cols mythiques de son département.

François Fortassin a voué l'essentiel de son existence et de son énergie à son travail d'élu et de parlementaire.

Je souhaite redire notre sympathie attristée aux membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen du Sénat et à ses collègues de la commission des affaires sociales.

Je souhaite aussi exprimer à chacun des membres de sa famille, à ses six enfants et à tous les habitants de Sart avec qui j'ai partagé un moment entre l'esplanade de l'église - symbole de laïcité assumée - et la salle des fêtes, les condoléances très sincères de l'ensemble des sénatrices et des sénateurs, auxquelles j'ajoute ma peine et ma tristesse personnelles.

François Fortassin, dont le visage est ici présent sur son fauteuil, portait une parcelle vivante de République. (Applaudissements)

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires .  - Le 15 mai dernier, nous avons tous appris avec tristesse que François Fortassin venait de nous quitter. Quatre jours plus tard, à Sarp, dans la vallée de la Barousse à laquelle il tenait tant, nous étions nombreux à lui rendre hommage : vous, monsieur le président du Sénat, son successeur Michel Pélieu, son ami et successeur dans « notre » assemblée, allais-je dire, le président Didier Guillaume, l'ensemble de ses collègues du groupe RDSE et d'autres encore. Oui, nous étions nombreux à Sarp, aux côtés de sa famille et de ses amis, pour une journée de recueillement et pour rendre à François Fortassin l'hommage qu'il méritait. Je ne l'oublierai pas (M. le ministre s'interrompt un instant.) - vous comprendrez mon émotion. Je n'oublierai pas cette journée, parce qu'elle fut riche en émotions, mais aussi parce que c'était mon premier déplacement en tant que ministre de l'agriculture.

Mon ami François et moi n'aurons jamais eu l'occasion d'échanger dans une relation de parlementaire à ministre. Ces échanges auraient été riches, constructifs, pleins d'humour et d'amitié. Il aurait su faire remonter ses analyses du terrain avec ce « bon sens », expression que vous avez employée à juste titre à son propos, monsieur le président, qui le caractérisait, ce pragmatisme qui lui a permis de tracer une trajectoire politique remarquable.

Le pyrénéiste François Fortassin a ainsi gravi tous les échelons du cursus honorum politique grâce à sa passion pour les autres et pour son territoire.

Élu conseiller municipal de Sarp en 1971, puis maire en 1977, réélu constamment jusqu'en 2001, car la confiance ne s'efface pas. Conseiller général de 1979 jusqu'en 2015, président du conseil général des Hautes-Pyrénées de 1992 à mars 2008, il a succédé à François Abadie au Sénat, dont il était le suppléant, élu sénateur quelques mois plus tard, puis réélu dix ans plus tard, en 2011, dès le premier tour, preuve que les grands électeurs des Hautes-Pyrénées savaient que François Fortassin était un ardent défenseur de leur territoire mais aussi un fantassin de la République.

C'était un homme de fidélité aux valeurs républicaines, à son territoire, à la Haute Assemblée, au parti radical.

Pour avoir souvent parlé avec lui de ses responsabilités politiques, celle qu'il a le plus appréciée était celle de président de l'institution départementale qui lui donnait directement prise sur le réel, pour mener à bien des projets concrets en faveur de son territoire et de ses concitoyens. Il a mis toute son énergie au service du développement de son département, en maintenant constamment l'équilibre entre les territoires ruraux et l'agglomération tarbaise, ce qui n'est pas toujours facile : fonds d'aménagement rural, fonds d'équipement urbain pour soutenir financièrement les communes du département dans leurs opérations d'aménagement : ce fut plus qu'une réussite, un exemple.

En matière touristique, la reconversion du Pic du Midi, fut une priorité à laquelle il fut très attaché, nous sommes ici plusieurs à pouvoir en témoigner, il mit en place une réserve internationale du ciel étoilé dont il était très fier.

L'eau et l'irrigation étaient une autre de ses priorités, enjeu fondamental pour nos territoires et notre agriculture.

François Fortassin était d'abord un élu de terrain, soucieux d'efficacité, d'amélioration de la situation de ses concitoyens des Hautes-Pyrénées. Il s'exprimait au Sénat dans une totale liberté, chère au RDSE, où nous avons été collègues, inhérente à son caractère. Homme de terrain, libre, pragmatique, loin des dogmes et des postures, respectueux, il était tout simplement un sénateur utile à la fabrique de la loi et à la République.

Je n'oublie pas son accueil amical dans cette Haute Assemblée où il était particulièrement attachant, atypique, reconnu et apprécié. Rares étaient les semaines où il ne prenait pas l'avion de Tarbes ou de Pau pour rejoindre ce Sénat qu'il aimait tant. À ne plus le voir dans nos réunions de groupe, ni dans l'hémicycle, ni au restaurant du Sénat, ces derniers temps, nous avions deviné qu'il menait son dernier combat, si difficile, dans la plus grande dignité.

François était un ardent défenseur des valeurs républicaines. J'étais ainsi à ses côtés, lors d'une séance de questions au Gouvernement, lorsqu'il priait le garde des sceaux de respecter l'indépendance de la justice et la séparation des pouvoirs. Ce fut sa dernière expression publique.

Profondément épris de liberté, de solidarité et de tolérance, Il se battait aussi pour la laïcité qu'il associait à l'école où il avait exercé. Il pratiquait ces valeurs au quotidien dans le sport, notamment le rugby qu'il pratiquait et je ne vous dévoilerai pas ici son surnom dans la mêlée... C'était aussi un vrai passionné de cyclisme, autre sport enraciné dans ses Pyrénées, en particulier du Tour de France. Je puis vous annoncer que ce jeudi 13 juillet, quand le Tour de France passera dans la vallée de la Barousse, il y aura un moment d'émotion. Je puis vous révéler que durant les chaudes sessions extraordinaires de juillet, il multipliait les allers-retours entre l'hémicycle et son bureau, tout proche de celui de son président de groupe ; il se peut que lors de certaines échappées ou arrivées au sprint, deux ou trois amendements n'aient pu être défendus... (Sourires)

C'était aussi un aficionado de tauromachie.

Un amendement dont il était très fier, dont il parlait souvent, lui valant un franc succès dans son département, et dont il obtint l'adoption à la quasi-unanimité au Sénat, fut inséré ici au projet de loi résultant du Grenelle de l'environnement : « Les herbivores doivent manger de l'herbe ». Selon ses propres propos, illustrant son bon sens légendaire, « si l'on avait fait manger de l'herbe aux vaches, on n'aurait jamais eu la vache folle ».

Cette voix pragmatique et sincère d'un authentique républicain qui savait toujours ramener les débats à l'essentiel, à savoir, l'utilité de la loi, sa perception par les citoyens et ses effets véritables sur le quotidien des Français, cette voix s'est éteinte et nous manquera.

Homme de passion, homme de son territoire, ayant la République chevillée au corps, François Fortassin restera une grande figure du radicalisme, un grand élu local du sud-ouest, un parlementaire assidu, utile et toujours libre dans son expression comme dans ses votes.

Ceux qui le connaissent savent qu'il a désormais trouvé sa place dans le ciel étoilé au-dessus des Hautes-Pyrénées, quelque part au-dessus du Pic du Midi.

Au nom du Gouvernement de la République, j'adresse à sa famille, à ses proches, à ses administrés, mes condoléances les plus sincères et les plus attristées. (Applaudissements)

M. le président. - Observons ensemble un moment de recueillement.

(Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que le ministre observent un moment de recueillement.)

La séance est suspendue à 14 h 45.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

La séance reprend à 15 heures.

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l'action publique.

Rappel au Règlement

Mme Éliane Assassi .  - Le débat qui va s'ouvrir est fondamental. Les dernières campagnes électorales, la place des médias dans la vie publique ont mis en exergue l'exaspération face au rôle de l'argent dans la vie politique.

Des affaires d'enrichissement personnel et de corruption ont rythmé l'actualité en masquant le dévouement, la probité et le sens de l'intérêt général de l'immense majorité des élus.

Comment, dans ces conditions, ne pas débattre ici de la représentativité des élus, de la place des médias, de leurs rapports avec puissance d'argent et forces politiques, mais aussi des instituts de sondages aux mains des grands groupes privés ?

Le Parlement doit demeurer un lieu de débat alternatif. Où aura-t-il lieu sinon ? Au Conseil des ministres ?

De nombreuses, trop nombreuses irrecevabilités ont été décrétées pour refuser d'emblée l'examen d'amendements. La plupart au motif qu'ils n'auraient pas, comme l'exige l'article 45 de la Constitution, de lien direct voire indirect avec le projet de loi.

Monsieur le président de la commission des lois, la réforme de 2008 avait pourtant pour objet d'élargir le droit d'amendement, non de le restreindre. Dois-je lire des extraits du rapport de M. Hyest, votre prédécesseur, et de ses interventions en séance publique dans ce sens ?

Le Parlement doit défendre ses prérogatives avec fermeté face à un Conseil constitutionnel dont la légitimité pose question et qui restreint ainsi le champ du droit d'amendement dans l'un de ces revirements de jurisprudence dont il a le secret.

Le renforcement du pouvoir exécutif décidé et mis en oeuvre très rapidement par M. Macron doit nous faire réfléchir. Le droit d'amendement est crucial pour respecter l'équilibre des pouvoirs. L'utilisation habile de l'article 45 donne au Gouvernement la clé du droit d'amendement. Monsieur le président de la commission des lois, je vous recommande la plus grande prudence dans l'utilisation de cet article qui met en péril les prérogatives du Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois .  - Les auteurs de certains amendements, sur tous nos bancs, ont eu à déplorer l'irrecevabilité appliquée à leurs textes, car ils n'étaient pas en rapport avec le projet de loi examiné. Ce fut également le cas dans une période récente, notamment sur le projet de loi relatif à la justice du XXIe siècle et sur le projet de loi de lutte contre la corruption, présenté par Michel Sapin. Le Conseil constitutionnel eut alors l'occasion de réaffirmer sa jurisprudence.

La commission des lois est le gardien de la procédure législative définie par la Constitution dont le Conseil constitutionnel reste le seul interprète.

Ce n'est pas le titre d'un projet de loi qui détermine le champ des amendements possible. C'est le contenu même des dispositions proposées par le Gouvernement qui définit l'irrecevabilité de certains amendements. En tout état de cause, le Conseil constitutionnel aura sans doute une nouvelle fois l'occasion de dire le droit s'il est saisi.

M. le président.  - Acte est donné de vos interventions.

Discussion des articles du projet de loi

ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°107, présenté par M. Cabanel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 44, il est inséré un article L. 44-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 44-1.  -  Ne peuvent faire acte de candidature les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes :

« 1° Les crimes ;

« 2° Les délits prévus aux articles 222-27 à 222-31, 222-33 et 225-5 à 225-7 du code pénal ;

« 3° Les délits traduisant un manquement au devoir de probité prévus à la section 3 du chapitre II du titre III du livre IV du même code ;

« 4° Les délits traduisant une atteinte à la confiance publique prévus aux articles 441-2 à 441-6 dudit code ;

« 5° Les délits de corruption et de trafic d'influence prévus aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 du même code ;

« 6° Les délits de recel, prévus aux articles 321-1 et 321-2 dudit code, ou de blanchiment, prévus aux articles 324-1 et 324-2 du même code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;

« 7° Les délits prévus aux articles L. 86 à L. 88-1, L. 91 à L. 100, L. 102 à L. 104, L. 106 à L. 109, L. 111, L. 113 et L. 116 du présent code ;

« 8° Le délit prévu à l'article 1741 du code général des impôts.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. » ;

2° Le 3° de l'article L. 340 est ainsi rétabli :

« 3° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions mentionnées à l'article L. 44-1. » ;

3° Au premier alinéa de l'article L. 388, les mots : « loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats » sont remplacés par les mots : « loi n° ... de ... pour la régulation de la vie publique » ;

4° Au dernier alinéa de l'article L. 558-11, après la référence : « L. 203 », sont insérés les mots : « ainsi que le 3° ».

II.  -  Le a du 3° du I de l'article 15 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales est ainsi rédigé :

« a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« ?I.  -  Le titre Ier du livre Ier du présent code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales, à l'exception des articles L. 15, L. 15-1, L. 46-1 et L. 66, est applicable à l'élection :? ; ».

III.  -  Les I et II du présent article s'appliquent :

1° S'agissant des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers de Paris, à compter du premier renouvellement général des conseils municipaux suivant la promulgation de la présente loi ;

2° S'agissant des conseillers départementaux, à compter du premier renouvellement général des conseils départementaux suivant sa promulgation de la présente loi ;

3° S'agissant des conseillers régionaux, des conseillers à l'Assemblée de Corse, des conseillers à l'assemblée de Guyane et des conseillers à l'assemblée de Martinique, à compter du premier renouvellement général des conseils régionaux suivant la promulgation de la présente loi.

M. Henri Cabanel.  - Les Français attendent des actes qui illustrent l'exemplarité et l'équité qu'ils exigent désormais de leurs responsables politiques. L'amendement obligeant à fournir un casier judiciaire vierge a pour but de répondre à cette double exigence, qui est conforme au programme d'Emmanuel Macron.

Plus de 300 professions exigent un casier judiciaire vierge pour toute candidature. Comment un élu pourrait-il s'en exonérer ?

On objecte l'anticonstitutionnalité de la mesure ? Le texte a pourtant été voté à l'Assemblée nationale. Je vous demande de considérer la nécessité de changer de pratiques.

M. le président.  - Amendement identique n°197 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mme Archimbaud.

M. Joël Labbé.  - Je souscris aux explications de M. Cabanel. Seul un souci technique m'a empêché de signer son amendement. Il répond à la crainte d'une inéligibilité à vie. Il oublie toutefois de répondre à un certains nombres de préoccupations. Par exemple, des faucheurs volontaires d'OGM, que je salue, seraient écartés... (Rires sur des bancs du groupe Les Républicains) ou encore celles des résistants à la ferme des mille vaches... (M. Alain Bertrand applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°232 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Bertrand et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mme Jouve et M. Requier.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code électoral est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 44, il est inséré un article L. 44-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 44-1.  -  Ne peuvent faire acte de candidature les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes :

« 1° Les crimes ;

« 2° Les délits prévus aux articles 222-27 à 222-31, 222-33 et 225-5 à 225-7 du code pénal ;

« 3° Les délits traduisant un manquement au devoir de probité prévus à la section 3 du chapitre II du titre III du livre IV du même code ;

« 4° Les délits traduisant une atteinte à la confiance publique prévus aux articles 441-2 à 441-6 dudit code ;

« 5° Les délits de corruption et de trafic d'influence prévus aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 du même code ;

« 6° Les délits de recel, prévus aux articles 321-1 et 321-2 dudit code, ou de blanchiment, prévus aux articles 324-1 et 324-2 du même code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;

« 7° Les délits prévus aux articles L. 86 à L. 88-1, L. 91 à L. 100, L. 102 à L. 104, L. 106 à L. 109, L. 111, L. 113 et L. 116 du présent code ;

« 8° Le délit prévu à l'article 1741 du code général des impôts.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. » ;

2° Le 3° de l'article L. 340 est ainsi rétabli :

« 3° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions mentionnées à l'article L. 44-1. » ;

3° Au premier alinéa de l'article L. 388, la référence : « loi n° 2017-286 du 6 mars 2017 tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques et des candidats » est remplacée par la référence : « loi n°     du      pour la régulation de la vie publique » ;

4° Au dernier alinéa de l'article L. 558-11, après la référence : « L. 203 », sont insérés les mots : « ainsi que le 3° ».

II.  -  Le a du 3° du I de l'article 15 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales est ainsi rédigé :

« a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« ?I.  -  Le titre Ier du livre Ier du présent code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales, à l'exception des articles L. 15, L. 15-1, L. 46-1 et L. 66, est applicable à l'élection :? ; ».

Mme Françoise Laborde.  - La conformité aux lois de la République est l'une des premières qualités que nos concitoyens recherchent chez leurs élus. La solution proposée dans cet amendement n'est pas satisfaisante à cause du principe d'individualisation des peines. D'autant que la liste des crimes et délits mentionnés n'est pas exhaustive. À l'heure actuelle, les magistrats disposent de suffisamment de possibilités. D'où notre souhait de revenir au texte examiné en février dernier à l'Assemblée nationale.

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois.  - Avis défavorable à ces trois amendements qui, paradoxalement, semblent plus sévères que le texte de la commission, alors qu'ils le sont moins. En effet, l'effacement d'une mention sur le bulletin n°2 peut se faire dans un délai de six mois après la condamnation. La règle s'appliquerait de manière très aléatoire, selon que le candidat ait pris ses précautions ou non.

Le Sénat doit protéger les droits fondamentaux. Or quoi de plus fondamental pour un citoyen que de pouvoir se présenter à une élection. Cela concerne tout de même 1,6 million de Français qui se présentent aux élections, y compris municipales. C'est loin d'être anecdotique. Ne pas prévoir l'intervention d'un juge pour décider d'une inéligibilité est choquant.

Nous prévoyons une règle plus sévère, égale pour tous, en évitant une application rétroactive. Avis fermement défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice.  - Le Gouvernement est défavorable aux amendements car s'il partage le souhait de renforcer la probité des candidats, cette mesure pourrait s'analyser comme une peine automatique, contraire au principe d'individualisation des peines. Nous avons donc fait le choix d'une peine d'inéligibilité obligatoire mais expressément prononcée par le juge, qui pourra l'écarter par une décision spécialement motivée.

M. Joël Labbé.  - Je retire mon amendement au profit de l'amendement n°107 de M. Cabanel.

Mme Françoise Laborde.  - Je retire aussi le mien.

Les amendements nos197 rectifié bis et 232 rectifié bis sont retirés.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Pour restaurer la confiance dans la vie publique, commençons par tenir nos promesses. Le président de la République a annoncé à plusieurs reprises qu'il rendrait impossible la candidature aux élections parlementaires et présidentielle à celui qui n'a pas un casier judiciaire vierge. Il est vrai que le président de l'Assemblée nationale lui-même avait promis de soutenir le vainqueur des primaires de la gauche et ne l'a pas fait... (Exclamations amusées à droite)

M. Alain Gournac.  - Hors sujet !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - L'argument constitutionnel sera vite levé. Lorsqu'il a examiné la loi Sapin 2, le Conseil constitutionnel a considéré qu'une telle mesure relevait d'une loi organique. Eh bien, vous ne pourrez pas vous dérober quand nous examinerons le projet de loi organique !

Notre amendement est complémentaire de la mesure voulue par le Gouvernement, car celle-ci ne s'appliquera qu'aux infractions perpétrées après la promulgation de la loi, alors que les délits antérieurs sont consignés au casier judiciaire.

Nos concitoyens ne veulent plus de passe-droits ni de combines. (M. Joël Labbé applaudit.)

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'argument du respect des promesses est important. J'en ajouterai d'autres. Dans sa décision du 18 novembre 1982, le Conseil constitutionnel a considéré que « la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont pas exclus pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité, ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu ». C'est bien ce dont il s'agit avec notre amendement, qui ne concerne que les comportements malhonnêtes prouvés et condamnés lors d'un procès régulier et contradictoire.

En outre, l'inscription d'une condamnation au bulletin numéro deux n'est pas une peine complémentaire, mais une conséquence de plein droit de cette condamnation - à laquelle le juge peut cependant déroger.

La jurisprudence constitutionnelle a évolué, comme Mme la ministre le sait bien, puisqu'elle n'écarte plus le principe des peines obligatoires, à condition que le principe d'individualisation des peines soit respecté. C'est le cas ici, puisque le juge peut à tout moment ordonner l'omission de la mention d'une condamnation au casier judiciaire.

Enfin, il y a un lien manifeste entre l'absence d'inscription au casier de condamnations pour atteinte à la probité et l'exercice d'un mandat électif. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent aussi.)

L'amendement n°107 n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°108 rectifié, présenté par Mme Rossignol et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles 222-33 et 222-33-2 du code pénal ;

Mme Laurence Rossignol.  - Les élus sont aussi des employeurs. Leur comportement vis-à-vis de leurs collaborateurs peut faire l'objet de condamnations pénales. Songeons à un maire condamné pour agression sexuelle envers une subordonnée et qui continue néanmoins d'exercer son mandat. La victime est, elle, totalement détruite.

Il s'agit par cet amendement de garantir l'exemplarité des élus, mais aussi de protéger leurs salariés, dans le cadre de ce lien de subordination très particulier, en étendant l'inéligibilité aux condamnations pour harcèlement moral et sexuel.

M. le président.  - Amendement n°234 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Collombat, Mme Costes, M. Guérini et Mme Jouve.

Après l'alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles 222-7 à 222-16-3, 222-33, 222-33-2 à 222-33-2-2 et 223-13 du présent code.

Mme Françoise Laborde.  - Ce amendement part du même principe que l'amendement précédent, en allant plus loin.

L'article premier réserve la peine complémentaire obligatoire d'inéligibilité aux crimes et à une liste de délits. Le problème des listes est qu'elles sont rarement exhaustives... Pourquoi les délits financiers seraient-ils plus sévèrement traités que les atteintes aux personnes ? Le comportement des élus doit être irréprochable dans leur rapport aux autres comme en matière financière.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La rédaction de l'amendement de Mme Rossignol atteint, Madame Laborde, vos objectifs. Retrait de l'amendement n°234 rectifié au profit de l'amendement n°108 rectifié ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Vous soulevez une question à laquelle le Gouvernement est très attentif. Avec Mme Schiappa, nous avons engagé un travail dans ce domaine et espérons avancer très rapidement. Nous sommes néanmoins soucieux de la cohérence du texte et du respect de la Constitution. Vous proposez d'étendre la peine obligatoire d'inéligibilité aux cas de harcèlement sexuel et moral, mais non à toutes les violences et agressions sexuelles - l'exposé écrit de l'amendement semant un léger doute à ce sujet. Le Gouvernement propose de la réserver aux infractions contre la probité - entendue en un sens très large - ainsi qu'aux crimes. Attention à ne pas l'étendre au-delà du contrôlable, d'autant qu'il faut respecter les principes de proportionnalité et de nécessité des peines.

Restons-en là pour le moment. Nous continuerons à travailler à l'élaboration d'une liste cohérente et pertinente.

Mme Laurence Rossignol.  - J'ai moi-même dû composer avec les réticences de la Chancellerie à l'égard des listes... Mais faut-il vous lire celles que dresse l'article premier ? Le harcèlement moral ou sexuel, surtout dans le cadre de fonctions publiques, n'est pas dissociable des atteintes à la probité. Il n'est pas moins grave.

En outre, un signal important doit être envoyé à la société française. Les femmes qui subissent un rapport hiérarchique intrusif doivent savoir que la loi les protège. Je regrette vivement l'opposition du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et communiste républicain et citoyen ; Mmes Françoise Laborde et Corinne Bouchoux ainsi que M. Joël Labbé applaudissent également.)

Mme Françoise Cartron.  - J'adhère totalement à ce qui vient d'être dit. Depuis plus d'un an, à la suite de la révélation de faits malheureux dans une autre assemblée, un travail a été entrepris à ce sujet au Sénat. Un code de déontologie sera distribué à tous les nouveaux sénateurs. Puisque ce projet de loi a pour objet de rendre confiance dans les élus, cet amendement doit être voté. Nous avons besoin d'un signe fort. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et communiste, républicain et citoyen)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Je suis stupéfaite de la réponse du Gouvernement. L'amendement n°108 rectifié prolonge le travail entrepris par la délégation aux droits des femmes depuis plusieurs années pour la reconnaissance des atteintes dont sont victimes les femmes dans les relations hiérarchiques. L'argument de la liste nous est régulièrement servi... Je soutiens l'amendement avec chaleur et enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent également.)

Mme Nathalie Goulet.  - Le groupe de l'Union centriste votera cet amendement qui envoie un signal fort. Ne décourageons pas le président Bas lorsqu'il émet un avis favorable ! (Applaudissements au centre et à gauche)

Mme Éliane Assassi.  - Les hommes aussi peuvent intervenir !

Mme Françoise Laborde.  - Je retire mon amendement n°234 rectifié au profit de l'amendement n°108 rectifié. Ce serait dommage d'éparpiller les voix. (Applaudissements à gauche et au centre)

L'amendement n° 234 rectifié est retiré.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Entendons-nous bien, le Gouvernement partage pleinement votre objectif. Nous avons seulement le souci de la sécurité juridique et de la cohérence. (Protestations à gauche)

M. Alain Bertrand.  - Ce n'est pas le Conseil constitutionnel qui fait la loi !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Nous devons veiller, cependant, à ce que la loi votée soit conforme à la Constitution. Je crains, sinon, les déceptions...

L'amendement n°108 rectifié est adopté.

(Vifs applaudissements à gauche et au centre)

M. le président.  - Amendement n°233 rectifié quater, présenté par MM. Collombat, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli et Collin, Mme Costes, M. Guérini, Mme Jouve et M. Requier.

Après l'alinéa 5

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

«  -  les délits prévus aux articles 313-1 et 313-2 du code pénal, lorsqu'ils sont commis en bande organisée ;

«  - les délits d'association de malfaiteurs prévus à l'article 450-1, lorsqu'ils ont pour objet la préparation des délits mentionnés au troisième alinéa du présent article ;

M. Pierre-Yves Collombat.  - L'article premier dresse une liste à trous, y compris dans le domaine qu'elle est censée traiter, les délits financiers. Un oubli, sans doute...

Je propose d'y ajouter au moins l'association de malfaiteurs et la grande délinquance économique et financière. J'aurais souhaité étendre encore la liste aux délits mentionnés à l'article 704 du code de procédure pénale, mais on m'a convaincu que c'était trop compliqué - comme souvent en matière financière...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Contrairement à ce qu'a laissé entendre Mme Goulet, la commission a émis nombre d'avis favorables, comme ici.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable pour des raisons de cohérence. Trop élargir la liste des infractions y nuirait. En outre, la rédaction de l'amendement n'est pas satisfaisante, car le code pénal ne connaît que l'abus de confiance, sans distinguer selon qu'il porte ou non sur la TVA.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La cohérence, la beauté du texte l'emportent sur toute autre considération... À quoi servons-nous donc ?

M. Henri de Raincourt.  - M. Collombat est lucide. (Rires)

M. Roger Karoutchi.  - Il est réaliste !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Votre objection, madame la garde des sceaux, tombe car l'amendement a été rectifié.

Si l'on est disqualifié en raison d'une mauvaise gestion des deniers publics, on doit l'être aussi lorsqu'on se rend coupable d'infractions relevant de la grande délinquance, même s'il s'agit de deniers privés.

L'amendement n°233 rectifié quater est adopté.

M. le président.  - Amendement n°88, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

«  -  les délits prévus aux articles L. 241-3 et L. 242-6 du code du commerce ;

M. Christian Favier.  - Le printemps a mis en lumière la défiance de nos concitoyens. Ce projet de loi est nécessaire. Les élus doivent être irréprochables, y compris dans leur vie professionnelle. C'est pourquoi nous proposons d'ajouter à la liste dressée par l'article premier l'abus de bien social, appropriation illégale voisine de l'abus de confiance. Comment des élus qui s'en seraient rendus coupables pourraient-ils gérer correctement le bien commun ?

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable en remerciant nos collègues de l'excellence de leur travail.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment. Le Gouvernement a déjà adopté une liste très large, dont il souhaite préserver la cohérence d'ensemble. Jusqu'où irons-nous, sinon ?

L'amendement n°88 est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER BIS

M. le président.  - Amendement n°205, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - La commission des lois a modifié la rédaction du délit de prise illégale d'intérêts au motif que la jurisprudence retient une acception trop imprécise de la notion d'intérêt. Il en résulterait pour les élus locaux une forte exposition au risque de condamnations pénales pour des manquements purement formels.

Le Gouvernement conteste cette analyse et souhaite rétablir le texte initial. Il faut pouvoir sanctionner des personnes dépositaires de l'autorité publique qui interviennent dans des décisions qui intéressent directement leurs proches : ainsi lorsqu'un élu intervient dans l'attribution d'un immeuble appartenant à la commune à un membre de sa famille, au prix du marché, en écartant d'autres candidats. Si la collectivité n'en subit aucun préjudice, l'élu n'en a pas moins manqué à l'impartialité.

Soulignons que les juridictions font une application particulièrement limitée de ces dispositions : le nombre de condamnations annuelles pour des faits de prise illégale d'intérêts oscille autour d'une quarantaine. Une modification de l'incrimination diminuerait encore ce nombre.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je suis navré de devoir émettre un avis défavorable. Le Sénat, représentant des collectivités territoriales, a constaté des excès de sévérité dans la condamnation d'élus, pour avoir subventionné des associations auxquelles ils appartenaient à la demande même de la collectivité territoriale, par exemple. La notion d'« intérêt quelconque » est trop floue. Nous avons donc retenue la proposition équilibrée de M. Collombat. L'intérêt en question est défini comme un intérêt personnel distinct de l'intérêt général : cela reste très large, mais cela évitera que la Cour de cassation se croie obligée de confirmer des condamnations qui ne se justifient pas. Faisons entrer un peu de pragmatisme et de bon sens dans ce débat.

M. Charles Revet.  - On en a bien besoin.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La façon dont est libellé l'article 432-12 du code pénal aboutit à des situations ubuesques. Dans le Var, un maire a été condamné pour avoir participé à la délibération révisant le plan d'occupation des sols, pour la seule raison qu'il est propriétaire d'un terrain concerné par ce plan, sans que la révision ait rien changé à son statut. Les juges appliquent la jurisprudence, plus que la loi d'ailleurs, mais en prononçant des peines qui disent le contraire : en l'espèce, il a été condamné à une amende avec sursis. Il arrive que les élus soient dispensés de peine.

Tout cela est aberrant. Nous proposons une solution simple. Le juge sera assez perspicace pour sanctionner les comportements qui le méritent.

L'amendement n°205 n'est pas adopté.

L'article premier bis est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

L'amendement n°167 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°41, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, les mots : « Sous peine d'irrecevabilité », sont remplacés par les mots : « Hors les cas de connexité avec d'autres infractions faisant l'objet d'une procédure judiciaire ou de découverte incidente dans le cadre d'une procédure pénale, ».

M. Éric Bocquet.  - Cent fois sur le métier, remettez votre ouvrage ! Nous proposons une nouvelle fois de supprimer le verrou de Bercy.

La constitution d'un Parquet financier fut un progrès significatif. Mais celui-ci demeure confronté à l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, qui soumet le dépôt des plaintes à l'avis conforme de la commission des infractions fiscales, véritable « juge d'instruction » en la matière. Il est temps de lever cet obstacle, afin que les administrations ayant repéré des faits de fraude fiscale puissent engager des poursuites, quitte à prévoir des mesures conservatoires - saisie de sommes illégalement en transit...- et l'information de l'administration fiscale au plus haut niveau. Un mémorandum du Premier président de la Cour des comptes soulignait déjà en août 2013 la nécessité d'une meilleure coopération entre la DGFip et les douanes.

Vous me répondrez, je le sais, que les procédures judiciaires sont longues et incertaines et qu'il vaut mieux faire pression sur les fraudeurs pour qu'ils rendent l'argent qu'ils doivent...

M. le président.  - Amendement n°203 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° L'article L. 228 est ainsi modifié :

a) À la fin du premier alinéa, les mots : « sur avis conforme de la commission des infractions fiscales » sont remplacés par les mots : « dans les conditions de droit commun » ;

b) Les deuxième à dernier alinéas sont supprimés ;

2° Les articles L. 228 A et L. 228 B sont abrogés.

II.  -  L'article 1741 A du code général des impôts est abrogé.

III.  -  Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après le mot : « République », la fin de l'article L. 711-21 est supprimée ;

2° Après le mot : « République », la fin du VI de l'article L. 725-3 est supprimée.

M. Joël Labbé.  - Pour l'écologiste non inscrit que je suis (sourires), la justice est un élément clé pour la restauration de la confiance dans l'action publique. Cet amendement supprime le verrou de Bercy, qui empêche les poursuites pour fraude sans l'accord de l'administration fiscale. (M. Éric Bocquet applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°68, présenté par Mme N. Goulet.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Par exception, les plaintes concernant les personnes soumises à une obligation de déclaration au sens de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique sont directement déposées par l'administration sans avis de la commission des infractions fiscales. »

Mme Nathalie Goulet.  - Espérons que ces amendements feront l'effet des trompettes de Jéricho et que le verrou de Bercy sera levé au septième jour !

Ma proposition diffère légèrement des autres pour passer sous les fourches caudines de la navette parlementaire : lever le verrou uniquement pour les personnes soumises à l'obligation de déclaration par la loi relative à la transparence de la vie publique. Avec notre collègue Anziani, nous dénoncions déjà en 2013 l'opacité la plus complète qui entoure le nombre de procédures traitées par la commission des infractions fiscales et les montants en jeu - on les dit extraordinairement élevés.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mme Lienemann.

I.  -  Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 5° de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa, lorsqu'il apparaît qu'un indice laissant supposer qu'une fraude fiscale a été commise dans l'une des conditions prévues aux 1° à 5°, l'agent en charge du contrôle qui le constate en informe directement le procureur financier et transmet à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :

Titre ...

Dispositions relatives à la lutte contre la fraude fiscale

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - J'invite le Sénat, qui a voté la suppression du verrou de Bercy en avril 2016, à confirmer sa position. On ne convaincra pas nos concitoyens que nous voulons la transparence si l'on traite différemment puissants et misérables, si l'on donne le sentiment que certains peuvent négocier et passer entre les gouttes. C'est une question de morale, de vertu comme on dit en République, mais aussi d'efficacité. Tout l'intérêt d'une procédure judiciaire réside dans l'ouverture de l'enquête judiciaire grâce à laquelle on parvient à caractériser le délit. Souvenez-vous des difficultés qui ont été rencontrées pour poursuivre ceux qui ont recouru à la technique dite du carrousel de TVA.

Mon amendement autorise un agent à solliciter directement le juge, il ne lève pas totalement le verrou de Bercy.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Me voici embarrassé par ces propositions qui relèvent davantage de la commission des finances que de celle des lois.

Le 22 juillet 2016, le Conseil constitutionnel a jugé constitutionnel le fait de confier à l'administration fiscale la lutte contre la fraude. Le but est, non de faire rendre gorge au contribuable fraudeur, mais de lui faire rendre l'argent. Le verrou de Bercy est dans l'intérêt de la Nation. J'ajoute qu'il ne fait nullement obstacle à une procédure judiciaire pour fraude fiscale. Par prudence, donc, avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je partage l'avis de votre rapporteur. D'autant que ces quatre amendements sont un peu éloignés de l'objet de la loi.

La saisine de la Commission des infractions fiscales est une garantie procédurale pour les contribuables. On ne peut pas dire que la suppression du verrou de Bercy est de nature à garantir l'égalité de traitement des citoyens. Ce serait laisser entendre que la pratique de l'administration fiscale n'est pas guidée par l'intérêt général. Le Gouvernement ne partage bien évidemment pas ce soupçon. Il est nécessaire de définir une politique pénale ad hoc pour ne pas surpénaliser la fraude fiscale.

La plupart du temps, l'application des pénalités fiscales suffit à réparer les torts. La procédure judiciaire, cela est fixé dans la jurisprudence constitutionnelle, doit être réservée aux fraudes les plus graves. Retrait, sinon rejet.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Parler de « surpénalisation de la fraude fiscale » ne manque pas de sel... Un traitement particulier est réservé à la délinquance financière : tout ce qui concerne l'argent se négocie. Si donner aux citoyens l'assurance que la même justice s'applique dans tous les cas n'est pas de nature à rétablir leur confiance, qu'est-ce qui le sera ?

M. Alain Anziani.  - Merci à Mme Goulet d'avoir rappelé le combat que je mène depuis des années pour lever le verrou de Bercy et, en particulier, à l'occasion de la loi de 2013 dont j'étais le rapporteur.

L'initiative des poursuites appartient au Parquet, sinon en matière fiscale. Les professionnels du droit condamnent cette exception. La Cour des comptes, également, ne s'est pas montrée tendre sur le sujet ; elle a rappelé qu'il vaut mieux être un fraudeur millionnaire qu'un maçon portugais. Le second aura tôt fait de se retrouver devant le tribunal quand le premier pourra négocier en mettant des millions sur la table.

Mme Nicole Bonnefoy.  - Très bien !

M. Alain Anziani.  - Selon Bercy, grâce au verrou, l'État récupérerait plus d'argent. C'est dire la confiance en la justice... Enfin, si ces amendements n'ont rien à voir avec la confiance, la transparence et la moralisation, je ne sais quelles propositions y ont trait. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, communiste républicain et citoyen, La République en marche, Union centriste et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Philippe Dominati.  - Ces amendements, que je ne voterai pas, me semblent néanmoins utiles. Si le Gouvernement veut conserver un système différencié, il faudra le perfectionner et faire en sorte que l'administration fiscale traite des cas semblables en suivant la même approche.

M. André Reichardt.  - Je voterai ces amendements pour les mêmes raisons que M. Anziani. Ils sont de bonne politique, nous sommes dans une période de moralisation. En revanche, je ne voterai pas la proposition de Mme Goulet : pourquoi créer une exception ? Il y en a assez de ces atteintes régulières aux personnes soumises à l'obligation de déclaration par la loi relative à la transparence.

M. Éric Bocquet.  - Pour éclairer nos débats, un exemple : Google doit 1,1 milliard d'euros à la République française ; que la firme américaine ne paiera pas, a-t-on annoncé le 14 juin dernier. Il y a de quoi s'inquiéter... (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et socialiste et républicain)

M. le président.  - L'amendement de M. Bocquet est adopté. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen, socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux et M. Joël Labbé applaudissent également.)

L'amendement n°41 est adopté et devient un article additionnel.

Les amendements nos203 rectifié bis, 68 et 7 rectifié sont sans objet.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°92, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 2

Après les mots :

déontologie parlementaire

insérer les mots :

et avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

Mme Éliane Assassi.  - Il s'agit d'associer la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique à la prévention des conflits d'intérêts au Parlement. Je le dis d'autant plus tranquillement que je suis membre du comité de déontologie du Sénat.

Des progrès ont été accomplis. Dès 2011, la Haute Assemblée a prévu un dispositif de déclaration. Pour autant, il faut sortir de l'entre-soi. La Haute Autorité, par son expérience et son statut indépendant, nous sera une ressource précieuse.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable : ce n'est pas le rôle de la Haute Autorité. Sauvegardons l'autonomie des assemblées.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. Le Gouvernement a la plus grande confiance dans les assemblées.

M. Alain Fouché.  - Très bien !

L'amendement n°92 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°141, présenté par M. Marie, Mme S. Robert, M. Botrel, Mmes Perol-Dumont et Lepage et MM. Daudigny, Lalande, Carcenac et Montaugé.

Mme Sylvie Robert.  - Cet amendement rétablit la définition édictée à l'article 2 de la loi de 2013. Sur le fond, il serait problématique que les conflits d'intérêts public-public soient écartés de cette loi. Un parlementaire siégeant, y compris au titre de son mandat parlementaire, dans un établissement public ou une société d'aménagement peut se retrouver en situation de conflit d'intérêts public-public.

M. le président.  - Amendement identique n°182 rectifié, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

M. Joël Labbé.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Il n'y a pas de conflit d'intérêts entre intérêts publics : l'essence même de notre mission est de les concilier.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Des conflits entre un intérêt public et un intérêt public ? C'est se tromper lourdement sur la nature de notre mission. Comme l'a dit le rapporteur, nous passons notre temps à arbitrer entre des intérêts publics. L'intérêt général naît de la confrontation des points de vue, de notre débat collectif.

Je vous félicite, madame la garde des sceaux, de ne pas avoir repris la définition de la loi de 2013. Avec de telles idées, les personnes qui s'y connaissent un tant soit peu sur un sujet ne pourront plus s'exprimer dessus. (Mme Sophie Primas applaudit.)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet amendement, déposé dans un but louable, aboutirait à une contradiction perpétuelle. Nous sommes tous élus d'un département. On pourrait nous accuser d'utiliser notre mandat national au profit d'un intérêt local parce que nous avons défendu tel projet d'aménagement ou évoqué une entreprise en difficulté...

Élus de la République, il nous appartient de délibérer entre des intérêts publics pour trouver l'intérêt de la Nation.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Excellent !

Les amendements identiques nos141 et 182 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°228 rectifié ter, présenté par Mme Aïchi, MM. Delcros, Longeot, Luche, Capo-Canellas, Médevielle et Kern et Mme Doineau.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, notamment à l'égard de la composition et du fonctionnement des groupes interparlementaires d'amitié

Mme Leila Aïchi.  - Cet amendement, comme l'amendement n°226 rectifié ter, vise à éviter toute dérive au sein des groupes d'amitié parlementaires. J'y suis très attachée, valorisons-les en prévoyant que les assemblées adoptent un ensemble de règles pour y prévenir les conflits d'intérêts.

M. le président.  - Amendement n°226 rectifié ter, présenté par Mme Aïchi, MM. Delcros, Longeot, Luche, Médevielle, Kern, Bonnecarrère et Gabouty et Mme Doineau.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque assemblée parlementaire définit les conditions dans lesquelles les députés ou les sénateurs souhaitant devenir membres d'un groupe interparlementaire d'amitié déclarent les intérêts qu'ils détiennent dans le pays entrant dans le champ de ce groupe, ainsi que ceux de leurs familles.

Mme Leila Aïchi.  - Défendu.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Conseil constitutionnel détermine ce qui figure dans le règlement des assemblées. Les dispositions que vous proposez relèvent de leur autonomie et engagent la compétence de leur bureau, non celle du législateur.

Exiger d'un parlementaire ayant de la famille à l'étranger que celle-ci décline ses intérêts représenterait une atteinte à la vie privée. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Cela relève de la compétence des bureaux des assemblées.

L'amendement n°228 rectifié ter n'est pas adopté.

L'amendement n°226 rectifié ter est retiré.

La séance est suspendue à 16 h 30.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 h 45.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. La séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.

Libération de Mossoul

M. Jeanny Lorgeoux .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Richard Yung applaudit également.) Après plusieurs mois de combats acharnés, le Premier ministre irakien, M. Haïder al-Abadi, a annoncé la libération de Mossoul, l'ancienne Ninive, berceau des civilisations assyriennes et chaldéennes qui a brillé de tant de feu et suscite tant de convoitises.

C'est le fruit de l'engagement sans faille des forces irakiennes et des Peshmergas kurdes, qui ont subi de lourdes pertes, mais aussi de la coalition internationale, dont la France.

C'est un coup fatal porté à l'État islamique et à sa folie destructrice, un pas vers la reconstruction d'un Moyen-Orient qui a soif de paix et de stabilité. Mossoul est libérée, mais c'est un champ de ruines ; sa population sort de l'enfer. Comment sauver ces vies hagardes, réenclencher la vie et l'économie ?

La reconquête de Raqqa semble en bonne voie et ouvre un horizon nouveau pour la Syrie. Je salue l'action de nos forces armées.

N'y a-t-il pas là une opportunité pour relancer un processus politique régional aujourd'hui enlisé ? Comment la France, dont la position a évolué, compte-t-elle y prendre sa part ?

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Jeanny Lorgeoux.  - Quels partenariats régionaux et diplomatiques devons-nous nouer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain, sur plusieurs bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs des groupes Union Centriste et Les Républicains)

Mme Florence Parly, ministre des armées .  - Le Premier ministre irakien a annoncé dimanche la nouvelle de la libération de Mossoul, occupée par l'État islamique depuis la proclamation d'un soi-disant califat à l'été 2014. Même s'il reste des poches de résistance, c'est une grande victoire que nous devons à la ténacité et au courage des forces irakiennes, accompagnées par les Peshmergas et par la coalition internationale à laquelle participait la France : nous les avons appuyées grâce à notre aviation basée en Jordanie et dans les Émirats arabes unis, à notre artillerie en périphérie de Mossoul, fourni du matériel, des renseignements et contribué à la formation des unités.

Je rends hommage aux militaires français déployés au Levant. Mais beaucoup reste à faire. Daech continue de contrôler de nombreux territoires en Irak et en Syrie. Tous les efforts portent sur la reconquête de Raqqa, qui est en bonne voie.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Florence Parly, ministre.  - La reconquête ne sera pas seulement militaire : un processus politique et un accompagnement économique devront être organisés sous l'égide de la coalition. (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain)

Taxation des poids lourds

Mme Anne-Catherine Loisier .  - Le Gouvernement a affiché sa volonté de voir les poids lourds participer davantage au financement des infrastructures, sans pour autant raviver la polémique de l'écotaxe, abandonnée en 2014.

Expérimentation dans les régions volontaires, péages sur les routes nationales, taxe spécifique dédiée aux besoins en équipement, telles sont les pistes évoquées. Je soutiens ces propositions qui permettent de financer l'entretien du réseau et de soulager les collectivités propriétaires, mais j'attire votre attention sur les milliers de riverains qui subissent les nuisances liées au transfert des poids lourds vers les voies non payantes. Nombre de nos voisins ont mis en place des taxes en ce sens. Comment comptez-vous mettre en oeuvre cette politique, et dans quels délais ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union centriste)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Il ne s'agit pas de revenir à l'écotaxe, mais de répondre au problème du juste financement des infrastructures. Le réseau de transport se dégrade, tout comme la qualité de l'environnement des villes et villages traversés par ces infrastructures. La priorité est à l'entretien et à la rénovation du réseau, il en va de la sécurité. Votre commission de l'aménagement du territoire en a parlé en février lors de sa table ronde.

M. Michel Raison.  - C'est vrai.

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - Nous sommes face à une impasse financière de 10 milliards d'euros, addition des engagements pris par les précédents gouvernements.

Des solutions innovantes peuvent être mises en place, comme au sud de Bordeaux ou sur la route Centre-Europe Atlantique : le long transit est soumis à péage, pas les trajets du quotidien. Autre solution : les vignettes, sur le modèle britannique ou allemand. L'objectif est de dégager de nouvelles ressources tout en encourageant les comportements les plus vertueux. Tous ces points seront à l'ordre du jour des Assises de la mobilité en septembre prochain. (Applaudissements sur quelques bancs au centre)

Réforme de la taxe d'habitation (I)

M. Pierre Cuypers .  - Monsieur le Premier ministre, alors que certaines promesses en faveur du pouvoir d'achat ont disparu, telle la défiscalisation des heures supplémentaires, il a été précisé hier, après de nombreux revirements, que l'exonération de 80 % des contribuables de la taxe d'habitation entrerait en vigueur progressivement dès 2018.

Le président de la République y voit un impôt lourd, inéquitable, dont le calcul obsolète est injuste. Où est donc la justice pour les 20 % de contribuables qui y resteront assujettis ? Où est la justice alors que la taxe foncière s'appuie sur les mêmes valeurs locatives ?

Certes, son mode de calcul est obsolète car les valeurs cadastrales n'ont pas été actualisées depuis 1970, et les taux d'imposition varient énormément d'une commune à l'autre.

Ne faudrait-il pas préférer une réforme structurelle ? La taxe d'habitation constitue la ressource principale de bien des petites communes ; l'État devra compenser une perte évaluée à 10 milliards d'euros. Où trouverez-vous cette somme dans votre budget ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Des exonérations, il y en a déjà pour douze millions de foyers - jusqu'à 10 500 euros de revenu annuel, pour lesquels l'État compense le manque à gagner aux communes.

Le Premier ministre a indiqué que la Conférence des territoires, qui réunira les élus locaux au Sénat le 17 juillet, discutera d'une compensation à l'euro près. Nous commencerons demain le débat d'orientation budgétaire : ce sera l'occasion de préciser le calendrier de cette suppression qui sera progressive, sur trois ans. Enfin, le coût n'est pas de 10 milliards d'euros, mais de 5 milliards d'euros ! (On fait mine d'être soulagé sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Philippe Dallier.  - Ouf !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - L'État interviendra sur la révision des valeurs locatives. Si c'était si facile, on l'aurait déjà fait depuis longtemps. (Mouvements divers) Nous allons nous y atteler, avec le renouveau de la fiscalité locale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe La République en marche)

Réforme de la taxe d'habitation (II)

M. Philippe Esnol .  - Nous sommes nombreux à être interpellés par des élus inquiets de la réforme de la taxe d'habitation. Votre discours de politique générale, monsieur le Premier ministre, laissait penser que vous alliez prendre le temps de la concertation, indispensable pour trouver à terme des recettes pérennes pour les collectivités. La semaine dernière, M. Darmanin répondait à Bernard Delcros que les maires pouvaient être rassurés...

Dans les Yvelines, la taxe d'habitation représente 30 à 50 % du budget pour une vingtaine de communes, dont Conflans-Sainte-Honorine. Certes, il faudra réformer cet impôt inéquitable, mais sans pénaliser les collectivités qui ont déjà largement pris leur part dans le redressement des comptes publics.

Quelles mesures de compensation prévoyez-vous pour assurer la prévisibilité et donner aux communes des garanties à long terme ? Comment comptez-vous associer les élus locaux qui doivent financer les services publics de proximité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Vous avez raison, cette fiscalité locale est injuste. Les communes ne sont pas toutes dans la même situation, selon qu'elles sont rurales ou urbaines, riches ou pauvres : selon l'AMF, la taxe d'habitation représente 36 % des recettes des communes ; dans la mienne, 16 %, dans d'autres, 50 %...

L'injustice vaut aussi entre citoyens : un avocat libéral aisé peut très bien payer moins qu'un salarié en logement social. Il faut recalculer en tenant compte du pouvoir d'achat.

Les communes garderont-elles une autonomie fiscale ? Auront-elles les moyens de financer les services publics de proximité ? Deux fois oui. Le Premier ministre, qui lancera lundi 17 juillet la Conférence des territoires, m'a confié le soin de gérer le pacte financier avec M. Mézard et le ministre de l'intérieur. (Applaudissements sur certains bancs du groupe RDSE)

Plan climat et mix énergétique

Mme Delphine Bataille .  - L'Europe est en passe d'atteindre ses objectifs pour 2020 en matière d'émissions de gaz à effet de serre, d'efficacité énergétique et de production d'énergies renouvelables, nous rassure la Commission européenne dans son dernier rapport. Mais des difficultés demeurent. Malgré les objectifs ambitieux de la loi de transition énergétique, la France peinera à atteindre son objectif de 23 % d'énergies renouvelables en 2020. L'Allemagne ne parviendra pas à réduire ses émissions de CO2 de 40 % et a repoussé à 2040 la sortie du charbon.

Dans ce contexte, il faut encourager l'innovation pour faire face aux changements climatiques.

Ramener à 50 % la part du nucléaire d'ici 2025, comme le prévoit la loi, suppose de fermer dix-sept réacteurs, a dit hier le ministre de la transition écologique. Or le programme de rénovation de notre parc nucléaire vise à allonger la durée de vie des centrales et générera des retombées pour nos entreprises.

Quelle est votre vision du mix énergétique dans la lutte contre le réchauffement climatique ? Comment assurer la complémentarité des énergies de base et des énergies renouvelables ?

Il faudra aussi trouver un équilibre entre innovation et précaution et éviter tout attentisme.

Comment contribuer à cet objectif et valoriser la connaissance du scientifique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche et sur plusieurs bancs du groupe RDSE)

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Rien ne se fera dans la brutalité et le dogmatisme. (On apprécie.) J'ai souhaité ouvrir hier le débat sur le nucléaire : il doit être serein, cohérent et transparent. Il n'y a qu'un cadre, celui de la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui prévoit la consultation de tous les acteurs. Il doit être cohérent avec l'horizon fixé par la loi pour la transition énergétique, que nous avons reçue en héritage et qui est fort ambitieuse.

Il faut mettre tous les scénarios sur la table pour éclairer la décision, avec comme critères l'exigence de sûreté - qui suppose l'indépendance de l'ASN - et le potentiel de toutes les énergies, pour retrouver notre souveraineté énergétique.

Nous renforcerons le dialogue avec tous les acteurs, syndicats, industriels, associations. Les Français ont leur mot à dire. Nous proposerons des contrats de transition aux salariés comme aux territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche ; Mme Corinne Bouchoux, MM. Joël Labbé et Jean Desessard applaudissent également.)

M. Jean Desessard.  - Bravo !

Réforme de la taxe d'habitation (III)

Mme Cécile Cukierman .  - Les communes, premier échelon de la démocratie vivante, vont voir la taxe d'habitation transformée, pour 80 % des redevables, en dotation d'État. Cet impôt est injuste et les contribuables concernés seront, dans un premier temps, satisfaits. Or il s'agit clairement de faire passer la pilule amère de la hausse de la CSG et du gel du Smic, de la hausse des taxes sur l'essence et le tabac - et surtout de l'indécente exonération de l'ISF pour les fortunes mobilières. Avec la taxe d'habitation, vous donnez 3 milliards d'euros, à partager entre 28 millions de contribuables. Avec l'ISF, 3 à 4 milliards d'euros, à partager entre 330 000 contribuables !

Comment assurer aux collectivités territoriales les ressources qu'elles vont perdre, et qui assurent leur autonomie fiscale ? Ne serait-il pas préférable de prolonger et renforcer les abattements et dégrèvements actuels ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - En effet, certains contribuables doivent consentir un gros effort fiscal : dans votre commune, la taxe d'habitation est à 13,67 %, contre 9 % en moyenne dans votre département ; à Aubervilliers, ville gérée par votre famille politique, elle a augmenté de 7 % rien que l'an dernier. (Protestations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen) Tous les contribuables ne sont pas égaux devant l'utilisation de l'argent public !

Le 17 juillet, ici au Sénat, aura lieu la Conférence des territoires ; ce sera le lieu de la concertation avec les élus locaux.

Mme Éliane Assassi.  - Nous n'avons aucune information pour l'instant.

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Nous devrons lier l'autonomie fiscale et la responsabilité des élus, le service public et la réforme territoriale. On ne peut continuer à renforcer les exonérations de taxe d'habitation sans revalorisation des valeurs locatives. (Applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche)

Mme Nicole Bricq.  - Bravo, bonne réponse !

Mme Cécile Cukierman.  - Il est urgent d'apporter des réponses sur la compensation, dont on sait qu'elle ne sera pas intégrale, au grand dam des élus locaux des villes et des campagnes, qui ne sont pas invités lundi, que je sache ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Situation de l'entreprise GM&S

M. Jean-Jacques Lozach .  - Le 6 juillet dernier, le ministre de l'économie a assuré qu'une solution était proche pour la reprise de l'équipementier automobile creusois GM&S Industry, en liquidation judiciaire. Or la confirmation des engagements de commandes de PSA et de Renault se fait toujours attendre.

La disparition de cette entreprise serait dramatique pour La Souterraine, cité de 5 000 habitants, et affecterait tout un bassin de vie à cheval sur trois départements. Espérons que votre optimisme se concrétisera : après trois redressements judiciaires en moins de huit ans, les salariés sont à bout, d'où des réactions virulentes.

À quel stade en sont les discussions ? Une réunion de la dernière chance se tient aujourd'hui même à Bercy - à laquelle les sénateurs du département n'ont pas été conviés.

Je salue la mobilisation de la région Nouvelle-Aquitaine dans ce dossier ainsi que l'implication de l'État. Ces efforts ne sauraient rester vains. Que fait l'État pour assurer un avenir pérenne à ce site ? Quelle sortie de crise pour ses salariés, leurs familles et le territoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et sur plusieurs bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement .  - En effet : face à un troisième plan de redressement judiciaire, la colère des salariés est légitime. L'objectif est celui d'une reprise pérenne pour le site. Ce n'est pas une question d'optimisme, mais de volontarisme.

Bruno Le Maire et Benjamin Griveaux réunissent en ce moment à Bercy les acteurs du dossier : les représentants des salariés, la CGT-FO, les clients Renault et PSA, le repreneur GMD et les collectivités. Il s'agit, dans un esprit de dialogue constructif, de chercher les solutions les plus favorables possibles pour les salariés, dont je salue l'esprit de responsabilité.

Nous avons déjà obtenu que Peugeot et Renault renforcent leurs engagements, à 22 millions d'euros. Il nous faut également obtenir des engagements d'investissements sur le site par le repreneur.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État.  - S'agissant de la dépollution du site comme des salariés qui ne seront pas retenus dans l'offre, il faudra mobiliser tous les moyens d'accompagnement et de formation professionnelle pour que ce site retrouve de l'espérance. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe La République en marche)

Situation politique à Montpellier

M. Jean-Pierre Grand .  - Mercredi dernier à Montpellier, un conseil de métropole extraordinaire était convoqué pour remplacer sept vice-présidents. Ces élus d'expérience, six maires et un premier adjoint, de toutes sensibilités, représentaient les principales villes de notre intercommunalité. Ils ont été destitués au seul motif qu'ils ont refusé de s'inscrire au groupe En marche ! constitué par le président de la métropole. (Vives exclamations à droite)

M. Henri de Raincourt.  - Quelle honte !

M. Jean-Pierre Grand.  - Nos concitoyens découvrent horrifiés ces méthodes d'un autre temps et le doute s'installe sur ce nouveau parti politique...

M. Henri de Raincourt.  - C'est la dictature !

M. Jean-Pierre Grand.  - D'autant que le président de la métropole revendique à tout propos le soutien du chef de l'État !

Mes convictions gaullistes, ma conception de l'intercommunalité ne sauraient s'accommoder de ce mépris de la démocratie locale. Je veux croire qu'il ne s'agit là que de la dérive d'un homme. La confiance dans la vie politique impose aux élus le respect de la démocratie, sur tout le territoire et dans toutes les instances. Cette affaire est suffisamment grave pour que le Gouvernement rassure le Sénat sur sa volonté de faire respecter partout les valeurs de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Union centriste ; M. Henri Cabanel applaudit également.)

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Union centriste) Le conseil de Montpellier Méditerranée Métropole a en effet partiellement renouvelé son exécutif. (Sourires)

Le code général des collectivités territoriales régit les délégations de fonction par le président de la métropole à des vice-présidents et encadre les conditions dans lesquelles elles peuvent être retirées. La composition des exécutifs s'efforce en général de refléter la pluralité des communes membres, gage d'un fonctionnement harmonieux des métropoles, auquel le Gouvernement est attaché.

Cependant, il n'appartient pas à celui-ci de se prononcer en opportunité sur un cas particulier. (On ironise à droite.) La libre administration des collectivités territoriales est un principe consacré par la Constitution, à l'article 72 alinéa 3, auquel la Haute Assemblée veille scrupuleusement. La régularité juridique d'une modification au sein d'un exécutif local relève du contrôle de légalité, voire du juge administratif. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union centriste et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains)

Ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse

Mme Brigitte Micouleau .  - Depuis le 1er juillet, Rennes n'est plus qu'à une heure vingt-cinq de Paris, Bordeaux à deux heures. Mais lors des festivités en gare de Bordeaux, vos déclarations ambiguës sur le prolongement de la LGV jusqu'à Toulouse ont jeté un froid.

Malgré l'avis négatif rendu par la commission d'enquête en mars 2015 pour les LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax, le Gouvernement s'était engagé à poursuivre ces projets et signait, le 5 juin 2016, le décret de déclaration d'utilité publique (DUP) de ces lignes.

L'annulation de la DUP par le tribunal administratif de Bordeaux, le 28 juin dernier, était fondée principalement sur la fragilité du financement. Or un comité de financeurs, regroupant toutes les collectivités concernées, a été lancé il y a un an pour répondre à cet enjeu. Il a mandaté un cabinet indépendant qui fera bientôt des propositions innovantes de financement : le motif d'annulation de la DUP n'aura plus objet.

Comment Toulouse, première métropole de France en termes de croissance, pourrait-elle être exclue du réseau à grande vitesse ? Le candidat Macron avait d'ailleurs affirmé son plein soutien à cette LGV.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Brigitte Micouleau.  - Pouvez-vous confirmer la volonté de l'État de poursuivre ce projet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ainsi que sur plusieurs bancs des groupes Union centriste et RDSE)

M. Éric Doligé.  - Il n'y a plus d'argent !

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Je tiens à vous rassurer. L'État et SNCF Réseau vont faire appel de l'annulation de la DUP. Depuis le 1er juillet, Bordeaux est à deux heures de Paris et Toulouse à quatre heures dix. Je mesure les attentes des Toulousains.

Mais voilà, la branche Bordeaux-Toulouse nécessite 6 milliards d'euros, alors même qu'il manque 10 milliards d'euros pour assurer la pérennité du réseau et honorer les engagements du précédent gouvernement, dont 7 milliards pour les nouvelles infrastructures.

C'est pourquoi le président de la République a annoncé une pause afin de rechercher une trajectoire financière soutenable pour ce projet, dans la concertation.

Je sors d'une réunion avec le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine et rencontrerai bientôt la présidente du conseil régional d'Occitanie. Je ne doute pas que nous arrivions ensemble à une solution raisonnable.

Canal Seine-Nord

Mme Catherine Génisson .  - J'associe à cette question mes collègues des départements du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme.

Le calendrier du canal Seine-Nord a déjà fait l'objet d'une question de notre collègue Jean-François Rapin qui a jeté un pavé dans la mare - ou dans le canal... Ce projet structurant a été relancé lors du Grenelle de l'environnement en 2007-2008 ; après un rapport de 2012, une mission de reconfiguration en 2013, l'Union européenne a annoncé en 2015 une participation d'1,8 milliard d'euros - soit 42 % du coût. Les acteurs institutionnels s'étaient engagés pour un début des travaux fin 2017. Gérald Darmanin, alors premier vice-président du conseil régional des Hauts-de-France, plaidait pour un démarrage rapide.

En mars 2017, le président de la République, alors candidat, confirmait les trois grands projets en cours : Bordeaux-Toulouse, Lyon-Turin et canal Seine-Nord. Ce dernier ne peut plus attendre. Le Gouvernement doit passer à l'action. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Éric Bocquet applaudit également.)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Je mesure pleinement les interrogations que suscite la pause annoncée par le président de la République. Je sais l'attachement des élus des Hauts-de-France à ce projet et les attentes qu'il a fait naître. Mais des engagements ont été pris sans vision d'ensemble : ils représentent une impasse de 10 millions d'euros. (On s'indigne sur les bancs du groupe socialiste et républicain.)

Mme Valérie Létard.  - Il s'agit de 25 000 emplois !

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - L'État ne dispose pas aujourd'hui des ressources nécessaires.

En organisant les Assises de la mobilité, qui associeront l'ensemble des acteurs, nous identifierons les besoins de chaque territoire afin d'élaborer une vision d'ensemble adaptée aux ressources mobilisables.

M. Didier Guillaume.  - Il faudra aller le dire aux habitants.

Mme Élisabeth Borne, ministre.  - Cette approche ne peut qu'être partagée par le Sénat, si j'en crois ses nombreux rapports... Nous ne doutons pas que nous parviendrons à une solution soutenable financièrement.

M. Didier Guillaume.  - Très mauvaise réponse, qui n'est pas à la hauteur des enjeux.

La séance est suspendue à 17 h 35.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

La séance est reprise à 17 h 45.

Demande d'avis sur une nomination

M. le président.  - Conformément aux dispositions de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 relatives à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution et en application de l'article L. 621-2 du code monétaire et financier, M. le Premier ministre, par lettre en date du 11 juillet 2017, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l'avis de la commission du Sénat compétente en matière d'activités financières sur le projet de nomination de M. Robert Ophèle aux fonctions de président de l'Autorité des marchés financiers.

Cette demande d'avis a été transmise à la commission des finances.

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons l'examen du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l'action publique.

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

M. le président.  - Amendement n°192 rectifié bis, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elle désigne un déontologue pour l'assister.

M. Joël Labbé.  - L'article 4 quater de l'ordonnance du 17 novembre 1958 énonce que : « le Bureau de chaque assemblée, après consultation de l'organe chargé de la déontologie parlementaire, détermine des règles en matière de prévention et de traitement des conflits d'intérêts. Il veille à leur respect et en contrôle la mise en oeuvre. »

Je propose d'y ajouter la nomination d'un déontologue.

Lors de la consultation citoyenne encore en cours, un grand nombre de participants se sont étonnés que les parlementaires, juges et parties, soient en charge de déterminer les règles de déontologie.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le comité déontologique du Sénat est remarquablement présidé par un collègue qui a toutes les qualités d'indépendance et l'élévation morale requises. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis, au nom du principe d'autonomie des assemblées.

M. Joël Labbé.  - Je ne remets pas en question le comité de déontologie. Il s'agit de rétablir la confiance en apportant une garantie supplémentaire. N'oublions pas que nos concitoyens nous regardent.

L'amendement n°192 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°109, présenté par Mme S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

veille à

par les mots :

est tenu de

Mme Sylvie Robert.  - Amendement rédactionnel.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission ne croit pas qu'il le soit. Selon l'article 27 de la Constitution, « tout mandat impératif est nul ». On ne peut nier ainsi l'autonomie d'appréciation des parlementaires. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je partage l'avis de la commission.

M. Charles Revet.  - Très bien.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Que signifie ici, madame la garde des Sceaux, le verbe « veiller à » ? S'il y a un conflit d'intérêts avéré, il faut y mettre fin, le parlementaire est tenu de le faire - sans qu'il s'agisse d'une obligation immédiate.

L'amendement n°109 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°110, présenté par Mme S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elle peut, après avis de l'organe chargé de la déontologie parlementaire, saisir la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, en cas de manquement répété.

Mme Sylvie Robert.  - Le texte est muet sur le cas où un parlementaire demeurerait en situation de conflit d'intérêts. Le comité de déontologie de chaque assemblée pourrait saisir la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique lorsqu'il constate des irrégularités en la matière.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Ce n'est pas le rôle de la Haute Assemblée de porter une appréciation sur les conflits d'intérêts. Elle n'est pas composée à cet effet. Il appartient au Bureau de chaque assemblée, après avis du comité de déontologie parlementaire, de mettre en oeuvre les procédures précises et efficaces de son Règlement.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable, car la Haute Autorité n'est pas l'organe pertinent. Il appartient aux assemblées de prévoir les sanctions appropriées en cas de conflit d'intérêts.

L'amendement n°110 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°184 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mmes Archimbaud et Bouchoux.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Le bureau de chaque assemblée prévoit, après consultation de l'organe chargé de la déontologie parlementaire, les conditions dans lesquelles les cadeaux, avantages et invitations en France et à l'étranger, de valeur supérieure à 150 euros, d'un organisme extérieur au Sénat acceptés par un parlementaire sont rendus publics. »

M. Joël Labbé.  - L'instruction générale du Bureau du Sénat prévoit déjà une certaine transparence pour les invitations de valeur de plus de 150 euros reçus par les sénateurs. Toutefois, si les cadeaux doivent faire l'objet d'une déclaration, aucune mesure de publicité n'est explicitement prévue, à la différence des invitations à l'étranger. Cet amendement tend à combler cette lacune.

Nous devrons avoir une réflexion plus large à l'occasion du prochain renouvellement du Sénat, pour introduire plus de transparence et de démocratie dans notre fonctionnement.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Des règles existent déjà. Laissons notre assemblée, pionnière dans ce domaine, continuer d'assumer sa fonction sans créer de procédure redondante. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - L'instruction générale du bureau du Sénat prévoit déjà des mesures. Nul besoin d'en ajouter. Avis défavorable.

M. Alain Fouché.  - Les sociétés de lobbying comme Boury & Co s'agitent et passent leur temps à inviter des parlementaires dans les plus grands restaurants de Paris, aux frais de fédérations et parfois du Gouvernement. Mettons fin à ce marchandage qui coûte trop cher tant aux sociétés qu'aux ministères.

L'amendement n°184 rectifié bis n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous allons débattre toute la semaine de démocratie, de confiance et de transparence. L'amendement que j'avais présenté, et qui retirait de la liste des documents non communicables au public les comptes rendus des délibérations ministérielles et réunions interministérielles, méritait d'être débattu. Il faut aussi faire la transparence sur les décisions de l'exécutif !

Or cet amendement a été déclaré irrecevable, sous prétexte qu'il s'agirait d'un cavalier. Je rappelle pourtant que l'article 48 de notre Règlement déclare recevables les amendements présentant un lien même indirect avec le texte en discussion. Hélas, la plus grande opacité entoure les décisions d'irrecevabilité dans notre assemblée... Cette autocensure empêche les parlementaires de mener à bien leur mission. Je demande que l'article 48 soit, à l'avenir, appliqué à la lettre. Lorsque le Gouvernement oublie une disposition essentielle pour la cohérence de son projet, nous ne pouvons pas nous taire, sinon c'est la confiance que nos concitoyens déclareront irrecevable. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain)

L'article 2, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°187 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa et Archimbaud.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 4 quinquies de l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il détermine également les règles de transparence appliquée aux documents transmis par des représentants d'intérêts, ainsi que les rencontres et rendez-vous pris ou organisés avec ces représentants. »

M. Joël Labbé.  - On nous dit souvent : « Vous avez de belles idées, mais vous ne faites pas le poids face aux lobbies. » C'est inacceptable. Il nous faut prendre des mesures pour garantir la transparence. L'article 4 quinquies de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires prévoit que « le Bureau de chaque assemblée parlementaire détermine les règles applicables aux représentants d'intérêts entrant en communication » avec les parlementaires et les organes des assemblées. Cet amendement renforce la transparence sur les documents fournis par les représentants d'intérêts, comme sur les rencontres organisées par ces mêmes représentants. C'est essentiel pour dissiper suspicions et fantasmes.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Le Bureau de chaque assemblée tient de la Constitution et non de la loi le pouvoir de réglementer le travail des parlementaires. C'est ce que fait le Bureau du Sénat depuis longtemps, il lui est loisible de préciser encore les règles. La loi Sapin 2 vient d'ailleurs de créer un registre des représentants d'intérêts. Attendons un peu ! Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. La loi de décembre 2016 a mis en place un répertoire numérique qui rend publiques les relations entre lobbies et parlementaires, et le Bureau des assemblées prend les mesures nécessaires.

Mme Nathalie Goulet.  - Il suffirait que nos collaborateurs refusent systématiquement ces liasses d'amendements prérédigés, voire prédigérés ! C'est simple.

M. Joël Labbé.  - C'est un amendement d'appel à l'intention du futur Bureau du Sénat. Même si des textes existent, l'influence des lobbies persiste.

L'amendement n°187 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°186 rectifié, présenté par M. Labbé et Mmes Benbassa, Bouchoux et Archimbaud.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le chapitre IX du titre II du livre I du code électoral, il est inséré un chapitre ... ainsi rédigé :

« Chapitre ...

« Fin de mandat

« Art. L. 178-...  -  L'exercice d'une activité de conseil au cours des douze mois suivant la fin de mandat d'un député est soumis à une autorisation de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

« Lorsque la Haute Autorité estime ne pas disposer de toutes les informations lui permettant de statuer sur la demande, elle invite l'intéressé, dans un délai maximum d'une semaine à compter de la réception de sa demande, à la compléter.

« En l'absence de décision expresse écrite contraire dans un délai de quinze jours, l'intéressé est réputé autorisé à exercer l'activité de conseil ».

M. Joël Labbé.  - Cet amendement soumet à autorisation, pendant un délai d'un an, les activités de conseil exercées à l'issue d'un mandat parlementaire afin d'éviter tout soupçon. Cette durée correspond à celle de l'indemnité différentielle de fin de mandat à taux plein des parlementaires. Le parlementaire concerné ne subirait donc pas de perte de revenu si le conseil était son activité principale avant sa prise de fonction.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable car l'amendement est inconstitutionnel.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. La persistance d'une règle d'incompatibilité au-delà de la fin du mandat serait difficile à justifier. D'ailleurs, tout risque de conflit d'intérêt disparaît au terme du mandat.

M. Joël Labbé.  - Soit.

L'amendement n°186 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°195 rectifié, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les trois derniers alinéas de l'article 18-2 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique sont supprimés.

M. Joël Labbé.  - L'article 25 de la loi Sapin 2 définit les représentants d'intérêts mais prévoit un certain nombre d'exceptions : organisations syndicales de fonctionnaires et de salariés, organisations professionnelles d'employeurs, associations cultuelles et associations d'élus. Cet amendement supprime ces exceptions, sauf le cas des élus dans l'exercice de leur mandat et des partis et groupements politiques dans le cadre de leur mission.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Je ne partage pas cet idéalisme parlementaire selon lequel tout contact avec la société civile nous contaminerait. Cela frise la fausse dévotion, la tartufferie. Nous menons de nombreuses auditions, nous avons besoin d'entendre les représentants des intérêts économiques et sociaux.

M. Charles Revet.  - Bien sûr !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Les organisations en question ont été exclues à dessein au terme d'un travail parlementaire approfondi qui ne date que de six mois. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. Le législateur a trouvé un équilibre dans la loi de décembre 2016.

M. Joël Labbé.  - J'ai beau m'appeler Labbé, je ne crois pas qu'on puisse me taxer de puritanisme. Bien sûr, nous devons avoir des rapports avec la société civile. Mais il s'agit ici du lobbying organisé. Nous devons rendre confiance à nos concitoyens.

Cela dit, je retire mon amendement.

L'amendement n°195 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°150, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 5° de l'article 18-3 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les projets d'amendement, de proposition de loi, de proposition de résolution transmis à des membres du Parlement. »

Mme Françoise Férat.  - Cet amendement impose aux représentants d'intérêts, dans le cadre prévu par la loi Sapin 2 de déclarer à la HATVP les projets d'amendements, de proposition de loi ou de résolution transmis à des parlementaires.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable à regret. Je ne veux pas que nous fassions de la HATVP un Léviathan alors que sa seule vocation est d'enregistrer nos déclarations d'intérêts et de patrimoine comme celle des présidents d'exécutifs locaux, et de vérifier que nous ne nous sommes pas enrichis pendant notre mandat. (Marques d'approbation sur de nombreux bancs) Il lui a été difficile de réunir les moyens nécessaires, même si elle a désormais atteint un régime de croisière.

Je reconnais toutefois qu'il serait intéressant de rendre publics les amendements des groupes d'intérêts. Je forme le voeu que nous trouvions une rédaction appropriée lorsque ce texte reviendra au Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable, ce n'est pas la mission de la HATVP.

M. Alain Marc.  - On n'arrivera jamais à déterminer la provenance d'un amendement. Mais on veut se faire plaisir...

L'amendement n°150 est retiré, de même que l'amendement n°227.

M. le président.  - Amendement n°193 rectifié, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 18-4 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il ne peut être attribué aux représentants d'intérêts une habilitation permanente pour l'accès aux enceintes des assemblées parlementaires. »

M. Joël Labbé.  - La police des assemblées relève de la compétence de leur président depuis le coup d'État du 18 brumaire an VIII. C'est lui qui fixe les règles d'accréditation et d'entrée au sein de l'assemblée.

Cet amendement a pour but d'inciter le Sénat et l'Assemblée nationale à prohiber, dans leur Règlement, l'attribution d'un accès permanent à des représentants d'intérêts. Il n'est pas justifiable qu'ils se promènent dans nos couloirs lorsqu'ils n'ont pas rendez-vous avec un parlementaire, pour glaner des informations ou exercer des pressions. Seuls les groupes influents ont d'ailleurs les moyens de le faire, quand d'autres, qui auraient aussi des choses à dire, ne le peuvent pas.

Nous devons pouvoir prendre nos décisions en notre âme et conscience, après être allés chercher les informations que nous souhaitons.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Mon âme et ma conscience ne sont pas exposés au moindre risque lorsque je rencontre le représentant d'un groupe d'intérêts.

M. Charles Revet.  - Heureusement !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Si les groupes d'intérêt sont licites - et vous ne proposez pas de les interdire - il faut bien qu'ils servent à quelque chose !

L'organisation du travail parlementaire relève non de la loi mais du Bureau des assemblées. Nous admettons en certains lieux du palais la présence de représentants d'intérêts, afin de pouvoir les rencontrer. Chacun en France doit pouvoir approcher les parlementaires ! Ce que la loi interdit, c'est la corruption, la prévarication, le conflit d'intérêts. Je suis donc très hostile à l'amendement sur le fond. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Pierre-Yves Collombat applaudit aussi.)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Le Gouvernement estime que les règles de prévention des conflits d'intérêts sont suffisantes. En outre, cela relève de la compétence des assemblées.

Mme Catherine Tasca.  - La loi n'a pas à intervenir sur ce terrain. Les amendements, malgré leurs excellentes intentions, empiètent sur un champ qui relève de la responsabilité propre de chaque assemblée. On a déjà trop tendance à le rogner ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain, au centre et à droite)

M. Marc Laménie.  - On peut comprendre les inquiétudes de M. Labbé, mais laissons à chacun une marge d'initiative et de liberté. Les séances de l'Assemblée nationale et du Sénat sont publiques. Ne ficelons pas tout, conservons de la souplesse. (« Très bien ! » à droite)

M. Joël Labbé.  - Je dois m'expliquer davantage. Que les questions agricoles ou alimentaires suscitent le débat entre nous, c'est normal. Mais est-il normal qu'un syndicat agricole, que je ne veux pas stigmatiser, dispose d'un collaborateur spécialement chargé du lobbying ?

M. Rémy Pointereau.  - Vous stigmatisez bel et bien !

M. Alain Fouché.  - Il y a aussi des lobbies écologistes !

M. Joël Labbé.  - Un autre syndicat, qui a aussi des arguments à faire valoir, n'est que trop peu entendu des parlementaires. C'est, une fois encore, un amendement d'appel au futur Bureau.

L'amendement n°193 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°235 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Arnell et Castelli, Mme Costes, M. Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La liste des déplacements en France et à l'étranger des parlementaires dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions est publiée par chaque assemblée.

M. Alain Bertrand.  - Je souhaite qu'on publie chaque année la liste des voyages des parlementaires dans le cadre des groupes d'étude ou d'amitié, missions, etc...

Mme Nathalie Goulet.  - C'est déjà fait !

M. Alain Bertrand.  - Il arrive qu'on dise que les élus se promènent aux frais de la princesse, ou du prince. Pour ma part, je ne suis pas très favorable à ces voyages dans tous les sens.

M. Alain Fouché.  - C'est l'inquisition !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis. Une telle disposition, inutilement complexe, serait disproportionnée et ne relève pas de la loi.

Mme Nathalie Goulet.  - Cette obligation existe depuis longtemps, la liste des voyages que nous effectuons est consultable en ligne.

L'amendement n°235 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Je salue la présence dans les tribunes de notre ancien collègue Daniel Hoeffel, qui fut longtemps vice-président du Sénat. (Applaudissements chaleureux)

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par Mme Lienemann et M. Leconte.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les emplois et fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce dans les conditions fixées au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution sont incompatibles avec le fait d'exercer ou d'avoir exercé, au cours des trois dernières années, les fonctions de dirigeant, de salarié ou de conseiller d'une société contrôlée, supervisée, subordonnée ou concernée par l'institution, l'organisme, l'établissement ou l'entreprise auquel cet emploi ou fonction se rattache.

II.  -  Aucune personne exerçant les emplois et fonctions mentionnés au I ne peut participer à une délibération concernant une entreprise ou une société contrôlée, supervisée, subordonnée ou concernée par l'institution, l'organisme, l'établissement ou l'entreprise dans laquelle elle a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat.

Les personnes exerçant les emplois et fonctions mentionnés au I ne peuvent, directement ou indirectement, détenir d'intérêts dans une société ou entreprise mentionnée au I.

L'article 432-13 du code pénal est applicable aux personnes visées au I, après la cessation de leur emploi ou de leur fonction.

Le non-respect de cet article est passible des sanctions prévues à l'article 432-13 du code pénal.

Un décret en Conseil d'État fixe le modèle de déclaration d'intérêts que chaque personne doit déposer au moment de sa désignation.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - J'ai plaisir à saluer à mon tour le président Hoeffel, qui avait accompagné le président Mitterrand en visite à Athis-Mons, dont j'étais maire.

Les conflits d'intérêts concernent aussi les hauts fonctionnaires, notamment ceux qui sont nommés en Conseil des ministres. Certains, après avoir travaillé dans une grande banque, rejoignent l'organisme chargé de la contrôler. C'est très fréquent, et très préjudiciable. La Hadopi, la Commission de régulation de l'énergie se sont dotées de règles, mais ce n'est pas le cas partout, et notamment pas dans la haute finance.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet amendement soulève une série de questions délicates. Il interdit de nommer à une fonction relevant de la procédure de l'article 13 de la Constitution une personne qui aurait travaillé dans une société, un organisme ou un établissement public se rattachant à cet emploi puis il prévoit qu'une personne ne pourrait pas participer aux délibérations si elle a, au cours des trois années précédentes, exercé des fonctions ou détenu un mandat dans la société, l'organisme ou l'établissement public concerné par la décision. Cela est parfaitement contradictoire. Surtout, si l'on quitte la théorie pour se pencher sur des cas pratiques, cela empêcherait la nomination à la tête de la Caisse des dépôts et des consignations d'une personne ayant auparavant dirigé une de ses filiales. Nous serions contraints de prendre un fonctionnaire de Bercy ou quelqu'un qui n'y connaît rien. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable également.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je maintiens mon amendement. Je veux bien en admettre l'imperfection technique mais il est un copié-collé de la loi Hadopi... On n'interdit pas, on empêche pour trois ans. Ces dispositions valent pour beaucoup de secteurs, dont l'énergie. Bien évidemment, ça ne vaudrait pas pour la banque et la finance ; comme par hasard !

M. Alain Vasselle.  - Je rappelle que nous avons légiféré dernièrement sur la déontologie des fonctionnaires. Je proposerai de fondre la Commission de déontologie et la HATVP pour traiter du pantouflage. Les préoccupations de Mme Lienemann sont légitimes.

Où s'arrêtera-t-on de légiférer ? Le président de la République l'a lui-même dit à Versailles : nous légiférons trop. Mieux aurait valu prendre le temps de la réflexion. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Pierre-Yves Collombat.  - « Une série de questions délicates » ? Et pour cause, cet amendement met en cause le système qui croît et embellit depuis trente ans : il est bâti sur la consanguinité, la porosité et les passages entre le public et le privé. La cogestion du pays par les intérêts financiers, les intérêts politiques les plus importants et ceux de la haute administration, c'est ça la France !

L'influence des milieux financiers passe par ce canal, bien plus que par la transmission de prospectus ou de propositions d'amendements aux parlementaires...

Certes, on ne réglera pas ce problème par un amendement. Pour autant, combien de temps encore allons-nous laisser perdurer cette confusion générale qui creuse le fossé entre les électeurs et nous !

M. Éric Doligé.  - Au risque d'en étonner certains - de toute façon il n'y a plus de frontières politiques dans cet hémicycle ! -, cet amendement me plaît. Nous allons délibérer durant quatre jours pour clouer les élus au pilori en restant silencieux sur les très hauts fonctionnaires. Je voterai l'amendement de Mme Lienemann, même si sa rédaction est imparfaite.

D'ailleurs, une question : ne va-t-on pas bientôt nous demander de nous déporter sur tous les textes de loi concernant l'avenir des élus ? (Sourires) Madame Lienemann, je me ferai un plaisir de voter votre proposition. (M. Yves Pozzo di Borgo et Mme Evelyne Yonnet applaudissent.)

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°4 rectifié, mis aux voix par assis et levé, est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et Union centriste)

ARTICLE 2 BIS

M. le président.  - Amendement n°206, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Cet amendement supprime le registre « de déport » pour les membres du Gouvernement. Ce serait méconnaître le principe de séparation des pouvoirs, dont le Conseil constitutionnel a jugé qu'il s'applique à l'égard du président de la République et du Gouvernement.

L'article 2 de la loi de 2013 a renvoyé au pouvoir réglementaire les règles de prévention des conflits d'intérêts concernant les membres du Gouvernement.

En précisant que le registre doit mentionner les cas dans lesquels un membre du Gouvernement s'abstient de participer à la délibération du Conseil des ministres, cet article, introduit par votre commission, prétend imposer au Gouvernement de rendre publics certains éléments de la délibération du Conseil des ministres, ce qui constitue une atteinte au secret des délibérations.

Enfin, le Gouvernement dispose déjà des instruments de protection suffisants. L'article premier de la loi du 11 octobre 2013 dispose que les membres du Gouvernement « exercent leurs fonctions avec dignité, probité et intégrité ».

M. Charles Revet.  - Ne faudrait-il pas rappeler qu'il en est de même pour les parlementaires ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Je ne dis pas autre chose depuis hier.

Lorsqu'un ministre estime se trouver en situation de conflit d'intérêts, il en informe le Premier ministre qui juge les responsabilités qu'il doit reprendre.

Ce système, qui respecte la séparation des pouvoirs, est suffisant et effectif. À titre d'exemple, Agnès Buzyn, ministre de la santé, n'intervient pas sur l'Inserm dirigé par son époux.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La commission s'en tient à son texte. Il est singulier que le Gouvernement, si prompt à intervenir sur le travail parlementaire, se montre si frileux vis-à-vis du travail gouvernemental... (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Les Républicains et Union centriste)

La séparation des pouvoirs ? Le Sénat est loin de l'opposer systématiquement au Gouvernement sur les sujets qui le concernent.

Quant au secret des délibérations en Conseil des ministres, nous demandons seulement un signalement des déports dans le compte rendu. Cela se pratique dans les conseils municipaux où la décision est pareillement collégiale car, de la base au sommet, la République fonctionne de la même façon.

Je souhaite la symétrie dans les exigences de transparence. Pourquoi le travail gouvernemental serait-il au-dessus de tout soupçon quand le travail parlementaire ne le serait pas ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Union centriste ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le Gouvernement ne cherche pas à s'éviter des règles déontologiques qu'il imposerait aux assemblées. Cet article, s'il demeurait dans la loi, constituerait une injonction au Gouvernement.

Mme Annie Guillemot.  - Et nous, alors ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Vous, parlementaires, examinez une loi qui vous concerne et qui sera soumise à votre vote ; cela est différent. (Marques de désapprobation)

Mme Éliane Assassi.  - C'est tout de même un projet de loi, un texte proposé par le Gouvernement !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le Conseil des ministres ne peut être comparé au conseil municipal : ce n'est pas une assemblée, c'est un organisme constitutionnel.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Ayant siégé dans les deux, je peux me prévaloir d'une certaine expérience. Le fait qu'ils ne sont pas de même nature n'empêche pas que les règles puissent être communes pour prévenir les conflits d'intérêts. Du reste, le Conseil constitutionnel n'a rien trouvé à redire à la loi de 2013 ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et Union centriste)

M. Bruno Sido.  - Très bien !

M. Jean-Pierre Sueur.  - En effet, la loi de 2013, dont j'étais l'un des rapporteurs, prévoyait des dispositions sur l'exécutif. Tous les pouvoirs sont soumis à la loi. Si nous acceptions le contraire, nous nous empêcherions de légiférer sur toute matière relevant de l'exécutif ! La commission des lois a bien fait de suivre son rapporteur. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes socialiste et républicain, Union centriste et Les Républicains)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Pardonnez-moi de faire référence encore une fois au Conseil constitutionnel... En 2011, il a précisé que le législateur ne peut intervenir dans l'organisation du Gouvernement et, donc, sur le Conseil des ministres. (Protestations sur tous les bancs)

M. Jean-Pierre Sueur.  - La mesure concerne l'exercice du pouvoir exécutif, et non l'organisation du Gouvernement !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Vous avez parfaitement raison, madame la ministre, mais nous ne touchons pas là à l'organisation du Gouvernement. Croyez bien que je veille au respect scrupuleux de la Constitution. (Applaudissements)

L'amendement n°206 n'est pas adopté.

L'article 2 bis est adopté.

Commission (Candidature)

M. le président.  - J'informe le Sénat que le groupe RDSE a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.

Cette candidature a été publiée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du Règlement.

La séance est suspendue à 19 heures.

présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président

La séance reprend à 21 heures.

Commission (Nomination)

M. le président.  - Je rappelle au Sénat que le groupe RDSE a présenté une candidature pour la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.

Le délai prévu par l'article 8 du Règlement est expiré. La présidence n'a reçu aucune opposition. En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Raymond Vall membre de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.

Rétablir la confiance dans l'action publique (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la suite de la discussion du projet de loi et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l'action publique.

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 2 bis

M. le président.  - Amendement n°278, présenté par MM. Baroin, Bonhomme, Bouchet et Calvet, Mme Canayer, MM. Cantegrit et Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Cuypers, Danesi et Darnaud, Mmes Deroche, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, M. Doligé, Mme Estrosi Sassone, MM. Forissier, Fouché, Frassa, Frogier et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, M. Guené, Mme Hummel, M. Husson, Mme Kammermann, MM. Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. Lefèvre, de Legge, Longuet, Malhuret et Mandelli, Mme Mélot, MM. Morisset, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pierre, Pointereau et Portelli, Mme Procaccia et MM. de Raincourt, Rapin, Revet, Savary, Savin, Vasselle et Vogel.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre Ier du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :

« Titre Ier

« Les conditions de la délivrance de l'attestation fiscale aux membres du Parlement et aux représentants au Parlement européen

« Art. L. 1.  -  Dans le cadre de la délivrance de l'attestation prévue à l'article L. O. 136-4 du code électoral et à l'article 5-3 de la loi n°77-729 du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen, les membres du Gouvernement ne peuvent adresser à l'administration des impôts aucune instruction dans des affaires individuelles. »

M. François Bonhomme.  - Cet amendement interdit aux membres du Gouvernement d'adresser à l'administration des impôts des instructions dans des affaires individuelles, dans le cadre de la délivrance de l'attestation fiscale prévue par le présent projet de loi.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis favorable. Cela devrait aller sans dire ; cela va mieux en le disant.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Puisque cela va sans dire, c'est inutile. Ce type d'instructions n'existe pas, attention au risque d'contrario. Avis défavorable.

L'amendement n°278 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°91, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au second alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale, après le mot : « tenu », sont insérés les mots : « sous peine de sanction pénale ».

Mme Éliane Assassi.  - Tout fonctionnaire ayant connaissance d'un crime ou d'un délit doit les signaler au procureur de la République, mais les manquements à cette obligation ne sont pas sanctionnés.

Cet amendement d'appel demande au Gouvernement de mieux définir le régime de sanction pénale. Rien n'est dit par ailleurs sur les risques sociaux et environnementaux. Il s'agit de mieux protéger les lanceurs d'alerte du secteur public, pour rétablir la confiance...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - C'est un amendement d'appel : quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Un manquement à l'obligation prévue à l'alinéa 2 de l'article 40 du code de procédure pénale expose l'agent public à des poursuites disciplinaires voire pénales en cas de complicité.

Un tel amendement pourrait inciter les fonctionnaires à tout dénoncer pour ne prendre aucun risque. Il est en outre difficile de démontrer que la personne ne peut ignorer le caractère frauduleux du comportement qu'elle devrait dénoncer... Avis défavorable.

L'amendement n°91 n'est pas adopté.

L'amendement n°158 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°194 rectifié bis, présenté par MM. Labbé et Cabanel et Mmes Benbassa, Archimbaud et Bouchoux.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 33 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un article 33 ... ainsi rédigé :

« Art. 33 ...  -  Les instances de rencontres régulières entre parlementaires et représentants d'intérêts, non prévues par les règlements des assemblées, doivent être constituées sous forme d'une association définie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.

« Ces instances de rencontres :

« 1° ne peuvent utiliser le terme de « parlementaire » ou « sénatorial » dans leur dénomination ;

« 2° ne peuvent utiliser le logo du Sénat ou de l'Assemblée nationale ;

« 3° ne peuvent utiliser le terme de « parlementaire » ou « sénatorial » dans l'organisation de colloques, manifestations, réunions ou dans les documents produits.

« Le non-respect de ces dispositions, après injonction de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique restée sans effet dans un délai d'un mois, est passible d'une amende de 15 000 euros. »

M. Joël Labbé.  - Le comité de déontologie du Sénat s'est penché sur les clubs parlementaires dès 2015. Saisie par le président de l'Assemblée nationale en 2016, la HATVP a souligné l'hétérogénéité de leurs statuts et l'absence d'encadrement juridique. Cet amendement définit donc les clubs et encadre leur fonctionnement.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Vous avez tellement raison que ces règles s'appliquent déjà ! Il n'est pas souhaitable d'inscrire dans la loi des règles qui relèvent du fonctionnement interne des assemblées. Retrait ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Joël Labbé.  - Si vous m'assurez en face que les mots « parlementaire » et « sénatorial » ne sont pas utilisés par ces clubs, je le retire sur parole.

M. Gérard César.  - Les yeux dans les yeux !

L'amendement n°194 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°162 rectifié, présenté par MM. Vasselle, Allizard, G. Bailly, Bonhomme, Bouchet et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cuypers et Danesi, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, M. Doligé, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, Frassa, Frogier et Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Guené et Houpert, Mme Hummel, MM. Huré et Husson, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Magras, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Pierre, Pointereau et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Retailleau et Revet, Mme de Rose et MM. Savin, Vaspart et Vogel.

A.  -  Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 25 octies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est abrogé.

II.  -  Après l'article 23 de la loi n°2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, il est inséré un article 23 bis ainsi rédigé :

« Art. 23 bis.  -  I.  -  La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique est chargée d'apprécier le respect des principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique.

« Elle est chargée :

« 1° De rendre un avis lorsque l'administration la saisit, préalablement à leur adoption, sur les projets de texte élaborés pour l'application des articles 6 ter A, 25 à 25 ter, 25 septies, 25 nonies et 28 bis de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

« 2° D'émettre des recommandations sur l'application des mêmes articles ;

« 3° De formuler des recommandations lorsque l'administration la saisit sur l'application desdits articles à des situations individuelles.

« Les avis et les recommandations au présent I ainsi que, le cas échéant, la réponse de l'administration sont rendus publics.

« II.  -  La Haute Autorité est chargée d'examiner la compatibilité du projet de création ou de reprise d'une entreprise par un fonctionnaire sur le fondement du III de l'article 25 septies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 précitée avec les fonctions qu'il exerce.

« III.  -  Le fonctionnaire cessant définitivement ou temporairement ses fonctions ou, le cas échéant, l'autorité dont il relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine saisit à titre préalable la Haute Autorité afin d'apprécier la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou de toute activité libérale, avec les fonctions exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité.

« Pour l'application du premier alinéa du présent III, est assimilé à une entreprise privée tout organisme ou toute entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé.

« À défaut de saisine préalable par le fonctionnaire ou l'administration, le président de la Haute Autorité peut saisir celle-ci dans un délai de trois mois à compter de l'embauche du fonctionnaire ou de la création de l'entreprise ou de l'organisme privé.

« La Haute Autorité apprécie si l'activité qu'exerce ou que projette d'exercer le fonctionnaire risque de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, l'indépendance ou la neutralité du service, de méconnaître tout principe déontologique mentionné à l'article 25 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ou de placer l'intéressé en situation de commettre l'infraction prévue à l'article 432-13 du code pénal.

« IV.  -  La Haute Autorité peut demander au fonctionnaire ou à l'autorité dont il relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine ou dans les corps, cadres d'emplois ou emplois dans lesquels il a été précédemment détaché ou a exercé des fonctions toute explication ou tout document nécessaire à l'exercice des missions de la Haute Autorité.

La Haute Autorité peut recueillir auprès des personnes publiques et privées toute information nécessaire à l'accomplissement de sa mission. Elle peut entendre ou consulter toute personne dont le concours lui paraît utile.

« La Haute Autorité est informée par la ou les autorités dont relève le fonctionnaire dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine des faits relatifs à une situation de conflit d'intérêts qui ont été relatés ou ont fait l'objet d'un témoignage en application de l'article 6 ter A de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983, dès lors que ces faits concernent les fonctions exercées ou ayant été exercées au cours des trois années antérieures par ce fonctionnaire.

« V.  -  Lorsqu'elle est saisie en application des II ou III du présent article, la Haute Autorité rend, dans un délai de deux mois à compter de sa saisine, un avis :

« 1° De compatibilité ;

« 2° De compatibilité avec réserves, celles-ci étant prononcées pour une durée de deux ans lorsque l'avis est rendu en application du II et de trois ans suivant la cessation des fonctions lorsque l'avis est rendu en application du III ;

« 3° D'incompatibilité.

« La Haute Autorité peut rendre, au nom de celle-ci, un avis de compatibilité, assorti éventuellement de réserves, dans le cas où l'activité envisagée est manifestement compatible avec les fonctions antérieures ou actuelles de l'intéressé.

« Elle peut également rendre un avis d'incompétence, d'irrecevabilité ou constatant qu'il n'y a pas lieu à statuer.

« VI.  -  Les avis rendus au titre des 2° et 3° du V lient l'administration et s'imposent à l'agent. Lorsque l'un de ces avis est rendu en application du III, la Haute Autorité peut, lorsqu'elle rend un avis d'incompatibilité ou un avis de compatibilité assorti de réserves, et après avoir recueilli les observations de l'agent concerné, le rendre public. L'avis ainsi rendu public ne contient aucune information de nature à porter atteinte à la vie privée de la personne concernée, au secret médical, au secret en matière commerciale et industrielle ou à l'un des secrets mentionnés au 2° de l'article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration.

« L'autorité dont le fonctionnaire relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine peut solliciter une seconde délibération de la Haute Autorité, dans un délai d'un mois à compter de la notification de son avis. Dans ce cas, la Haute Autorité rend un nouvel avis dans un délai d'un mois à compter de la réception de cette sollicitation.

« Lorsque le fonctionnaire ne respecte pas l'avis rendu au titre des mêmes 2° et 3°, il peut faire l'objet de poursuites disciplinaires.

« Lorsque le fonctionnaire retraité ne respecte pas l'avis rendu au titre desdits 2° et 3° , il peut faire l'objet d'une retenue sur pension dans la limite de 20 % pendant les trois ans suivant la cessation de ses fonctions.

« Lorsque l'agent est titulaire d'un contrat de travail et qu'il ne respecte pas l'avis rendu au titre des mêmes 2° et 3° le contrat prend fin à la date de notification de l'avis, sans préavis et sans indemnité de rupture. »

III.  -  Le I et II entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2019.

B.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Titre IV

Dispositions relatives à la déontologie des fonctionnaires

M. Bruno Retailleau.  - Cet amendement fusionne la Commission de déontologie de la fonction publique et la HATVP, dans un objectif de rationalisation et d'homogénéisation : le traitement doit être équivalent entre membres du Gouvernement, du Parlement et de la haute administration.

M. le président.  - Amendement n°259 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa du III de l'article 25 octies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq ».

M. Pierre-Yves Collombat.  - Selon l'enquête « Que sont les énarques devenus », les chiffres du pantouflage sont éloquents : 75,5 % des inspecteurs généraux des finances ont pantouflé, dont 34 % durablement ; 45,3 % des auditeurs de la Cour des comptes, dont 20 % durablement ; 37,70 % pour le Conseil d'État, dont 11,5 % durablement. Le phénomène n'est pas marginal : 22 % des énarques ont pratiqué cette technique sportive de promotion.

Cet amendement allonge de trois à cinq ans le délai incompressible pour présenter une demande à la Commission de déontologie.

M. le président.  - Amendement n°239 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La deuxième phrase du premier alinéa du VI de l'article 25 octies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi rédigée :

« Lorsque l'un de ces avis est rendu en application du III, après avoir recueilli les observations de l'agent concerné, la commission le rend public. »

M. Pierre-Yves Collombat.  - Même objectif, par des moyens moins drastiques, à savoir la publication des avis de la Commission.

M. le président.  - Amendement n°185 rectifié bis, présenté par M. Labbé et Mme Archimbaud.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 51 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État et l'article 72 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Un fonctionnaire ne peut être placé en position de disponibilité pour exercer une activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou toute activité libérale, que pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois. »

II.  -  Après le deuxième alinéa de l'article 62 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Un fonctionnaire ne peut être placé en position de disponibilité pour exercer une activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé, ou toute activité libérale, que pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois. »

III.  -  Les 1° et 2° du VII de l'article 25 octies de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« 1° Un conseiller d'État ou son suppléant, conseiller d'État ;

« 1° bis Deux conseillers maîtres à la Cour des comptes ou leurs suppléants, conseillers maîtres à la Cour des comptes ;

« 2° Deux magistrats de l'ordre judiciaire ou leurs suppléants, magistrats de l'ordre judiciaire ; ».

M. Joël Labbé.  - Cet amendement limite la durée pendant laquelle un fonctionnaire peut être placé en disponibilité pour exercer dans le privé à trois ans, renouvelable une fois, contre dix ans actuellement.

Il assure également aux magistrats siégeant à la Commission de déontologie une majorité de sièges par rapport aux personnalités qualifiées et aux représentants des administrations.

M. le président.  - Amendement n°237 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 51 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le nombre de fonctionnaires admis annuellement en disponibilité sous réserve des nécessités de service ne peut dépasser 5 % de leurs corps d'origine respectifs. La disponibilité sous réserve des nécessités de service ne peut durer plus de trois ans sauf en cas d'études ou recherches présentant un intérêt général. Tout fonctionnaire qui ne réintègre pas le service de l'État au terme de cette période est considéré comme démissionnaire. »

M. Pierre-Yves Collombat.  - Toujours la même chanson : pour éviter la fuite des fonctionnaires dans le privé, nous limitons à 5 % des effectifs du corps le nombre de fonctionnaires en disponibilité.

M. le président.  - Amendement n°258 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 51 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le nombre de fonctionnaires admis annuellement en disponibilité sous réserve des nécessités de service ne peut dépasser 10 % de leurs corps d'origine respectifs. La disponibilité sous réserve des nécessités de service ne peut durer plus de trois ans sauf en cas d'études ou recherches présentant un intérêt général. Tout fonctionnaire qui ne réintègre pas le service de l'État au terme de cette période est considéré comme démissionnaire. »

M. Pierre-Yves Collombat.  - Même chose : 90 % des fonctionnaires d'un corps travailleraient à ce pour quoi ils ont été formés et embauchés. Ce n'est pas excessif.

M. le président.  - Amendement n°257 rectifié, présenté par MM. Collombat, Arnell, Bertrand, Collin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Requier.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le VII de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les deux occurrences des mots : « conseiller d'État » sont remplacés par les mots : « magistrat de l'ordre administratif » ;

2° Au 1°, les deux occurrences des mots : « conseiller maître à la Cour des comptes » sont remplacés par les mots : « membre des juridictions financières ».

M. Pierre-Yves Collombat.  - Cet amendement étend le recrutement des membres de la Commission de déontologie aux magistrats administratifs et financiers de premier et deuxième degré, non énarques.

M. le président.  - Amendement n°89 rectifié bis, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifiée :

1° Après le cinquième alinéa de l'article 20, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Elle se prononce, en application de l'article 23 bis, sur la compatibilité de toute activité lucrative, salariée ou non, dans une entreprise ou un organisme privé ou toute activité libérale, avec les fonctions effectivement exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité par tout agent cessant ses fonctions. » ;

2°  Après l'article 23, est inséré un article 23 bis ainsi rédigé :

« Art. 23 bis.  -  I.  -  Au regard des exigences prévues à l'article 1er, la Haute Autorité se prononce sur la compatibilité de l'exercice d'une activité libérale ou d'une activité rémunérée au sein d'un organisme ou d'une entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles du droit privé avec des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales énumérées au 2° du I de l'article 11 exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité. Lorsque ces fonctions sont exercées par un agent public, la Haute Autorité est seule compétente pour assurer ce contrôle.

« Afin d'assurer ce contrôle, la Haute Autorité est saisie :

« 1° Soit par la personne concernée, préalablement au début de l'exercice de l'activité envisagée ;

« 2° Soit par son président, dans un délai d'un mois à compter de la connaissance de l'exercice non autorisé d'une activité exercée dans les conditions prévues au premier alinéa du présent I. La Haute Autorité rend son avis dans un délai d'un mois à compter de sa saisine. Elle met la personne concernée en état de présenter ses observations, sauf lorsqu'elle rend un avis de compatibilité sur saisine de la personne concernée.

« II.  -  Les avis de compatibilité peuvent être assortis de réserves dont les effets peuvent s'imposer à la personne concernée pendant une période maximale expirant trois ans après la fin de l'exercice des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales.

« Lorsque la Haute Autorité rend un avis d'incompatibilité, la personne concernée ne peut pas exercer l'activité envisagée pendant une période expirant trois ans après la fin de l'exercice des fonctions gouvernementales ou des fonctions exécutives locales.

« La Haute Autorité notifie sa décision à la personne concernée et, le cas échéant, à l'organisme ou à l'entreprise au sein duquel celle-ci exerce d'ores et déjà ses fonctions en violation du premier alinéa du I. Les actes et contrats conclus en vue de l'exercice de cette activité :

« 1° Cessent de produire leurs effets lorsque la Haute Autorité a été saisie dans les conditions fixées au 1° du I ;

« 2° Sont nuls de plein droit lorsque la Haute Autorité a été saisie dans les conditions fixées au 2° du I.

« Lorsqu'elle est saisie en application du même 2° et qu'elle rend un avis d'incompatibilité, la Haute Autorité le rend public.

« Elle peut rendre un avis d'incompatibilité lorsqu'elle estime ne pas avoir obtenu de la personne concernée les informations nécessaires.

« III.  -  Par délégation de la Haute Autorité et dans les conditions prévues par son règlement général, le président de la Haute Autorité peut rendre un avis de compatibilité, dans le cas où l'activité envisagée est manifestement compatible avec les fonctions antérieures de l'intéressé, ou un avis d'incompétence, d'irrecevabilité ou constatant qu'il n'y a pas lieu à statuer.

« IV.  -  Lorsqu'elle a connaissance de l'exercice, par une personne mentionnée au I, d'une activité exercée en violation d'un avis d'incompatibilité ou d'une activité exercée en violation des réserves prévues par un avis de compatibilité, et après que la personne concernée a été mise en mesure de produire des explications, la Haute Autorité publie au Journal officiel un rapport spécial comprenant l'avis rendu et les observations écrites de la personne concernée.

« Elle transmet au procureur de la République le rapport spécial mentionné au premier alinéa du présent IV et les pièces en sa possession relatives à cette violation de son avis.

« V.  -  Ces dispositions sont applicables :

« 1° Aux fonctionnaires placés ou devant être placés en cessation définitive de fonctions, disponibilité, détachement, hors-cadre, mise à disposition ou exclusion temporaire de fonctions ;

« 2° Aux agents non titulaires de droit public employés par l'État, une collectivité territoriale ou un établissement public ;

« 3° Aux membres du cabinet de la Présidence de la République ;

« 4° Aux membres d'un cabinet ministériel ;

« 5° Aux collaborateurs de cabinet des autorités territoriales ;

« 6° Aux agents contractuels de droit public ou de droit privé des établissements mentionnés aux articles L. 1142-22, L. 1222-1, L. 1323-1, L. 1336-1, L. 1413-2, L. 1418-1 et L. 5311-1 du code de la santé publique ;

« 7° Aux agents contractuels de droit public ou de droit privé d'une autorité administrative indépendante.

« Ces dispositions ne s'appliquent aux agents non titulaires de droit public mentionnés aux 2° et 7° que s'ils sont employés de manière continue depuis plus d'un an par la même autorité ou collectivité publique.

« VI.  -  La Haute Autorité est également chargée d'examiner la compatibilité du projet de création ou de reprise d'une entreprise par un fonctionnaire sur le fondement de l'article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires avec les fonctions qu'il exerce. Elle examine en outre la compatibilité entre la poursuite de son activité privée par le dirigeant d'une société ou association sur le même fondement.

« La Haute Autorité donne son avis sur les autorisations demandées par les personnels de la recherche en vue de participer à la création d'entreprise et aux activités des entreprises existantes.

« VII.  -  La saisine de la Haute Autorité est obligatoire au titre du I pour les agents chargés soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée ou de formuler un avis sur de tels contrats, soit de proposer des décisions relatives à des opérations effectuées par une entreprise privée ou de formuler un avis sur de telles décisions.

« Pour l'application du premier alinéa du présent VII, est assimilée à une entreprise privée toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé. »

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Il s'agit, en fusionnant HATVP et Commission de déontologie, de renforcer le contrôle de compatibilité dont les lacunes nourrissent la défiance de nos concitoyens. Si les élus doivent être exemplaires, les hauts fonctionnaires aussi ! De plus en plus d'énarques et de polytechniciens vont pantoufler dans le privé avant même d'avoir rempli leur engagement décennal, ce qui s'apparente à une forme blanche de corruption. Ce mélange des sphères privée et publique, source de conflit d'intérêts, pose un vrai problème d'éthique.

Notre amendement n°90 sanctionne le non-respect de l'engagement décennal.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - L'amendement n°162 rectifié avait été adopté par le Sénat dans la loi relative à la déontologie des fonctionnaires avant d'être écarté en CMP. En effet, il transforme radicalement les missions de la HATVP, qui se borne à recevoir des déclarations d'intérêt et de patrimoine et à vérifier l'absence d'enrichissement illicite, en la chargeant de contrôler toute mobilité de fonctionnaires, y compris de catégorie B et C. Si vous voulez réformer la Commission de déontologie, il faut procéder autrement. Retrait ?

Avis défavorable à l'amendement n°259 rectifié ainsi qu'à l'amendement n°239 rectifié : nous avons tranché il y a un an à peine dans la loi sur la déontologie des fonctionnaires. En outre, la Commission de déontologie peut déjà publier ses avis.

Avis défavorable aux amendements nos185 rectifié bis et 257 rectifié. Retrait de l'amendement n°89 rectifié bis.

Défavorable enfin aux amendements n° 237 rectifié et 258 rectifié : les modalités de disponibilité varient d'un corps à l'autre et le statut est aussi utilisé pour des années sabbatiques.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Si je peux partager les objectifs qui animent ces amendements, des dispositions qui s'attachent à la fonction publique ou à la magistrature n'ont pas de lien avec le texte. Ce sont à mes yeux des cavaliers. Retrait ou avis défavorable.

M. Bruno Retailleau.  - Le président Bas nous a convaincus : nous retirons l'amendement n° 162 rectifié, dans la douleur. (Sourires)

L'amendement n°162 rectifié est retiré.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Moi, il ne m'a pas convaincu ! Pourquoi ne pourrait-on revenir sur des dispositions récentes ? On le fait bien pour la définition du conflit d'intérêts !

Je constate que le pantouflage a de beaux jours devant lui, et de solides amis. Tant qu'on refusera de s'attaquer à cette plaie, on ne pourra rétablir la confiance dans les institutions : c'est le conflit d'intérêts permanent ! Le problème n'est pas le déport du gouverneur de la Banque de France sur tel ou tel dossier - c'est que des hauts fonctionnaires confondent l'intérêt des banques et des entreprises avec celui de la France.

Mme Éliane Assassi.  - Très bien !

M. Joël Labbé.  - Oui, le pantouflage est une plaie ! Pour rétablir la confiance dans l'action publique, il faut des signes forts. Il est anormal de retrouver dans les services du ministère de l'agriculture des anciens des grandes firmes agricoles, et vice-versa.

32

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous vivons des temps nouveaux qui ne cessent de me surprendre et de me réjouir : j'ai rarement vu les groupes CRC et Union centriste présenter des amendements en tous points identiques. Je reste sans voix. (Rires)

M. Loïc Hervé.  - C'est la convergence !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Après longue délibération, la commission des lois a émis un avis favorable, sous réserve de rectification pour viser les trois fonctions publiques - ce qui a été fait.

S'ils sont liés par des contrats de droit privé qui leur interdisent d'accéder au concours interne, il est difficilement contestable que nos collaborateurs concourent au service public de la législation et du contrôle du Gouvernement. Après avoir moi-même hésité, compte tenu du nombre de places limitées par la troisième voie, je me suis résolu à donner un avis favorable.

M. Loïc Hervé.  - Excellent !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Nous sommes tout de même un peu loin du sujet... (On s'en défend sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen.) Sagesse.

M. Alain Richard.  - Malgré ma sympathie pour les temps nouveaux, on fait ici preuve d'une improvisation hasardeuse. En fonction de principes du droit qui tombent sous le sens, le deuxième concours est réservé aux agents publics. La troisième voie a été créée pour ceux qui ont une expérience professionnelle, associative ou syndicale dans le secteur privé, très souvent en lien avec l'intérêt général - c'est le cas d'anciens délégués du personnel, par exemple.

Cet amendement créerait une situation privilégiée, au sens propre. Les collaborateurs parlementaires seraient la seule catégorie à avoir accès à la fois au deuxième et au troisième concours ! Cela n'a pas d'intérêt social : les chances sont bien meilleures par la troisième voie. Mais ce sera voté parce que c'est la mode...

Mme Françoise Cartron.  - Depuis un an et demi, l'Agas a signé un partenariat avec la Sorbonne pour faire bénéficier six collaborateurs par an d'une préparation à l'ENA : ils sont déchargés de leur travail auprès de leur parlementaire et leur salaire est pris en charge par l'Agas pendant qu'ils se consacrent à la préparation du concours. C'est une réponse partielle certes, mais intéressante.

M. Jean-Yves Leconte.  - J'entends Alain Richard, mais la situation de nos collaborateurs est particulière. Ils ont des contrats de droit privé mais travaillent chaque jour avec les services de l'État, avec les administrateurs du Sénat, dans le même but.

M. Alain Richard.  - Comme les avocats qui font du droit public.

M. Jean-Yves Leconte.  - Il serait dommage d'interdire une évolution de carrière à quelqu'un qui a six, douze ou dix-huit ans d'expérience de l'écriture de la loi et du contrôle du Gouvernement !

M. Alain Richard.  - Mais ils ont déjà ce droit ! Cet amendement le leur double.

Les amendements identiques nos48 rectifié bis et 149 rectifié bis sont adoptés et deviennent un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°240 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Guérini et Requier.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 32 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est complété par les mots : « , à l'issue de la publication d'une offre sur un site internet dédié, en amont de la procédure de recrutement ».

M. Guillaume Arnell.  - Cet amendement améliorera la transparence sur l'embauche, par des voies détournées, de collaborateurs ministériels hors plafond mais aussi, plus largement, les conditions de recrutement des 400 000 agents contractuels de l'État.

Le déficit de publicité autour des offres d'emploi est un obstacle à l'égalité d'accès à l'emploi public, garantie par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme. Nous proposons donc que tout recrutement contractuel soit précédé de la publication d'une offre sur le site Internet de la bourse interministérielle de l'emploi public.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Ce n'est pas du niveau de la loi, et bien loin du texte...

L'amendement n°240 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE 4

Mme Catherine Tasca .  - Mon propos est personnel et n'engage en rien mon groupe. L'enfer est pavé de bonnes intentions - cet article qui interdit les emplois dits familiaux en est un exemple.

Nous critiquons souvent la propension des gouvernements à légiférer en fonction de l'actualité. Or l'affaire Fillon tient à ce que les emplois familiaux en question sont présumés fictifs, et leur rémunération hors normes : ce sont ces abus qu'il s'agit de prévenir, voire de sanctionner. Personne ne songerait à interdire à un médecin d'employer son épouse comme secrétaire ou à un agriculteur de travailler en famille. Pourquoi infliger une interdiction générale et discriminatoire aux collaborateurs parlementaires ? Pour éliminer le soupçon, il suffit d'encadrer strictement ces embauches, comme le fait le Sénat. La loi pourrait fort bien s'en tenir là et laisser aux assemblées - si elles sont encore autonomes - le soin de définir les modalités.

Alors que la notion de famille ne cesse de se diversifier, cette interdiction radicale va conduire à des investigations sans fin et encourager la délation. Le devoir des politiques est d'expliquer pour convaincre, non de suivre aveuglément l'emballement de l'opinion. (Applaudissements nourris sur de nombreux bancs des groupes socialiste et républicain, RDSE, Union centriste et Les Républicains)

M. Maurice Antiste .  - L'interdiction des emplois familiaux fait suite aux affaires qui ont marqué la campagne présidentielle. Or le problème n'était pas le lien familial mais le caractère fictif de l'emploi. Des règles existent déjà : le Sénat plafonne ainsi le nombre et la rémunération des emplois familiaux. Un élu peut souhaiter travailler avec une personne compétente qui lui serait proche et en qui il aurait toute confiance. Je suis d'autant plus à l'aise pour le dire qu'aucun membre de ma famille ne travaille à mes côtés ! Prenons garde à la discrimination et ne jetons pas l'opprobre sur des collaborateurs parlementaires dévoués et compétents.

Une telle interdiction ne saurait suffire à régler les questions de moralité inhérentes à notre fonction. Enfin, en quoi est-il moralement différent d'employer un cousin ou un ami ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes socialiste et républicain, RDSE, Union centriste et Les Républicains)

M. le président.  - Amendement n°241 rectifié, présenté par MM. Collombat et Collin, Mme Costes, M. Guérini et Mme Laborde.

Supprimer cet article.

Mme Françoise Laborde.  - Assurons-nous donc que les moyens alloués aux parlementaires soient utilisés à rémunérer des emplois réels, plutôt que d'introduire des dispositions discriminantes qui n'amélioreront en rien le travail législatif. Se tromper de cible et viser la pratique minoritaire des emplois familiaux affaiblira au contraire la confiance de nos concitoyens dans leurs représentants.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Cet amendement est contraire à la position de la commission. Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable. Notre objectif est triple : réaffirmer l'exigence de probité et d'intégrité, prévenir les conflits d'intérêts et imposer la transparence. Les révélations récentes sur certaines pratiques ont heurté nos concitoyens : en tant que représentants de la Nation, vous n'avez pas la même qualité qu'un médecin ou autre...

M. Rachel Mazuir.  - Il s'agit d'argent public !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - L'interdiction posée est logique et proportionnée au but recherché. Nous nous en tenons aux membres de la famille proche, sans risque d'enfreindre le droit au respect de la vie privée ou la liberté contractuelle.

M. Philippe Adnot.  - J'approuve cet amendement de suppression. Imaginez qu'un de mes collaborateurs, de grande qualité, s'éprenne d'une de mes petites-filles : s'il l'épouse, il ne pourra conserver son emploi ! C'est invraisemblable ! Pensez-vous que les citoyens nous condamneront si nous ne votons pas cet article ? Ils nous reprocheraient plutôt de n'avoir pas le courage de dénoncer un texte insupportable de ségrégation, de reproches implicites ! Demain, on ne se mariera donc plus : on est en effet parfaitement libre de recruter sa maîtresse ou son amant. Mais le conjoint de sa petite-fille, ça non !

C'est un scandale. Ayons du courage et personne ne nous le reprochera ! (Applaudissements nourris sur de nombreux bancs des groupes RDSE, Union centriste et Les Républicains ainsi que sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain)

L'amendement n°241 rectifié est adopté et l'article 4 est supprimé.

(Applaudissements sur plusieurs bancs)

Les amendements nos21 rectifié, 174 rectifié, 264, 22 rectifié, 24 rectifié, 23 rectifié, 47, 111, 82, 166 rectifié ter, 211 et 136 rectifié n'ont plus d'objet.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°25 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mme Deseyne, M. Fouché, Mme Férat, M. Commeinhes, Mme Imbert, MM. Laurey, Médevielle et D. Bailly et Mme Joissains.

Après l'article 4

Insérer un article ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 ... ainsi rédigé :

« Art. 8 ... - Chaque assemblée détermine des règles destinées à contrôler l'effectivité du travail effectué par les collaborateurs employés par les parlementaires.

« Elle veille à la mise en oeuvre de ces règles dans les conditions déterminées par son règlement. » 

M. Jean-François Longeot.  - Si nos concitoyens ont été choqués par les récentes affaires, ce n'est pas dû à la nature familiale des emplois mais à leur caractère présumé fictif et à leur niveaux de rémunération. L'interdiction globale des emplois familiaux ne répond donc pas au problème. Cet amendement ne se satisfait pas d'apparences mais apporte des garanties aux citoyens quant au bon usage des deniers publics.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable.

Mme Françoise Férat.  - Je regrette le postulat d'une tricherie organisée. À croire que tous les emplois familiaux seraient frauduleux ! Quelle faute ont commis ces collaborateurs pour être ainsi virés ? Ils sont victimes de discrimination.

Confiance, confidentialité, disponibilité, loyauté, telles sont les qualités que l'on recherche chez nos collaborateurs. La transparence a ses limites, traitons-les avec un minimum d'humanité, sans les stigmatiser ! Oserai-je rappeler que le président de la République lui-même est en train d'organiser un emploi pour son épouse ?

M. Hervé Maurey.  - Je m'étonne de ces avis défavorables. Nous voulons contrôler la réalité du travail de l'ensemble des collaborateurs. Ce qui a choqué, à juste titre, ce n'est pas le lien familial mais le caractère présumé fictif de l'emploi, et sa rémunération. Il est préférable que les assemblées fixent les règles pour contrôler cette effectivité. Je suis sûr que l'Agas ferait cela très bien.

À la demande de la commission des lois, l'amendement n°25 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°105 :

Nombre de votants 335
Nombre de suffrages exprimés 334
Pour l'adoption   42
Contre 292

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°26 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mmes Deseyne et Férat, MM. Commeinhes et Rapin, Mme Imbert, MM. Laurey, Médevielle et D. Bailly et Mme Joissains.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 8 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 - ... ainsi rédigé :

« Art. 8-... Il est interdit à un député ou un sénateur d'employer en tant que collaborateur parlementaire au sens du règlement de l'assemblée dont il est membre, une personne également employée par un parti politique 

« La violation de cette interdiction emporte la nullité du contrat. Cette nullité ne donne lieu à aucune restitution entre les parties.

« Le règlement de l'assemblée parlementaire détermine les modalités selon lesquelles le député ou le sénateur rembourse les sommes versées en vertu des contrats conclus en violation de l'interdiction mentionnée au premier alinéa ainsi que les autres sanctions qu'il encourt.

« Le fait, pour un député ou un sénateur, d'employer un collaborateur en méconnaissance de l'interdiction mentionnée au premier alinéa est puni d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende.

« Lorsque le contrat de travail en cours au jour de la promulgation de la loi n°       du        pour la régulation de la vie publique méconnaît ces dispositions, il prend fin de plein droit dans les conditions prévues à cet article six mois après cette promulgation, sous réserve du respect des dispositions spécifiques à la protection de la grossesse et de la maternité prévues à l'article L. 1225-4 du code du travail.

« La rupture du contrat constitue un licenciement fondé sur la loi précitée. Ce motif spécifique constitue une cause réelle et sérieuse.

« Le parlementaire notifie le licenciement à son collaborateur, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, dans les quinze jours suivant la promulgation de la loi précitée. Il lui remet dans le même délai les documents prévus aux articles L. 1234-19 et L. 1234-20 du même code ainsi qu'une attestation d'assurance chômage.

« La période qui s'étend entre la notification du licenciement et la rupture de plein droit mentionnée au premier alinéa constitue le délai de préavis quelles que soient l'ancienneté du collaborateur et la durée de préavis prévue au contrat.

« Le collaborateur bénéficie des indemnités mentionnées aux articles L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 3141-28 du code du travail lorsqu'il remplit les conditions prévues. Les indemnités sont supportées par l'assemblée parlementaire dans les conditions fixées par son règlement.

« Le parlementaire n'est pas pénalement responsable de l'infraction prévue au présent article lorsque cette infraction est commise pendant les six mois suivant la promulgation de la loi précitée. »

M. Hervé Maurey.  - Je regrette le vote sur l'amendement précédent, car le contrôle de la réalité du travail était le pendant de la suppression pure et simple de l'interdiction des emplois familiaux.

Celui-ci interdit à tout collaborateur parlementaire de travailler dans le même temps pour un parti politique, ce qui a pu occasionner les dérives que l'on sait.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Sueur..  - Pourquoi ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le texte a atteint un équilibre, il n'est pas nécessaire d'ajouter de nouvelles interdictions. Cet amendement entamerait en outre la liberté des partis, constitutionnellement protégée.

À la demande de la commission, l'amendement n°26 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°106 :

Nombre de votants 335
Nombre de suffrages exprimés 248
Pour l'adoption 43
Contre 205

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Nous avons un problème de cohérence. Nous avons voté pour l'interdiction des emplois familiaux des membres du Gouvernement mais contre l'interdiction des emplois familiaux des parlementaires, et aucun amendement ne revient sur leur suppression dans les cabinets d'exécutifs locaux. Je serai donc obligé de demander, en application de l'article 43, alinéa 4 du Règlement, une seconde délibération sur l'article 4 afin que chacun prenne ses responsabilités en connaissance de cause.

Je rappelle que la commission des lois a adopté, à l'unanimité des groupes présents, le principe de l'interdiction. Je considère que le vote de l'amendement de suppression est accidentel. (MM. Jean-Yves Leconte, Jean-Pierre Sueur et Michel Mercier applaudissent.)

M. Jean-Yves Leconte.  - Tout à fait.

M. le président.  - Nous avons examiné 105 amendements sur le projet de loi ; il en reste 99. En outre, 72 amendements sont à examiner sur le projet de loi organique.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 12 juillet 2017, à 14 h 30.

La séance est levée à 1 heure.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Ordre du jour du mercredi 12 juillet 2017

Séance publique

À 14 h 30 et le soir

Présidence : M. Jean-Pierre Caffet, vice-président

Secrétaires : M. Claude Haut - Mme Colette Mélot

- Suite du projet de loi rétablissant la confiance dans l'action publique (procédure accélérée) (n° 581, 2016-2017) et projet de loi organique rétablissant la confiance dans l'action publique (procédure accélérée) (n° 580, 2016-2017)

Rapport de M. Philippe Bas, fait au nom de la commission des lois (n° 607, 2016-2017)

Textes de la commission (nos 608 et 609, 2016-2017)

Avis de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances (n° 602, 2016-2017)

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°105 sur l'amendement n°25 rectifié, présenté par M. Maurey et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 du projet de loi rétablissant la confiance dans l'action publique

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 335

Suffrages exprimés : 334

Pour : 42

Contre : 292

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (142)

Contre : 141

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe socialiste et républicain (87)

Contre : 86

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Luc Carvounas

Groupe Union centriste (43)

Pour : 42

N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Jacqueline Gourault

Groupe La République en marche (29)

Contre : 28

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Baptiste Lemoyne

Groupe communiste républicain et citoyen (18)

Contre : 18

Groupe du RDSE (16)

Contre : 16

Sénateurs non inscrits (12)

Contre : 3

Abstention : 1 - M. Jean Louis Masson

N'ont pas pris part au vote : 8 - Mmes Aline Archimbaud, Esther Benbassa, Corinne Bouchoux, MM. Ronan Dantec, Jean Desessard, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°106 sur l'amendement n°26 rectifié, présenté par M. Hervé Maurey et plusieurs de ses collègues, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 du projet de loi rétablissant la confiance dans l'action publique

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 335

Suffrages exprimés : 248

Pour : 43

Contre : 205

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (142)

Contre : 141

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe socialiste et républicain (87)

Abstentions : 86

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Luc Carvounas

Groupe Union centriste (43)

Pour : 42

N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Jacqueline Gourault

Groupe La République en marche (29)

Contre : 28

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Baptiste Lemoyne

Groupe communiste républicain et citoyen (18)

Contre : 18

Groupe du RDSE (16)

Contre : 16

Sénateurs non inscrits (12)

Pour : 1 - M. Joël Labbé

Contre : 2

Abstention : 1 - M. Jean Louis Masson

N'ont pas pris part au vote : 8 - Mmes Aline Archimbaud, Esther Benbassa, Corinne Bouchoux, MM. Ronan Dantec, Jean Desessard, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier