Disponible au format PDF Acrobat
Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.
Table des matières
Décisions du Conseil constitutionnel
Question prioritaire de constitutionnalité
Commission mixte paritaire (Demande de constitution)
Révision des valeurs locatives
Information des parlementaires sur l'application du CICE
Services des douanes du Valenciennois
Dossiers en souffrance d'anciens combattants
Contrôle des exploitations agricoles
Crise dans le secteur des travaux publics
Prolongation de validité de la carte nationale d'identité
Site des archives nationales de Fontainebleau
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication
Avenir du pôle judiciaire d'Aix-en-Provence
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication
Ligne ferroviaire Carcassonne-Quillan
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication
Instruction des autorisations du droit des sols
DSR et fraction « bourg-centre »
Baisse des dotations des collèges de Côte d'Or
Réforme de l'asile (Procédure accélérée - Suite)
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur
Organisme extraparlementaire (Appel à candidature)
Nouvelle organisation territoriale de la République (Procédure accélérée - Deuxième lecture)
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique
M. René Vandierendonck, co-rapporteur de la commission des lois
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur de la commission des lois
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis de la commission de la culture
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique
SÉANCE
du mardi 26 mai 2015
106e séance de la session ordinaire 2014-2015
présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président
Secrétaires : M. Serge Larcher, M. Jackie Pierre.
La séance est ouverte à 9 h 35.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté sous les réserves d'usage.
Décisions du Conseil constitutionnel
M. le président. - Par lettre en date du 22 mai 2015, M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué à M. le président du Sénat une décision rendue le même jour par laquelle le Conseil a rejeté une requête concernant les opérations électorales auxquelles il a été procédé, le 28 septembre 2014, pour l'élection d'un sénateur dans le département d'Eure-et-Loir.
Le Conseil constitutionnel a également communiqué au Sénat, par courrier en date du 22 mai 2015, une décision du Conseil relative aux questions prioritaires de constitutionnalité portant sur la société Uber France SAS et autres.
Question prioritaire de constitutionnalité
M. le président. - Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le vendredi 22 mai 2015, qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, le Conseil d'État lui a adressé une décision de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les articles 20 et 98 de la loi relative à l'économie sociale et solidaire (Information des salariés en cas de cession de leur société). Le texte en est disponible à la direction de la séance.
Commission mixte paritaire (Demande de constitution)
M. le président. - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi tendant à faciliter l'inscription sur les listes électorales. Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l'article 12 du Règlement.
Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle dix-huit questions orales.
Révision des valeurs locatives
Mme Catherine Procaccia . - La Charente-Maritime, le Nord, l'Orne, le Val-de-Marne et Paris ont été choisis pour tester la révision des valeurs locatives des logements des particuliers, mais aussi des locaux professionnels, ce qui n'avait pas été explicitement annoncé. Les premières simulations conduites dans le Val-de-Marne ont prouvé l'inadaptation de la méthode retenue car celle-ci favorise les grandes surfaces au détriment du commerce de proximité.
En ne retenant que le seul critère du loyer au mètre carré déclaré il y a deux ou trois ans par les propriétaires, on pénalise les petits commerces car leurs loyers sont plus chers qu'en périphérie où se concentrent les grandes surfaces. J'ajoute que les locaux professionnels vides ne sont pas pris en compte, ce qui a le même effet. En outre, le délai d'examen de trente jours donné à la Commission intercommunale des impôts directs pour rendre son avis est beaucoup trop court.
Conscient de ces critiques, le gouvernement a accepté de reporter d'un an la mise en application de la réforme. La vacance des locaux sera-t-elle prise en compte ? Se donnera-t-on des délais raisonnables ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - La révision des valeurs locatives résulte d'une initiative parlementaire à laquelle le gouvernement s'était déclaré favorable, lors de l'examen de la loi de finances rectificative de décembre 2013. Elle répond également à une demande régulière des associations d'élus car ces valeurs, déterminées au début des années 1970, produisent des inégalités flagrantes entre contribuables. Dès lors, la révision des valeurs locatives constitue une mesure de justice fiscale.
M. Eckert a annoncé le report d'un an de la réforme, afin de disposer d'éléments stabilisés issus des simulations. La réforme, qui ne doit pas porter préjudice au petit commerce, sera à produit fiscal constant. Nous procéderons aux ajustements nécessaires.
La DGfip est entièrement mobilisée pour fournir les éléments utiles aux commissions départementales. Cet été, nous pourrons encore mieux identifier les effets de la réforme et envisager des adaptations législatives dans la loi de finances initiale pour 2016 afin de la rendre soutenable pour les professionnels. Le gouvernement travaillera étroitement avec le Parlement comme il le fait depuis le début du processus.
Mme Catherine Procaccia. - Merci de cet engagement. On aurait pu éviter de mettre une telle pression sur les commissions intercommunales. Attention aussi aux logements des particuliers : la méthode de révision est là aussi très lourde, on demande aux bailleurs sociaux de remplir une fiche par logement ! Les services fiscaux, eux aussi, sont débordés.
Information des parlementaires sur l'application du CICE
M. Éric Bocquet . - En octobre 2014, les députés Carré et Blein rendaient un rapport sur l'application du CICE. Ils regrettaient de n'avoir pu obtenir les informations nécessaires du ministère du travail. Dans le Nord, j'ai moi-même demandé au préfet, en octobre 2014, la liste des entreprises bénéficiaires ; la réponse, qui ne m'est parvenue que le 19 février 2015 après moult relances, m'a laissé pantois. Les parlementaires, m'a-t-on écrit, ne bénéficient d'aucune dérogation au principe du secret fiscal ! N'y a-t-il pas là une entrave au contrôle parlementaire ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - Le CICE vise à encourager les entreprises à investir, pour exporter et embaucher. Environ 15 000 d'entre elles ont bénéficié du préfinancement en 2013 ; la créance totale s'élève cette année à 16 milliards d'euros. Les deux tiers des chefs d'entreprises interrogés indiquent qu'ils utiliseront cet argent pour embaucher ou investir.
Le contrôle parlementaire est légitime et nécessaire. Une première mission d'information a dressé fin 2014 un bilan d'étape positif. Un comité de suivi des aides aux entreprises a été mis en place le 4 novembre 2014, où siègent des parlementaires. Les membres du comité ont reçu l'assistance des services fiscaux, dans le respect du principe juridique du secret fiscal pour ce qui concerne les particuliers. Vos commissions parlementaires ont aussi un droit d'information. Pour le CICE comme pour le reste, nous agissons dans le respect du Parlement.
M. Éric Bocquet. - Je voulais pointer deux dysfonctionnements : le temps qu'il m'a fallu attendre pour obtenir une réponse ; et le fait que l'on m'oppose le secret fiscal dix jours après que la presse locale avait publié les informations chiffrées que je réclamais. Chacun sait ainsi que le premier bénéficiaire régional du CICE est Carrefour avec 110 millions, soit deux fois plus qu'Auchan.
Services des douanes du Valenciennois
Mme Valérie Létard . - Le 19 février dernier, j'ai écrit à M. Sapin pour l'alerter sur le projet de réorganisation des services régionaux de l'Interrégion des douanes de Lille dans le cadre du projet stratégique de la douane à horizon 2020. Je vous cite sa réponse : « le projet de fermeture de la brigade de Saint Aybert procède d'une démarche d'analyse de sa volumétrie et de son adéquation aux flux et courants de fraude identifiés et tire les conséquences des difficultés d'intervention réelles de son positionnement actuel et permet de renforcer les trois autres brigades situées en aval de Valenciennes. » Comprenne qui pourra ce jargon !
À la croisée des autoroutes de Bruxelles, de Lille et de Paris, Saint Aybert fait figure de porte vers l'Europe du nord, utilisée tant pour le transit économique que le trafic des stupéfiants et de la contrefaçon. Quelle logique y a-t-il à renforcer les brigades en aval, quand l'amont doit être tout autant surveillé ? J'aimerais savoir, dans un tel schéma, quelles seraient les brigades renforcées pour Cambrai, Amiens, Nogent ou le péage de Chamant ?
On me dit que la baisse prévisionnelle des effectifs du bureau de Valenciennes ne résulte pas d'une volonté de l'administration mais d'une conséquence de choix prévisibles des opérateurs à la suite de l'entrée en vigueur du dédouanement centralisé. Mais les opérateurs nationaux et locaux ne souhaitent pas une délocalisation du dédouanement sur Lesquin ou sur Paris, ils apprécient de disposer d'un interlocuteur de proximité et réactif en fonction de leurs contraintes logistiques.
Pouvez-vous me préciser sur quelles évaluations et quelles sources, repose l'élaboration de ces nouveaux « choix prévisibles » ?
Peut-on croire sérieusement que « la réduction prévisionnelle des effectifs douaniers dans le Valenciennois ne se traduira pas par moins de douane dans ce territoire mais par des interventions mieux ciblées, conduites par des structures étoffées et donc plus efficaces » ?
Je réitère donc ma question du 19 février : le plan de restructuration si intelligemment concocté par les services centraux sera-t-il réexaminé pour tenir compte des réalités de notre territoire frontalier ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - Le ministre du budget a annoncé au Sénat un projet stratégique pour les douanes, dont l'enjeu est de moderniser ces services, de les adapter à l'économie mondiale et à la montée des menaces. Il s'agit aussi de leur donner de la visibilité. Simplification et dématérialisation du dédouanement, renforcement de la lutte contre la fraude, protection des consommateurs, soutien à la compétitivité de notre économie : voilà les missions des douanes. La mise en oeuvre de ce projet stratégique doit être pragmatique, elle doit participer d'une démarche collective. Cela suppose une concertation locale afin d'aboutir à une déclinaison interrégionale du projet stratégique. Ce travail est nécessaire pour aboutir à des solutions cohérentes et les moins difficiles possible pour les services. Il n'est pas prévu de fermer le bureau de Valenciennes, même si ses effectifs seront revus après la dématérialisation du dédouanement. Quant à la brigade de Saint Aybert, son positionnement actuel pose problème ; sa fermeture permettra de renforcer les trois brigades en aval de Valenciennes. Il n'y aura pas moins de douanes dans le Valenciennois, mais des interventions ciblées par des structures plus étoffées et plus efficaces.
Toute fermeture devra être validée par le ministère des finances, l'application de la réforme sera étalée jusqu'en 2018. Les agents bénéficieront d'un accompagnement social spécifique conformément à l'accord de mars 2015.
Mme Valérie Létard. - Merci de cette réponse, qui ne me satisfait évidemment pas. Le Valenciennois est un carrefour. Nous avons investi énormément dans la logistique fluviale et routière, afin de développer des ports logistiques, bases arrière des grands ports d'Europe du Nord. Six mois après leur inauguration, ils sont pleins.
Dire qu'il n'y a pas besoin de renforcer les douanes à Saint Aybert, est pour le moins paradoxal ! La douane de Saint Aybert a déjà été amputée d'un gros effectif il y a quelques années. N'allons pas toujours punir les mêmes !
Gaspillage alimentaire
M. Alain Fouché . - Dans le cadre du projet de loi Macron, un amendement, dont j'étais cosignataire, a été voté pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Jeudi dernier, les députés ont voté à l'unanimité un amendement similaire. Je m'en réjouis. Il y avait urgence.
L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie a mis en évidence qu'en moyenne chaque Français jette vingt kilogrammes de nourriture chaque année, dont sept de produits non déballés, soit une perte totale de 1,2 million de tonnes de nourriture, alors même que 3,3 millions de personnes doivent recourir à une aide alimentaire.
Quand la nouvelle loi sera-t-elle appliquée ? Comment répondrez-vous aux préoccupations des associations, qui ne souhaitent pas d'obligation ? Les Français les plus démunis sont attentifs à cette question.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique . - Tous les produits alimentaires ne relèvent pas des mêmes normes. L'article 9 du règlement européen de 2011 distingue entre la date de durabilité minimale et la date limite de consommation. Cette dernière concerne les denrées microbiologiquement périssables qui sont susceptibles de présenter rapidement un danger pour la santé humaine.
Une denrée dont la date limite de consommation est dépassée ne peut plus être commercialisée ni même donnée à des associations caritatives pour être consommée. En revanche, rien n'interdit de vendre un produit dont la date de durabilité minimale est passée, car si ses propriétés organoleptiques sont altérées, il n'y a pas de danger pour la santé humaine. Des organismes se sont spécialisés dans l'écoulement de ces denrées.
En revanche, obliger les opérateurs à céder leurs produits porterait atteinte à leur droit de propriété, à la liberté d'entreprendre, et si l'État devait se charger de leur écoulement, cela aurait un coût important. Le gouvernement privilégie la voie conventionnelle, conformément au rapport Garot.
M. Alain Fouché. - Merci de ces précisions. Matthieu Ricard s'émeut de la « tuerie de masse » que représente l'abattage d'animaux pour la consommation humaine : 60 milliards d'animaux terrestres chaque année. Il critique aussi le gaspillage, qui porte préjudice aux hommes, en plus de menacer la survie de certaines espèces.
Dossiers en souffrance d'anciens combattants
M. Dominique Watrin . - J'ai été alerté par le président de la Fnaca du Pas-de-Calais, un ancien combattant d'Algérie, envoyé faire une guerre dont il ne voulait pas. Confirmez-vous, monsieur le secrétaire d'État chargé des anciens combattants, que des milliers de dossiers de demande de revalorisation de pensions d'invalidité sont en instance auprès de la sous-direction des pensions de La Rochelle ? On en vient à se demander si l'État ne joue pas la montre !
M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire . - En fait, votre question porte sur les ressortissants des pays anciennement placés sous la souveraineté française, et titulaires d'une pension relevant du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Ils bénéficient des dispositions de l'article 100 de la loi de finances pour 2007, dont les effets ont été maintenus par l'article 211 de la loi de finances pour 2011, conduisant à l'alignement de la valeur du point d'indice et du nombre de points d'indice de leur pension, sur celles allouées aux ressortissants français.
Si la revalorisation du point d'indice est effectuée directement par les trésoriers, la révision de la pension s'étudie sur demande expresse des intéressés auprès de la sous-direction des pensions, laquelle est souvent amenée à demander des pièces complémentaires. Cela dit, 1 871 dossiers restent en effet en instance pour 2014. Au premier trimestre 2015, 2 544 sont en attente et 8 111 n'ont pas encore été étudiés.
J'ai demandé aux services compétents de tout faire pour réduire les délais de traitement des dossiers de ressortissants du Maghreb comme de métropole. Il faut toutefois avoir à l'esprit que la sous-direction des pensions continue de connaître un afflux de nouvelles demandes, la loi de 2007 produisant ses effets huit ans après.
M. Dominique Watrin. - Merci de votre franchise, monsieur le ministre : vos chiffres sont encore plus inquiétants que ceux dont je disposais ! Les pistes d'amélioration que vous avez indiquées restent vagues, il faudra y veiller, car l'État ne saurait se mettre en faute. La RGPP et la MAP font ici sentir leurs effets. Des marges de manoeuvre existent, car les anciens combattants sont de moins en moins nombreux. Je vous transmettrai le dossier que j'ai mentionné.
Garnison de Castelsarrasin
M. François Bonhomme . - Le chantier de l'armée de terre 2020, s'il épargne pour l'essentiel la garnison de Castelsarrasin en 2015, n'en suscite pas moins des inquiétudes auprès des élus. Certes, seulement 15 postes ont été supprimés, sur un total de 1 200, mais le ministère de la défense se réserve le droit, chaque année, de procéder à de nouvelles coupes budgétaires dans les régiments, voire d'inscrire l'un d'eux sur la liste des services à fermer. Fin 2014 a été annoncée, à Castelsarrasin, la fermeture en 2016 du centre de dépôt des essences, alors même que des millions d'euros ont été investis sur ce site.
Depuis la fin des années 1990, le 31e régiment du génie n'a cessé de grandir et la municipalité de Castelsarrasin a accompagné les projets d'investissements du ministère de la défense en facilitant l'achat de terrains pour créer de nouveaux bâtiments, ainsi que la construction de lotissements et d'infrastructures scolaires et sportives à l'usage des familles. Avec le Centre d'instruction élémentaire de conduite, près de 1 400 militaires sont sur site, ce qui représente près de 10 % de la population de la ville, et il faut aussi compter leurs familles. Le maintien du 31erégiment dans la plénitude de ses effectifs est vital pour l'économie locale et le développement du territoire.
M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'État auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire . - La réorganisation de nos armées est nécessaire. L'armée de terre a proposé le modèle « au contact », que le ministre de la défense a validé. Cela dit, ni les effectifs ni le stationnement du 31e régiment ne sont menacés. La fermeture du centre de dépôt des essences à l'été 2015 ne remet nullement en cause l'ancrage à Castelsarrasin. Le ministère a investi quelque 30 millions d'euros depuis 2008 pour moderniser ces infrastructures.
Nous mesurons votre attachement à ce régiment qui contribue à la visibilité de Castelsarrasin et au dynamisme du lot-et-Garonne.
M. François Bonhomme. - Merci de cette réponse qui rassurera.
Contrôle des exploitations agricoles
Mme Anne Emery-Dumas . - Les agriculteurs sont exaspérés par la multiplication des contrôles dont ils font l'objet. Alors que l'évolution de la politique agricole commune et son application nationale entraînent de nombreux changements qui doivent être pris en compte dans les exploitations, s'y ajoutent des contraintes réglementaires liées aux modalités d'application de la directive « Nitrates » ou à l'entretien des cours d'eau. Les agriculteurs ont le sentiment que la réglementation change tout le temps...
Lors de son intervention devant l'assemblée générale de la FNSEA, le 26 mars 2015, le Premier ministre s'est engagé à explorer les pistes proposées par la mission Massat-Bastian - Saillant pour clarifier, simplifier et stabiliser les contrôles réglementaires. Il s'est également engagé à nous aligner, dès 2015, sur les standards européens, indiquant que le temps des surenchères réglementaires, à l'origine de distorsions de compétitivité avec nos voisins européens, était révolu.
Comment ces engagements seront-ils tenus ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - La quasi-totalité des recommandations de ce rapport d'étape seront mises en oeuvre par le gouvernement ; le rapport définitif est attendu cette semaine.
Il y aura des améliorations en termes d'organisation. C'est ainsi qu'il sera demandé aux préfets de région de réunir régulièrement un comité pour assurer une information préalable sur les contrôles, une meilleure coordination des différents contrôles et un retour d'expérience afin d'améliorer la préparation et le déroulement des contrôles. L'accent sera mis sur la formation des contrôleurs. Sur les dispositions nouvelles de la PAC en 2015, un gros travail d'information et de pédagogie est d'ores et déjà lancé dans chaque département, avec l'appui des organisations professionnelles agricoles.
En revanche, une « année blanche » est inenvisageable, au regard du droit européen ; elle remettrait en cause les aides de la PAC.
Mme Anne Emery-Dumas. - Merci de cette réponse. Les agriculteurs ne refusent évidemment pas les contrôles ; ce qu'ils remettent en question est la manière dont ils sont exercés et, surtout, leur multiplication.
Crise dans le secteur des travaux publics
M. Henri de Raincourt . - Élu local de longue date, M. le ministre connaît bien la situation critique où se trouve le secteur des travaux publics alors que le chômage explose. Conséquence visible, l'état de notre réseau routier se dégrade rapidement. Les budgets des collectivités locales étant ce qu'ils sont, leurs investissements déclinent, si bien que 22 500 emplois ont été supprimés dans les travaux publics, 9 000 en Bourgogne.
Le gouvernement envisage-t-il ou a-t-il pris des mesures pour réduire les difficultés pesant sur ce secteur, si important pour l'économie locale ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Le gouvernement est naturellement conscient de cette difficulté. À une nuance près : pour voyager beaucoup en Europe, je constate que notre réseau routier reste l'un des mieux entretenus. Je l'ai encore vu l'autre jour, quand je suis allé d'Isère en Lozère.
Les collectivités territoriales représentent 70 % de l'investissement public ; le gouvernement, tout en leur demandant de contribuer à la hauteur de leurs moyens à l'effort de redressement des finances publiques, a eu à coeur de protéger l'investissement local. Les crédits de la DETR ont été portés de 600 à 800 millions pour financer des projets communaux et intercommunaux. Une aide de 2 000 euros par permis de construire est également versée pour la construction de logements en zone tendue.
Dans les prochains contrats de plan État-région, 12,5 milliards d'euros seront fléchés sur les routes. Le FCTVA a été rénové par une aide de 29 millions en 2015. La Caisse des dépôts et consignations offre aux collectivités territoriales des prêts à taux zéro. L'Agence France locale, agréée en décembre dernier, disposera de 750 millions pour soutenir l'investissement des collectivités territoriales.
Jeudi, après son entrevue avec le président de l'Association des maires de France, le Premier ministre annoncera de nouvelles mesures concrètes.
M. Henri de Raincourt. - Je connais les dispositifs que vous avez énumérés, leur efficacité est plus ou moins grande. Attendons jeudi mais n'oublions pas d'associer tous les niveaux de collectivités territoriales, y compris les départements et les régions. Je ne doutais pas de l'engagement de l'État pour ce secteur important, singulièrement en milieu rural, que sont les travaux publics.
Prolongation de validité de la carte nationale d'identité
M. Dominique Bailly . - Depuis le 1er janvier 2014, la durée de validité des cartes nationales d'identité délivrées aux personnes majeures est passée de dix à quinze ans. Parmi les pays non européens, la Tunisie, le Maroc, la Turquie et l'Égypte acceptent la carte nationale d'identité comme document officiel de voyage.
De nombreux dysfonctionnements subsistent à l'entrée et à la sortie de certains pays, pour les citoyens dont la carte d'identité a été établie entre janvier 2004 et décembre 2013. Les points de blocage dans la chaîne de voyages se situent au départ, au niveau des compagnies aériennes, et dans les pays d'arrivée, au niveau des autorités locales. Les difficultés peuvent aller jusqu'au refus de départ, difficile à accepter pour un voyageur.
Pour éviter ces désagréments, il est recommandé aux voyageurs de se munir d'un passeport, ce qui est pour le moins paradoxal ! Comment le gouvernement compte-t-il faire reconnaitre la prolongation de la validité des cartes nationales d'identité ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Le décret du 18 décembre 2013, entré en vigueur le 1er janvier 2014, a prolongé la durée de validité de la carte nationale d'identité comme document de voyage. La mesure avait été annoncée le 17 juillet 2013, lors du comité interministériel de modernisation de l'action publique.
Seulement 3 pays sur les 44 concernés ne reconnaissent pas cette évolution. Les négociations diplomatiques, en cours depuis un an, ont abouti avec la Serbie, la Turquie et Malte. Depuis, les choses se sont améliorées.
La directive de 2004 pose en principe que les citoyens de l'Union peuvent circuler librement sous le couvert d'une carte d'identité ou d'un passeport en cours de validité, à seule fin de justifier de leur identité. L'article 5-4 de cette directive prévoit également que lorsque le citoyen de l'Union européenne ne dispose pas du document de voyage requis, « I'État membre concerné accorde à ces personnes tous les moyens raisonnables afin de leur permettre d'obtenir ou de se procurer, dans un délai raisonnable, les documents requis ou de faire confirmer ou prouver par d'autres moyens leur qualité de bénéficiaires du droit de circuler et de séjourner librement ». Dans la mesure où un document d'identité périmé permet de circuler librement sur le territoire de l'Union européenne, dès lors que la qualité de ressortissant de l'Union européenne peut être établie par ce moyen, la simple péremption faciale du titre ne constitue pas une difficulté pour circuler sur le territoire d'un État membre.
M. Dominique Bailly. - Merci. Des difficultés demeurent, aplanissons-les alors que la saison estivale commence.
Site des archives nationales de Fontainebleau
Mme Colette Mélot . - Depuis mars 2014, le site des archives nationales de Fontainebleau est fermé au public et ses agents ont dû quitter les lieux, l'état du bâtiment constituant une menace à la sécurité des personnes.
Malgré le transfert d'une grande partie des documents vers le bâtiment flambant neuf de Pierrefitte, il reste à Fontainebleau soixante kilomètres linéaires de documents qui ne peuvent plus être consultés : dossiers de carrière des fonctionnaires, dossiers de naturalisations mais aussi archives d'architectes et documents audiovisuels.
Trois scénarios sont envisagés : la consolidation, la déconstruction avec reconstruction sur le site ou la reconstruction à Pierrefitte. Le temps passe, rien n'est fait.
Je réitère ma question écrite du 15 mai 2014, restée sans réponse : quels sont vos arbitrages pour le site de Fontainebleau et ses 47 agents ?
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - Madame, vous étiez présente lors de la réunion du 27 novembre 2014, avec le directeur des archives de France et la coordinatrice du projet pour le ministère. Pour des raisons de sécurité, il a été impossible de récupérer les archives restant à Fontainebleau, mais aussi, des mois durant, de mener les enquêtes techniques nécessaires à l'intérieur.
Un appel d'offres a cependant été lancé pour engager une opération d'instrumentation interne sur les étages inférieurs, qui aura lieu selon toute vraisemblance au cours de la deuxième quinzaine de juillet. Elle sera suivie d'une campagne d'investigation pour envisager, si les conditions de sécurité l'autorisent, des extractions d'archives. Les agents sont informés périodiquement par le directeur adjoint des archives nationales. Le travail a repris progressivement à Fontainebleau depuis l'été dernier dans d'autres bâtiments, même si les conditions ne sont pas évidemment optimales : saisie informatique, constitution de bases d'archives électroniques...
Sur la base des éléments techniques disponibles, l'Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (Oppic) me rendra un rapport qui évaluera le coût des différents scénarios. C'est alors seulement que je pourrai arbitrer.
Mme Colette Mélot. - Merci pour ces précisions. Le dossier n'est certes pas facile à régler. Élus locaux et agents sont impatients d'en savoir davantage.
Avenir de l'Oipsa
M. Georges Labazée . - Ma question s'adresse au ministre du travail, elle concerne l'avenir de l'organisme intermédiaire des plans locaux pour l'insertion et l'emploi Sud Aquitaine (Oipsa). Cette association, née de la réunion des cinq plans locaux pour l'insertion et l'emploi (Plie) du sud de l'Aquitaine, des Pyrénées-Atlantiques et des Landes, est un organisme intermédiaire conçu pour répondre à l'injonction des services de l'État qui ont imposé le regroupement des Plie en 2010.
En dehors des fonds provenant du Fonds social européen (FSE), dont l'association dispose depuis 2011, l'Oipsa ne bénéficie que de contributions des Plie.
Alors que les exigences de bonne gestion des fonds européens sont de plus en plus importantes, l'association a appris la réduction des moyens du FSE, en particulier la diminution de près de 60 % de ses crédits d'assistance technique.
Les Plie devront compenser cette baisse de crédits, ce qui les mettra en délicatesse financière alors que la situation de l'emploi leur confère un rôle important dans la politique européenne d'inclusion et de lutte contre la pauvreté.
Quelles mesures le gouvernement entend-il prendre pour que ces organismes pivots puissent remplir efficacement leurs missions sur la programmation européenne 2014-2020 ?
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - Je vous prie d'excuser l'absence du ministre du travail. Le FSE a vu ses crédits d'assistance technique diminuer, passant de 4,5 millions à 2,8 millions dans la nouvelle programmation.
Dans ces conditions, la Direccte a fait le choix de répartir équitablement l'effort. L'État a aussitôt informé les organismes intermédiaires en les encourageant à mutualiser leurs services.
La lutte contre l'exclusion est l'une des priorités du nouveau FSE qui lui consacre 50 % de ses crédits, soit 1,6 milliard. Grâce à quoi le financement des actions des Plie est assuré.
M. Georges Labazée. - Merci. Il revient cependant à l'État d'examiner comment compenser la baisse des crédits du FSE car c'est lui-même qui avait demandé la réduction du nombre de gestionnaires et des coûts. Il y a des limites à la mutualisation...
Avenir du pôle judiciaire d'Aix-en-Provence
Mme Sophie Joissains . - La ville d'Aix-en-Provence a une aura judiciaire historique : ancien siège du Parlement de Provence, elle accueille la deuxième cour d'appel et le dix-huitième tribunal de grande instance de France. Il a été décidé d'y construire un nouveau palais de justice en 2005, car les locaux étaient très vétustes. En mars 2013, Mme la garde des sceaux a pris l'engagement, face à l'urgence de la situation, de démarrer les travaux dès 2014. Il le faut : vols et vandalisme sont fréquents, un meurtre a même été commis sur le parking du tribunal. Malheureusement, les travaux ont été repoussés de trois ans. La ville d'Aix-en-Provence a examiné attentivement la faisabilité juridique et financière d'un financement des travaux par emprunt exceptionnel de la ville, à rembourser ultérieurement par l'État. La municipalité, contrairement à ce que semble croire la ministre, ne demande pas d'intérêts ! Sa proposition consiste en une pure avance de fonds remboursable par l'État.
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - Cette opération de grande envergure, renvoyée au prochain budget triennal en raison du nécessaire redressement des comptes publics, n'est nullement remise en cause. La ministre a reçu le 22 mai dernier la maire et la bâtonnière d'Aix-en-Provence. L'expertise de la proposition que vous exposez se poursuit, pour en étudier les avantages mais aussi les risques juridiques.
Après le déplacement des services de l'État le 27 novembre 2014, qui a été l'occasion d'entendre sur place toutes les personnes, les besoins de travaux de sécurisation ont été évalués à 585 000 euros. En février dernier, un montant de 500 000 euros a été notifié par la chancellerie. La construction du nouveau palais de justice est, je le répète, une priorité du prochain budget triennal.
Mme Sophie Joissains. - Des travaux de sécurisation, très bien, mais si nous pouvions lancer la construction du nouveau site dès maintenant, ce serait mieux !
Ligne ferroviaire Carcassonne-Quillan
M. Roland Courteau . - Un engagement a été pris d'inscrire en priorité au contrat de projet État-région pour 2014-2021 les travaux de régénération du segment de la ligne Carcassonne-Limoux pour un montant de 9 millions d'euros, répartis également entre l'État, le conseil régional et SNCF Réseau. Pourquoi attendre ?
L'Association pour le maintien et le développement de la ligne ferroviaire Carcassonne-Quillan (ALF), qui regroupe élus et populations, craint que tout retard dans la réalisation de ces travaux n'entraîne une réelle dégradation des segments de cette ligne, voire l'interruption de la circulation des trains, pour des raisons de sécurité.
L'attente n'a que trop duré. Les travaux doivent être lancés, et nous attendons des assurances sur la pérennité du tronçon Limoux-Quillan. Je m'étonne aussi que l'on ne se soit pas interrogé sur le nombre de projets industriels susceptibles d'avoir recours au fret ferroviaire.
Enfin, nous demandons le rétablissement de l'intégralité du service public ferroviaire à Quillan, où les services de vente de billets, de renseignement et d'aide aux voyageurs ont été supprimés sans concertation.
L'ALF a lancé une pétition qui a recueilli plus de 7 500 signatures. C'est que le maintien de cette ligne détermine l'avenir économique et social de toute la haute et moyenne vallée de l'Aude.
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - Comme vous le savez, les infrastructures du segment Carcassonne-Quillan ne sont pas en bon état ; d'où des ralentissements fréquents. Des travaux de renouvellement sont nécessaires.
Le CPER qui sera signé en juin prochain pour 2015-2020 comprend une enveloppe de 11 millions d'euros pour la régénération et les travaux prioritaires sur l'axe le plus fréquenté, Carcassonne-Limoux. L'accent étant désormais mis sur l'entretien du réseau, les travaux s'engageront après la construction de la voie de contournement de Nîmes et Montpellier en 2017. Cependant, je veux vous rassurer : des travaux indispensables sur la ligne ont été effectués en 2014. L'opérateur mettra à profit le délai pour optimiser les coûts, notamment par la récupération de matériaux après d'autres travaux de renouvellement.
M. Roland Courteau. - Je répète que ce chantier est urgent pour éloigner le risque de fracture territoriale.
TGV Limousin
M. Daniel Chasseing . - Le TGV est un synonyme de modernité. Les Limousins l'attendent, pour mettre Limoges à deux heures de Paris et désenclaver la région. Celle-ci n'a pas de ligne à grande vitesse contrairement aux deux régions avec lesquelles elle va fusionner, Aquitaine et Poitou-Charentes.
La création de la ligne TGV Limousin se fera-t-elle ou non ? Le décret portant déclaration d'utilité publique (DUP) a été publié au Journal officiel du 10 janvier 2015. Cela rend-il la décision irréversible ? Le gouvernement s'est engagé à lancer les travaux le plus rapidement possible. Comment seront financés les 1,6 à 1,8 milliard nécessaires ?
J'ai lu que la Commission européenne n'aurait pas été saisie ou qu'elle ne pourrait contribuer. Où l'argent sera-t-il trouvé ? Enfin, quand les premiers trains rouleront-ils ?
Un mot encore sur la ligne Brive-Limoges-Paris, dont les défaillances techniques occasionnent des retards récurrents - j'en sais quelque chose... Sa rénovation, dont le coût est estimé à 500 millions d'euros, est-elle prévue en attendant le futur TGV ? Un calendrier a-t-il été fixé ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - M. Vidalies m'a chargée de vous répondre.
Le ministère de l'écologie a reçu six recours contre la DUP ; le Conseil d'État n'a pas encore tranché. Quant au financement, il s'appuie sur le volet mobilité des CPER 2015-2020. Nous avons bien déposé une demande de financement auprès de l'Europe le 26 février dernier, au titre du mécanisme d'interconnection en Europe. Reste à financer les travaux : le devoir du gouvernement est d'éclairer les acteurs.
L'État investira 500 millions d'euros d'ici 2020 pour l'entretien de la ligne Brive-Limoges et 90 millions pour la ligne Brive-Paris. Notre mobilisation est totale, pour ces lignes structurantes.
M. Daniel Chasseing. - Merci de cet engagement. Je me réjouis que le projet de desserte de la Corrèze et du Limousin soit maintenu, quand le rapport du député Philippe Duron évoque des abandons de desserte. Sans cette ligne, la Corrèze et le Limousin connaîtront l'exclusion ferroviaire.
Instruction des autorisations du droit des sols
M. René Danesi . - L'article 134 de la loi Alur aura d'importantes conséquences sur l'instruction des autorisations du droit des sols (ADS), que ni le législateur ni le gouvernement n'ont anticipées.
Dès le 1er juillet 2015, les communes qui font partie d'un EPCI regroupant plus de 10 000 habitants et se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme ne disposeront plus du service que l'État leur rendait, par le biais des Directions départementales des territoires (DDT), en matière d'instruction des ADS.
Je me réjouis toujours d'un transfert de compétence de l'État aux collectivités locales. En l'occurrence, cette mission n'étant pas considérée comme une compétence, mais une prestation, son abandon par l'État n'est pas accompagné de compensation des charges.
Se posent aussi la question du recrutement de personnel spécialisé ainsi que celle de l'achat de logiciels spécifiques. Que les DDT mettent à disposition l'application « ADS 2007 » avait l'avantage de la simplicité.
À l'heure de la simplification, ce manque de prévision aboutit à un véritable gâchis matériel, financier et humain.
L'application « ADS 2007 » ne peut-elle pas être mise à disposition des collectivités territoriales ? Quel sera le devenir des 10 000 fonctionnaires des DDT en sureffectif qui ne rejoindraient pas une collectivité territoriale ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - il n'y a pas d'abandon de compétence. L'État, qui jusqu'à présent mettait à disposition certains de ses services pour l'instruction des ADS, s'est interrogé, dès lors que la carte des intercommunalités est complète, sur la nécessité de maintenir à l'identique ses prestations.
Il le fera pour les petites communes et les petits EPCI. Des conventions de transition pourront être signées. La mise à disposition de l'interface « ADS 2007 » sera généralisée, afin que les collectivités récupèrent les données pour la liquidation des taxes. Pour faciliter le recrutement des DDT par les collectivités territoriales, des mécanismes ont été prévus tel qu'un complément indemnitaire pour l'agent et la compensation pendant deux ans de l'écart de cotisations.
Pour votre information, dans le Haut-Rhin, six sur quarante agents instructeurs rejoignent une collectivité territoriale.
M. René Danesi. - L'État prendra-t-il enfin son courage à deux mains en transférant d'office les agents affectés à une mission qu'il confie aux collectivités territoriales, au lieu de maintenir des agents en surnombre et justifier leur existence en leur confiant des contrôles tatillons, dont pâtissent les élus ?
DSR et fraction « bourg-centre »
M. Philippe Mouiller . - Selon l'article L. 2334-21 du code général des collectivités territoriales, les communes chefs-lieux de cantons se voient attribuer une fraction dite « bourg-centre » de la dotation de solidarité rurale (DSR).
Or la loi du 17 mai 2013 a réduit le nombre de cantons par deux. La réforme ne sera effective qu'en 2017, cependant les maires de ces anciens chefs-lieux de canton sont inquiets, d'autant que la perte de la fraction « bourg-centre » de la DSR s'ajoutera à la régression de la dotation globale de fonctionnement.
Quelles seront les modalités d'attribution de la fraction « bourg-centre » applicables à compter de 2017 ?
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - Veuillez excuser M. le ministre de l'intérieur. Le redécoupage cantonal posait en effet la question de l'éligibilité des communes qui perdaient le statut de chef-lieu de canton ou passaient sous le seuil de 15 % de la population cantonale. Afin de rassurer les collectivités territoriales, le gouvernement a fait adopter par le Parlement, avant même le redécoupage, des mesures qui neutralisent les effets de la réforme, s'agissant de régime indemnitaire des élus ou des dotations des collectivités, dans le cadre de la loi de finances pour 2015.
M. Philippe Mouiller. - Les garanties devraient rassurer les collectivités territoriales.
Baisse des dotations des collèges de Côte d'Or
Mme Anne-Catherine Loisier . - Le gouvernement prétend réduire les inégalités scolaires. Or les fermetures frappent de plein fouet la haute Côte d'Or, où les dotations horaires des collèges ruraux diminuent considérablement. Les restrictions prévues pour la rentrée 2015 sont injustes : elles se fondent sur des baisses minimes du nombre d'élèves, leurs conséquences seront disproportionnées.
Les petits collèges ruraux concernés appartiennent tous à des territoires fragilisés par une baisse de leur population, liée à une évolution économique défavorable et une situation géographique peu attrayante pour les enseignants.
Les choix du ministère mettront en péril la qualité des enseignements obligatoires, la stabilité et le dynamisme des équipes pédagogiques ainsi que la pérennité du dispositif d'accompagnement éducatif, réorienté au seul bénéfice des zones urbaines sensibles et des réseaux d'éducation prioritaire.
La répartition des dotations ne saurait répondre à une logique purement comptable !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - La jeunesse étant pour lui une priorité, le gouvernement s'est engagé à créer 60 000 postes d'enseignants d'ici 2017. Cette année, cela se traduit par 5 061 postes supplémentaires à la rentrée 2015. Leur répartition se fait dans la transparence, elle est fonction des évolutions démographiques et des difficultés sociales et scolaires des enfants accueillis.
Dans votre département de Côte d'Or, à la rentrée 2014, malgré la baisse significative du nombre d'élèves, 128 en moins, les moyens d'enseignement ont été intégralement maintenus.
La réduction du nombre d'heures prévue pour la rentrée 2015 s'explique par une baisse prévisionnelle de 277 élèves. Elle sera ajustée si le besoin s'en fait sentir. Une chose est certaine : les effets de seuil ont des conséquences plus importantes sur les petites structures rurales. Nous en tenons compte.
Soyez sûre de l'engagement du gouvernement pour l'éducation de nos enfants, en zone rurale comme ailleurs.
Mme Anne-Catherine Loisier. - Les spécificités des établissements ruraux doivent être mieux reconnues, en particulier leur isolement. Ils ne bénéficient pas du même environnement, quels que soient les efforts des communes et intercommunalités, que les collèges situés en zone urbaine. Au total, les élèves y sont nettement moins bien traités.
Fermeture de la CPAM de Bondy
M. Gilbert Roger . - En janvier 2015, l'agence de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Bondy a fermé ses portes sans aucune explication ni concertation préalable avec les partenaires du territoire. Seule une affiche placardée sur le local informe que l'espace accueil est « exceptionnellement fermé ». Depuis, les assurés sociaux doivent se déplacer à Noisy-le-Sec, au Raincy ou à Bobigny, où les centres sont déjà surchargés...
Après une pétition, le directeur de la gestion du réseau de la CPAM a indiqué que l'agence de Bondy rouvrirait à compter du 17 mars 2015, mais seulement deux jours par semaine. Il a annoncé vouloir présenter bientôt aux maires du département le nouveau maillage territorial, qui validera la fermeture de plusieurs centres d'accueil, dont celui de Bondy...
Cette réponse n'est pas acceptable pour Bondy, chef-lieu de canton dont les habitants sont très touchés par la précarité, avec un taux de chômage de 19 %. Les personnes âgées, modestes, précaires ou en situation de handicap ont besoin d'un accueil de proximité pour effectuer leurs démarches administratives, et beaucoup d'entre elles n'ont pas internet à leur domicile.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - De telles décisions sont prises par la CPAM sur la base des chiffres de fréquentation des centres : plus de 1,3 million de visites annuelles en Seine-Saint-Denis, avec des temps d'attente par conséquent très longs, une continuité de service insuffisante, des conditions de sécurité incertaines. Les habitants de Bondy peuvent désormais se rendre dans les centres des communes limitrophes, à moins de trente minutes, où leurs demandes sont traitées efficacement et où ils sont reçus sur rendez-vous. L'ouverture est maintenue deux jours par semaine à l'agence de Bondy, en plus des autres points d'accueil dans la communauté de communes. Cela dit, une concertation va s'engager avec les élus.
M. Gilbert Roger. - Le gouvernement joue maintenant les porte-plumes de la CPAM ! Mais la réponse, « plus de 1,3 million de visites, donc on ferme la moitié des boutiques », est incompréhensible sinon stupide.
La concertation ? Nous subissons le diktat du directeur de la CPAM, qui prend prétexte d'une légère baisse des crédits pour réduire le nombre de lieux d'accueil, au détriment de Bondy qui compte 57 000 habitants, soit trois fois plus que des communes où les agences sont maintenues. Décision stupide, qui ne vise qu'à produire des économies de bouts de chandelle.
La séance est suspendue à 11 h 45.
présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires : M. Serge Larcher, Mme Valérie Létard, M. Jackie Pierre.
La séance reprend à 14 h 30.
Réforme de l'asile (Procédure accélérée - Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à la réforme de l'asile.
Explications de vote
M. Jean-Claude Requier . - L'asile a partout ses malheureux damnés, en Asie aussi où 8 000 d'entre eux dérivent en mer, abandonnés par leurs passeurs. Comme l'a rappelé la proposition de la Commission européenne d'instaurer des quotas obligatoires, le problème est désormais européen.
La réalité, nous la connaissons à Lampedusa ou à Calais. Plus de 360 000 demandes ont été traitées en 2014 à l'échelle européenne, seule la moitié a été acceptée et, d'abord, par l'Allemagne, la Suède, la France, l'Italie, le Royaume Uni et les Pays-Bas. Le groupe RDSE est, par principe, opposé à des quotas, tout particulièrement en matière d'asile ; le ministre nous a rassurés sur la position du gouvernement.
La France oscille entre l'amour des belles idées et la réalité des petits arrangements, comme le montre la sous-dotation chronique de la mission « Immigration, asile, intégration ». Le texte a deux objectifs difficilement conciliables : un accueil inconditionnel et un bon traitement des demandeurs. Il renforce les garanties accordées au demandeur, présence d'un avocat lors des audiences, prise en compte systématique de la vulnérabilité, droit au maintien sur le territoire, recours à la visioconférence devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), possibilité de huis clos devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA)... Il réduit les délais d'instruction à l'Ofpra et la CNDA. Ils seront ainsi de 96 heures si le demandeur est en détention. Outre le recrutement de 70 agents à l'Ofpra en 2014, la décentralisation de l'office améliorera les choses.
En revanche, comme l'a rappelé Pierre-Yves Collombat en discussion générale, le groupe RDSE s'interroge sur la conformité aux engagements internationaux de la France. Le Sénat a voté le principe selon lequel le rejet définitif de la demande vaut obligation de quitter le territoire français. Que devient le droit internationalement reconnu à la vie familiale ? Les constats sont partagés, les solutions moins évidentes.
Bien que le texte ait été renommé : réforme du droit d'asile...
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. - Loi Requier ! (Sourires)
M. Jean-Claude Requier. - Le groupe RDSE, dans sa majorité, s'abstiendra.
M. Stéphane Ravier . - Beaucoup a été dit sur cette loi, j'ai déjà dit avec clarté ma position - je n'étonnerai donc personne. Qu'un rejet définitif vaille obligation de quitter le territoire français va dans le bon sens ; mais cette mesure relève de la posture et signe l'incapacité de l'UMP à proposer une véritable alternative. On aime à jouer les braves quand on est dans l'opposition, pour donner le change à ceux qu'on a tant de fois trahis... Le ministre nous dit que les déboutés doivent quitter la France ; mais le maintien sur notre sol, de façon scandaleuse, de tant de clandestins, dont profitent les exploiteurs de la misère, doit beaucoup aux consignes qu'il donne aux préfets... Ce ne sera qu'un nouvel appel d'air à l'immigration clandestine.
La droite plurielle s'est illustrée dans ce débat. Mme Létard, qui appartient à son aile centriste essentiellement alignée sur la gauche, a critiqué cette disposition pourtant timide ; j'aurais pu citer Nathalie Kosciusko-Morizet et Alain Juppé... Ce n'est pas l'UMP qui va changer quelque chose... Si seulement les obligations de quitter le territoire étaient aussi bien exécutées que les ordres de Bruxelles ! Il faut rompre avec certaines postures et faux-semblants d'opposition, cesser de se soumettre à ceux qui bientôt vont nous imposer des quotas d'immigrants. Réveillons-nous avant qu'il ne soit trop tard ! Faisons enfin des lois pour ceux qui nous confient leurs suffrages, c'est-à-dire pour les Français d'abord.
Plusieurs voix à droite, au centre et à gauche. - Insupportable !
M. Stéphane Ravier. - Quittez donc l'hémicycle !
Mme Valérie Létard . - Plutôt que des postures politiciennes, servons l'intérêt général. Qu'avez-vous à proposer, monsieur Ravier, sinon des solutions inapplicables ? (Applaudissements)
Je salue la qualité de nos débats. Nous devons accueillir dans de bonnes conditions ceux qui ont besoin de la protection de la France, et en même tant traiter humainement mais fermement ceux qui ont tenté le tout pour le tout puis déposé une demande d'asile alors qu'ils ne relèvent pas de ce droit.
Je salue l'esprit d'ouverture du ministre qui est allé jusqu'à reprendre mon amendement mort-né sur la territorialisation de l'Ofpra. J'espère que la CMP aboutira, ce texte est une première étape dans la modernisation du droit de l'asile, largement issue des travaux que j'avais menés avec le député Jean-Louis Touraine en 2013.
Lisons d'abord cette loi en positif : réduction des délais d'instruction, délivrance immédiate d'une carte de séjour provisoire, création à l'article 14 bis de centres dédiés aux déboutés pour préparer le retour dans les pays d'origine, expérimentation de la territorialisation de l'Ofpra adaptée aux nouvelles grandes régions, missions foraines de la CNDA, consultation des collectivités territoriales dans l'élaboration des schémas locaux d'accueil qui déclineront le schéma national.
Un seul regret : à l'article 14, alinéa 17, le Sénat a voté le principe selon lequel une décision définitive de rejet, éventuellement après appel devant la CNDA, vaudra obligation de quitter le territoire français. Je reste convaincue que cette solution n'est pas fonctionnelle. J'ai retiré mon amendement de suppression sous l'engagement du président Bas que le dispositif serait revu en lien avec le gouvernement et l'Assemblée nationale.
Sous cette réserve, le groupe UDI-UC votera le texte issu des travaux du Sénat. L'enjeu est bien de sauver notre droit d'asile, en évitant que la procédure soit détournée, avec un dispositif plus souple, plus proche des territoires et plus opérant. Un dispositif que nous devons articuler avec une politique de l'immigration qui doit être européenne. La situation appelle des réponses urgentes et équitables. (Applaudissements au centre ; M. Didier Guillaume applaudit aussi)
Mme Catherine Troendlé . - Monsieur Ravier, nous sommes tous des législateurs responsables et éclairés.
M. Stéphane Ravier. - ça, j'en doute !
Mme Catherine Troendlé. - L'asile est un sujet d'une grande gravité, en traiter ne relève pas de postures politiciennes, nous l'avons compris, pas vous ! (Applaudissements au centre, à droite et sur les bancs socialistes et écologistes)
L'asile remonte au Moyen Âge, les persécutés pouvaient trouver refuge dans les monastères et les couvents. À la Révolution française, la France a décidé d'offrir l'asile aux persécutés en raison de leur combat pour les libertés. Ce droit est désormais inscrit au Préambule de 1946.
Aujourd'hui la procédure est à bout de souffle, elle est dévoyée et transformée en une machine à légaliser les clandestins. Il faut apporter une réponse digne à ceux qui ont besoin de protection, reconduire rapidement aux frontières ceux qui relèvent de l'immigration économique.
Le texte du gouvernement passait sous silence la question des déboutés. Ils sont nombreux : 75 % des demandes d'asile sont rejetées chaque année. Engager la procédure équivaut souvent au droit de séjour. Voici pourquoi le groupe UMP s'est attaché à réduire les délais d'instruction - trois mois au lieu de six, mais quinze jours en procédure accélérée et 96 heures lorsque le demandeur est en détention - à appliquer le principe fraus omnia corrumpit - oui le latin est important ! - à la procédure, à territorialiser l'Ofpra, à appliquer strictement la directive « Retour », à borner l'inconditionnalité de l'accueil en hébergement d'urgence par la jurisprudence du Conseil d'État. Voilà pourquoi nous avons voulu que le rejet définitif de la demande vaille OQTF, qu'un débouté ne puisse solliciter un autre titre de séjour.
Je remercie vivement MM. Buffet et Karoutchi (On renchérit à droite) pour leur détermination à rendre ce texte efficace et respectueux de la dignité humaine. (Applaudissements à droite)
M. Jean-Yves Leconte . - Je veux dire ma fierté d'avoir été chef de file du groupe socialiste sur ce texte. Réduction des délais d'instruction, garanties supplémentaires accordées au demandeur, amélioration de l'accueil sont autant d'avancées que notre Haute Assemblée a conservées. Modification de la composition du conseil d'administration de l'Ofpra, territorialisation de l'Office, missions foraines de la CNDA et renforcement du contradictoire durant la procédure, tout cela va dans le bon sens.
En revanche, monsieur le rapporteur Buffet, la loi n'a pas à envoyer de message politique. Elle n'est pas un communiqué de presse.
M. Éric Doligé. - Quand même !
M. Jean-Yves Leconte. - Le meilleur message, c'est de garantir des délais d'instruction rapides. Il est plus facile d'organiser le retour de personnes installées depuis trois ou huit mois qu'après deux ans.
Le texte du Sénat n'est pas conforme aux directives européennes, en particulier le refus du droit d'accès au marché du travail après neuf mois et le rejet de la demande valant obligation de quitter le territoire français.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - Mais non !
M. Jean-Yves Leconte. - Je veux remercier les juges de l'asile, les agents de l'Ofpra, les associations comme la Cimade et les avocats sur le terrain. Ce sont eux qui font vivre le droit d'asile au quotidien. Je veux dire à ces derniers que nous avons eu à coeur de renforcer le contradictoire et de rendre possible le passage de la procédure accélérée à la procédure normale.
Le groupe socialiste s'abstiendra en espérant une commission mixte paritaire constructive...
M. Philippe Dallier. - Ce n'est pas très courageux !
M. Jean-Yves Leconte. - Ce texte comporte des mesures inacceptables (Protestations à droite). Nous voulons un texte conforme au droit européen voté le plus rapidement possible. 60 % des demandes d'asile se font dans quatre pays mais seulement 14 % dans les pays ayant une frontière au sud de la Méditerranée, signe que le système ne fonctionne pas.
À droite. - Alors, votez le texte !
M. Jean-Yves Leconte. - Le droit pour chaque individu d'appartenir à l'humanité devrait être garanti par l'humanité elle-même disait Hannah Arendt. Si la France prend sa part d'humanité, nous aurons fait oeuvre utile. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Esther Benbassa . - Après dix ans de présence, les troupes françaises ont quitté l'Afghanistan ; interprètes, cuisiniers, jardiniers recrutés localement sont menacés de représailles. Ils sont encore 800, avec leurs familles. Le ministre a promis une réponse avant l'été. J'espère que la France ne leur tournera pas le dos.
Je disais, en discussion générale, que nous n'apporterions nos voix qu'à un texte humaniste, ambitieux et fidèle aux valeurs de la France ; que la majorité sénatoriale avait la tentation de faire de ce texte un bouclier sécuritaire anti-immigration...
Après quinze heures de discussions, il répond encore moins que le texte initial aux exigences du droit européen. Nos débats m'ont étonnée : il n'était question que de chiffres, de statistiques et de sigles barbares. Et les femmes et les hommes contraints à l'exil forcé ? Rares ont été les moments où nous les avons gratifiés d'un autre regard que celui, évoqué autrefois par Jorge Semprun, des estivants de Bayonne voyant débarquer les réfugiés rouges espagnols... Une barrière sépare ceux qui ont vécu des atrocités de ceux qui en parlent ; ils vivent sur deux planètes différentes, comme l'écrivait François Sureau dans Le Monde.
Ce texte comporte des dispositions inacceptables quand des milliers de personnes périssent en mer : décision définitive de rejet valant obligation de quitter le territoire français, interdiction aux déboutés de déposer une demande de titre de séjour sur un autre fondement, assignation à résidence dans des centres pour les déboutés, autant de dispositions qui n'honorent pas la France.
Je n'oublie pas les dizaines de milliers de républicains espagnols cantonnés en 1939 dans le camp d'Argelès-sur-Mer et déportés à Mauthausen dès 1940. Certes, le contexte n'était pas le même, mais qui nous assure qu'il ne changera pas demain ?
Le groupe écologiste votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs écologistes)
Mme Éliane Assassi . - 1 770, c'est le nombre de morts en Méditerranée depuis le début de l'année, un toutes les deux heures... Qui sont ces gens ? Pourquoi prennent-ils ce risque ? Voici la question que nous devrions collectivement nous poser. Le ministre Cazeneuve refuse les quotas tout en parlant de répartition solidaire des demandes ; Matignon évoque des quotes-parts... On joue sur les mots. Si l'on opère des calculs en fonction de la démographie, de la richesse, des efforts déjà faits, cela veut dire 14,17 % des demandes déposées en France, soit 26 000 demandeurs de plus, 7 000 régularisés de plus. Mais la France, paraît-il, assumerait déjà plus que sa part... Le groupe CRC, lui, est clair : pas de quotas, l'asile est un droit, un principe de valeur constitutionnelle.
On a beaucoup entendu dire dans nos débats que l'asile était une charge. Nous avons déposé des amendements pour supprimer l'extension de la procédure accélérée et la visioconférence, pour améliorer les droits des demandeurs et l'aide qui leur est apportée. Nous n'avons pas été entendus. Le texte a été droitisé et durci : suppression de l'accès au marché du travail après neuf mois et de l'allocation en cas de refus des conditions d'hébergement, élargissement de la procédure accélérée, réduction des délais d'instruction - les associations se demandent comment préparer un dossier dans un temps aussi contraint - déboutés assignés à résidence... Quelle surenchère démagogique et sécuritaire ! Et on voudrait nous faire croire, à droite et à l'extrême droite, que les trois quarts des demandeurs sont des fraudeurs puisque un quart seulement des demandes est accepté...
Le droit d'asile mérite mieux, nous ne devons pas en rabattre sur les valeurs de la République. Le groupe CRC votera contre. (Applaudissements sur les bancs CRC et écologistes)
Scrutin public solennel
M. le président. - Il va être procédé au scrutin public sur l'ensemble du projet de loi dont l'intitulé a été ainsi modifié : « Projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile ». Ce scrutin aura lieu en salle des Conférences, conformément aux dispositions du chapitre 15 bis de l'Instruction générale du Bureau.
La séance, suspendue à 15 h 20, reprend à 15 h 55.
M. le président. - Merci à Mmes et MM. les secrétaires du Sénat qui ont veillé au dépouillement- du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n°190 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 218 |
Pour l'adoption | 187 |
Contre | 31 |
Le Sénat a adopté.
(Applaudissements au centre et à droite)
Intervention du gouvernement
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur . - Je veux remercier tous les sénateurs et sénatrices mobilisés sur ce texte, ainsi que le rapporteur Buffet et le président Bas.
Le gouvernement a souhaité que la République continue à apporter une réponse à ceux qui demandent l'asile en France parce qu'ils sont persécutés dans leur pays. La mission historique de notre pays ne pouvait être remplie avec des délais de réponse de 24 mois, deux fois plus que la moyenne européenne. Nous ne remplissons pas non plus nos obligations en ce qui concerne l'accueil des demandeurs, faute de places en centre d'accueil de demandeurs d'asile ; leurs droits devant les instances chargées d'examiner leur dossier doivent aussi être mieux respectés.
Ce texte tient également compte de la situation internationale actuelle, qui voit de nombreux réfugiés trouver la mort en mer, victimes de réseaux de passeurs qui poursuivent leur oeuvre cynique.
Le projet de loi s'inscrit en outre dans une réalité européenne : 70 % de ceux qui débarquent en Italie ne relèvent pas de l'asile mais de l'immigration irrégulière. Si nous ne distinguons pas ces deux cas de figure, nous ne réglerons aucun problème. Nous n'arriverons à rien non plus sans un dialogue approfondi avec les pays de provenance, l'Organisation internationale pour les migrations et le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, pour permettre à ceux qui le méritent d'obtenir l'asile, pour les accompagner individuellement et les soustraire à l'exploitation par les réseaux mafieux. Je me suis rendu compte que certains pays de provenance, comme le Mali, n'étaient pas équipés pour lutter contre le phénomène.
Conjuguons accueil des demandeurs, sauvetages en mer et contrôle des frontières, grâce à Frontex. Renforcer les moyens de l'agence dissuadera les passeurs ; ce n'est pas incompatible avec le secours porté aux migrants, qui est une obligation absolue posée par le droit de la mer.
La France a inspiré une grande partie des propositions formulées par le président Juncker car il n'y a aucune raison que cinq États membres accueillent 75 % des demandeurs d'asile en Europe.
La notion de « quotas » de migrants est une mauvaise expression qui gâche une bonne disposition de l'Union européenne... L'accueil des réfugiés ne saurait obéir à des quotas car l'asile est un droit individuel reposant sur des critères objectifs. Parler de quota signifierait que, lorsque celui-ci est atteint, il faudrait refuser des réfugiés, même lorsqu'ils ont droit à l'asile.
Les migrants irréguliers, eux, n'ont pas vocation à demeurer sur le territoire mais à être reconduits vers leur pays d'origine grâce aux politiques de co-développement. La notion de quota n'a là non plus aucun sens. La lutte contre l'immigration irrégulière est la condition de la soutenabilité de notre modèle d'accueil des étrangers. Générosité et soutenabilité impliquent responsabilité, sans quoi il n'y a pas d'humanité possible.
Durant nos débats, j'ai eu à coeur de parvenir à un consensus sur un sujet aussi essentiel. Certaines modifications voulues par votre commission des lois ne me paraissaient conformes ni à notre tradition républicaine, ni aux principes constitutionnels et conventionnels.
Ainsi, que le rejet d'une demande d'asile vaille OQTF reviendrait à priver le demandeur du droit dont dispose tout étranger à demander un titre de séjour pour un autre motif. J'avais proposé pour vous satisfaire que le préfet puisse lui-même délivrer immédiatement l'OQTF, dans le respect des droits du demandeur.
J'ai veillé également à distinguer la question de l'asile de celle du séjour des étrangers, qui fera bientôt l'objet d'un autre projet de loi. Ce sont deux choses différentes, qui doivent rester clairement différenciées, comme d'ailleurs tout gouvernement l'a toujours fait.
Le texte adopté par le Sénat n'est pas conforme à celui que le gouvernement a déposé, ce qui explique l'abstention d'une partie de la minorité sénatoriale. Il est toutefois tel que je puisse raisonnablement former le voeu que la CMP aboutisse à un accord, car nous avons besoin de ce texte pour rendre notre système viable. Je salue la grande qualité du travail accompli par le Sénat.
M. Bruno Retailleau. - Et la commission !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. - Je ne voulais pas compromettre MM. Bas et Buffet ! (Sourires). Je souhaite qu'un accord soit finalement trouvé pour que le droit d'asile en France prolonge notre belle tradition républicaine. (Applaudissements sur les bancs socialistes et RDSE, ainsi que sur quelques bancs UDI-UC et UMP)
Organisme extraparlementaire (Appel à candidature)
M. le président. - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir désigner un sénateur appelé à siéger au sein du conseil d'administration de France Télévisions. La commission de la culture a été invitée à présenter une candidature. La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, conformément à l'article 9 du Règlement.
La séance est suspendue à 16 h 10.
présidence de M. Thierry Foucaud, vice-président
Secrétaires : M. Serge Larcher, M. Jackie Pierre.
La séance reprend à 16 h 15.
Nouvelle organisation territoriale de la République (Procédure accélérée - Deuxième lecture)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Discussion générale
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique . - La loi NOTRe est un enjeu important pour répondre aux injonctions contradictoires de nos concitoyens, qui veulent à la fois moins de dépenses publiques et plus d'action publique.
Ils attendent avant tout des services publics plus efficaces, favorisant toutes les solidarités, toutes les créativités. Nous nous accordons pour réduire la dette, non dans l'idée de complaire à Bruxelles mais pour éviter d'avoir à choisir entre les 44 milliards de remboursement de la dette de l'État et nos engagements d'avenir. Cela concerne nos discussions à venir car les collectivités ne peuvent plus demander des compétences générales fortes et dire leurs difficultés à faire face à leurs dépenses obligatoires.
J'ai bon espoir que nous parviendrons à un accord même si certaines déclarations caricaturales pourraient parfois me faire douter.
Le gouvernement et l'Assemblée nationale ont donné suite à plusieurs de vos propositions sur les compétences économiques des régions. Nous savons que la fusion ANPE-Assedic a compliqué le débat. Mais les moyens de conduire des politiques ambitieuses leur ont été donnés.
M. Hyest peut être rassuré : les compétences auxquelles les départements tiennent le plus - collèges et routes - sont préservées. Des compétences d'ingénierie et de solidarité leur sont également dévolues, conformément au voeu de la Haute Assemblée : c'est une innovation précieuse pour les communes rurales aux ressources fragiles.
M. Pierre-Yves Collombat. - Certainement pas !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Beaucoup a été fait pour dessiner un bon compromis sur les EPCI, afin de ne pas déstabiliser les intercommunalités nouvellement constituées.
J'entends les inquiétudes sur une disparition des communes. Le vrai problème des 25 000 d'entre elles qui comptent moins de 1 000 habitants, c'est de parvenir à exercer leurs compétences. Leur ennemi, c'est la difficulté de mettre en place les services attendus par les habitants. Plus je me déplace sur notre territoire, plus j'en suis persuadée. Le Sénat a beaucoup travaillé sur la question des mutualisations, avec par exemple les centres intercommunaux d'action sociale ; c'est dans cette voie qu'il faut aller.
Nous avons également beaucoup avancé sur les métropoles : l'Assemblée nationale a adopté conformes les dispositions relatives à Aix-Marseille-Provence, et accepté les grandes lignes du compromis trouvé entre le gouvernement et le Sénat sur la métropole du Grand Paris. S'agissant de Lyon, on en est à peaufiner.
Il nous faut continuer pour atteindre les ambitions communes : aider tous les territoires, promouvoir leur égalité. Les métropoles doivent tirer la croissance sans accroître les disparités - déjà fortes, et pas seulement entre milieu urbain et milieu rural.
L'histoire des dotations le montre : l'extrême richesse côtoie encore la grande pauvreté. Je veux saluer la mémoire de Jean Germain, qui avait beaucoup travaillé à réduire ces disparités. (On approuve vivement sur le banc des commissions)
Traçons une voie pour une démocratie locale ouverte au débat, transparente, dans laquelle chacun se sent partie prenante. Le Sénat a du courage, rejette l'immobilisme.
Grâce à lui, nous pouvons tracer cette voie. Le gouvernement propose de mettre fin à la schématologie. (On s'en félicite sur plusieurs bancs). Donnons aux régions les moyens de leur action, sans les comparer sans cesse aux Länder allemands qui ont compétence pour l'enseignement mais n'ont aucune autonomie fiscale. Adaptons notre système à la diversité de nos territoires.
Le statut de la Corse a été souhaité par tous les parlementaires, et l'Assemblée de Corse l'a validé le 12 décembre 2014. Compte tenu des délais, il n'avait pas été possible de traiter ce sujet en première lecture. Un référendum serait superflu : les élus sont les représentants de leurs mandants.
La coopération intercommunale est fondamentale pour l'équilibre de notre territoire. Mais cessons d'alimenter les peurs : ce projet de loi consacre la commune comme échelon de base de la démocratie. (Vives protestations sur les bancs RDSE et à droite).
M. Pierre-Yves Collombat. - Des communes vidées de leur substance !
Mme Sophie Primas. - Dévitalisées !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Ce texte leur permet de mieux répondre aux questions posées par nos concitoyens, en milieu rural y compris. Les maires restent les relais principaux de millions d'habitants, dont je comprends les inquiétudes. Le rapport d'Alain Bertrand sur l'hyper-ruralité a faite date.
M. Jacques Mézard. - Il reste lettre morte !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Pour sauver nos territoires des dangers de la concurrence, ce texte franchit un pas nécessaire. Tous les élus le disent : la situation actuelle n'est pas bonne (Vives protestations à droite). La loi n'est pas encore votée, elle n'en est donc pas responsable !
La nouvelle organisation territoriale de la République repose sur des principes simples : clarté, courage, coopération.
M. Charles Revet. - Vous faites tout le contraire !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Nous souhaitons faire émerger des territoires moteurs de croissance - tel est l'objet de la loi sur les métropoles - et favoriser la proximité car les communes sont le socle de notre organisation.
Renonçons aux mots d'ordre et lieux communs. Progressons vers le compromis. Sachons surmonter nos peurs et nos tentations de repli, pour faire à nouveau société ensemble. Nos concitoyens sont trop nombreux à ne plus voter, à ne plus croire au progrès ni à l'avenir de leur territoire.
Nous avons des responsabilités à assumer, pour rassurer une société française décontenancée face aux enjeux d'un XXIe siècle qui, pour beaucoup, a trop mal commencé.
M. André Reichardt. - Bla bla !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Je vous remercie de votre enthousiasme à progresser ensemble. (Rires à droite ; applaudissements sur les bancs socialistes ; M. René Vandierendonck, co-rapporteur, M. Michel Mercier et Mme Jacqueline Gourault applaudissent aussi)
M. René Vandierendonck, co-rapporteur de la commission des lois . - Comme le disait le Premier ministre le 28 octobre, la deuxième lecture du projet de loi NOTRe offre au Sénat la possibilité de jouer pleinement son rôle de législateur.
Le texte du gouvernement s'est considérablement enrichi, puisqu'il est passe de 37 à 166 articles, dont 62 issus de travaux du Sénat.
L'Assemblée nationale a globalement tenu compte des mesures adoptées au Sénat, si bien que la convergence semble possible sur un grand nombre de points. Suppression de la clause de compétence générale des régions et départements, accroissement de la compétence stratégique régionale en matière de développement économique, création de deux schémas régionaux économiques, maintien des compétences routes et collèges aux départements...
Mais il existe aussi des sujets de divergence. Le Haut Conseil des territoires d'abord. Ce nouvel organe consultatif avait été ajouté au projet de loi Métropoles à l'Assemblée nationale, pour satisfaire le souhait de certains élus de disposer d'une instance de dialogue avec l'État, puis supprimé en CMP. Cette création, qui ne doit pas faire fi du rôle constitutionnel reconnu au Sénat, ne nécessite pas d'en passer par la loi. Sa réapparition à l'Assemblée nationale nous étonne donc ; la commission des lois l'a supprimée.
L'article 22 octies élargit à tous les EPCI à fiscalité propre l'élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct, élargissant ainsi la loi Maptam selon des modalités à définir par la loi avant le 1er janvier 2017.
M. Rémy Pointereau et M. Alain Gournac. - C'est la mort des communes !
M. René Vandierendonck, co-rapporteur. - Le Sénat est favorable au suffrage universel direct communal, mais hostile à la supracommunalité ! (Applaudissements sur la plupart des bancs)
Enfin, sur la compétence d'urbanisme, l'Assemblée nationale est revenue sur une disposition adoptée par nos deux assemblées dans la loi Alur. La minorité de blocage est un signal fort, l'assurance que le transfert à l'intercommunalité se fera par l'entente, non par la contrainte.
Ces désaccords mis à part, nous pouvons converger vers un texte commun. Le maintien des compétences de proximité aux départements est nécessaire. Le gouvernement s'est engagé sur ce point. L'article 24 du projet de loi concrétise l'attribution aux départements d'une véritable compétence de solidarité territoriale et humaine ; la commission des lois a précisé ces missions de solidarité ; le schéma d'accessibilité des services publics et les missions de services au public ont également été précisées.
Les compétences collèges et voirie resteront départementales, nous avons tenu bon. Restera à préciser les choses pour le transport scolaire et interurbain. Au gouvernement de nous fournir les éléments complémentaires utiles.
Le maintien de compétences importantes aux départements s'est accompagné du transfert de compétences économiques majeures aux régions.
Le Sénat a voulu respecter tous les équilibres de la loi Maptam, notamment la répartition des rôles entre régions et métropoles en matière économique. Les soixante-dix heures de débat que M. Hyest a courageusement assumées seul...
M. Charles Revet. - ... et pleinement !
M. René Vandierendonck, co-rapporteur. - ... en témoignent.
Il a insisté pour que le Schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire (Sraddt) devenu le Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité du territoire (Sraddet) et le Schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII) soient le produit d'une co-élaboration.
Sur les aides aux entreprises, les deux assemblées convergent vers l'octroi d'une responsabilité prépondérante aux régions. Sur l'emploi, le Sénat avait donné une compétence aux régions. L'Assemblée nationale, tout en modifiant le texte, a retenu notre ambition décentralisatrice, de même que sur la coordination du service public de l'emploi, confiée à la région.
Enfin, la commission des lois a maintenu la suppression de la clause de compétence générale, tout en supprimant les ajouts de l'Assemblée nationale concernant le pouvoir réglementaire des régions, qui se heurte à des difficultés constitutionnelles et juridiques.
En latin, tandem signifie « enfin ». J'ai été heureux de celui que j'ai formé avec M. Hyest, pour faire progresser la décentralisation, mais aussi la déconcentration. (Applaudissements sur les bancs socialistes, au centre et à droite)
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur de la commission des lois . - Les collectivités territoriales sont mises à rude épreuve : baisse sévère des dotations, conjuguée à la quasi-disparition de leur autonomie fiscale depuis vingt ans... On a supprimé la vignette, la part « salaires » de la taxe professionnelle, puis créé une sorte de « truc » dénommé CVAE... Aujourd'hui, on réforme notre organisation territoriale au pas de charge, sans tenir aucun compte des réalités territoriales.
Si ce projet de loi a toutefois son utilité, c'est qu'il clarifie les compétences des diverses collectivités. Jean-Pierre Raffarin s'y était essayé, sans beaucoup de résultats, parce que chacune voulait toutes les compétences. Aujourd'hui, les moyens sont moindres, la clarification plus facile. Elle vaut mieux que de supprimer des échelons de collectivités, au mépris de notre histoire et des efforts de mutualisation des élus.
Mon co-rapporteur, René Vandierendonck, et moi-même sommes d'accord sur l'avenir des collectivités territoriales. Nous en avons l'un et l'autre une longue expérience, comme vous tous.
Un mot sur l'accompagnement vers l'emploi. Ce n'est pas rendre service aux chômeurs que de dissocier développement économique, politique de l'emploi, formation professionnelle et enseignement supérieur. L'Assemblée nationale s'est montrée timide, des marges de progression existent. L'emploi est au coeur de cette troisième étape de la décentralisation.
La commune, cellule de base de notre démocratie locale, est plus que jamais indispensable. Sans les élus locaux, ne croyez-vous pas que les choses iraient encore plus mal ? (Applaudissements) Rappelez-vous le rapport Raffarin-Krattinger, le rapport Belot...
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Je les ai entièrement lus !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Soit, mais peut-être ne les avez-vous pas entièrement retenus. (Rires sur divers bancs ; Mme la ministre rit également.) La supracommunalité et ses avatars, nous n'en voulons pas. Les regroupements volontaires de communes ne sont pas la panacée, nous verrons bien dans quelque temps combien se seront formés. La commission des lois a réaffirmé le principe de l'intercommunalité, par lequel les communes rassemblent leurs forces pour plus d'efficacité - et peut-être quelques économies, mais cela n'est pas encore apparu !
M. Bruno Sido. - C'est le moins qu'on puisse dire !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - La loi de 2010, si critiquée en ce qui concernait le seuil de l'intercommunalité, les pouvoirs du préfet ou les compétences obligatoires, apparaît rétrospectivement presque timide. Elle a pourtant permis, avec le seuil de 5 000 habitants, de couvrir tout le territoire en intercommunalités. Aujourd'hui, on veut diviser par deux leur nombre. Pour quoi faire ? Selon quelle étude d'impact ? Je croyais qu'il n'était plus question de leur transférer des compétences départementales...
Le seuil de 20 000 habitants, avec des dérogations pour les zones hyper-rurales, n'est pas adapté aux secteurs ruraux ayant une métropole ou une partie fortement urbanisée. (Applaudissements sur divers bancs)
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - C'est le contraire !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - La commission propose de maintenir le seuil de 5 000 habitants en tenant compte des spécificités des montagnes et des îles. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Jacqueline Gourault. - Ah oui ! Il ne faut pas oublier l'île d'Yeu pour M. Retailleau ! (Sourires)
Mme Marylise Lebranchu, ministre, rapporteur. - C'est déjà le cas !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Sur l'eau et l'assainissement, laissons mûrir les choses au lieu de multiplier les compétences obligatoires. Les élus - je ne parle pas de ceux qui s'expriment en leur nom... (Sourires)
Mme Jacqueline Gourault. - M. le rapporteur est contre le monde associatif !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Je ne vise pas l'association qui regroupe toutes les communes de France, seulement certaines de ses sous-filiales. (Sourires) Les mariages forcés sont toujours malvenus. L'absorption d'un territoire rural dans une communauté urbaine ne constitue pas un bon aménagement du territoire ! Nous parlerons de la Corse, mais aussi du Grand Paris.
M. Roger Karoutchi. - C'est sûr !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - J'espère que le texte issu de nos travaux confortera la décentralisation.
L'équilibre des territoires est à conforter ainsi que la commune, à laquelle les Français sont attachés, n'en déplaise aux experts auto-proclamés et aux comités Théodule. (Applaudissements sur les bancs UMP, au centre et sur plusieurs bancs socialistes)
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis de la commission de la culture . - En matière culturelle et sportive, ce projet de loi est très loin de ses ambitions déclarées. Félicitons-nous que l'Assemblée nationale ait accepté de maintenir les collèges dans le giron des départements. Il n'en a pas été de même des transports scolaires... Merci à la commission des lois de nous avoir suivis et de refuser le transfert.
Je veux insister sur la nécessité d'une politique volontariste pour la culture et le sport. Ce texte en fait des compétences partagées : c'est énoncer une évidence, même si le gouvernement le présente comme une avancée ! Car tout le monde est concerné. Mais des centres d'art, des conservatoires ferment, des festivals sont annulés, faute de moyens. Si l'État promet de maintenir pendant trois ans les crédits de la culture, les collectivités territoriales, elles, voient leurs dotations fondre, ce qui pèse lourdement sur les projets et activités culturels... Quand la ressource est rare, il faut l'utiliser à bon escient, grâce à une meilleure coordination. La loi doit donc organiser l'exercice conjoint de ces compétences, dans les conférences territoriales de l'action publique (CTAP) sur les thèmes « Sport » et « Culture ». La commission des lois les a acceptés, et je l'en remercie, ainsi que la commission de la culture de l'Assemblée nationale, mais ni la commission des lois de celle-ci, ni le gouvernement n'étaient d'accord... Pourtant, si chacun agit à sa guise, la culture et le sport seront relégués à la fin de l'ordre du jour des conférences territoriales. Les doublons et dépenses inutiles se multiplieront.
Des initiatives existent pour des politiques culturelles concertées, par exemple en Pays de Loire ; d'autres chartes régionales existent. Poursuivons dans cette voie. La culture et le sport sont une question, non de bonnes volontés, mais de volontarisme, car ils consolident notre vie en société. (M. Charles Revet approuve) C'est une défenseure ardente de la décentralisation qui vous le dit ! (Applaudissements sur les bancs au centre et à droite)
M. Ronan Dantec . - Je caressais l'espoir que le Sénat vote conforme le magnifique article 22 octies, qui prévoit l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires. Hélas, ce frêle vaisseau s'est fracassé sur le récif de la commission des lois comme dans un roman de Jules Verne...
Le Sénat détricote toutes les avancées législatives, il tourne ainsi le dos à la réalité des territoires et à l'aspiration démocratique des citoyens. Comment pouvons-nous avoir des expériences locales aussi différentes ? À Nantes, les habitants des petites communes périphériques n'ont pas le même accès aux débats intercommunaux. Le Sénat devrait être le moteur, et non le frein, des réformes territoriales !
Le gouvernement souhaitait rendre lisibles les compétences des collectivités territoriales : l'économie aux régions, le social aux départements, puisqu'il n'est plus question de les faire disparaître, et les solidarités au bloc communal. Le groupe écologiste ne s'est pas opposé au maintien des départements et de leurs compétences sociales - il a évolué lui aussi. Quant aux autres compétences, où est la logique ? Pourquoi laisser aux départements les petites lignes ferroviaires qu'ils n'ont pas les moyens d'entretenir ? « C'est à moi, donc je le garde » ? Il est légitime de transférer un certain nombre de compétences aux régions. Il est vrai que la création de méga-ensembles a chamboulé les termes du débat !
Ce sont les régions qui se chargeront de l'aménagement du territoire et de l'égalité territoriale. Attention à ce que le maintien de prérogatives aux départements n'autorise pas les premières à se défausser sur les seconds, qui n'en ont pas les moyens. Garantie ou piège ? Par son attitude défensive, en entretenant la méfiance entre territoires, y compris très proches, le Sénat fait fausse route.
De même, maintenir la voirie ou les ports et les lignes ferroviaires dans le giron des départements ne favorise pas la cohérence de la politique de mobilité confiée aux régions.
La protection de la biodiversité, elle, a vocation à s'intégrer dans la politique régionale d'aménagement du territoire. Mais comment préserver la continuité écologique sans que celle-ci soit intégrée dans les schémas régionaux ? Le comité trame verte et bleue n'est même pas consulté !
Nous avons besoin d'intercommunalités de taille suffisante, pour plus de cohérence, d'efficacité et de mutualisation - sur laquelle le texte a progressé.
Je reviendrai sur d'autres avancées démocratiques que nous souhaitons, renforcement des droits de l'opposition dans les petites communes, pouvoir d'adaptation législative des régions, pouvoirs des Conseils économiques, sociaux et environnementaux (Ceser)... adoptés par les députés, ils ont hélas été supprimés en commission des lois.
À l'abord de cette deuxième lecture, les écologistes ont le sentiment d'une occasion manquée. (Applaudissements sur les bancs écologistes)
M. Christian Favier . - Chacun sait ici combien les élus, les agents, la population s'inquiètent et doutent de la pertinence de cette réforme territoriale. Les citoyens ont de plus en plus de mal à savoir qui fait quoi. La baisse des dotations conduit à une action publique locale low cost... Et nous n'en sommes qu'au début du processus.
La suppression de la clause de compétence générale est une atteinte grave au principe de libre administration. L'austérité imposée aux collectivités territoriales, avec 28 milliards d'euros de dotations en moins sur trois ans alors que les cadeaux aux entreprises se multiplient, est aussi une absurdité, qui conduit à réduire les subventions aux associations, à réduire les services publics locaux, à éloigner le pouvoir des citoyens. Cette recentralisation ne fait qu'alimenter les populismes.
Le projet de loi poursuit dans la même voie, mêlant réduction de la dépense publique locale et recul de la démocratie locale. Il est à la décentralisation ce que la Restauration fut à la Révolution française : un retour en arrière inquiétant.
Les régions exerceront désormais une tutelle sur les autres collectivités territoriales, et un pouvoir réglementaire : nous changeons ainsi de République sans que les citoyens soient appelés à se prononcer. Nous entrons dans une République fédérale, au sein d'une Europe supranationale. L'AMF craint une disparition programmée des communes.
Les regroupements autoritaires de communes se poursuivent, les transferts de compétences obligatoires aux EPCI se multiplient. Des maisons de services au public - et non de services publics - seront ouvertes sans concertation avec les communes. Demain, celles-ci ne décideront plus seules de leur taux d'imposition fiscale, elles perdent le pouvoir fiscal au profit de l'intercommunalité. Au reste, la réforme de la DGF prévoit déjà le transfert de la dotation de la commune à l'intercommunalité.
Et que dire de l'élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct ! Les communes seront réduites au rang d'arrondissements administratifs de seconde zone... Le département, lui, est promis à devenir une simple assemblée d'intercommunalité. Bref, nous aurons des régions et des intercommunalités en lieu et place des communes et des départements.
Le texte réduit les possibilités d'expression du peuple, en supprimant sa consultation lors d'une modification des périmètres territoriaux. Le gouvernement a accepté la création d'une Assemblée unique de Corse, que les habitants avaient rejetée par référendum il y a quelques années.
Ce texte est inspiré par des choix profondément libéraux, qui font de la concurrence l'alpha et l'oméga de toute réussite.
Mettant à mal les services publics, seule richesse de ceux qui n'en ont pas, caporalisant les collectivités territoriales et faisant disparaître celles qui sont au plus près des citoyens, vous oubliez ces derniers et les besoins qu'ils expriment. Nos 36 000 communes, nos 500 000 élus sont une richesse. Nos territoires n'ont pas besoin de moins de démocratie, de moins de proximité mais au contraire de plus d'écoute, de plus d'accompagnement, de plus de soutien.
Les premiers reculs du gouvernement à l'Assemblée nationale trahissent sa fébrilité et son impréparation. Nous défendons, nous, une République dont l'action publique locale soit mise au service des besoins des habitants et de l'intérêt général. Le groupe CRC a déposé des amendements inspirés des conclusions des États généraux des collectivités territoriales. Nous ne pourrons voter le texte en l'état. (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Jacques Mézard . - Est-ce ici la conclusion de la réforme territoriale ? Je ne le crois pas, tant le gouvernement a oublié que la ligne droite était le meilleur chemin pour aller d'un point à un autre... (Sourires) Le projet de loi NOTRe est l'oeuvre de gauchers contrariés... Fort heureusement, nos rapporteurs ont corrigé la trajectoire par un travail conjoint et solidaire. Pour moi, ce texte s'appelle plutôt le projet de loi LEURRE... Les élus locaux finissent par y perdre le latin qu'ils avaient, pour beaucoup, eu la chance d'apprendre... (Sourires)
Nous avons voté la loi Maptam. Nous appelions de vos voeux des régions de taille européenne, conformément au rapport Raffarin-Krattinger, des locomotives pour les territoires et non des machines à absorber la substance vitale des territoires interstitiels : les villes moyennes et les territoires ruraux seront les principales victimes. Nous aurions aussi souhaité que la réforme de l'organisation territoriale soit menée conjointement avec celle de leurs ressources. (Applaudissements des bancs RDSE jusqu'aux bancs UMP)
Nous voulions de la simplification, de la liberté pour les collectivités territoriales. Sous couvert de coopération, vous nous offrez la complexité avec une accumulation de conférences, de hauts et bas conseils tandis qu'une tutelle des régions, tenues par des grands féodaux, s'impose sur les autres collectivités territoriales. Nous continuons à préconiser la suppression d'un grand nombre de syndicats mixtes, agences et associations parapubliques - sachant que certaines sont utiles. Quant aux pays, votre opiniâtreté à les maintenir n'a d'égale que la nôtre à les supprimer... La France vue de Bercy, du Conseil d'État ou de l'ENA n'est pas celle que vivent les élus ! (Applaudissements sur les mêmes bancs) Laissez-nous respirer, redonner une réalité au contrôle de légalité et de la liberté aux collectivités territoriales !
Une partie de l'exécutif rêve d'une République sans départements, sans communes et sans Sénat. Cela peut se concevoir, c'est respectable, mais il faut l'assumer. Au lieu de cela, nous avons eu droit à un salmigondis de textes et de déclarations et à d'innombrables revirements. Nous avons voté la loi Maptam, contre le binôme. Le département va disparaître... puis réapparaît... Mais l'étude d'impact continue d'évoquer leur suppression à l'horizon 2021. Il est vrai que créer 13 grandes régions et supprimer en même temps les conseils départementaux... Lisez, je le dis en passant, le rapport de France Stratégie : certains départements n'ont rien à faire dans leurs nouvelles régions... C'est le cas du mien... Avec les membres du RDSE et Jean-Michel Baylet, nous avons plaidé pour l'existence des départements. Le Premier ministre nous a entendus, nous lui en savons gré.
Reste la répartition des compétences à arbitrer. Nous attendons que le gouvernement revoie sa position, par exemple sur les transports scolaires, et qu'il considère que l'éloignement est antagoniste... de la proximité.
Nous ne voulons pas de votre conférence territoriale qui sera un instrument aux mains du président du conseil général ou un lieu de bavardage - ou les deux. Assez de schémas régionaux, surtout lorsqu'ils sont prescriptifs - c'est à nos yeux contraire au principe de non-tutelle énoncé par l'article 72 de la Constitution. (Applaudissements sur les bancs du RDSE, au centre et à droite)
Les intercommunalités... Quelle mouche vous a piquée, madame la ministre, pour fixer ce seuil des 20 000 habitants ?
M. Bruno Sido. - La mouche tsé-tsé !
M. Jacques Mézard. - Vous parlez de la diversité des territoires, puis vous fixez un seuil unique pour tous...
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Mais non !
M. Jacques Mézard. - ... de manière arbitraire, sans aucune concertation... Faciliter la fusion, oui, la création de communes nouvelles, oui, mais dans la liberté... Quant à l'élection des conseillers communautaires au suffrage universel, c'est la fin des communes, il faut le dire ! (Applaudissements sur les bancs du RDSE, au centre et à droite)
Le rétablissement du Haut Conseil des territoires est un acte de défiance à l'égard du Sénat, représentant constitutionnel des collectivités territoriales. Vous vous étiez engagée à respecter la position du Sénat, madame la ministre ; mais les promesses n'engagent que ceux qui les entendent... L'adoption de l'amendement rétablissant le Haut Conseil des territoires avec la complicité d'un député UMP et d'une députée socialiste était manifestement orchestrée.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Mais non !
M. Jacques Mézard. - À l'Assemblée nationale, vous vous êtes déclarée favorable à l'amendement mais défavorable à l'appellation de la nouvelle instance... Vous vous êtes moquée de nous...
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - C'est une demande de l'AMF !
M. Jacques Mézard. - Et ce n'est pas bien. Le Haut Conseil des territoires et tous ses avatars doivent être définitivement supprimés. Notre vote dépendra de l'attention que vous porterez à ces différents points. (Applaudissements sur les bancs RDSE, au centre et à droite)
M. Michel Mercier . - Il n'est pas plus facile pour le groupe centriste que pour les autres groupes de présenter devant le Sénat sa position. Comme tous ici, nous sommes des élus. Et tous, nous vivons la diversité de nos territoires.
Nous voulons que cette loi soit la dernière ! (M. Philippe Dallier ironise) Qu'on attende avant de retoucher au Grand Paris ou à Aix-Marseille ! Les élus sont saturés, ils n'en peuvent plus, surtout que nous sommes en train de défaire ce que nous avons fait il y a six mois... Nous voulons souffler. (Applaudissements au centre et à droite)
Pour cela, nous devons trouver un accord avec l'Assemblée nationale - abomination ! Non pas sur les collectivités territoriales telles que nous avons reçues mais sur des collectivités territoriales adaptées aux besoins d'aujourd'hui et de demain. Le principe d'adaptation est à la base de l'idée française de service public, dans la tradition de Léon Duguit.
M. René Vandierendonck, co-rapporteur. - Très bien !
M. Michel Mercier. - Il ne faut pas bouger pour bouger mais adapter nos structures territoriales à la réalité, aux territoires vécus - j'aime bien cette expression. Des gens habitent quelque part, travaillent ailleurs, vont au cinéma ou au théâtre ailleurs encore. Regardons les territoires vécus pour rendre les Français plus heureux. (Applaudissements au centre)
Les députés se sont un peu amusés... Ils ont réintroduit le Haut Conseil des territoires pour nous exciter. Disons non calmement et n'en parlons plus, disons non aussi à l'AMF et à Jacques Pélissard qui est un de mes vieux copains de faculté...
Même chose pour l'élection des conseillers communautaires ; non, nous n'en voulons pas, et passons aux choses concrètes.
Je salue le travail de la commission tout en émettant des réserves sur les délégations. Celui qui a la compétence doit l'exercer, il se débrouille et il en rend compte devant les électeurs.
M. Bruno Sido. - Juste !
M. Michel Mercier. - Il y a des affaires compliquées : le seuil de l'intercommunalité. On n'en met pas (M. Pierre-Yves Collombat applaudit), c'est la position de la commission des lois. J'y suis assez favorable, mais il faut trouver un accord... Et je crois qu'on y arrivera. Le seuil de 20 000 est trop élevé, on peut sans doute retenir un niveau inférieur. En tout cas faire confiance aux élus locaux et redonner du pouvoir aux Commissions départementales de la coopération intercommunale (CDCI) pour la définition des seuils et des plafonds.
Une dernière chose, on ne se réforme pas en fonction des dotations de l'État. Je le dis aux maires, ne choisissez pas une structure pour la mesure financière qui l'accompagne ; qui sait si demain il y en aura encore ? Attention aux bonifications de la DGF, je crois bien que l'Assemblée nationale en a voté une. (Applaudissements au centre)
M. Bruno Retailleau . - Je salue le travail de la commission des lois. En vous écoutant, madame la ministre, je me demandais si nous parlions du même texte tant votre vision est irénique, en décalage avec la réalité.
Depuis plusieurs mois, dans nos départements, nous voyons des préfets presser le pas, faire comme si le seuil des 20 000 habitants était gravé dans le marbre. Madame la ministre, considérez-vous que le Sénat et l'Assemblée nationale servent à quelque chose ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Oui !
M. Bruno Retailleau. - Leur avez-vous donné des consignes ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Non !
M. Bruno Retailleau. - Alors donnez-leur en d'autres et ramenez-les au bon sens républicain.
Ce texte a été écrit sur un coin de bureau après quelques coups de téléphone avec des éléphants...
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Un peu caricatural...
M. Bruno Retailleau. - Ce texte de réforme territoriale est le premier dénué de toute ambition décentralisatrice. Il est marqué par une double erreur, l'erreur d'abord que les régions, chargées de la formation professionnelle, n'auront pas la responsabilité de coordonner la politique de l'emploi ; l'erreur ensuite d'aucune réflexion d'ensemble sur les ressources et le périmètre d'intervention de l'État.
Autre défaut, il ne répond pas aux crises territoriale et civique. Crise territoriale parce que le seuil arbitraire et des schémas prescriptifs tombés d'en haut sont ressentis comme des contraintes insupportables. Crise civique ensuite : les élus, tandis que l'État se rétracte, sont de plus en plus découragés. Que ferons-nous quand ils le seront totalement ? Qui recoudra le tissu social déchiré si nos 500 000 élus baissent les bras ?
Troisième défaut, ce texte ne remplit pas ses objectifs. La simplification ? Nous aurons de grandes régions, des mastodontes, de gros machins presqu'aussi grands que certains États européens, alors que la France n'a pas de tradition fédérale ; des départements heureusement toujours vivants ; un Haut Conseil des Territoires, chiffon rouge à l'intention du Sénat ; et une répartition des compétences sans cohérence ni logique. Pas de simplification, pas de cohérence, donc pas d'économies. L'éloignement coûtera cher et la France reste championne du monde des dépenses publiques.
Le Sénat, qui est le Conseil des territoires, veut être entendu au moment où l'on parle tant de civisme et de citoyenneté : cessons d'embêter les élus sans lesquels il n'est pas de cité vivante. (Applaudissements à droite)
M. Michel Delebarre . - C'est reparti pour un tour... (Sourires) Madame Lebranchu, quel plaisir de vous revoir... (Même mouvement) Le gouvernement a eu le courage de réformer la carte des régions et de clarifier les compétences des collectivités territoriales ; c'est ce qui nous réunit régulièrement... Nous ressentons un peu de fatigue, nous ne savons pas au moment où commence l'exercice où nous allons, nous tâtonnons. Heureusement, nos rapporteurs nous aident à trouver la piste. Plus de 700 amendements pour une deuxième lecture. Faites un effort, chers collègues.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - Vous en voulez 1 000 !
M. Roger Karoutchi. - Attendez la troisième lecture...
M. Michel Delebarre. - Les rapporteurs ont donné ce matin beaucoup d'avis défavorables... Peut-être pourrait-on se passer de présenter les amendements qui auraient reçu pareil avis...
M. Roger Karoutchi. - Hélas, la Constitution garantit le droit d'amendement...
M. Michel Delebarre. - Comme en première lecture, le groupe socialiste propose d'abaisser le seuil de l'intercommunalité à 15 000...
M. Philippe Dallier. - Oh non !
M. Pierre-Yves Collombat. - Quel effort !
M. Michel Delebarre. - Si vous nous aviez écoutés en première lecture... La nouveauté, c'est l'intégration des adaptations retenues par l'Assemblée nationale. 719 des 2134 EPCI fusionneraient... C'est un progrès. Je regrette que la commission des lois s'en soit tenue à la loi de 2010. (M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur, proteste) Monsieur Hyest, si je devais citer toutes les innovations dont vous êtes à l'origine... Vous êtes un intellectuel qui progresse... Ce matin, dans les couloirs, j'ai croisé le président Mercier. Une journée qui commence bien... J'ai également croisé Mme la présidente Gourault. L'un comme l'autre m'ont dit que l'affaire des 15 000 leur convenait... Voilà la base d'un accord avec l'Assemblée nationale. Retenez vos applaudissements... (Sourires)
M. Philippe Dallier. - Il nous en faudrait plus !
M. Michel Delebarre. - Intégrez cette donnée et nous nous retrouverons dans quelques jours malgré l'incertitude du départ. Je pourrai vous donner d'autres illustrations. Le Sénat peut être à l'origine de l'accord ; montrez-le ! (Applaudissements sur les bancs socialistes ; Mme Jacqueline Gourault applaudit aussi)
M. Jean-Jacques Lasserre . - Combien de fois avons-nous dit que l'approche fractionnée posait problème ? Que le découpage des cantons était un saccage ? Que définir les périmètres sans les ressources n'était pas de bonne méthode ?
Tordons le cou à quelques poncifs. Le millefeuille administratif n'est pas la cause de toutes les dérives financières ; parfois, c'est la gestion des collectivités territoriales qui l'est. Atteindre une taille critique n'est pas gage d'économies. Des seuils arbitraires pour chacun de nos territoires ne simplifient guère notre administration. La diminution du nombre de communes n'est en rien un gage de modernité. Le découpage administratif imposé ne remplacera jamais la volonté de se rassembler...
Redonnons voix aux élus locaux à travers les CDCI. Les préfets, eux, ne sont pas investis de la clause de compétence générale.
La loi doit renforcer le couple commune-département dans des régions surdimensionnées, favoriser les partenariats, donner une place majeure aux collectivités territoriales dans l'élaboration des schémas régionaux. (Applaudissements au centre et à droite)
M. François Baroin . - (Marques d'encouragement à droite) Personne ne nie que les collectivités territoriales doivent s'adapter aux nouveaux enjeux. Nous nourrissions de grands espoirs, nous avons été déçus, frustrés car l'ordre des priorités a été inversé. Chacun comprendra que je porte la parole des maires de France. Il aurait fallu parler de l'action de l'État avant de confier une compétence à tel ou tel niveau. Après quelques mois, on ne comprend plus rien, on ne sait plus qui fait quoi. La France ne peut pas se réduire à 12 métropoles et à 13 régions ; la France, ce sont 36 000 communes dont 33 000 ont moins de 3 500 habitants. Nous ne voulons pas d'une grande transhumance inhumaine vers les villes. (Applaudissements à droite) Il faut des points forts mais aussi des points d'appui.
Les textes se sont succédés dans la confusion : on a rétabli puis supprimé la CGC, idem pour les départements ; on a créé artificiellement de grandes régions - on voit bien dans quelle difficulté sont aujourd'hui les préfets... Les élus locaux sont les victimes de ces incessants mouvements législatifs. L'AMF est en phase avec les autres associations d'élus même si nous avons des débats nourris sur la clé de répartition des ressources. Le bloc communal ne peut supporter 58 % de l'effort demandé aux collectivités territoriales ; nous allons en discuter sérieusement avec le gouvernement.
Aucun maire ne conteste la nécessité de mutualiser les services pour les rendre plus efficaces. En revanche, pourquoi avoir alourdi la procédure ? Pourquoi le seuil de 20 000 ? La défiance se propage. Les technocrates n'ont jamais eu de mandat local, ils se trompent parce qu'ils ignorent la réalité des territoires.
Ancien ministre du budget, je vous le dis : ne sacrifiez pas l'investissement local sur l'autel de Bruxelles. C'est le principal moteur de la croissance et nous ne serons pas un meilleur élève pour autant ! (Applaudissements à droite) 30 % d'investissement public en moins en 2017 pourrait nous coûter jusqu'à un point de croissance...
Dès fin 2015, nous aurons au moins 1 000 communes dans le rouge et la moitié d'entre elles en 2017 si l'on poursuit sur la même voie. Si l'État veut administrer les collectivités, qu'il le dise tout de suite.
M. François-Noël Buffet. - Très bien !
M. François Baroin. - Il faut porter le débat devant les Français. Je ne développe pas plus, le débat se poursuivra. Merci. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Philippe Kaltenbach . - J'ai entendu beaucoup de critiques à l'égard du texte, de nos débats. Souvenez-vous d'où nous sommes partis : on est passé de 37 articles dans le projet de loi initial à 166, on a renforcé les départements, qu'il était question de supprimer. Je suis fier de ce travail réalisé au Sénat et à l'Assemblée nationale.
Le groupe socialiste fera tout pour aboutir à un accord avec l'Assemblée nationale sur ce texte qui est le fruit d'une coproduction législative. Ne laissons pas le dernier mot aux députés sur des sujets auxquels nous tenons. J'ajoute que citoyens et élus locaux veulent de la stabilité. Le président du Sénat le disait il y a quelques jours en mettant en garde contre les effets de manche. J'ignore de qui il voulait parler.
Il y a déjà des points d'accord : la suppression de la clause générale de compétence, les collèges et les routes restés aux départements, la compétence régionale en matière économique. Il reste des points de friction : le seuil des intercommunalités. La droite semble arc-boutée sur le seuil actuel, l'Assemblée nationale sur celui de 20 000 habitants. Dans un pays grand comme la France, il faut un cadre. Le seuil de 15 000 peut fonder un compromis.
M. Jacques Mézard. - Cela n'aurait aucun sens !
Mme Natacha Bouchart. - Laissez vivre les élus locaux !
M. Philippe Kaltenbach. - La question est de bien placer le curseur : depuis la première lecture, le groupe socialiste propose un seuil de 15 000. Autres points de désaccord sur lesquels le groupe socialiste sera extrêmement ferme : la création du Haut Conseil des territoires, qui signerait la mort du Sénat, le remaniement du dispositif sur le PLUI et l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires. Ces trois points ne sont pas négligeables.
Un point qui m'est cher : un conseil métropolitain de 200 membres pour le Grand Paris nous satisfait... (Marques d'impatience à droite) Le gouvernement a déposé un amendement en ce sens.
M. Philippe Dallier. - Ce n'est pas le seul point de cet amendement...
M. Philippe Kaltenbach. - Faisons aboutir cette grande réforme territoriale que nos concitoyens attendent pour de meilleurs services publics locaux. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Marc Gabouty . - La discussion de ce projet de loi aurait pu être consensuelle. Encore aurait-il fallu que le gouvernement entende les élus. Mais son texte est fondé sur l'idée fausse que la taille serait un gage d'efficacité. Un seul exemple : les transports scolaires sont mieux gérés au plus près par les départements que par les régions. Résultat, leur compétence est dévolue à la région qui délèguera la mission aux départements. Où est la simplification ?
Ce texte est dénué d'une véritable ambition décentralisatrice : tous les transferts se font du bas vers le haut. On crée un Haut Conseil des territoires ; en revanche, on ne supprime pas les Ceser pour des raisons politiques. Malgré la qualité de leurs membres, ces structures coûtent cher pour une contribution à la politique régionale qui ne le justifie pas. Il faut avoir le courage de le leur dire. Je l'ai fait dans ma région, je suis ressorti vivant de cette séance ! (Sourires)
Je suis maire, j'ai créé une communauté de communes, j'ai plaidé contre l'État au tribunal administratif - j'ai perdu (Sourires) - et ma commune fait désormais partie d'une communauté d'agglomération. Je peux vous le dire : nous avons dérivé vers la supracommunalité. Pour ceux qui sont réticents à aller plus loin, l'on propose la méthode de la carotte et du bâton...
Certes, les plus petites communes peuvent se regrouper pour être plus efficaces ; mais laissons-leur la liberté de le faire. Faisons confiance aux élus, et aux électeurs. Je souhaite que nous arrivions à un accord sur la base des propositions réalistes de la commission des lois. Madame la ministre, faites confiance à la sagesse du Sénat. (Applaudissements au centre et sur quelques bancs à droite)
M. Roger Karoutchi . - La France est confrontée à deux défis : celui de la démocratie, celui de ses finances. Soit on fait confiance aux élus locaux, soit on s'en remet à une tradition recentralisatrice et jacobine. Vous avez choisi cette dernière méthode. Ainsi, le Haut Conseil des territoires mènera immanquablement à l'extinction du Sénat. (M. Jacques Mézard renchérit)
Pourquoi ce seuil de 20 000 habitants pour les intercommunalités ? M. Kaltenbach se rallie au seuil de 15 000. Pourquoi ? Est-ce un jeu de bonneteau ? Pourquoi donner de tels pouvoirs aux préfets ? Tout est à l'avenant.
Madame la ministre, vous avez reçu les élus locaux sur le Grand Paris ; ils craignent eux aussi la recentralisation. Je n'étais pas favorable à la métropole ; je m'y suis rallié, même si cela conduit à ajouter encore un échelon territorial. Quant à l'équilibre financier au sein de la métropole, plus personne n'y comprend rien ; même les préfectures avouent ne rien y comprendre, et faire des calculs approximatifs sur la péréquation financière. Vous faites fi d'un vote à 94 % et créez une structure totalement technocratique dans laquelle personne ne se retrouve. Et voici que le gouvernement dépose une liasse d'amendements, sans doute pour évincer quelques personnes du conseil métropolitain.
Soit vous faites confiance aux élus locaux, et vous laissez le Conseil des élus de la métropole et le Sénat se prononcer, soit vous reniez la tradition décentralisatrice française et vous laissez la main aux énarques, lesquels ne font aucune confiance aux élus. Ce n'est pas avec une telle bataille entre élus locaux et gouvernement que nous sortirons de la crise. (Applaudissements à droite)
M. Yannick Botrel . - Depuis plusieurs décennies, notre pays a connu des évolutions institutionnelles et subi de fortes évolutions sociétales que même l'Insee n'avait pas prévues - il prévoyait ainsi que les Côtes d'Armor se dépeupleraient et c'est le contraire qui se produit. Les populations se sont déplacées et formulent de nouvelles demandes d'équipements collectifs. Jadis, le maire s'occupait essentiellement de la voirie ; désormais, ses administrés réclament haut débit et transports publics.
Les intercommunalités ont progressé, exerçant des compétences déléguées consensuellement par les communes. Ce quatrième échelon doit trouver sa place dans notre architecture institutionnelle, alors que nous modifions la carte régionale et repensons le rôle des départements. Notre pays a changé profondément, mais la place de la commune doit être confortée.
J'en viens au texte proprement dit. Celui-ci clarifie notre organisation : guichets uniques, nomenclature comptable M57 renouvelée, suppression de la clause de compétence générale.
Les élus, le président Larcher a raison, ont besoin de stabilité législative et réglementaire. Favorisons une adoption rapide et consensuelle de ce projet de loi pour qu'on n'y revienne pas dans les années à venir.
Sur le seuil des intercommunalités, veillons à ne pas laisser le dernier mot à nos collègues du Palais Bourbon. La rédaction actuelle nous empêche de peser sur la décision finale. Le groupe socialiste est soucieux d'aboutir à une CMP conclusive, dans l'intérêt des collectivités territoriales, de nos concitoyens et du Sénat. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Bruno Sido . - Une fois n'est pas coutume, le gouvernement a fait preuve d'un état d'esprit constructif au long de la procédure parlementaire. Je ne reviens pas sur les efforts de la commission des lois pour préserver les départements ; je salue néanmoins le remarquable travail des rapporteurs et du président Bas.
La commission des lois a heureusement maintenu le seuil de 5 000 habitants pour la création d'un EPCI à fiscalité propre. Les dérogations pour les territoires à faible densité démographique sont bienvenues. Les schémas départementaux de coopération intercommunale ont été adoptés en 2011, c'était hier. Confortons l'existant, quitte à encourager la création de communes nouvelles. Je suis convaincu de la pertinence de l'échelon départemental. Reconnaître au département des compétences de proximité tandis que l'on confie des missions stratégiques aux régions, va dans le bon sens : dans le contexte actuel, les Français ont plus que jamais besoin des services publics départementaux.
Le texte clarifie le « qui fait quoi » entre région et département. La perte de la clause de compétence générale pourrait être compensée par des solutions innovantes, comme la mutualisation, qui remet perpétuellement en question la pertinence des politiques menées. Le faire-ensemble est une approche efficiente pour tous.
La fusion des conseils départementaux et des syndicats départementaux est selon certains une autre solution pour améliorer l'efficacité des services publics locaux. Notre pays consacre en effet 57,5 % de son PIB en dépense publique, ce qui lui confère la palme d'or des pays de l'OCDE, devant le Danemark...
M. Gérard Collomb . - Madame la ministre, je me souviens du début de votre engagement sur la réforme des collectivités territoriales. Peu de gens imaginaient que nous en arriverions là, devant le Sénat ! Quand les vents sont contraires, il faut tirer de bords et, quand on veut réformer notre organisation territoriale, les vents sont toujours contraires ; il est plus facile d'avoir des majorités contre que pour.
Lors de la réforme lancée en 2010 par Nicolas Sarkozy, la gauche en appelait aux 36 000 communes et aux 500 000 élus locaux ; c'est aujourd'hui la droite qui le fait. Il faut pourtant bien progresser. Depuis les menaces de certains maires camarguais de se pendre aux arbres pour empêcher la création de la métropole Aix-Marseille, nous avons progressé et grâce au Sénat ! Et le texte final sera plus proche de celui du Sénat que de celui de l'Assemblée nationale. Lisez Paul Krugman et les économistes de la nouvelle économie géographique ; lisez Laurent Davezies. Les métropoles sont une nécessité pour tirer leur territoire. Mais on ne saurait avoir la même organisation territoriale partout. Il faut adapter celle-ci aux réalités.
Si nous progressons ensemble, personne ne remettra en cause ce que nous aurons fait. (Applaudissements sur les bancs socialistes, Mme Jacqueline Gourault applaudit aussi)
M. Alain Fouché . - Depuis trente-cinq ans, on passe son temps en France à décentraliser et à recentraliser. Les hauts fonctionnaires sont souvent bien éloignés des territoires...
Mme Sylvie Goy-Chavent. - C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Alain Fouché. - La loi Defferre est sans doute la plus novatrice de toutes. Et ce projet de loi engage à présent une recentralisation qui éloignera les services publics des habitants. L'État se désengage de tout ; les collectivités territoriales et les syndicats mixtes sont contraints de prendre le relais. Les préfectures se comportent le plus souvent en censeurs et les élus subissent mille tracasseries journalières. Combien cela coûterait-il à l'État, sans le dévouement des 500 000 élus municipaux ?
La régionalisation de la compétence économique m'inquiète dans des régions élargies. Une grande région aurait-elle financé le Futuroscope, qui a créé 10 000 emplois ? Ayant son siège à Bordeaux, comment pourra-t-elle se prononcer sur la construction d'un Center Parcs à 30 kilomètres de Tours, ou sur telle implantation d'entreprise sise à 500 kilomètres ? Les départements doivent conserver l'initiative et la maîtrise des grands projets économiques.
Sur les regroupements intercommunaux, la méthode appliquée par les préfets me semble scandaleuse. Ils n'attendent même pas le vote de la loi ! Précipitation et absence de concertation sont contraires à l'esprit du Sénat et nuiront aux collectivités locales. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Alain Duran . - Je veux d'abord souligner les avancées de ce texte : clarification des compétences avec la suppression de la clause de compétence générale, affirmation de la région en matière stratégique... Saluons la capacité de la ministre à écouter les mises en garde contre la tentation de réduire les compétences des départements. Les départements conservent l'élaboration des schémas des services publics : c'est une bonne chose.
La question du seuil des intercommunalités est un point chaud restant en débat. Sachons nous rassembler dans le respect de chacun pour être plus forts et plus efficaces. Je me réjouis du maintien des compétences collèges et routes aux départements. Le président Larcher a eu raison d'appeler sa famille politique à renoncer à mener une nouvelle réforme territoriale, si elle revient au pouvoir.
Ce projet de loi est un socle majeur pour l'avenir de nos territoires. Construisons-le ensemble, dans l'intérêt de tous. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Gérard César . - Président de l'association des maires de la Gironde, je peux dire que ceux-ci sont découragés. Le projet de loi est le coup de grâce porté aux communes. Frappées par la baisse des dotations, elles sont désormais menacées d'être fondues dans de grandes entités coupées du terrain, au risque de la paralysie. L'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires engagerait en effet à terme la disparition des communes, et couperait leur lien avec les intercommunalités. Avec le seuil de création d'EPCI, le gouvernement nie la diversité de nos territoires. Nous réclamons la prise en compte de l'intérêt communautaire, c'est-à-dire que liberté soit laissée aux élus locaux pour s'organiser en fonction des besoins de la population.
Nous nous opposons aussi au transfert obligatoire aux intercommunalités des compétences liées à la distribution de l'eau, à l'assainissement et à la gestion des déchets. Les syndicats existants, dont les frontières ne recoupent pas celles des EPCI, ont fait leurs preuves. Pensez-vous au coût engendré par une telle réorganisation ?
Nous dénonçons le changement permanent des règles qui désespère les élus et les administrés. Laissez-nous vivre et nous organiser librement dans le cadre de la concertation locale ! (Applaudissements à droite)
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Je veux d'abord remercier les deux rapporteurs Hyest et Vandierendonck, et me réjouir de la qualité des débats. Certes, il y a des critiques. Mais les choses ont beaucoup évolué, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, dans le bon sens.
MM. Mercier et Collomb souhaitent une réforme durable, et ils ont raison. Le président Larcher a dit que cette réforme ne devrait pas être remise en chantier en 2017.
M. Bruno Retailleau. - Lisez-le bien !
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Sur les compétences, un compromis est en passe d'être trouvé. Les départements sont confrontés dans leur rôle d'acteurs de la solidarité...
M. Alain Fouché. - Cela arrange l'État !
M. André Vallini, secrétaire d'État. - ...car on ne pouvait agrandir les régions et renier sur les compétences départementales. J'ai passé quelques jours en Lozère, chez le sénateur Bertrand. Ce seuil de 20 000 habitants n'a de pertinence que moyennant des dérogations, des adaptations nécessaires : 19 des 23 intercommunalités de Lozère ont moins de 1 000 habitants.
D'aucuns pensent que le gouvernement veut la mort des communes ; c'est tout le contraire car plus les intercommunalités seront grandes et fortes, plus les communes seront le point de référence des citoyens.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique . - Si le gouvernement avait initialement proposé la création d'un Haut Conseil des territoires, c'était pour répondre à une demande de l'AMF ! Les avis étaient alors unanimes : point de confusion entre le Sénat et le Haut Conseil des territoires, ce dernier réunissant les exécutifs locaux n'aurait aucun pouvoir législatif.
Ce n'est pas la loi, mais l'application de la disposition sur la gestion des milieux aquatiques qui pose problème ; nous ne remettons nullement en cause la compétence législative du Sénat.
Avec un grand sourire, M. Retailleau a dit une nouvelle fois que ce projet de loi aurait été griffonné par le président de la République sur un coin de table. Je ne pense pas qu'il travaille ainsi ! La réalité est que ce texte prolonge les réflexions de Mme Gourault, les États généraux de la démocratie locale, le rapport Bertrand sur l'hyper-ruralité et le rapport Raffarin-Krattinger. Lors d'un débat en séance sur ce dernier rapport, la question du couple département-région a été clairement posée ici même ; je n'étais alors qu'à l'écoute de vos propositions. Ou bien, disait-on, de grandes régions, et le département conservera tout son rôle ; ou bien conserver les régions en l'état et supprimer le département. Le consensus s'est dégagé sur de grandes régions, reprenant ainsi les préconisations de MM. Raffarin et Krattinger !
La loi Maptam a créé les conférences territoriales de l'action publique, qui ont suscité le scepticisme de beaucoup avant qu'elles ne soient largement acceptées. Nous avons, depuis, cheminé ; continuons à progresser pour avoir la cote la moins mal taillée possible - je déplore moi aussi l'instabilité législative.
M. Karoutchi ne peut ignorer que c'est le syndicat Paris Métropole qui a remis la question sur le tapis ; le gouvernement s'est rallié à son avis. Sur le nombre d'élus, la solution trouvée était transitoire, vous le savez ; ne nous reprochez pas tout et le contraire de tout. Nous proposerons une solution à 209 élus, dans le sens souhaité par le président Devedjian.
Je vous remercie de la tonalité donnée aux débats et je persiste à penser qu'un accord est possible. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
La discussion générale est close.
La séance est suspendue à 19 h 40.
présidence de Mme Françoise Cartron, vice-présidente
La séance reprend à 21 h 30.
Discussion des articles
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Pour la clarté du débat, la commission des lois demande la disjonction de l'amendement n°205 rectifié, à l'article 6, pour éviter la discussion commune de 59 amendements...
Acceptée par le gouvernement, la disjonction est de droit.
ARTICLE PREMIER
M. Christian Favier . - Que de déclarations contradictoires dans ce débat ! On affirme ainsi qu'il faut renforcer les coopérations entre collectivités territoriales, mais le texte supprime la clause de compétence générale, donc les financements croisés.
La loi reste très silencieuse : les compétences ne sont guère définies. Les régions vont-elles devoir mettre un terme à toutes leurs interventions hors du champ strictement prévu par la loi ? Que deviendront les établissements en place ? Rétablissons la clause de compétence générale, au nom de la modernité, car la loi ne peut tout prévoir.
M. Ronan Dantec . - De nombreux acteurs de la santé nous ont alertés sur les risques liés à la suppression de la clause de compétence générale. Que deviendront les politiques comme la lutte contre le sida, l'aide alimentaire ou le soutien aux opérateurs locaux de santé qu'elles assumaient jusque-là ? Rétablir la clause de compétence générale règlerait la question.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Je vous rassure : nous avons étudié cette question. Les régions pourront toujours intervenir dans les domaines sanitaire et social, ne serait-ce qu'au titre de leurs compétences sur les lycées, l'enseignement supérieur, la jeunesse.
Mme la présidente. - Amendement n°258, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Supprimer cet article.
Mme Christine Prunaud. - Le gouvernement veut renforcer le pouvoir réglementaire des régions, faute de pouvoir leur accorder un pouvoir d'adaptation législative. Je me réjouis que notre commission ait supprimé cette mesure, comme en première lecture en adoptant notre amendement. La suppression de la clause de compétence générale impose d'élargir les domaines d'intervention des régions, car leur action reste indispensable ! Ne supprimons pas la clause de compétence générale au nom d'une prétendue lisibilité de l'action publique locale et d'économies de dépenses hypothétiques : nous récusons ces arguments.
Mme la présidente. - Amendement identique n°357 rectifié, présenté par MM. Collombat, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Mézard et Requier et Mme Laborde.
M. Pierre-Yves Collombat. - J'ai bien conscience d'être minoritaire... Nous avons ce débat sur la clause de compétence générale depuis la loi de réforme des collectivités locales dite loi RCT. À l'époque, la partie gauche de l'hémicycle voulait rétablir la compétence générale, ce qui fut fait dans la loi Maptam, à présent battue en brèche par le projet de loi NOTRe. À l'époque, notre ancien collègue Edmond Hervé expliquait que « la liberté locale impose que la commune définisse l'intérêt communal, le département l'intérêt départemental, la région l'intérêt régional : qu'une autorité transcendantale les définisse à leur place et c'en est fini de la décentralisation ». Bruno Retailleau disait la même chose : la clause de compétence générale est consubstantielle à la liberté d'administration des collectivités territoriales. Moi, au moins, je ne change pas d'avis. Notez enfin que pour remédier à sa suppression, on multiplie les associations, les schémas, les délégations, qui ligotent les élus comme Gulliver chez les Lilliputiens. Vous verrez qu'un jour, on regrettera la clause de compétence générale...
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Ce projet de loi a pour objet de clarifier les compétences entre les différentes collectivités territoriales. Le sport, le tourisme ou la culture sont à l'évidence partagées car ils concernent tous les échelons, il n'est pas possible de désigner un chef de file. Je n'ai pas changé d'avis depuis 2010 : j'ai toujours estimé que la clause générale de compétence, qui n'a guère de consistance juridique, est source de confusion.
Si tout le monde s'occupe de tout, on ne sait plus qui fait quoi. Nous préférons pour les régions et les départements une compétence d'attribution. Il en va différemment pour la commune, bien sûr - cependant lorsqu'une commune délègue une compétence à une intercommunalité, elle ne peut plus l'exercer.
Le texte de l'Assemblée nationale sur le pouvoir réglementaire des régions est manifestement excessif, inconstitutionnel même, prévoyant un pouvoir de propositions qui, dans le silence du gouvernement et du législateur, deviendraient applicables ! Chaque collectivité territoriale possède déjà un pouvoir réglementaire pour l'exercice de ses compétences. Nous instaurons un droit de proposition, mais certainement pas un pouvoir de décision négative.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - La conférence territoriale de l'action publique sera le lieu des adaptations en fonction de la diversité des territoires. Ne sous-estimez pas ce nouvel outil. Monsieur Retailleau, un mot sur les préfets. Je les encourage à discuter avec les élus en toute transparence sur l'intercommunalité. Mais aucune loi ne leur permet de proposer des schémas. Travailler et réfléchir ensemble en amont avec les élus locaux, là est la finalité. Le mouvement vers les communes nouvelles, soit dit en passant, met plus en péril les communes que les intercommunalités ; de grandes communes nouvelles sont en train d'apparaître, dont M. Pélissard lui-même ne rêvait pas ! Que les préfets veuillent réfléchir, notamment dans les zones de montagne où le seuil pertinent de l'intercommunalité est très discuté - 2 000, 5 000 habitants ? - soit. Mais aucun texte ne donne droit au préfet d'imposer un seuil ni une échéance !
M. Bruno Retailleau. - Merci pour ces réponses. Beaucoup d'élus m'ont signalé ce problème. Certains préfets font preuve de beaucoup d'enthousiasme et d'empressement...
J'ai toujours été attaché à la clause générale de compétence. Et je n'ai pas pour habitude de mettre mes convictions dans ma poche. On ne gère pas la Savoie comme la Vendée ou les Hauts-de-Seine. C'est un outil de souplesse et d'adaptation aux nouveaux enjeux - le numérique par exemple, inexistant il y a dix ans. Si j'ai rallié la position majoritaire de mon groupe, c'est pour sauver le département, et parce qu'est préservée une clause de compétence dégradée, autorisant les départements à cofinancer des projets des communes.
M. Pierre-Yves Collombat. - MM. Retailleau et Hervé n'ont jamais mis leurs convictions sous leur mouchoir, c'est bien pourquoi je les ai cités.
Mais je ne suis pas rassuré. Certains souhaitent manifestement la suppression des communes, fondues dans de grandes intercommunalités dotées de la clause générale : voilà le grand rêve !
Vous justifiez la répartition des compétences par l'objet assigné au présent texte : mais je n'ai pas réclamé de loi ! Tout le monde fait tout et donc n'importe quoi, affirmez-vous : nullement ! Quant aux économies, on nous avait annoncé dans le passé 20 milliards d'euros, mais je n'ai jamais pu obtenir l'explication de ce chiffre. Il n'y a rien là de vrai, juste la marotte actuelle, le rêve d'un jour qui tournera bientôt au cauchemar.
Enfin, ne confondons pas la suppression de la clause de compétence générale, plutôt résiduelle du reste, avec la possibilité pour les communes de transférer certaines compétences à l'intercommunalité en tant que coopération de communes.
M. René-Paul Savary. - Je me suis rallié à la position de la commission des lois. La clarification attendue, cependant, vaudra pour Paris mais non ailleurs. On demandera toujours aux collectivités territoriales de cofinancer les projets, sinon ils ne se feront pas.
Comment financerons-nous nos universités ? Dans le contrat de plan, ces travaux sont financés par la région. Comment fera-t-on si la clause générale de compétence est supprimée ?
On ne peut, depuis Paris, prétendre que les collectivités territoriales dépensent trop et faire appel à elles pour chaque projet !
M. Jean-Claude Lenoir. - Certains des membres de la majorité sont en campagne pour les régionales. À voir leurs promesses, on a l'impression qu'ils anticipent le maintien de la clause générale de compétence... De grâce, un peu de bon sens !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Nous avons discuté de cette clause pendant des heures en première lecture. Sa suppression s'accompagne de possibilité de participations, de délégations. De plus, le texte règle le cas des universités. Quant aux contrats de plan, voilà une question qui n'a rien à voir avec notre sujet du jour. La clause générale de compétence, je le répète, n'a aucune substance juridique...
M. René-Paul Savary. - Alors pourquoi la supprimer ?
M. Pierre-Yves Collombat. - Mais si, elle a une consistance ! C'est la capacité de pouvoir agir dans les domaines qui concernent l'intérêt de la collectivité territoriale !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - La seule compétence qui vaille est celle attribuée par la loi à telle collectivité. Nous ne sommes pas dans un état fédéral ! Attendons la décision du Conseil constitutionnel mais appliquons dès maintenant la réforme de notre règlement, que nous avons adoptée la semaine dernière...
M. Ronan Dantec. - Je partage l'analyse selon laquelle on ne peut construire de grandes régions sans leur donner une compétence générale. Nous proposons la suppression des alinéas 7 et 8, peut-être préférable à la suppression de tout l'article, afin de ne pas tout désorganiser. Ce sera l'objet de notre prochain amendement.
Les amendements identiques nos258 et 357 rectifié ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°259, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
Mme Laurence Cohen. - La région doit pouvoir continuer à contribuer au financement des opérations d'intérêt régional des départements, des communes et de leurs groupements, ainsi que des groupements d'intérêt public. Nous sommes attachés à la coopération entre collectivités. Il ne s'agit pas là d'une obligation mais d'une faculté, dans le cadre du principe constitutionnel de libre administration.
Si tel n'était pas le cas, ce texte marquerait un recul des services au public, que le texte prétend développer. Faire plus avec moins, personne ne sait faire, sauf dans certains cabinets ministériels...
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Défavorable.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Même avis.
L'amendement n°259 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°543, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
Alinéas 7 et 8
Supprimer ces alinéas.
M. Ronan Dantec. - Nous supprimons simplement les alinéas 7 et 8, ce qui ne modifie pas l'équilibre de la loi.
Mme la présidente. - Amendement n°260, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
M. Christian Favier. - Nous supprimons un alinéa qui restreint les possibilités d'intervention des régions, au détriment de la solidarité entre territoires voisins.
La loi ne peut définir toutes les compétences ; conservons de la souplesse, sans quoi nous alourdirons la gestion des collectivités territoriales et susciterons entre elles contestations et conflits.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Défavorable.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Même avis.
Les amendements nos543 et 260 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°120, présenté par MM. Courteau et Tourenne.
Alinéa 9
Après le mot :
urbaine
insérer les mots :
, la gestion équilibrée et durable des ressources en eau par bassin versant
M. Roland Courteau. - La région est l'échelle la plus pertinente pour la gestion des ressources en eau. La loi Maptam a créé une nouvelle compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi) affectée aux communes et EPCI à fiscalité propre. Néanmoins une grande partie des actions de gestion de l'eau n'entre pas dans le bloc de compétence Gemapi et nécessite à la fois un pilotage global et l'implication de tous les niveaux de collectivités.
Une gestion équilibrée et durable des ressources en eau nécessite une complémentarité entre les actions menées par les communes et les EPCI au titre de leurs compétences propres, et celles menées sur le bassin versant, qui reposent sur une ingénierie qualifiée et spécialisée, des outils de programmation et de planification et des moyens financiers mutualisés à une échelle adaptée.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Cet amendement fort intéressant a déjà été rejeté en première lecture, ainsi qu'en commission en deuxième lecture. La loi Maptam n'a pas confié la compétence ressources en eau par bassin versant aux régions. Retrait ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Retrait ?
Votre amendement est satisfait par l'article L. 211-7 du code de l'environnement.
L'amendement n°120 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°544, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 9
Après le mot :
urbaine
insérer les mots :
, la maîtrise foncière
M. Ronan Dantec. - Les régions partagent avec les territoires un objectif commun de maîtrise de la consommation de l'espace, dans une optique de gestion des grands équilibres nationaux. Cela a conduit de nombreuses régions à se préoccuper de la question foncière et à se doter d'une stratégie propre et d'un outil mutualisé avec les Safer.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Le foncier relève de la commune. Cessons de tout faire remonter à la région. Quelle méconnaissance des réalités... Défavorable.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - La maîtrise foncière relève des communes et intercommunalités. C'est un outil essentiel pour elles. Retrait ? Revenons-y à l'article 6.
M. Ronan Dantec. - Il faudra écrire dans la loi que les régions pourront se doter d'outils de maîtrise foncière.
M. Jean-Claude Lenoir. - Pas à l'article 1er en tout cas !
L'amendement n°544 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°482 rectifié bis, présenté par MM. Anziani, Patriat et M. Bourquin et Mme Cartron.
Alinéa 9
Après le mot :
urbaine
insérer les mots :
, la protection et la gestion des espaces naturels sensibles
M. Alain Anziani. - Les régions interviennent déjà en matière de biodiversité, de schémas de cohérence écologique ; elles doivent pouvoir faire de même pour la protection et la gestion des espaces naturels sensibles.
Mme la présidente. - Amendement identique n°646, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
M. Ronan Dantec. - Notre amendement est identique.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Les régions géreraient-elles mieux que les départements les espaces naturels sensibles ? Je ne le crois pas. Les conservatoires départementaux ont constitué un patrimoine considérable et bien géré, grâce à la taxe affectée. Défavorable.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Beaucoup souhaitent le transfert de la gestion des espaces naturels sensibles parce qu'il s'accompagnerait de celui de la taxe correspondante... En revanche je reconnais que certaines difficultés se posent et je serai moins catégorique que le rapporteur. Quid des parcs naturels régionaux, en effet ? Un partage de compétences ne serait pas absurde. Sagesse.
M. Michel Bouvard. - Ce point met en évidence les faiblesses du texte qui s'attache aux compétences sans se pencher sur les ressources. Bien des positions sont intéressées...
Je souligne que les départements participent systématiquement au financement des parcs naturels régionaux. Les ressources des espaces naturels sensibles servent aussi à l'entretien de sites naturels de proximité, ce qui contribue à faire accepter la politique de protection de certains espaces. Nous ne serions pas parvenus à boucler Natura 2000 sans la médiation des conservatoires nationaux départementaux des espaces naturels. Dans les grandes régions, les outils de gestion de proximité seront encore plus nécessaires, pour gérer la diversité. Je rejoins la position du rapporteur.
M. Pierre-Yves Collombat. - Pourquoi changer ce qui fonctionne bien ? Confier les espaces naturels sensibles à la région éloignerait leur gestion des problématiques locales. Ce n'est pas une bonne chose.
M. Alain Vasselle. - Chez moi la région, avec l'appui de l'État, a élaboré un schéma de cohérence environnementale contre l'avis de l'ensemble des communes de mon département. C'est inadmissible ! Je soutiens la position du rapporteur.
M. Ronan Dantec. - Peut-être faut-il retirer le terme « sensible » ? Ainsi les choses seront plus claires : la taxe reste aux départements, mais les régions interviennent dans la gestion des espaces naturels.
M. Daniel Gremillet. - Autant je suis opposé à la maîtrise foncière, autant je suis sensible à la gestion des espaces. En Lorraine les choses fonctionnent bien. Nous pouvons faire des économies en la matière.
M. Jean-Claude Lenoir. - Nous avons assez des schémas régionaux qui viennent de nulle part, arrivent dans les collectivités territoriales au mois de juin et requièrent un avis dans les trois mois. Les documents sont rédigés par des administrations qui ont un avis sur tout mais aucun sens des réalités...
M. René-Paul Savary. - Je dis notre révulsion devant tous ces schémas. Dans ma région, les communes et les intercommunalités ont été sollicitées au moment des élections départementales... Le résultat devrait vous interpeller : 70 % des communes ou intercommunalités n'ont pas répondu car le document, 1 000 pages, leur avait été envoyé de manière dématérialisée. La réponse est alors considérée comme favorable, alors que tout le monde est vent debout contre une approche aussi grossière ! Et nous aurons dans quelque temps la loi sur la biodiversité, encore un schéma... C'est ainsi que le sentiment d'abandon des territoires s'accentue, et que les élections produisent les résultats que l'on sait.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Revenons à notre débat : nous parlons des espaces naturels sensibles, me semble-t-il... Si l'on commence à parler de tout et du reste, je ne vous suis plus. La protection des espaces naturels sensibles est une compétence du département depuis une loi du 18 juillet 1885... Votons ces amendements.
Les amendements identiques nos482 rectifié bis et 646 ne sont pas adoptés.
L'amendement n°403 rectifié n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°350 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collombat, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.
Alinéas 11 à 13
Supprimer ces alinéas.
M. Jacques Mézard. - Nous sommes opposés à l'affirmation d'un pouvoir réglementaire régional. Rappelons ce qui a été voté à l'Assemblée nationale...
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Il ne vaudrait mieux pas !
M. Jacques Mézard. - Son objectif était de renforcer le pouvoir réglementaire de la région, et de l'autoriser à proposer des modifications législatives, ce qui paraît pour le moins anticonstitutionnel. Or c'est cela qui sous-tend tout le texte ! Le jacobinisme régional sera bien pire que le jacobinisme national. Disons non : n'outrepassons pas la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°545, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 13
Après le mot :
ministre
insérer les mots :
, aux présidents des deux assemblées
M. Ronan Dantec. - Il est prévu que les résolutions votées par les conseils régionaux demandant à modifier ou adapter une loi, un projet de loi ou une proposition de loi seront envoyées au Premier ministre et à l'autorité préfectorale. Les présidents des deux assemblées doivent également être directement informés...
Mme la présidente. - Amendement n°354 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et M. Requier.
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
et aux commissions concernées du Parlement
M. Jacques Mézard. - Cet amendement de repli précise que les propositions adoptées par les conseils régionaux devront être transmises pour avis aux commissions parlementaires concernées. Cela instaure un débat avec le véritable législateur...
Mme la présidente. - Amendement n°355 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elles sont rendues publiques.
M. Jacques Mézard. - Cet amendement précise que les propositions adoptées par les conseils régionaux sont rendues publiques.
Mme la présidente. - Amendement n°487 rectifié, présenté par MM. Anziani, Patriat et M. Bourquin.
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
En cas de refus de ces propositions, le Premier ministre notifie aux régions concernées les motifs de ce refus dans un délai de six mois à compter de la réception de la demande de modification ou d'adaptation.
M. Alain Anziani. - Comment l'État ferait-il connaître la position ? Cet amendement précise que le Premier ministre dispose de six mois pour notifier son avis.
Mme la présidente. - Amendement identique n°547, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
M. Ronan Dantec. - Cet amendement est identique.
Mme la présidente. - Amendement n°546, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
Après l'alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque année avant le 1er mars, le Gouvernement établit un bilan public qui fait état de l'ensemble des demandes de modification ou d'adaptations législatives ou réglementaires proposées par les régions et par l'Assemblée de Corse, ainsi que les réponses qui y ont été apportées. » ;
M. Ronan Dantec. - Prévue pour la Corse depuis plusieurs années, les demandes d'adaptation législatives ou réglementaires, n'ont jamais fonctionné. Cet amendement en tire les conséquences.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Compliquons, compliquons... On connaîtra les propositions, nul besoin d'alourdir le droit. Nous avons désormais de grandes régions. La commission a supprimé les dispositions votées par l'Assemblée nationale qui posaient des difficultés constitutionnelles. L'amendement n°350 rectifié est contraire à sa position : retrait ou avis défavorable. L'amendement n°545 n'est pas indispensable, a fortiori pour les commissions permanentes - défavorable à l'amendement n°354 rectifié.
Les délibérations des conseils régionaux sont publiques. Retrait de l'amendement n°355 rectifié ?
Avis favorable aux amendements nos487 rectifié et 547, qui obligent le gouvernement à répondre. Avis défavorable enfin à l'amendement n°546.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Retrait des amendements nos350 rectifié, 545, 354 rectifié et 355 rectifié. Pendant longtemps, le gouvernement s'est abstenu de répondre aux demandes d'adaptations législatives. Le Premier ministre a envoyé une instruction au secrétaire général du gouvernement pour que les demandes soient systématiquement envoyées au ministère compétent. Les amendements nos487 rectifié et 547 sont légitimes, mais le délai de six mois est irréaliste : avis défavorable, ainsi qu'à l'amendement n°546.
M. Jacques Mézard. - Je retire les amendements nos354 rectifié et 355 rectifié, mais maintiens l'amendement n°350 rectifié, amendement de principe. Je ne vois pas en quoi la création de grandes régions autorise à accroître leur pouvoir réglementaire. Madame la ministre, je vous ai déjà fait part des menaces de blocage des subventions reçues du président de ma région : voilà le risque.
M. André Reichardt. - Je désapprouve l'amendement n°350 rectifié. M. Doligé avait jadis soumis une proposition de loi sur l'adaptabilité des normes ; on lui avait répondu que ce serait possible si une loi le permettait... Voilà l'occasion. Permettez à un alsacien de s'étonner que ce qui est permis en Corse ne le soit pas ailleurs.
L'amendement n°350 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°545 est retiré.
Les amendements nos354 rectifié et 355 rectifié sont retirés.
Les amendements identiques nos487 rectifié et 547sont adoptés.
L'amendement n°546 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°261, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Alinéas 15 et 16
Supprimer ces alinéas.
M. Christian Favier. - Par cohérence, nous refusons la suppression de la compétence générale des régions pour les régions d'outre-mer.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Avis défavorable, par cohérence.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Même avis.
L'amendement n°261 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°8, présenté par M. Vergès et les membres du groupe CRC.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'avant-dernier alinéa de l'article 1er de la loi n° 2011 - 884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique est ainsi rédigé :
« En Guadeloupe et à La Réunion, le congrès des élus départementaux et régionaux est composé des membres du conseil départemental et du conseil régional. »
M. Christian Favier. - Cet amendement met en conformité la loi d'orientation pour l'outre-mer avec les textes de la Constitution.
Aux termes de l'article L. 5911-1 du CGCT, La Réunion ne peut avoir de congrès. La Constitution offre la possibilité d'une évolution institutionnelle, mais le CGCT la bloque. Cet amendement offre la même possibilité à La Réunion qu'à la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Cette disposition est parfaitement étrangère aux objectifs de l'article premier. Réunion et Guadeloupe ne sont pas encore des collectivités uniques ; Martinique et Guyane le seront au 1er janvier 2016.
Laissons les gens libres. Et nous ne sommes pas là pour réviser la Constitution.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. - Ce problème a une histoire : les Réunionnais ont souhaité rester dans le droit commun, c'était une demande expresse de leur part. Si les assemblées de La Réunion souhaitaient voir la situation changer, nous en tiendrions compte, mais ce n'est pas le cas. Les débats ont été longs il y a quelques mois - j'y étais ; ne rouvrons pas la discussion. Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n°8 n'est pas adopté.
M. Yannick Botrel. - J'invite chacun à ne pas remettre en cause cet article, qui rendra l'action publique plus efficace et plus claire pour nos concitoyens. Au stade de la deuxième lecture, les avancées sont notables, preuve de l'utilité du travail parlementaire. Nous voterons cet article en l'état.
M. Jean-Claude Lenoir. - Nous ne supportons plus la mainmise d'un certain nombre d'administrations qui utilisent les régions pour inventer des schémas de cohérence imposés à tous les niveaux. Les documents, sur lesquels nous devons nous prononcer en trois mois, sont aussi épais que le casier judiciaire d'Al Capone ! Ce n'est plus supportable. Je ne voterai pas l'article.
L'article premier, modifié, est adopté.
L'article premier bis demeure supprimé.
ARTICLE 2
Mme la présidente. - Amendement n°262, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
Supprimer cet article.
Mme Cécile Cukierman. - Nous ne sommes pas opposés à l'action régionale en matière économique, mais les objectifs fixés sont minces : rien en termes d'emploi, de formation, d'égalité salariale entre les femmes et les hommes. Rien non plus sur le contrôle des fonds publics, même si quelques régions ont créé des commissions ad hoc. Le renforcement de la compétence des régions se fait au détriment de la libre administration des autres niveaux de collectivité territoriale, ce qui méconnaît l'interdiction constitutionnelle de la tutelle d'une collectivité sur une autre. Et parce que le contrôle a priori du préfet est en quelque sorte rétabli dès lors qu'il doit approuver le schéma régional de développement économique. Nous ne pouvons accepter ce recul par rapport aux lois de 1982.
Mme la présidente. - Amendement identique n°359 rectifié, présenté par MM. Collombat, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mme Laborde, MM. Mézard et Requier et Mme Malherbe.
M. Pierre-Yves Collombat. - Le développement économique régional fait intervenir d'autres acteurs que la région : les intercommunalités, les métropoles, le département pour le tourisme... La région ne peut définir seule les orientations en matière de développement économique. L'amendement rétablit l'article L. 1511 du CGCT, qui commence par ces mots : « la région coordonne... »
M. René Vandierendonck, co-rapporteur. - Ces amendements ont déjà été examinés en première lecture. Notre commission des lois a approuvé le renforcement des prérogatives économiques de la région, sous la forme d'un schéma régional opposable, dans la mesure où celui-ci est co-élaboré avec les autres collectivités territoriales, sans préjudice de leurs compétences propres...
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Ce texte renforce les départements dans leur rôle social, les régions dans leur rôle économique et les intercommunalités dans leur rôle de garants des services de proximité. Faisons des grandes régions françaises les équivalentes des grandes régions allemandes ou espagnoles ; offrons un interlocuteur unique aux investisseurs internationaux...
M. Alain Fouché. - Les départements peuvent le faire !
M. Pierre-Yves Collombat. - Nous voulons faire de nos régions des communautés autonomes espagnoles ou des länder, mais sans un sou ! Le jour où elles auront un peu d'argent, on commencera à vous prendre au sérieux... Côté face, on sépare ; côté pile, on continue à conventionner et à déléguer... Dès lors, donnons voix au chapitre, cela parait logique. On veut à tout prix réformer, mais nous faisons compliqué...
M. Joël Guerriau. - Il eut mieux valu débattre de tout cela avant la délimitation des régions. Une belle et grande région Bretagne aurait eu du sens... Je ne vois plus la cohérence du discours du gouvernement...
M. Alain Fouché. - Les départements ont fait leurs preuves en matière économique, plus que les régions !
M. François Patriat. - N'importe quoi !
Les amendements identiques nos262 et 359 rectifié ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°263, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.
I. - Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 9
Remplacer les mots :
la région est la collectivité territoriale responsable, sur son territoire, de la définition des
par les mots :
la région définit, sur son territoire, les
Mme Laurence Cohen. - Amendement de repli. Nous rétablissons la région comme chef de file, mais n'en faisons pas la collectivité territoriale « responsable » en matière économique. Le redressement du pays exige l'engagement de toutes les collectivités au plus près des réalités et des besoins de la population.
Mme la présidente. - Amendement n°597 rectifié bis, présenté par MM. Fouché et Houel, Mme Duranton, MM. Milon, P. Leroy, Karoutchi, Morisset, Mayet et Danesi, Mmes Deromedi, Giudicelli et Mélot et MM. Charon et Grand.
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 4251-12. - Sans préjudice des compétences attribuées par la loi aux autres collectivités territoriales et leurs groupements, la région et le département sont les collectivités territoriales co-responsables, sur leur territoire, de la définition des orientations en matière de développement économique sous réserve des missions incombant à l'État.
M. Alain Fouché. - Cet amendement établit une responsabilité économique partagée entre la région et le département. Dans le cas de l'aménagement de grosses structures économiques ou de toutes petites entreprises en milieu rural, le département doit exercer un rôle primordial. Dans la Vienne, c'est le Conseil général qui a permis l'installation du Futuroscope et de sa Technopole, plus de 10 000 emplois, de même que le Center Parc dans le nord du Département. Dans les deux cas, l'État et la région ont mis très peu d'argent.
Il est indispensable de mettre en place des compétences partagées entre la région et le département car il est vraisemblable que les projets situés à 500 kilomètres de la capitale régionale, seront moins suivis par la région que par le Conseil général. Les grands projets partent aussi de la proximité. Ma nouvelle région va de Saint-Jean-de-Luz à Loudun, imagine-t-on que tout sera géré depuis Bordeaux ? Enlever toute initiative économique au département, n'en faire qu'un assistant social, est une grave erreur.
M. Bruno Sido. - Très bien !
Mme la présidente. - Amendement n°655, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 9
Supprimer les mots :
Sans préjudice des compétences attribuées par la loi aux autres collectivités territoriales et à leurs groupements,
et les mots :
, sous réserve des missions incombant à l'État
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Il est temps de faire de la région la collectivité territoriale leader en matière économique sur son territoire, avec la coopération des communes, bien sûr, et des intercommunalités. Le texte maintient en outre la compétence sociale des départements et lui donne, pour la première fois dans un texte de loi, la charge de la solidarité territoriale.
Un exemple... Jeudi dernier, nous avons lancé le chantier de l'implantation d'une grande entreprise américaine en Isère. Nous étions en concurrence avec 60 sites européens... À son PDG, il a fallu initialement expliquer qu'il lui faudrait rencontrer une dizaine d'interlocuteurs ; je lui ai dit que nous allions rationaliser tout cela... Les élus continueront à défendre leur territoire au sein du conseil régional.
M. Pierre-Yves Collombat. - Les élus ? Vous les avez supprimés !
Mme la présidente. - Amendement n°549, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
À ce titre, elle organise l'absence de concurrence foncière entre les territoires.
M. Ronan Dantec. - Je crois à la planification régionale, à la nécessité d'une collectivité territoriale force d'impulsion sur son territoire. Mais comment éviter de retrouver une concurrence foncière entre territoires au sein d'une même région ? Cet amendement y pourvoit.
M. René Vandierendonck, co-rapporteur. - Mme Blandin était présidente de la région Nord-Pas de Calais lorsque Toyota s'est implantée dans le Valenciennois. Le département est intervenu sur le fondement de la compétence « voirie »... Or c'est à l'initiative du Sénat qu'elle a été maintenue aux départements. Prenez la compétence tourisme : qui s'est battu pour qu'elle soit partagée ? Le Sénat.
Pourquoi mettre dans la loi ce qui est déjà dans le CGCT ? La délégation de compétence entre collectivités territoriales est déjà possible. À certains moments, il faut revenir à la réalité. Avis défavorable.
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Avis défavorable à ces amendements : le chef de filat ne suffit pas, la région doit avoir l'exclusivité de la compétence.
M. François Patriat. - Je suis lassé de ces guerres picrocholines. Chacun pense qu'il peut tout faire, qu'il fait tout bien et que les autres ne veulent rien faire. Résultat : on ne clarifie rien, on ne simplifie rien, on ne fait pas d'économie.
D'aucuns pensent que la région ne sert à rien, que le département peut tout faire. Président d'une petite région, je ne revendique pas la gestion de l'APA, de la compensation handicap ou de la solidarité. (Exclamations et rires à droite)
À la région l'innovation, le développement économique, la formation professionnelle, les transports.
Le tourisme, c'est 28 000 emplois sur mon territoire : continuerons-nous de le partager ?
Étonnez-vous alors que les gens ne s'y retrouvent plus et que 50 % des Américains jugent que la France est une dictature. Celle des collectivités. Comment la Côte-d'Or peut-elle investir 62 millions dans un MuséoParc Alésia et refuser 500 000 euros pour faciliter l'implantation d'une petite entreprise ? Tout cela est incompréhensible, et doit être clarifié.
M. Alain Fouché. - Entre Saint-Jean-de-Luz et Loudun, il y a 500 kilomètres ; comment la région peut-elle se pencher efficacement sur chaque dossier de subvention locale ? Les départements savent soutenir l'installation des entreprises. Voyez le Futuroscope, Chronopost ou Carglass dans mon département. Leur retirer cette compétence serait une faute grave. On en reparlera dans quelques mois.
M. Joël Guerriau. - Je ne partage pas l'analyse du gouvernement. Cet amendement me paraît plutôt cohérent avec sa position. De plus, vous évoquez la cohérence territoriale. Allons jusqu'au bout et supprimons les Scot ! Sinon, on va vers la complication extrême et l'illisibilité.
Mme Cécile Cukierman. - On n'améliorera pas l'efficacité ni ne renforcerons la démocratie en imposant des décisions aux élus locaux.
Si l'entreprise qu'évoque le ministre s'est installée en Isère et non ailleurs en Rhône-Alpes, c'est bien parce que le département s'est mobilisé. Il ne s'agit pas de remettre en cause les régions qui ont élaboré des schémas en concertation avec les autres collectivités territoriales. Mais votre amendement instaure une tutelle de la région en matière de développement économique. Il faut associer les élus locaux pour éviter de concentrer l'implantation des entreprises sur quelques territoires seulement.
Mme Jacqueline Gourault. - Dans cette partie de ping-pong entre région et département, permettez-moi de monter au filet pour rappeler le rôle des intercommunalités, dont la compétence économique est pourtant centrale. Les maires ou les présidents des intercommunalités sont les premiers interlocuteurs des habitants. Ce débat ne doit pas se résumer à un face-à-face entre régions et départements.
M. Jacques Mézard. - L'amendement du gouvernement supprime à l'alinéa 9 les mots « sans préjudice des compétences des autres collectivités territoriales ». Ainsi les intercommunalités et les collectivités territoriales devront se soumettre au schéma prescriptif de la région, toutefois vous excluez les métropoles. Lyon pourra tout faire mais les autres intercommunalités devront se soumettre au pouvoir régional.
M. François Patriat. - On ne peut pas comparer Sarlat et Lyon !
M. Jacques Mézard. - J'ai voté pour la métropole de Lyon. Mais je ne suis pas d'accord pour mettre les collectivités territoriales sous la coupe des régions. Celles-ci ne veulent qu'une chose : le pouvoir !
France Stratégie a publié une excellente étude : dans certaines régions, les forces centrifuges sont dominantes ; à l'inverse, certains départements sont isolés au sein de leur région. Monsieur le ministre, nous sommes élus de la même région, même si nous ne nous sommes jamais rencontrés. Comment avec nos quatre élus régionaux partagés entre majorité et opposition, notre département pourra-t-il se faire entendre ?
M. Gérard Bailly. - Les projets économiques sont souvent lancés par les communes ou les intercommunalités, aidées par les départements pour trouver des financements. Les porteurs de projets s'adressent d'abord aux maires. Les gens ne connaissent souvent pas leurs conseillers régionaux ; ils ne feront pas 300 ou 400 kilomètres pour les rencontrer. Qui portera à l'avenir les petits projets ? Je suis inquiet. Que signifient aussi les compétences partagées ? Comment fera-t-on concrètement sur le terrain ? Les régions nommeront des délégués au tourisme ou à l'économie, mais connaîtront-ils le terrain ?
M. Alain Vasselle. - Je croyais que le débat portait sur l'amendement n°263. Chacun doit s'exprimer sur l'amendement en discussion, sinon nous ne nous y retrouvons plus.
Mme la présidente. - Ces amendements sont en discussion commune et chacun s'est laissé emporter.
Mme Valérie Létard. - Je m'exprimerai sur l'amendement n°655 du gouvernement.
L'amendement n°263 n'est pas adopté.
M. Bruno Sido. - L'amendement n°597 rectifié bis est excellent. M. Patriat a beau « crier maman, pleurer beaucoup » comme dans la chanson de Brassens, dans la réalité, c'est le préfet qui fait le chef d'orchestre. On n'est jamais trop nombreux pour financer les projets. On pourrait améliorer encore l'amendement Fouché en ajoutant les intercommunalités.
M. Alain Vasselle. - Je voterai aussi l'amendement n°597 rectifié bis. Certes, dans la rédaction de la commission des lois, le schéma économique de la région ne sera plus opposable, mais les départements en sont absents. Peut-on aussi envisager que le schéma des Scot soit élaboré sans concertation avec les communes ?
M. Ronan Dantec. - Si je vous comprends bien, la région, élue au suffrage universel, est une menace pour les territoires qui la composent ! Comme si notre pays n'était pas déjà traversé de frontières territoriales profondes ! Si nous ne nous dotons pas de stratégies régionales de planification, le système restera bloqué. Mieux vaudrait penser en termes d'obligation de résultats pour les régions, que la priver de ses pouvoirs de planification.
Certes il faut de la souplesse. Garder le système tel qu'il est, c'est renforcer la compétition libérale entre les territoires.
Mme la présidente - Il est minuit. Je vous propose de poursuivre jusqu'à minuit et demi. (Assentiment)
M. Alain Anziani. - Si l'objectif de cet amendement est la confusion ou le retour sur trente ans de construction territoriale, il est atteint. Depuis 1982, la compétence économique est au coeur des prérogatives de la région. Ne créons pas de confusion. Les électeurs ne s'y retrouvent pas. Ce texte conserve de la souplesse. Il ne supprime pas les compétences en matière d'investissement immobilier des communes.
M. Jean-Claude Lenoir. - Monsieur Dantec, vous avez mal compris, nous ne sommes pas contre la région. Je voterai l'amendement n°597 rectifié bis. Simplement, il faut être pragmatique. Le développement économique doit être soutenu à la fois par les départements et les régions. C'est ainsi que nous mobiliserons toutes les intelligences. Je perçois derrière cet amendement la philosophie de M. Monory.
Le rapport de France Stratégie laisse entendre que certains départements, comme le Cantal ou l'Orne, n'ont pas leur place dans la région à laquelle ils appartiennent de longue date. France Stratégie dépend du gouvernement. Celui-ci lui a-t-il donné des consignes ?
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - En première lecture nous avons décidé de donner la compétence économique principale aux régions.
M. Michel Bouvard. - « Principale », en effet !
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Les intercommunalités ont aussi une compétence économique. Nous avons soutenu l'association de toutes les collectivités territoriales au schéma régional. Si le Futuroscope a vu le jour c'est avant tout grâce à l'action d'une personnalité exceptionnelle, René Monory.
M. Alain Fouché. - On a continué après sa mort et le Center Parc ne lui doit rien.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - L'Assemblée nationale veut une simple consultation quand nous tenons à une co-élaboration. Ne changeons pas d'avis par rapport à la première lecture. Soyons cohérents ; vous avez été battus en première lecture : ayez la décence de ne pas trop insister.
M. Jean-Claude Lenoir. - Perseverare diabolicum - je veux bien être le diable ! (Sourires)
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - En décembre, d'ailleurs, certains d'entre vous trouveront aux régions beaucoup plus d'intérêt qu'aujourd'hui.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - La seconde lecture ne sert pas à détricoter ce que nous avons voté en première lecture, mais à statuer sur les divergences demeurant avec l'Assemblée nationale. Je suis président de conseil départemental mais pouvons-nous adopter une position différente de celle que nous avons adoptée en janvier ? Les compétences de la région s'exercent sans préjudice des compétences des autres collectivités territoriales. Ne nous déjugeons pas.
Si nous avons réussi à sauver les départements, c'est en affirmant la spécialisation des collectivités pour éviter la concurrence entre les différents échelons.
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Il n'y a aucune intention cachée du gouvernement derrière le rapport de France Stratégie. Nous l'avons commandé, pas commandité !
Celui-ci montre que le découpage des régions est pertinent, même si certains départements semblent être moins intégrés dans leur région que d'autres. C'est le cas du Cantal ou de l'Orne.
M. Jean-Claude Lenoir. - Non, pas de l'Orne !
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Je dis seulement que c'est ce que dit le rapport. En tout cas, le gouvernement n'a aucune arrière-pensée.
À la demande de la commission des lois, l'amendement n°597 rectifié bis est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°191 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Pour l'adoption | 6 |
Contre | 316 |
Le Sénat n'a pas adopté
Mme Valérie Létard. - Si une politique économique a besoin de stratégie et d'un schéma régional, elle ne peut faire fi de l'avis des collectivités. J'aurais souhaité aller plus loin dans la co-élaboration mais le texte est équilibré. L'amendement du gouvernement porte atteinte aux compétences des intercommunalités, qu'il priverait de leur pouvoir d'aide à l'immobilier d'entreprise. Il revient à mettre les collectivités territoriales sous la tutelle de la région. Dans l'intercommunalité que je préside, je ne fais que du développement économique ! Sans cela, nous n'aurions pas 15 % mais 30 % de chômage.
Mme Éliane Giraud. - Les régions sont les gestionnaires des fonds européens. Il est cohérent de les rendre chefs de file. La coopération entre collectivités territoriales se fera, même si leurs compétences sont diverses car chacun se bat pour l'intérêt général. On ne doit pas avoir peur de soi-même mais de ne rien faire.
M. Bruno Sido. - Je ne comprends pas l'expression « sans préjudice de la loi ». Cela signifie-t-il qu'on se place hors la loi ?
L'amendement du gouvernement exclut du circuit les communes, les départements, les intercommunalités. Le ministre a été un grand président du département de l'Isère ; il sait bien que celui-ci n'a pas eu besoin de la région pour faire venir le CEA et se développer. De même, la Haute-Marne a développé son schéma départemental d'aménagement numérique avant que la région ne le copie, sans d?ailleurs nous verser le moindre euro, ce n'est pas M. Savary qui me contredira.
Par la bouche de M. Patriat, les régions se parent de la plume du paon mais je les vois plutôt comme la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf. Or nous avons besoin de tous pour avancer.
M. René Vandierendonck, co-rapporteur. - L'amendement du gouvernement supprime un ajout du Sénat dont ce débat vient de prouver l'utilité. La commission y est défavorable.
M. Alain Vasselle. - Je suivrai la position de la commission. Toutefois, la rédaction de cet alinéa n'est pas claire. Toutes les collectivités territoriales seront-elles, par exemple, amenées à contribuer au financement des schémas régionaux ?
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Mme Létard tient à ce que l'on conserve « sans préjudice ». La rédaction de l'Assemblée nationale est brutale : la région est responsable et les autres n'ont qu'à obéir. Nous voulons une élaboration concertée ; « sans préjudice » maintient les compétences de chaque niveau de collectivité.
M. Alain Fouché. - Cela ne se passera pas ainsi.
M. Jean-Jacques Hyest, co-rapporteur. - Nous verrons. J'ai tout fait pour conserver les départements, qui sont indispensables. Ce n'est pas une question de pouvoir ; le problème central reste celui du service de la population. Ce qui motive le rôle donné aux régions, c'est la difficulté qu'ont les investisseurs à obtenir trois sous par-ci, deux autres par-là. Tous veulent une simplification. Là-dessus le ministre a raison.
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Le gouvernement souhaite avancer vers une réforme durable. Le retrait de l'expression « sans préjudice » obéissait à un souci de pédagogie et de clarté. Mais compte tenu de la clarté apportée par les échanges que nous venons d'avoir, je retire l'amendement. (Marques d'approbation)
L'amendement n°655 est retiré.
L'amendement n°549 est retiré.
Mme la présidente. - Nous avons examiné 24 amendements. Il en reste 707.
Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 27 mai 2015, à 14 h 30.
La séance est levée à minuit trente-cinq.
Jacques Fradkine
Direction des comptes rendus analytiques
Ordre du jour du mercredi 27 mai 2015
Séance publique
À 14 h 30 et le soir
Présidence : Mme Isabelle Debré, vice-présidenteM. Thierry Foucaud, vice-président
Secrétaires : MM. Philippe Adnot, Christian Cambon
Suite de la deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant nouvelle organisation territoriale de la République (n° 336, 2014-2015).
Rapport de MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, fait au nom de la commission des lois (n° 450 tomes I et II, 2014-2015).
Texte de la commission (n° 451, 2014-2015).
Avis de Mme Catherine Morin-Desailly, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n° 438, 2014-2015).
Analyse des scrutins publics
Scrutin n°190 sur l'ensemble du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la réforme du droit d'asile.
Résultat du scrutin
Nombre de votants :344
Suffrages exprimés :218
Pour :187
Contre :31
Le Sénat a adopté.
Analyse par groupes politiques
Groupe UMP (144)
Pour : 141
N'ont pas pris part au vote : 3 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Hubert Falco, Mme Joëlle Garriaud-Maylam
Groupe socialiste (110)
Abstentions : 109
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Sylvie Robert
Groupe UDI-UC (43)
Pour : 43
Groupe CRC (19)
Contre : 19
Groupe du RDSE (13)
Pour : 1 - M. Gilbert Barbier
Abstentions : 12
Groupe écologiste (10)
Contre : 10
Sénateurs non inscrits (9)
Pour : 2 - MM. Jean Louis Masson, Alex Türk
Contre : 2 - MM. David Rachline, Stéphane Ravier
Abstentions : 5
Scrutin n°191 sur l'amendement n°597 rectifié bis, présenté par M. Alain Fouché et plusieurs de ses collègues, à l'article 2 du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Résultat du scrutin
Nombre de votants :341
Suffrages exprimés :322
Pour :6
Contre :316
Le Sénat n'a pas adopté.
Analyse par groupes politiques
Groupe UMP (144)
Pour : 5 - MM. Michel Bouvard, Daniel Chasseing, Alain Fouché, Jean-Claude Lenoir, Alain Vasselle
Contre : 138
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat
Groupe socialiste (110)
Contre : 110
Groupe UDI-UC (43)
Contre : 43
Groupe CRC (19)
Abstentions : 19
Groupe du RDSE (13)
Pour : 1 - M. Pierre-Yves Collombat
Contre : 12
Groupe écologiste (10)
Contre : 10
Sénateurs non inscrits (9)
Contre : 3
N'ont pas pris part au vote : 6 - MM. Michel Amiel, Jean-Noël Guérini, Mme Mireille Jouve, MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier