Modernisation, développement et protection des territoires de montagne (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
Discussion générale
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales . - Au nom du Gouvernement, je m'associe à votre hommage et salue la mémoire de Jean-Claude Frécon. Il aurait été heureux de participer à ce débat, lui qui avait une passion pour les territoires et la défense des services publics. C'était un homme d'engagement, de rigueur, de conviction et de tolérance. Au nom du Gouvernement, je présente mes condoléances à sa famille et je dis toute mon amitié au groupe socialiste et à son président.
Historiquement les territoires de montagne ont toujours constitué une marge et une périphérie. Leurs habitants ont longtemps été marginalisés, voire méprisés. Situés aux frontières, nos massifs n'en ont pas moins été stratégiques. Ils ont aussi été des abris - la région autour du Chambon-sur-Lignon fut la terre d'accueil des Huguenots, des Républicains espagnols, puis de milliers de juifs.
Les hommes ont su tirer profit des contraintes de ces espaces pour les développer et les sortir de leur enclavement : hydroélectricité, sidérurgie, industrie, tourisme, autant de facteurs d'attractivité.
Mais ces territoires sont hétérogènes. Dans leur fragilité et leur diversité, ils méritent une attention sans cesse renouvelée. La première loi Montagne de 1985 a été un acte fondateur. Elle a posé le principe d'adaptation en tant que de besoin aux spécificités des territoires de montagne. Elle reposait sur un juste équilibre entre le nécessaire développement de ces territoires et l'impératif de protection de leur environnement.
Trente ans plus tard, nous pouvons prendre la mesure du caractère visionnaire de ce texte, de l'ampleur des innovations qu'il a proposées mais aussi du besoin d'actualisation. Les modes de vie ont changé, les besoins des habitants évolués.
Le Premier ministre avait commandé un rapport aux députées Genevard et Laclais, l'une de la majorité, l'autre de l'opposition, qu'elles ont remis en septembre 2015 ; il a inspiré le texte que je vous présente. L'approche transpartisane a toujours prévalu, qui a donné un cadre aux échanges et permis de définir un calendrier : nous devons faire aboutir ce texte avant la fin de l'année.
Cet « attelage » a permis d'enrichir le texte, qui est passé de 25 à 75 articles. Quatre axes le structurent. Le titre I traite de la spécificité des zones de montagne et de chaque massif. Comme l'a écrit Montesquieu, les lois « doivent être relatives au physique du pays, au climat glacé, brûlant ou tempéré ; à la qualité du terrain, à sa situation, à sa grandeur ; au genre de vie des peuples, laboureurs, chasseurs, ou pasteurs ». Le texte réaffirme le principe d'adaptation des politiques publiques à ces spécificités, éventuellement sous forme d'expérimentation.
Le titre I renforce le Conseil national de la montagne dans ses missions et sa représentation ; il sera doté d'un vice-président par ailleurs président de la commission permanente, ce qui assurera un fonctionnement plus régulier de l'institution. Il pourra aussi saisir le Conseil national d'évaluation des normes. Les comités de massif sont eux aussi renforcés.
L'Assemblée nationale a complété le schéma régional de santé, pour mieux prendre en compte le temps d'intervention des secours. Elle a prévu aussi la participation d'un membre du Comité de massif au Conseil territorial de santé.
La difficile et déterminante question du numérique est évidemment abordée. Le premier chapitre du titre II adapte les investissements publics aux contraintes du relief.
J'en profite pour rappeler que l'État prend déjà en charge l'intégralité du coût des pylônes reliant les centres-bourgs en 3G d'ici mi-2017 ; 1 300 autres sites seront équipés en 3G puis en 4G d'ici 2019, et non plus 2022 - l'État participe à hauteur de 75 %, soit plus de 42 millions d'euros.
À l'Assemblée nationale comme ici, cette partie du texte a donné lieu à de nombreux amendements, notamment pour prioriser la montagne dans le cadre du programme de résorption des zones blanches. Cela confirme l'importance de cette thématique : il s'agit d'accélérer l'accès aux technologies sur tout le territoire. (Marques d'approbation)
Un second chapitre aborde le travail saisonnier et la pluriactivité. Formation professionnelle et accès aux services, tels sont les enjeux.
Enfin, pour répondre aux immenses difficultés que les saisonniers rencontrent pour l'accès au logement, le texte propose la mobilisation de logements vacants par les bailleurs sociaux et un plan concerté entre les communes et les acteurs locaux de l'habitat.
Favoriser le développement économique des massifs implique de développer agriculture et tourisme. La place du pastoralisme a été confortée par l'Assemblée nationale, notamment sous la forme des Groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC). Le Gouvernement vise également une meilleure reconnaissance de l'agriculture de montagne.
S'agissant des grands prédateurs, l'Assemblée nationale a adopté le principe d'adaptation à la situation de chaque massif - le loup ici, l'ours là... Un équilibre a été atteint, que je souhaite préserver.
La loi NOTRe a prévu de confier la compétence « promotion du tourisme » aux EPCI au plus tard au 1er janvier 2017. Certaines communes s'en inquiètent. L'article 18 autorise une dérogation pour les communes classées « station de tourisme » ou en cours de classement sous réserve d'une délibération du conseil municipal avant le 1er janvier 2017. Les députés ont également précisé la notion du classement. Je ne vois pas d'inconvénient à parfaire la rédaction du texte. Quoi qu'il en soit, cet article ne s'appliquera que si le texte est voté d'ici la fin de l'année.
Avec la réhabilitation de l'immobilier de loisirs, il s'agit de lutter contre le phénomène dit des « lits froids ». Nous réorientons le Censi-Bouvard pour soutenir la réhabilitation du parc existant plutôt que d'encourager les constructions neuves. Dans le cadre des opérations de réhabilitation de l'immobilier de loisirs (ORIL), un amendement adopté à l'Assemblée nationale a introduit une obligation d'information des copropriétaires en cas de vente d'un logement en résidence de tourisme.
Le texte modifie la procédure des Unités touristiques nouvelles (UTN) ; à la demande de l'Association nationale des élus de montagne (ANEM), j'ai renoncé à procéder par ordonnance de sorte que le Parlement en débatte. La concertation engagée avec les élus et les représentants des professionnels s'est prolongée. L'objectif est de concilier la planification des projets par les élus et une certaine souplesse, sans renoncer à leur maîtrise de l'urbanisme communal. D'où la procédure particulière en dehors des Scot, pour la mise en compatibilité des documents d'urbanisme nécessaire à la réalisation d'UTN qui n'auraient pas été prévus dans les Scot, PLU ou PLUI. Cet accord exigeant a permis de valider l'ensemble de la réforme des UTN. Ne remettons pas en cause cet équilibre.
Le projet de loi renforce en outre le rôle des parcs naturels régionaux (PNR) afin notamment d'améliorer la protection de leur biodiversité. Sans imposer de réglementation supplémentaire, il ouvre la possibilité de créer une « zone de tranquillité », de sorte que les différents usages soient conciliés tout en préservant le développement des espèces. Un accord a été trouvé avec l'Assemblée nationale pour réserver cette possibilité aux seuls parcs nationaux.
Les commissions du développement durable, des affaires économiques, des affaires sociales et des lois du Sénat ont fait évoluer ce texte en intégrant une centaine d'amendements. Je salue un travail de qualité, la suppression de dispositions redondantes et des demandes de rapport au Gouvernement. Vous connaissez ma position sur la multiplication des rapports... Vous avez complété les mesures proposées par l'Assemblée nationale sur le numérique, les offices du tourisme et les UTN ; les amendements que vous proposez respectent l'accord auquel nous sommes parvenus, avec des précisions utiles.
Il reste néanmoins des points de dissension comme les dispositions relatives au Fonds national de péréquation des ressources intercommunales (FPIC), le dispositif transitoire de sortie de classement en zone de revitalisation rurales (ZRR) - je serai en mesure de vous communiquer fin janvier la nouvelle carte des ZRR - les conditions d'exonération de l'autorisation de défrichement, ou l'assouplissement de celles qui assouplissent la construction en discontinuité.
Nous aurons aussi à discuter du rétablissement de la disposition qui permet de mettre en place des zones de tranquillité dans les parcs nationaux. La mesure est facultative ; elle n'en reste pas moins importante.
C'est par l'écoute, le dialogue et la recherche de solutions pragmatiques que nous avons abouti à l'Assemblée nationale à l'adoption du texte à la quasi-unanimité. Le seul député à avoir voté contre souhaitait qu'on repérât son vote... - il s'agit de notre ami du Béarn Jean Lassalle.
Je ne doute pas que nous parviendrons à trouver un compromis dans les délais impartis, c'est-à-dire avant la fin de l'année. J'espère que le Sénat, réputé pour sa sagesse, trouvera un juste consensus dans l'intérêt de la montagne, de ses territoires et de ceux qui y vivent. (Applaudissements)
M. Cyril Pellevat, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - La montagne est un trésor national qui doit être préservé et valorisé par tous. Relancer la politique nationale de la montagne, tel est l'objet du texte.
La montagne est un lieu de vie et d'activité pour plus de 6 millions de Français. Elle accueille une économie riche et diversifiée, 600 000 entreprises et 15 millions d'actifs. Une exploitation agricole sur six est en montagne, le tourisme pèse pour 15 % dans le PIB. La montagne occupe une place particulière dans l'identité de notre pays. La beauté de ses paysages, sa biodiversité, ses forêts, son rôle de château d'eau en font un bien commun de la Nation. Une politique de la montagne est indispensable pour prendre en compte ces atouts comme les difficultés liées au relief.
Le texte de 1985 était particulièrement novateur dans sa volonté d'un développement durable de la montagne. Mais de nouveaux enjeux ont surgi, liés notamment au réchauffement climatique. D'où la nécessité d'actualiser la loi.
Le Gouvernement a confié aux députées Genevard et Laclais la réalisation d'un rapport qui a été remis en septembre 2015. En collaboration avec l'Anem et les acteurs de terrain, le Gouvernement a proposé un texte qui a été adopté à la quasi-unanimité à l'Assemblée nationale. Je salue les rapporteurs des cinq commissions du Sénat qui ont travaillé sur ce texte, ainsi que Jean-Yves Roux, le président du groupe d'études sur la montagne.
La commission du développement durable a délégué une trentaine d'articles à la commission des affaires économiques, une dizaine à celle des affaires sociales. La commission des lois s'est saisie pour avis et celle de la culture a produit une communication.
Des précisions ont été apportées sur les objectifs de la politique de la montagne, les secours, l'organisation scolaire, la prévention des risques naturels ; le volet numérique a été renforcé et l'article 16 précisé pour garantir sa conformité au droit international et européen. Quant aux zones de tranquillité, nous avons estimé que le droit en vigueur permettait déjà de les créer dans les PNR.
Nous proposons au Sénat d'adopter une loi utile, équilibrée et pérenne pour les territoires de montagne. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques . - Le développement économique est essentiel pour les territoires de montagne. La loi de 1985 a plutôt bien réussi. On compte 6 millions d'habitants en montagne et des activités multiples, agriculture, exploitation forestière, tourisme mais aussi industrie et artisanat.
Le développement doit être accompagné en tenant compte des spécificités de la montagne. Cet accompagnement existe - ICHN, CNM, comités de massif. Nous devons encore moderniser nos territoires, par exemple en accélérant le développement du numérique.
La commission du développement durable a délégué vingt-six articles à la commission des affaires économiques qui s'est également saisie de treize autres articles.
Nous avons adopté 43 amendements qui ne remettent pas en cause l'équilibre du texte.
Concernant l'agriculture, nous avons encouragé les GAEC à participer à des groupements pastoraux ; souhaité que le défrichement reste contrôlé, proposé une exonération de redevance pour les prélèvements dans les petits canaux d'irrigation gérés collectivement, indispensables à l'agriculture familiale.
Concernant la forêt, les mesures vont dans le bon sens. Nous avons précisé le plan de gestion des propriétaires privés, traité des difficultés d'exploitation et de desserte, proposé d'aligner les pénalités pour coupes illicites en forêt publique sur celles des forêts privées. Nous avons fait obligation à l'ONF d'instruire les dossiers de restauration des zones de montagne.
Quant à la rénovation de l'immobilier de loisir en montagne, nous sommes favorables à ce que propose le texte, même si nous avons simplifié le cadre des UTN.
Sur le tourisme, nous avons soutenu l'idée que Bpifrance intervienne en faveur des entreprises touristiques. Nous avons approuvé la création de servitudes nouvelles sur le domaine skiable et adopté des mesures pour encourager le ski nordique.
La commission n'était saisie que pour avis sur le numérique. Elle n'a pas proposé d'amendements. Les dispositions du texte vont dans le bon sens.
Le projet Montagne II est une modernisation, un approfondissement. Aidons les territoires de montagne, territoires d'excellence, favorisons le développement d'activités multiples, c'est la meilleure garantie du maintien de l'équilibre territorial, indispensable à la France. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales . - Saisie de 12 amendements, dont 10 délégués au fond, la commission des affaires sociales partage globalement les orientations du projet de loi qui s'inscrit dans la continuité de la loi Montagne de 1985. Les questions de santé et de travail y étaient abordées du point de vue de l'administration territoriale et du tourisme. Les enjeux ont évolué depuis trente ans ; il importe de garantir un égal accès aux soins de tout le territoire, de surmonter les difficultés liées au transport mais aussi à la désertification médicale.
Notre commission s'est montrée favorable à l'article 8 quinquies sur les propharmacies ; elle a simplement apporté des précisions pour plus de sécurité juridique. Elle a précisé le champ d'application de l'article 8 sexies relatif à la traduction, dans les schémas régionaux, des besoins de santé des habitants de montagne. Elle n'a pas maintenu l'article 8 quinquies qui visait à demander un rapport au Gouvernement sur la compensation des surcoûts : certaines questions relèvent de négociations conventionnelles, certaines mesures sont trop récentes pour être évaluées.
La commission des affaires sociales a approuvé les dispositions sur le travail ou la formation professionnelle, de portée limitée ou technique. Elle espère que l'expérimentation du CDI intermittent sera une réussite ; elle se réjouit que deviennent éligibles à l'activité partielle les régies gérant des remontées mécaniques qui ne disposent pas de la personnalité juridique. Les salariés seront mieux protégés, en cas par exemple de déficit d'enneigement. Mais il y a des difficultés juridiques, il faut donc préciser le cadre.
J'espère que ce texte, très attendu, sera adopté par notre Haute Assemblée à une large majorité. Il est le fruit d'une coconstruction originale, transpartisane, qui pourrait servir d'exemple pour d'autres textes. (Applaudissements à droite).
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur pour avis de la commission des lois . - La concertation en amont, avec le Conseil national de la montagne, avec l'Association nationale des élus de la montagne, a été approfondie. Je m'en félicite. La commission des lois s'est saisie pour avis de neuf articles, relatifs aux grands principes applicables aux zones de montagne, au rôle des collectivités dans la promotion du tourisme, aux règles de l'urbanisme en montagne et à l'immobilier de loisir. Elle estime que le texte répond aux principaux enjeux, mais qu'il est besoin de clarifier et de préciser certains points. À ce stade, 30 de ses 33 amendements ont été adoptés par les autres commissions. Je remercie le rapporteur et les rapporteurs pour avis de leur écoute.
Nous proposons de fixer à l'État un objectif d'évaluation et de prévention des risques en montagne. À cet égard, le service de restauration de terrain en montagne (RTM) doit être conforté, il est précieux.
Nous sommes soucieux de bien articuler le présent texte avec le dispositif des communes nouvelles : je songe au transfert de la compétence promotion du tourisme aux communautés de communes ou d'agglomération. Nous approuvons ainsi la dérogation pour les stations classées de tourisme, en en renforçant l'encadrement.
Nous nous sommes également prononcés pour la simplification de la procédure des unités touristiques nouvelles (UTN), à l'article 19.
Peu de sujets ont fait consensus au sein de notre commission. Nous reviendrons donc sur la gouvernance du CNM et surtout sur le mode de désignation de ses représentants par chaque assemblée ; ou sur la simplification des documents d'urbanisme dans les parcs naturels régionaux.
Il faut faire passer un message sur la couverture numérique et de téléphonie mobile. Les opérateurs ont écrit à l'Ademe pour prendre des engagements. Je n'en suis pas pour autant rassuré ! Ils avaient accepté des efforts pour éviter l'application du principe d'itinérance... mais les zones blanches persistent. Sur la couverture numérique, ils ont pris des engagements sur les zones Amii, parce qu'ils refusaient le principe de mutualisation dit du timbre-poste, défendu à Bruxelles au nom de l'exception française. Mais les opérateurs n'ont pas tenu leurs engagements. Et aujourd'hui, les territoires ruraux et de montagne sont abandonnés à leur sort.
La construction dans les stations de montagne est soumise à deux textes contradictoires : il faut revoir cela, d'autant que la loi ALUR autorise une densification qui va à l'encontre des efforts de maîtrise de l'urbanisation en montagne.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Merci à tous les rapporteurs pour leurs contributions.
M. Ronan Dantec . - Les six massifs de la France métropolitaine et les trois d'outre-mer, sans parler des Montagnes noires et des Monts d'Arrée (Sourires), occupent 30 % de notre territoire et regroupent 15 % de la population. Ils sont donc un enjeu de premier plan.
Ils sont enclavés, éloignés, souffrent de désertification médicale. Ils comptent le plus grand nombre de parcs naturels régionaux et nationaux. Le groupe écologiste ne peut que souscrire à l'ambition de ce texte satisfaisant dans son ensemble et qui complète utilement la loi Montagne de 1985. Il précise bien quelles politiques pourront être adaptées à la montagne ; il donne des prérogatives plus importantes au Comité national de la montagne et aux comités de massif.
Ce texte traite enfin le dossier des « lits froids ». Il assouplit le cadre des opérations de réhabilitation de l'immobilier de loisir, ouvrant les aides des collectivités aux propriétaires qui louent en direct. Le dispositif Censi-Bouvard est réorienté pour soutenir les rénovations plutôt que les constructions neuves, qui entraînent l'artificialisation, l'étalement, la pression sur le foncier préjudiciable aux populations.
Le texte prend acte que le réchauffement climatique est plus rapide, en montagne : en 2080, la durée d'enneigement des stations de basse altitude aura diminué de 60 à 85 % ; et de 40 à 75 % en moyenne altitude.
Je ne peux que renouveler mon soutien à la création d'une dotation climat au sein de la dotation générale de fonctionnement, pour aider les intercommunalités de montagne qui s'engagent dans des plans climat.
Monsieur le ministre, votre soutien sera le bienvenu pour l'obtenir dans le cadre du collectif budgétaire, car Bercy n'est guère enthousiaste... Le groupe écologiste déplore le travail de sape des opérateurs de téléphonie mobile contre la loi Abeille. C'est ainsi que dans ce texte, l'information des élus locaux sur les modifications substantielles d'antennes relais a été réduite, sur tout le territoire. Cette façon de revenir subrepticement sur des dispositifs déjà décidés, et pour tout le territoire, est une manipulation ; on flirte ici avec le cavalier législatif... J'espère que le Sénat restaurera la disposition, nos concitoyens exigent de la transparence.
Je regrette que les députés soient pareillement revenus sur le principe de continuité écologique adopté dans la loi de biodiversité. Ou que le travail en commission ait abouti à la suppression des zones de tranquillité : un compromis a été trouvé à l'Assemblée nationale, elles ont été limitées aux parcs nationaux, n'y revenons pas.
En dépit de ces réserves, le groupe écologiste votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, socialiste et républicain et RDSE)
M. Jean-Yves Roux . - Jean-Claude Frécon nous manquera. Lui qui était originaire des Alpes de Haute-Provence a été un grand défenseur des services publics, de l'école, de La Poste.
Ce projet de loi s'est fondé sur le rapport de deux députées en 2015, et sur le travail assidu des élus de la montagne depuis juin dernier ; il concrétise les engagements du Gouvernement lors du Conseil de la montagne de 2015 ou lors du dernier Congrès des maires. Je salue la méthode de concertation continue, tout à fait appropriée au sujet. Le groupe développement économique de la montagne, que je préside, a pris sa part dans les débats.
La montagne est partie prenante de notre identité nationale. Skieurs ou randonneurs, petits ou grands, français ou étrangers : pour tous, la loi Montagne de 1985 a été, d'une manière ou d'une autre, un acte fondateur. Le présent texte actualise ce texte précurseur et novateur : il est le signe que le Gouvernement prend en compte les territoires de montagne.
D'autres textes comportent aussi des mesures concernant les territoires de montagne, sur le droit au numérique, la santé, les maisons de service public, la biodiversité. Cependant ce projet de loi est véritablement un signal politique.
Je salue le renforcement de la capacité d'intervention des élus, l'amélioration de la gouvernance territoriale, les modifications du calcul de la DGF. Je me réjouis de voir reconnue la notion d'usage partagé de la ressource en eau.
Ce texte prend en compte les besoins spécifiques en santé des territoires de montagne, en particulier la nécessité de prendre en considération les temps de transport.
Il reconnaît la spécificité de l'école en montagne, grande absente de la loi de 1985 et qui doit être un critère, pour l'ouverture ou la fermeture de classes dans le primaire. Ceci est conforme aux recommandations du rapport de notre collègue Alain Duran. Il faudrait aller plus loin, en élargissant le dispositif aux collèges - car ceux-ci ont disparu du texte en commission - dans le cadre du bassin de vie.
Souvenons-nous que dans la loi de 1985, nous voulions faire disparaître les zones d'ombre, où la télévision n'était pas captée ; nous y sommes parvenus. Aujourd'hui, il s'agit de réduire les zones blanches de la téléphonie mobile. Le programme de résorption à la mi-2017, l'appel à projet de raccordement de 1 300 sites d'intérêt économique et touristique vont dans le bon sens. C'est que le développement économique est en jeu.
En montagne, les défis se cumulent, morcellement des zones blanches et grises, difficultés techniques et géographiques. Je salue la création du guichet France Mobile grâce auquel les élus pourront faire remonter les difficultés. Pour les opérateurs, les zones de montagne sont des zones non rentables. Un changement culturel s'impose.
J'espère que la Caisse des dépôts et consignations s'engagera pour accélérer le raccordement des zones peu denses.
M. Loïc Hervé. - Très bien !
M. Jean-Yves Roux. - Le texte pose le principe de compensation des handicaps naturels pour les exploitants agricoles. Un mot du loup : nous devons respecter nos engagements internationaux et tenir compte d'une situation différente d'un massif à l'autre, ici très tendue, là plus apaisée. Je souhaite que les éleveurs puissent continuer à vivre et faire vivre la montagne. Le plan loup arrive à son terme. Je plaide pour une approche plus fine.
Le texte améliore le statut des saisonniers. Il est bon aussi de lutter contre les lits froids et de favoriser la montée en gamme des logements.
Je défendrai le maintien des offices de tourisme dans le giron communal. Au total, le groupe socialiste et républicain présentera une trentaine d'amendements, pour mieux prendre en compte les surcoûts en montagne, pour éviter de détricoter les lois Alur et NOTRe, pour faire en sorte que la loi profite à tous les massifs. La montagne est diverse, mais toujours unique et solidaire. Les territoires de montagne peuvent constituer le cadre privilégié d'expérimentations. Les expérimentations conduites en montagne peuvent devenir une avant-garde et un modèle.
J'espère que le Sénat votera ce texte à une large majorité, à la hauteur des exigences de la montagne. (Applaudissements à gauche)
Mme Cécile Cukierman . - Je m'associe à l'hommage à Jean-Claude Frécon, avec qui j'ai eu souvent l'occasion d'échanger. Il était très attaché aux collectivités rurales et de montagne.
En montagne vivent 10 millions de Français, dans 6 000 communes et neuf massifs. Les spécificités de ces territoires ont été reconnues par la loi Montagne de 1985. Une nouvelle loi devenait nécessaire trente ans après, pour tenir compte des enjeux actuels, climatiques, numériques, institutionnels, etc.
L'Assemblée nationale a étoffé le texte. Je salue la reconnaissance du concept d'aménité, qui recouvre les externalités positives pour la communauté nationale. Toutefois ce texte manque de souffle. Il n'est certainement pas l'acte II de la loi Montagne ! Il se contente de dépoussiérer le texte de 1985.
Alors que le principe d'adaptabilité des normes nationales à la montagne existe, les lois NOTRe et Maptam ont mal pris en compte la montagne. Mais le présent texte n'y pourvoit pas ; il n'améliore pas les politiques particulières à destination des habitants de la montagne. Nous déposerons des amendements pour défendre le maintien des services publics en montagne, comme la présence postale. S'ils ne sont pas soumis à la contrainte, les opérateurs ne couvriront pas les zones blanches. Le texte ne répond pas à tous les enjeux.
Certains n'appréhendent la montagne que comme un lieu de tourisme. Si ce texte améliore la vie des saisonniers, il se révèle pauvre pour le tourisme durable. L'indemnité compensatoire pour handicap naturel est réservée à certaines exploitations. C'est dommage.
Dommage aussi que le texte ne s'accompagne d'aucun financement nouveau de la part de l'État. Nous soutiendrons les avancées de ce texte, et nous essaierons d'aller plus loin, en regrettant que l'acte II de la loi Montagne demeure à rédiger, avec les habitants et les élus de montagne. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)
M. Alain Bertrand . - Jean-Claude Frécon était une personne attachante, qui aimait profondément les gens. Sa disparition m'attriste beaucoup.
Merci à M. Valls et à M. Baylet d'avoir entendu les élus de la montagne. Cette loi n'est cependant pas une loi de programmation ni de financement. Tous les territoires de montagne sont des territoires ruraux ; l'inverse n'est pas vrai. La montagne et la ruralité ont besoin de financement pour faire face à leurs handicaps naturels.
Ce texte est une étape qui ne clôt pas le débat.
Il y a certes beaucoup d'avancées : sur la santé, l'école, l'agriculture, ou sur la lutte contre les grands prédateurs - l'article 16, qui autorise l'agriculteur à procéder à des tirs de prélèvements en cas d'attaque de loup, me satisfait. Il faudrait étendre les mesures à tous les prédateurs : l'ours et le lynx, notamment.
En matière de numérique, la notion de zone grise est inopérante : il suffit qu'un opérateur couvre 5 % du territoire de la commune pour qu'il soit considéré comme satisfaisant à ses obligations. L'enjeu est bien de supprimer les zones blanches et je proposerai que toute commune non couverte à 90 % soit considérée comme en zone blanche.
Les ZRR souffrent d'un grand saupoudrage des moyens, en raison d'un spectre géographique beaucoup trop large : j'y reviendrai.
Il n'est pas acceptable non plus que le risque de mourir d'un AVC ou d'en conserver des séquelles graves soit plus élevé en zone de montagne à cause des délais de transport jusqu'à l'hôpital. Il faut mutualiser les hélicoptères bleus-blancs-rouges ! Et que dans chaque zone, le transport vers un CHU ne dure pas plus d'une demi-heure.
Les petites communes de montagne et leurs ECPI ne parviennent pas à recruter des administratifs à un haut niveau. Il serait juste d'autoriser des ECPI de moins de 10 000 habitants à recruter un directeur général des services. Je salue l'action du Gouvernement, le doublement de la DETR, la revitalisation des centres-bourgs, et d'autres mesures. Vous l'avez dit : la montagne est une zone de résistance : le Vercors, mais pas seulement ! J'en appelle à une loi d'avenir des ruralités et des montagnes. Ce texte est une première étape. (Applaudissements à gauche)
M. Loïc Hervé . - L'homme a longtemps craint la montagne. Il l'habite et s'efforce de la dompter, exploitant la « houille blanche », profitant du dynamisme touristique. La loi de 1985, prévue dès la loi pastorale du Gouvernement Chaban-Delmas en 1972, a été votée plus tardivement que dans d'autres pays.
En 2002, un rapport de M. Amoudry, mon prédécesseur, préparait l'avenir de la montagne. La montagne attendait ce texte. Merci au Gouvernement de l'avoir présenté. L'Anem et l'Association nationale des maires de stations de montagne (ANMSM) ont été consultées. Ce texte traduit leurs préoccupations.
Je salue les améliorations apportées par l'Assemblée nationale et la commission du développement durable, en particulier sur la compétence promotion touristique. La loi NOTRe devait être revue. Le Premier ministre en avait pris l'engagement sur le Montenvers à Chamonix.
Quant à l'urbanisme de montagne, la procédure des UTN sera inscrite dans les Scot ou les PLU. Attention tout de même à ne pas créer un dispositif dissuasif, alors qu'il faut investir et créer de l'emploi...
M. Michel Bouvard. - Très bien !
M. Loïc Hervé. - De même la loi Alur va à l'encontre d'un urbanisme durable en montagne. Il faut une politique volontariste en faveur de la population permanente, afin qu'elle puisse continuer à vivre en montagne... (M. Michel Bouvard approuve)
Les élus de la montagne sont en colère : ils ne comprennent pas pourquoi la question de la couverture mobile n'est pas encore réglée. C'est pourtant un enjeu de sécurité, de développement, de crédibilité internationale... Les touristes ne comprennent pas qu'il n'y ait pas de réseau !
Ce texte sera l'un des derniers de la législature. Personne ne doute que la montagne est belle, comme le dit la chanson. Faisons en sorte que cela dure. C'est ce que les Français attendent. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Patrick Chaize . - Merci aux rapporteurs de m'avoir confié le volet numérique de cette loi.
Je renouvelle mon souhait de voir le Sénat être une force de proposition en ce domaine. La loi de 1985 ne mentionnait que les émissions radio. Ce texte est bienvenu, succédant à la loi du 6 août 2015 et à celle de 2016 pour une République numérique.
Les réseaux se sont développés mais les collectivités ne pourront pas assumer seules la couverture de leur territoire.
En attendant le Très haut débit (THD), les habitants ne disposent pas toujours de grande qualité de téléphonie. Des initiatives ont été prises, il faut les accélérer : la résorption des zones blanches en centre-bourg, en particulier.
Ce texte en est l'occasion, l'Assemblée nationale l'a fait passer de 1 à 9 articles sur ce chapitre, en particulier l'article 9 qui confie une responsabilité en la matière au ministre de l'aménagement du territoire et à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep). Il faut privilégier la fibre optique, seule architecture pérenne, et la commission européenne impose le gigabit dès 2025.
L'Assemblée nationale a prévu des cartes d'élaboration spécifique en zone de montagne, je crois utile de viser en particulier les zones hors centre-bourg.
L'article 9 bis prévoit des tarifs préférentiels pour la commercialisation sur ces réseaux, nous en avons renforcé l'encadrement. L'article 9 nonies a été récrit en commission pour améliorer la fourniture des services sur les réseaux Très haut débit. L'Arcep devra publier les informations sur la commercialisation de services sur les réseaux privés : c'est une bonne chose.
Nous avons enrichi le volet numérique, élément essentiel du désenclavement des territoires. Ce texte est équilibré, il simplifie les procédures, tout en facilitant la couverture : faisons en sorte que le numérique avance. (Applaudissements)
M. Éric Jeansannetas . - Les populations de montagne, souvent isolées, ont des besoins particuliers ; je parlerai donc de l'accès aux soins, au nom des sénateurs socialistes de la commission des affaires sociales. Le Pacte santé, voulu par Mme Touraine, apporte des outils nouveaux pour l'accès de tous aux soins, en renforçant l'offre médicale : télémédecine, maison de santé. Vous avez supprimé la compensation des surcoûts à l'exercice de la médecine en zone de montage, nous en débattrons.
S'agissant des travailleurs saisonniers, la loi Travail prévoit des contrats de travail à durée indéterminée intermittent (CDII) jusqu'en 2019, à condition de renoncer aux allocations de chômage pendant l'intersession : c'est un progrès important. Les articles 10 à 14 affinent les dispositions concernant les travailleurs saisonniers en zone de montagne : la pluriactivité sera mieux prise en compte, la biqualification également. Des maisons de saisonniers seront installées pour faciliter les démarches des travailleurs saisonniers. Un effort sera fait en particulier pour leur logement, trop souvent difficile.
Les enjeux en montagne sont cruciaux. Comme en 1985, nous allons valoriser les spécificités de la montagne. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)
M. Michel Savin . - Alors que la saison hivernale s'ouvre en montagne, nous allons débattre de l'acte II, attendu, de la loi Montagne. Cette concomitance est hautement significative ; une mise au point de la loi de 1985 était nécessaire. Les défis sont très divers ; ce texte, concerté longuement, les aborde tous. Élus locaux, nationaux, acteurs économiques, citoyens, ANEM : cette concertation a permis d'avancer sur le fond et d'arriver, à l'Assemblée nationale, à l'unanimité moins une voix, pour la montagne de demain, numérique, dynamique, démocratique, riche de son développement économique et de ses habitants, ses principaux acteurs.
L'Assemblée nationale reconnaît l'adaptation nécessaire de la DGF pour prendre en compte les surcoûts de la montagne, lesquels mettent en difficulté certaines communes de montagne ; la réforme de la gouvernance permettra d'adapter les politiques publiques. Les services publics ne doivent pas disparaître, même dans les territoires difficiles d'accès.
La transition numérique est centrale pour la qualité de vie comme pour l'attractivité économique des territoires. Des adaptations, cependant, restent à effectuer, souvent réglementaires. D'abord l'indemnité kilométrique pour les professionnels de santé qui résident en plaine mais interviennent en montagne : elle est calculée sur le tarif des kilomètres en plaine, ce qui accentue la désertification.
M. Michel Bouvard. - Tout à fait.
M. Michel Savin. - J'ai déposé un amendement sur les EPCI : la loi NOTRe a fixé le seuil de 15 000 habitants avec des dérogations possibles, que les représentants de l'État ne reconnaissent pas toujours. Il faut clarifier les choses.
Les acteurs de la forêt sont absents du projet de loi initial ; je proposerai de les inclure dans les instances de gouvernance et que les documents d'urbanisme prévoient des espaces de stockage utiles aux forestiers.
Enfin, je proposerai de renforcer les mesures prévenant les attaques de troupeaux par le loup. En 2015, on a dénombré 9 000 victimes dans 24 départements, soit 114 % de plus qu'en 2010, et 40 % de ces attaques ont lieu en plein jour. Le nombre de loups croît de 20 % par an, cela compromet le pastoralisme ; les éleveurs ne veulent pas faire la chasse aux loups mais mieux protéger leur bétail. Nous vous proposerons des amendements plus conformes aux attentes des éleveurs, qui veulent vivre de leur métier en toute sécurité.
Les élus locaux veulent aussi se protéger des risques en cas d'attaque de riverains et de touristes. Un maire de l'Isère a dû fermer un sentier de grande randonnée de sa commune à la suite d'attaques par des chiens de garde mis à l'épreuve par la présence de loups.
Je vous proposerai donc de valoriser les territoires de montagne ! (Applaudissements)
présidence de M. Jean-Pierre Caffet, vice-président
M. Bernard Delcros . - Merci, monsieur le ministre, d'avoir inscrit ce texte attendu à notre ordre du jour : en trente ans, la France s'est urbanisée, des territoires ont décroché, des enjeux environnementaux nouveaux sont arrivés, la numérisation a bouleversé notre société. Notre rendez-vous est donc crucial, mais il sera réussi à condition d'y inscrire les avancées promises dont la montagne a besoin. Comme ce n'est pas encore le cas, nous proposerons de compléter le texte.
D'abord, sur l'agriculture d'altitude : ses surcoûts ne sont plus acceptables dans le cadre de la mondialisation. Il faut donc jouer sur la qualité, faire la différenciation.
De même, nous proposons de mieux reconnaître la forêt. Sur la téléphonie mobile et le THD, rien ne justifie d'en exclure des centaines de milliers de nos concitoyens : c'est les abandonner à la désertification ! Il faut être ferme avec les opérateurs, nous vous proposerons des amendements concrets, en particulier pour redéfinir les zones blanches.
L'accès à des services publics de qualité ne peut se mesurer en kilomètre au standard national ni selon le seul critère de rentabilité : l'État doit avoir des priorités et en être le garant.
Enfin, nous prévoirons des moyens pour des tâches essentielles, ne serait-ce que l'entretien des routes : la DGF doit être adaptée.
Monsieur le ministre, abordez positivement nos amendements, pour que, comme la loi de 1985, ce texte soit cité en exemple parce qu'il aura inscrit la montagne dans le XXIe siècle ! (Applaudissements)
M. Michel Bouvard . - Cette loi est attendue, elle a été largement concertée - nous vous en remercions, monsieur le ministre -, elle répond en grande partie aux attentes.
En 1985, il fallait freiner le développement touristique intempestif, il n'était pas question de désertification rurale, ni médicale, ni encore de téléphonie mobile et réseau numérique. Cependant, la loi d'aménagement du territoire de 1995 organisant les comités de massifs, et celle de 1999, avec leur volet montagne des CPER, sont passées par là ; de même, les crédits européens consacrés aux programmes intégrés de massifs et aux programmes transfrontaliers.
Qu'attendons-nous ? Une reconnaissance des spécificités de la montagne, laquelle n'est pas soluble dans la ruralité. Nous attendons la rémunération des aménités de la montagne : l'eau, la qualité des espaces. La réorganisation de l'administration territoriale de l'État a changé la donne : la fusion des services a fait perdre des expertises, nous en souffrons quand il s'agit de l'eau, du tourisme. La loi NOTRe risque de diluer les collectivités, au risque de diluer l'identité des territoires. Cette loi devra être déclinée dans le fonctionnement des services de l'État. Nous avons besoin de transversalité, il faudra préserver des services.
J'ai déposé des amendements - trop, m'a fait savoir mon président de groupe. Mais je suis dans un esprit constructif. Je viserai d'abord la rémunération des aménités, la prise en compte des surcoûts pour les agences de bassin, pour le numérique, les services publics.
Nos 357 stations de sport d'hiver représentent 30 % du domaine skiable mondial. Elles passent pour riches et l'on oublie leur situation concurrentielle avec l'Autriche, la Suisse, l'Italie ; il leur faut capter une nouvelle clientèle touristique.
Elles sont à la fois des communes et des entreprises en même temps et elles souffrent à la fois de la situation des finances publiques et de la péréquation. Leurs capacités d'investissement diminuent. J'ai siégé au comité des unités touristiques nouvelles, je puis vous dire que c'est un vrai parcours du combattant. Les dossiers sont très longs, chers ; il y en a pour 140 millions en attente !
On a évoqué le problème du logement des saisonniers mais il faut considérer aussi celui des habitants. L'accès des jeunes au logement est devenu impossible dans les stations, avec un foncier beaucoup trop cher. Depuis des années nous nous battons pour que le zonage reconnaisse les coûts réels : à Tignes, à Chamonix, les coûts ne sont pas ceux des Landes ou de la Lozère ! (M. Loïc Hervé approuve)
Nombre de ces sujets sont réglementaires, j'en suis conscient, mais ce débat est l'occasion que le Gouvernement s'engage, dans le sens que nous souhaitons. Il faut que les montagnards continuent à vivre en montagne, au bénéfice du pays tout entier ! (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean-Michel Baylet, ministre . - Merci pour la qualité de vos interventions - l'excellence de M. Bouvard vient de nous le rappeler, lui qui a donné son nom à une procédure qui concerne la montagne... Nous sommes tous dans le même esprit, de construire. J'ai pu me concerter de façon constructive avec M. Wauquiez en tant que président de l'Anem. Je retrouve cet état d'esprit, je vous en remercie.
Faut-il des financements ? En trois ans, nous avons augmenté la DETR de 62 %. Même chose pour la volonté politique : trois comités interministériels en trois ans, 104 mesures, dont les contrats de ruralité, pendant des contrats de ville - alors que les réunions étaient bien moins nombreuses sous la précédente législature, je le dis sans polémique...
Le seuil de l'EPCI à 15 000 habitants ? Nous en avons débattu longuement dans la loi NOTRe, approuvée par le Sénat en CMP. On ne saurait y revenir.
M. Loïc Hervé. - On peut en débattre...
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - J'ai donné les chiffres, nous avons réduit de moitié les intercommunalités ; les choses se feront plutôt bien, ne remettons pas en cause le processus ! Nous avons la loi de la République, il faut s'y tenir...
Sur le numérique et la téléphonie mobile, oui, il y a des problèmes majeurs de fracture numérique ; nous payons le moment initial de la cession : le Gouvernement d'alors a vendu les fréquences en négociant avantageusement leur prix de vente, mais en oubliant de fixer un cahier des charges en matière de couverture du territoire : les opérateurs ont privilégié les territoires urbains et les territoires ruraux ont été mis de côté, il faut y revenir ! (Applaudissements)
Quant aux zones blanches, j'ai reçu l'Arcep qui fait un travail remarquable de cartographie : il sera publié début 2017, ce sera une base objective pour notre débat.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Merci monsieur le ministre de souligner la qualité de notre travail et merci au président du Sénat, sa présence marque l'importance d'un tel débat. Nous devons examiner 462 amendements et nous serons interrompus par d'autres points à l'ordre du jour : je vous invite à la concision.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
L'amendement n°296 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°427, présenté par MM. Carle et Savin.
Alinéa 3, première phrase
Remplacer les mots :
et conditions
par les mots :
d'emploi, des conditions
M. Michel Savin. - Défendu.
M. le président. - Amendement identique n°443, présenté par M. Bouvard.
M. Michel Bouvard. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°181 rectifié bis, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti et Delahaye, Mme Férat, MM. Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle.
Alinéa 3, première phrase
Remplacer les mots :
et de protection sociale
par les mots :
, de protection sociale et d'emploi
M. Loïc Hervé. - Nous avons introduit la notion d'emploi dans la définition du développement équitable et durable de la montagne.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Avis favorable, mais la commission préfère l'amendement n°181 rectifié bis.
. M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Même avis.
Les amendements identiques nos 427 et 443 sont retirés.
L'amendement n°181 rectifié bis est adopté.
L'amendement n°88 n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°136.
M. le président. - Amendement n°335 rectifié bis, présenté par MM. Gremillet, Morisset et Pillet, Mme Di Folco, MM. Raison et Pierre, Mme Morhet-Richaud, MM. Chasseing, Bizet, Chaize, Mandelli, Pointereau, B. Fournier, Sido et de Raincourt et Mmes Lamure et Deromedi.
I. - Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
y compris en adaptant la spécificité des normes aux terrains montagneux
II. - Après l'alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Mettre en place un suivi statistique de l'évolution des exploitations de montagne complémentaire au recensement général agricole prévu ;
M. le président. - Amendement n°270 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Amiel, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
y compris en adaptant la spécificité des normes aux terrains montagneux
M. Alain Bertrand. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°72, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Après l'alinéa 9
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° D'adapter les normes agricoles et leur modalités d'application aux conditions spécifiques d'élevage et d'agriculture en montagne ;
« ...° De mettre en place une politique spécifique au soutien des petites exploitations agricoles ;
Mme Cécile Cukierman. - Le texte de l'Assemblée nationale doit être précisé. Le rapport pour avis de la commission des affaires économiques cite certaines spécificités, comme l'attache des animaux. En zone de montagne, les petites exploitations sont bien plus nombreuses qu'ailleurs, elles valorisent les territoires et l'emploi : il faut reconnaître leur rôle.
M. le président. - Amendement n°55 rectifié bis, présenté par MM. Longeot, Cigolotti, Delcros, Médevielle et Gabouty.
Après l'alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° D'adapter les normes et leurs modalités d'application aux conditions spécifiques d'élevage et d'agriculture en montagne ;
M. Jean-François Longeot. - En zones de montagne, les contraintes naturelles ne permettent pas de respecter les obligations règlementaires en matière de dimensionnement, de mesure, de respect des distances. Des adaptations doivent être prises pour permettre aux porteurs de projets de voir leurs ambitions se réaliser.
C'est ainsi que faciliter la création de retenues collinaires en montagne est un des moyens de développer à long terme l'agriculture en montagne. Or certaines études techniques, environnementales, financières découragent la réalisation de l'ouvrage. Pour cette raison, les enquêtes pourraient être simplifiées ou les études allégées.
L'attache des animaux est parfois une nécessité en terme de place et de coût de construction des bâtiments, mais aussi pour les frais de fonctionnement, de plus pour les mises aux normes comme les capacités de stockage des effluents, lorsque la règlementation donne une année pour la mise aux normes, la réalité du terrain oblige à faire les travaux durant les beaux jours, et les agriculteurs ne disposent que de 6 mois réels.
M. le président. - Amendement identique n°166 rectifié bis, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Calvet, Capo-Canellas et Delahaye, Mme Férat, M. Guerriau, Mme Joissains et M. Kern.
M. Loïc Hervé. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°167 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Delahaye et Delcros, Mme Férat, MM. Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle.
Après l'alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Mettre en place un suivi statistique de l'évolution des exploitations de montagne complémentaire au recensement général agricole prévu ;
M. Loïc Hervé. - Les recensements agricoles ont lieu tous les dix ans environ, nous adaptons la procédure aux zones de montagne.
M. le président. - Amendement identique n°290, présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
M. Jean Desessard. - Les jeunes agriculteurs nous ont proposé cet amendement identique.
Des enquêtes pastorales ont été conduites à la suite de ces recensements pour compléter les données en 1972, 1983, à l'échelle nationale puis dans les années 2000 mais de manière non exhaustive à l'échelle nationale. Des enquêtes plus récentes ont été menées dans les Alpes et une démarche est en cours en Auvergne.
Nous proposons d'optimiser ces recensements et de mieux valoriser les recensements agricoles nationaux pour atteindre une approche exhaustive, y compris en zone de montagne. Le recensement agricole de 2010 a ouvert la voie en proposant un champ sur les surfaces collectives et les effectifs concernés, mais l'absence de cadrage méthodologique homogène ne permet pas une analyse fiable des résultats.
M. le président. - Amendement n°56 rectifié bis, présenté par MM. Longeot, Cigolotti, Delcros, Médevielle et Gabouty.
Après l'alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Mettre en place un suivi statistique de l'évolution des exploitations agricoles de montagne complémentaire au recensement général agricole prévu ;
M. Jean-François Longeot. - Défendu.
L'amendement n°140 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement identique n°272 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Amiel, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
M. Alain Bertrand. - Il est nécessaire de compléter l'article premier du projet de loi par la mise en place d'un suivi statistique de l'évolution des exploitations agricoles de montagne complémentaire au recensement général agricole.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Le premier point de l'amendement n°335 rectifié bis est satisfait, le second trop précis pour figurer dans la loi. Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n°270 rectifié est également satisfait par l'article 3 qui pose le principe d'adaptation des politiques publiques. Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n°72 est également satisfait par l'article 3. Retrait ou avis défavorable. Il en va de même pour les amendements nos55 rectifié bis et 166 rectifié bis, ainsi que pour les amendements nos167 rectifié, 290, 56 rectifié bis et 272 rectifié.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - L'article premier est programmatique et fixe les objectifs de l'action de l'État. J'ai vu apparaître des amendements portés par les jeunes agriculteurs et d'autres lobbies... La position du Gouvernement est identique à celle du rapporteur sur tous les amendements et pour les mêmes raisons.
L'amendement n°335 rectifié bis est retiré.
L'amendement n°270 rectifié est retiré.
M. Jean Desessard. - L'amendement n°72 serait satisfait ? Je n'ai rien lu en ce sens. Pouvez-vous préciser où ce point est traité ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Ces adaptations sont prévues à l'article 3 qui mentionne le soutien spécifique aux petites exploitations agricoles.
M. Loïc Hervé. - À la lecture de l'article premier, je ne vois pas de difficulté majeure à insérer les modifications de l'amendement n°72. Je le voterai.
L'amendement n°72 est adopté.
Les amendements nos55 rectifié bis et 166 rectifié bis deviennent sans objet.
Les amendements identiques nos167 rectifié et 290 ne sont pas adoptés.
Les amendements identiques nos56 rectifié bis et 272 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°100, présenté par M. Roux et les membres du groupe socialiste et républicain.
Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° De contribuer à la valorisation de tous les atouts de la montagne, en soutenant la recherche appliquée, l'expérimentation, l'innovation, l'animation locale et l'assistance technique nécessaires à la mise en oeuvre de projets de développement global, ainsi que la diffusion des expériences et des techniques adaptées au milieu montagnard ;
M. Jean-Yves Roux. - Cet amendement vise à préciser, dans les finalités de l'action de l'État en faveur de la montagne, la nécessité de valoriser les atouts de ces territoires. Depuis l'abrogation de l'article 80 de la loi de 1985, l'auto-développement n'a plus de définition...
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - L'ajout est redondant. L'objectif de l'amendement n'est d'ailleurs pas clair. Retrait ou avis défavorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - La nécessité de valoriser les atouts en tant que tels des territoires n'est pas précisée, c'est vrai. La position de principe reste néanmoins plus efficace qu'une énumération par nature incomplète. Sagesse.
L'amendement n°100 est retiré.
M. le président. - Amendement n°182 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Delahaye, Delcros, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle.
Alinéa 8
Remplacer les mots :
et artisanales liées à la montagnes ou présentes
par les mots :
, le tourisme hivernal et estival, et l'artisanat liés à la montagne ou présents
M. Loïc Hervé. - Cet amendement tend à préciser l'importance du tourisme tant hivernal qu'estival pour le développement économique des territoires de montagne.
Le tourisme dans les territoires de montagne est une source d'emplois non délocalisables et de valorisation du patrimoine. Ce secteur est un atout qu'il convient de conserver et de renforcer. Les stations de montagne doivent faire l'objet d'une politique ambitieuse pour répondre aux enjeux stratégiques auxquels sont confrontés leurs élus : pressions budgétaires, diversification des activités, modernisation, investissements, sans compter le réchauffement climatique.
M. le président. - Amendement identique n°428, présenté par MM. Carle et Savin.
M. Michel Savin. - Défendu.
L'amendement identique n°297 n'est pas défendu.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Précision utile... Avis favorable à l'amendement identique no428.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - La demande est satisfaite à l'alinéa 10 de l'article premier. Retrait.
L'amendement n°182 rectifié est retiré.
L'amendement n°428 est adopté.
M. le président. - Amendement n°101, présenté par M. Roux et les membres du groupe socialiste et républicain.
Alinéa 19
Après les mots :
transition numérique
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
et le développement de services numériques adaptés aux usages et contraintes de populations de montagne ;
M. Jean-Yves Roux. - Les attentes de nos concitoyens sont fortes en matière de développement numérique. Cet amendement inscrit, dans les grandes finalités de l'action de l'État en faveur de la montagne, le soutien à la transition numérique et le développement de services numériques adaptés aux usages et contraintes de populations de montagne. Je plaide en outre pour un observatoire de l'usage du numérique en montagne.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Cette notion est cohérente avec l'article 9. Avis favorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°101 est adopté.
M. le président. - Amendement n°165 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti et Delcros, Mme Férat, MM. Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« ...°De favoriser les coopérations interrégionales et les programmes européens. »
M. Loïc Hervé. - La question frontalière est importante. L'action de l'État doit favoriser les coopérations interrégionales. N'oublions pas non plus la dimension européenne.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Je partage l'objectif sur le fond. Mais l'article 2 prend déjà en compte la dimension européenne. Retrait.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Les questions européennes sont mentionnés à l'article 2 ; la coopération internationale à l'article 7. Même avis que le rapporteur.
M. Loïc Hervé. - Monsieur le ministre, il s'agit d'encourager la coopération de région à région. Les articles 2 et 7 ne parlent que de coopération verticale.
M. Michel Bouvard. - Il y a d'une part la nécessité de promouvoir la politique de la montagne au niveau européen ; d'autre part, la coopération transfrontalière. Les territoires de montagne sont souvent victimes du syndrome de la terre plate. Au comité de massif des Alpes, si on propose des classements en zone naturelle, il serait intéressant de regarder ce qui se fait de l'autre côté de la frontière. L'administration est incapable de donner ces informations. C'est cette complémentarité qu'il faut travailler.
L'amendement n°165 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°231, présenté par MM. Savin, Calvet et Joyandet, Mme Lamure, M. Mandelli, Mme Deromedi, MM. Carle, B. Fournier, Perrin, Raison, Darnaud, Saugey et Genest, Mme Giudicelli et MM. Chaize, A. Marc et Reichardt.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Prendre en compte la représentation des habitants et des territoires dans l'organisation de la République. »
M. Michel Savin. - L'organisation territoriale de la République impose une uniformité calquée sur le modèle urbain. La loi du nombre, source de recentralisation et d'éloignement, prive la ruralité et la montagne de visibilité dans les assemblées d'élus. Il faut, à la représentation démographique, ajouter un critère relatif aux territoires.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - L'amendement est satisfait. L'article premier pose le principe de la reconnaissance de la diversité des territoires. De plus, la rédaction de l'amendement pose des problèmes au regard de la Constitution. Retrait ou défavorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - La Constitution dispose que la France est une République décentralisée, ce qui implique la prise en compte de la diversité des territoires et de leurs habitants. Et elle dispose que la représentation se fait sur une base essentiellement démographique. Retrait ou défavorable.
M. Michel Savin. - Cet amendement est un engagement fort pour nos territoires de montagne. Pourquoi anticiper une censure ? Je maintiens mon amendement.
M. Alain Bertrand. - Il est urgent de modifier la Constitution pour que soient représentés non seulement les citoyens mais aussi les territoires. Prenez la Lozère : sans une correction dans la loi NOTRe nous n'aurions pas de conseillers régionaux. Il faut rester vigilant. Un conseiller isolé représentant la ruralité aura du mal à porter la voix de son territoire dans une assemblée de 250 membres... Peut-être n'est-ce ni le jour, ni le lieu mais il faudra bien réviser un jour la Constitution.
M. Alain Marc. - Je ne méconnais pas la jurisprudence du Conseil constitutionnel mais cet amendement témoigne notre attachement aux territoires. La densité de certains territoires en France est moitié moindre qu'au Sahel... Il est temps d'en finir avec une représentation strictement démographique.
M. Loïc Hervé. - Je remercie M. Savin d'avoir déposé et maintenu cet amendement. Je croyais que nous discutions d'un texte sur la montagne. Dans les assemblées locales, les territoires sont de moins en moins représentés. Certaines communes ne sont représentées que par leur maire, alors que ce sont des territoires immenses. Il faut que les élus puissent assurer la représentativité de ces territoires qui constituent un patrimoine exceptionnel. C'est notre devoir de sénateurs de le rappeler.
Mme Cécile Cukierman. - De texte de loi en texte de loi, on nous renvoie à la Constitution lorsqu'on évoque la représentativité des élus. La Constitution doit être le meilleur texte pour que les territoires de la République soient bien administrés. Elle peut évoluer...
Cependant, ce n'est pas au détour d'un amendement dans une loi ordinaire que nous la modifierons. Concilier l'exigence du principe de la démocratie - un homme, une voix - et la réalité de la représentation de la diversité des territoires, voilà l'enjeu. Notre groupe a toujours fait le choix de renforcer la représentativité par un plus grand nombre d'élus. Nous nous abstiendrons sur cet amendement, le débat qu'il ouvre va bien au-delà de la loi Montagne. À la majorité qui sortira des urnes au printemps prochain de proposer de modifier la Constitution...
M. Bernard Delcros. - Des zones urbaines à très forte concentration d'habitants ; des espaces peu peuplés mais très important en termes de patrimoine : telle est la réalité de nos territoires. Il faut que tous aient la parole.
M. Jean Desessard. - Les territoires indispensables à l'équilibre écologique des villes doivent être correctement représentés. C'est au Sénat qu'ils doivent l'être, l'Assemblée nationale obéissant plutôt aux impératifs démographiques. Je voterai cet amendement. Il faudrait néanmoins redéfinir le pouvoir du Sénat par rapport à l'Assemblée nationale, qu'il ait en particulier le dernier mot sur les questions qui touchent aux territoires.
Mme Éliane Giraud. - La définition politique des territoires est plus complexe qu'une distinction entre sites urbains et territoires ruraux. L'intérêt des habitants dépasse leur territoire. Nous avons travaillé cette question à la délégation aux collectivités. L'essentiel est de faire travailler tout le monde ensemble. Plus qu'une politique de cercle fermé, il faut prendre en compte l'intérêt des citoyens. Le pouvoir des montagnards est aussi de conviction. Nos territoires sont riches en atouts. La vision de l'aménagement du territoire défendue par cet amendement est trop restreinte.
M. Hervé Maurey, président de la commission. - Ce débat est particulièrement bienvenu dans cette assemblée qui représente les territoires. On peut certes regretter qu'on ne prenne en compte que la représentation démographique et pas territoriale. Mais c'est ainsi... Nous ne sommes pas là pour réformer la Constitution, nous travaillons sur un projet de loi sur la montagne. Même si nous votons l'amendement, il restera inconstitutionnel. Si nous voulons aller plus loin sur ce point, lançons-nous dans l'écriture consensuelle d'une proposition de loi constitutionnelle...
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Je partage le point de vue du président de la commission du développement durable. Nous n'allons pas réformer la Constitution au détour de ce texte. Mais il y a des lois particulières ; la loi sur les cantons, la loi sur l'intercommunalité favorisent la représentation des territoires. Cet amendement d'appel restera lettre morte...
M. Michel Savin. - Ce débat a toute sa place ici. La preuve : il a eu lieu. Le problème de la représentation se pose dans les départements et les régions. C'est une réalité politique, ne nous voilons pas la face. Lors de la constitution des listes pour les élections régionales, la montagne est mal représentée. Et pourtant, c'est dans ces assemblées que nous débattons du logement en montagne ou des stations touristiques... À chaque fois, on reporte le débat...
Je retire mon amendement. À écouter les uns et les autres, il aurait pu être adopté mais je privilégie l'intérêt général.
L'amendement n°231 est retiré.
L'article premier, modifié, est adopté.
L'article 2 est adopté.
L'amendement n°89 n'est pas défendu.
ARTICLE 3
M. le président. - Amendement n°63 rectifié bis, présenté par MM. A. Marc, Raison, Genest, Commeinhes, Calvet, Longuet, Morisset et de Raincourt, Mmes Deromedi et Lamure et MM. Doligé et Chaize.
Alinéa 2
Après le mot :
sont,
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
dès lors que des dynamiques locales s'expriment, accompagnées de façon à gommer les inégalités liées aux particularités des territoires de montagne. Tous les dispositifs financiers nationaux doivent faire l'objet d'adaptations spécifiques à chaque massif ou partie de massif permettant leur développement.
M. Alain Marc. - Les politiques publiques doivent prendre en compte les spécificités des territoires afin d'assurer les mêmes services que ceux offerts en plaine ; il s'agit d'accompagner au mieux le développement.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Cet amendement, dont la formulation n'est pas très heureuse, est satisfait à l'article 3. Avis défavorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°63 rectifié bis est retiré.
L'article 3 est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°40 rectifié, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 8 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, il est inséré un article 8 ... ainsi rédigé :
« Art. 8 ... - En raison des spécificités des territoires de montagne, le seuil de constitution des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre comprenant une moitié au moins de communes situées dans une zone de montagne est fixé à 5 000 habitants minimum. »
Mme Cécile Cukierman. - L'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales prévoit que le seuil minimum de population des EPCI à fiscalité propre est adapté, notamment, dans les territoires de montagne. La circulaire interministérielle du 27 août 2015 indique explicitement que ce seuil reste une limite basse.
Les préfets disposent d'une trop grande latitude pour proposer d'appliquer ou non la dérogation pour les zones de montagne, la CDCI devant réunir une majorité des deux tiers pour s'y opposer - ce qui est extrêmement difficile.
Il est du ressort de la loi d'adapter les règles nationales aux situations particulières.
M. le président. - Amendement identique n°183 rectifié bis, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti et Delahaye, Mme Férat, MM. Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle.
M. Loïc Hervé. - Il y a la loi et l'interprétation qu'en donnent les préfets, à qui on laisse une grande marge d'appréciation... La loi fixe un seuil, ils ne l'ont pas traduit dans les faits. Il faudrait au moins appliquer l'esprit de la loi.
M. le président. - Amendement identique n°261 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
M. Alain Bertrand. - La loi dit qu'on peut descendre jusqu'à 5 000 habitants, c'est ce qui a été fait en Lozère. Il est étonnant que les préfets aient une autre interprétation.
L'amendement n°299 rectifié n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement identique n°345 rectifié ter, présenté par MM. Gremillet, Morisset et Pillet, Mmes Di Folco, Imbert et Morhet-Richaud, MM. Chasseing, Bizet, Chaize, Houpert, Dufaut, Pointereau et Sido, Mme Lamure, M. de Raincourt et Mme Deromedi.
Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteure pour avis. - Cet amendement consacre dans la loi Montagne l'adaptation des seuils de population pour les intercommunalités de montagne, afin de garantir la libre volonté des communes en matière de coopération intercommunale.
M. le président. - Amendement identique n°377, présenté par M. Bouvard.
M. Michel Bouvard. - J'ai bien conscience que nous sommes redondants avec la loi NOTRe... Mais on ne peut vouloir la libre administration des collectivités territoriales et laisser les préfets essayer d'imposer à marche forcée des schémas qui n'ont pas été discutés en amont.
Le seuil des 5 000 habitants donne de la souplesse. Cet amendement est de mauvaise humeur. Nous constatons que certains préfets passent outre les intentions du législateur, sans doute parce qu'ils sont mieux notés s'ils font des intercommunalités plus grandes... (M. Loïc Hervé applaudit) Mais faire plus grand ne veut pas dire faire plus performant.
M. le président. - Amendement identique n°430 rectifié, présenté par MM. Carle et Savin.
M. Michel Savin. - La possibilité dérogation n'est pas toujours respectée. En Haute-Savoie, la communauté de communes de la rive gauche du lac d'Annecy se l'est vu refuser alors que toutes les communes qui la composent relèvent de la loi Montagne. La dérogation doit être automatique.
M. le président. - Amendement n°232, présenté par MM. Savin et Calvet, Mme Lamure, M. Mandelli, Mme Deromedi, MM. Carle, B. Fournier, Darnaud, Saugey et Genest, Mme Giudicelli et MM. Chaize, A. Marc et Reichardt.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
En raison des spécificités des territoires de montagne, le seuil de constitution des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre comprenant une moitié au moins de communes situées dans une zone de montagne est fixé à 5 000 habitants minimum.
M. Michel Savin. - Défendu.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Les schémas proposés par les préfets sont validés par la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI). Le problème relève de l'application de la loi, pas de la loi elle-même. Retrait ou avis défavorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - La loi Montagne n'est pas le cadre adéquat pour remettre en cause la loi NOTRe qui a fait l'objet d'une commission mixte paritaire conclusive. Le Sénat a débattu de ces seuils. Rappelez-vous : le Gouvernement souhaitait 20 000, nous sommes descendus à 15 000, voire 5 000 dans certains cas. Les dernières CDCI se sont réunies ; dès janvier prochain, les nouvelles intercommunalités seront réalité. Toucher aujourd'hui aux seuils, c'est ouvrir la boîte de Pandore... Cet amendement est dangereux, sans effet même car les schémas ont été arrêtés avant le 31 mars 2015 et leur mise en oeuvre touche à leur fin.
Les élus ont le pouvoir dans les CDCI. (Exclamations) Le préfet n'est qu'un coordinateur, un greffier en chef... Les schémas sont votés par les CDCI, c'est-à-dire par les élus, par les préfets.
Je sais les difficultés auxquelles le processus a donné lieu, nous en avons réglé beaucoup, même en Corse... Il n'y a pas plus de 15 % de passer-outre, là où les élus n'ont pu s'accorder. S'il y a eu des intercommunalités XXL, c'est le résultat du vote des CDCI... Dans trois semaines, l'ensemble des intercommunalités sera réalité. Nous avons besoin maintenant de stabilité institutionnelle.
Mme Cécile Cukierman. - Nous maintenons notre amendement. Notre groupe n'a voté ni la loi de 2010, ni la loi NOTRe. Quelle est la réalité ? Le préfet fait des propositions, nous savons tous qu'il est compliqué de les modifier et que les élus sont parfois résignés et s'en arrangent pour éviter le pire... Le ministre nous dit que les schémas ont été ratifiés au 31 mars et qu'on ne peut plus y revenir... Mais des conseillers communautaires élus au suffrage universel ne le seront plus fin décembre... On fait fi du vote des citoyens et cela ne pose pas de problème démocratique...
M. Loïc Hervé. - Cette question a fait l'objet d'un deal en CMP... Et l'avancée ne s'est pas traduite en actes.
Monsieur le ministre, venez voir comment les choses se passent dans une CDCI ! Le législateur n'a pas donné au préfet un stylo de greffier, mais un couteau suisse, et dans certains départements, il s'en sert et imprime sa marque profondément. Avec la règle des deux-tiers, il est bien compliqué d'adopter un amendement.
M. Alain Marc. - C'est un problème d'application de la loi NOTRe. Il est anormal que les dérogations ne soient pas quasi-automatiquement accordées lorsque la CDCI le souhaite.
L'expérience montre de plus que les grandes communautés de communes ne sont pas toujours les plus efficaces... Je connais des intercommunalités où des petites communes ne sont pas représentées du tout, ce n'est pas satisfaisant.
M. Jean-François Longeot. - Ce n'est pas parce que le seuil a été abaissé à 15 000 qu'il en devient pertinent ! Ma communauté de communes comptait 11 000 habitants ; la communauté de communes voisine comptait 4 000 habitants. Aujourd'hui elle en regroupe 25 000, mais avec des communes très éloignées. Cela n'a pas de sens. À ce rythme, il faudra réunir tout le Jura dans une communauté de communes !
M. Daniel Raoul. - Ces amendements sont d'appel, et même de rappel de l'esprit de la loi. Monsieur Longeot, dans l'abaissement du seuil à 15 000, il y a eu des gagnants, qui ne sont pas forcément ceux qui s'en vantent. Chacun doit rester humble... Avouons aussi que les votes dans les CDCI se dérouleraient plus facilement si les élus mettaient leurs egos en sourdine.
M. Hervé Maurey, président de la commission. - Je ne peux pas laisser dire que les élus ont le pouvoir dans les CDCI. C'est le préfet qui élabore le projet de schéma. La CDCI peut l'amender à la majorité des deux tiers... des membres, pas même des présents ! (Applaudissements au centre) C'est toujours un exploit, sauf si l'évidence s'impose. Très peu de CDCI ont modifié un territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen, au centre et à droite)
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Je siège dans une CDCI et préside une intercommunalité. Je fus comme secrétaire d'État un pionnier de l'intercommunalité. J'ai toujours considéré qu'il fallait une représentation égalitaire, deux représentants par commune.
Je le répète, ce n'est pas le préfet qui décide, mais les élus. Et lorsqu'il y a des blocages, ils sont liés à des oppositions parmi ceux-ci - entre grands élus en particulier - et non entre les élus et le préfet ! Le système actuel est une avancée par rapport au système précédent, dans lequel le préfet décidait seul. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas le lieu ni le moment de modifier le fonctionnement de ces instances.
Les amendements identiques nos40 rectifié, 183 rectifié bis, 261 rectifié bis, 345 rectifié ter, 377, 430 rectifié sont adoptés et deviennent article additionnel.
L'amendement n°232 devient sans objet.
ARTICLE 3 BIS A
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Cet amendement supprime l'article 3 bis par lequel les députés ont précisé que le futur calcul de la DGF prendrait en compte les charges spécifiques aux territoires de montagne. La réforme est prévue pour 2018.
M. Loïc Hervé. - Elle est tombée dans l'oubli.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Non, mais les enjeux sont nombreux et personne n'est d'accord sur le contenu. J'ai réuni les élus de toutes les catégories de communes, et faute de point de vue commun, le président de l'AMF a demandé au nom de toutes un report, pour insérer la réforme dans un projet plus vaste sur les collectivités locales. C'est ce que le président de la République a annoncé au Congrès des maires.
Quant à la péréquation, on l'accepte volontiers tant qu'elle est verticale, mais dès qu'elle devient horizontale, tous les contributeurs protestent. Ne touchons pas au FPIC. Nous avons stabilisé ses crédits à 1 milliard d'euros. Le temps est venu d'une pause.
M. Daniel Raoul. - Très bien.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Cet article est pourtant un article de compromis. Il se contente de poser le principe d'une prise en compte des surcoûts liés à la montagne dans la DGF. Avis défavorable à l'amendement n°449.
M. Loïc Hervé. - Pour certaines collectivités, la DGF sera bientôt négative. À Cluses, le montant du FPIC sera même supérieur à la DGF !
Les communes de montagne doivent faire face aux contraintes climatiques, aux surcoûts sur le foncier, aux aménagements du territoire, au soutien à l'activité... La DGF doit en tenir compte.
M. Bernard Delcros. - Nul ne sait ce qu'il adviendra de la réforme de la DGF. Ce texte est l'occasion de fixer les principes et d'abord la prise en compte des surcoûts de la montagne. Je soutiens le texte de la commission. C'est la meilleure garantie pour la future réforme !
M. Michel Bouvard. - Les surcoûts liés à la montagne doivent être intégrés dans le calcul de la dotation.
En théorie, le FPIC est merveilleux. La montagne reçoit certes plus qu'elle ne verse au titre du fonds de péréquation... mais dans certains territoires, toutes les communes sont contributrices ! Des quatre départements où toutes les communes contribuent, trois sont des territoires de montagne. Un seul est urbain, les Yvelines. Il y aurait beaucoup à dire sur la péréquation.
De même Paris et les Hauts-de-Seine, les départements les plus riches du pays, ne contribuent pas à la DCRTP. C'est un scandale. On prend même à des communes défavorisées, pour distribuer aux autres... Il faut une remise à plat de la péréquation dans son ensemble.
M. Alain Marc. - Toutes les communes autour de chez moi sont contributrices au FPIC. Quels sont les critères ? Je souhaite plus de transparence. Enfin, les communes ont besoin de davantage de visibilité pour élaborer leurs projets.
Mme Annie David. - Nous ne pouvons suivre le Gouvernement. Nous l'aurions fait s'il avait rétabli la rédaction de l'Assemblée nationale votée par tous les bancs, avec le soutien du ministre. Mais la rédaction proposée ne s'en tient pas à cela, elle comporte de nouveaux éléments relatifs au calcul des montants FPIC.
L'amendement n°449 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°13, présenté par M. Delcros et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Supprimer les mots :
Dans leur principe,
M. Bernard Delcros. - Cet amendement supprime la mention « dans leur principe » car soit elle est inutile, soit elle atténue le principe de prise en compte des particularités des zones de montagne dans la DGF et le fonds national de péréquation.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Retrait ou défavorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Même avis.
L'amendement n°13 est retiré.
M. le président. - Amendement n°102, présenté par M. Roux et les membres du groupe socialiste et républicain.
Remplacer les mots :
la dotation globale de fonctionnement et le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales intègrent
par les mots :
l'ensemble des dispositifs financiers de soutien aux collectivités territoriales, et notamment la dotation globale de financement et le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, intègre
M. Jean-Yves Roux. - Nous avons tous entendu qu'une réforme de la DGF sera menée. Cet amendement d'ordre rédactionnel propose une rédaction plus large de l'article, incluant l'ensemble des dispositifs financiers de soutien aux collectivités territoriales, dont la DGF et le FNPRIC.
M. le président. - Amendement n°14, présenté par M. Delcros et les membres du groupe UDI-UC.
Après les mots :
de fonctionnement
insérer les mots :
, dans ses composantes forfaitaires et ses dotations de péréquation,
M. Bernard Delcros. - Cet amendement précise que les deux composantes de la DGF sont affectées.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°102, la formulation est trop large. L'amendement n°14 est inutile, la rédaction porte bien sur l'ensemble de la DGF.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Même avis, pour les mêmes raisons.
L'amendement n°102 est retiré, ainsi que l'amendement n°14.
L'article 3 bis A est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°280 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mme Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Après l'article 3 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La section V du chapitre II du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complétée par un 12° ainsi rédigé :
« 12° Réduction d'impôt dans les zones de revitalisation rurale prioritaire
« Art. 220 ... - 1. Les zones de revitalisation rurale prioritaire comprennent les départements dont la densité de population est inférieure ou égale à trente-cinq habitants par kilomètre carré.
« 2. Dans les zones de revitalisation rurale prioritaire, le taux de l'impôt définit à l'article 205 est réduit de cinquante pour cent par rapport au taux normal. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. Alain Bertrand. - La définition actuelle des zones de revitalisation rurale ne prend pas réellement en compte les difficultés spécifiques des territoires hyper-ruraux.
Nous proposons de fixer le plafond de densité de population à 35 habitants au kilomètre carré, afin d'inclure les quatorze départements les plus ruraux.
À cause de l'éloignement des grandes villes, les territoires situés en ZRR ne sont plus assez attractifs pour attirer les entreprises, même s'ils ont d'autres avantages. Une réduction d'impôt sur les sociétés de moitié, cela pourrait faire briller les yeux...
M. le président. - Amendement n°281 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Amiel, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Après l'article 3 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La section V du chapitre II du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complétée par un 12° ainsi rédigé :
« 12° Réduction d'impôt dans les zones de revitalisation rurale prioritaire
« Art. 220-... - 1. Les zones de revitalisation rurale prioritaire comprennent les départements dont la densité de population est inférieure ou égale à trente-cinq habitants par kilomètre carré.
« 2. Dans les zones de revitalisation rurale prioritaire, le taux de l'impôt définit à l'article 205 est réduit de trente pour cent par rapport au taux normal. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. Alain Bertrand. - Amendement de repli, prévoyant une réduction d'impôt sur les sociétés de 30 %.
M. le président. - Amendement n°282 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Amiel, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Après l'article 3 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La section V du chapitre II du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complétée par un 12° ainsi rédigé :
« 12° Réduction d'impôt dans les zones de revitalisation rurale prioritaire
« Art. 220 ... - 1. Les zones de revitalisation rurale prioritaire comprennent les départements dont la densité de population est inférieure ou égale à trente-cinq habitants par kilomètre carré.
« 2. Dans les zones de revitalisation rurale prioritaire, le taux de l'impôt définit à l'article 205 est réduit de quinze pour cent par rapport au taux normal. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. Alain Bertrand. - Second amendement de repli, avec une réduction d'impôt sur les bénéfices ramenée à 15 %.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Les amendements étendraient excessivement le périmètre des ZRR car le classement s'effectuerait par département et toutes les communes seraient concernées. Actuellement, en outre, la réduction d'impôt est temporaire et non pérenne, et elle ne vise que les plus petites PME. Avis défavorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Une telle réforme relève du projet de loi de finances, non de ce texte. De plus, le Gouvernement est en train de finaliser la carte des ZRR : ce n'est pas le moment de la chambouler ! Avis défavorable.
M. Alain Bertrand. - Je retire mes amendements mais je déposerai une proposition de loi.
Les amendements nos280 rectifié, 281 rectifiéet 282 rectifié sont retirés.
M. le président. - Amendement n°168 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Delahaye, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle.
Après l'article 3 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La majoration de la population prise en compte dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement intègre l'ensemble des modes d'hébergement de la population non permanente définis à l'article R. 133-33 du code du tourisme.
M. Loïc Hervé. - Cet amendement vise une meilleure prise en compte de la population non permanente pour la majoration prévue dans le calcul de la DGF.
Actuellement, seules les résidences secondaires sont intégrées. Il faut y ajouter les autres modes d'hébergement des touristes.
Les stations de montagne sont confrontées à d'importantes variations de population. Les écarts très forts entre la population permanente et la population touristique induisent des charges supplémentaires non compensées actuellement par la DGF et lourdes pour ces communes, malgré un niveau moyen de richesse apparent plus élevé.
M. le président. - Amendement identique n°256 rectifié, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
M. Alain Bertrand. - Défendu.
L'amendement n°298 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement identique n°376, présenté par M. Bouvard.
M. Michel Bouvard. - Seules les résidences secondaires sont comptabilisées pour la majoration alors qu'il s'agit du mode d'hébergement le moins performant. Elles ne sont pas toujours occupées ; en cas de location, les revenus ne sont pas toujours déclarés... Or tous les types d'hébergement engendrent des charges pour les communes.
M. Michel Savin. - Défendu.
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Avis favorable.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Certaines communes de montagne, à l'inverse, trouvent que la population saisonnière pèse trop lourd dans le calcul de la DGF. Des amendements à l'Assemblée nationale qui allaient dans le même sens que les vôtres n'ont pas été adoptés, ce qui prouve qu'il n'y a pas d'unanimité. Votre amendement favoriserait les communes les plus touristiques, au détriment des autres. La structure actuelle est plutôt équilibrée.
M. Jean Desessard. - Si je comprends bien, les communes les moins touristiques préfèrent que l'on prenne en compte la population réelle ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - J'avais en tête un amendement de M. Joël Giraud à l'Assemblée nationale. Certaines communes de montagne ont des charges importantes et ne bénéficient pas de la manne touristique.
Mme Annie David. - Je suivrai le ministre, la proposition doit être travaillée plus collectivement, et cet amendement ne satisferait pas tous les montagnards.
M. Michel Bouvard. - Certes, mais l'enveloppe de la DGF n'est pas fermée. La majoration au titre des résidences secondaires concerne toutes les communes, pas seulement celles de montagne. Ainsi, le système actuel encourage la rente. L'erreur a déjà été faite : la réforme Juppé de 1995 a cristallisé la dotation touristique au sein de la DGF. Aujourd'hui, tout le monde souhaite en finir avec cette dotation touristique. Raison de plus pour élargir l'assiette !
M. Loïc Hervé. - Les équipements des stations touristiques profitent à tout le territoire, aux communes voisines. Ils ont pourtant un coût d'entretien. Ce sont des charges de quasi-centralité !
Les amendements identiques nos168 rectifié, 256 rectifié, 376 et 429 ne sont pas adoptés.
L'article 3 bis est adopté.
L'article 3 ter reste supprimé.
ARTICLE 3 QUATER
M. Jean-Michel Baylet, ministre. - Cet amendement supprime le prolongement, sur trois ans, du bénéfice du classement en ZRR pour les communes de montagne qui sortiront du dispositif au 1er juillet 2017.
L'article 3 quater conduirait à maintenir jusqu'au 31 décembre 2020 les principales mesures liées au classement ZRR alors même que ces communes ne remplissent plus les critères. Cet élargissement, sans réel fondement, conduirait à minorer l'impact territorial du dispositif des ZRR pour les communes qui en ont le plus besoin. Avec cet article, on marche sur la tête !
M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Il faut éviter les sorties sèches du dispositif de ZRR pour ne pas déstabiliser les territoires.
L'amendement n°446 n'est pas adopté.
L'article 3 quater est adopté.
L'amendement n°4 n'est pas défendu.
L'article 4 A est adopté.
La séance est suspendue à 19 h 55.
présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente
La séance reprend à 21 h 30.