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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Convention fiscale avec Singapour

Discussion générale

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

M. Éric Doligé, rapporteur de la commission des finances

Mme Nathalie Goulet

M. Éric Bocquet

M. Richard Yung

M. André Gattolin

M. Jean-Claude Requier

Mme Jacky Deromedi

Intervention sur l'ensemble

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Convention fiscale avec la Suisse

Discussion générale

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Hommage à une délégation québécoise

Convention fiscale avec la Suisse (Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Éric Doligé, rapporteur de la commission des finances

Mme Nathalie Goulet

M. Éric Bocquet

M. Richard Yung

M. André Gattolin

M. Guillaume Arnell

M. Alain Houpert

Intervention sur l'ensemble

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Avis sur deux nominations

Élection présidentielle (Procédure accélérée)

Discussion générale commune

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales

M. Christophe Béchu, rapporteur de la commission des lois

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis de la commission de la culture

Mme Éliane Assassi

M. Alain Anziani

Mme Corinne Bouchoux

M. David Rachline

M. Pierre-Yves Collombat

M. Hugues Portelli

Mme Nathalie Goulet

M. Jean-Pierre Sueur

M. Roger Karoutchi

Discussion des articles de la proposition de loi organique

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 2

ARTICLE 3

ARTICLE ADDITIONNEL

Hommage à une délégation du Bundesrat

Élection présidentielle (Procédure accélérée - Suite))

Discussion des articles de la proposition de loi organique (Suite)

ARTICLE 4

ARTICLE 6

ARTICLE 7

ARTICLE 8 A

ARTICLE 8

M. Robert del Picchia

Interventions sur l'ensemble

M. Pierre-Yves Collombat

Mme Nathalie Goulet

Mme Éliane Assassi

Mme Corinne Bouchoux

Discussion des articles de la proposition de loi

ARTICLE 2 TER

ARTICLE ADDITIONNEL

ARTICLE 5

Question prioritaire de constitutionnalité

Dépôt d'un rapport

Protection de l'enfant (Nouvelle lecture)

Discussion générale

Mme Laurence Rossignol, ministre de la famille, de l'enfance et des droits des femmes

Mme Michelle Meunier, rapporteure de la commission des affaires sociales

Mme Aline Archimbaud

M. Guillaume Arnell

M. Philippe Mouiller

Mme Élisabeth Doineau

Mme Laurence Cohen

Mme Claire-Lise Campion

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 4

ARTICLE 5 ED

ARTICLE 6

ARTICLE 7 (Supprimé)

ARTICLE 21 TER

ARTICLE 22 QUATER

Interventions sur l'ensemble

Mme Claire-Lise Campion

Mme Laurence Cohen

Mme Aline Archimbaud

M. Guillaume Arnell

M. Philippe Mouiller

Mme Élisabeth Doineau

Mme Michelle Meunier, rapporteure

Mme Laurence Rossignol, ministre de la famille, de l'enfance et des droits des femmes

Expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée (CMP - Procédure accélérée)

Mme Anne Emery-Dumas

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage

M. Jean Desessard

M. Guillaume Arnell

M. Philippe Mouiller

Mme Élisabeth Doineau

Mme Laurence Cohen

M. Éric Jeansannetas

M. Daniel Chasseing

Ordre du jour du mardi 1er mars 2016

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du jeudi 18 février 2016

69e séance de la session ordinaire 2015-2016

présidence de Mme Françoise Cartron, vice-présidente

Secrétaires : M. Serge Larcher, M. Jean-Pierre Leleux.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Convention fiscale avec Singapour

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Singapour en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu.

Discussion générale

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Traditionnellement, le débat fiscal se concentre sur les textes financiers. Pourtant, les conventions fiscales ont acquis une importance croissante dans une économie globalisée, avec des flux financiers transfrontaliers en progression. Elles garantissent aux contribuables concernés un traitement équitable, sans formalités excessives ni sacrifier les recettes, tout en prévenant la fraude.

Le premier texte de ce matin concerne Singapour. Une modernisation de la Convention de 1974 s'imposait en raison de l'accroissement de nos échanges, de stipulations devenues coûteuses pour le Trésor français et de l'absence de dispositifs anti-abus. Le nouvel accord a été conclu et signé en janvier 2015.

Ce texte, conforme aux normes internationales les plus récentes, marque un progrès pour les acteurs économiques comme dans la lutte contre l'optimisation fiscale. Singapour a fait d'importants progrès en matière de coopération fiscale sur demande, grâce à la levée du secret bancaire en 2009. Sur douze demandes adressées à la cité-État en 2015, nous avons obtenu satisfaction dix fois ; le délai de réponse est passé de trois mois à cinquante jours. Singapour a en outre promis d'appliquer le dispositif d'échange automatique d'informations en 2018.

La lutte contre les situations de non-imposition est renforcée. L'exonération en France d'un revenu taxable à Singapour n'est accordée que si le bénéficiaire est effectivement assujetti à l'impôt à Singapour à raison de ce revenu. Un dispositif de lutte contre les montages financiers de structuration des investissements est introduit ; le bénéfice du taux de retenue à la source réduit n'est accordé que si le récipiendaire du revenu en est le bénéficiaire effectif. Une clause anti-abus générale a été introduite. Le crédit d'impôt forfaitaire, coûteux pour nos finances publiques, sera supprimé.

Des aménagements favorables aux opérateurs économiques ont été prévus : définition de l'établissement stable, intérêts imposés dans le seul État du bénéficiaire ; rédaction rapprochée du modèle de l'OCDE pour plus de sécurité juridique.

Je vous invite donc à ratifier cette convention. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Éric Doligé, rapporteur de la commission des finances .  - Vous l'avez dit, monsieur le ministre, les conventions sont un élément majeur de notre fiscalité.

Alors que l'accord avec la Suisse vise à répondre à un problème ponctuel et précis, l'accord avec Singapour s'inscrit dans le mouvement continu de renégociation de nos conventions fiscales.

L'actualité, pourtant n'est jamais loin. Cette convention a été négociée dans le contexte des débats sur le projet « BEPS » (Base erosion and profit shifting) de l'OCDE, qui vise à lutter contre la délocalisation abusive des bénéfices - de vigoureuses discussions sont en cours à Bruxelles...

Une convention fiscale est un acte politique. Ce n'est pas sans raison que notre commission avait organisé, le 1er juillet dernier, une audition conjointe sur le thème de la diplomatie fiscale : car c'est dans une convention fiscale que se joue la répartition entre les États du droit d'imposer les bases fiscales et le partage des fruits de la croissance mondiale. Et c'est dans une telle convention que les entreprises et les particuliers trouvent, ou non, une incitation à investir et s'installer dans un autre pays.

En l'espèce, cette convention fiscale viendra se substituer au texte actuel, qui date du 9 septembre 1974, et ne correspond plus à la réalité des échanges économiques entre les deux pays.

Plaque tournante du commerce et des investissements en Asie du Sud-Est, Singapour a en effet vu son économie évoluer en profondeur, délaissant en quatre décennies les activités manufacturières au profit d'une spécialisation dans la finance et les activités à haute valeur ajoutée. La cité-État cherche aujourd'hui à attirer de nouveaux investissements dans les secteurs de pointe, où la France excelle. Nos entreprises et nos ingénieurs ne pourront que tirer parti du nouveau cadre fiscal.

Le texte de l'accord est, en pratique, très proche du modèle de l'OCDE, malgré quelques spécificités. La nouvelle convention offre un cadre plus favorable aux investissements. La retenue à la source sur les dividendes est abaissée de 10 % à 5 %, ce qui permettra aux entreprises françaises détenant des filiales à Singapour de faire remonter plus facilement leurs bénéfices vers la France ; les intérêts sont exonérés de la retenue à la source de 10 % s'ils résultent de prêts inter-entreprises, mode de financement très utilisé par les entreprises françaises. Un chantier devra dorénavant avoir une durée de douze mois, contre six auparavant, pour être considéré comme un établissement stable, et donc imposable à Singapour. Enfin, les clauses particulièrement favorables aux étudiants, stagiaires, apprentis et enseignants de la convention de 1974 sont maintenues.

La nouvelle convention fiscale préserve en outre le droit des États à imposer des activités sur leur territoire, par le maintien d'une imposition à la source des redevances provenant d'activités littéraires et artistiques et par l'introduction de la notion d'établissement stable de services.

Le système des crédits d'impôt forfaitaires est supprimé. Le Trésor public français en sera le grand bénéficiaire, après la fin de la période de transition. Ce système, qui s'apparentait à une forme de subvention à l'exportation vers les pays en développement, est devenu anachronique ; il sera remplacé par un crédit d'impôt égal au montant réellement acquitté à Singapour, conformément au modèle OCDE.

La convention comporte enfin une série d'améliorations visant à prévenir la fraude fiscale et l'optimisation abusive. Relevons, notamment, l'introduction d'une clause anti-abus générale, visant à combattre les montages dont le but est principalement, sinon exclusivement, de tirer indûment un avantage fiscal des stipulations de la convention. Notons aussi le renforcement du mécanisme d'échange d'informations à la demande : il est dorénavant précisé que les renseignements obtenus peuvent être utilisés, sous conditions, à d'autres fins que des fins fiscales, comme la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. La coopération fiscale avec Singapour est déjà satisfaisante, et devrait être encore être renforcée par le passage à l'échange automatique en 2018.

Cette convention fiscale n'est pas exempte de critiques : un texte de ce type est toujours le résultat d'un compromis. On peut regretter l'absence de clauses traitant des sociétés de personnes et entités transparentes, dont l'interposition, notamment en matière immobilière, constitue un montage courant pour échapper à l'impôt. Une précaution aurait été bienvenue.

Les avantages de cette convention l'emportent toutefois très nettement sur ses quelques faiblesses. La commission des finances vous propose d'autoriser sa ratification. (Applaudissements)

Mme Nathalie Goulet .  - Nous recevons en ce moment même une délégation québécoise qui vient étudier la façon dont nous traitons de l'évasion et de la fraude fiscales. Nous voici aux travaux pratiques...

La renégociation de nos conventions fiscales, c'est un peu comme la chanson de Barbara, ça recommence... Mais cela prouve que quand il y a la volonté, il y a un chemin... C'est bon signe.

La baisse de 10 à 5 % de la retenue à la source aidera nos entreprises et favorisera le rapatriement des bénéfices. Dans la suite des travaux de nos deux commissions d'enquête, cette convention contient une clause anti-abus qui permettra de sanctionner des pratiques telles que les sociétés-écrans que certaines banques peu scrupuleuses proposent à leurs clients. La France a fait beaucoup de progrès en la matière, comme le note le président de Transparency International, et ce type de convention y contribue.

Vice-présidente de la commission des affaires étrangères, je n'oublie pas notre importante coopération militaire avec Singapour, et le bénéfice que nos industries de défense tireront de cette convention.

Nous voterons ce projet de loi.

M. Éric Bocquet .  - Le débat fiscal a quelque chose d'exotique lorsqu'il s'agit de pays lointains tels que Singapour. On sait que certains sites internet spécialisés dans la création de sociétés off shore vantent volontiers des taux d'imposition proches de zéro, l'anonymat et l'absence de capital minimal...

Détaché de la Malaisie, la cité-État, de 700 kilomètres carrés et de 5,5 millions d'habitants, prospère, est riche comme le Danemark. Disposant du deuxième port mondial après Shanghai, c'est une plaque tournante du commerce asiatique et une place financière importante. La main d'oeuvre y est qualifiée, la fiscalité des entreprises assez douce, celle des particuliers favorable aux plus aisés. Si l'on y ajoute un système éducatif performant, un système politique stable, et des gratte-ciels à perte de vue, on a tout le cocktail de la réussite économique de Singapour...

Singapour reste aussi dans la liste des dix paradis fiscaux les plus recommandés, en quatrième position sur 92 dans le classement de l'opacité financière de l'ONG Tax justice network. ...

En pleine lucidité, nous nous abstiendrons, car des progrès sérieux restent à accomplir. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et écologiste)

M. Richard Yung .  - Ce fut une spécialité britannique que de créer des micro-États là où il y avait, soit un enjeu stratégique, soit du pétrole... Singapour en fait partie.

Cette convention modernise les relations fiscales entre nos deux pays. C'est d'autant plus important que la cité-État est devenue un grand carrefour économique de l'Asie du sud-Est.

Il faut se réjouir des efforts de transparence faits par Singapour. C'est le deuxième port du monde, qui génère beaucoup d'activités. La France n'y est que le dix-huitième investisseur étranger, avec 600 entreprises de toutes tailles. La convention renforcera la sécurité juridique des personnes physiques et morales, et la sécurité des recettes fiscales. Espérons que la répartition des droits imposés se fera en notre faveur.

Les principaux éléments de l'accord ont été évoqués : définition de l'établissement stable, baisse de la retenue à la source sur les dividendes, suppression du crédit d'impôt fictif... Il intègre notamment un nouveau dispositif anti-abus - après la Suisse, le chemin de l'optimisation fiscale conduirait à Singapour... Enfin, c'est très important, le dispositif d'échange de renseignements est conforme aux normes BEPS.

Malgré ses faiblesses - il ne traite pas de l'impôt sur la fortune...qui n'existe pas à Singapour - l'accord prouve la volonté de coopération de la cité-État. J'appelle le groupe socialiste et républicain à le voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. André Gattolin .  - Cette convention fiscale mérite une attention particulière. Jusqu'à récemment au moins, Singapour était une des principales plaques tournantes de l'optimisation fiscale internationale. Mais c'est aussi une économie florissante et un partenaire important pour la France. D'où le double enjeu : lutter contre la fraude, et fluidifier nos échanges économiques et commerciaux.

Je regrette toutefois que cette convention ait été négociée alors que l'Union européenne venait d'ouvrir des négociations avec Singapour en vue d'un accord de libre-échange. La superposition de deux accords n'augure hélas pas du passage du niveau bilatéral au niveau européen...

Singapour a aujourd'hui un comportement plutôt coopératif, nos demandes sont raisonnablement honorées. Et la cité-État a promis d'appliquer l'échange automatique d'informations à partir de 2018. Reste que les clauses anti-abus comportent quelques failles, il eut été préférable d'être plus strict. Nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Jean-Claude Requier .  - « Puisse Singapour progresser », dit l'hymne de la cité-État. Puissent nos relations fiscales progresser aussi !

Si les paradis fiscaux du Vieux Continent disparaissent peu à peu, les investisseurs vont chercher ailleurs, et notamment à Singapour. Mais la cité-État n'est pas seulement une place financière : son économie se repositionne aujourd'hui sur les nouvelles technologies et nos relations commerciales sont importantes. Il est bon de les stimuler. Les facilités dont les étudiants disposeront sont également bienvenues.

Enfin, les clauses visant à lutter contre la fraude, malgré leurs faiblesses, constituent un progrès. Le groupe RDSE votera ce texte.

Mme Jacky Deromedi .  - Résidente à Singapour pendant vingt-sept ans, où j'ai créé un cabinet d'aménagement d'espaces professionnels, je m'intéresse naturellement à la présente convention.

Les gouvernements français et singapouriens entendent renforcer des liens commerciaux déjà forts. Singapour est l'un des cinq pays avec lesquels notre excédent commercial est le plus important, 15 000 Français vivent sur son sol, 600 entreprises françaises y sont installées et la cité-État fait tout pour attirer les étrangers.

Il était temps de revoir la convention fiscale de 1974. La notion de résidence s'éloigne ici du standard de l'OCDE, excluant notamment le critère de nationalité. Celle d'établissement stable est précisée. Autre particularité : l'imposition des dividendes, ramenée de 10 % à 5 % lorsque la société détient au moins 10 % du capital de sa filiale. C'est une bonne nouvelle pour nos entreprises.

La nouvelle convention élimine les doubles impositions et supprime le mécanisme de crédit d'impôt forfaitaire.

Le forum mondial sur la transparence a constaté à Djakarta en novembre 2013 que Singapour, du point de vue de la coopération fiscale, se plaçait désormais au même niveau que l'Allemagne. Toutes nos demandes, en 2015, ont été satisfaites en deux mois. Le dispositif d'échange de renseignement est conforme aux normes OCDE et Singapour s'est engagé sur l'échange automatique à l'horizon 2018. La généralisation des clauses anti-abus évitera que des investisseurs continuent à s'installer dans des pays en raison de leur réseau de conventions fiscales favorables...

En dépit de l'absence de clauses sur les redevances, j'invite à ratifier cette convention pro-business et sévère à l'égard des fraudeurs, qui favorisera les échanges et renforcera l'amitié entre nos deux peuples. (Applaudissements)

Intervention sur l'ensemble

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Quand il y a la volonté, il y a un chemin, dit Mme Goulet... Nous n'avons pas attendu ce jour pour renégocier nos conventions fiscales... Nous avons récemment résolu le problème des plus-values immobilières avec le Luxembourg. Nous reviendrons vers vous avec d'autres conventions...

J'ai entendu que certains s'abstiendront. J'aurais aimé comprendre plus précisément pourquoi...

Quand des législations sont aussi différentes que celles de la France et Singapour, il faut bien trouver des compromis. Et il ne s'agit pas seulement d'éviter la double imposition, mais aussi la non-imposition.

La discussion générale est close.

L'article unique est adopté.

En conséquence, le projet de loi est définitivement adopté.

Convention fiscale avec la Suisse

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse modifiant le protocole additionnel à la convention entre la France et la suisse du 9 septembre 1966 modifiée, en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales.

Discussion générale

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Cet accord est un pas extrêmement important dans la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. Il portera l'échange d'informations entre nos deux pays au niveau élevé du standard de l'OCDE. Il faut saluer les efforts substantiels de la Suisse en matière d'échange de renseignement sur demande, sachant que l'engagement pris par ce pays pour appliquer l'échange automatique d'informations en 2018 est une avancée majeure.

Ces progrès se constatent au quotidien. En 2014 et 2015, le stock de demandes en attente de notre part a largement diminué - pour 642 nouvelles demandes, nous avons reçu 942 réponses. Le délai de traitement a été divisé par deux et ramené à 185 jours. Cela contribue aux excellents résultats du Service de traitement des déclarations fiscales rectificatives (STDR) : en 2015, 2,65 milliards ont été constatés en recettes, 91 % des dossiers venant de Suisse. Le rapport en cours d'élaboration nous sera transmis dans les prochains jours. Même s'il a un peu ralenti, le rythme de nouveaux dossiers reste soutenu, et le montant moyen de ceux-ci à plus de 700 000 euros. Nous prévoyons 2,4 milliards de recettes en 2016.

Les dispositions du projet de nouvelle convention sur l'échange d'informations sur les successions, qui avait échoué en 2014, ont été reprises dans ce texte. La France pourra adresser à la Suisse des demandes portant sur des groupes de contribuables sans avoir à indiquer le nom et l'adresse de chacun. La Suisse faisait jusqu'ici une interprétation restrictive, ce qui a conduit à quelques surprises ...

Pour les informations bancaires, l'État requérant n'aura pas non plus à désigner l'établissement financier qui détient les éléments recherchés. Une clause de portée générale est prévue pour éviter toute interprétation restrictive.

Ces nouveaux outils seront applicables à tous les faits constatés depuis le 1er février 2013 ; les renseignements pouvant, eux, remonter jusqu'au 1er janvier 2010. J'espère que cela incitera certains - je m'adresse au-delà de cet hémicycle - à se précipiter au STDR ...

Ce texte d'efficacité contribuera à réprimer les pratiques de ceux qui se soustraient aux charges publiques au préjudice de leurs concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Hommage à une délégation québécoise

Mme la présidente.  - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent, ainsi que M. le ministre) J'ai le grand plaisir, au nom du Sénat tout entier, de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d'une délégation de députés de l'Assemblée nationale du Québec, conduite par M. Raymond Bernier, président de la commission des finances de cette assemblée.

Nous sommes particulièrement sensibles à l'intérêt et à la sympathie que vous portez à notre institution. Au nom du Sénat de la République, je leur souhaite la bienvenue et je forme des voeux pour que leur séjour en France contribue à renforcer les liens d'amitié francophone entre la France et le Québec. (Applaudissements)

Convention fiscale avec la Suisse (Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Éric Doligé, rapporteur de la commission des finances .  - Difficile d'intervenir après vous, monsieur le ministre, car nous sommes d'accord sur l'essentiel.

Contrairement à la convention avec Singapour, de portée générale, l'accord avec la Suisse répond à un problème ciblé : l'échange d'informations fiscales. Il n'est pas nécessaire de rappeler combien une bonne coopération fiscale avec la Suisse est importante : 85 % des 45 000 régularisations effectuées depuis 2013 auprès du service de traitement des déclarations fiscales rectificatives (STDR) proviennent de la Confédération helvétique. En février 2015, l'affaire Swiss Leaks révélait un vaste système de fraude fiscale organisée par HSBC. En janvier 2016, les médias faisaient état de 38 000 comptes non déclarés, soit 12 milliards d'euros détenus par des citoyens français auprès d'UBS.

Si les échanges de renseignements fiscaux entre la France et la Suisse sont, depuis 2009, régis par un dispositif juridique conforme aux derniers standards de l'OCDE, la coopération demeurait difficile. En effet, la ratification de l'avenant du 27 août 2009 avait été conditionnée par la Suisse à la signature d'un échange de lettres, daté du 11 février 2010, à la formulation ambiguë, que la Suisse invoque pour écarter les demandes qui ne mentionnent pas le nom et l'adresse du contribuable visé ou l'établissement qui détient les informations - ce que par définition l'administration française ignore généralement. C'est à ces insuffisances que s'est heurtée la demande effectuée dans le cadre de l'affaire Cahuzac. Sur 426 demandes entre le 1er janvier 2011 et le 15 avril 2013, seules 29 réponses ont été reçues, et six jugées satisfaisantes.

La pression internationale croissante a rendu une renégociation inévitable. Elle a toutefois pris du retard en raison du rejet en 2014 par le parlement suisse de la convention bilatérale sur les successions, qui incluait le nouveau dispositif. Il a donc été décidé d'élaborer un texte spécifique, qui a abouti au présent accord du 25 juin 2014.

Cet accord contient trois avancées notables. Il assouplit les conditions d'identification de la personne visée par la demande et autorise les demandes groupées. Il met fin à l'obligation d'identifier au préalable l'établissement financier qui détient les informations recherchées, en levant l'interprétation restrictive de l'accord actuel. Enfin, une clause de portée générale stipule que les éléments de la convention et du protocole « doivent être interprétés de manière à ne pas faire obstacle à un échange effectif de renseignements ».

L'accord s'applique aux faits survenus à compter du 1er février 2013, une rétroactivité qui correspond opportunément au délai de prescription fiscale.

Bien sûr, l'échange à la demande suppose de savoir au préalable ce que l'on cherche et repose in fine sur la bonne volonté des autorités étrangères. Toutefois, on peut espérer que la Suisse mette en oeuvre l'échange automatique d'informations d'ici 2018, comme elle s'y est engagée, avec 94 autres pays, le 29 octobre 2014 à Berlin et comme elle le pratique déjà avec les États-Unis dans le cadre de la loi Fatca. La loi fédérale a été récemment modifiée afin de permettre la mise en oeuvre de ce dispositif, qui signe la fin du secret bancaire.

D'ailleurs, monsieur le ministre, les États-Unis jouent-ils le jeu de la coopération ?

La perspective de la levée du secret bancaire a déjà conduit près de 45 000 repentis à se manifester auprès du service de traitement des déclarations fiscales rectificatives (STDR), qui a récupéré 1,9 milliard d'euros en 2014 et 2,5 milliards en 2015. La place de Genève incite désormais ses clients à régulariser leur situation.

Merci, monsieur le ministre, de nous faire parvenir le jaune budgétaire, qui n'était plus disponible depuis deux ans. (M. Michel Bouvard s'en réjouit).

En 2013, la France a formulé 246 demandes et reçu 51 réponses ; en 2014, 319 demandes et 696 réponses - signe d'un grand rattrapage ; ces progrès se sont poursuivis en 2015. La Suisse, elle n'a formulé qu'une demande en 2013 et 2014, puis 22 en 2015.

Cet accord n'épuise pas tous les sujets que nous avons à régler avec les Suisses - travailleurs frontaliers, accès aux marchés financiers européens, etc. C'est néanmoins un progrès majeur, difficilement concevable il y a seulement deux ou trois ans. C'est pourquoi toutes les initiatives politiques qui vont en ce sens doivent être soutenues avec constance et détermination. Je vous propose d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements).

Mme Nathalie Goulet .  - Si nous ne prononçons pas encore l'éloge funèbre du secret bancaire, l'heure de l'extrême onction approche... Quand on veut, on peut disais-je. Ma remarque ne se voulait pas désobligeante, et Transparency a souligné les progrès réalisés : 7 milliards d'euros rapatriés depuis 2010.

Cette convention assouplit les conditions d'identification, mettant un terme au recours à des prête-noms et sociétés écran. Mais il faut aussi protéger les lanceurs d'alertes.

En outre, la question des ports francs n'est pas réglée. L'évasion fiscale nourrit le terrorisme : la Suisse est le troisième pays de blanchiment de capitaux finançant le terrorisme.

L'opinion publique supporte de moins en moins la fraude et l'évasion fiscales. Membre de la commission des affaires étrangères, et non de la commission des finances, je ne peux que souligner que des progrès restent à faire, en dépit d'avancées. Vous pourrez compter sur le soutien de notre groupe. (Applaudissements)

M. Éric Bocquet .  - Clin d'oeil à l'actualité, nous traitons aujourd'hui de deux conventions avec Singapour et la Suisse, pays pivots d'un système d'évasion fiscale particulièrement sophistiqué.

Mais les conventions bilatérales ne sont plus le cadre approprié pour lutter contre l'évasion fiscale : il faudrait des décennies pour mettre à jour les 3600 conventions bilatérales aujourd'hui en vigueur dans le monde. Quand les enjeux se chiffrent en centaines de milliards d'euros, un cadre multilatéral imposant l'échange automatique d'informations est indispensable.

Le Parlement doit être associé et informé régulièrement : ces sujets ne sauraient être l'apanage de Bercy. Notre commission d'enquête avait proposé de créer un Haut-commissaire à la défense des intérêts publics, qui permettrait d'associer les parlementaires.

Les lignes ont bougé avec la Suisse, sous l'effet de la pression des États-Unis et des dossiers dévoilés par des lanceurs d'alerte. Nous voterons ce texte en pleine lucidité : c'est un premier petit pas, sachant que la route sera encore longue vers la grande lumière universelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; Mme Nathalie Goulet applaudit également)

M. Richard Yung .  - En attendant la grande lumière universelle, que le Sénat laïc appelle de ses voeux (Sourires), cette convention porte les échanges d'informations aux standards de l'OCDE, après le rejet de la convention sur les successions par le parlement suisse.

La Suisse, qui passe beaucoup de temps à négocier des accords bilatéraux, rejoindra sans doute bientôt l'accord global en vigueur à l'intérieur de l'Union européenne. L'avenant d'août 2009 et l'interprétation qu'en fait la Suisse sont contraires à la norme internationale.

Le Monde dénonce aujourd'hui les pratiques d'une grande banque suisse qui aurait mis en place une fraude fiscale de grande ampleur et détenu jusqu'en 2014 entre 13 et 23 milliards d'actifs français occultes. D'où l'importance de cette convention.

Les Américains, eux, ont dit aux Suisses : « Signez l'accord Fatca, en bas à droite, ou nous retirons à vos banques le droit d'exercer sur notre territoire ». Simple et efficace. Nous sommes plus diplomates...

Cette convention bilatérale fluidifiera les échanges d'informations. Les demandes pourront porter sur des groupes de contribuables, le fisc n'aura plus à donner le nom et l'adresse des contribuables lorsqu'il interrogera la Suisse, ni à indiquer l'établissement financier concerné. L'administration fiscale est lasse de ces obstacles juridiques, qui lui avaient été opposés dans l'affaire impliquant votre prédécesseur.

L'échange d'informations concernera tous les impôts et contributions, y compris la fiscalité douanière, fédérale, cantonale ou locale.

Depuis sa création en 2013, le STDR a bien fonctionné : 92 % des dossiers viennent de Suisse. Rien que pour UBS, 4 200 clients ont choisi de régulariser leur situation.

M. François Marc.  - Il était temps !

M. Richard Yung.  - Cet accord interdit à la Suisse d'interpréter restrictivement les accords qu'elle a signés. Le groupe socialiste votera ce texte. (Applaudissements)

M. André Gattolin .  - La Suisse est l'un des principaux protagonistes de l'évasion fiscale internationale. Longtemps il a été de bon ton de déplorer avec fatalisme, voire complaisance, l'attraction des paysages helvétiques sur les grandes fortunes comme sur les petits magots français. Sous la pression de l'opinion publique et des lanceurs d'alerte, les choses ont pris une tournure plus précise : les grandes banques suisses, comme HSBC ou UBS, ont mis sur pied un système sophistiqué de fraude massive, soustrayant des dizaines de milliards d'euros aux services fiscaux étrangers. En pleine crise mondiale, la Suisse a assumé sans vergogne son soutien actif à ses banques. Elle aura tout tenté pour préserver son secret bancaire : interprétation restrictive de l'avenant de 2009, refus du véhicule législatif de 2014, etc...

Mais les choses changent : Fatca, menace de l'OCDE d'inscrire la Suisse sur la liste des paradis fiscaux, refus des pays de fermer les yeux sur la transhumance des valises de billets, etc... En la matière, seuls le volontarisme et le rapport de force sont efficaces. Il est d'autant plus désolant que le dernier projet de loi de finances rectificative ait considéré que les schémas d'optimisation fiscale des entreprises étaient couverts par le secret des affaires... (M. Éric Bocquet et Mme Nathalie Goulet renchérissent)

Cette convention entérine un progrès majeur dans l'échange d'informations. Le groupe écologiste le votera.

M. Guillaume Arnell .  - L'accord signé à Berne le 25 juin 2014 modifie la convention de 1966 qui avait laissé des marges de manoeuvre importantes aux deux parties.

La Suisse a bâti en grande partie sa prospérité sur ses règles fiscales particulières pour les investisseurs et épargnants étrangers. Mais la crise financière de 2008 et la révélation de scandales impliquant des banques suisses a jeté l'opprobre sur les pratiques d'évasion fiscale permises par le secret bancaire.

Ce sont les États-Unis en 2010, avec le Fatca, qui ont ébranlé le système. L'échange d'informations automatique est en passe de devenir la norme ; la Suisse l'appliquera à compter de 2018.

L'accord que nous examinons met les échanges entre la France et la Suisse en conformité avec les standards les plus récents de l'OCDE. Il assouplit les conditions d'identification des contribuables et prévient toute interprétation restrictive. Déjà, ces efforts portent leurs fruits : le STDR enregistre des milliers de demandes de régulation. La vertu fiscale est une obligation citoyenne, et contribue à améliorer nos comptes publics. Le groupe RDSE, à l'unanimité, votera ce texte. (Applaudissements)

M. Alain Houpert .  - Cet accord bilatéral a été signé quatre mois avant la conclusion de l'accord multilatéral de Berlin du 29 octobre 2014 qui engage 94 États. Il vise à pallier les défauts de l'avenant de 2009 à la convention de 1966, la Suisse ayant utilisé tous les artifices pour restreindre la portée du dispositif. L'évasion fiscale coûte entre 30 milliards et 50 milliards d'euros par an à la France. Elle n'est plus supportable.

Cet accord assouplit les conditions d'identification, autorise les demandes groupées ; il est rétroactif pour éviter les mouvements frauduleux d'ici sa ratification. C'est donc un progrès. Seul l'échange automatique d'informations changera réellement la donne, cependant. La loi Fatca de 2010 a progressivement changé la donne, en obligeant tous les établissements financiers de par le monde à transmettre à l'administration américaine les informations en leur possession sur les avoirs détenus par les ressortissants américains ; elle a poussé le G20 à élaborer une norme commune de déclaration sous l'égide de l'OCDE, et 94 États se sont engagés à signer l'accord multilatéral d'octobre 2014. Un premier groupe de pays, dont la France, mettra en place l'échange automatique d'informations dès 2017. En 2018, des pays comme la Suisse, l'Autriche et Andorre suivront.

Les banques devront procéder aux diligences raisonnables pour identifier les comptes de non-résidents et collecter les renseignements. En attendant, cet accord constitue une avancée. Qu'en sera-t-il toutefois des demandes concernant des binationaux franco-suisses ?

En attendant, le groupe Les Républicains votera ce projet de loi qui permettra de lutter contre l'évasion et la fraude fiscale.

Intervention sur l'ensemble

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Il y aurait beaucoup à dire...

Vous avez raison monsieur Bocquet : la lutte contre la fraude doit être partagée avec le Parlement et non pas être l'apanage de Bercy.

Merci pour votre unanimité. En bons Français, nous avons trop tendance à pointer les manques sans saluer les avancées. Sans verser dans l'autosatisfaction, il convient toutefois d'adresser à nos concitoyens le message que les choses changent et qu'ils peuvent avoir confiance dans leurs institutions. Transparency reconnaît les progrès accomplis, et d'autres sont sur le point de se concrétiser.

Le STDR est une réussite : 2,65 milliards récoltés en 2015, dont 1,7 milliard d'euros de droits non acquittés et 900 millions d'euros de pénalités, soit une pénalité de 50 % en moyenne. Il n'y a pas d'impunité !

M. Richard Yung.  - 50 %, ce n'est pas cher... C'est un fusil à un coup.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Les avoirs à l'étranger sont autorisés, à condition qu'ils soient déclarés. Ce patrimoine - évalué à 26,7 milliards d'euros pour les deux tiers environ des dossiers - pourra désormais être assujetti, par exemple à l'ISF. Il ne s'agit donc pas de recettes ponctuelles.

La mise en oeuvre de la réciprocité dans le cadre de Fatca s'est heurtée à des difficultés d'ordre technique, mais la signature d'un accord est imminente. Le jaune budgétaire sur les redressements fiscaux sera disponible très prochainement.

L'affaire Swiss Leaks a aidé certes mais n'a pas été l'élément déclencheur ; des lanceurs d'alerte ont été à l'origine des affaires UBS et HSBC. L'affaire HSBC a éclaté en 2009. L'ACPR a été aussitôt saisie. Elle a immédiatement transmis le dossier à la justice et a prononcé des sanctions administratives à l'encontre des banques, qui ont payé ces pénalités. Les procédures judiciaires suivent leur cours, même si on peut regretter leur lenteur... Parallèlement, les informations exploitables ont été exploitées par le fisc et certaines personnes ont été poursuivies et condamnées.

Dans le dossier HSBC, l'administration fiscale a exploité toutes les données fournies par M. Falciani, et l'État s'est porté partie civile. La banque a été mise en examen. Des personnes ont été poursuivies et condamnées, parfois au pénal.

UBS a porté plainte contre Le Monde pour violation du secret de l'instruction. La justice, là aussi, tranchera. La loi Sapin II qui sera présentée en Conseil des ministres le 24 mars, protègera les lanceurs d'alerte.

Monsieur Houpert, la Suisse est tenue de répondre à toutes les demandes concernant les binationaux.

J'ai été brocardé comme protecteur de l'optimisation fiscale au motif que je refusais la publicité du reporting fiscal des entreprises pays par pays. Ce qui reste à faire doit-il masquer ce qui a été fait ? Le Parlement a voté une révolution : l'obligation pour les entreprises de fournir à l'administration fiscale toutes leurs informations financières, bénéfices, subventions, impôts... pays par pays. Si la presse, les associations, l'opinion publique jouent un rôle d'aiguillon, l'essentiel n'est-il pas que le fisc dispose de ces informations ?

Le Conseil constitutionnel a depuis jugé que le reporting pays par pays n'était conforme à la Constitution que dans la mesure où ces informations n'étaient pas publiques, et qu'il ne saurait faire obstacle à la liberté d'entreprendre, principe constitutionnel. Malgré cela, nous militons pour que les pays européens adoptent le principe de la publicité : M. Sapin, M. Moscovici l'ont dit publiquement. La loi Sapin II sera le véhicule ad hoc. L'obstacle constitutionnel pourra être contourné, car la transposition des directives est aussi une obligation constitutionnelle.

Pardon, madame la présidente, d'avoir été un peu long, mais j'ai souhaité que le Parlement soit parfaitement informé. (Applaudissements à gauche)

Mme la présidente.  - Je vous en prie, ces éclaircissements étaient utiles, sur un sujet qui tient à coeur à nos concitoyens.

La discussion générale est close.

L'article unique est adopté.

En conséquence, le projet de loi est adopté définitivement.

Mme la présidente.  - C'est l'unanimité.

La séance est suspendue à midi et demi.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 14 h 30.

Avis sur deux nominations

Mme la présidente.  - En application du cinquième alinéa de l'article 13 et de l'article 56 de la Constitution, la commission des lois a émis un vote favorable (18 voix pour, 0 contre, 2 bulletins blancs ou nuls) à la nomination, par M. le président de la République, de M. Laurent Fabius comme membre du Conseil constitutionnel.

La commission a également émis un vote favorable (16 voix pour, 4 voix contre, 0 bulletin blanc ou nul) à la nomination, par M. le président du Sénat, de M. Michel Pinault comme membre du Conseil constitutionnel.

Élection présidentielle (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi organique et de la proposition de loi adoptées par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle.

Discussion générale commune

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales .  - Depuis la révision constitutionnelle de 1962, l'élection du président de la République au suffrage universel direct est la clef de voûte des institutions de la cinquième République. Après les scrutins de 2007 et 2012, les organes chargés de leur déroulement - Conseil constitutionnel, Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle, Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, Commission des sondages - ont formulé des recommandations techniques cohérentes qui ont donné lieu à ces propositions de loi, adoptées par l'Assemblée nationale le 16 décembre dernier, pour remédier aux controverses aussi vaines que récurrentes surgissant élection après élection.

Ce texte renforce le cadre juridique de l'organisation des élections présidentielles à venir pour la rendre incontestable. Je veux saluer avant tout le travail important de votre commission des lois et l'engagement du rapporteur Christophe Béchu.

La proposition de loi revoit d'abord les règles de parrainage. Il devra être adressé par le parrain et non plus par le candidat, directement au Conseil constitutionnel par voie postale, sauf pour l'outremer et l'étranger. La remise des parrainages par voie électronique sera également rendue possible, une fois le système informatique sécurisé ad hoc mis en place.

Le texte prévoit aussi la publicité intégrale de la liste des parrains, pour mettre fin à une inégalité flagrante - actuellement, 500 parrains sont tirés au sort. La transparence et la responsabilité l'imposent.

La proposition de loi organique substitue aussi à la règle de l'égalité des temps de parole accordés aux candidats par les médias audiovisuels, la règle de l'équité pendant la période dite intermédiaire, qui s'écoule de la publication de la liste des candidats à la veille de la campagne officielle. La règlementation était devenue si complexe et absconse que certaines chaînes n'organisaient même plus de débat, ce qui nuit évidemment à la richesse de la vie démocratique.

Sur l'horaire de fermeture des bureaux de vote, le Gouvernement préfère s'en remettre au statu quo à l'appréciation des maires. L'harmonisation à 19 heures voulue par la commission des lois évitera certes la diffusion prématurée de sondages, mais pourrait réduire la participation. Nous soutiendrons à cet égard l'amendement de M. Anziani, qui maintient la possibilité d'une dérogation. J'ajoute que l'embargo sur la diffusion des résultats est maintenu à 20 heures.

Enfin, la proposition de loi organique prévoit la radiation automatique des listes électorales consulaires des expatriés qui rentrent en France.

Le Gouvernement soutiendra les compléments proposés sur la double inscription par la proposition de loi transpartisane des députés Pochon et Warsmann.

Le Gouvernement salue la décision de votre Commission des Lois qui, à l'initiative du rapporteur Christophe Béchu, a rétabli, pour toute élection, l'obligation de comptabiliser pendant un an avant le scrutin l'ensemble des dépenses et des recettes électorales ayant vocation à figurer dans les comptes de campagne des candidats.

La commission des lois a néanmoins réduit à six mois la durée de comptabilisation des dépenses de campagne pour les élections qui auront lieu après 2017 ; conformément à sa position devant l'Assemblée nationale, le Gouvernement soutient l'amendement du groupe socialiste d'en revenir à douze mois, car cette modification contredirait le mouvement vers plus de transparence dans la vie publique.

La société se modernise, la vie politique doit accompagner ce mouvement pour être attractive, et cette proposition de loi y contribue. Le Gouvernement appelle à soutenir cette initiative, au-delà des clivages partisans. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Christophe Béchu, rapporteur de la commission des lois .  - Un regret d'abord : à peine moins d'un an avant l'élection présidentielle, nous devons, à nouveau légiférer dans l'urgence sur un sujet fondamental pour la démocratie, comme nous avions dû le faire avant les deux derniers scrutins.

Cela ne favorise pas la sérénité souhaitable sur un sujet aussi important pour notre vie démocratique, alors même que les propositions de loi résultent pour l'essentiel des recommandations du Conseil constitutionnel, du CSA, de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, de la Commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l'élection présidentielle... Sur un tel sujet, il fallait prendre le temps de la réflexion.

Ce regret surmonté, de quoi s'agit-il ? Nous ne débattons pas ici de la personnalité du prochain président de la République, mais des règles propres à assurer sérénité et transparence pour ce grand rendez-vous qui rythme notre vie politique.

Les parrainages d'abord : il s'agit d'éviter les pressions sur les parrains et d'assurer la transparence - comme y appelait le Conseil constitutionnel en 1974 déjà. La commission des lois a souhaité une transparence totale de la liste des parrains une fois la collecte terminée, mais la publication au fil de l'eau du nombre de parrains seulement.

Les temps de parole ensuite. Pendant la phase préliminaire, où l'on ne sait qui sera candidat, l'équité s'impose naturellement. Pendant la campagne officielle, régie par l'article 7 de la Constitution, la règle est l'égalité. Reste la période intermédiaire, qui depuis 2007 ne dure plus trois jours mais trois semaines. Or le CSA observe que le temps d'antenne consacré à l'élection présidentielle a été divisé par deux. Tel n'était pas l'objectif de la loi organique de 2006 ! Selon des constitutionalistes, dont Guy Carcassonne, c'est notamment en raison des difficultés rencontrées par les chaînes, eu égard au nombre de candidats, pour appliquer la règle de l'égalité des temps de parole qu'elles n'organisent pas de débat du premier tour.

La commission des lois a d'abord préféré substituer l'équité bonifiée à une égalité formelle. Mais je soutiendrai l'amendement de M. Anziani, qui conserve le principe d'égalité tout en réduisant d'une semaine la durée de la période intermédiaire, selon les préconisations du CSA.

J'en viens à l'horaire de fermeture des bureaux de vote. Les règles d'extrapolation permettant de deviner l'issue du scrutin dès qu'un certain nombre de résultats partiels sont connus, la commission des sondages appelle de ses voeux un raccourcissement du délai - actuellement de deux heures - entre la fermeture du premier et du dernier bureau de vote. Au nom de l'égalité, nous préférons qu'ils ferment partout à 19 heures. Nous en avons déjà fait l'expérience lors des dernières élections européennes. Nous constatons en outre que peu de personnes votent entre 19 et 20 heures.

Enfin, la comptabilisation des dépenses de campagne. Nous n'avons pas souhaité, si près de la prochaine élection présidentielle, modifier les règles applicables en 2017.

Je tiens toutefois à briser ici un non-dit : la question des primaires. Aujourd'hui, une fraction seulement des dépenses liées à une primaire ouverte du vainqueur de celle-ci est prise en compte, soit environ 400 000 euros dans le cadre de la campagne de François Hollande pour la précédente élection présidentielle. C'est un peu bancal... En légiférant pour les scrutins qui se tiendront au-delà de 2017, nous posons une règle dont nous ne connaissons ni ceux qui en bénéficieront, ni ceux qui en pâtiront. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs des groupes socialiste et républicain, écologiste et RDSE)

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis de la commission de la culture .  - Deux articles de la proposition de loi organique ont retenu toute l'attention de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.

L'article 7 d'abord : l'Assemblée nationale avait prévu de reporter d'une heure la fermeture des bureaux de vote, de 18 heures à 19 heures, dans de nombreuses petites communes, pour éviter les fuites de résultats de sondages sur internet, mais le risque demeurerait, compte tenu du maintien d'un décalage d'une heure pour la fermeture des bureaux en zone urbaine.

Des membres de notre commission se sont interrogés sur les difficultés que rencontreraient les petites communes qui peinent parfois à constituer des bureaux de vote, d'autres contrario sur le brouillage des règles... La solution retenue par la commission des lois est judicieuse : les électeurs seront traités de la même façon et les risques de fuite seront minimisés.

L'article 4, qui a retenu le plus l'attention de notre commission, substitue le principe d'équité au principe d'égalité des temps de parole entre les candidats pendant la période intermédiaire. C'est un sujet sensible qui touche à notre conception même de la démocratie et du respect du pluralisme.

Le principe de l'égalité constitue la meilleure garantie pour vivifier notre démocratie, le meilleur gage de renouvellement de l'offre politique ; au lieu de quoi, nous entérinerions une dérive qui conduit à privilégier les candidats les plus connus... (MM. Jacques Mézard et Pierre-Yves Collombat approuvent). Le filtre des parrainages garantit déjà le sérieux et la représentativité des candidatures.

Nous n'ignorons pas qu'il s'agit d'encourager les médias à couvrir la campagne présidentielle pendant la période intermédiaire. N'est-ce pas plutôt aux médias de réfléchir à la meilleure façon d'en rendre compte en respectant l'égalité ?

M. Pierre-Yves Collombat. - Très bien !

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis.  - Celle-ci autorise à jouer sur la diversité des formats, des plages horaires... La nouvelle règle relative aux conditions de programmation ne compliquera-t-elle pas les choses ?

Il a manqué une réflexion sur la façon de conduire aujourd'hui l'élection présidentielle, à l'heure des nouveaux médias. Rien non plus pour garantir l'égalité, ni même l'équité, entre les candidats aux primaires dotés à cette occasion d'un surcroît de visibilité - certains analystes accordent d'ailleurs aux primaires plus d'importance qu'au premier tour de la présidentielle.

Une large marge d'appréciation serait accordée au CSA, qui devrait se fonder sur les derniers résultats électoraux, les enquêtes d'opinion et la participation des candidats à l'animation du débat... Critères insuffisants, voire subjectifs !

La commission d'enquête sur les autorités administratives, présidée par notre collègue Marie-Hélène des Esgaulx et dont Jacques Mézard était le rapporteur, nous a rappelé la nécessité de ne pas donner à ces autorités indépendantes de rôle politique. L'application du principe d'équité irait donc contre les recommandations des travaux du Sénat. (M. Pierre-Yves Collombat et M. Jacques Mézard approuvent vivement)

Aussi la commission de la culture s'est-elle prononcée majoritairement en faveur du maintien du principe d'égalité pour assurer le respect du pluralisme des temps de parole pendant la période intermédiaire. Un amendement vous sera proposé afin de rétablir ce principe dans le texte de l'article 4.

Notre commission avait adopté un second amendement visant à soumettre la recommandation établie par le CSA à un débat préalable avec les commissions de la culture de chaque assemblée. Cet amendement a été adopté par la commission des lois et figure à l'article 2 quinquies de son texte. Je tenais à en remercier le rapporteur de notre commission des lois. (Applaudissements au centre et sur plusieurs bancs à droite, ainsi que sur ceux du groupe écologiste, du groupe RDSE et du groupe communiste républicain et citoyen)

Mme Éliane Assassi .  - Que l'élection présidentielle soit incontournable depuis 1962 n'en fait pas un bienfait pour la démocratie. Les présidences Sarkozy et Hollande ont accentué le caractère monarchique et personnel de nos institutions, souvent dénoncé, et accentué sous les présidences de Nicolas Sarkozy, puis de François Hollande, que le récent remaniement et le débat sur la déchéance de nationalité illustrent à merveille...

M. Jacques Mézard.  - Très bien !

Mme Éliane Assassi.  - Le quinquennat et l'inversion du calendrier électoral avaient préparé cette dérive...

Le président de la République concentre non seulement les pouvoirs mais monopolise le débat. D'où l'importance des règles relatives à l'élection présidentielle, car c'est alors que l'on peut espérer changer les choses... C'est la présidentialisation à tous les étages - y compris peut-être demain, dans les régions dont il est question d'élire les présidents au suffrage universel direct.

Le PCF plaide depuis 1958 pour un retour au système parlementaire. D'autres défendent aujourd'hui ouvertement une présidentialisation dans le cadre d'une Union européenne aux pouvoirs accrus...

Je m'interroge sur la publicité intégrale des signatures de parrains. Ne risque-t-on pas un pré-premier tour ? Les candidats dont les parrains seront les plus nombreux seront favorisés.

La réduction de douze à six mois de la durée de comptabilisation des dépenses si les plafonds demeurent inchangés, feront exploser les dépenses au bénéfice des grands partis. L'américanisation de notre vie politique se poursuit...

Le Gouvernement, par le biais de MM. Urvoas et Le Roux, entend aussi mettre fin à l'égalité des temps de parole pendant la période intermédiaire, sous prétexte qu'il n'est pas respecté... On excipe des recommandations et de la pratique du CSA. C'est donc le bagout de Mme Le Pen qui explique son omniprésence médiatique ? (M. David Rachline s'exclame) « La liberté des médias prime », peut-on lire. Inacceptable !

M. Jacques Mézard.  - Très bien !

Mme Éliane Assassi.  - Ces propositions de loi, loin de répondre aux interrogations fondamentales sur l'élection présidentielle, mettent à bas les règles qui l'encadrent et ouvrent la voie à un régime présidentiel. Nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen, RDSE, écologiste et UDI-UC)

Mme Nathalie Goulet et M. Jacques Mézard.  - Très bien !

M. Alain Anziani .  - Je suivrai le plan du rapporteur. Sur les parrainages, un consensus se dégage pour dire qu'ils ne sauraient rester secrets au nom de la responsabilité. Le Conseil constitutionnel le demande depuis 1974, mais le législateur a jusqu'ici limité la publication à cinq cents noms tirés au sort.

Nous souhaitons une publication intégrale, y compris pour ceux qui n'ont pas obtenu cinq cents signataires. Nous sommes également pour une publication régulière, deux fois par semaine, du nombre, mais aussi des noms.

Faut-il réduire la durée de comptabilisation des dépenses à six mois et cela dès 2017 ? Nous préférons en rester à douze mois, en attendant d'avoir défini le statut des primaires - question importante en effet, à l'arrière-plan. Faut-il les constitutionnaliser ? Sans doute pas. Les réglementer ? Sans doute. Prendre en compte les dépenses afférentes ? Peut-être.

Autre question sensible : la communication audiovisuelle. Restons-en à des principes. Tous ceux qui ont réussi l'épreuve des 500 parrainages doivent-ils jouir des mêmes droits ? Le CSA recommande de supprimer la période intermédiaire, allongée en 2006 à 20 jours.

En même temps, le CSA considère qu'une égalité intégrale rend les émissions inintéressantes : l'audience diminue...

M. Roger Karoutchi.  - C'était déjà le cas !

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis.  - Pour les journaux télévisés...

M. Alain Anziani.  - À mon sens, il faut trouver un juste milieu, et ramener la durée de la période intermédiaire à une dizaine de jours, tout en maintenant le principe d'égalité.

À défaut, on ouvrirait la voie à d'innombrables polémiques. Le CSA devra apprécier la participation de chaque candidat au débat, il y aura des recours devant le Conseil d'État...

Quant à la fermeture des bureaux de votre, je défendrai un horaire unique - 19 heures - avec des dérogations. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Corinne Bouchoux .  - Je veux saluer le travail du rapporteur, sa disponibilité et ses talents pédagogiques.

Ces propositions de loi sont peut-être utiles, mais elles témoignent des maux de notre vie politique, que révèle la progression de l'abstention et du vote Front national. En attendant de réfléchir aux conditions du vivre-ensemble, nous revoyons ses modalités techniques... mais le diable se cache dans les détails.

Nous vivons aujourd'hui une crise de l'offre politique qui explique le désintérêt des citoyens. Or sous prétexte de transparence, la proposition de loi vise à réduire par petites touches cette offre politique... Le succès du film Demain démontre pourtant la volonté d'investissement dans la vie publique d'un nombre important de citoyens même s'ils ne votent pas.

Après réflexion, nous sommes favorables à la publication au fil de l'eau des candidatures. En revanche, nous tenons à l'égalité des temps de parole - et déplorons le transfert progressif des pouvoirs du Parlement vers les autorités telles que le CSA qui exerce un pouvoir croissant dans notre pays !

M. Jean-François Longeot.  - Très bien !

Mme Corinne Bouchoux.  - Il faudrait d'ailleurs s'interroger sur l'accès aux médias des petits partis.

Ce texte est fait pour les hommes en place. Si M. Béchu a réussi à convaincre Mme Benbassa du caractère progressiste, et je rends hommage à ses qualités pédagogiques...

M. Roger Karoutchi.  - Ah !

Mme Corinne Bouchoux.  - ...je ne pourrai voter ce texte.

M. David Rachline .  - Je suis amusé d'entendre les communistes fustiger la dérive présidentialiste, eux qui ont soutenu les pires régimes totalitaires... (Exclamations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Jean-Pierre Bosino.  - Caricature ! Et la dictature actuelle du Front national ?

M. David Rachline.  - Cette proposition de loi organique fait fausse route. En diminuant la durée de comptabilisation des dépenses, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) entend inciter les candidats à réduire leurs dépenses. Mais cette mesure aurait d'évidents effets pervers.

L'article premier de la proposition de loi sur le recours de la CNCCFP à des experts est contraire à la liberté du commerce et de l'industrie, dont le Conseil constitutionnel a réaffirmé à plusieurs reprises la valeur constitutionnelle, fondée sur le décret d'Allarde des 2 et 17 mars 1791 auquel le Conseil d'État fait régulièrement référence dans ses arrêts.

Sur les parrainages, ce texte aura pour effet de restreindre l'expression démocratique des opinions, en favorisant l'exercice de pressions inadmissibles sur les élus.

Les citoyens devraient pouvoir choisir librement leurs représentants, sans se voir préciser leur choix par quelque comité préparatoire que ce soit, comme Jean Taittinger, alors garde des Sceaux y incitait, dès 1973, le législateur.

M. Pierre-Yves Collombat .  - Avec le temps, la quasi-totalité des pouvoirs ont glissé vers l'Élysée et ses annexes bureaucratiques. Le Parlement joue un rôle subalterne tandis que le président de la République, à qui il est loisible de contourner la voix du peuple, comme lors du référendum de 2005, concentre tous les regards. Quoi d'étonnant que le nombre candidats à l'élection présidentielle se multiplie ? Une multiplication qui risque, dit-on, de brouiller les enjeux - mais surtout de perturber la programmation télévisuelle... Augmenter le nombre de parrains ? La publication des parrainages au fil de l'eau augmentera la pression sur ceux qui envisageraient de parrainer des candidats inappropriés ; la position de la commission des lois évite ce travers.

La substitution du principe d'équité médiatique à celui d'égalité... Quoique blasé, je n'imaginais pas voir les créateurs d'un ministère de l'égalité réelle brûler ce qu'ils disent adorer... beaucoup de problèmes seraient réglés s'il y avait un candidat officiel... En seront favorisées les candidats des formations qui ne portent d'autre remède, chacune leur tour, aux maux du pays que la saignée. Comme à l'opéra, le changement se fait sur place. Ni René Dumont en 1974, ni Jean-Louis Tixier- Vignancour n'auraient pu se présenter, et songez qu'en 1965, François Mitterrand avait eu le même temps de parole à la télévision que le Général de Gaulle...

M. Roger Karoutchi.  - C'était une autre époque !

M. Pierre-Yves Collombat.  - L'équitomètre devra tenir compte de la contribution de chaque candidat à l'animation du débat électoral. Comme celle-ci dépend des médias libres dans le poulailler médiatique libre, le résultat ne surprendra pas par son originalité...

Le moindre des paradoxes n'est pas que les institutions de la Ve République, créées pour mettre fin au régime des partis, conduisent à ce que deux partis alternent dans l'exercice du pouvoir pour conduire les mêmes politiques. Aveugles au principe de réalité, sourds aux messages des électeurs ces formations « sérieuses » entendent continuer à occuper le pouvoir suprême, au besoin, comme on l'a vu à l'envi pendant ce quinquennat, en changeant les règles du jeu - aujourd'hui avec la modernisation des conditions du déroulement de la campagne des élections présidentielles. À en juger par les résultats, les modernisateurs feraient bien d'y regarder à deux fois...

Marianne peut être susceptible quand on froisse ses principes. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs à droite)

M. Hugues Portelli .  - Je suis ravi que la ministre chargée des collectivités territoriales nous réponde sur ces affaires constitutionnelles : car les collectivités territoriales ont leur rôle dans l'organisation de l'élection présidentielle...

Le groupe Les Républicains approuve le texte de grande qualité de la commission des lois, qui apporte une réponse aux questions de l'heure - mais le vrai débat est ailleurs. Les vraies questions sont renvoyées aux calendes grecques. Sur le coût des campagnes d'abord. La République octroie 22 millions d'euros au candidat du deuxième tour - à comparer au milliard de dollars de la campagne américaine.

Sur les primaires ensuite, qui posent des questions juridiques et politiques qu'on ne pourra pas éluder longtemps. Aux États-Unis, la législation fédérale, les législations locales et la jurisprudence de la Cour Suprême encadrent clairement les choses. Nous ne pourrons tenir longtemps dans la cote mal taillée qui est la nôtre.

Quant à l'émergence de forces et de personnalités nouvelles, la sélection par les parrainages joue davantage un rôle de barrage que de relais...

Cela dit, le texte pose les jalons d'une possible évolution ultérieure - souhaitons-le avant 2021... Nous avons tout le loisir d'intervenir. Le Conseil constitutionnel s'est prononcé le 21 juin 2012, la CNCCFVP le 2 septembre 2013, le Sénat aussi en votant le 14 février 2011, à l'unanimité, la proposition de loi sur les sondages, auquel il n'a été donné aucune suite. Pourquoi se réveille-t-on à la veille de la prochaine présidentielle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Nathalie Goulet .  - Je veux saluer notre créativité procédurale : voilà une proposition de loi en procédure accélérée, sur un sujet fondamental, examinée un jeudi après-midi par 35 sénateurs...

Notre vie politique est bloquée, la société est à bout de souffle, l'antiparlementarisme est au plus haut, le fonctionnement des partis est problématique, la société civile tente de prendre le relais et on bricole... Le texte est quasiment périmé avant d'avoir été examiné... Notre droit fiscal était déjà jugé « gazeux » par le Conseil d'État en 1991 et 2006, notre droit électoral ne l'est pas moins.

Équité plutôt qu'égalité ? Ce doit être aux candidats d'être bons pour capter l'attention, y compris à la télévision... Rien ne justifie que l'on revienne sur ce principe. Au reste, qui serait juge de l'équité ? Pour nous, c'est inacceptable et non négociable.

Ce texte ne prend pas assez en compte le quinquennat et l'impact des primaires sur la physionomie de notre système. Beaucoup de points restent en suspens...

Quant à la prise en compte des dépenses de campagne, l'impasse est faite sur une hypocrisie bien française : une campagne coûte cher, davantage que 22 millions d'euros. Là encore je me refuse à bricoler devant l'opinion. L'article 4 du texte n'est pas non plus acceptable, qui revient sur le principe de pluralisme. Veut-on une politique nationale duopolistique, oligopolistique ? Est-ce pour cela qu'on a créé un ministère de l'égalité réelle ? Gardons-nous de ces dérives, alors que nous prétendons améliorer la déontologie et la transparence de la vie politique... Soyons cohérents.

Sur les parrainages, les horaires d'ouverture des bureaux de vote et les sondages, le texte va toutefois dans le bon sens. Mais à l'heure des réseaux sociaux, la campagne, à commencer par celle des primaires, est déjà engagée. L'UDI-UC appuie la démarche de la commission de la culture qui fait primer l'égalité.

Pour le reste, cette proposition de loi organique étant largement insuffisante, nous ne la voterons pas. (Applaudissements au centre)

M. Jean-Pierre Sueur .  - Voilà cinq ans, jour pour jour, que le Sénat a voté à l'unanimité une proposition de loi préparée sur la base d'un immense travail, coécrite avec M. Portelli, visant à réformer le régime des sondages hérité de la loi de 1977, devenue parfaitement obsolète. Il est inadmissible qu'elle n'ait pas été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

M. Jacques Mézard.  - Un mépris scandaleux du Sénat !

M. Jean-Pierre Sueur.  - J'en ai parlé un nombre incalculable de fois avec les présidents successifs de la commission des lois de l'Assemblée, avec les ministres, avec les premiers ministres... Rien n'y a fait.

Un grand nombre d'analyses politiques reposant sur des sondages, il est incompréhensible de ne pas encadrer leur mode de fabrication. Alors qu'en période de campagne, il en est produit jusqu'à trois par jour, rien n'oblige les instituts à publier la marge d'erreur qui, lorsque les candidats sont dits à 51%-49%, atteint 3,5 %... Une telle marge pourrait faire se croiser des courbes...

Je remercie par conséquent la commission des lois d'avoir incorporé une partie de nos propositions dans ce texte. Reste des sujets en suspens, comme la composition de la commission des sondages, qui ne comprend aucun spécialiste des statistiques ou des études d'opinion...

J'espère que nous pourrons prolonger cette réflexion : madame la ministre, ne nous dites pas que ce texte n'est pas le bon véhicule ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Roger Karoutchi .  - Il n'est pas tout à fait exact de dire qu'en 1965 François Mitterrand avait eu le même temps d'expression que le Général de Gaulle, car le Général, considérant que ce n'était pas de son niveau, avait délaissé les studios pendant la campagne du premier tour...

Pierre-Yves Collombat. - C'est encore mieux !

M. Roger Karoutchi.  - On parle beaucoup, depuis longtemps, d'actualiser notre système, mais au moment de légiférer la main tremble...

Publier les parrainages au fil de l'eau ? Cela ne changera pas grand-chose. Pourquoi ne pas imaginer un système de parrains indistinctement élus et simples citoyens ?

Le système des temps de parole a été inventé à une période où il n'y avait que quelques chaînes de télévision toutes publiques : l'audience était captive. Qui regarde encore les émissions politiques et les spots de campagne ? Ceux-ci participent sans doute du désintérêt de nos concitoyens pour la vie politique. Moderniser les clips de campagne, voilà qui serait utile...

Je ne suis pas convaincu que les primaires soient un problème en soi. En 2012, 400 000 euros ont été imputés à ce titre au compte de campagne de François Hollande. Pourquoi ce chiffre ? Mystère. J'ai déjà cosigné une proposition de loi qui propose de comptabiliser les dépenses sur une période de six mois ; les primaires peuvent très bien se dérouler dans ce laps de temps.

Donner au CSA des pouvoirs supplémentaires, je doute que cela changera fondamentalement les choses. Mais on fait avec ce qu'on a...

Le texte apporte des précisions utiles, mais sans changer les grands équilibres. Notre appréciation sera positive. (Applaudissements à droite)

La discussion générale commune est close.

Discussion des articles de la proposition de loi organique

Les amendements nos13, 14 et 15 ne sont pas défendus.

ARTICLE PREMIER

Mme la présidente.  - Amendement n°43, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 3

Supprimer les mots :

et les mots : « ou membres élus de l'Assemblée des Français de l'étranger » sont remplacés par les mots : « , membres de l'Assemblée des Français de l'étranger ou vice-présidents des conseils consulaires »

II.  -  Alinéa 6

Supprimer les mots :

et les mots : « et les membres élus de l'Assemblée des Français de l'étranger » sont remplacés par les mots : « , les membres de l'Assemblée des Français de l'étranger et les vice-présidents des conseils consulaires »

III.  -  Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...° Aux deuxième et troisième alinéas, les mots : « membres élus de l'Assemblée des Français de l'étranger » sont remplacés par les mots : « membres de l'Assemblée des Français de l'étranger ».

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement a déposé cet amendement au regard des activités exercées par les membres de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE) et les vice-présidents des conseils consulaires ; s'il n'était pas voté, il faudrait s'intéresser aux adjoints au maire et aux vice-présidents des EPCI, qui ne peuvent parrainer des candidats.

Mme la présidente.  - Amendement n°9, présenté par Mmes Garriaud-Maylam, Deromedi et Kammermann et MM. Cantegrit, del Picchia, Duvernois et Frassa.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

, membres de l'Assemblée des Français de l'étranger ou vice-présidents des conseils consulaires

par les mots :

ou membres élus des conseils consulaires

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Les conseillers élus à l'AFE sont la voix des conseillers consulaires, qui sont 442. Soyons clairs : la question est essentiellement budgétaire...

L'élargissement de la possibilité de parrainage aux seuls vice-présidents des conseils consulaires, voté par la commission des lois, n'est pas suffisant et revient à établir entre conseillers consulaires une hiérarchie contraire à l'esprit du cadre législatif relatif à la représentation des Français de l'étranger. Étendons-le à tous les conseillers, c'est une question d'équité et de représentativité.

Mme la présidente.  - Amendement n°37, présenté par MM. Cadic et Détraigne et Mme Joissains.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

, membres de l'Assemblée des Français de l'étranger ou vice-présidents des conseils consulaires

par les mots :

ou conseillers consulaires

M. Yves Détraigne.  - Même objet.

Mme la présidente.  - Amendement n°10, présenté par Mmes Garriaud-Maylam, Deromedi et Kammermann et MM. Cantegrit, del Picchia, Duvernois et Frassa.

Alinéa 6

Après les mots :

et les mots :

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

« de l'Assemblée des Français de l'étranger » sont remplacés par les mots : « des conseils consulaires » ;

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Amendement de coordination ; le vote sur l'amendement n°9 le conditionne...

Mme la présidente.  - Amendement n°38, présenté par MM. Cadic et Détraigne et Mme Joissains.

Alinéa 6

Après les mots :

et les mots :

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

« membres élus de l'Assemblée des Français de l'étranger » sont remplacés par les mots : «conseillers consulaires » ;

M. Yves Détraigne.  - Défendu.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Jusqu'au 22 juillet 2013, 155 parrains représentaient les Français de l'étranger, chiffre alors ramené à 90 - sans doute pour les raisons budgétaires évoquées.

Faut-il augmenter ce nombre ? D'aucuns proposent d'en rester à 90 ; d'autres proposent d'autoriser tous les membres des conseils consulaires à parrainer. La commission s'oppose à ces deux solutions.

La ministre entend assimiler les vice-présidents des conseils consulaires aux adjoints au maire ; or depuis la loi sur le cumul, ils ne peuvent être parlementaires car ils sont considérés comme des responsables exécutifs. Par analogie, le Conseil constitutionnel serait fondé à considérer que tous les adjoints au maire peuvent être parrains. Par conséquent, avis défavorable à tous les amendements qui veulent soit augmenter, soit diminuer le nombre de parrains.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Notre avis se réfère aussi à la nature des fonctions exercées. Avis défavorable aux amendements nos9, 37, 10 et 38.

M. Jean-Yves Leconte.  - La prise en compte de leur fonction consultative n'est pas un argument ; et ils sont grands électeurs. Il faut trouver un équilibre entre parallélisme juridique et capacité de parrainage des représentants des Français de l'étranger. 47 000 parrains potentiels pour 66 millions de personnes, au maximum 110 pour 1,7 millions de Français établis hors de France... Nous serons encore un peu sous-représentés... Je suivrai la commission.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Les conseils consulaires ne sont pas des conseils municipaux. Je crois qu'il est bon d'élargir le vivier de parrains aux vice-présidents des conseils consulaires. Mais dans l'esprit de la loi de 2013, je soutiendrai l'amendement n°9.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Ces 443 élus l'ont été au suffrage universel direct. Si l'on en reste aux vice-présidents des conseils consulaires, comment garantir la représentativité des citoyens ? Ce n'est pas la même chose d'être vice-président du conseil consulaire à New York et vice-président en Géorgie...

M. Jean-Yves Leconte.  - C'est pareil pour les maires...

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Les conseillers consulaires se battent au quotidien dans des conditions difficiles pour les intérêts de la France. Il serait à l'honneur du Sénat de créer pour eux une dérogation.

M. Robert del Picchia.  - Combien, sur ces quelques centaines de personnes, parraineront ? Cela ne changera pas fondamentalement la capacité de présenter des candidats. J'entends parler de raisons budgétaires, mais présenter un candidat ne coûte rien.

M. Philippe Bas.  - Les questions budgétaires n'ont été évoquées que parce que le nombre de membres de l'AFE a été abaissé en 2013. Il ne peut y avoir aujourd'hui que 90 parrainages, contre 155 auparavant.

La commission des lois propose de faire passer de 90 à plus de 200 le nombre de parrains possible. Faut-il aller plus loin comme le proposent ces amendements ? Le maire de Paris et celui de ma commune de Saint-Pois ont chacun droit à un parrainage, au contraire du premier adjoint de Paris... Le parrainage n'est pas un droit acquis fondé sur la population représentée, c'est une fonction, qui n'incombe qu'aux maires. Le parrain se prononce seulement sur le fait de savoir si le candidat représente un courant de pensée digne de figurer dans l'élection - c'est la théorie. C'est à la fois un choix du législateur et du constituant, et une pratique à laquelle les parrains sont attachés, en tant qu'ils contribuent par-là à la vie démocratique du pays.

M. Marc Laménie.  - Il y a d'un côté la légitimité et la passion de nos collègues représentant les français de l'étranger, de l'autre l'argumentation du rapporteur et du président de la commission des lois. Je suivrai leur avis.

L'amendement n°43 n'est pas adopté.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - J'ai bien entendu le raisonnement du président Bas. Mais sa logique arithmétique me gêne. De plus, dans de nombreux conseils consulaires, les vice-présidents changent tous les six mois : ils peuvent ne plus l'être au moment de l'élection... Le petit coup de pouce que je propose ne coûte rien et les conseillers communautaires, qui exercent des mandats très spécifiques, le méritent.

Cela donnerait plus de poids à leur mandat, améliorerait leur reconnaissance et leur respectabilité. Vraiment, il serait décevant que cet amendement soit rejeté.

M. Jean-Yves Leconte.  - Si les vice-présidents des conseils consulaires peuvent parrainer des candidats, c'est en partie grâce à vous, madame Garriaud-Maylam, qui, dans la loi sur le non cumul, avez voté leur assimilation à un exécutif local. Le texte de l'Assemblée nationale ne tenait pas compte de la loi de 2013 ; celui de la commission répare l'oubli. N'en rajoutons pas. Ce qui compte, c'est que nous votions un dispositif cohérent qui puise être repris par l'Assemblée nationale.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Si j'étais conseiller consulaire, je serais fier d'être représenté au Sénat par Mme Garriaud-Maylam ! Cependant, il faut savoir ne pas aller trop loin, car vos arguments sur le caractère dérogatoire pourraient conduire le Conseil constitutionnel à considérer qu'il y a rupture d'égalité entre les parrains. Je maintiens mon avis défavorable... pour vous aider à obtenir au final une augmentation du nombre de présentateurs !

L'amendement n°9 n'est pas adopté non plus que l'amendement n°37.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Je tiens à rappeler que le Conseil constitutionnel admet des conditions dérogatoires pour les Français établis hors de France en matière électorale.

L'amendement n°10 est retiré.

L'amendement n°38 n'est pas adopté.

L'article premier est adopté.

ARTICLE 2

Mme la présidente.  - Amendement n°28, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

M. Jean-Pierre Bosino.  - Cet article est dangereux pour le pluralisme. Sous couvert de modernité et de transparence, cet article complique le recueil des parrainages, en particulier pour ceux qui atteignent tout juste les 500. La commission des lois de l'Assemblée nationale a voulu que les parrainages soient publiés au fil de l'eau ; dommage que la nôtre ait écarté la publication des noms. En réalité, le seul objectif ici est de gêner l'accès au scrutin présidentiel et de réduire l'offre démocratique.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Le contrôle et la transmission sont deux sujets différents : nous avons voulu que le contrôle s'exerce en continu, sans attendre la liasse des 500 parrainages, et éviter ce petit jeu de la présentation à la dernière minute sous l'oeil des caméras.

Mme Éliane Assassi.  - C'est cela qui nous dérange !

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Le parrain peut toujours transmettre le récépissé au candidat parrainé. Objectivement, cet amendement ne vise qu'à réduire la pression sur les maires. Il ne mérite pas le reproche d'atteinte au pluralisme !

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Le Conseil constitutionnel, le 21 juin 2012, a recommandé cette transmission individuelle : avis défavorable.

M. Jean-Pierre Bosino.  - Même avec le récépissé, le problème se pose : il faudra les compiler pour contrôler. On complique les choses pour les candidats.

L'amendement n°28 n'est pas adopté.

L'amendement n°11 est retiré.

L'amendement n°39 n'est pas défendu.

L'amendement n°44 est retiré.

L'article 2 est adopté

L'amendement n°16 n'est pas défendu.

ARTICLE 3

L'amendement n°12 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°45, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots : 

nombre par candidat

par les mots :

nom et la qualité

M. Alain Anziani.  - La publication du nom et de la qualité des parrains est une mesure de transparence, en faveur du candidat comme de l'opinion publique, et évitera les tentations de combinazione.

Cela présenterait un risque pour le parrain, qui pourrait subir des sanctions s'il s'avère qu'il n'a pas obéit à tel ou tel grand élu ? Allons ! Notre démocratie est adulte, et les pressions sont susceptibles de sanction pénale. La publication intégrale exposerait ceux qui n'ont pas déjà parrainé à des sollicitations incessantes ? Mais c'est déjà le cas, pour tout le monde ! Cette publication légale et régulière est utile.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Je salue le talent de M. Anziani, qui retourne les arguments à sa guise. Nous avons décidé de la transmission directe des parrainages au Conseil constitutionnel, pour éviter les pressions sur les élus. Notre débat ne porte en réalité que sur les conditions de la transparence entre le début et la fin de la collecte des parrainages.

La publication en continu qui expose ceux qui ne sont pas encore parrains à être démarchés en permanence ; nous voulons protéger les élus, en ne publiant que le nombre de parrains au fur et à mesure, puis en publiant tous les noms à la fin. Cela protègera les élus du harcèlement, mais la transparence démocratique est la même - d'autant que rien n'empêche de rendre public le récépissé auprès du candidat.

Avis défavorable.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis favorable, au nom de la transparence de la vie démocratique et d'une information citoyenne juste. La publication continue évitera l'instrumentalisation et l'agitation médiatique autour des parrainages. C'est en outre une recommandation constante du Conseil constitutionnel depuis 1971.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La transparence a bon dos ! Cette mesure est clairement une manoeuvre pour faire pression sur les grands électeurs. Transparence ? Nous en reparlerons quand, sur les amendements suivants, vous nous proposerez de diminuer la période intermédiaire, de régler dans le détail l'équité des temps de parole... Tout cela ne vise qu'à limiter le nombre de candidats face à l'embouteillage, qui tient à la nature de cette élection, mère de toutes les autres ! Il faut tout changer, ou rien : arrêtons de poser des rustines. Je préfère la position de la commission des lois. Bientôt, on supprimera les isoloirs au nom de la responsabilité...

M. Alain Vasselle.  - Le rapporteur est cohérent, sa rédaction est équilibrée. Il a pesé le pour et le contre, ne la modifions pas ! J'invite nos collègues à rejeter l'amendement n°45, ainsi que l'amendement n°46.

Mme Éliane Assassi.  - Les élus subissent surtout la pression des grands partis qui veulent éviter la multiplication des candidatures. Or il faut protéger le pluralisme, donc la participation du plus grand nombre de « petits » candidats. Guy Carcassonne, dont beaucoup se réclament ici, a fait part de ses doutes sur l'opportunité d'un changement des règles de publicité, se méfiant d'un pré-premier tour et jugeant malsaine une sorte de course publique aux parrainages : réfléchissons-y à deux fois avant de changer les règles !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le mot « pression » revient dans notre débat : mais quand nous allons voir les grands électeurs pour leur demander leur suffrage, ce n'est pas une pression, c'est l'exercice de la démocratie ! Ce que disait Guy Carcassonne s'applique dans tous les cas, qu'il y ait publicité ou non. Pourquoi ne pas choisir la publicité et la transparence des parrainages ? Des élus ont déjà dit qu'ils ne voteraient pas pour celui qu'ils parrainaient, mais qu'ils jugeaient sa candidature souhaitable pour le débat démocratique.

Mme Corinne Bouchoux.  - La quête de cinq cents signatures n'a pas le même sens pour tous. Pour les grands partis, c'est une formalité ; pour les petits, une course de fond, chronophage et énergivore.

Il est vrai que certains parrainent des candidats pour qui ils ne voteront pas par souci de pluralisme, mais d'autres sont incités à parrainer des adversaires politiques pour fragmenter le scrutin...

La visibilité immédiate protège-t-elle les maires ? Je leur fais confiance. La pression s'exerce en réalité sur les candidats, mis en compétition les uns avec les autres, et la quête des parrainages devient une propédeutique au premier tour... Nous manquons d'une réelle expertise scientifique pour choisir entre publication au fil de l'eau et publication à la fin. Nous ne pouvons voter une mesure dont on ne connaît pas les retombées pratiques.

L'amendement n°45 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°50, présenté par M. Béchu, au nom de la commission des lois.

Alinéa 2, deuxième phrase

Remplacer le mot :

publiée

par le mot :

envoyée

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Une fois envoyé, le parrainage ne peut être retiré.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°50 est adopté.

L'amendement n°17 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°46, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2, dernière phrase

Supprimer les mots :

inscrits sur la liste mentionnée au premier alinéa du présent I

M. Alain Anziani.  - Nous prévoyons la publicité intégrale des noms et qualité des présentateurs de candidats, y compris de ceux qui n'ont pas recueilli cinq cents signatures. La transparence, pour tout le monde !

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Cet amendement est utile dès lors que nous avons rejeté l'amendement n°45, pour éviter qu'il n'y ait un trou dans la raquette de la transparence.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

M. Alain Vasselle.  - Je voterai contre. Je comprends qu'il faille informer le candidat qui a recueilli 499 parrainages, mais quel intérêt à publier les noms auprès de l'opinion publique ?

L'amendement n°46 est adopté

L'article 3, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°49 rectifié bis, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste et républicain.

Avant l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « Quinze jours au moins avant » sont remplacés par les mots : « Au plus tard le quatrième vendredi précédant » ;

2° À la troisième phrase du deuxième alinéa, le mot : « sixième » est remplacé par le mot : « cinquième ».

M. Alain Anziani.  - Lors de la période préliminaire de l'élection présidentielle, la règle est celle de l'équité des temps de parole et de programmation. Pendant la campagne officielle, c'est le principe d'égalité. Reste la période intermédiaire, où il y a égalité dans le temps de parole mais équité dans le temps de programmation, qui dure environ vingt jours. La proposition de loi propose l'équité dans le temps de parole et dans la programmation ; cet amendement rétablit l'égalité dans les temps de parole et l'équité dans la programmation - impossible, matériellement, de faire autrement - mais réduit cette période à dix jours seulement. Je ne vois pas d'autre solution pour éviter les conflits incessants avec le CSA.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Je vous propose de soutenir l'amendement de M. Anziani et de supprimer l'article 4 par cohérence. Cet article 4 découlait du constat que la loi organique du 5 avril 2006, qui a étendu la période intermédiaire à deux semaines et demie, avait entraîné des difficultés matérielles - qu'a relevées Guy Carcassonne lors de la même conférence du 22 février 2013, soulignant que le nombre de candidats empêchait un débat digne.

La solution ? Maintenir l'égalité des temps de parole, mais sur une période plus courte.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Nous faisons là oeuvre utile de législateur. Reste à convaincre les députés en CMP...

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Cet amendement réduirait à une semaine le temps alloué au Conseil constitutionnel pour contrôler les parrainages : ce n'est pas praticable quand il faut en vérifier des milliers. Avis défavorable.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Cet accord ne me surprend pas. Il correspond aux intérêts des grandes formations politiques qui alternent au pouvoir. Je salue les artistes, véritables prestidigitateurs : on croit tout voir, mais on ne comprend pas tout. Cet amendement est peut-être moins pire que le projet initial, mais il revient tout bonnement à réduire la période pendant laquelle l'égalité est appliquée ! (On le conteste sur les bancs du groupe socialiste et républicain

M. Jean-Pierre Sueur.  - Non, aujourd'hui c'est l'équité.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Non -  sinon, vous auriez laissé les choses en l'état ! Pour changer les choses, il aurait fallu renforcer l'égalité sur la période pendant laquelle les médias, à leur guise, font et défont les candidats. Voilà ce qu'aurait été une approche de gauche ! Le problème n'est pas technique, mais politique. Veut-on favoriser la diversité ou canaliser le débat ?

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis.  - Nous prenons connaissance de cet amendement qui va dans le sens de la commission de la culture puisqu'il s'assortirait de la suppression de l'article 4. Le principe d'équité serait très difficile à appliquer pendant la période intermédiaire, les diffuseurs l'ont confirmé. La commission de la culture ne s'est pas prononcée sur la réduction de la période intermédiaire, je m'abstiendrai donc. En tout état de cause, je déplore qu'une proposition de loi organique aussi importante soit examinée en procédure accélérée sans travail préalable suffisant.

Mme Éliane Assassi.  - Nous critiquons le principe d'équité, qui laisse le champ libre aux rédactions. M. Anziani nous a parlé très rapidement de son amendement ce matin même. Il nous propose -  ce n'est pas simple à comprendre  - de réduire la période intermédiaire, où s'applique le principe d'égalité. On rallonge donc d'autant la période préliminaire, régie par le principe d'équité ! C'est un compromis par le bas pour couper court au débat sur l'article 4, que l'Assemblée nationale s'empressera de rétablir !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Chapeau, l'artiste !

Mme Éliane Assassi.  - Nous voulons nous aussi supprimer l'article 4, mais pour d'autres raisons !

M. Alain Anziani.  - Si Mme Morin-Desailly veut supprimer l'article 4, il faut voter cet amendement. Notre compromis renforce l'égalité, puisqu'elle sera rétablie ! (M. Pierre-Yves Collombat s'exclame). Avant la réforme de 2006, les parrainages étaient déposés le vendredi et la campagne s'ouvrait le lundi : le Conseil les contrôlait en trois jours. Il peut bien le faire en une semaine...

M. Alain Vasselle.  - Nous avons consacré deux heures à ce sujet en commission des lois, sans parvenir à une rédaction commune -  jusqu'à ce matin. Mme le ministre nous dit que dix jours ne suffisent pas au Conseil constitutionnel pour vérifier ? Il y aurait désormais trois semaines, l'argument technique tombe.

M. Collombat veut la stricte égalité mais pendant la période préliminaire, c'est l'équité. Avec les primaires qui se tiendront pendant la période intermédiaire, il y un risque d'inégalité des temps de parole entre les candidats potentiels. Il faudra y réfléchir.

Mme Corinne Bouchoux.  - On confère au génie politique ! Faute de pouvoir augmenter le nombre de signatures, on passe par le tamis de la visibilité. Quand on ne peut rien faire, on jour sur le temps et le périmètre. Là, vous jouez sur les deux, et faites tomber l'article 4 au passage : d'une pierre, trois coups ! Avez-vous au moins une étude d'impact ? La présidentialisation structure notre vie politique, mais on bricole, sans base scientifique...

Madame le ministre, je ne peux pas entendre l'argument de l'inconfort pour le Conseil constitutionnel : s'il le faut, qu'il recrute ! Je suis gênée mais étant socio-réaliste, je vais voter pour, alors que je suis contre. C'est surréaliste : vous êtes géniaux ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il y a des jours où l'on est fier d'être parlementaire. La solution trouvée par M. Anziani et le rapporteur a été le fruit d'un débat très fécond en commission. L'égalité du chronomètre n'est pas celle de la diffusion, le sujet est complexe ; le raccourcissement de la période intermédiaire est une bonne idée.

Le Conseil constitutionnel fait appel à de nombreux vacataires : ce ne sont pas les neuf membres qui comptent les enveloppes ! Une semaine suffit. Je me réjouis de l'équilibre atteint, fruit du travail du Sénat.

Mme Nathalie Goulet.  - Mme Bouchoux raisonne bien mais je ne partage pas ses conclusions. L'article 4 n'est pas satisfaisant, mais nos conditions de travail le sont encore moins. Nous faisons du travail de commission en séance ! Le Gouvernement, sur un texte fondateur de l'élection présidentielle, devrait renoncer à la procédure accélérée. Monsieur le président de la commission des lois, soutenez-nous !

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Mes premiers mots ont été pour regretter les conditions d'examen de ce texte, donnez m'en acte ! Le butoir, c'est qu'en avril, nous arrivons au délai d'un an avant la campagne. Attelez-vous à un texte qui s'appliquera pour l'élection de 2020. Les deux derniers parlementaires à avoir présenté un texte sur le sujet sont devenus, l'un président de la République, l'autre garde des sceaux : cela devrait susciter des vocations ! (Sourires)

Oui, cet amendement est un compromis. La politique s'honore, parfois, à éviter les conflits inutiles. Nous nous accordons sur les règles du jeu. Nous améliorons la situation d'avant 2007, et corrigeons les excès observés depuis, nous évitons le débat sur équité et égalité, et toutes les postures et arrière-pensées qu'il charrie.

L'argument de la ministre n'est pas recevable. Trois jours, c'est le temps qu'a pris le Conseil constitutionnel lors des dernières élections : nous en proposons dix, sans compter que le contrôle aura lieu tout au long de la période avec la transmission au fur et à mesure.

Comparez donc les scores de 2002, quand le principe d'égalité s'appliquait, et de 2007 et 2012, sous l'empire du principe d'équité. Ce sont les dernières fois que les gros candidats ont enregistré les scores les plus importants.

M. Jacques Mézard.  - Cette réforme va à l'encontre de nos principes mêmes. Nous n'avons jamais été favorables à l'élection au suffrage universel direct du président de la République, reste qu'elle est devenue la plus importante dans notre système politique. Une fois les candidatures déclarées recevables par le Conseil constitutionnel, tout autre principe que l'égalité entre les candidats est contraire à la démocratie.

Une telle réforme, à peine plus d'un an avant le terme, n'est pas raisonnable. Après les cantonales, les régionales, les sénatoriales et maintenant la présidentielle, allez-vous changer les règles des élections législatives ?

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - On ne peut reprocher au Gouvernement d'être attentif au bon fonctionnement du Conseil constitutionnel. Les parrainages pourront toujours être déposés au dernier moment, une semaine ne suffit pas pour les contrôler.

L'égalité du temps de parole et l'équité du temps d'antenne ? C'est une équation improbable...

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Curieusement, nos échanges embrouillent un débat que l'avis favorable de la commission à cet amendement devrait simplifier... Monsieur le président Mézard, vous dites que l'égalité doit s'appliquer dès lors que le Conseil constitutionnel déclare les candidatures recevables en en publiant la liste. C'est exactement ce que nous sommes en train de faire !

L'amendement n°49 rectifié bis est adopté et devient article additionnel.

présidence de M. Gérard Larcher

Hommage à une délégation du Bundesrat

M. le président.  - Madame la ministre, mes chers collègues, (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent, ainsi que Mme la ministre), j'ai le plaisir et l'honneur de saluer la présence dans notre tribune officielle d'une délégation conduite par le président du Bundesrat de la République fédérale d'Allemagne et le ministre-président du Land de Saxe, M. Stanislaw Tillich, accompagnée par notre collègue Catherine Troendlé, ardente promotrice de l'amitié France-Allemagne. (Applaudissements)

Après une forte mobilisation du Sénat sur le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, nous examinons aujourd'hui en séance publique des propositions de loi relatives aux règles applicables à l'élection présidentielle. Ce sont donc les spécialistes de ces questions qui siègent aujourd'hui.

La présence, à mon invitation, de la délégation conduite par le président Tillich est le signe visible du lien qui unit l'Allemagne et la France, et de l'excellence du partenariat entre nos assemblées.

La relation franco-allemande est un trésor précieux que chaque génération, des deux côtés du Rhin, doit faire grandir.

Ce partenariat exceptionnel, fondé sur le traité de l'Élysée de 1963, a non seulement fait naître une coopération politique, économique, culturelle, sans égale entre nos deux pays, mais elle est également le « moteur » du projet européen.

Or, vous le savez, au-delà de ces propos de courtoisie et d'amitié, l'Union européenne est confrontée aujourd'hui à une triple crise : crise migratoire, qui fait vaciller l'Espace Schengen, - M. le président Tillich rencontrait ce matin même le directeur général de Frontex - crise agricole, qui dépasse de loin les frontières de nos pays, et des négociations à risque, qui peuvent éviter -  ou accélérer ! - une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Sur tous ces sujets, sans oublier la lutte contre la menace de l'État islamique, il est plus nécessaire que jamais que l'Allemagne et la France dialoguent, y compris au niveau parlementaire.

Le Sénat et le Bundesrat y prennent toute leur part, avec des échanges entre nos groupes d'amitié, des déclarations communes entre nos commissions des affaires européennes, et des rencontres à haut niveau comme celles d'aujourd'hui.

C'est donc une joie et un honneur de vous accueillir dans cet hémicycle.

Votre visite contribuera encore au renforcement des relations d'amitié qui unissent la France et l'Allemagne. Le Bundesrat et le Sénat entretiennent des liens féconds : nous travaillons ensemble à la construction d'une loi de décentralisation en Ukraine, qui s'inscrit dans l'application des accords de Minsk II.

Bienvenue au Sénat de la République. (Vifs applaudissements)

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

Élection présidentielle (Procédure accélérée - Suite))

Discussion des articles de la proposition de loi organique (Suite)

ARTICLE 4

Mme la présidente.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par MM. Collombat, Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.

Supprimer cet article.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Les règles font souvent le résultat, monsieur le rapporteur, il faut donc en débattre... En politique, il ne faut parfois pas être trop intelligent, monsieur le Président. Le principe d'égalité continuerait certes à s'appliquer... pendant une période réduite ! C'est de cela que notre système est en train de mourir. Voyez les questions d'actualité au Gouvernement. « Non, le chômage n'augmente pas ! », entend-on, avec force arguments : le Gouvernement et sa majorité ont toujours raison ! Sauf que les Français n'y croient plus... Assez de bricolage !

Mme la présidente.  - Amendement identique n°30 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Mme Éliane Assassi.  - MM. Le Roux et Urvoas présentaient comme une « modernisation » des mesures propres à réduire le pluralisme démocratique.

Le trop grand nombre de candidats empêcherait d'organiser des débats : ce serait donc à la démocratie de s'adapter à la soif d'audimat des grands groupes au lieu de l'inverse. On aurait pu débattre plutôt du fait que l'égalité ne s'applique pas au temps d'antenne !

Cet article 4 est anti-démocratique.

Mme la présidente.  - Amendement n°52, présenté par M. Béchu, au nom de la commission des lois.

Supprimer cet article.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Défendu. Je citerai derechef Guy Carcassonne qui nous disait ici même en 2013 : le système actuel produit des effets directs mauvais et des effets indirects désastreux « notamment car il échoue à éviter les candidatures farfelues ou carrément indignes ». (Mme Éliane Assassi s'exclame)

Les formations politiques représentées au Parlement ne sont évidemment pas « petites ». Mais Guy Carcarssonne remarque que trois candidats trotskistes à l'élection présidentielle, cela fait beaucoup, nonobstant les nombreux courants internes à ce mouvement...

La suppression de cet article évitera que l'on nous prête des intentions qui ne sont pas les nôtres.

Entendre dire à M. Collombat qu'il ne faut pas être trop intelligent pour faire de la politique me surprend de la part d'un membre du RDSE...

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Égalité du temps de parole et équité du temps d'antenne, je le répète, cela dissuade les chaînes d'organiser des débats. Sans compter qu'un passage à 20 heures ou à 2 heures du matin, ce n'est pas la même chose... Avis défavorable.

Les amendements identiques nos2 rectifié, 30 rectifié et 52 sont adoptés.

L'article 4 est supprimé.

Les amendements nos34, 29, 3 rectifié, 18, 36, 42, 27, 31, 32, 33, 19 sont sans objet.

L'article 5 est adopté.

ARTICLE 6

L'amendement n°23 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°35, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

Mme Éliane Assassi.  - La période de comptabilisation des dépenses électorales étant réduite d'un an à six mois, la période de remboursement public des dépenses de campagne l'est aussi, ce qui pénalise les candidats ne disposant pas des ressources d'un vaste appareil politique. Cette mesure s'oppose à la pluralité des candidatures et du débat politique.

L'appareil tentaculaire de la communication des grands partis se déploiera encore plus facilement... Repousser la réforme à 2022 n'est qu'un moindre mal.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°47, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Alain Anziani.  - Faut-il déjà fixer les règles pour les élections postérieures à 2017 ? Je ne le crois pas, la réflexion sur les primaires, notamment, n'est pas mûre.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il ne faut pas légiférer à la dernière minute ! Avis défavorable.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis favorable. On en resterait ainsi à la règle actuelle, conforme au principe de transparence et aux attentes des citoyens.

Mme Nathalie Goulet.  - Cet article a été perçu - à tort sans doute - comme une manoeuvre favorisant l'opacité. Vu l'actualité, c'est malvenu... Je voterai sa suppression.

M. Alain Vasselle.  - La question, ce n'est pas le délai mais le volume des dépenses : les plafonds devraient peut-être être modifiés, pour l'élection présidentielle comme pour les autres.

M. Jacques Mézard.  - Voilà qui montre une nouvelle fois qu'une proposition de loi d'origine gouvernementale, examinée selon la procédure accélérée, est particulièrement malvenue ! Sur un sujet qui plus que tout autre devrait faire émerger un consensus.

Les comptes du vainqueur sont toujours validés, on ne peut faire autrement... Le vrai problème est celui de montant autorisé, compte tenu de l'apparition des primaires. On attend encore sur ce point une réflexion de fond...

Puisqu'on ne cesse d'invoquer la transparence, il y a fort à faire pour rendre plus transparents et lisibles les travaux de la commission de contrôle.

Mme Corinne Bouchoux.  - Il y a des problèmes de riches ! La réalité, ici encore, n'est pas la même dans les grands et les petits partis. Ces derniers cherchent à dépenser le moins possible... Reste qu'on a assisté ces dernières années à une explosion des dépenses. D'où l'importance de la transparence.

Faudrait-il avouer ce soir, entre la poire et le fromage, à nos collègues allemands que nous avons légiféré sans étude d'impact, à l'aveuglette et dans l'urgence ? Cela fait peur.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je voterai ces amendements car le problème ne peut être abordé par petits bouts. Mais que se passera-t-il quand on constatera que l'élu a dépassé le plafond de dépenses ? Laissons-nous le temps de la réflexion...

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - L'article ne concerne pas l'élection de 2017. En pratique, les comptes de campagne retracent, pour l'essentiel, les dépenses des six derniers mois. L'avantage de notre proposition, c'est que l'on ignore à qui elle s'appliquera.

Les amendements identiques nos35 et 47 ne sont pas adoptés.

L'article 6 est adopté.

L'article 6 ter est adopté.

ARTICLE 7

Mme la présidente.  - Amendement n°25 rectifié bis, présenté par MM. Vasselle, Reichardt, Calvet, Joyandet et Panunzi, Mme Morhet-Richaud, M. Lemoyne, Mme Lopez et MM. Rapin, Houel, Chaize, Masclet, Mayet et D. Bailly.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

dix-neuf heures

par les mots :

dix-huit heures

M. Alain Vasselle.  - Je propose que tous les bureaux ferment à 18 heures et non 19 heures. Le rapporteur a raison de vouloir vérifier l'horaire, pour éviter la divulgation des résultats avant la fin du scrutin. Mais une fermeture à 19 heures poserait problème aux communes rurales, alors que la grande majorité des électeurs votent avant 18 heures.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Si nous choisissons 18 heures, on nous accusera de favoriser l'abstention ; 20 heures que nous mettons en difficultés les assesseurs ruraux. 19 heures, c'est un bon compromis, d'autant que 0,7 % des électeurs seulement votent après 19 heures.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement préfère le statu quo, on ne saurait restreindre l'exercice du droit de vote, alors que les habitants des grandes villes votent aujourd'hui jusqu'à 20 heures. L'uniformisation à 19 heures poserait aussi problème aux communes rurales. Avis défavorable.

Mme Corinne Bouchoux.  - Nous soutiendrons la position du rapporteur. Symboliquement, un horaire unique est intéressant. Ceux qui ont la chance d'avoir une maison de campagne et en rentrent tard le dimanche soir peuvent facilement donner procuration... Cela évitera la publication anticipée des résultats par des instituts de sondage, ou par les sites internet des journaux suisses ou belges.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Une précision : je ne sais pas d'où M. le rapporteur sort le chiffre de 0,7 %. La participation n'est mesurée qu'à la fin du scrutin.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La proposition du rapporteur est raisonnable.

Mme Nathalie Goulet.  - Cet article-ci s'appliquera-t-il dès 2017 ?

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Oui. Les préfets peuvent décider d'un horaire unique quelle que soit la taille des communes. C'est une faculté rarement utilisée... mais qui l'a été par ce Gouvernement, pour les élections départementales dans l'Ariège, sans que personne n'y trouve à redire. 19 heures, c'est un vrai bon compromis.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Que le Gouvernement fasse preuve de bonne volonté et de bon sens ! Il n'est pas raisonnable de mettre exclusivement à la charge des communes rurales la résolution du problème posé par la publication anticipée des résultats. Entre ville et campagne, nous faisons faire à chacune la moitié du chemin ! Ni les électeurs urbains, ni les assesseurs des bureaux urbains ne s'en plaindront.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Si nous retenons l'horaire unique de 19 heures, avec une possibilité de dérogation jusqu'à 20 heures, le risque serait limité, car les premiers résultats ne seraient connus que vers 19 h 45. Reconnaissez que le Gouvernement a fait preuve de courage en reprenant les propositions de MM. Sueur et Portelli sur les sondages !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous proposions aussi une heure de fermeture unique à 19 heures...

M. Alain Houpert.  - Que le Gouvernement fasse preuve d'un peu de sollicitude à l'égard des campagnes, où l'on a le plus grand mal à trouver des assesseurs...

L'amendement n°25 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°48 rectifié, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  -  Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

(heure légale locale)

II.  -  Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

, et sans que le scrutin puisse être clos après vingt heures (heure légale locale)

III.  -  Alinéas 4 et 5

Après le mot :

ouverture

insérer les mots :

ou retarder l'heure de clôture

M. Alain Anziani.  - Nous proposons que la fermeture des bureaux de vote ait lieu à 19 heures sur l'ensemble du territoire avec possibilité de dérogation à 20 heures.

Mme la présidente.  - Amendement n°26 rectifié bis, présenté par MM. Vasselle, Masclet, Chaize, Mayet, G. Bailly, Houel, Gremillet, Reichardt, Calvet et Panunzi, Mme Morhet-Richaud, M. D. Laurent et Mme Lopez.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

et sans que le scrutin puisse être clos après dix-neuf heures

M. Alain Vasselle.  - Cet amendement de repli n'autorise une dérogation que pour ouvrir jusqu'à 19 heures : avec une heure de décalage seulement, le scrutin ne peut être faussé.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Avis défavorable : pour l'élection présidentielle, un horaire unique et préférable.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis favorable à l'amendement n°48 rectifié, défavorable à l'amendement n°26 rectifié bis.

M. Alain Vasselle.  - Tout cela n'aidera pas les communes rurales à trouver les assesseurs...

M. Alain Houpert.  - Il s'agit d'élire le président de tous les Français : il n'y a pas un président des Français des villes et un président des Français des campagnes !

L'amendement n°48 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°26 rectifié bis.

L'article 7 est adopté.

ARTICLE 8 A

Mme la présidente.  - Amendement n°51, présenté par M. Béchu, au nom de la commission des lois.

Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Le titre II du livre IV n'est pas assez précis pour que cet alinéa puisse être maintenu.

L'amendement n°51, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 8 A, modifié, est adopté.

ARTICLE 8

M. Robert del Picchia .  - Lorsque l'inscription au registre consulaire arrive à échéance, l'information ne parvient pas toujours à l'intéressé. Il peut avoir changé d'adresse sans en avoir avisé le consulat, lequel peut aussi ne pas disposer de données exactes ; les dysfonctionnements postaux ne sont pas rares, dans certains pays. Cet article, c'est la double peine : on se retrouverait ainsi radié des listes électorales sans l'avoir voulu, sans avoir effectué de démarche à cet effet, contrairement à ce qui se passe sur le territoire français, sans même en être informé ! Nos compatriotes le découvriront le jour du vote... C'est une atteinte, inconstitutionnelle, à l'exercice du droit de vote.

J'ajoute qu'il n'y a pas d'obligation à s'inscrire sur le registre consulaire, et que cela ne conditionne pas l'inscription sur les listes électorales consulaires... Demain, il vaudra mieux ne pas s'inscrire au registre pour ne pas prendre le risque d'être radié automatiquement des listes électorales ! C'est ubuesque. Nous demanderons par conséquent la suppression de l'article.

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par M. Leconte.

Supprimer cet article.

M. Jean-Yves Leconte.  - La fermeture de nombreux consulats rend l'inscription plus difficile. La radiation automatique risque de multiplier les recours.

L'amendement n°41 ne rend la radiation des listes électorales automatique que si la personne a demandé celle du registre consulaire.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°7, présenté par Mmes Garriaud-Maylam, Deromedi et Kammermann et MM. Cantegrit, del Picchia, Duvernois et Frassa.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - La radiation automatique est inutile dans l'immense majorité des cas, il n'est pas besoin de légiférer sur ce point. Au reste, le code électoral dispose déjà qu'en cas de double inscription, l'électeur restera inscrit sur la liste qu'il a rejointe en dernier.

La radiation automatique de la liste électorale des personnes radiées du registre consulaire accroît les risques : une personne radiée par erreur du registre sera aussi radiée de la liste électorale. Pour mémoire, en 2008, plus de 8 000 électeurs, radiés par erreur par les postes diplomatiques et consulaires, avaient été réintégrés dans leurs droits suite à un recours individuel ou collectif.

Pour répondre au Conseil constitutionnel, il importe de mieux encadrer les processus d'inscription et de radiation et de mieux informer les Français de l'étranger de la spécificité de leur situation électorale.

L'amendement n°40 n'est pas défendu.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - 40 000 personnes n'ont pas pu voter aux dernières élections présidentielles car elles étaient toujours inscrites sur des listes consulaires.

Avis favorable à l'amendement n°41, qui évitera les cas de caducité ; avis défavorable aux autres.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis défavorable aux amendements identiques nos1 et 7. Par parallélisme des formes, il est normal d'être désinscrit des listes électorales lorsque l'on quitte les registres consulaires ; les électeurs sont dûment informés par courrier ou par courriel.

M. Robert del Picchia.  - Et quand ils ne le reçoivent pas ?

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - J'ajoute que le registre en ligne permet de renouveler une inscription ou de signaler un départ.

M. Christophe-André Frassa.  - On ne peut contenter tout le monde, monsieur le rapporteur, mais nous ne faisons pas la même analyse. L'inscription au registre consulaire et sur une liste électorale sont deux processus différents : le second est géré par une commission administrative institué par la loi, la première par l'administration consulaire.

On ne réglera rien en automatisant la radiation : les 40 000 radiés à tort risquent de se transformer en 40 000 contentieux...

Je voterai les amendements de suppression.

M. Jean-Yves Leconte.  - L'amendement n°41 répond à vos préoccupations... Toutes les difficultés, comme celles rencontrées par les 40 000 radiés, ne sont toutefois pas levées, il faudra y revenir.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Je maintiens un avis défavorable aux amendements de suppression malgré les arguments de Christophe-André Frassa...

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Selon l'article 4 de la loi organique de 1976, il y a automaticité d'inscription sauf opposition de l'intéressé. L'objet du texte n'est pas de vider de sa substance la commission administrative chargée de gérer les listes électorales mais de permettre à nos compatriotes qui reviennent en France de voter au lieu de leur nouveau domicile, ce qu'ils pensent possible dès lors qu'ils se sont radiés du registre consulaire.

Les amendements identiques n°s1 et 7 ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°41, présenté par M. Leconte.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Lorsqu'un Français demande sa radiation du registre des Français établis hors de France, celle-ci entraîne de plein droit sa radiation de la liste électorale consulaire, sauf opposition de sa part. »

M. Jean-Yves Leconte.  - Je l'ai défendu.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Avis favorable.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°41 est adopté.

L'article 8, modifié, est adopté.

L'article 9 est adopté, de même que les articles 10 et 11.

L'article 12 demeure supprimé.

Interventions sur l'ensemble

M. Pierre-Yves Collombat .  - Le temps pendant lequel les candidats seront traités à égalité a diminué, la part laissée à l'appréciation des médias a augmenté. Le groupe du RDSE ne votera pas le texte.

Mme Nathalie Goulet .  - A l'exception de Catherine Morin-Desailly, qui s'abstiendra, notre groupe, malgré le travail de la commission des lois, ne votera pas ce texte.

Mme Éliane Assassi .  - Conformément à ce que j'ai indiqué en discussion générale, nous ne voterons pas ce texte.

Mme Corinne Bouchoux .  - André Gattolin votera contre ce texte ; le reste des membres du groupe écologiste s'abstiendra.

L'ensemble de la proposition de loi organique est mis aux voix par scrutin public de droit.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°157 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 332
Pour l'adoption 252
Contre 80

Le Sénat a adopté.

Discussion des articles de la proposition de loi

L'article premier AA est adopté.

Les amendements nos3, 7, 6 et 5 ne sont pas défendus.

L'amendement n°8 n'est pas défendu et l'article premier A demeure supprimé.

L'article premier est adopté.

Les articles 2 et 2 bis sont adoptés.

ARTICLE 2 TER

Mme la présidente.  - Amendement n°16, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

Le deuxième alinéa de l'article 11 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion est complété par une phrase ainsi rédigée :

« En outre, lorsque la publication, la diffusion ou le commentaire du sondage est intervenu pendant la semaine précédant un tour de scrutin, les sociétés mentionnées à l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication programment et diffusent sans délai la mise au point de la commission des sondages, sur demande écrite de celle-ci. »

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - L'Assemblée nationale n'a pas souhaité, monsieur Sueur, inscrire votre texte à son ordre du jour, ni le reprendre dans celui-ci par amendement. Sa constitutionnalité est douteuse au regard de la liberté de la presse. En outre, préciser que l'échantillon doit être représentatif conduit à exclure de l'encadrement les sondages dont l'échantillon ne l'est pas.

L'article 1er de la loi de 1977, modifiée, étend le champ d'application de la loi « aux organes d'information qui font état, sous quelque forme que ce soit, d'un sondage (...) publié ou diffusé depuis un lieu situé hors du territoire national. » Outre la difficulté pratique de sa mise en application, cette disposition pourrait rendre délicat le respect de l'article 11 de la CEDH qui protège la liberté de communication. En effet, la poursuite pénale d'un organe d'information pour non-respect de l'interdiction de diffusion d'un sondage publié à l'étranger paraît fragile juridiquement, et ne permettra d'ailleurs pas de poursuivre les sites internet diffusant des sondages illégaux. 

Enfin, l'article 11 pourrait poser des problèmes d'application en outre-mer et pour les Français établis hors de France.

Néanmoins, parce que le Gouvernement a entendu votre appel, monsieur Sueur, je retire l'amendement et vous promet d'engager le débat sur tous ces aspects, y compris avec les députés.

L'amendement n°16 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°13, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'alinéa 33

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article 4-1 est ainsi rédigé :

« Art. 4-1. - Tout sondage portant sur le second tour d'une élection est interdit avant le premier tour de celle-ci. » ;

Mme Éliane Assassi.  - Les us et coutumes actuels privilégient systématiquement le deuxième tour d'une élection au détriment du premier. C'est pourtant là que s'organise la réelle démocratie électorale d'un pays...

Brûler l'étape du premier tour, ce que font allègrement les instituts de sondages qui oeuvrent de fait pour la bipolarisation de la vie politique, met en péril l'exercice plein et entier du suffrage universel.

Mme la présidente.  - Amendement n°14, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'alinéa 38

Insérer deux alinéas ainsi rédigés : 

...° Après l'article 10, il est inséré un article 10-1 ainsi rédigé :

« Art. 10-1.  -  Le président de la commission des sondages présente chaque année au Président de la République, au Président du Sénat et au Président de l'Assemblée nationale un rapport public qui rend compte de son activité. Ce rapport rappelle chaque année la composition des organes de direction des instituts de sondages. » ;

Mme Éliane Assassi.  - Cet amendement reprend en partie l'article 12 de la proposition de loi sur les sondages de MM. Portelli et Sueur et précise le contenu du rapport. Il est légitime que les Français sachent qui sont ceux qui cherchent à les influencer...

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°13 : nous sommes dans un pays de liberté, et la proposition n'a pas de sens. La volonté d'organiser des primaires citoyennes s'appuie d'ailleurs sur les perspectives tracées par un deuxième tour...

Avis défavorable à l'amendement n°14. Nous avons cherché un équilibre entre ce qui relève de l'élection présidentielle et ce qui relève d'un texte plus large.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°13. Sagesse sur l'amendement n°14.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Merci, madame la ministre. Le fait qu'un sondage soit réalisé sur la base d'un échantillon représentatif est de bon sens. Notre définition couvre les méthodes par quota ou aléatoire. Je souhaite que nous avancions d'ici à la CMP.

L'amendement n°13 pose un problème en termes de liberté d'expression ; dans notre proposition de loi, nous précisions qu'on ne pourrait publier un sondage sur le second tour sans un sur le premier. Ce serait sinon tromper les gens. Je remercie Mme Assassi d'avoir repris une de nos propositions dans son amendement n°14 - mais en accord avec M. Portelli et le rapporteur, nous avons choisi de ne reprendre qu'une partie de celles-ci.

Mme Éliane Assassi.  - Les instituts de sondage brûlent très souvent les étapes, ce qui favorise la bipolarisation de la vie politique et met en péril l'exercice du suffrage universel. Je ne comprends donc pas la position du rapporteur.

L'amendement n°13 n'est pas adopté.

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

L'article 2 ter est adopté.

L'article 2 quater est adopté, de même que l'article 2 quinquies.

L'article 3 demeure supprimé, de même que l'article 4.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par Mmes Garriaud-Maylam, Deromedi et Kammermann et MM. Cantegrit, del Picchia, Duvernois et Frassa.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article L. 39 du code électoral, les mots : « de la commune » sont supprimés.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - La rédaction actuelle de l'article L. 39 du Code électoral ne tient pas compte de la possibilité qu'un électeur soit inscrit sur une liste électorale consulaire. Il convient donc de supprimer la précision « de la commune », susceptible d'induire en erreur en ne permettant pas que la dernière inscription retenue soit celle sur une liste électorale consulaire et non dans une commune française.

L'amendement n°15 rectifié n'est pas défendu.

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Cela aboutirait à la situation inverse à celle recherchée : un électeur français ne pourrait être inscrit en France et à l'étranger simultanément. Avis défavorable.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°1 rectifié est retiré.

ARTICLE 5

Mme la présidente.  - Amendement n°17, présenté par M. Béchu, au nom de la commission des lois.

Alinéa 1

Remplacer les références :

des articles L. 388 et L. 428 et au second alinéa de l'article L. 438

par la référence :

de l'article L. 388

M. Christophe Béchu, rapporteur.  - Correction d'une erreur d'imputation.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°17 est adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

L'ensemble de la proposition de loi, modifié, est adopté.

Question prioritaire de constitutionnalité

Mme la présidente.  - Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 18 février, qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel deux arrêts de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les articles 62 et 63 du code des douanes (Pouvoir des agents des douanes) (2016-541 QPC) et l'article L. 442-6, III du code de commerce (Pratiques restrictives de concurrence) (2016-542 QPC).

Le texte de ces arrêts de renvoi est disponible à la direction de la Séance.

Dépôt d'un rapport

Mme la présidente.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur la situation financière des organismes complémentaires assurant une couverture santé. Il a été transmis à la commission des affaires sociales.

La séance, suspendue à 19 h 10, reprend à 19 h 15.

Protection de l'enfant (Nouvelle lecture)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant.

Discussion générale

Mme Laurence Rossignol, ministre de la famille, de l'enfance et des droits des femmes .  - Voilà plus d'un an que le travail de Michelle Meunier et Muguette Dini mobilise le Parlement, sur un sujet trop peu abordé, la protection des enfants et la politique publique qui la garantit.

La navette a été marquée par de réelles avancées, quelques inquiétudes, mais surtout l'investissement de nombreux élus sur une question au gain politique faible mais qui fait appel aux valeurs universelles autour desquelles nous savons nous retrouver.

Le texte s'inscrit dans le cadre de la feuille de route fixée par le Gouvernement ; des groupes de travail thématiques accompagneront la mise en oeuvre de la réforme. Les départements y seront pleinement associés ; je les réunis régulièrement. Ce suivi est nécessaire, pour confronter l'application des lois à la réalité du terrain et à ses évolutions.

La loi du 5 mars 2007 est une bonne loi. Muguette Dini et Michelle Meunier l'ont dit, mais elles en ont aussi pointé les difficultés d'application. Il fallait aller plus loin, en centrant la politique publique sur l'enfant et la prise en compte de ses besoins. D'où la nouvelle définition de la protection de l'enfant que j'ai proposée, inspirée de nos engagements internationaux.

Mieux prendre en compte les besoins de l'enfant, améliorer le repérage des situations de maltraitance, des dangers et risques de danger, développer la prévention à tous les âges de l'enfant, tels sont les trois objectifs du texte.

Se centrer sur l'enfant implique de prendre en compte la pluralité de ses besoins, de son parcours et de son environnement, et de s'appuyer sur toutes les personnes qui comptent pour lui. Il y a un peu plus d'un mois, j'ai défendu la position de la France devant le Comité des droits de l'enfant à l'ONU. J'ai affirmé l'attachement de la France à ses valeurs et insisté sur la titulature du ministère qui les reflète parfaitement.

Le développement de l'allocation de rentrée scolaire permettra de constituer un petit pécule pour l'autonomie, pour démarrer dans la vie. C'est aussi un geste de confiance de la société envers le jeune adulte. Y étant personnellement attachée, je le défendrai jusqu'au bout.

Deuxième enjeu majeur : l'amélioration de la gouvernance de la politique publique de la protection de l'enfant. La place de l'État dans le pilotage d'une politique décentralisée a suscité des craintes, aujourd'hui dissipées : l'État est respectueux du rôle des départements ; il garantira l'égalité de traitement sur tout le territoire, comme des singularités locales, et favorisera le décloisonnement des acteurs.

Le Conseil national de la protection de l'enfance (CNPE) sera l'organe de pilotage attendu - en témoigne le large accord suscité par sa création à l'Assemblée nationale. Les observatoires départementaux amélioreront le suivi des politiques de l'enfance sans porter atteinte à la libre administration des collectivités territoriales.

Nous avons pleinement conscience du chemin qu'il reste à parcourir. Le Comité des droits de l'enfant de l'ONU a salué la mise en oeuvre d'une stratégie et accueilli très positivement la feuille de route du Gouvernement. Plus le consensus sera large, plus nous donnerons de poids à la place de l'enfant dans la société. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Michelle Meunier, rapporteure de la commission des affaires sociales .  - Ce texte fait suite au rapport que j'ai réalisé jadis avec Mme Dini au nom de la commission des affaires sociales. Nous y notions que la loi de 2007 était une bonne loi mais que certaines de ses dispositions étaient mises en oeuvre de manière trop disparate sur le territoire. Nous ne pouvons nous satisfaire d'une situation dans laquelle trop de jeunes voient leur enfance, et parfois leur vie, détruite du fait de défaillances des institutions et des dispositifs censés assurer leur protection.

L'ambition de cette proposition de loi est d'apporter des réponses concrètes, de renforcer la gouvernance et d'aider les départements en diffusant bonnes pratiques.

En mars dernier, le Sénat adoptait un texte comprenant 16 articles, introduisant notamment l'inceste dans le code pénal et réformant la procédure judiciaire d'abandon.

L'Assemblée nationale et le Gouvernement se sont saisis de notre texte, après la concertation nationale.

Je salue votre nomination madame la ministre, à ce nouveau ministère, je ne doute pas de votre volonté d'agir et de votre engagement en faveur d'objectifs et de valeurs que nous partageons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Revenons à la proposition de loi : le texte a été substantiellement enrichi, et un certain nombre des dispositions proposées par le Gouvernement ont reçu sans grande difficulté l'accord du Sénat. Le mécanisme consistant à confier un mineur protégé à un tiers de confiance et la légalisation du dispositif trouvé par accord entre l'État et les départements en 2013 sur la question des mineurs étrangers isolés ont ainsi fait l'objet d'un accord, c'est bien.

Malgré ce consensus entre les deux assemblées, des points de désaccord subsistent : le Sénat a repoussé la création du Conseil national de la protection de l'enfance, proposé par le rapport d'information rédigé avec Muguette Dini, au nom de la libre administration des collectivités territoriales. Celle-ci n'est pourtant nullement en cause.

Le Gouvernement propose que l'allocation de rentrée scolaire due au titre d'un enfant placé auprès d'un service de l'aide sociale à l'enfance (ASE) ne soit plus versée à ses parents mais sur un compte auquel l'enfant aura accès à sa majorité. À titre personnel, je salue cette disposition originale et utile, mais le Sénat a préféré qu'il soit versé au service qui en a la charge. Ces deux points d'achoppement majeurs, expliquent pour l'essentiel l'échec de la commission mixte paritaire qui s'est réunie le 12 janvier dernier. En deuxième lecture, l'Assemblée nationale est quasiment restée sur ses positions.

Nous avons donc été saisis d'un texte d'une cinquantaine d'articles, dont 21 en discussion. La commission des affaires sociales a encore adopté 18 amendements lors de sa réunion du 10 février. Elle est revenue sur la création d'un Conseil national de la protection de l'enfance et a rétabli le versement de l'allocation de rentrée scolaire au service départemental. À mon initiative, elle a supprimé certaines des dispositions ajoutées au texte par l'Assemblée nationale, qui apparaissaient surabondantes par rapport au droit existant. Les désaccords qui subsistent portent sur un nombre limité de dispositions du texte.

Nos avis divergent sur les moyens, pas sur l'objectif d'obtenir rapidement un meilleur niveau de protection de l'enfant sur tout le territoire : cet enjeu prend tout son sens après l'annonce des recommandations faites à la France par le comité des droits de l'enfant de l'ONU.

J'espère que nous aboutirons, en retrouvant l'esprit constructif qui nous caractérise, à un texte juste, efficace, et qui rassemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Aline Archimbaud .  - Nous voici enfin au terme de ce très long processus législatif. Nous étions pourtant tous d'accord au départ sur la nécessité de revoir profondément la loi de 2007. Je salue l'initiative conjointe de Michelle Meunier et Muguette Dini.

De récents drames montrent les lacunes de notre dispositif de protection : la coordination entre tous les professionnels de la protection de l'enfant est indispensable. Il faut communiquer, décloisonner, partager, coopérer, homogénéiser les dispositifs entre les territoires. Cependant plusieurs avancées du texte ont été retirées en commission, par exemple, la création du Conseil national, gage de coordination et d'application plus rigoureuse. Parmi les 23 articles qui ont fait l'objet d'un consensus entre les deux assemblées : la mise en place d'un projet pour l'enfant, la collaboration entre les services d'Aide Sociale à l'Enfance de différents départements, ou encore l'aide à la parentalité. Le texte renforce également l'accompagnement des enfants suivis par l'ASE. Je salue l'inscription tant attendue de l'inceste dans le code pénal.

Les tests osseux nous posent problème, car, en dépit de la circulaire de 2013 qui requiert de la bienveillance et accorde aux enfants le bénéfice du doute, ils ne sont pas fiables scientifiquement avec des marges d'erreurs pouvant aller jusqu'à deux ans. Les professionnels de l'enfance, le Haut conseil de la santé publique et l'ordre des médecins ont demandé que cette pratique, qualifiée d'indigne par le comité des droits de l'enfant de l'ONU, soit bannie ; en l'encadrant, les députés lui ont donné malheureusement une base légale. Que se passera-t-il quand l'enfant refusera le test ? A-t-il seulement les moyens d'en comprendre les enjeux ? Quid du problème éthique des médecins qui ne voudront pas effectuer ces tests dénués de base scientifique sérieuse ? Ils n'ont pas leur place dans la loi.

Sur l'article 22 quater, sur la répartition des mineurs isolés étrangers entre les départements, même constat de lacune, dénoncé par le récent rapport de l'Unicef, qui dénonce en particulier le sort fait aux enfants Roms, mais aussi à Mayotte et dans d'autres départements et territoires d'outre-mer. On ne peut laisser quelques départements -  Pas-de-Calais, Seine-Saint-Denis, Bouches-du-Rhône - devoir se débrouiller seuls avec l'accueil de ces mineurs ; c'est le rôle de la solidarité nationale. L'accord conclu entre l'État et l'Association des départements de France doit être validé par la loi.

En dépit de notre accord de fond sur de nombreuses mesures contenues dans ce texte, nous ne partageons pas la logique qui a prévalu aux choix de la majorité sénatoriale et de la commission des affaires sociales : nous ne saurions donc le voter en l'état.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Guillaume Arnell .  - Je supplée d'autant plus Mme Malherbe que le débat ouvert par ce texte nous touche tous et nous préoccupe particulièrement outre-mer. Quel dommage de devoir lui faire subir une troisième lecture, alors qu'il devrait dépasser largement tous clivages politiciens ! Je félicite chaleureusement les deux sénatrices, de sensibilités différentes qui en sont à l'origine, Muguette Dini et Michelle Meunier pour leur engagement.

L'enjeu est de taille : n'oublions pas que 300 000 jeunes sont pris en charge chaque année par l'Aide sociale à l'enfance (ASE).

Je salue la sagesse de la commission des affaires sociales qui a choisi de ne pas modifier douze articles sur les vingt-et-un restants en discussion à l'issue de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale.

Neuf articles posent encore problème : la majorité sénatoriale ne veut pas d'un conseil national au motif qu'il y a déjà un observatoire national, je le regrette car sa mission est d'une autre nature, d'observation, de statistique, pas de coordination.

Difficultés, encore, sur l'articulation des moyens, et je vise ici les articles 2 et 5 ED : des responsabilités nouvelles, oui, mais pas sans moyens nouveaux !

L'ARS est encore une pierre d'achoppement : les chèques fléchés n'ayant pas été retenus, je préfère, en l'absence de garanties sur l'utilisation de ce pécule, que l'ARS soit reversée au service du conseil départemental qui en a la charge afin d'avoir la certitude qu'il sera dépensé au profit du jeune.

Ouvrir le poste de référent pour la protection de l'enfance créé par l'article 4 à un professionnel de santé, sage-femme ou psychologue par exemple, au cas où il ne pourrait être pourvu par un médecin ? Madame la ministre, ce serait sage, sauf à prendre le risque d'avoir des départements sans référent.

Le RDSE a choisi de ne déposer aucun amendement pour avancer : nous voterons tous ce texte, à deux exceptions près, qui ne voteront pas contre. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et socialiste et républicain)

M. Philippe Mouiller .  - Ce texte, pour lequel je rends hommage à mon tour à Mmes Meunier et Dini, au long parcours parlementaire, a ouvert un débat important, profond - la protection de l'enfance est une mission essentielle, à laquelle je suis très attaché, que la loi a confiée entièrement aux départements. L'ASE est leur troisième poste de dépenses sociales, qui concerne, j'y insiste, 300 000 enfants, et représente 7 milliards d'euros.

Nos finances départementales, cependant, subissent un effet de ciseaux à mesure que les dépenses augmentent, en particulier celles du RSA, alors que les recettes stagnent. Il faut en tenir compte, je le regrette, mais la situation est très préoccupante et les perspectives économiques ne nous laissent pas entrevoir une baisse des dépenses sociales en 2016.

Tout au long des débats, à chaque lecture, notre groupe a fait preuve de pragmatisme. Nous avons suivi deux objectifs : d'une part, placer l'intérêt de l'enfant au coeur du dispositif de protection de l'enfance ; d'autre part, limiter les contraintes qui pourraient peser sur les départements qui sont les chefs de file de cette politique.

La compétence étant entièrement décentralisée, le conseil national qui était créé à l'article premier serait inutile ; il doublonne l'observatoire national qui se substitue à l'article 3 à l'observatoire national de l'enfance en danger ; les départements ont déjà des cellules de pilotage, d'étude, de suivi. S'il faut simplifier, l'heure est au regroupement des moyens dans une structure nationale unique aux compétences élargies.

À l'article 7, nous avons souhaité supprimer, dans le même esprit, l'obligation de la création, au sein des départements, d'une nouvelle commission pluridisciplinaire.

Nous regrettons que l'Assemblée nationale n'ait pas retenu nos propositions sur l'ARS à l'article 5 ED. En effet, cette allocation sert avant tout à acheter des fournitures à la rentrée, en particulier pour la famille d'accueil. La confier à la Caisse des dépôts et consignations en vue de la création d'un pécule, c'est détourner le rôle de cette allocation.

Je rappelle que le Sénat a adopté la proposition de loi de Christian Béchu et Catherine Deroche pour le versement des allocations familiales et de l'ARS au service de l'ASE du département lorsque l'enfant lui est confié sur décision du juge.

Nous partageons les objectifs du texte, mais déplorons les changements apportés par l'Assemblée nationale. Nous le voterons donc dans la rédaction de notre commission des affaires sociales.

Mme Élisabeth Doineau .  - « Un homme n'est jamais aussi grand que lorsqu'il est à genoux pour aider un enfant » : Pythagore a eu cette formule à laquelle je tiens et qui m'a accompagnée tout au long de ce processus législatif. Une même ambition nous anime tous et toutes, des auteures de la proposition de loi jusqu'à vous, madame la Ministre.

Ce processus a été long car nous avons eu des désaccords. Mais quel que soit le chemin - tous sont respectables - il faut parvenir à notre objectif commun.

Je défendrai mon point de vue, fruit de mon expérience de conseillère départementale en charge de la protection de l'enfance depuis plusieurs années, même si j'ai le sentiment personnel de plaider une cause perdue d'avance.

La loi est-elle toujours une solution ? Oui, pour protéger le faible - et pour protéger les enfants, il fallait adapter notre cadre juridique, améliorer nos outils. Mais la loi ne peut pas tout : la disparité d'application de la loi de 2007 que vous constatez est un fait.

Pour l'aide sociale à l'enfance, ce n'est pas tant le nombre, mais la complexité des situations qui a mobilisé les équipes, c'est aussi la prise en charge des mineurs isolés étrangers, c'est également le manque de soutien en pédopsychiatrie et le désengagement progressif de la protection judiciaire de la jeunesse : tout cela a sérieusement contrarié la bonne volonté des élus et des professionnels.

C'est pourquoi, je m'oppose à toutes les propositions qui imposeraient des procédures supplémentaires, coûteuses et chronophages pour les départements et en particulier à la création d'une nouvelle instance, le Conseil national de la protection de l'enfance. Je ne conteste pas la nécessité d'un travail en réseau, d'échanges fructueux interdépartementaux, mais l'Observatoire national de l'enfance en danger (ONED) qui sera rebaptisé Observatoire national de la protection de l'enfance peut tout à fait jouer ce rôle si on lui en donne les moyens. À l'instar des ODPE qui se sont dotés, dans la plupart des cas, de ces deux missions, mission d'observation et de recensement et mission de régulation et de prospection, l'ONPE pourrait assurer cette supervision en proposant des orientations nationales, en formulant des avis et en évaluant l'offre de service. Une telle organisation aurait du sens.

Certes, l'ONED est aujourd'hui membre du GIP enfance en danger au même titre que le service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger, comme Hermeline Malherbe me le rappelle à juste titre. Pourquoi ne pas donner cette compétence de coordination et de mobilisation des politiques de protection de l'enfance au GIP enfance en danger?

Lors que l'État demande quotidiennement aux collectivités des efforts de mutualisation, la solution que vous proposez ne s'explique que par votre intention de reprendre le pilotage des politiques de protection de l'enfance.

Si la loi est nécessaire pour fixer le cadre et le faire évoluer dans un environnement qui bouge continuellement, elle n'a en rien vocation à écrire la méthode de mise en oeuvre.

Pourquoi la protection de l'enfance est-elle si difficile ? D'abord parce qu'elle met en jeu la responsabilité de chacun face à des traumatismes - c'est pourquoi il faut soutenir les professionnels qui assurent cette mission, leur faciliter la tâche et non pas l'entraver. Ensuite, l'administratif prend trop souvent le pas sur l'opérationnel : trop de procédures, protocoles, référentiels, chartes, schémas, plans, pactes : une avalanche à laquelle nous ne parvenons plus à faire face ! Cherchons plutôt à développer sur le terrain, en proximité, la compétence, l'efficience, l'excellence !

La question des moyens, elle, est devenue tabou. Or les conseils départementaux sont pris à la gorge par la montée en charge de leurs dépenses sociales. Les problèmes sont criants, les missions se multiplient, mais on n'évoque jamais de moyens supplémentaires ou d'une articulation meilleure avec l'université ou la pédopsychiatrie, par exemple. C'est dommage. Une co-construction avec les départements, chefs de file en matière de protection de l'enfance, aurait permis de se mettre d'accord sur une vision commune, de dépasser l'insatisfaction actuelle pour donner corps à l'ambition transpartisane qui animait les auteures de cette initiative.

Mme Laurence Cohen .  - Après un an de procédure législative, ce texte a été profondément modifié : il a perdu en ambition et il est devenu clivant ; ce n'est guère la faute de Mmes Dini et Meunier, mais celle des positions partisanes qui ont empêché le consensus sur la gouvernance de la protection de l'enfance et sur le versement de l'allocation de rentrée scolaire. La gouvernance ? Elle est trop cloisonnée, dispersée - un outil national était bienvenu.

Quant au versement de l'ARS, le pécule à la majorité aiderait peut-être l'intégration à la vie adulte, mais on cache en fait le recul de l'intervention de l'État, on entérine le manque de moyens pour la protection de l'enfance.

Ces reculs contredisent la loi de 2007, qui a confié la protection de l'enfance aux départements et visaient à mettre l'enfant au coeur de cette politique. Ceux-ci ne consacrent que 4 % des 5 milliards d'euros dédiés à la protection de l'enfance à la prévention.

La situation des mineurs isolés étrangers, dont il n'est pas fait grand cas dans ce texte, est, elle, plus que préoccupante. Ainsi, le 4 février dernier, le comité de l'ONU pour les droits de l'enfant a publié des recommandations à destination de la France, sur l'application de la Convention internationale des droits de l'enfant.

Il s'inquiète de la capacité de la France à répondre à ses obligations concernant la protection de tout mineur, sans distinction de nationalité. Il demande à l'État de mettre à disposition des ressources humaines, techniques et financières suffisantes afin d'assurer leur accompagnement social, leur éducation, et leur formation professionnelle.

Nous redéposerons un amendement pour garantir le respect de l'interdiction pour les mineurs étrangers isolés d'être placés dans les centres de rétention administrative.

Quant aux tests osseux, ils ne sont pas fiables : des experts britanniques en anthropologie biologique estiment que 50 % des garçons ont un squelette d'adulte à 16 ans tandis qu'un sur cinq n'est pas encore arrivé à la maturité sur le plan osseux à l'âge de 18 ans. Comment s'appuyer sur des données aussi aléatoires ? Il faut en finir avec une pratique injuste, indigne, inhumaine et coûteuse.

Nous votions pour, nous sommes devenus contre, si nos amendements ne sont pas adoptés. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Mme Claire-Lise Campion .  - S'il n'est nullement question de remettre en cause les principes et l'équilibre de la loi de juillet 1989 complétée par celle du 5 mars 2007, la rapporteure Michèle Meunier nous propose de tirer les conséquences de leur application, d'en corriger les imperfections et dysfonctionnements, tout en apportant des réponses à de nouvelles problématiques.

Le texte initial a été étoffé et comporte désormais une cinquantaine d'articles. Il renferme des évolutions, ô combien attendues par les départements, les associations, les travailleurs sociaux, les juges et les médecins, les familles, sans oublier les enfants eux-mêmes. Il rencontre donc un accueil très favorable.

Pourquoi ce consensus ? Parce qu'il s'attaque aux trop grandes disparités territoriales, en améliorant le pilotage par les départements, tout en plaçant l'enfant au coeur du dispositif. Il devient l'acteur central : il sera associé à l'élaboration de son projet. La place des personnes qui s'impliquent auprès de lui est reconnue. Autre avancée, l'introduction de l'inceste dans le code pénal, très attendue, par les victimes en particulier.

Deux désaccords chroniques subsistent. La création du Conseil national passe auprès de certains de nos collègues pour inutile.

II s'agit pourtant d'une avancée essentielle qui répond à la demande des professionnels de disposer d'une instance pluridisciplinaire, où les services de la justice, des départements, de pédopsychiatrie, les maisons des adolescents, puissent se mettre autour d'une table et discuter de leurs pratiques afin de se coordonner et d'accorder leurs méthodes de travail.

On fait grief à la création du conseil national de porter atteinte au principe de libre administration des départements ! Cette interprétation est erronée et l'ensemble de nos collègues de l'Assemblée nationale ne s'y sont pas mépris. Puissions-nous les imiter ! Je défendrai au nom de mon groupe un amendement pour rétablir la création de cette institution, véritable pilier de la proposition de loi.

Le second point d'achoppement, objet de profonds désaccords, concerne le versement de l'allocation de rentrée scolaire lorsqu'un enfant est confié à l'aide sociale à l'enfance. Cette innovation a pour objet d'accompagner les jeunes majeurs vers l'autonomie.

Elle est aussi malheureusement repoussée par notre commission des affaires sociales. Je vous proposerai de la réintroduire par amendement.

Ce texte donne un cadre, des repères, propose des solutions pragmatiques : le parcours de l'enfant sera davantage sécurisé, ses conditions d'existence améliorées. La loi du 4 mars 2007 s'en trouvera confortée.

Je salue à nouveau le travail de notre collègue rapporteure Michèle Meunier, qui n'a pas ménagé ses efforts et qui nous donne l'occasion de voter une loi au service de la cause de l'enfant. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Vous regrettez, madame Doineau, un manque de travail avec les départements ? Depuis décembre 2014, une réunion par trimestre s'est tenue avec les exécutifs départementaux et une réunion mensuelle avec les cadres techniques - qui ont rassemblé des départements de toutes couleurs politiques, de droite comme de gauche Votre département, il est vrai, n'a été représenté à aucune d'entre elles...

Sur la qualité de l'accueil des mineurs isolés étrangers en France par les services de l'aide sociale à l'enfance, nos enquêtes évaluent, car heureusement, il n'y a pas de fichiers spécifiques, qu'ils représentent 10 % des enfants. Tous sont bien accueillis, et accueillis comme tous les autres enfants confiés à l'ASE.

Ce texte améliore leur situation en mettant en oeuvre l'indispensable solidarité entre les départements.

La séance est suspendue à 20 h 20.

présidence de M. Jean-Pierre Caffet, vice-président

La séance reprend à 21 h 50.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Il est institué auprès du Premier ministre un Conseil national de la protection de l'enfance, chargé de proposer au Gouvernement les orientations nationales de la politique de protection de l'enfance, de formuler des avis sur toute question s'y rattachant et d'en évaluer la mise en oeuvre. Ce conseil promeut la convergence des politiques menées au niveau local, dans le respect de la libre administration des collectivités territoriales. Ses missions, sa composition et ses modalités de fonctionnement sont définies par décret. »

Mme Claire-Lise Campion.  - Le CNPE sera facteur de plus grande cohérence et de meilleure coordination. Il existe une trop grande hétérogénéité entre départements, sa création est par conséquent indispensable. Les Oned ont, eux, une mission très différente, l'amélioration des connaissances sur la mise en danger et la protection des mineurs.

M. le président.  - Amendement identique n°15, présenté par le Gouvernement.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Défendu excellemment par Mme Campion !

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - La commission a émis un avis défavorable, le Sénat ayant adopté une position différente lors des lectures précédentes. Le CNPE porterait atteinte à la libre administration des départements.

M. Daniel Chasseing.  - La loi de 2007 a bien structuré la protection de l'enfance, confiée au département. Les cellules départementales de recueil et de traitement des informations ont été alors rationalisées, et placées sous la responsabilité des présidents de conseil général. Je veux féliciter le personnel de l'ASE et des centres départementaux de l'enfance pour tout le travail d'adaptation accompli. Nous manquons surtout de pédopsychiatres, mais la proposition de loi n'en dit rien.

Les observatoires départementaux suivent la mise en oeuvre des schémas départementaux. Ils formulent des propositions, établissent des statistiques, transmises au niveau de l'État via les préfets : pourquoi créer une structure supplémentaire ?

M. Jean-Marie Morisset.  - Les départements sont nombreux à ne pas comprendre cette proposition. Ce dont les élus et acteurs de terrain ont besoin, nous le savons, c'est de moyens ! Faisons confiance aux départements, qui organisent, et aux préfets, qui coordonnent les services de la protection judiciaire de la jeunesse et de l'éducation nationale pour améliorer l'action menée sur le terrain. Je voterai contre l'amendement.

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos7 et 15 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°158 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 158
Contre 184

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article premier n'est pas adopté.

L'article 2 est adopté.

L'article 2 ter demeure supprimé.

ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

ou, à défaut, un professionnel de santé

Mme Claire-Lise Campion.  - Il est important que l'information circule mieux. Or l'échange est plus difficile lorsqu'un médecin n'intervient pas dans le circuit d'information.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - La commission a vu dans cet amendement une volonté de recruter davantage de médecins, d'où son avis défavorable. Or il s'agit seulement de coordination. Avis favorable à titre personnel...

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Avis favorable.

M. Philippe Mouiller.  - Il faut pouvoir trouver dans chaque département un médecin référent dans une PMI. Ce n'est pas toujours facile.

M. Daniel Chasseing.  - Dans certains départements, les médecins ne font que des vacations. Un référent est utile pour la communication de certaines informations, qu'il soit ou non médecin.

Mme Élisabeth Doineau.  - Lorsque le référent ne peut être un médecin de PMI, il est utile de faire appel à un autre professionnel de santé, principe de réalité oblige !

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°11 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°159 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 323
Pour l'adoption 119
Contre 204

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 4, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

L'article 5 ABA est adopté, de même que les articles 5 B, 5 EA et 5 EB.

ARTICLE 5 ED

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  Le chapitre III du titre IV du livre V du code de la sécurité sociale est complété par un article L. 543-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 543-3.  -  L'allocation mentionnée à l'article L. 543-1 ou l'allocation différentielle mentionnée à l'article L. 543-2 due au titre d'un enfant confié en application des 3° ou 5° de l'article 375-3 du code civil ou en application de l'article 375-5 du même code est versée à la Caisse des dépôts et consignations, qui en assure la gestion jusqu'à la majorité de l'enfant ou, le cas échéant, jusqu'à son émancipation. À cette date, le pécule est attribué et versé à l'enfant.

« Pour l'application de la condition de ressources, la situation de la famille continue d'être appréciée en tenant compte à la fois des enfants présents au foyer et du ou des enfants confiés au service de l'aide sociale à l'enfance.

« La ou les sommes indûment versées à la Caisse des dépôts et consignations sont restituées par cette dernière à l'organisme débiteur des prestations familiales. »

II.  -  À la fin du 10° de l'article 11 de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales, la référence : « et L. 543-2 » sont remplacés par les références : « , L. 543-2 et L. 543-3 ».

III.  -  Le présent article est applicable à l'allocation de rentrée scolaire due à compter de la rentrée scolaire 2016.

Mme Claire-Lise Campion.  - Le versement de l'allocation de rentrée scolaire sur un compte bloqué géré par la Caisse des dépôts et consignations, pour que le jeune reçoive une somme à sa majorité, est une mesure innovante et un signal fort pour accompagner les intéressés vers l'autonomie.

M. le président.  - Amendement identique n°16, présenté par le Gouvernement.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Défendu.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable de la commission.

M. Jean-Marie Morisset.  - Je comprends l'intention du Gouvernement, mais ce n'est pas la vocation de l'allocation de rentrée scolaire que d'alimenter un compte d'épargne. De plus, il est question d'en confier la gestion à la Caisse des dépôts et consignations : est-ce raisonnable ? Tel jeune dépend de l'ASE dès l'âge de deux ans, tel autre à dix-sept ans : je plains les services de la CDC qui auront à gérer ce fonds ! Verser ces sommes aux services d'aide sociale à l'enfance serait plus utile.

Mme Élisabeth Doineau.  - Je ne suis pas non plus hostile au principe du pécule, mais il vaudrait mieux octroyer la même somme à chaque jeune et en confier la gestion aux départements. Pouvons-nous être favorables à un tel principe de Robin des bois ?

Mme Evelyne Yonnet.  - La comparaison est douteuse : Robin des bois volait...

Je trouve l'idée bonne et voterai cet amendement. Un petit pécule, surtout quand on sort de l'ASE, c'est un coup de pouce qui n'est pas à négliger.

Mme Nicole Bricq.  - L'allocation de rentrée scolaire, d'abord exceptionnelle, a été pérennisée et inscrite au budget de l'État. Pourquoi confier aux départements cette somme versée à l'enfant par l'État ? Il est normal que la CDC en soit chargée, car c'est son métier, précisément, de gérer les consignations. Ne vous inquiétez pas pour elle, elle sait faire et gère des fonds autrement plus importants. Cette mesure reprend ce que d'autres, la Grande-Bretagne en particulier, font depuis longtemps.

M. Philippe Mouiller.  - Eh bien assumez-le ! Vous détournez une allocation destinée à couvrir des dépenses scolaires, au détriment des départements qui devront compenser. Et vous ne prenez même pas le temps d'en changer le nom !

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos8 et 16 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°160 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 322
Pour l'adoption 120
Contre 202

Le Sénat n'a pas adopté.

À la demande du groupe Les Républicains, l'article 5 ED est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°161 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 322
Pour l'adoption 202
Contre 120

Le Sénat a adopté.

ARTICLE 6

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  - Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 223-1-2.  -  Lorsque l'enfant pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance est confié à une personne physique ou morale, une liste des actes usuels de l'autorité parentale que cette personne ne peut pas accomplir au nom de ce service sans lui en référer préalablement est annexée au projet pour l'enfant.

II.  -  Alinéa 3

Supprimer les mots :

, en fonction de leur importance.

Mme Claire-Lise Campion.  - Prévoir une liste indicative d'actes usuels que la personne physique ou morale qui accueille l'enfant peut exercer au nom de l'ASE irait à l'encontre de l'objectif recherché, qui est de faciliter la prise en charge quotidienne. Prévoyons plutôt une liste des actes qui ne peuvent pas être accomplis sans en référer au service.

Nous supprimons aussi les termes « en fonction de leur importance », trop subjectifs et qui créent au sein des actes usuels une hiérarchie qui n'a pas lieu d'être.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable de la commission. Je le regrette à titre personnel.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Avis favorable.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°12 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°162 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l'adoption 155
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 6 est adopté, de même que les articles 6 bis et 6 quater.

ARTICLE 7 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Avant le dernier alinéa de l'article L. 223-1 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le président du conseil départemental met en place une commission pluridisciplinaire et pluri-institutionnelle chargée d'examiner, sur la base des rapports prévus à l'article L. 223-5, la situation des enfants confiés à l'aide sociale à l'enfance depuis plus d'un an lorsqu'il existe un risque de délaissement parental ou lorsque le statut juridique de l'enfant paraît inadapté à ses besoins. La commission examine tous les six mois la situation des enfants de moins de deux ans. Sont associés à l'examen de la situation de l'enfant son référent éducatif et la personne physique qui l'accueille ou l'accompagne au quotidien. La commission peut formuler un avis au président du conseil départemental sur le projet pour l'enfant mentionné à l'article L. 223-1-1. Cet avis est remis à chacune des personnes morales ou physiques auxquelles le projet pour l'enfant est remis et au juge, lorsque celui-ci est saisi. Les membres de cette commission sont soumis au secret professionnel, selon les modalités prévues aux articles L. 221-6 et L. 226-2-2. Sa composition et son fonctionnement sont fixés par décret. »

Mme Claire-Lise Campion.  - Cet amendement vise à rétablir l'article 7, qui créait une commission pluridisciplinaire, très utile pour diffuser les bonnes pratiques, car celles-ci ne sont pas suivies dans tous les départements.

M. le président.  - Amendement identique n°17, présenté par le Gouvernement.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Défendu.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable de la commission. Je vous rappellerai tout de même - n'y voyez pas malice - que la disposition, qui figurait dans le rapport sur le texte initial, avait été adoptée à l'unanimité...

M. Jean-Marie Morisset.  - Encore une commission pluridisciplinaire ! Je ne vous citerai pas toutes celles qui existent déjà dans les départements. Favorisons les bonnes pratiques, oui, mais 30 % des départements ne satisfont pas à l'obligation d'émettre des projets personnalisés de l'enfant... que cette nouvelle commission aurait pour mission d'évaluer ! Les départements ont déjà de bonnes pratiques et des équipes pluridisciplinaires : faisons-leur confiance.

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos9 et 17 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°163 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 154
Contre 188

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 7 demeure supprimé.

L'article 15 est adopté, de même que les articles 16 et 18.

ARTICLE 21 TER

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 388 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'évaluation tendant à la détermination de la minorité ne peut être effectuée à partir de données radiologiques de maturité osseuse ou à partir du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires. »

Mme Laurence Cohen.  - Protéger les mineurs étrangers isolés est indispensable : selon Europol, 10 000 enfants et jeunes non accompagnés ont disparu ces vingt-quatre derniers mois en Europe.

Les tests osseux ne sont pas fiables, les études le démontrent, pour déterminer l'âge des mineurs, ils n'attestent que l'étape du développement physiologique. Un appel à l'abandon de ces tests a été signé par 13 500 personnalités, magistrats, médecins, intellectuels ainsi que des parlementaires écologistes, communistes et socialistes, mais aussi par le président de la commission des affaires sociales Alain Milon. L'Académie de médecine et le Conseil national d'éthique ont également exprimé des réticences, voire une opposition. Cette pratique non fiable nuit à l'état psychologique de ces jeunes déjà fragilisés.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - La commission est défavorable aux amendements nos3, 13, 1 rectifié ter et 2.

Cette méthode n'est en effet pas fiable sur le plan scientifique ; la marge d'erreur se situe entre 12 et 18 mois et il n'est guère admissible que le destin du jeune soit scellé sur la base de tels tests - prise en charge par l'ASE ou reconduite à la frontière. Il n'existe toutefois aucune méthode alternative. L'article 21 encadre la procédure : les tests ne pourront être réalisés que sur décision judiciaire, avec l'accord de l'intéressé et ils ne feront que contribuer à un faisceau d'indices pour déterminer l'âge du mineur. Cette position est conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme et c'est une avancée par rapport au droit existant.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Même avis défavorable, pour les mêmes raisons.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je voterai contre l'amendement, sachant que 10 000 enfants ont disparu sur les routes de l'exil ces deux dernières années. Toutes les autorités scientifiques reconnaissent que cette méthode est fondée sur des données des années trente, qui ne sont pas applicables aux populations aujourd'hui concernées. La marge d'erreur n'est pas de 18 mois mais de trois ans... La Cour de cassation a recommandé d'abandonner le recours à de tels tests. Que se passera-t-il si l'intéressé refuse de s'y soumettre ? Ce sera une présomption de majorité ! Encadrer est encore trop, puisque cela laisse supposer que ces tests ont un semblant de fiabilité.

Mme Aline Archimbaud.  - Les tests osseux n'étaient jusqu'alors pas mentionnés dans la loi, mais uniquement dans des circulaires. Ils sont unanimement considérés comme scientifiquement non fiables. Le Haut Conseil de la santé publique, le 23 janvier 2014, s'est insurgé contre cette pratique : la maturité physiologique dépend du sexe, de l'origine, du patrimoine génétique... L'Ordre national des médecins demande lui aussi que ces tests soient bannis. Refusons de leur donner valeur législative.

M. Daniel Chasseing.  - L'accord de l'intéressé est nécessaire, le test fera partie d'un faisceau d'indices et le doute profitera toujours à l'intéressé. Cependant, la médecine n'est pas toujours une science exacte : je m'abstiendrai.

M. Philippe Mouiller.  - Le texte est de compromis et la procédure sécurisée. Les garanties apportées nous satisfont. Le groupe Les Républicains votera contre, à l'exception de MM. Chasseing et Milon.

Mme Evelyne Yonnet.  - Je présenterai un amendement analogue avec M. Leconte. Le Comité des droits de l'enfant des Nations Unies a pris une position claire, dont je pensais qu'elle pousserait au consensus ce soir.

M. Altrad, bédouin né dans le désert, ignorant de sa date de naissance, est aujourd'hui la 54e fortune de France. Faut-il lui faire subir un test osseux ?

Mme Laurence Cohen.  - Qui peut croire que l'enfant, mis sous pression, en état de sidération, consentira librement au test ? Cet article ne sert qu'à se donner bonne conscience.

À la demande de la commission, l'amendement n°3 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°164 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l'adoption 42
Contre 299

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

I.  -  Alinéas 2 à 4

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« L'évaluation tendant à la détermination de la minorité ne peut être effectuée à partir de données radiologiques de maturité osseuse ou dentaire ou à partir du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires. »

II.  -  Alinéas 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

Mme Aline Archimbaud.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié ter, présenté par M. Leconte, Mme Yonnet, MM. Marie, Yung et Kaltenbach, Mmes Lienemann et Khiari, M. Courteau, Mmes Lepage, Cartron et D. Michel, M. Bigot et Mme Jourda.

I.  -  Alinéas 2 et 3

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« L'évaluation tendant à la détermination de la minorité ne peut être effectuée à partir de données radiologiques de maturité osseuse.

II.  -  Alinéas 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

M. Jean-Yves Leconte.  - Défendu.

L'amendement n°2 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

de l'autorité judiciaire

par les mots :

du juge des enfants

Mme Aline Archimbaud.  - Amendement de repli pour que les tests osseux ne puissent être réalisés que sur décision d'un juge des enfants.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

Mme Laurence Cohen.  - La commission des affaires sociales a institué un comité d'éthique départementale chargé de statuer sur la majorité ou la minorité des jeunes, ce qui ne garantit pas à nos yeux l'indépendance des décisions. Nous sommes en outre opposés à l'accès au fichier automatisé de données à caractère personnel Visabio. Ce fichier enregistre les données personnelles, notamment biométriques, des demandeurs de visa pour la France. Sa consultation permet de savoir si une personne a déjà sollicité un visa sous une autre identité ; de vérifier lors du passage de la frontière l'authenticité du visa et l'identité de son détenteur et, lors des contrôles d'identité en France, l'identité de la personne et la régularité de son séjour.

Les données ne sont aujourd'hui accessibles qu'aux agents des consulats et des préfectures qui instruisent les demandes de visa, aux services en charge des contrôles aux frontières, aux officiers de police judiciaire et aux agents chargés de la lutte anti-terroriste. Nous sommes bien éloignés de la philosophie de la proposition de loi... Une ligne rouge est franchie.

M. le président.  - Amendement identique n°10, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain.

Mme Claire-Lise Campion.  - Mêmes arguments, à quoi s'ajoute que la décision relève de l'autorité judiciaire et que le comité d'éthique serait pour les départements une charge supplémentaire à l'utilité douteuse.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable aux amendements nos1 rectifié ter et 13. Même avis sur l'amendement n°14 et sur les amendements identiques nos4 et 10.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Favorable aux amendements identiques nos4 et 10, défavorable aux autres.

L'amendement n°13 est retiré.

L'amendement n°1 rectifié ter est retiré.

L'amendement n°14 est adopté.

À la demande du groupe Les Républicains, les amendements identiques nos4 et 10 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°165 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 154
Contre 188

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les mineurs isolés et les familles comprenant un ou plusieurs enfants mineurs ne peuvent être placés en rétention par l'autorité administrative. Cette prohibition ne souffre d'aucune exception. »

M. Dominique Watrin.  - Nous demandons l'application du droit qui interdit le placement des mineurs en Centre de rétention administrative (CRA). La France a déjà été condamnée par la CEDH en 2012 : combien de temps cette situation va-t-elle durer ?

Le Défenseur des droits nous a alertés ainsi que la CNCDH, 60 professeurs de droit, des associations... Le tribunal administratif de Lille se prononcera bientôt, saisi par le Secours catholique et Médecins du monde d'un recours. Les associations sont contraintes de saisir le juge en référé pour obtenir la nomination d'un administrateur ad hoc, de sorte que les droits des mineurs soient effectifs, notamment de ceux qui veulent rejoindre le Royaume-Uni au titre du regroupement familial. Nous demandons seulement que la loi soit appliquée.

La première étape serait la suppression des tests osseux.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - En deuxième lecture, la commission des affaires sociales avait demandé l'avis du Gouvernement, la ministre nous avait répondu que le placement en rétention était très exceptionnel - le Sénat avait alors rejeté l'amendement. Une proposition similaire a été faite lors de l'examen du texte sur le droit des étrangers. Avis défavorable.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Même avis.

M. Jean-Yves Leconte.  - Être en situation irrégulière n'est pas un délit, le placement en rétention, qui est privatif de liberté, est préalable à l'éloignement. Le placement en rétention de mineurs qui ne sont pas responsables de leur situation est une facilité, un traumatisme qui n'est pas acceptable. Il faut privilégier l'assignation à résidence.

Mme Evelyne Yonnet.  - Je voterai l'amendement.

Mme Aline Archimbaud.  - Même position.

M. Dominique Watrin.  - On peut douter que ces mesures soient exceptionnelles... L'amendement appelle l'État à prendre ses responsabilités. L'État français a été condamné pour traitement inhumain et dégradant. Je suis élu du Pas-de-Calais... Dans la « jungle », près de deux cents enfants vivent dans l'humidité, le froid, la boue, des conditions d'hygiène inacceptables... L'État ne prend même pas la peine de les recenser, les laissant en proie aux rackets et aux trafiquants. Il doit prendre ses responsabilités.

À la demande de la commission, l'amendement n°5 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°166 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 30
Contre 312

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Je mets aux voix l'article 21 ter.

Mme Claire-Lise Campion.  - Les tests osseux manquent de fiabilité, comme les autres méthodes. L'article 21 ter les encadre strictement, ces six conditions - décision du juge, absence de document d'identité valable, âge manifestement invraisemblable, accord de l'intéressé, maintien de la marge d'erreur, test non exclusif - sont essentielles ; et le doute profite à l'intéressé. C'est la méthode la moins approximative, les droits de la personne sont respectés et les départements ne sont pas laissés seuls face à ces situations.

M. Philippe Mouiller.  - Le groupe Les Républicains votera pour, malgré le vote de l'amendement n°14 : les juges pour enfants sont déjà débordés, les imposer dans la procédure n'est pas soutenable. Les délais vont s'allonger...

Mme Laurence Cohen.  - Ces tests ne figuraient pas dans la loi, ce sera chose faite. Je ne comprends pas cette obstination. Mme Campion essaye de justifier l'injustifiable - nous avons un dialogue de sourds. Je déplore que le Sénat s'apprête à voter l'introduction dans la loi des tests unanimement rejetés par la communauté scientifique.

À la demande de la commission, l'article 21 ter est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°167 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l'adoption 310
Contre 30

Le Sénat a adopté.

L'article 22 est adopté, de même que les articles 22 bis et 22 quater A.

ARTICLE 22 QUATER

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié bis, présenté par Mme Giudicelli, MM. Mouiller, Leleux, Savin, Longuet, Paul et Raison, Mme Hummel, MM. Dériot et Doligé, Mme Duchêne, M. G. Bailly, Mme Cayeux, MM. Charon, Lefèvre et Kennel, Mme Lamure, MM. Mayet, Chaize, Chasseing, Bouchet et Milon, Mme Troendlé, MM. Reichardt et Danesi, Mme Micouleau, MM. Cardoux, Laufoaulu et Vasselle et Mme Deromedi.

Alinéa 2, deuxième phrase

Remplacer les mots :

fixe les objectifs de répartition proportionnée des accueils de ces mineurs entre les départements

par les mots :

détermine annuellement avec chaque département la capacité réelle d'accueil de ces mineurs

M. Philippe Mouiller.  - L'année 2015 a été marquée par un afflux sans précédent de migrants dans notre pays. Cette situation est intenable pour les départements, qui endossent une lourde charge alors que l'accueil des migrants, et notamment des mineurs isolés étrangers, relève d'une politique de maîtrise des flux migratoires incombant à l'État.

Chargés de veiller à l'intérêt supérieur des enfants recueillis sur leur territoire ou qui leur sont confiés par la justice, les présidents de conseils départementaux voient leur responsabilité engagée, faute de disposer de capacités d'accueil suffisantes.

Il est indispensable que la capacité réelle et contradictoire des structures d'aide sociale à l'enfance accueillant les mineurs, étrangers ou non, soit prise en compte. Nous allons dans ce sens avec cet amendement.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Favorable.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - Défavorable.

M. Jean-Marie Morisset.  - Les présidents des départements, madame la ministre, ne vous ont certainement pas donné leur accord pour que leur soient fixés des objectifs d'accueil de mineurs isolés étrangers. Les départements n'ont pas attendu l'État pour assurer leurs missions. Dans certains d'entre eux, le juge prononce beaucoup de mesures de placement, qu'ils sont contraints de prendre en compte. Les retards d'exécution s'accumulent... Il y a de quoi coopérer plutôt que d'imposer.

M. Jean-Yves Leconte.  - La répartition des charges n'est pas prévisible, comme pour l'application de la Convention de Genève : il faut répartir en fonction des besoins de protection, non fixer des quotas.

M. Jean Desessard.  - Très bonne intervention !

M. Dominique Watrin.  - Avec cet amendement, vous exonérez les départements qui ne voudraient pas s'engager ; c'est le contraire de la solidarité, nationale ou interdépartementale. Certains départements, dont la situation est spécifique ont absolument besoin de cette solidarité. Dans le Pas-de-Calais, l'an passé, 1 540 jeunes ont été hébergés en urgence -  85 % sont retournés dans la « jungle ». Nous avons dû nous adapter à cette population migrante en transit, nous négocions avec la préfecture pour trouver des lieux d'accueil, à Saint-Omer par exemple, mais il faut aussi viser l'accompagnement à plus long terme pour ceux qui choisissent de faire leur vie en France. Quelque 300 jeunes refusent les foyers de l'ASE... Bien sûr, tout cela a un coût... La solidarité nationale, pour la répartition, est nécessaire. Nous voterons contre cet amendement.

Mme Aline Archimbaud.  - Nous voterons contre, parce que le principe de réalité l'impose. Des départements sont asphyxiés, le Pas-de-Calais mais aussi la Seine-Saint-Denis à cause de la proximité de l'aéroport de Roissy. On ne peut plaider pour un accueil correct de ces jeunes et refuser d'organiser la solidarité entre les territoires. On ne peut laisser les départements seuls. La situation est humainement insupportable.

M. Daniel Chasseing.  - Souvent les départements les plus pauvres sont les plus solidaires... Cet amendement ne parle que d'évaluer les capacités d'accueil, il s'agit seulement de prendre en compte la réalité, pas de contester la nécessité de la solidarité.

Mme Laurence Rossignol, ministre.  - La circulaire Taubira déférée par quelques départements a été annulée, non sur le fond mais pour défaut de base légale : cet article y supplée.

Le volontariat, que suggère l'amendement, ce n'est pas la solidarité nationale ni la péréquation que nous voulons. Cette disposition a été discutée avec l'ADF ; les départements qui demandent une base légale sont plus nombreux que ceux qui n'en veulent pas...

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°6 rectifié bis est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°168 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 188
Contre 154

Le Sénat a adopté.

L'article 22 quater, modifié, est adopté.

Interventions sur l'ensemble

Mme Claire-Lise Campion .  - Il fallait ajuster la loi de 2007. Ce texte apporte des avancées, mais nous regrettons que la protection de l'intérêt des enfants ait parfois été reléguée au second plan. Nous nous abstiendrons à regret.

Mme Laurence Cohen .  - Nous sommes déçus par les résultats du travail parlementaire. La majorité a rejeté le CNPE, rompu avec le dernier amendement avec le principe de solidarité. Elle a refusé d'interdire le placement des mineurs en centre de rétention administrative et inscrit les tests osseux dans la loi. Nous n'y retrouvons pas le rapport de Mmes Dini et Meunier. Leur proposition de loi a été dénaturée. Nous voterons contre.

Mme Aline Archimbaud .  - L'équilibre du texte a été bousculé. Nous voterons contre également.

M. Guillaume Arnell .  - Nous aspirions à plus de consensus. Nous sommes contraints de revoir notre position...

M. Philippe Mouiller .  - Nous voterons pour grâce aux amendements adoptés.

Mme Élisabeth Doineau .  - La majorité du groupe UDI-UC votera pour.

Mme Michelle Meunier, rapporteure .  - Le texte ne restera pas à mes yeux la meilleure des trois lectures de ce texte. Je regrette que des clivages nous aient parfois éloignés de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Maintenant, madame le ministre, je vous confie ce beau bébé que j'appellerai Eléa, le prénom de ma petite fille qui vient tout juste de naître. (Sourires)

À la demande du groupe Les Républicains, l'ensemble du texte est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°169 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 215
Pour l'adoption 187
Contre 28

Le Sénat a adopté.

Mme Laurence Rossignol, ministre de la famille, de l'enfance et des droits des femmes .  - Je veux remercier à nouveau Mmes Meunier et Dini, non seulement pour l'élaboration de cette proposition de loi, mais aussi pour le rapport d'information, qui a servi de base à ce texte, pour les analyses et diagnostic qu'il contenait et qui nous ont inspirés. Mme Dini et moi-même avons mené de nombreux combats ensemble lorsque nous siégions sur ces bancs ; je doute qu'elle aurait voté certains des amendements votés par le Sénat ce soir, qui donnent au texte une coloration particulière, en tout cas différente de l'état d'esprit de la proposition initiale.

Je continuerai le travail entamé avec les départements pour les accompagner dans la mise en oeuvre de la loi. Mon ministère n'est pas la tutelle, mais le partenaire des départements.

Ce texte est conforme à l'esprit de la loi de 2007. Je forme le voeu que la politique de protection de l'enfant gagne en efficacité conformément à nos valeurs. Je remercie le Sénat.

Madame Meunier, vous êtes plusieurs fois grand-mère ce soir : d'une petite-fille, à qui nous souhaitons la bienvenue dans ce monde, et de ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

La séance est suspendue de 23 h 55 à minuit.

Expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée (CMP - Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée.

Mme Anne Emery-Dumas .  - La proposition de loi d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée arrive aujourd'hui au terme de son parcours législatif, qui fut exemplaire : son élaboration, à l'initiative du monde associatif, a fait l'objet d'une vaste concertation ; son examen parlementaire l'a enrichi en tenant compte des besoins des territoires.

Déposée le 22 juillet 2015 à l'initiative des membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, elle a été adoptée par l'Assemblée nationale le 9 décembre dernier ; je veux notamment saluer le travail de Laurent Grandguillaume, député, rapporteur. La commission des affaires sociales a travaillé avec diligence ; le Sénat s'est prononcé à la quasi-unanimité en sa faveur, après avoir adopté vingt-cinq amendements ; les débats en commission et en séance ont été exemplaires.

La commission mixte paritaire, qui s'est réunie le 2 février, s'est déroulée sous les meilleurs auspices, en plein accord avec le rapporteur de l'Assemblée nationale, si bien que le texte final a été adopté à l'unanimité de ses membres, puis par l'Assemblée, mercredi 10 février dernier.

Le texte est innovant en ce qu'il autorise des entreprises relevant de l'économie sociale et solidaire, conventionnées par un fonds national spécifique, à embaucher en contrat à durée indéterminée des demandeurs d'emploi de longue durée, rémunérés au moins au Smic, pour réaliser des activités pérennes répondant à des besoins sociaux locaux non satisfaits, avec pour objectif de les rendre solvables grâce à une réallocation des dépenses publiques d'indemnisation ou de solidarité dont auraient bénéficié les personnes ainsi recrutées.

La CMP a confirmé l'ensemble des modifications apportées par le Sénat : ouverture du dispositif aux personnes démissionnaires et à celles ayant conclu une rupture conventionnelle, renforcement du volet relatif à l'évaluation de l'expérimentation et modifications de cohérence afin d'améliorer la lisibilité du texte.

La CMP a également permis quelques avancées : extension du dispositif aux personnes au chômage depuis plus de douze mois à la suite d'une formation ou de la fin d'une activité non salariée, dégressivité de l'aide versée par le fonds aux entreprises en fonction de l'évolution de leur situation économique, bilan de l'expérimentation au plus tard dix-huit mois avant son terme.

Surtout, la CMP a confirmé le caractère volontaire de la participation financière des collectivités territoriales, qui avait fait l'objet d'un long débat dans notre hémicycle. Cette expérimentation se déroulera dans dix territoires, et je ne doute pas qu'il y aura bien plus de candidats que d'élus. Il appartiendra à l'État, comme la ministre s'y est d'ailleurs engagée, d'assurer l'amorçage de ce dispositif.

Cette proposition de loi rompt avec les politiques de l'emploi menées depuis maintenant quarante ans par les gouvernements successifs qui ont cherché à enrayer l'inexorable hausse du chômage.

Je vous invite à l'approuver définitivement afin que ses dispositions d'application soient publiées dans les meilleurs délais. (Applaudissements)

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage .  - Nous abordons la dernière étape législative de ce texte : la ministre et moi nous en réjouissons. Le travail collectif mené ces dernières semaines entre les deux assemblées a permis de rassembler toutes nos forces politiques autour de la première préoccupation des Français : l'emploi.

Le texte innove, cherche des solutions, et s'appuie sur le terrain. En cela, il renforce les mesures annoncées par le président de la République en début d'année : 500 000 formations supplémentaires pour les demandeurs d'emploi, aide à l'embauche pour les PME - 16 000 dossiers ont déjà été déposés...

Les travaux menés en commission des affaires sociales ont enrichi le texte, en élargissant le dispositif et en affinant son mode d'évaluation.

Grâce à votre travail, cette belle idée entrera bientôt en application, permettant aux collectivités territoriales d'accompagner le travail mené sur le terrain par les associations, les bénévoles, tous les acteurs locaux qui luttent pour l'emploi sur nos territoires.

Autre moteur de ce texte : le souhait de renforcer la cohésion sociale, d'intégrer les personnes concernées. Le travail n'est pas terminé ; l'adoption de ce texte ce soir, ne fera qu'ouvrir une nouvelle étape. Je souhaite que parmi les territoires qui s'engagent dans cette expérimentation figurent les quartiers prioritaires de la politique de la ville, mais aussi des zones de revitalisation rurale.

Merci à tous pour votre travail. Vous avez été le dernier maillon d'une longue chaîne, partie des associations. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Desessard .  - Cette proposition de loi apporte une réflexion nouvelle, une conception innovante des politiques publiques de lutte contre le chômage, préférant le concret à la remise en cause du coût du travail ou de la prétendue rigidité du code du travail.

Elle procède en effet du double constat d'ATD Quart-Monde, selon lequel de nombreux postes ne sont pas pourvus dans le secteur non concurrentiel, alors même qu'ils sont créateurs de valeur d'usage, et que le chômage coûte cher -  15 000 à 17 000 euros par an, par chômeur  - à la collectivité.

Pour y remédier, Laurent Grandguillaume a proposé, avec le soutien d'ATD Quart-Monde cette expérimentation au plus près des besoins des territoires. Vous en connaissez le principe. Elle a un triple intérêt : pour les chômeurs de longue durée, retrouver un emploi stable puisqu'en CDI ; pour les territoires, satisfaire des emplois non pourvus ; pour la société, transformer des dépenses passives en investissements utiles.

La méthode de mise en oeuvre est la bonne : l'expérimentation. Les dix territoires volontaires accumuleront suffisamment d'expérience pour ensuite songer à une généralisation du dispositif, après évaluation à 18 mois de la fin de l'expérimentation.

Preuve du caractère transpartisan de la proposition de loi, la commission mixte paritaire est rapidement parvenue à un accord. Merci, madame la rapporteure, pour vos modifications, dont je me réjouis qu'elles aient été conservées dans le texte. Votre amendement est bienvenu qui intègre notamment les personnes ayant fait l'objet d'une rupture conventionnelle - licenciement déguisé, souvent - dans le dispositif.

Le groupe écologiste votera ce texte qui redonne une chance de travailler aux exclus, dynamise les territoires en créant de nouveaux services et réduit le cout de la précarité pour toute la collectivité. (Applaudissements)

M. Guillaume Arnell .  - Cette proposition de loi d'expérimentation territoriale arrive au terme de la navette. Si nous confirmons le vote de la CMP, nous donnerons vie et force de loi à ce beau projet innovant, né d'une expérience de terrain. Soyons le rempart à tous les doutes exprimés à l'égard de l'action publique, à ceux qui n'ont d'autre programme que la désespérance ! Envoyons un signal positif aux acteurs de l'économie sociale et solidaire !

L'initiative d'ATD-Quart Monde est née d'un postulat simple : si les emplois manquent, le travail, lui, ne manque pas. En 1995, une expérience menée dans le Maine-et-Loire a montré qu'il y avait adéquation entre les compétences des chômeurs de longue durée et les besoins locaux. Ce texte propose enfin une solution concrète pour les rapprocher.

Avec ce texte, nous montrons notre solidarité face à un objectif commun : offrir des perspectives d'avenir aux personnes, encore trop nombreuses, qui subissent durement avec leurs proches le drame du chômage de longue durée.

Quelques regrets toutefois : nous aurions pu autoriser l'expérimentation dans plus de dix territoires : pourquoi pas vingt ou trente ? Nous aurions pu aussi raccourcir sa durée, pour gagner des mois précieux vers une mise en oeuvre généralisée, au bénéfice des chômeurs de longue durée.

Dommage ; le bicamérisme, qui a une fois de plus prouvé tout son intérêt, grâce à l'apport de la Haute Assemblée, a néanmoins permis d'ouvrir le mécanisme à davantage de bénéficiaires, ce qui est très opportun. La présence au conseil d'administration du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée de l'association Alliance Villes emploi est un autre apport notable et utile.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDSE votera le texte de la CMP à l'unanimité. Je forme le voeu que tous les partenaires se mobilisent pour la pleine réussite de ce projet et pour faire reculer durablement le chômage de longue durée. (Applaudissements)

M. Philippe Mouiller .  - Cette proposition de loi rencontre un large consensus. Entendons-nous bien : le vote du groupe Les Républicains en sa faveur ne vaut approbation de la politique menée par le Gouvernement, alors que le chômage de longue durée a augmenté de 9,7 % en un an pour atteindre 2,7 % de la population active. Faute de réforme de fond, faute de projet global pour soutenir notre économie et l'emploi, le Gouvernement piétine depuis quatre ans.

Contrairement à ce qu'il semble croire, ce texte ne peut constituer la seule réponse au chômage de longue durée.

Cette mise au point étant faite, nous y sommes, j'y insiste, favorables. Mais elle ne sera utile qu'à une poignée de personnes, puisqu'autorisée sur dix territoires seulement. Parmi eux, la commune de Mauléon dans mon département des Deux-Sèvres, où les besoins sont clairement identifiés.

Les acteurs de tous bords y sont mobilisés. Ils m'ont convaincu. Sur les 200 chômeurs de longue durée de la commune contactés par la Maison de l'Emploi, un tiers s'est porté volontaire. Leur but : sortir de l'assistanat. En retrouvant une activité professionnelle, ils reprendront confiance en eux et pourront, ensuite, valoriser cette nouvelle expérience, dans leur parcours professionnel.

En parallèle, les partenaires sont en train de repérer des besoins non satisfaits afin de proposer des emplois, dans les domaines de l'environnement, du lien social, des services aux collectivités voire aux entreprises. Il s'agit de créer des activités utiles qui ne fassent pas concurrence aux emplois déjà existants dans le privé.

L'expérimentation sera menée dans les territoires volontaires, c'est important. Le financement des emplois créés se fera par la réaffectation de dépenses liées à la privation d'emploi : iI s'agit de réactiver des dépenses passives. Les demandeurs d'emploi au chômage, depuis plus d'un an, seront embauchés sous contrat de travail à durée indéterminée et seront payés au SMIC.

Ce texte ne va pas, je le répète, régler à lui seul le chômage de longue durée. Mais, compte tenu du nombre de chômeurs de longue durée, aucune piste ne peut être négligée.

Durant l'examen du texte, nous avons été vigilants : le dispositif ne devra pas peser excessivement sur les collectivités territoriales ; l'État s'est engagé à en être le principal financeur, tant mieux.

Tous les chômeurs de longue durée pourront en bénéficier, grâce aux apports du Sénat. L'administrateur du Fonds sera nommé par arrêté du ministère de l'emploi.

La participation financière de chaque collectivité territoriale au Fonds sera transparente, de sorte qu'elle ait l'assurance d'avoir financé l'emploi sur son territoire.

D'une manière générale, il est bon de laisser les acteurs locaux libres de mettre en oeuvre le dispositif. Retrouvons nous dans quatre ans pour, je l'espère, le généraliser. Nous voterons ce texte. (Applaudissements)

M. Jean Desessard.  - J'ai applaudi un Républicain !

Mme Élisabeth Doineau .  - Merci à notre rapporteure d'abord, pour son investissement sur ce texte.

Je me réjouis que cette proposition de loi soit sur le point d'être adoptée. Issue des travaux d'ATD-Quart Monde, elle montre que le monde associatif peut faire bénéficier la société de ses réflexions innovantes. L'activation ici proposée des indemnités chômage est une excellente idée et permettra de faire travailler ensemble, utilement les acteurs locaux.

Le recours à l'expérimentation est salutaire. Trop de dispositifs ont été développés loin du terrain et sans associer les acteurs qui, au quotidien, appliquent les politiques publiques de lutte contre le chômage. Les chiffres du chômage parlent d'eux-mêmes, ces politiques ont échoué.

La multiplicité des acteurs du service public de l'emploi et les difficultés de coordination qu'ils rencontrent sont l'une des sources d'échec des politiques de l'emploi ces dernières décennies.

La navette a enrichi le texte en gardant l'objectif de favoriser l'insertion du plus grand nombre.

Nous aurions toutefois trouvé intéressant d'étendre le système au secteur marchand et de raccourcir la durée de l'expérimentation à trois ans, avec un bilan douze mois avant son arrivée à échéance. Ces mesures plus audacieuses auraient témoigné de plus d'ambition, alors que les chiffres si élevés du chômage appellent à une mobilisation plus forte et que les annonces du Gouvernement, nombreuses, répétitives, n'augurent pas d'un retour à une situation plus favorable. D'où les réserves de certains sénateurs du groupe UDI-UC.

Cependant, la majorité des membres de notre groupe a emporté un vote positif sur ce texte intéressant. (Applaudissements)

M. Jean Desessard.  - J'ai applaudi une centriste !

Mme Laurence Cohen .  - Je regrette le mode d'organisation de nos débats, qui explique sans doute la présence dans l'hémicycle...

Face à cette proposition, fruit de la réflexion de femmes et d'hommes engagés sur le terrain, nous ne pouvons que partager l'initiative de mener cette expérimentation territoriale innovante.

En première lecture, nous avons obtenu que des emplois durables soient proposés aux chômeurs, et que le dispositif soit évalué, afin de reconnaître aux bénéficiaires une formation de qualité. Celle-ci est indispensable à la réussite d'un tel dispositif. C'est d'ailleurs le sens des engagements récents du président de la République en la matière.

Le financement de l'expérimentation nous laisse encore dubitatifs. Le Gouvernement a annoncé le déblocage de 10 millions d'euros la première année, mais ensuite ? Selon nos informations, l'État ne prendra plus en charge que 47 % du mécanisme la deuxième année. Nous avons maintes fois dénoncé les coupes budgétaires opérées par l'État au détriment des collectivités territoriales. Cette politique à courte vue, pour ainsi dire « austéritaire », est porteuse de graves conséquences.

La prise en compte de nos amendements nous conduira à voter cette proposition, mais cela ne doit pas masquer la réalité du chômage dans notre pays. Donner un emploi à 2 000 ou 3 000 personnes, c'est très bien, mais les chômeurs de longue durée sont 782 500 plus nombreux aujourd'hui qu'en 2012, soit 45 % des chômeurs. Les baisses de cotisations, de plusieurs milliards d'euros dans le cadre du CICE, n'ont pas eu les résultats annoncés - et que nous avons contestées sans ambigüité.

Contre le chômage, les propositions existent : arrêt de la politique d'austérité et de gel des salaires, développement des services publics, fin des exonérations de charges, effort beaucoup plus important de formation professionnelle de la part des entreprises, relance de l'emploi industriel dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, 32 heures hebdomadaires - ce serait un beau défi à relever au XXIe siècle. Les pistes ne manquent pas, empruntons-les ! En attendant, nous voterons ce texte, en espérant qu'il sera suivi de mesures ambitieuses en faveur de l'emploi pour enfin apporter une réponse aux trois millions de chômeurs de longue durée de notre pays. (Applaudissements sur divers bancs)

M. Jean Desessard.  - J'ai applaudi une communiste !

M. Éric Jeansannetas .  - Le travail législatif a été intense et rigoureux. Merci à Laurent Grandguillaume et à Anne Emery-Dumas, qui apportent la preuve, sur la base des travaux d'ATD Quart Monde, que l'on peut dépasser les clivages partisans pour penser autrement la lutte contre le chômage de longue durée.

Les territoires, les acteurs locaux, doivent être les moteurs de la création d'emplois ; à nous de tirer parti de leur force créatrice. Les besoins sociaux sont réels et le mode de financement innovant ici créé permettra d'y répondre, en créant des CDI.

Le travail accompli en CMP a affiné ce texte de manière judicieuse, comme sur le comité d'évaluation ou les conditions de rupture de contrat de travail exigées pour entrer dans le dispositif.

Le chômage de longue durée, qui touche un chômeur sur deux, est un drame social et humain. La proposition de loi est pragmatique. Limitée dans sa portée, elle ne résorbera pas tous les problèmes d'un coup de baguette magique, mais donnera un espoir à des chômeurs de longue durée, et ils en ont désespérément besoin. Nous la voterons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Daniel Chasseing .  - Le retour au travail est indispensable à l'insertion sociale des chômeurs de longue durée, cette expérimentation leur en ouvre la voie : l'économie sociale et solidaire joue un rôle utile, surtout dans nos territoires ruraux. C'est pourquoi le mien est candidat à cette expérimentation. Je soutiens bien sûr ce texte et remercie Mme la rapporteure.

Les conclusions de la CMP sont adoptées.

M. le président. - À l'unanimité ! (Applaudissements)

Prochaine séance, mardi 1er mars 2016, à 15 h 15.

La séance est levée à 0 h 55.

Jacques Fradkine

Direction des comptes rendus

Ordre du jour du mardi 1er mars 2016

Séance publique

À 15 h 15

1. Explications de vote des groupes sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine.

De 16 heures à 16 h 30

2. Vote solennel par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine.

Ce scrutin sera organisé en salle des Conférences, avec la possibilité d'une seule délégation de vote par sénateur.

À 16 h 30

3. Proclamation du résultat du scrutin public sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine.

À 16 h 45

4. Questions d'actualité

À 17 h 45

5. Question orale avec débat n° 12 de M. Jean Desessard à Mme la secrétaire d'État et de la simplification sur la situation des salariés rémunérés par le chèque emploi service universel (CESU), en cas d'arrêt pour maladie.

À 21 heures

6. Débat sur le dispositif exceptionnel d'accueil des réfugiés.

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°157 sur l'ensemble de la proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :341

Suffrages exprimés :331

Pour :251

Contre :80

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 140

Abstention : 1 - M. Jean-Baptiste Lemoyne

N'ont pas pris part au vote : 3 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, Mme Isabelle Debré, président de séance, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 110

Groupe UDI-UC (42)

Contre : 41

Abstention : 1 - Mme Catherine Morin-Desailly

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Contre : 19

Groupe du RDSE (17)

Contre : 17

Groupe écologiste (10)

Contre : 1 - M. André Gattolin

Abstentions : 8

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 1 - M. Alex Türk

Contre : 2

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°158 sur l'amendement n°7, présenté par Mme Claire-Lise Campion et les membres du groupe socialiste et républicain et sur l'amendement n°15, présenté par le Gouvernement, à l'article 1er de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :342

Pour :158

Contre :184

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 110

Groupe UDI-UC (42)

Pour : 4 - Mme Chantal Jouanno, MM. Michel Mercier, Gérard Roche, Jean-Marie Vanlerenberghe

Contre : 38

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Pour : 19

Groupe du RDSE (17)

Pour : 16

Contre : 1 - M. Gilbert Barbier

Groupe écologiste (10)

Pour : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°159 sur l'amendement n°11, présenté par Mme Claire-Lise Campion et les membres du groupe socialiste et républicain, à l'article 4 de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :323

Pour :119

Contre :204

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 110

Groupe UDI-UC (42)

Contre : 42

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Abstentions : 19

Groupe du RDSE (17)

Contre : 17

Groupe écologiste (10)

Pour : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°160 sur l'amendement n°8, présenté par Mme Claire-Lise Campion et les membres du groupe socialiste et républicain et sur l'amendement n°16, présenté par le Gouvernement, à l'article 5 ED de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :322

Pour :120

Contre :202

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 110

Groupe UDI-UC (42)

Pour : 1 - M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Contre : 40

Abstention : 1 - Mme Chantal Jouanno

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Abstentions : 19

Groupe du RDSE (17)

Contre : 17

Groupe écologiste (10)

Pour : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°161 sur l'article 5 ED de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :322

Pour :202

Contre :120

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Contre : 110

Groupe UDI-UC (42)

Pour : 40

Contre : 1 - M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Abstention : 1 - Mme Chantal Jouanno

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Abstentions : 19

Groupe du RDSE (17)

Pour : 17

Groupe écologiste (10)

Contre : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°162 sur l'amendement n°12, présenté par Mme Claire-Lise Campion et les membres du groupe socialiste et républicain, à l'article 6 de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :341

Suffrages exprimés :341

Pour :155

Contre :186

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 110

Groupe UDI-UC (42)

Contre : 41

N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Sylvie Goy-Chavent

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Pour : 19

Groupe du RDSE (17)

Pour : 17

Groupe écologiste (10)

Pour : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°163 sur l'amendement n°9, présenté par Mme Claire-Lise Campion et les membres du groupe socialiste et républicain et sur l'amendement n°17, présenté par le Gouvernement, tendant à rétablir l'article 7 de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :342

Pour :154

Contre :188

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 110

Groupe UDI-UC (42)

Contre : 42

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Pour : 19

Groupe du RDSE (17)

Pour : 16

Contre : 1 - M. Gilbert Barbier

Groupe écologiste (10)

Pour : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°164 sur l'amendement n°3, présenté par Mme Laurence Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, à l'article 21 ter de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :341

Suffrages exprimés :340

Pour :42

Contre :298

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 140

Abstention : 1 - M. Danie  Chasseing

N'ont pas pris part au vote : 3 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, MM. Michel Bouvard, Alain Milon

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 14 - M. Jacques Bigot, Mmes Nicole Bricq, Françoise Cartron, M. Roland Courteau, Mme Gisèle Jourda, M. Philippe Kaltenbach, Mme Bariza Khiari, M. Jean-Yves Leconte, Mmes Claudine Lepage, Marie-Noëlle Lienemann, M. Didier Marie, Mmes Danielle Michel, Evelyne Yonnet, M. Richard Yung

Contre : 96

Groupe UDI-UC (42)

Contre : 42

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Pour : 19

Groupe du RDSE (17)

Contre : 17

Groupe écologiste (10)

Pour : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°165 sur l'amendement n°4, présenté par Mme Laurence Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen et l'amendement n°10, présenté par Mme Claire-Lise Campion et les membres du groupe socialiste et républicain, à l'article 21 ter de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :342

Pour :154

Contre :188

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 110

Groupe UDI-UC (42)

Contre : 42

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Pour : 19

Groupe du RDSE (17)

Pour : 16

Contre : 1 - M. Gilbert Barbier

Groupe écologiste (10)

Pour : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°166 sur l'amendement n°5, présenté par Mme Laurence Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, à l'article 21 ter de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :342

Pour :30

Contre :312

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 2 - M. Jean-Yves Leconte, Mme Evelyne Yonnet

Contre : 108

Groupe UDI-UC (42)

Contre : 42

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Pour : 19

Groupe du RDSE (17)

Contre : 17

Groupe écologiste (10)

Pour : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°167 sur l'article 21 ter de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :340

Pour :310

Contre :30

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 140

Abstentions : 2 - MM. Daniel Chasseing, Alain Milon

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Pour : 108

Contre : 2 - M. Jean-Yves Leconte, Mme Evelyne Yonnet

Groupe UDI-UC (42)

Pour : 42

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Contre : 19

Groupe du RDSE (17)

Pour : 17

Groupe écologiste (10)

Contre : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°168 sur l'amendement n°6 rectifié bis, présenté par Mme Colette Giudicelli et plusieurs de ses collègues, à l'article 22 quater de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :342

Pour :188

Contre :154

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Contre : 110

Groupe UDI-UC (42)

Pour : 42

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Contre : 19

Groupe du RDSE (17)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 16

Groupe écologiste (10)

Contre : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°169 sur l'ensemble de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l'enfant

Résultat du scrutin

Nombre de votants :342

Suffrages exprimés :215

Pour :187

Contre :28

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 142

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste et républicain (110)

Abstentions : 110

Groupe UDI-UC (42)

Pour : 41

Abstention : 1 - Mme Chantal Jouanno

Groupe communiste républicain et citoyen (19)

Contre : 19

Groupe du RDSE (17)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Abstentions : 16

Groupe écologiste (10)

Contre : 9

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Vincent Placé, membre du Gouvernement

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 3 - MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier