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Table des matières
Mise au point au sujet d'un vote
Assainissement cadastral (Procédure accélérée)
Nominations à d'éventuelles CMP
Consommation (Conclusions de la CMP)
M. Martial Bourquin, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire
Ordre du jour du jeudi 9 février 2017
SÉANCE
du mercredi 8 février 2017
53e séance de la session ordinaire 2016-2017
présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente
Secrétaires : Mme Frédérique Espagnac, M. Bruno Gilles.
La séance est ouverte à 14 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
CMP (Candidatures)
Mme la présidente. - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de réunion d'une commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle. La commission des affaires économiques a désigné les candidats qu'elle présente à cette commission mixte paritaire.
La commission des lois a désigné les candidats à d'éventuelles commissions mixtes paritaires chargées d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la sécurité publique ; du projet de loi ratifiant les ordonnances du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse, portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse et portant diverses mesures électorales applicables en Corse ; de la proposition de loi portant réforme de la prescription en matière pénale et de la proposition de loi visant à favoriser l'assainissement cadastral et la résorption du désordre de propriété, en cours d'examen.
Ces listes ont été publiées conformément à l'article 12, alinéa 4, du Règlement et seront ratifiées si aucune opposition n'est faite dans le délai d'une heure.
Dépôt d'un rapport
Mme la présidente. - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur les modalités d'élection des conseillers métropolitains au suffrage universel direct. Il a été transmis à la commission des lois.
Mise au point au sujet d'un vote
M. Joseph Castelli. - Lors du scrutin n°96 du 7 février 2017, MM. Jean-Noël Guérini et Michel Amiel souhaitaient voter contre, et non s'abstenir.
Mme la présidente. - Acte vous en est donné. Il en sera tenu compte dans l'analyse politique du scrutin.
Assainissement cadastral (Procédure accélérée)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à favoriser l'assainissement cadastral et la résorption du désordre de propriété.
Discussion générale
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales . - Le 8 novembre dernier, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité cette proposition de loi déposée par les députés Rocca Serra, Gandolfi-Sheit, Giacobbi, Marcangeli et Pupponi. La liste des signataires qu'elle a rassemblés au-delà des clivages politiques montre bien son importance pour l'avenir de la Corse.
C'est pour cette raison que le Gouvernement l'a mise à l'ordre du jour sur son temps, car elle n'avait pas pu prendre place sur le temps réservé au groupe Les Républicains. Je connais l'enjeu de ce texte pour toutes les familles corses.
Les amendements déposés par le RDSE à l'ordonnance relative à la Corse ont hélas été déclarés irrecevables au titre de l'article 45 par la commission des lois.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - Qui a fait son travail !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Pour des raisons qui ne sont pas évidentes, ou qui le sont trop...
Cela fait un peu plus de deux siècles que la Corse se trouve dans un inextricable désordre foncier.
En 1801, l'administrateur général de la Corse, André François Miot, nommé par le Premier Consul, avait abrogé les pénalités encourues par le défaut de déclaration des successions dans le délai de six mois ; cela a occasionné ce désordre qui devrait cesser.
Les différents gouvernements, les notaires qui s'attachent depuis trente ans à rétablir des titres de propriété, sont arrivés à une position commune : le nécessaire retour au droit commun.
La loi du 22 janvier 2002, modifiée par la loi de finances rectificative pour 2008, prévoyait une exonération de droits de succession de 100 % jusqu'en 2012, puis de 50 % jusqu'en 2017.
En 2007, la loi a autorisé la création du Groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété (Girtec), composé de magistrats, de notaires, de fiscalistes. Mais cela a soulevé des difficultés d'ampleur inattendue au regard de la tâche à accomplir. En 2010, il est apparu que 405 727 parcelles sur les 995 386 cadastrées appartenaient à des « propriétaires apparents », c'est-à-dire nés avant 1910... Les notaires doivent donc rechercher des centaines d'héritiers. De plus, 34 % des parcelles sont encore sans titre.
Il faut laisser le Girtec faire son travail jusqu'à son terme, avec des moyens exceptionnels. Pour connaître de mieux en mieux la Corse, je sais que son travail est attendu.
Le Premier ministre Manuel Valls s'est engagé le 4 juillet devant l'assemblée de Corse - dont je salue le président Jean-Guy Talamoni et le président de l'exécutif Gilles Simeoni - à examiner avec bienveillance ces questions.
Les articles premier et 2 sécurisent la prescription acquisitive ou usucapion Avec leur rédaction initiale, ils avaient concerné tout le territoire national. Monsieur le président-rapporteur, vous avez voulu les restreindre à la Corse, et à la durée de vie du Girtec, soit 2027. Le Gouvernement se rangera à la rédaction du Sénat. L'article 3 porte de 50 % à 30 % l'exonération de DTMG lors de la première mutation. Le coût de ce dispositif est modique et sera compensé par les recettes fiscales supplémentaires.
L'article 4 proroge le dispositif dérogatoire d'exonération partielle de droits de succession à hauteur de 50 %.
L'article 5 prévoit une exonération du droit de 2,5 % à hauteur de la valeur des immeubles pour les actes de partage de succession ou les licitations de certains biens héréditaires.
L'article 7 a été ajouté par la commission des lois pour toiletter l'article 24 de la loi de 1884, permettant l'utilisation de la prescription acquisitive en Alsace-Moselle. J'ai découvert ces dispositions avec intérêt : elles interdisent l'agrandissement des propriétés par prescription acquisitive dans ces départements. Elles avaient été rejetées comme cavaliers par le Conseil constitutionnel. Je ne m'y opposerai pas.
Le Gouvernement s'honore d'avoir créé les conditions pour que le débat ait lieu au Sénat, pour un retour au droit commun dans l'intérêt de la Corse. (Applaudissements)
M. Philippe Bas, président de la commission des lois, en remplacement de M. André Reichardt, rapporteur . - Près de 33 % des parcelles cadastrées appartiennent à des propriétaires décédés, à cause de l'application d'un régime dérogatoire depuis les arrêtés Miot de juin 1801. De nombreuses successions anciennes n'ont donc jamais été réglées. Les propriétaires ne peuvent jouir pleinement de leurs droits et les pouvoirs publics ne peuvent recouvrer l'impôt, faute de propriétaires identifiés.
Rendons hommage aux auteurs de cette proposition de loi, M. Camille de Rocca-Serra et ses collègues. Le dispositif était initialement applicable à l'ensemble du territoire, la commission des lois l'a restreint à la Corse.
Les deux premiers articles facilitent la constatation de la prescription acquisitive ; les suivants concernent la fiscalité.
À l'article 3 par exemple, il fallait éviter que la mise en ordre du droit applicable en Corse s'accompagne d'une forme de matraquage fiscal.
La commission des lois a déclaré irrecevable l'amendement qui introduisait ces dispositions dans une ordonnance car elle a voulu leur éviter une censure par le Conseil constitutionnel, comme cela avait eu lieu auparavant, de votre propre aveu. Cela ne remet aucunement en cause la qualité des travaux de nos collègues, qui ont inspiré la commission des lois.
Nous réglons le problème de la propriété foncière outre-mer dans un autre texte - adopté récemment - comme nous le faisons aujourd'hui pour la Corse. Nous avons assoupli les règles de gestion des biens indivis.
Je salue l'initiative d'André Reichardt d'ajouter des dispositions autorisant l'utilisation de la prescription acquisitive en Alsace et Moselle. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)
M. David Rachline . - Je me félicite de l'inscription de ce texte à l'ordre du jour. Cela règlera un problème qui empoisonne la vie de nos compatriotes corses, et le texte est issu d'un modèle de concertation. La question sera réglée dans sa globalité. Il est raisonnable que l'État abandonne les droits de mutation à 50 % - peut-être une exonération totale aurait-elle été préférable pour des familles qui pourraient se voir contraintes de vendre leurs biens ?
Le Girtec doit aller au terme de son travail - il faudra sans doute aller plus loin que le délai de dix ans prévu, les dossiers pendants étant les plus complexes. Il évalue lui-même à vingt ans le temps de travail restant.
La Corse a des spécificités qui font la richesse de la culture française, dont elle est une composante ; faisons confiance aux Corses pour les défendre contre l'uniformisation mondialiste qui nous guette.
M. Éric Bocquet . - Avec ce texte, la Corse devrait enfin disposer d'un cadastre, outil indispensable à toute activité économique : on pourra définir une véritable stratégie de conservation du patrimoine naturel. Les arrêtés Miot étaient la manifestation de l'état de droit de l'époque.
La Corse de 1801 n'est pas la région la plus riche du pays, avec des voies et chemins à la qualité médiocre. L'administration a donc estimé - souvent à zéro - les biens à distance. Ajoutez à cela deux cents ans de mutations et vous arrivez au désordre foncier. Toute la Corse n'est pas concernée. En Corse du sud, les communes perçoivent de la taxe d'habitation, mais de manière très inégale : 17 millions pour Ajaccio, 2 000 euros pour les petits villages de l'Alta Rocca. Les inégalités de taxe sur le foncier bâti sont aussi importantes : 13 millions pour Ajaccio, contre moins de 4 000 euros pour les petites communes.
Depuis 2012, le passif cadastral est peu à peu apuré ; il nous reste beaucoup à faire. Il ne faut pas cependant négliger la faiblesse des moyens dont dispose le Girtec. Avec 25 membres et un conseil d'administration de 11 membres, il ne compte que 7 agents seulement alors que 15 % du territoire corse reste à cadastrer ! La prolongation du dispositif prévu à l'article 1135 bis du Code général des impôts à laquelle procède l'article 4 est donc peu opportune.
Mme la présidente. - À ceux qui assistent à nos débats, je veux indiquer qu'à cette heure se réunissent en même temps la commission des affaires économiques, une commission d'enquête, une mission d'information, le groupe Les Républicains et le groupe de suivi du Brexit...
M. Joseph Castelli . - Ce sujet est capital pour notre île. Rassurons nos collègues du groupe Les Républicains et en particulier mon ami M. Panunzi : mon amendement lors du débat sur les ordonnances avait pour but de rappeler à tous l'urgence à examiner cette proposition de loi, portée par toutes les tendances politiques de nos îles. C'est si rare qu'il faut le souligner.
Merci à monsieur le ministre Baylet. En Corse, le droit de propriété ne peut s'exercer normalement à cause de l'absence de titre pour 33 % des parcelles cadastrées et 63 800 biens ne sont pas délimités, soit 6,4 % contre 0,4 % en moyenne sur le territoire national.
Cela produit des désordres : non seulement l'administration ne peut recouvrer les impôts, mais la revitalisation des territoires ruraux est freinée. Le Conseil constitutionnel a censuré à deux reprises les dispositions dérogatoires dans les lois de finances ; il était donc temps de mettre fin au désordre cadastral.
Le texte que nous examinons aujourd'hui a vocation à favoriser et à accélérer la reconstitution des titres de propriété, ainsi qu'à mettre fin au désordre foncier et cadastral avec des dispositifs incitatifs de nature civile et fiscale. Il s'articule autour de trois axes : améliorer le processus de titrisation des biens dépourvus d'acte de propriété ; faciliter les actes de conservation et de gestion des biens ; adopter une fiscalité spécifique incitative. Dans le prolongement des travaux du Girtec, on apporte des solutions concrètes aux Corses.
Je souhaite la même unanimité qu'à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et socialiste et républicain)
M. Vincent Delahaye . - Le droit français repose sur le principe d'égalité : la loi est la même pour tous. C'est sa définition même. Pour des raisons liées à la coutume, le droit de la propriété foncière n'a pu s'appliquer pleinement en Corse.
Il est assez scandaleux que ce régime se prolonge depuis deux siècles. De facto, le tiers du foncier est soumis à une indivisibilité de fait qui empêche le développement du marché immobilier et plus généralement le développement de l'île. Le problème doit être résolu pour que la collectivité unique de Corse qui va naître puisse prospérer. Un territoire, même insulaire, ne peut ainsi échapper plus longtemps à l'impôt.
Cela fait deux siècles que la République tente de régler ce problème, tantôt par voie administrative, tantôt par voie juridictionnelle ou législative. Cette dernière méthode semble progressive et respectueuse des propriétaires. Il s'agit de porter de 30 à 50 % la valeur des biens exonérée de droits de mutation, idem pour les droits de succession et de clarifier les droits de partage.
Le Conseil constitutionnel avait censuré ces dispositions pour des raisons de procédure. Les droits de partage peuvent se justifier, mais pourquoi toutes ces exonérations, qui peuvent avoir des effets d'aubaine ? Pourquoi faire des efforts pour rétablir des titres de propriété sinon pour percevoir des impôts ? Le Conseil constitutionnel devra trancher : il suffirait pour cela d'une question prioritaire de constitutionnalité.
Ce texte est une tentative bienvenue d'arrimer encore plus la Corse à la République. Les sénateurs centristes suivant la recommandation de la commission des lois, voteront majoritairement ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC)
M. André Gattolin . - Depuis deux siècles, la Corse a vu se développer un épais maquis cadastral, avec un régime de propriété de plus en plus informel. L'État, comme les propriétaires présumés, y perdent. Régler ce problème prend du temps : il faut rétablir le cadastre, puis détricoter des indivisions inextricables. Dans les années quatre-vingt, les notaires de Corse commencèrent à pratiquer la prescription acquisitive. Il fallut attendre trente ans pour voir arriver le Girtec.
Le rythme des régularisations reste insuffisant. Cette proposition de loi hâte le mouvement. La commission des lois a utilement encadré dans le temps et dans l'espace les dispositions des premiers articles, qui sont bienvenues.
Les trois articles fiscaux nous laissent plus circonspects. La nécessité d'une incitation n'est pas contestable. Dans certains cas, le coût de la régularisation double ou triple la valeur du bien lui-même... Mais enfin une régularisation sur dix ans est excessive. Nous regrettons que la commission des lois n'ait pas suivi ce point sur l'avis de la commission des finances, à qui elle avait pourtant délégué au fond l'examen de ces articles...
Cela aurait pu nous conduire à une abstention. Mais, sensible au consensus politique, le groupe écologiste montrera sa confiance dans le peuple et les institutions corses en votant ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)
M. Alain Richard . - Je ne reviens pas sur le contexte, bien rappelé par le ministre et le président-rapporteur. Voilà des années que le Girtec reconstitue les titres de propriété : le système rigoureux rendu possible par la prescription acquisitive doit être conforté : c'est l'objet de ce texte. Le processus est toutefois lent par définition, puisqu'il faut s'assurer au cas par cas de l'absence d'objections à la possession, dans les règles fixées par le code civil, d'un bien.
La commission a refusé d'inscrire une disposition dérogatoire dans le code civil : c'est de bon sens.
Il fallait ensuite en tirer les conséquences sur le plan fiscal, en s'appuyant sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Une exonération de 50 % des droits de mutation durant dix ans - un peu plus même puisque le délai va jusqu'à fin 2027 - paraît satisfaisante pour reconstituer un dispositif de preuve de la propriété foncière à peu près complet en Corse. Il nous appartiendra de le vérifier.
Contrairement à M. Gattolin, je ne ménagerai aucun suspense : le groupe socialiste et républicain soutiendra ce texte sans hésiter, y compris l'article 7 qui constitue, sous son apparence dérogatoire, un retour bienvenu au droit commun en Alsace et Moselle concernant la prescription acquisitive.
L'effort à poursuivre suppose la mobilisation de tous les acteurs économiques en Corse. La difficulté d'accès aux titres et le coût parfois disproportionné des actes constitutifs de la propriété par rapport à la valeur du bien représentent des obstacles à la restauration de la situation, qui est nécessaire au dynamisme de l'économie corse. Je salue l'engagement des collectivités et des élus corses. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Jean-Jacques Panunzi . - Nous avons à nous positionner sur un texte abouti, contrairement au projet de loi ratifiant des ordonnances examiné le 26 janvier, qui mettra fin au désordre foncier qui règne dans certains territoires, à commencer par la Corse.
Je veux remercier Camille de Rocca Serra à qui nous devons cette proposition de loi d'ensemble ; les parlementaires qui se sont associés à son initiative - Sauveur Gandolfi-Scheit et Laurent Marcangeli, Paul Giacobbi et François Pupponi ; les notaires qui ont accompagné cette démarche avec une mention spéciale pour Maître Pieri, présente dans nos tribunes ; l'assemblée de Corse qui a donné un avis très favorable au texte à l'unanimité le 24 septembre dernier ainsi que les présidents Simeoni et Talamoni, qui assistent à nos débats.
Je veux également remercier le Gouvernement : MM. Valls qui, Premier ministre, a démontré que la République savait être à l'écoute des territoires ; Bernard Cazeneuve qui a tenu ses engagements ; et vous-même, monsieur le ministre Baylet, qui n'avez pas ménagé votre peine pour que cette proposition de loi soit adoptée avant la fin de la législature. Merci enfin à l'Assemblée nationale qui l'a votée à l'unanimité le 8 décembre dernier.
Si le désordre cadastral est marginal à l'échelle nationale, les biens non délimités représentent 15,7 % de la surface cadastrée en Corse, contre 0,4 % en moyenne dans notre pays. D'autres territoires avaient néanmoins également besoin d'une incitation à la régularisation, parmi lesquels les Ardennes, l'Ariège, la Creuse, le Pas-de-Calais ou encore la Guyane.
Les fameux arrêtés Miot ont instauré l'absence de sanction en cas de non déclaration d'une succession ; la suppression de la contribution foncière sur laquelle reposait la liquidation des successions a généré en 1949 une exonération de fait. Cette situation a des conséquences économiques néfastes. La détention des biens par de multiples héritiers entraîne une dilution des responsabilités, complique l'entretien des biens et alimente de nombreux contentieux familiaux. Les autorités publiques se trouvent en difficulté pour collecter l'impôt, foncier, d'habitation et, surtout, de transmission, et faire appliquer la réglementation - environnementale, entre autres.
Le désordre cadastral n'est pas un privilège, il est un frein. Jusqu'alors, on s'était, à tort, concentré sur les aspects fiscaux. Or fiscaliser le désordre accroît la confusion. Ce texte s'inscrit dans la continuité de la volonté que le législateur a exprimée par les lois de 2002 et de 2006. Le Girtec, qui n'a été opérationnel que fin 2010, sera pérennisé jusqu'en 2027. Ce texte global apporte une véritable réponse au désordre cadastral en cinq articles.
J'invite le Sénat à le voter avec la même unanimité que les députés. (Applaudissements au centre et à droite et sur les bancs du groupe RDSE)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Jean Louis Masson . - Tous les Français doivent être égaux face à la loi et aux charges fiscales. Or en Corse, tout un tas de dispositifs permet de contourner la règle commune... Certains orateurs ont tenté de nous faire pleurer sur ces pauvres corses privés de cadastre alors qu'ils sont bien contents de ne pas payer d'impôts ! Il y a onze ans, on nous promettait déjà de mettre de l'ordre... et on exonère encore jusqu'à 2027 ? Je ne voterai rien de ce texte.
L'article premier est adopté, de même que l'article 2.
ARTICLE 3
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Rédiger ainsi cet article :
Au premier alinéa du 8° du 2 de l'article 793 du code général des impôts, l'année : « 2017 » est remplacée par l'année : « 2020 ».
M. Éric Bocquet. - Les positions de la commission des lois et de la commission des finances étaient inconciliables sur cet article. Finalement, l'exonération partielle des droits de mutation est prolongée de dix années. Il faut saluer le travail du Girtec qui a permis de percevoir 42 millions d'euros de droits en 2015. Entre 2012 et 2017, l'abattement était de 30 % : il passerait à 50 % jusqu'en 2027, ce qui diminuerait les résultats obtenus par le Girtec.
N'oublions pas que chaque héritier en ligne directe est exonéré jusqu'à 100 000 euros de droits de mutation et que le conjoint survivant l'est totalement. Cet article, sans cet amendement, représenterait une prime aux ménages aisés qui ont tardé à régulariser leur situation.
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois - Commission des lois et commission des finances sont en parfait accord sur la rédaction de cet article. Cet amendement reprend une disposition écartée en commission, ramenant le taux de l'exonération à 30 % et le délai, de dix à trois ans. Vous voulez laisser au Girtec le temps de travailler ? Mieux vaut, dans ce cas, opter pour 2027. Avis défavorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Votre amendement réduit totalement la portée de la prorogation du dispositif dérogatoire. Surtout, il relance la navette parlementaire, ce qui limiterait les chances de voir ce texte adopté avant la fin de la législature. Si vous souhaitez vraiment faciliter le travail du Girtec, je vous conseille de le retirer...
L'amendement n°1 est adopté.
L'article 3 est adopté.
ARTICLE 4
Mme la présidente. - Amendement n°2, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
1° Alinéa 2
Remplacer l'année :
2027
par l'année :
2020
2° Alinéa 3
Remplacer l'année :
2028
par l'année :
2021
M. Éric Bocquet. - C'est un amendement de conséquence.
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission. - Avis défavorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Même avis.
L'amendement n°2 n'est pas adopté.
L'article 4 est adopté.
ARTICLE 5
Mme la présidente. - Amendement n°3, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Alinéa 2
Remplacer l'année :
2027
par l'année :
2020
M. Éric Bocquet. - Défendu.
L'amendement n°3, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 5 est adopté.
L'article 6 demeure supprimé.
L'article 7 est adopté.
La proposition de loi est adoptée.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Je veux vous dire ma satisfaction d'avoir inscrit ce texte à l'ordre du jour gouvernemental. Sans cela, le Sénat n'aurait pas pu adopter ce texte, si important pour mettre fin au désordre cadastral en Corse. Vous avez fait preuve d'une belle unanimité ; tout au moins, aucun sénateur n'a voté contre.
Je veux également saluer l'auteur de la proposition de loi, M. de Rocca Serra et les présidents Talamoni et Simeoni présents en tribunes. Merci pour les Corses ! (Applaudissements des bancs du groupe socialiste et républicain aux bancs du groupe Les Républicains)
CMP (Nominations)
Mme la présidente. - Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle.
La liste des candidats établie par la commission des affaires économiques a été publiée conformément à l'article 12 du Règlement.
N'ayant reçu aucune opposition, je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire : membres titulaires, MM. Jean-Claude Lenoir, Daniel Gremillet, Mme Sophie Primas, MM. Daniel Dubois, Henri Cabanel, Franck Montaugé, Michel Le Scouarnec ; membres suppléants, Mme Delphine Bataille, M. Martial Bourquin, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Joël Labbé, Mme Élisabeth Lamure, MM. Jean Jacques Lasserre et Jackie Pierre.
Nominations à d'éventuelles CMP
Mme la présidente. - Dans le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion de commissions mixtes paritaires chargées d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la sécurité publique ; du projet de loi ratifiant les ordonnances du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse, du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse et du 21 novembre 2016 portant diverses mesures électorales applicables en Corse ; de la proposition de loi portant réforme de la prescription en matière pénale ; et de la proposition de loi visant à favoriser l'assainissement cadastral et la résorption du désordre de propriété.
Il va être procédé à la nomination des membres de ces commissions mixtes paritaires.
Les listes des candidats ont été publiées ; je n'ai reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 12 du Règlement.
En conséquence, je proclame représentants du Sénat à ces éventuelles commissions mixtes paritaires : pour le projet de loi relatif à la sécurité publique, membres titulaires, MM. Philippe Bas, François Grosdidier, Philippe Paul, Mme Lana Tetuanui, MM. Philippe Kaltenbach, René Vandierendonck, Mme Éliane Assassi ; membres suppléants, M. François-Noël Buffet, Mme Jacky Deromedi, MM. Roger Madec, Jacques Mézard, François Pillet, Alain Richard, François Zocchetto ; pour le projet de loi ratifiant plusieurs ordonnances relatives à la Corse, membres titulaires, MM. Philippe Bas, Hugues Portelli, Charles Guené, Mme Lana Tetuanui, MM. Philippe Kaltenbach, René Vandierendonck, Christian Favier ; membres suppléants, MM. Mathieu Darnaud, Roger Madec, Jacques Mézard, Alain Richard, Mme Catherine Troendlé, MM. Alain Vasselle, François Zocchetto ; pour la proposition de loi portant réforme de la prescription en matière pénale, membres titulaires, MM. Philippe Bas, François-Noël Buffet, François Pillet, Mme Lana Tetuanui, MM. Philippe Kaltenbach, René Vandierendonck, Mme Cécile Cukierman ; membres suppléants, Mme Jacky Deromedi, MM. François Grosdidier, Roger Madec, Jacques Mézard, Hugues Portelli, Alain Richard, François Zocchetto ; pour la proposition de loi visant à favoriser l'assainissement cadastral et la résorption du désordre de propriété, membres titulaires, MM. Philippe Bas, André Reichardt, Mmes Catherine Troendlé, Lana Tetuanui, MM. Philippe Kaltenbach, René Vandierendonck, Mme Cécile Cukierman ; membres suppléants, M. François Bonhomme, Mmes Jacky Deromedi, Catherine Di Folco, MM. Roger Madec, Jacques Mézard, Alain Richard, François Zocchetto.
Ces nominations prendront effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de ces commissions mixtes paritaires et dès que M. le Président du Sénat en aura été informé.
La séance est suspendue à 16 heures.
présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente
La séance reprend à 16 h 45.
Consommation (Conclusions de la CMP)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi ratifiant les ordonnances n°2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation et n°2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d'habitation et simplifiant le dispositif de mise en oeuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services.
M. Martial Bourquin, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - Le 17 janvier dernier, la CMP est parvenue à un accord à l'unanimité, et ses conclusions ont d'ores et déjà été adoptées par l'Assemblée nationale le 26 janvier. Ce projet de loi avait à l'origine une ambition limitée, bien qu'indispensable : donner force de loi à deux ordonnances relatives au droit de la consommation tout en apportant des corrections techniques à la recodification du code de la consommation. Le Sénat, en première lecture, y a ajouté des dispositions de fond votées dans le cadre de la loi Sapin 2 et censurées par le Conseil constitutionnel en tant que cavaliers législatifs ou contraires à la règle de l'entonnoir : aménagement des modalités du droit de rétractation en cas d'achat de métaux précieux, remboursement des frais et taxes aéroportuaires en cas d'annulation de transports aériens outre-mer et, surtout, droit de substitution annuel pour les contrats d'assurance emprunteur.
Cette dernière disposition faisait débat depuis des années. L'Assemblée nationale l'avait adoptée, dans le cadre de la loi Sapin 2, aussi bien pour les contrats en cours que pour les nouveaux contrats. Le Sénat, souhaitant lui aussi favoriser la concurrence sur ce marché, avait cependant limité cette mesure aux nouveaux contrats.
Selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, cependant, une législation nouvelle peut affecter les contrats en cours à condition que cela réponde à un motif d'intérêt général suffisant et que la mesure soit proportionnée à cet objectif. Les conditions nous paraissant remplies, Audrey Linkenheld et moi-même avons proposé à la CMP d'étendre le droit de substitution aux contrats en cours, ce qu'elle a accepté.
Le motif d'intérêt général est double. Tout d'abord, nul ne le conteste, le marché de l'assurance emprunteur est oligopolistique, entre les mains des filiales des grands groupes bancaires, avec un taux de commissionnement de 40 à 50 euros pour 100 euros de prime, ce qui est économiquement injustifiable. Le droit de résiliation permettra aux titulaires des huit millions de contrats concernés, pour six milliards d'euros de primes, de bénéficier d'assurances moins chères, soit auprès d'un concurrent, soit en obtenant la renégociation de leur contrat. L'argent économisé pourra être réinvesti dans la consommation quotidienne.
Ensuite, la jurisprudence actuelle de la Cour de cassation rend les consommateurs captifs. La durée des contrats d'assurance emprunteur s'allonge, en effet, avec celle des prêts immobiliers, et peut atteindre jusqu'à vingt ans. C'est contraire à l'esprit de la loi Chatel de 2005.
La mesure est d'autant plus proportionnée qu'elle ne s'appliquera qu'à partir du 1er janvier 2018, ce qui laissera aux professionnels le temps de s'adapter et assurera l'homogénéité entre les contrats : pour les nouveaux contrats, en effet, le nouveau droit de résiliation ou de substitution s'exercera à partir de 2018, puisqu'il existe déjà au cours des douze premiers mois depuis 2014.
Je vous invite donc à voter ce texte qui renforce les droits des consommateurs et rendra 3 milliards d'euros aux familles, accélérant la relance du bâtiment et favorisant l'accession à la propriété. C'est l'intérêt des familles, et c'est l'intérêt de notre économie. (Applaudissements à gauche)
Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire . - Ce texte achève le toit de la grande maison des droits des consommateurs. La recodification du code de la consommation, préparée depuis une décennie et entrée en vigueur le 1er juillet, offre aux consommateurs plus de lisibilité sur leurs droits et aux entreprises plus de sécurité juridique.
S'agissant du crédit immobilier, la directive du 4 février 2014 a favorisé l'avènement d'un marché intérieur responsable, qui protège le consommateur, avec notamment une fiche d'information standardisée et une évaluation de la solvabilité de l'emprunteur.
Autres mesures qui sont le fruit d'un travail de qualité, que je tiens à saluer : le remboursement des taxes d'aéroport et les aménagements apportés au droit de rétractation en cas de vente de métaux précieux.
Sur le droit de substitution annuel de l'assurance emprunteur, le Gouvernement s'en remet à l'accord unanime trouvé en CMP, traitant indistinctement les nouveaux contrats et le stock de contrats en cours.
Je veux vous remercier pour vos travaux et souhaite que ce texte rencontre l'approbation la plus large. (Applaudissements à gauche)
M. Michel Le Scouarnec . - Le projet de loi introduit de nouvelles obligations renforçant l'information des emprunteurs : information générale, fiche d'information standardisée, évaluation de la solvabilité, devoir d'alerte et de conseil, évaluation du bien acheté... C'est une bonne chose.
L'assurance emprunteur, elle, devait pouvoir être résiliée chaque année ; mais cette disposition de la loi Sapin 2 avait été censurée par le Conseil constitutionnel. Or la concurrence fait défaut dans ce secteur : ce marché de 6 milliards d'euros est accaparé à 88 % par les banques, qui réalisent jusqu'à 50 % de marge, et l'assurance représente en moyenne 30 % du coût du crédit... Faire baisser les primes serait bienvenu en temps de crise.
Surtout, en laissant à l'emprunteur sa liberté de choix tout au long de la durée du contrat, on garantit l'effectivité du droit à l'oubli, comme le souligne UFC-Que Choisir. Car un emprunteur, ancien malade, peut devenir éligible au droit à l'oubli en cours de contrat ; pourquoi continuerait-il à payer des surprimes exorbitantes, jusqu'à 300 % de la prime de base ?
Vous le savez, nous ne sommes pas, par principe, friands d'ordonnances ; mais il est indispensable que le droit de substitution soit inscrit dans la loi. Le groupe CRC votera les conclusions de la CMP. (Applaudissements à gauche)
M. Guillaume Arnell . - Si le rôle du Sénat est quelquefois mis en cause, sa contribution au présent texte illustre de manière éclatante son utilité et la qualité de ses travaux.
La CMP a adopté à l'unanimité l'amendement incluant les outre-mer dans le dispositif de remboursement des taxes aéroportuaires, en cas d'annulation de vol, dont elles avaient été exclues par erreur par la loi de transition énergétique : nous nous en réjouissons.
Sur l'assurance emprunteur, l'épilogue est heureux, après les longues controverses jurisprudentielles et doctrinales ayant suivi l'adoption des lois Lagarde, Hamon et Sapin 2. Il faut protéger les consommateurs contre le monopole des banques, qui pratiquent des taux exorbitants.
Les dispositions contenues dans les deux ordonnances sont variées et essentiellement techniques. La première entérine une réécriture du code à la consommation, renforçant l'intelligibilité et l'accessibilité d'un droit qui a beaucoup évolué depuis 1993. Il est désormais ordonné selon la chronologie de l'acte d'achat, tandis que les règles encadrant les pouvoirs de l'administration sont clarifiées et regroupées.
La seconde ordonnance, celle du 25 mars 2016, est relative aux contrats de crédit aux consommateurs. Elle transpose la directive du 4 février 2014, qui donne un cadre juridique commun aux crédits immobiliers et hypothécaires.
En mai 2016, le groupe RDSE avait approuvé la proposition de résolution affirmant la nécessité de protéger le système de crédit immobilier français dans le cadre des négociations de Bâle. De la même manière, notre groupe approuvera ce texte tel qu'il ressort des travaux de la CMP. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, socialiste et républicain et écologiste)
M. Jean-Claude Luche . - Ces ordonnances étaient attendues et nécessaires. La refonte du code de la consommation, pour laquelle le Gouvernement avait déjà reçu habilitation en 2008 et 2010, n'avait pas abouti ; c'est chose faite depuis l'ordonnance du 14 mars 2016. Elle était devenue nécessaire, compte tenu des réformes successives et des nouvelles normes européennes. Le code a été rendu plus lisible pour les consommateurs et les professionnels, son organisation clarifiée, et des notions centrales comme celles de consommateur ou de professionnel ont été définies ; les procédures de contrôle de l'administration sont sécurisées. Je salue tout particulièrement le travail sur la partie réglementaire, avec notamment des annexes précieuses comportant un modèle de formulaire de rétractation, un modèle d'assurance emprunteur ou encore les informations à connaître avant de signer un contrat de crédit immobilier. Je pense aussi aux dispositions applicables au rachat de métaux précieux et à la création d'une nouvelle contravention pour sanctionner la détention, l'absence de retrait et de rappel des denrées alimentaires impropres à la consommation. Une table de concordance et l'accompagnement de la DGCCRF faciliteront la transition.
La seconde ordonnance transpose la directive du 4 février 2014, prise après la crise des subprimes, qui avait pourtant peu touché la France où le crédit hypothécaire est très peu développé. Il faut se réjouir néanmoins des nouvelles règles, qui améliorent encore l'encadrement du marché du crédit immobilier.
Le 9 mars 2016, la Cour de cassation censurait l'application aux contrats d'assurance emprunteur du droit de résiliation annuel prévu par le code des assurances. Il fallait trouver une solution équilibrée et conforme à la jurisprudence constitutionnelle, ce qui a été fait. Les prêteurs seront ainsi mis en concurrence sur un marché où les banques pratiquent des taux de marge de près de 50 %. Différer l'application de ce nouveau droit apaisera les inquiétudes des banquiers, même si cela ne paraît pas entièrement justifié pour le stock...
La réussite de cette réforme dépendra en définitive de l'information du consommateur.
M. Marc Daunis. - C'est vrai.
M. Jean-Claude Luche. - Trop souvent encore, l'assurance emprunteur est contractée de manière automatique, en même temps que l'emprunt. Et les prêteurs sont réticents à accepter les substitutions - c'est un ancien employé de banque qui vous le dit...
Le groupe UDI-UC votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-UC, socialiste et républicain, RDSE et écologiste)
M. Jean Desessard . - Je ne voudrais pas répéter les arguments excellemment avancés par les précédents orateurs. Un point cependant...
M. Marc Daunis. - Ah !
M. Jean Desessard. - Fin décembre, nous avons eu de vifs débats sur la rétroactivité du droit de substitution de l'assurance emprunteur, autrement dit son application au stock des contrats en cours. La proposition de notre rapporteur, que je remercie, a permis de surmonter les réticences en laissant un temps d'adaptation aux banques ; elle a été adoptée à l'unanimité par la CMP, ce qui assoit la position du Parlement face au juge constitutionnel.
Comme le disait Joël Labbé, le motif d'intérêt général justifiant la rétroactivité existe bel et bien, malgré l'agitation du puissant monde bancaire. Il oppose le risque de démutualisation, mais l'argument vaudrait aussi bien pour les nouveaux contrats.
Le groupe écologiste votera le texte. (Applaudissements à gauche)
Mme Delphine Bataille . - La CMP, ce n'est pas si fréquent, a voté unanimement en faveur de ce texte qui offre de nouveaux droits à nos concitoyens. La première ordonnance ratifiée, consensuelle, recodifie à droit constant le code de la consommation pour plus de lisibilité, tout en harmonisant les pouvoirs de contrôle de l'administration pour plus de sécurité juridique et d'efficacité. Rendre le droit de la consommation plus accessible et plus sûr, c'est augmenter le pouvoir d'achat et faciliter l'exercice de nouveaux droits, comme l'action de groupe.
La seconde ordonnance transpose la directive favorisant l'émergence d'un marché unique du crédit immobilier. Elle améliore la protection du consommateur et crée un statut européen pour les intermédiaires. Le crédit immobilier est très encadré en France, mais les nouvelles obligations n'en sont pas moins bénéfiques pour les emprunteurs.
L'assurance emprunteur obligatoire, qui protège les emprunteurs contre les risques de la vie et garantit aux prêteurs le remboursement du capital, est très importante. La loi Sapin 2 avait ouvert un droit de substitution pour les contrats en cours ou à venir, mais le Conseil constitutionnel y avait vu un cavalier législatif. De nombreux parlementaires sont néanmoins restés mobilisés.
La loi Consommation de 2014 a amélioré l'information de l'emprunteur, lui a donné la liberté de choisir son assureur, à condition que le contrat choisi offre les mêmes garanties que celui proposé par la banque, mais aussi la possibilité de substituer un nouveau contrat sans frais ni pénalités au cours des douze premiers mois, afin d'encourager la concurrence dans un secteur où les tarifs sont très élevés : les primes peuvent représenter 30 à 40 % du coût de l'emprunt, voire plus de 50 % pour un prêt à taux zéro. Mais les dispositions de la loi Consommation ne sont pas suffisamment utilisées, faute pour les consommateurs d'information et de temps pour exercer leur droit.
Or les marges sont très importantes : huit millions d'emprunteurs sont concernés. Merci donc à M. Bourquin pour son travail.
Le Sénat, en première lecture, avait restreint ce droit aux seuls contrats nouveaux. Mais il est loisible au législateur de modifier des contrats en cours pour des motifs d'intérêt général. Nous nous félicitons de l'accord trouvé en CMP, grâce à nos rapporteurs et au soutien de Yannick Vaugrenard.
Dès 2018, ce marché oligopolistique sera ouvert à de nouveaux acteurs ; des personnes malades pourront renégocier leurs primes. Le groupe socialiste et républicain votera ce texte qui redonnera du pouvoir d'achat aux ménages. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste)
M. Daniel Gremillet . - Revenons sur un point qui nous occupe depuis plusieurs mois, donnant lieu à quelques passes d'armes : le droit de substitution d'un contrat d'assurance emprunteur. Je salue cette avancée considérable, notamment pour des personnes en risque aggravé.
Certains avaient voulu raccourcir les étapes de notre décision. Pour ma part, j'y vois la preuve du sérieux du Sénat, qui devait prendre le temps de la réflexion. Nous ne disposons toujours pas de l'étude d'impact promise, cela devrait venir ce printemps.
D'un point de vue de la procédure parlementaire, d'une part, il pourrait être difficile de légiférer sur ce point après la loi de 2014 sur les études d'impact. Nous avons, d'autre part, été confrontés à la règle de l'entonnoir. Mais la commission des affaires économiques a pris le temps de réfléchir à la possibilité d'une application du droit de substitution aux contrats en cours. À la suite de cette réflexion, nous avons décidé de ne pas l'autoriser en l'état.
C'est encore une fois la sagesse du Sénat qui permit le succès de cette commission mixte paritaire.
M. Charles Revet. - Et oui, le Sénat apporte beaucoup !
M. Daniel Gremillet. - Les députés eux-mêmes l'ont reconnu, il était préférable de ne pas permettre une substitution des contrats en cours tout de suite. La rédaction retenue permet de toucher tous les emprunteurs. Je me réjouis grandement de cet accord en CMP.
On a parlé d'un gain de trois milliards d'euros. Dans un tel contexte, on sait bien que ce sont les initiés qui seront les plus réactifs. Les plus fragiles financièrement risquent fort de ne pas oser aller voir leur banque, par crainte de remettre en cause l'emprunt qui a leur permis d'accéder à la propriété - le projet d'une vie.
Avec la convention Aéras a été dressée une liste de pathologies ne donnant pas lieux à une majoration. Le monde des assureurs doit l'appliquer.
Je propose que le groupe de travail se réunisse dans quelques mois pour tirer le bilan de cette belle avancée. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Marc Daunis. - Très bien !
La discussion générale est close.
Mme la présidente. - En application de l'article 42, alinéa 12 du Règlement, le Sénat examinant après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.
Les conclusions de la CMP sont adoptées.
En conséquence, le projet de loi est adopté définitivement.
M. Charles Revet. - Belle unanimité !
Avis sur une nomination
Mme la présidente. - En application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique et de la loi du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable par 26 voix pour, 3 voix contre, à la nomination de M. Jean-François Carenco aux fonctions de président du collège de la commission de régulation de l'énergie.
Prochaine séance, demain, jeudi 9 février 2017 à 11 h 30.
La séance est levée à 17 h 45.
Marc Lebiez
Direction des comptes rendus
Ordre du jour du jeudi 9 février 2017
Séance publique
À 11 h 30
Présidence : M. Gérard Larcher, président
Secrétaires : MM. François Fortassin et Jean-Pierre Leleux
1. Dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes par M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes
À 15 heures
Présidence : M. Gérard Larcher, président
2. Questions d'actualité au Gouvernement
À 16 h 15
Présidence : Mme Isabelle Debré, vice-présidente
3. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l'ordonnance n°2016-1519 du 10 novembre 2016 portant création au sein du service public de l'emploi de l'établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes (n°318, 2016-2017)
Rapport de M. Michel Forissier, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°356, 2016-2017)
Texte de la commission (n°357, 2016-2017)