SÉANCE

du vendredi 10 avril 2015

88e séance de la session ordinaire 2014-2015

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

Secrétaires : M. Jean Desessard, M. Serge Larcher.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Croissance, activité et égalité des chances économiques (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite du projet de loi, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 9

M. Michel Le Scouarnec .  - L'article 9 réforme les modalités de l'épreuve du permis de conduire pour réduire le temps d'attente de 98 jours en moyenne, voire cinq mois dans certains départements, et donc le coût.

Si nous partageons cette volonté de faciliter l'accès au permis de conduire des jeunes durement touchés par le chômage et la précarité, nous sommes opposés à toute externalisation de l'examen à des acteurs privés. Si les délais sont trop longs, c'est d'abord dû à la pénurie d'inspecteurs : ils ne sont que 1 300, répartis dans 700 centres. Recrutons plutôt que de déléguer au privé.

La commission spéciale a eu raison de supprimer le recours à des agents publics ou contractuels ; en revanche, nous regrettons qu'elle ait abandonné la notion de « service universel » et retiré du texte des précisions utiles au motif qu'elles relèvent du domaine réglementaire. Nous proposerons des amendements pour corriger le tir.

Mme la présidente.  - Amendement n°668 rectifié, présenté par M. Kern, Mme Gatel et MM. Marseille et Médevielle.

Alinéa 2

Rétablir le I bis dans la rédaction suivante :

I bis.  -  Au début du même chapitre Ier, il est ajouté un article L. 221-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 221-1 A.  -  L'accès aux épreuves théoriques et pratiques du permis de conduire est un service universel. Tout candidat se présentant librement ou par l'intermédiaire d'un établissement ou d'une association agréé au titre des articles L. 213-1 ou L. 213-7, et ayant déposé une demande de permis de conduire se voit proposer une place d'examen, sous réserve d'avoir atteint le niveau requis. L'aptitude est vérifiée par la délivrance d'une attestation de fin de formation initiale dans des conditions de réalisation précisées par décret. »

M. Pierre Médevielle.  - Cet amendement rétablit des dispositions supprimées en commission spéciale ; l'objectif est d'abaisser le coût du permis. Il s'agit de proposer une place aux candidats qui ont obtenu l'attestation de fin de formation initiale. Cette disposition réduira le délai d'attente, et donc le coût de la formation, sachant qu'un mois d'attente supplémentaire coûte environ 200 euros. À titre indicatif, si les délais d'attentes sont ramenés à 45 jours, l'économie peut aller de 400 à 600 euros par élève.

Mme la présidente.  - Amendement n°1463, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 2

Rétablir le I bis dans la rédaction suivante :

Au début du même chapitre Ier, il est ajouté un article L. 221-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 221-1 A.  - L'accès aux épreuves théoriques et pratiques du permis de conduire est un service universel. Tout candidat se présentant librement ou par l'intermédiaire d'un établissement ou d'une association agréé au titre des articles L. 213-1 ou L. 213-7, et ayant déposé une demande de permis de conduire se voit proposer une place d'examen, sous réserve d'avoir atteint le niveau requis. »

M. Jean-Jacques Filleul.  - Cet amendement consacre dans la loi le principe selon lequel l'accès au permis de conduire est un service universel, accessible équitablement sur le territoire, dans des délais et à un prix raisonnables. La commission spéciale a estimé que le renvoi à ce principe n'était pas approprié au motif qu'il n'a pas de portée normative et qu'il est superflu au regard de l'arrêté du 22 octobre 2014.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure de la commission spéciale.  - La commission spéciale partage l'objectif de réduire les délais d'attente : 200 jours parfois, c'est inacceptable. Le législateur n'est cependant pas fondé à décider des mesures dérogatoires au droit commun, comme le recours à des agents contractuels ou de La Poste, sans disposer d'une étude d'impact.

La notion de service universel, qui sonne bien, certes, est utilisée dans les industries de réseau pour imposer une forme de service public minimum dans un environnement concurrentiel. Or le projet de loi conserve le caractère public de l'organisation des épreuves du conduire. De plus, sa portée normative est limitée. Ouvre-t-il la possibilité de se retourner contre les pouvoirs publics si les délais de présentation sont jugés trop longs ? Je ne le crois pas. Mais si c'est le cas, une indemnisation pourra être demandée à l'État... A ce compte, l'accès à la carte grise ou à un conseiller de Pôle emploi, le passage du baccalauréat sont aussi des services universels.

Évitons les affirmations déclamatoires. Défavorable.

M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.  - Je souhaite le retrait de l'amendement n°668 rectifié au profit du suivant. La création d'une attestation de fin de formation (AFI) représenterait une nouvelle contrainte. Ce n'est pas souhaitable.

Le concept de service universel est un principe fort, il a du sens dès lors qu'une externalisation est prévue. L'amendement pose également le principe que tout candidat qui se présente librement ou par l'intermédiaire d'un établissement se voit proposer une place d'examen. Il est utile de garantir l'égalité d'inscription partout sur le territoire. L'avis est favorable à l'amendement n°1463. (M. Jean-Jacques Filleul remercie)

J'ajoute que service universel et service public sont des notions proches mais distinctes.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - L'arrêté du 22 octobre 2014 prévoit déjà que tout candidat doit se voir proposer une place d'examen, qu'il soit candidat libre ou présenté par une auto-école.

Mme Nicole Bricq.  - Votre argumentation, madame la rapporteure, est purement juridique. Mais il faut fixer un principe. La réalité est que le permis, pour nombre de jeunes, s'apparente à un diplôme, peut-être le seul qu'ils auront... Autrefois, les hommes pouvaient passer leur permis pendant leur service militaire, même le permis poids lourds... Passer son permis doit devenir aujourd'hui un service universel. Il y a des inégalités territoriales effrayantes... Pour d'autres professions réglementées, la commission spéciale a rappelé la nécessité du diplôme ; le permis de conduire est un diplôme d'entrée dans la vie... Les faits sont têtus, soyez pragmatiques.

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - Je suis étonné de ce reproche. Notre rôle de législateur est d'écrire la loi, et le rapporteur a pour mission d'éclairer notre assemblée sur la portée du texte. Bien d'autres services pourraient être érigés en services universels.

M. Didier Guillaume.  - Pensez aux jeunes !

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - Nous avons préféré éviter les mentions déclamatoires qui ont pour seul objectif de ressouder les troupes.... Le ministre l'a dit : c'est un principe fort.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Ne tirez pas d'interprétation psychologique de mon propos... La loi n'est faite ni pour porter des principes abstraits ni pour ressouder les troupes... Créer un droit opposable, l'idée prospérera ; l'article fait porter sur l'administration l'obligation des 45 jours -peut-on se satisfaire d'un délai d'attente moyen de 98 jours ? Le ministre de l'intérieur a engagé une réforme inédite, le Gouvernement entend créer une dynamique. Il prend ses responsabilités. Peut-on le lui reprocher dès lors que nous sommes en situation d'échec collectif ? Il y a un principe, décliné ensuite par des mesures concrètes.

M. Didier Guillaume.  - Nous sommes une assemblée politique, notre mission est de donner du sens. La notion de service universel devrait nous rassembler. Le permis de conduire est souvent le premier diplôme pour les jeunes. Sans lui, surtout dans les campagnes, ils ne peuvent rien faire, ils sont ratatinés. L'inégalité est terrible en fonction des territoires. Le Sénat, chambre des territoires, doit envoyer un signe. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Nous partageons les objectifs mais ces propos sont un peu démagogiques... (Mme Nicole Bricq proteste) Ce n'est pas en faisant du passage du permis de conduire un service universel que les jeunes l'obtiendront plus facilement. Que se passera-t-il si le délai de 45 jours n'est pas respecté ? Quelles seront les procédures ? Quelle sera l'indemnisation ? On connaît déjà les difficultés du Dalo. Oui, soyons pragmatiques...

M. Patrick Abate.  - Avec cet amendement, on pose un engagement à agir. Je ne comprendrais pas qu'il n'y eût pas unanimité. À nous ensuite de nous donner les moyens pour atteindre l'objectif - sans toutefois brader d'autres principes.

Mme Nathalie Goulet.  - J'ai été très sensible aux arguments de M. Guillaume. Je voterai cet amendement en rappelant que j'ai déposé, à l'article 10, un amendement sur le gâchis alimentaire... (Sourires)

M. Hervé Marseille.  - Je rejoins la position de notre rapporteure. On sait les difficultés qu'on a pour appliquer le Dalo. Notre monde se judiciarise. La rédaction de l'amendement n°1463 est source de contentieux.

M. Jean Desessard.  - Le groupe écologiste votera les amendements nos668 rectifié et 1463.

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - Monsieur le ministre, affirmer le principe du service universel crée-t-il ou non un droit opposable ? Nos concitoyens, et les jeunes en particulier, sont fatigués des déclarations non suivies d'effet, qui ne changent rien à leur réalité. Il faut cesser d'employer des mots qui n'ont pas de conséquence. (M. Henri Tandonnet applaudit)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Nous partageons la volonté de faciliter le passage du permis de conduire. Mais rien ne sert de hacher menu les mots. Imaginer que parler de service universel suffit à régler le problème, c'est abuser l'opinion. La notion figure dans la loi sur La Poste : le service en a-t-il été amélioré pour autant ?

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Grâce à cette notion, des contraintes nouvelles et particulières pèsent sur l'établissement public.

Les 45 jours, c'est la moyenne européenne, l'objectif n'est pas déraisonnable. Nous ne créons pas un droit opposable individuel, il n'y a pas de voie de recours, le mécanisme Dalo est différent. C'est un mécanisme de pression sur les pouvoirs publics. Surtout, au-delà de la notion de service universel, l'amendement porte un principe d'égalité d'accès sur le territoire.

L'amendement n°668 rectifié est retiré.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°1463, mis aux voix par assis et debout, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1048, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéas 3 à 20

Supprimer ces alinéas.

M. Patrick Abate.  - Il faut certes réduire les délais mais pas en procédant à la libéralisation qu'organisent ces alinéas. Les délais d'attente sont dus avant tout à la pénurie d'inspecteurs. Si des correctifs ont déjà été apportés, les besoins restent estimés à 200 000 places supplémentaires. Les alinéas 3 à 20 relèvent plus de l'idéologie que de la volonté de réduire les délais d'attente.

Mme la présidente.  - Amendement n°1425, présenté par M. Médevielle.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Toute épreuve pratique en vue de l'obtention du permis de conduire de la catégorie B ;

M. Pierre Médevielle.  - Le permis de conduire est l'examen auquel se présente le plus de candidats. Le délai d'attente moyen est de 98 jours, plus de 130 en région parisienne. Étendons la portée de cet article 9 à l'épreuve pratique du permis B.

Mme la présidente.  - Amendement n°1464 rectifié, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 17

Rétablir le II bis dans la rédaction suivante :

Le chapitre 1er du titre 1er du livre 2 du code de la route est complété par des articles L. 211-2 à L. 211-5 ainsi rédigés :

« Art. L. 211-2.  -  L'apprentissage de la conduite sur les voies ouvertes à la circulation publique est effectué dans un véhicule spécialement équipé à cette fin sous la supervision directe du titulaire d'une autorisation d'enseigner, ou d'un accompagnateur ayant suivi une formation le préparant à cette fonction.

« Art. L. 211-3.  -  Par dérogation à l'article L. 211-2, les candidats justifiant d'au moins vingt heures d'apprentissage dans les conditions prévues au même article L. 211-2 peuvent également apprendre la conduite des véhicules légers sur les voies ouvertes à la circulation publique sous le contrôle d'un accompagnateur. Cet accompagnateur est soumis à la seule obligation d'être titulaire du permis de conduire ces véhicules depuis un délai minimal.

« Cet apprentissage est effectué dans un véhicule spécialement équipé, au sens dudit article L. 211-2, sauf lorsqu'il s'intègre dans les formations qui sont définies par voie réglementaire.

« Art. L. 211-4.  -  L'apprentissage de la conduite avec un accompagnateur dans le cadre des formations mentionnées au second alinéa de l'article L. 211-3 n'est soumis à aucune condition de durée ou de distance parcourue minimales si le candidat a atteint l'âge de la majorité légale ou suit une formation professionnelle en vue de l'obtention d'un diplôme de l'éducation nationale permettant la délivrance du permis de conduire.

« Art. L. 211-5.  - Les modalités d'application du présent chapitre sont déterminées par décret en Conseil d'État. »

M. Jean-Jacques Filleul.  - Nous entendons rétablir les dispositions relatives à la conduite accompagnée supprimées par la commission spéciale. La conduite accompagnée, qu'elle soit supervisée, encadrée ou anticipée, augmente le taux de réussite des candidats, réduit la mortalité sur la route et abaisse le coût du permis de conduire. Toutefois, nous ne rétablissons pas la suppression de la durée minimale de formation de 20 heures.

Mme la présidente.  - Amendement n°670 rectifié bis, présenté par MM. Kern, Détraigne, Marseille, Médevielle et Gabouty.

Après l'alinéa 18

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article L. 213-7 du même code, il est inséré? un article L. 213-7-... ainsi rédigé? :

« Art. L. 213-7-...  -  Les établissements et associations agréés au titre des articles L. 213-1 ou L. 213-7 s'engagent dans des de?marches d'ame?lioration de la qualite? des prestations de formation qu'ils de?livrent et dans des démarches d'obtention d'une garantie financière permettant de garantir un sérieux économique de l'établissement. La labellisation ou la certification par un organisme accre?dite? peuvent faire acce?der ces e?tablissements a? des droits ou des dispositifs particuliers.

« La labellisation, la certification d'une démarche qualité et la garantie financière de l'établissement sont des éléments à préciser sur le contrat défini à l'article L. 213-2.

« Ces e?tablissements sont tenus de transmettre, dans les meilleurs de?lais, les renseignements et documents relatifs a? l'organisation et a? la qualite? de la formation aux examens the?oriques et pratiques du permis de conduire qui leur sont demande?s par le comite? d'apprentissage de la route mentionne? au chapitre IV du titre Ier du livre II.

« Les modalite?s d'application du pre?sent article sont fixe?es par arre?te? du ministre charge? de la se?curite? routie?re. »

M. Pierre Médevielle.  - Cet amendement rétablit des dispositions supprimées par la commission spéciale, en les complétant. Il faut protéger le consommateur.

Mme la présidente.  - Amendement n°596 rectifié, présenté par M. Revet, Mmes Gruny et Hummel et MM. Magras, P. Dominati, G. Bailly, de Nicolaÿ et Houel.

Alinéas 19 et 20

Supprimer ces alinéas.

M. Michel Magras.  - Le taux de réussite des candidats aux épreuves du permis de conduire n'est pas toujours représentatif de la qualité de l'enseignement. En faire la publicité peut pénaliser les agences installées dans des quartiers défavorisés, où les candidats ne maîtrisent pas forcément la langue française, où l'apprentissage est nécessairement plus long et souvent le taux de réussite plus bas. Il est nécessaire de tenir compte de ces situations, sauf à dissuader les auto-écoles de s'installer dans ces quartiers.

L'amendement n°590 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°669 rectifié, présenté par MM. Kern, Détraigne et Médevielle.

Alinéas 19 et 20

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

III. - Après l'article L.

 213-7 du même code, il est inséré un article L. 213-7... ainsi rédigé :

« Art. L. 213-7... - Les établissements et associations agréés au titre des articles L. 213-1 ou L. 213-7 s'engagent dans des démarches d'amélioration de la qualité des prestations de formation qu'ils délivrent.

« La labellisation ou la certification par un organisme accrédité peuvent faire accéder ces établissements à des droits ou des dispositifs particuliers. Ces établissements sont tenus de transmettre, une fois par an, les renseignements et documents relatifs à l'organisation et à la qualité de la formation aux examens théoriques et pratiques du permis de conduire et d'en faire l'affichage dans leur locaux, mention dans les contrats et tous supports d'information les concernant.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. »

M. Pierre Médevielle.  - L'affichage des taux de réussite théorique et pratique en fonction du volume horaire dispensé est contreproductif. Il amènera les écoles de conduite à sélectionner les meilleurs élèves et à laisser les élèves en difficulté de côté. Outre qu'elle est difficilement contrôlable, cette disposition est incomplète et injuste. Il faut en effet que la transparence soit totale et que l'affichage soit complété par le taux de réussite en fonction des résultats des examinateurs -ils peuvent varier au sein d'une même école de 30 % à 70 % !

Nous proposons d'inciter les écoles de conduite à entrer dans une démarche de qualité.

Mme la présidente.  - Amendement n°586, présenté par Mme Doineau, MM. Détraigne, Kern, Guerriau, Bonnecarrère, Longeot et Roche, Mme Billon, MM. Namy et Tandonnet et Mme Férat.

Alinéa 20

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 213-9. - Les départements rendent publics, dans des conditions fixées par voie réglementaire,  la moyenne départementale des taux de réussite et le volume moyen d'heures d'enseignement par cursus d'apprentissage. »

M. Henri Tandonnet.  - Afficher les taux de réussite par auto-école risque de stigmatiser les élèves en difficulté et les auto-écoles installées dans des zones difficiles, qui font un travail social important. Prévoyons plutôt l'affichage de la moyenne départementale.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°674 rectifié, présenté par MM. Patient et Antiste, Mme Claireaux et M. S. Larcher.

M. Maurice Antiste.  - Si les taux de réussite des auto-écoles varient selon la qualité de l'enseignement, ils dépendent également du lieu du centre d'examen, de l'exigence de l'inspecteur et des capacités de l'élève. Ne stigmatisons pas les auto-écoles opérant dans des zones difficiles, qui réalisent un travail social important. Afficher la moyenne départementale sera le moyen de promouvoir l'apprentissage anticipé de la conduite.

Mme la présidente.  - Amendement n°313 rectifié, présenté par MM. Antiste, Cornano, Desplan, J. Gillot, S. Larcher, Mohamed Soilihi et Patient et Mme Jourda.

Après l'alinéa 20

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Tout manquement au présent article est sanctionné dans les conditions prévues à l'article L. 111-6 du code de la consommation. »

M. Maurice Antiste.  - Dès lors que l'affichage par les auto-écoles des taux de réussite des candidats est obligatoire, il convient de prévoir les modalités de sanction en cas de manquement.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Défavorable à l'amendement n°1048. Les débats sur l'externalisation du passage du permis de conduire ont été nourris. La commission spéciale est réservée sur l'amendement n°1425 qui reviendrait à rendre le passage du permis de conduire payant, et il n'est pas certain que l'initiative privée suffise pour mailler tout le territoire, y compris dans les zones rurales.

Les mesures proposées par l'amendement n°1464 rectifié ne relèvent pas du domaine de la loi, notamment la promotion de la conduite accompagnée. Le groupe socialiste ne fait-il pas confiance au Gouvernement ?

Le Gouvernement a proposé d'abaisser à 15 ans l'âge à partir duquel il est possible de commencer la conduite anticipée. Une bonne mesure qu'il n'aurait peut-être pas pu prendre si cela avait été écrit dans la loi.

La labellisation ou la certification des auto-écoles, qui existe de par l'arrêté du 13 janvier 2009, doit rester facultative. Retrait de l'amendement n°670 rectifié bis, sinon avis défavorable.

De nombreux amendements visent à revenir sur la transparence accrue que nous demandons aux auto-écoles avec l'affichage de leur taux de réussite. Ces dernières, je le rappelle, ont interdiction de sélectionner les candidats. On le sait, la durée moyenne de la formation est plutôt de 30/35 heures que de 20 heures. Enfin, les choses seront claires pour le candidat qu'on dirige souvent vers le forfait minimal. J'ajoute qu'un mauvais élève rapporte plus d'argent à l'auto-école, il ne risque pas d'être écarté. Retrait, sinon avis défavorable aux amendements nos596 rectifié, 669 rectifié, 586 et 674 rectifié. Même avis défavorable à l'amendement n°313 rectifié.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°1048. Externaliser l'épreuve théorique, qui demande moins de compétences, permet de dégager 140 000 places pour l'épreuve pratique du permis B. l'externalisation du permis de conduire poids lourds est prévue. Pour l'épreuve pratique, des agents du ministère du travail ou de l'Éducation nationale sont présents. Nous pourrons ainsi récupérer 110 000 places pour le permis B.

Avis défavorable à l'amendement n°1425 : nous préférons recourir à des agents publics ou contractuels, ce qui revient à faire porter le coût par l'État plutôt que de rendre payante l'épreuve pratique du permis. Une précision : toute la France affiche des délais d'attente supérieurs à 45 jours. Le député Fromentin, dont vous reprenez la formule, avait cité Veritas. Cependant, Veritas n'a pas de bureaux partout, en Seine-Saint-Denis notamment. Mieux vaut s'appuyer sur La Poste.

Avis favorable à l'amendement n°1464 rectifié : vous avez bien fait de supprimer la durée minimale. Ce compromis lèvera toutes les craintes sur l'abaissement de l'exigence de santé.

Je propose à ses auteurs de retirer l'amendement n°670 rectifié bis au profit de l'amendement n°669 rectifié, auquel je donne un avis favorable.

Nous avons privilégié une démarche qualité incompatible avec l'amendement n°596 rectifié. Le taux de réussite ne reflète pas forcément la qualité de l'enseignement dispensé. L'affichage pourrait conduire à des pratiques de sélection. Le taux de réussite départemental  doit être rendu public par l'État ; il n'y a pas de raison de transférer cela aux départements : avis défavorable aux amendements nos586 et 674 rectifié.

Retrait de l'amendement n°313 rectifié : la démarche qualité suffit, des sanctions sont inutiles.

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 10 h 45, reprend à 11 heures.

Les amendements nos1425, 670 rectifié bis et 669 sont retirés.

L'amendement n°1048 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°1464.

M. Michel Magras.  - L'amendement n°596 rectifié de M. Revet était particulièrement fondé et pragmatique, d'autant que l'on veut faire du permis de conduire un service universel. On ouvre une porte qu'on aura du mal à refermer. Cependant, je m'incline.

L'amendement n°596 rectifié est retiré, de même que les amendements nos586 et 313 rectifié.

L'amendement n°674 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1049, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéas 21 et 22

Supprimer ces alinéas.

Mme Éliane Assassi.  - Ce n'est pas un amendement fondamental. Nous nous interrogions sur la pertinence de faire passer l'épreuve théorique du permis de conduite dans les lycées.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Avis défavorable.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - La procédure est encadrée avec la référence à l'article L. 214-6-2. Elle réduira les délais d'attente.

M. Jean Desessard.  - Le problème est symbolique. L'épreuve du code est devenue très difficile ; je ne suis pas certain que je le réussirais aujourd'hui.

Mme Catherine Procaccia.  - Moi non plus.

M. Jean Desessard.  - Le code devrait être un apprentissage pratique, non un examen scolaire...

M. Roger Karoutchi.  - Pourquoi ? De toute façon, vous êtes contre les voitures... (On s'amuse)

M. Jean Desessard.  - En l'organisant dans les lycées, on en fait un examen scolaire alors qu'il s'agit d'un apprentissage fondamental, d'un service universel. Oui, des jeunes s'ennuient à l'école ! L'enseignement est souvent rébarbatif.

Mme Catherine Procaccia.  - On s'éloigne du sujet !

M. Jean Desessard.  - Non, l'examen du code a un caractère scolaire, sélectif, ce qui ne devrait pas être le cas. (Marques d'impatience à droite) Peut-être êtes-vous plus proches de la réalité et connaissez-vous des jeunes qui disent tout comprendre aux questions du code et adorer cela, moi j'en connais qui s'ennuient au lycée. L'école est sélective alors que le code devrait être universel. Je vote l'amendement.

M. Marc Laménie.  - Tout de même, il faut se souvenir qu'autrefois, le service militaire était aussi une école de formation au permis de conduire. Il fallait le rappeler.

L'amendement n°1049 est retiré.

(M. Jean Desessard le regrette)

Mme la présidente.  - Amendement n°362 rectifié, présenté par MM. Vaspart et Doligé, Mme Primas, MM. Pointereau et Mandelli, Mme Lamure, MM. Calvet et Commeinhes, Mme Deseyne et MM. Laménie, de Nicolaÿ, Charon, Pierre, Revet, César et Vasselle.

Compléter cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque l'élève a choisi la voie de la conduite accompagnée, les auto-écoles sont habilitées à lui délivrer, sous certaines conditions fixées par décret, un permis provisoire.

« La validité de ce permis provisoire est fixée à six mois.

« Si aucune infraction n'est commise, constatée et reconnue pendant ces six mois, l'élève est réputé avoir valablement passé son permis.

« Si une infraction est reconnue pendant ces six mois, l'élève perd le bénéfice du permis provisoire. »

M. Michel Vaspart.  - Mon amendement va dans le sens du Gouvernement puisqu'il institue un permis provisoire pour les élèves ayant choisi la conduite accompagnée. Sans infraction pendant six mois, ce permis devient définitif.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Votre amendement introduit une trop grande distorsion entre les jeunes qui peuvent choisir la conduite accompagnée et les autres.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis défavorable.

M. Michel Vaspart.  - Je n'insiste pas.

L'amendement n°362 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°200 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Mézard et Requier, Mme Laborde, MM. Fortassin, Esnol, Collin, Castelli, Arnell et Collombat et Mme Malherbe.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le chapitre Ier du titre Ier du livre II du code de la route est complété par un article L. 211-... ainsi rédigé :

« Art. L. 211-...  - Les personnes âgées d'au moins seize ans et pouvant justifier du contrat d'apprentissage défini aux articles L. 6221-1 et suivants du code du travail, quand ce contrat est en vigueur depuis plus de deux mois, peuvent s'inscrire à la formation d'apprentissage de la conduite des véhicules à moteur en vue de l'obtention du permis de conduire. »

M. Joseph Castelli.  - Les chiffres sont éloquents : la mobilité, et notamment l'auto-mobilité, qui passe par la détention du permis de conduire, sont un facteur d'embauche à 65 %. L'obtention du permis de conduire vient en même temps que celle de la majorité légale, il coïncide le plus souvent avec la fin du lycée, le passage du baccalauréat et une sorte d'émancipation du jeune adulte. Or cette limite d'âge peut constituer un frein pour les jeunes de 16 ans en contrat d'apprentissage dès leur seizième année.

Certaines régions, comme le Languedoc-Roussillon (M. Roland Courteau le confirme) ont créé des aides financières pour les étudiants en contrat d'apprentissage.

Mme Catherine Deroche, co-rapporteure de la commission spéciale.  - Des étudiants !

M. Joseph Castelli.  - Cet amendement baisse l'âge d'obtention du permis de conduire à 16 ans pour les jeunes en contrat d'apprentissage. Un pays comme le Canada le permet, l'Allemagne l'autorise dès 17 ans.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Tous les jeunes peuvent déjà apprendre à conduire un véhicule motorisé à partir de 16 ans, voire 15 ans en conduite anticipée. La directive européenne sur le permis de conduire fixe l'âge d'obtention à 18 ans, limite qui peut être abaissée à 17 ans pour les véhicules de catégorie D. Enfin, pourquoi privilégier les apprentis ? Le permis de conduire concerne tous les jeunes. Avis défavorable.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°200 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°335 rectifié, présenté par Mme Gruny, MM. Calvet et Chasseing, Mme Deromedi, M. Commeinhes, Mme Mélot et MM. Milon, Revet et Vasselle.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le 2° de l'article L. 213-3 du code de la route est ainsi rédigé :

« 2° Avoir obtenu le certificat de qualification professionnelle ; »

Mme Jacky Deromedi.  - Le certificat de qualification professionnelle, délivré par l'ANFA, est un diplôme sanctionnant la validation de la formation pour tout aspirant exploitant d'un établissement d'enseignement de la conduite automobile.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°584 rectifié, présenté par Mme Doineau, MM. Guerriau, Détraigne et Gabouty, Mme Férat, MM. Luche, Delahaye, Kern, Bonnecarrère, Longeot, Cigolotti et Roche, Mme Billon et MM. Namy, Jarlier, Tandonnet, Marseille et Pozzo di Borgo.

M. Henri Tandonnet.  - Inscrivons le certificat de qualification professionnelle dans le code de la route.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°676 rectifié, présenté par MM. Patient et Antiste, Mme Claireaux et M. S. Larcher.

M. Maurice Antiste.  - Le certificat de qualification professionnelle est amené à compléter et sanctionner le stage à la capacité de gestion en proposant un examen final diplômant, gage de sérieux et de qualité pour les futures écoles de formation des conducteurs automobile.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Avis défavorable. Actuellement, la capacité à gestion relève du Règlement, de l'article R. 213-3 du code de la route. Modifier cela risquerait d'ôter leur agrément à des auto-écoles et de mettre en difficulté leurs élèves.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis défavorable.

Les amendements identiques nos335 rectifié, 584 rectifié et 676 rectifiés ne sont pas adoptés.

L'article 9, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°543 rectifié ter, présenté par Mme Deromedi, MM. Frassa et Duvernois, Mme Kammermann, M. Cadic, Mme Garriaud-Maylam, MM. Calvet, Charon, Commeinhes et Magras, Mme Mélot et M. Milon.

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le livre 2 du code de la route est complété par un titre 5 ainsi rédigé :

« TITRE 5

« DISPOSITIONS RELATIVES AUX FRANÇAIS ÉTABLIS HORS DE FRANCE

« Art. L. 251-1  -  Les consulats sont habilités à délivrer aux Français établis hors de France :

« 1° le permis de conduire international ;

« 2° un duplicata du permis de conduire français en cas de perte ou de vol ;

« 3° le relevé d'information restreint délivré en cas de perte ou de vol du permis français.

« Art. L. 251-2  -  Lorsqu'un Français a son domicile hors de France, il peut également obtenir la délivrance d'un duplicata de son permis de conduire auprès de la préfecture dans laquelle il a conservé une résidence ou dans la préfecture du département où il est inscrit sur une liste électorale.

« Art. L. 251-3  -  Pour tout renouvellement de permis de conduire à validité limitée pour raison médicale, la visite médicale a lieu auprès d'un médecin agréé par la préfecture ou par le consulat.

« Art. L. 251-4.  -  Lorsqu'un Français qui a fixé sa résidence habituelle à l'étranger échange son permis français avec un permis local, la délivrance de ce titre local entraîne la conservation du titre français.

« Art. L. 251-5  -  Un décret détermine, en tant que de besoin, les modalités d'application du présent titre. » 

Mme Jacky Deromedi.  - Cet amendement résout les problèmes que rencontrent quotidiennement nos compatriotes établis hors de France en matière de permis de conduire. L'assemblée des Français de l'étranger a adopté à l'unanimité une résolution à ce sujet lors de sa dernière session en mars 2015. Cette dernière demande au Gouvernement d'autoriser les postes consulaires à délivrer des duplicatas de permis de conduire en cas de vol ou de perte et de délivrer des permis de conduire internationaux.

La parution d'un décret a été promise par les gouvernements successifs depuis 2003. Le sujet est consensuel.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Vous soulevez un problème important. Le Gouvernement avait annoncé un décret d'ici fin mars mais le cabinet est resté muet face à mes questions. D'où mon avis favorable à votre amendement.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Le décret est en cours d'élaboration. Reste à étudier le problème des Français ne pouvant plus justifier d'une résidence en France, au regard de l'article 12 de la directive 2006-126 CE relative au permis de conduire. Deux incertitudes demeurent : la directive s'applique-t-elle y compris aux résidents de pays hors Union européenne ? Dans l'affirmative, cet article oblige-t-il à justifier d'un domicile dans le pays où a été déposée la demande ? Dès qu'elles seront levées, le projet de décret sera élaboré. L'expertise juridique sera rendue en avril, puis le ministre des affaires étrangères et le Conseil d'État seront consultés.

Cet amendement sera donc satisfait. C'est pourquoi je vous demande de le retirer.

M. Richard Yung.  - Voilà un problème que nous connaissons tous. Certains, après avoir perdu leur permis français, se retrouvent dans l'impossibilité d'en retrouver un autre.

Mme Nicole Bricq.  - Il nous reste bien des questions à examiner...

M. Richard Yung.  - Celle-ci n'est pas la plus grave, j'en conviens, mais elle concerne les Français de l'étranger, que nous représentons, et nous devons la traiter.

J'espère, monsieur le ministre, que le dispositif sera simple et n'exigera pas une montagne de papiers. Dans ces conditions, je voterai cet amendement.

Mme Nicole Bricq.  - Moi aussi !

L'amendement n°543 rectifié ter est adopté l'article additionnel est inséré.

ARTICLE 9 BIS A

Mme la présidente.  - Amendement n°1460, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéas 3 et 4

Supprimer ces alinéas.

M. Jean-Jacques Filleul.  - Amendement de coordination.

Mme la présidente.  - Amendement n°1689, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission.

Alinéa 4

Supprimer les mots :

organisées en vue de l'obtention

et après le mot :

permis

insérer les mots :

de conduire

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Amendement rédactionnel.

Défavorable à l'amendement n°1460, par cohérence avec notre position.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Retrait de l'amendement n°1460 ? Défavorable à l'amendement n°1689.

L'amendement n°1460 est retiré.

L'amendement n°1689 est adopté.

L'article 9 bis A, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°255 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Mézard, Arnell, Barbier, Castelli, Collombat, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Collin.

Après l'article 9 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 6231-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Favorisent le passage de l'examen du permis de conduire, en informant les apprentis sur les aides existantes et les modalités de passage, en lien avec leur formation, et en encourageant le passage durant la formation d'apprentissage»

M. Joseph Castelli.  - La moitié des personnes en insertion n'ont pas le permis de conduire. Six à huit millions de travailleurs ont des difficultés de mobilité. Obtenir le permis de conduire doit leur faciliter l'accès à l'emploi. Cet amendement inscrit l'incitation des apprentis au passage du permis dans les missions des centres de formation d'apprentissage. Il ne s'agit pas seulement de leur demander d'en faire la promotion mais d'ériger cet objectif en priorité.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Défavorable. Inutile d'inscrire cette mesure dans la loi, les régions peuvent déjà agir.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Sagesse.

L'amendement n°255 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°585 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°675 rectifié, présenté par MM. Patient et Antiste, Mme Claireaux et M. S. Larcher.

Après l'article 9 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois après la promulgation de la présente loi, un rapport sur l'opportunité que représente le permis à un euro par jour pour la démarche qualité dans laquelle les établissements d'enseignement de la conduite se sont engagés, le financement du permis de conduire des personnes les plus démunies et sur les freins actuels à ce financement.

M. Maurice Antiste.  - Le « permis à un euro par jour » est une aide au financement de la formation à la conduite et à la sécurité routière pour tous les candidats au permis de conduire de moins de 26 ans, sous- utilisée -15 % des permis- faute de financement par les établissements financiers. Pour être conventionnés, les établissements d'enseignement de la conduite agréés doivent fournir un certain nombre de garanties. Ce dispositif représente une double opportunité : garantir le service universel du permis en garantissant son financement ; obtenir un premier pas concret dans le cadre de la démarche qualité. Cet amendement prévoit un rapport sur le sujet.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Défavorable comme à toutes les demandes de rapport.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Retrait ? Le permis à un euro par jour a été rendu accessible dès 15 ans, dans le cadre de l'apprentissage anticipé de la conduite, par le décret du 3 mars 2015. Le Gouvernement incite en outre les écoles de conduite à s'engager dans une démarche qualité. Un groupe de travail a été constitué au ministère de l'intérieur, en concertation avec les organisations professionnelles. Le Gouvernement travaille donc déjà dans le sens de votre amendement.

M. Maurice Antiste.  - Je le retire, mais serai vigilant...

L'amendement n°675 rectifié est retiré.

ARTICLE 9 BIS (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°1465 rectifié, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article L. 213-4 du code de la route, il est inséré un article L. 213-4-... ainsi rédigé :

« Art. L. 213-4-...  -  La répartition des places d'examen au permis de conduire attribuées aux établissements d'enseignement de la conduite et de la sécurité routière est assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, ne portant pas atteinte à la concurrence entre ces établissements. Ces places sont attribuées de manière à garantir l'égal accès des candidats libres à une place d'examen.

« La méthode nationale de répartition est définie par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. »

M. Jean-Jacques Filleul.  - Cet amendement rétablit l'article 9 bis du projet, relatif à la répartition des places d'examen au permis de conduire, afin d'affirmer que cette répartition est assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires. Mettons fin à la distorsion de concurrence dans l'attribution des places d'examen, en raison de la règle dite du « droit du grand-père », ainsi qu'à la discrimination à l'égard des candidats libres.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Défavorable. La portée normative de cet amendement est limitée. L'arrêté du 22 octobre 2014 prévoit que les candidats libres peuvent s'inscrire dans les mêmes conditions que ceux présentés par des auto-écoles. Êtes-vous défiants à l'égard de ce gouvernement ?

Mme Nicole Bricq.  - Nous ne faisons que notre travail de parlementaire !

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Il est bon que le principe d'égal accès au permis de conduire des candidats libres figure dans la loi. De plus, le « droit du grand-père » défavorise les nouveaux entrants car les quotas sont insuffisants. Je m'étonne que la commission spéciale, attachée à la liberté de l'offre, n'ait pas retenu cet amendement...

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Il suffirait de changer l'arrêté !

À la demande du groupe socialiste, l'amendement n°1465 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin n°130 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 337
Pour l'adoption 150
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 9 bis demeure supprimé, de même que l'article 9 ter.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°436, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 9 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 417-1 du code de la route, il est inséré un article L. 417-... ainsi rédigé :

« Art. L. 417-...  -  À compter du 1er janvier 2016, le conducteur d'un véhicule à moteur, à l'exception des véhicules d'intérêt général, doit éteindre le moteur après cinq minutes à l'arrêt ou en stationnement.

« Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application du présent article. »

M. Jean Desessard.  - Cet amendement oblige les conducteurs à éteindre le moteur après cinq minutes d'arrêt. Vous me direz : c'est un amendement écologiste. (Rires) Mais cette disposition existe déjà en Suisse ou au Canada.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Où il existe le tram-train. (Rires)

M. Jean Desessard.  - Les entreprises feraient des économies. De plus, les véhicules à l'arrêt feraient moins de bruit pour les voisins.

M. Roger Karoutchi.  - Ah !

M. Jean Desessard.  - Merci de rythmer mon intervention, monsieur Karoutchi !

M. Roger Karoutchi.  - Je n'ai pas mon permis de conduire, moi !

M. Jean Desessard.  - Enfin, à l'approche de la COP 21, cette législation permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Après les pics de pollution en région parisienne, c'est notre amendement, c'est notre responsabilité. (Applaudissements sur quelques bancs socialistes et CRC)

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Défavorable. Faut-il une loi pour inciter aux comportements vertueux ?

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Défavorable. Ne rajoutons pas une nouvelle norme. Avec les investissements d'avenir, nous incitons déjà les constructeurs à investir pour réduire la pollution des véhicules. À une approche punitive, nous privilégions une approche incitative, comme l'éco-conduite.

M. Roger Karoutchi.  - Cet amendement créerait des emplois. Il faudra des agents pour contrôler la durée des cinq minutes !

M. Hervé Marseille.  - Comment ferons-nous respecter cette obligation ? On est dans un sketch de Fernand Raynaud !

Mme Catherine Procaccia.  - Dans la cour du Sénat, les moteurs des véhicules des ministres à l'arrêt tournent souvent pendant quinze-vingt minutes, sinon plus, et non pendant cinq minutes. J'espère, monsieur le ministre, que les véhicules de votre ministère donnent l'exemple.

M. Patrick Abate.  - Il faudrait aussi que cette mesure s'applique aux autocars. Pour contrôler, c'est simple, il suffit que le gendarme reste cinq minutes à côté du car...

Mme Sophie Primas.  - Et les voitures à l'arrêt dans les embouteillages, verbalisera-t-on leurs chauffeurs ? L'intention est bonne, certes !

Mme Évelyne Didier.  - Mieux vaut encourager les constructeurs à généraliser les dispositifs de coupure du moteur à l'arrêt. Cela existe, j'en ai un.

M. Jean Desessard.  - Les cars restent souvent arrêtés le moteur allumé pour maintenir le chauffage ou la climatisation, ils seront concernés, bien entendu. Il ne s'agit pas tant de verbaliser que d'encourager les comportements vertueux.

Nous-mêmes, au Sénat, ne sommes pas capables de montrer l'exemple... Inspirons-nous de la Suisse et du Canada !

M. Marc Laménie.  - Oui, nous devons être exemplaires, je crois. C'est pourquoi je voterai cet amendement, qui contribuera à la lutte contre la pollution et empêchera un beau gâchis. Le groupe PSA équipe déjà ses voitures. J'ai une voiture de ce type, une C3. Au début, j'étais surpris, puis ravi de ce mécanisme. Soutenons nos constructeurs !

L'amendement n°436 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°291 rectifié bis, présenté par MM. Antiste, Desplan, J. Gillot, Mohamed Soilihi, Patient, Cornano et S. Larcher et Mme Jourda.

Après l'article 9 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport destiné à évaluer la possibilité et l'opportunité de supprimer les surcharges sur le carburant ou les composantes tarifaires appliquées par les compagnies aériennes françaises.

M. Maurice Antiste.  - La promotion de la mobilité constitue l'une des priorités de ce projet de loi qui lui consacre symboliquement son chapitre premier.

Les Outre-Mer sont pénalisées par le coût élevé du transport aérien. Les prix des billets d'avion au départ de la Martinique ont augmenté de 6,2 % au cours de l'année 2014 contre une hausse de 1,1 % pour l'Hexagone, selon la Direction générale de l'aviation civile.

Afin d'améliorer l'attractivité économique des Outre-Mer et le pouvoir d'achat de leurs habitants, les compagnies aériennes devraient être incitées à modérer leur politique tarifaire, dont les surcharges sur le carburant sont une composante importante. Celles-ci ne sauraient être maintenues au regard du net recul des cours pétroliers.

Selon l'Association internationale du transport aérien, leur suppression abaisserait de 5,1 % le coût moyen du billet d'avion, sans détériorer la situation des compagnies aériennes compte tenu de la baisse du prix du pétrole et de la hausse de 7 % du trafic de passagers depuis 2014.

Je propose que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur l'opportunité de parvenir à l'extinction progressive des surcharges sur le carburant appliquées par les compagnies aériennes françaises.

Mme la présidente.  - Amendement n°822 rectifié bis, présenté par MM. Cornano, Antiste, Desplan, J. Gillot, Karam, S. Larcher, Mohamed Soilihi et Patient.

Après l'article 9 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi, un rapport sur les surcharges carburant et les surcharges transporteur appliquées par les compagnies aériennes en complément du prix des billets d'avion.

M. Jacques Cornano.  - A l'heure où le baril de pétrole chute à moins de 50 dollars, le poids des surcharges carburant appliquées par les compagnies aériennes sur le prix des billets d'avion apparait de moins en moins justifié.

Cette taxe grève le pouvoir d'achat des passagers ainsi que l'attractivité et le dynamisme économique des territoires d'outre-mer à fort potentiel touristique.

Avec la fin des surcharges carburant, le prix moyen d'un billet aller-retour par avion pourrait diminuer de 5,1 %, sans compromettre les bénéfices du secteur aérien.

Si le coût du carburant répercuté sur le prix des billets n'est pas uniquement lié au prix du brut, il paraît opportun de proposer, dans cette loi visant à préserver le pouvoir d'achat des Français, un rapport au Parlement sur la possibilité de supprimer cette taxe surcharge carburant.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Défavorable car ce sont des demandes de rapports.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - La surcharge carburant est une obligation d'affichage, une mesure de sensibilisation. Ne cédons pas à une pensée magique : ce n'est pas parce que les compagnies n'afficheront plus le prix du carburant qu'elles ne le répercuteront plus sur le prix du billet. La transparence est plutôt saine. Il nous faut plutôt encourager l'efficacité énergétique et poursuivre la réflexion sur le coût de la vie outre-mer.

M. Maurice Antiste.  - Il est une seule chose au monde qui échappe à la loi de la gravité terrestre : le prix des billets d'avion ! Il monte, il monte, très vite, avec la hausse du prix du pétrole, mais diminue beaucoup plus lentement quand celui-ci vient à baisser... Il est temps de s'y intéresser, c'est une question de continuité territoriale.

M. Michel Magras.  - J'ai rendu un rapport sur ce sujet au nom de la commission nationale d'évaluation des politiques outre-mer. La surcharge carburant n'est qu'une partie du problème : une variable d'ajustement offerte aux compagnies aériennes pour équilibrer leur budget d'une année sur l'autre, en dépit des variations de passagers, du prix du pétrole...

De mon rapport, il ressortait des abus clairs, qui tiennent davantage à des taxes qui ne se justifient pas toujours au regard de ce qu'elles sont censées financer. J'avais préconisé de lancer un audit mené par un organisme neutre, indépendant de l'État et des compagnies aériennes.

Vous avez raison de soulever ce problème, même si je soutiens la position de notre rapporteure, hostile à toutes les demandes de rapport.

M. Jacques Cornano.  - Nous devons engager des travaux sur l'insularité, le président de la République s'y était engagé. Le caractère archipélagique de la Guadeloupe doit être pris en compte. Sa situation, bien spécifique, diffère de celle de la Martinique ou de La Réunion, par exemple.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - L'élasticité du prix des billets est, il est vrai, plus forte à la hausse du pétrole qu'à la baisse...

M. François Marc.  - En effet !

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Je saisirai la DGCCRF et la DGAC, afin qu'elles mènent une enquête commune à ce sujet, et vous en rendrai compte.

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - Sur la méthode, le groupe d'étude sénatorial sur l'aviation civile pourrait se saisir de la question, tout comme la commission du développement durable, qui dispose d'un rapporteur pour avis sur le budget de l'aviation civile, lequel est aussi examiné par un rapporteur spécial de la commission des finances. Évitons les rapports.

Enfin, M. Desessard regrettait que certains moteurs tournent pendant cinq minutes à l'arrêt. Il nous reste plus de 1 400 amendements. Il serait bon d'accélérer.

M. Maurice Antiste.  - Vu l'engagement fort du ministre, je retire l'amendement n°291 rectifié bis.

M. Jacques Cornano.  - Moi de même. Je ferais volontiers partie d'une mission de réflexion sur les conséquences de l'insularité et de la continuité territoriale.

Les amendements nos292 rectifié bis et 822 rectifié bis sont retirés.

L'article 9 quater demeure supprimé.

Mme la présidente.  - Amendement n°1467, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'article 9 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° L'article L. 612-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la référence : « aux 1° et 2° » est remplacée par la référence : « aux 1° à 3° » et sont ajoutés les mots : « ou de protection de l'intégrité physique des personnes » ;

b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« En outre, les personnes exerçant l'activité mentionnée au 2° de l'article L. 611-1 peuvent transporter, dans les conditions des articles L. 613-8 à L. 613-11, tout bien, objet ou valeur. » ;

2° À l'article L. 613-9, les mots : « les fonds sont placés dans des dispositifs garantissant qu'ils peuvent être détruits ou rendus impropres à leur destination et transportés » sont remplacés par les mots : « le transport est effectué ».

II. - Le présent article est applicable en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna.

M. Jean-Jacques Filleul.  - Cet amendement révise les conditions d'exclusivité grevant l'activité des entreprises de transport de fonds. Ces entreprises doivent pouvoir transporter, en véhicule blindé avec une escorte armée, d'autres types de biens que ceux qui sont actuellement limitativement énumérés : je pense en particulier aux scellés judiciaires, les produits de luxe ou le matériel de haute technologie. De plus, cet amendement libérerait nos forces de l'ordre de certaines missions.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - L'objet de cet amendement est succinct et peu explicite. Faute de précision sur ses buts, la commission spéciale a émis un avis défavorable. On ne peut régler, au détour d'un amendement, des sujets aussi importants que le port d'armes.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Il ne s'agit pas d'élargir le port d'armes mais d'autoriser les transporteurs de fonds à convoyer d'autres marchandises : les chèques-déjeuner, les produits de luxe, les oeuvres d'art, le matériel de haute technologie, les scellés de justice, etc...

Le besoin existe, il justifie pleinement l'amendement. De plus, ce sera, en effet, une manière de libérer nos forces de l'ordre de tâches logistiques qui pourraient très bien être assurées par le secteur privé. Pour ces raisons pratiques, l'avis est favorable.

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - L'exposé des motifs de l'amendement est particulièrement succinct. La rapporteure, qui a fourni un important travail, n'a pas eu le temps de s'y pencher. Le ministère ne s'est pas non plus rapproché de nous. Traiter un tel sujet avec si peu d'informations serait tout de même un peu léger.

Mme Nicole Bricq.  - Pour avoir quelques années d'expérience parlementaire, je suis surprise par l'argument rigide du président de la commission spéciale. L'objet est succinct ? Soit, la séance publique est l'occasion de donner des éclaircissements. Nous sommes là dans notre rôle de législateurs.

L'amendement, parce qu'il est extérieur, a été examiné rapidement en commission spéciale. Il a été déposé par le groupe socialiste et même si celui-ci a pu consulter, par les moyens courants à notre disposition, le cabinet du ministre, pourquoi le ministère devrait-il se rapprocher de la commission dans ce cas ? Il s'agit bien d'un amendement du groupe, qui modifie à la marge l'activité des entreprises de transport de fonds, nous le défendons en séance publique. C'est le jeu parlementaire.

Mme Nathalie Goulet.  - Qu'un amendement connaisse ce parcours, que son objet soit peu explicite, cela arrive tous les quatre matins. Je ne doute pas qu'il puisse être utile. En revanche, je suis incapable, en l'état actuel de nos informations, de déterminer son bien-fondé. Je ne le voterai donc pas.

Mme Éliane Assassi.  - En effet ! Où mettra-t-on le curseur ? Combien prétend-on économiser de postes de gendarmes et de policiers ? J'aurais besoin d'éléments supplémentaires pour me prononcer sur ce sujet qui n'est pas banal.

M. Jean-Jacques Filleul.  - L'amendement est souple...

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - ...trop souple !

M. Jean-Jacques Filleul.  - Il s'agit d'autoriser les transporteurs de fonds à convoyer d'autres richesses pour économiser le recours aux forces de l'ordre.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Je suggère le retrait contre mon engagement à déposer au Sénat un amendement plus précis, qui tienne compte de nos débats.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - C'est une meilleure méthode.

M. Jean-Jacques Filleul.  - D'accord.

L'amendement n°1467 est retiré.

La séance est suspendue à 12 h 40.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 14 h 45.

Rappel au Règlement

Mme Éliane Assassi .  - La majorité de la commission spéciale a adopté un amendement important, qui remet en cause le compte pénibilité -l'une des rares avancées du gouvernement Ayrault. J'ai cru comprendre que les sénateurs socialistes avaient voté contre en commission spéciale. Or, j'apprends que François Rebsamen, ministre du travail, a pris le pari, devant un parterre de patrons du bâtiment, qu'il n'y aurait pas de fiches individuelles à remplir pour les petites entreprises, que les critères inapplicables seraient supprimés, qu'il fallait de la simplification...

Quelle est votre position, monsieur le ministre, vous qui déclariez, à Berlin, que la protection des salariés était l'une des explications du taux de chômage élevé en France ? Vos propos ont-ils été déformés, ou apportez-vous votre soutien aux propositions de la commission spéciale, remise en cause du compte pénibilité ou relèvement de seuils sociaux ? Cela ne me paraît guère correspondre aux orientations du parti socialiste...

Mme la présidente.  - Acte vous est donné de ce rappel au Règlement.

Mme Nicole Bricq.  - Laissez-nous définir nos orientations, nous ne occupons pas des vôtres !

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 10 A (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°1052, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'article 21 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie est abrogé.

Mme Éliane Assassi.  - Lors de l'examen de la loi de modernisation de l'économie, tous les sénateurs de gauche avaient dénoncé la libéralisation des relations commerciales, et plus particulièrement la libre négociabilité des conditions générales de vente. Il existe un autre modèle que celui de la concurrence libre et sans entrave. Le rapport d'information de Mme Élisabeth Lamure, fait au nom de la commission de l'économie, dresse un bilan peu satisfaisant de cette réforme. Il faut toujours une règle du jeu et c'est à l'État de la définir.

Mme la présidente.  - Amendement n°1646, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I.  -  Le livre III du code de commerce est complété par un titre IV ainsi rédigé :

« TITRE IV

« DES RÉSEAUX DE DISTRIBUTION COMMERCIALE

« Art. L. 341-1.  -  L'ensemble des contrats conclus entre, d'une part, une personne physique ou une personne morale de droit privé regroupant des commerçants, autre que celles mentionnées aux chapitres V et VI du titre II du livre Ier du présent code, ou mettant à disposition les services mentionnés au premier alinéa de l'article L. 330-3 et, d'autre part, toute personne exploitant, pour son compte ou pour le compte d'un tiers, au moins un magasin de commerce de détail, ayant pour but commun l'exploitation d'un de ces magasins et comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d'exercice par cet exploitant de son activité commerciale prévoient une échéance commune.

« La résiliation d'un de ces contrats vaut résiliation de l'ensemble des contrats mentionnés au premier alinéa du présent article.

« Le présent 'est pas applicable au contrat de bail dont la durée est régie par l'article L. 145-4.

« Art. L. 341-2.  - Toute clause ayant pour effet, après l'échéance ou la résiliation d'un des contrats mentionnés à l'article L. 341-1, de restreindre la liberté d'exercice de l'activité commerciale de l'exploitant qui a précédemment souscrit ce contrat est réputée non écrite.

« Art. L. 341-3.  -  Les contrats mentionnés à l'article L. 341-1 ne peuvent être conclus pour une durée supérieure à neuf ans. Ils ne peuvent être renouvelés par tacite reconduction.

« Art. L. 341-4.  - Les règles statutaires et les décisions collectives adoptées conformément aux dispositions législatives relatives aux associations et aux sociétés civiles, commerciales ou coopératives ne peuvent déroger aux articles L. 341-1 à L. 341-3. »

II.  -  Le I s'applique à l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date de promulgation de la présente loi s'agissant des contrats en cours dont la durée restant à courir est supérieure à six ans à la même date. Le même I s'applique quatre ans après la promulgation de la présente loi aux contrats dont la durée restant à courir est inférieure à six ans à la date de cette promulgation. 

III.  -  Un décret, pris après avis de l'Autorité de la concurrence, définit, en tant que de besoin, les seuils de chiffre d'affaires en deçà desquels il peut être dérogé au I.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Cet amendement rétablit le texte de l'Assemblée nationale. Plusieurs études de nos services et de l'Autorité de la concurrence ont montré que, dans certains réseaux, les franchisés subissaient des conditions excessives de la part des franchiseurs, au point de se retrouver interdits de mobilité.

Je conviens, les coopératives ayant un statut spécifique, que la rédaction proposée devra être revue pour éviter de remettre en cause leur statut ou leur stabilité financière. Un dialogue est en cours pour l'améliorer d'ici la nouvelle lecture.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°1700 à l'amendement n°1646 du Gouvernement, présenté par M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Amendement n° 1646

I - Alinéa 5

Remplacer les mots :

autre que celles mentionnées aux chapitres V et VI du titre II du livre Ier du présent code, ou

par les mots :

autre que celles visées à l'article L. 341-4 et

II - Alinéa 10

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 341-4.  - Les dispositions de l'article L. 341-1 ne sont pas applicables aux personnes morales de droit privé mentionnées aux chapitres IV, V et VI du titre II du livre Ier du présent code, ainsi qu'aux associations, sociétés civiles, sociétés commerciales ou coopératives regroupant des commerçants ou mettant à disposition les services mentionnés au premier alinéa de l'article L. 330-3, lorsque ces personnes sont majoritairement détenues, directement ou indirectement, par des personnes exploitant pour leur compte ou pour le compte d'un tiers au moins un magasin de commerce de détail sous l'une des enseignes de l'association, la société civile, la société commerciale ou la coopérative concernée. »

M. Yannick Vaugrenard.  - J'entends cet engagement mais je m'étonne que le Gouvernement souhaite rétablir à l'identique une rédaction manifestement inadaptée, notamment pour les magasins organisés en coopérative. C'est pourquoi nous proposons, à ce stade, d'exclure du dispositif le commerce coopératif et associatif.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - L'article 21 de la loi de modernisation de l'économie de 2008 visait à réduire les délais de paiement inter-entreprises et à renforcer les sanctions. Le rapport du Sénat de 2009 soulignait les résultats positifs de cette mesure, ne revenons pas en arrière : avis défavorable à l'amendement n°1052.

L'amendement n°1646 du Gouvernement revient, sans surprise, à la rédaction de l'Assemblée nationale. La commission spéciale a voté la suppression de cet article, même si l'idée de renforcer la concurrence entre enseignes est sans doute une bonne chose. L'amendement limite à neuf ans la durée d'affiliation pour tous les commerces de détail, au-delà du commerce alimentaire que l'Autorité de la concurrence visait explicitement. On manque d'études de l'impact d'un tel dispositif. Je ne suis pas sûre, en outre, que remplacer une enseigne par une autre change réellement la donne. Et le fonctionnement des groupes coopératifs sera perturbé, à la différence de celui des groupes intégrés. L'Autorité de la concurrence peut en outre déjà imposer des cessions en cas de position dominante d'une enseigne. Le juge tranche en cas de litige si la durée d'affiliation ne correspond pas aux investissements collectifs du groupe. Enfin, la réglementation permet déjà la concordance de la durée des contrats.

La commission spéciale avait souhaité que les échanges se poursuivent avec les parties prenantes pour aboutir, en séance publique, à un texte plus adapté et moins perturbateur pour le commerce franchisé coopératif et associatif. Vous avez refusé tout dialogue, puisque vous revenez au texte de l'Assemblée nationale : avis défavorable.

Le sous-amendement n°1700 aurait pu recevoir un avis favorable mais la commission spéciale n'a pas pu l'examiner.

Les CDI ou CDD tacitement reconductibles sont interdits par le droit en vigueur. Le sous-amendement interdit en outre de proposer aux coopératives et commerces associatifs une pluralité de contrats dont les termes ne coïncideraient pas. Sagesse.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Retrait de l'amendement n°1052, sinon avis défavorable. La loi de modernisation de l'économie a tout de même corrigé la pratique des marges arrière, même si la récente guerre des prix a nui aux fournisseurs les plus fragiles. Ne revenons pas au statu quo ante. Avec la loi Consommation, le Gouvernement a souhaité redonner des marges aux fournisseurs en cours d'année : depuis le 1er mars 2014, les prix peuvent être renégociés dans l'année en cas d'évolution majeure du prix des matières premières. Les moyens de contrôle ont été renforcés. La DGCCRF est pleinement mobilisée.

Le sous-amendement n°1700 va plus loin que les objectifs que s'est fixé le Gouvernement puisqu'il exclut complètement le commerce associé. Le Gouvernement continue à négocier, en toute transparence, madame la rapporteure, et s'engage à préserver le bon fonctionnement des commerces associés, particulièrement ceux adhérant à des coopératives.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je partage l'analyse de la commission sur ce point. On ne peut comparer le commerce associé avec les franchisés. Ces derniers sont locataires de services et de savoir-faire ; les premiers sont copropriétaires, donc codécideurs, et caution des engagements financiers pris par l'association. Ils subissent l'impact commercial et financier en cas de sortie du réseau de l'un d'entre eux.

Le fait coopératif est protégé par un droit européen, consolidé en France par la loi sur l'économie sociale et solidaire. L'Autorité de la concurrence méconnait la spécificité des coopératives -c'est sa culture... Il faut un équilibre entre liberté d'entrer et de sortir de la coopérative et l'affectio societatis, qui ne doit pas être menacée.

Chat échaudé craint l'eau froide : j'ai vu souvent l'Autorité de la concurrence arbitrer contre le monde coopératif. Si le Sénat rejette cet amendement, monsieur le ministre, vous pourrez trouver un accord d'ici la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale. D'autant que le Conseil supérieur de la coopération n'a pas été consulté...

Mme Élisabeth Lamure.  - J'étais rapporteure de la loi de modernisation de l'économie en 2008. Il ne s'agissait pas de libéraliser les relations entre fournisseurs et distributeurs mais d'apporter de la souplesse sans tomber pour autant dans l'économie administrée.

Le bilan n'a pas été satisfaisant en effet -la faute à la crise et au talent de contournement des distributeurs. Aujourd'hui, les relations entre fournisseurs et distributeurs sont toujours dégradées. Le diktat des prix bas, qui est la doctrine de la grande distribution, fragilise l'ensemble de la chaîne économique.

L'amendement n°1052 n'est pas adopté.

M. François Marc.  - La commission spéciale a supprimé l'article ; le Gouvernement souhaite, lui, rétablir un dispositif qui n'est pas satisfaisant -vous l'avez reconnu vous-même, monsieur le ministre. On ne peut mettre sur le même plan les franchisés et les commerçants coopératifs. Ces derniers investissent dans leurs outils et partagent les risques. En limitant à neuf ans la durée des contrats, on crée une incertitude, un manque de visibilité sur leurs investissements. Notre sous-amendement porte remède à cette difficulté.

Il est important de veiller à préserver la concurrence, la pérennité de la diversité des enseignes. Concentrer davantage les enseignes serait préjudiciable au consommateur. Le modèle coopératif appelle un regard particulier, il faut le préserver.

L'étude d'impact ? D'autre l'ont faite... La banque Merrill Lynch a publié dernièrement une recommandation boursière et financière : elle considère que les groupes intégrés comme Carrefour ou Auchan ont plus à gagner de ce dispositif que le réseau coopératif, et que des opportunités d'achat pourraient s'ouvrir à eux pour accroître leur force de frappe. Autant dire un dépeçage du réseau. Adoptons notre sous-amendement pour rassurer les investisseurs.

M. Olivier Cadic.  - L'institution d'un contrat plus ou moins unique, sur la durée duquel devraient s'aligner tous les autres contrats établis entre les parties, est source de discrimination ; cette contrainte impacte très partiellement la distribution intégrée -l'activité des points de vente exploités par elle en franchise est minime - mais concerne tous les réseaux de commerçants indépendants. Le déséquilibre serait flagrant au bénéfice des sociétés intégrées, qui pourraient s'emparer progressivement de nombreux magasins indépendants, qu'on aurait privés des éléments les plus importants de leur compétitivité.

Le législateur a renforcé de longue date les règles régissant l'organisation du système coopératif. Avec ce texte, l'efficacité économique de celui-ci sera menacée. La seule solution est la suppression de l'article 10 A ou la limitation de sa portée, comme le propose le sous-amendement.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Revenir au texte de l'Assemblée nationale est une fausse bonne idée -cela vous priverait de toute marge de manoeuvre, monsieur le ministre. Dans la rédaction actuelle, les inconvénients l'emportent sur les avantages.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Les analyses de Merrill  Lynch sont rarement neutres et indépendantes, celle que vous citez  est à destination des réseaux privés franchisés, déjà cotés. Méfiez-vous de ce type d'analyse !

La réalité quotidienne d'un franchisé d'un réseau coopératif n'est pas vraiment celle d'un co-décideur... Il faut bien aménager le cadre existant. Comme vous, je suis attaché à la stabilité du secteur coopératif et aux valeurs qu'il porte. Reste qu'il y a des pratiques d'optimisation, qui ne sont pas souhaitables.

Mme la rapporteure a reconnu la notion de position dominante, je m'en réjouis. L'injonction structurelle ne vaut que dans le cas de position dominante avec des marges excessives. Un franchisé peut se retrouver dans l'impossibilité de changer d'enseigne à cause de l'enchevêtrement des contrats.

Le problème a été identifié, le dialogue est en cours, je l'ai dit. Quel que soit le vote du Sénat, les préoccupations que vous portez seront prises en compte et le dispositif final préservera bien l'essence du modèle coopératif.

À la demande de la commission spéciale, le sous-amendement n°1700 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°131 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 324
Pour l'adoption 128
Contre 196

Le Sénat n'a pas adopté.

À la demande de la commission spéciale, l'amendement n°1646 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°132 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 324
Pour l'adoption 0
Contre 324

Le Sénat n'a pas adopté.

(Rires et applaudissements à droite)

M. Roger Karoutchi.  - Quel succès, monsieur le ministre !

L'article 10 A demeure supprimé.

ARTICLE 10 B (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°192 rectifié bis, présenté par MM. Raison, César, Morisset, de Nicolaÿ, Vasselle et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Kennel, Delattre, Lefèvre, Nougein, Pointereau, Milon, Vaspart, B. Fournier, Grosperrin, Calvet, Béchu, Trillard, Joyandet et Revet, Mme Bouchart et MM. Chaize, Laménie, Perrin et Gremillet.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'article L. 441-7 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, au 2°, au 3° et à la première phrase du neuvième alinéa, les mots : « ou le prestataire de services » sont remplacés par les mots : « de commerce de détail » ;

b) Au huitième alinéa, les mots : « ou prestataire de services » sont remplacés par les mots : « de commerce de détail » ;

2° Après le I, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« ...  -  Au sens du I, la notion de distributeur de commerce de détail s'entend du distributeur effectuant pour plus de la moitié de son chiffre d'affaires de la vente de marchandises à des consommateurs pour un usage domestique, ou de la centrale d'achat ou de référencement d'entreprises de ce distributeur. »

M. Marc Laménie.  - Cet amendement exclut les entreprises de l'approvisionnement professionnel du champ de l'article L. 441-7 du code de commerce ; il précise que cet article ne s'applique qu'aux relations entre la grande distribution et ses fournisseurs.

Il définit en outre la notion de grande distribution en référence à la définition proposée par l'Autorité de la concurrence du commerce de détail dans ses lignes directrices relatives au contrôle des concentrations.

Mme la présidente.  - Amendement n°848 rectifié, présenté par MM. Bizet et G. Bailly, Mme Bouchart, M. Calvet, Mme Cayeux, MM. César, Commeinhes, de Nicolaÿ et Delattre, Mme Deromedi, MM. Doligé, Houel, L. Hervé, Laménie, Lefèvre, Longuet et Mayet, Mme Mélot, MM. Milon, Morisset, Perrin et Pierre, Mme Primas et MM. Raison, Trillard et Vogel.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Le II de l'article L. 441-7 est abrogé ;

2° Après l'article L. 441-7, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art.  L. 441-7-1.  -  I.  -  L'article L. 441-7 n'est pas applicable entre un fournisseur et un grossiste.

« Une convention écrite conclue entre le fournisseur et le grossiste indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale. Établie soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre annuel et des contrats d'application, elle fixe :

« 1° Les conditions de l'opération de vente des produits ou des prestations de services telles qu'elles résultent de la négociation commerciale dans le respect de l'article L. 441-6 ;

« 2° Les conditions dans lesquelles le grossiste s'oblige à rendre au fournisseur, en vue de la revente de ses produits aux professionnels, tout service propre à favoriser leur commercialisation ne relevant pas des obligations d'achat et de vente, en précisant l'objet, la date prévue, les modalités d'exécution, la rémunération des obligations ainsi que les produits ou services auxquels elles se rapportent ;

« 3° Les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le grossiste, en précisant pour chacune l'objet, la date prévue et les modalités d'exécution, ainsi que la rémunération ou la réduction de prix globale afférente à ces obligations.

« Les obligations relevant des 1° et 3° concourent à la détermination du prix convenu.

« La convention unique ou le contrat-cadre annuel est conclu avant le 1er mars ou dans les deux mois suivant le point de départ de la période de commercialisation des produits ou des services soumis à un cycle de commercialisation particulier.

« « Le présent I n'est pas applicable aux produits mentionnés au premier alinéa de l'article L. 441-2-1.

« II.  -  Au sens du I, la notion de grossiste s'entend de toute personne physique ou morale qui, à titre professionnel, achète des produits à un ou plusieurs fournisseurs et les revend, à titre principal, à d'autres commerçants, grossistes ou détaillants, à des transformateurs, ou à tout autre professionnel qui s'approvisionne pour les besoins de son activité.

« Sont assimilées à des grossistes au sens du premier alinéa du présent II, les centrales d'achat ou de référencement de grossistes, à l'exception de celles agissant également pour le compte de détaillants.

« Art. L. 441-7-2.  -  Le fait de ne pas pouvoir justifier avoir conclu dans les délais prévus une convention satisfaisant aux exigences de l'article L. 441-7 ou du I de l'article L. 441-7-1 est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale. L'amende est prononcée dans les conditions prévues à l'article L. 465-2. Le maximum de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »

Mme Sophie Primas.  - Il s'agit de lever les difficultés que posent aux entreprises spécialisées dans l'approvisionnement professionnel le cadre légal en vigueur en matière de formalisation de la négociation commerciale.

La loi Hamon a renforcé les contraintes de formalisme pesant sur les relations commerciales. Le déséquilibre qui caractérise la relation entre la grande distribution et ses fournisseurs, les entreprises concernées par cet amendement, à 95 % des PME, ne le connaissent pas. Elles se voient pourtant imposées les mêmes contraintes. Le cadre légal est devenu impraticable pour elles et les place dans une situation d'insécurité juridique.

Pour des dizaines de milliers d'entreprises, l'adoption de cet amendement serait une avancée considérable.

Mme la présidente.  - Amendement n°1053, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport portant, dans les départements et régions d'outre-mer, sur les modalités de création et de fonctionnement de centrales d'approvisionnement et de stockage régionales qui, par mutualisation des moyens, réduiraient les coûts et permettraient aux distributeurs de mieux faire jouer la concurrence entre fabricants et intermédiaires.

M. Michel Le Scouarnec.  - Il s'agit de favoriser la création de centrales d'approvisionnement régional, revendication ancienne des Outre-Mer. C'est aussi une préconisation de l'Autorité de la concurrence. Dans les Outre-Mer, les marchés sont étroits ; on s'approvisionne généralement sur les marchés français et européens lointains, d'où un coût supplémentaire. La vie chère outre-mer tient aussi au fractionnement de l'approvisionnement, avec des marges à chaque étape.

Les Outre-Mer éprouvent des difficultés à s'insérer dans leur environnement économique. L'approvisionnement sur les marchés régionaux entraînerait une baisse des coûts de transport, et donc du prix des produits. Il est pour l'heure entravé par les réglementations et normes européennes. Serge Letchimy, député de la Martinique, a proposé, dans un rapport, la mise en place d'outils de certification pour les produits d'origine régionale.

L'idée d'une plate-forme d'achat a été adoptée par la CCI de La Réunion, qui a lancé une campagne : « Le bon produit au bon endroit ». Les initiatives de ce type sont à encourager -le soutien des pouvoirs publics serait bienvenu. Le Gouvernement pourrait enfin ainsi s'appuyer sur le résultat de missions d'étude conduites dans chaque région outre-mer pour le rapport que nous demandons.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Défavorable à l'amendement n°192 rectifié bis : il rétablit l'article 10 B dans la rédaction de l'Assemblée nationale, ce que nous ne voulons pas. Les professionnels ont travaillé sur un dispositif alternatif qui a notre soutien. L'amendement n°848 rectifié s'inspire des négociations entre professionnels pour revoir le cadre légal régissant les relations entre les fournisseurs et les grossistes. Il maintient l'obligation de convention écrite et donne une définition du statut de grossiste. Favorable. Défavorable à l'amendement n°1053 qui demande encore un rapport.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Défavorable à l'amendement n°192 rectifié bis : supprimer tout formalisme entre fournisseurs et grossistes est, en effet, simpliste. Retrait de l'amendement n°848 rectifié ? Je vous propose de travailler à une meilleure rédaction pour des raisons techniques. Enfin, sagesse sur l'amendement n°1053.

L'amendement n°192 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°848 rectifié est adopté et devient l'article 10 B.

L'amendement n°1053 n'a plus d'objet.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°849 rectifié, présenté par MM. Bizet et G. Bailly, Mme Bouchart, M. Calvet, Mme Cayeux, MM. César, Commeinhes, de Nicolaÿ, Delattre, Doligé et Houel, Mme Gruny, MM. Laménie, Lefèvre, Longuet et Mayet, Mme Mélot, MM. Milon, Morisset, Perrin et Pierre, Mme Primas et MM. Raison, Reichardt, Trillard, Vaspart et Vogel.

Après l'article 10 B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du septième alinéa du I de l'article L. 441-6 du code de commerce, après les mots : « de vente », sont insérés les mots : « , opposables dès leur date d'entrée en vigueur définie par le fournisseur, ».

Mme Sophie Primas.  - Selon le principe de liberté des prix et de la concurrence consacré par le droit français, tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur doit soumettre la vente de ses produits ou de ses prestations de services à des conditions générales de vente applicables à tous ses clients sans distinction. Depuis l'entrée en application de la loi de modernisation de l'économie, le tarif fournisseur, socle de la négociation commerciale, n'est pas appliqué dans la majorité des cas. En effet, les fournisseurs sont confrontés à des demandes de conditions générales de vente dérogatoires, de reports d'application du tarif annuel, voire de refus d'appliquer le tarif de l'année sur la base duquel ont été négociés et conclus les accords commerciaux.

L'objectif de la loi de modernisation de l'économie, qui était de garantir une négociation commerciale équilibrée à partir d'un socle commun à tous les clients, est donc détourné. Les abus en résultant créent de véritables distorsions de concurrence. La négociation doit porter sur le prix convenu, résultant de la négociation commerciale, et non sur le tarif de départ. La date d'entrée en application du tarif n'a pas à être négociable ; elle s'applique de plein droit pour ouvrir les négociations commerciales.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Les conditions générales de vente doivent être identiques pour tous. Dans la pratique, certains distributeurs tentent effectivement d'imposer leur point de départ dans la négociation. Cette pratique abusive doit être sanctionnée.

Toutefois, cet amendement va trop loin en transformant les clauses générales de vente en règles unilatéralement opposables. Ce serait inverser le déséquilibre, en mettant à mal toute négociation contractuelle, quand la liberté de prix est consacrée depuis 1986. Retrait ?

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

Mme Sophie Primas.  - Je m'incline, en espérant que nos débats faciliteront la formation d'une jurisprudence et le règlement des nombreux contentieux entre fournisseurs et distributeurs.

L'amendement n°849 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°189 rectifié ter, présenté par MM. Raison, Bizet, Morisset, de Nicolaÿ, Vasselle et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Kennel, Lefèvre, Pointereau, G. Bailly, Béchu, Chaize, Reichardt, Milon, Vaspart, B. Fournier, Grosperrin, Perrin, Pierre, Calvet, Cornu, Trillard et Joyandet, Mme Primas, M. Revet, Mme Bouchart et MM. Laménie et Gremillet.

Après l'article 10 B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le quatrième alinéa du I de l'article L. 441-7 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le plan d'affaires fait partie intégrante de la convention. Il reprend les engagements réciproques, les leviers de développement, ainsi que les objectifs que les parties se sont fixés tels qu'ils sont définis par la commission d'examen des pratiques commerciales. »

M. Marc Laménie.  - Nous voulons préciser que le plan d'affaires fait partie intégrante de la convention.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°438 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Mme Esther Benbassa.  - Le plan d'affaires doit faire partie intégrante de la convention entre industriel et ses fournisseurs. Comme il retrace l'ensemble des négociations, il est un facteur de transparence et facilite les contrôles.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Ces amendements attribuent au plan d'affaires un rôle qu'il n'a pas vocation à jouer. Ils introduisent une incertitude juridique dans les relations commerciales, qui ont besoin d'un cadre clair. De plus, ils sont en grande partie satisfaits car la convention doit déjà indiquer l'objet, la date prévue ou les remises aux termes de l'article L. 441-7 du code du commerce. Retrait, sinon défavorable.

L'amendement n°189 rectifié ter est retiré.

L'amendement n°438 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°603 rectifié n'est pas défendu.

ARTICLE 10 C

Mme la présidente.  - Amendement n°1054, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 611-4-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« Art. L. 611-4-2.  -  Un coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente des produits agricoles et alimentaires est instauré. Ce coefficient multiplicateur est supérieur lorsqu'il y a vente assistée.

« Après consultation des syndicats et organisations professionnelles agricoles, les ministres chargés de l'économie et de l'agriculture fixent le taux du coefficient multiplicateur, sa durée d'application et les produits visés.

« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article et les sanctions applicables en cas de méconnaissance de ses dispositions. »

Mme Christine Prunaud.  - Il convient d'instituer un coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente des produits alimentaires. Entre agro-business et grande distribution, l'agriculture s'inscrit dans de puissantes filières agro-industrielles et financières dominées par l'aval et par l'amont, ce qui favorise les dérives. Depuis 1992, les réformes de la PAC imposées par l'offensive libérale ont conduit à la suppression des outils de régulation et à l'ouverture des marchés agricoles à la spéculation financière, ce qui entraîne une grande volatilité des prix agricoles.

La grande distribution, malgré les évolutions de la législation, a les coudées franches pour imposer sans vergogne aux producteurs des prix d'achat de plus en plus compressés, souvent inférieurs aux prix de production, et aux consommateurs des prix à la caisse toujours plus hauts. Il importe de mieux rémunérer les agriculteurs et de revoir la répartition de la valeur ajoutée au sein de la filière.

Mme la présidente.  - Amendement n°277, présenté par Mme Lamure et MM. César, Kennel, Lefèvre, D. Laurent, Calvet, Sido et Laménie.

Alinéa 5

Après les mots :

article est

insérer le mot :

également

Mme Élisabeth Lamure.  - Amendement de clarification : l'article 10 C doit également s'appliquer aux contrats d'une durée d'exécution supérieure à trois mois et portant sur la conception et la production.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - L'article L. 611-4 du code rural prévoit déjà un coefficient multiplicateur en cas de crise conjoncturelle pour les légumes et les produits frais. Aucun arrêté n'a jamais été promulgué. C'est qu'il n'est pas le meilleur outil. Il garantit moins les revenus de l'agriculteur que la marge du distributeur et n'empêche pas celui-ci de se fournir à l'étranger. En outre, le mécanisme que vous proposez est trop général, trop contraignant et présente un risque d'inconstitutionnalité.

Défavorable à l'amendement n° 1054 et favorable à la précision rédactionnelle apportée par l'amendement n°277 rectifié.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1054 n'est pas adopté.

L'amendement n°277 rectifié est adopté.

L'article 10 C, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

L'amendement n°220 rectifié ter n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°730 rectifié, présenté par M. Camani et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'article 10 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 441-2-2 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par les mots : « ou prévoir la rémunération de services rendus à l'occasion de leur revente, propres à favoriser leur commercialisation et ne relevant pas des obligations d'achat et de vente, ou de services ayant un objet distinct » ;

2° Au deuxième alinéa, après les mots : « à la commande », sont insérés les mots : « ou prévoir la rémunération de services rendus à l'occasion de sa revente, propres à favoriser sa commercialisation et ne relevant pas des obligations d'achat et de vente, ou de services ayant un objet distinct ».

M. Yannick Vaugrenard.  - Cet amendement, auquel mon collègue Camani tient beaucoup, évitera le contournement par certains distributeurs de l'interdiction des remises, rabais et ristournes pour l'achat de fruits et de légumes, posée dans la loi de modernisation de l'agriculture. Il convient donc de revenir sur la possibilité laissée dans la loi de rémunérer des services de coopération commerciale ou des services ayant un objet distinct, sous réserve que ceux-ci soient prévus dans un contrat écrit portant sur la vente de ces produits par le fournisseur. Certains distributeurs ont imposé par ce biais la rémunération de services fictifs ou disproportionnés imposés sans négociation lors de la signature des contrats cadres annuels.

Mais s'ils sont négociés correctement, ces services peuvent être utiles. D'où notre choix de laisser l'interprofession définir les conditions dans lesquelles serait autorisée leur rémunération.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Avis défavorable. La fausse coopération commerciale est déjà sanctionnée, notamment lorsque la facturation est disproportionnée par rapport au service : c'est l'article L. 442-6 du code de commerce. En outre, les interprofessions n'ont pas de pouvoir de sanction. En revanche, rien ne leur interdit d'édicter des guides de bonnes pratiques qui puissent servir de référentiel.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Le législateur, en 2010, a déjà interdit les rabais ou ristournes. La cour d'appel a sanctionné, le 15 janvier 2015, les contournements. Cet amendement s'inscrit dans cette ligne, il est utile. Mieux vaut intervenir en amont que par un contrôle juridictionnel a posteriori.

M. Henri Tandonnet.  - Je ne voterai pas cet amendement. La loi de modernisation agricole a traité cette question. La mesure proposée n'est pas proportionnée. Co-président du groupe Fruits et légumes, j'ai été surpris de ne pas avoir été consulté par les auteurs de cet amendement. Le président de l'interprofession, que j'ai contacté, m'a dit ne pas y être favorable.

L'amendement dn°730 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°382 rectifié bis, présenté par Mme Lamure, MM. Laménie, Pierre et Lefèvre, Mme Primas et MM. G. Bailly, César, Houel et Calvet.

Après l'article 10 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 442-2 du code de commerce est ainsi rédigé :

« Le prix d'achat effectif est le prix unitaire net figurant sur la facture d'achat, majoré des taxes sur le chiffre d'affaire, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport. »

Mme Élisabeth Lamure.  - La loi de modernisation de l'économie de 2008 a autorisé les distributeurs à réintégrer dans le calcul du seuil de revente à perte l'ensemble des avantages consentis aux fournisseurs. Cette dérégulation a marqué le début d'une communication agressive sur les prix, et uniquement eux, aboutissant à une asphyxie généralisée de la filière. Le déséquilibre entre les acteurs et la dépendance économique des fournisseurs, toujours forte, sont très éloignés d'une situation de concurrence idéale.

L'actuelle déflation des produits alimentaires n'est une bonne nouvelle pour personne, pas même pour les consommateurs. Pour sortir par le haut de cette situation, nous proposons de redonner au seuil de revente à perte son vrai rôle d'outil économique.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°839 rectifié bis, présenté par M. Bizet, Mmes Bouchart et Cayeux, MM. Commeinhes et de Nicolaÿ, Mme Gruny, MM. P. Leroy, Longuet et Mayet, Mme Mélot et MM. Milon, Morisset, Reichardt, Trillard, Vaspart et Vogel.

M. Michel Vaspart.  - Défendu.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Votre amendement interdit au commerçant de faire bénéficier ses clients des ristournes que lui auront accordées ses fournisseurs. C'est une hausse très forte du seuil de vente à perte. Retrait des amendements n°382 rectifié bis et 808.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

Mme Élisabeth Lamure.  - Tant que l'on ne reviendra pas sur la définition de la revente à perte, on entretiendra la déflation et la guerre des prix.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, les amendements nos382 rectifié bis et 839 rectifié bis, mis aux voix par assis et levé, ne sont pas adoptés.

L'amendement n°808 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°381 rectifié, présenté par Mme Lamure.

Après l'article 10 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa du I de l'article L. 442-6 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° De pratiquer à l'égard d'un partenaire économique ou d'obtenir de lui des prix, des délais de paiement, des conditions de vente ou des modalités de vente ou d'achats discriminatoires et non justifiés par des contreparties réelles en créant de ce fait, pour ce partenaire, un désavantage ou un avantage dans la concurrence ; ».

Mme Élisabeth Lamure.  - Les concentrations des distributeurs se sont accélérées : 93 % de la puissance d'achat sont désormais entre les mains de quatre centrales dont dépendent des milliers de fournisseurs, multinationales, PME et TPE. Le balancier est bloqué en faveur de la distribution et la dépendance économique est devenue un fait. La concurrence saine, celle qui entretient une compétition au mérite et en faveur des consommateurs, n'existe plus. Reste une guerre des prix entre enseignes, pour gagner des parts de marché. Après plus de sept ans de libre négociation, aucun point positif ne peut être mis au crédit du nouveau régime juridique de la négociation : les relations au sein de la filière se sont fortement dégradées.

Corrigeons une situation avant qu'elle n'entraîne le reste de l'économie dans la déflation. Rendons aux fournisseurs une prérogative qu'ils n'auraient jamais dû perdre : fixer la valeur de leur produit. Par la même occasion, nous rendrons à la négociation son vrai rôle : mettre en concurrence les fournisseurs sur leurs produits et leur prix et les distributeurs sur la qualité de leurs relations avec les consommateurs. En revenant sur la libre négociation au profit de la non-discrimination tarifaire, on atténue la guerre des prix mais demeure la concurrence entre industriels et entre distributeurs.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°840 rectifié, présenté par MM. Bizet et G. Bailly, Mme Bouchart, M. Calvet, Mme Cayeux, MM. César, Commeinhes, de Nicolaÿ, Delattre et Houel, Mme Gruny, MM. Laménie, Lefèvre, P. Leroy et Longuet, Mme Mélot et MM. Milon, Morisset, Perrin, Pierre, Raison, Reichardt, Trillard, Vaspart et Vogel.

M. Marc Laménie.  - Agissons avant que cette guerre des prix n'entraîne notre pays dans la déflation. Pour cela, rendons aux producteurs le soin de fixer les prix.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Le droit existant satisfait ces amendements : le 1°du I de l'article L. 442-6 du code de commerce précise déjà qu'il est interdit d'obtenir une remise en échange d'un service commercial fictif.

Plutôt que revoir le cadre juridique, mieux vaudrait renforcer les moyens de contrôle, en particulier ceux de la DGCCRF. Modifier sans cesse la loi crée une incertitude juridique qui n'est pas saine. Retrait ?

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

Mme Élisabeth Lamure.  - Je le retire, mais je reste sur ma faim. J'ai l'impression que l'on ne compte plus que sur le répressif pour lutter contre des pratiques que tout le monde déplore.

Les amendements nos381 rectifié et 840 rectifié sont retirés.

Mme la présidente.  - Amendement n°190 rectifié ter, présenté par MM. Raison, Bizet, Morisset, de Nicolaÿ, Vasselle et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Kennel, Pointereau, Saugey, G. Bailly, Béchu, Chaize, Milon, Vaspart, B. Fournier, Grosperrin, Pierre, Calvet, Cornu, Trillard et Joyandet, Mme Primas, M. Revet, Mme Bouchart et MM. Laménie, Reichardt, Perrin et Gremillet.

Après l'article 10 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la dernière phrase du 1° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce, le mot : « abusivement » est supprimé.

M. Marc Laménie.  - Les mécanismes prévus par l'article L. 442-6 du code de commerce ne permettent toujours pas de répondre à certains abus commis par les distributeurs.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°439, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Mme Esther Benbassa.  - Défendu

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Le code du commerce sanctionne les avantages disproportionnés obtenus en échange de services. Notre droit distingue ainsi déjà les compensations légitimes de celles qui sont abusives. Ces amendements s'éloignent trop de la logique de l'entreprise. Là encore, mieux vaut renforcer les moyens de la DGCCRF qui contrôle les négociations sur la base d'un cadre juridique qui est parmi les plus élaborés d'Europe. Retrait, sinon défavorable.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°190 rectifié ter est retiré.

L'amendement n°439 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°191 rectifié ter, présenté par MM. Raison, Bizet, Morisset, de Nicolaÿ, Vasselle et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Kennel, Delattre, Pointereau, G. Bailly, Béchu, Chaize, Milon, Vaspart, B. Fournier, Grosperrin, Pierre, Calvet, Cornu, Trillard et Joyandet, Mme Primas, M. Revet, Mme Bouchart et MM. Laménie, Reichardt, Perrin et Gremillet.

Après l'article 10 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Un tel avantage peut également résulter d'une disproportion entre le tarif du fournisseur, qui constitue le socle unique de la négociation, et le prix convenu, ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. »

Mme Sophie Primas.  - Il faut nous donner les moyens de lutter contre les déséquilibres économiques qui peuvent résulter de dérogations tarifaires non justifiées par des contreparties.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°440 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Mme Esther Benbassa.  - Défendu.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Ces amendements sont en partie satisfaits par l'article L. 442-6 du code du commerce qui sanctionne le fait d'obtenir un avantage ne correspondant à aucun service commercial. Retrait ? Sinon défavorable.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°191 rectifié ter est retiré.

L'amendement n°440 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°598 rectifié bis, présenté par M. Revet, Mmes Gruny et Hummel et MM. Magras, de Nicolaÿ, Houel et Chaize.

Après l'article 10 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 12° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce est abrogé.

M. Michel Magras.  - Dans certains secteurs, les industriels subissent les fluctuations des prix des matières premières ou des taux de change. Or les prix sont fixés une fois par an, en application de l'article L 442-6 du code du commerce. La DGCCRF remet en cause les contrats sur cette base. Supprimons-la.

Mme la présidente.  - Amendement n°383 rectifié, présenté par Mme Lamure.

Après l'article 10 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 442-6 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Après le 12°, il est inséré un 13° ainsi rédigé :

« 13° De refuser, pour tenir compte de toute variation significative, au sens d'une variation supérieure ou égale à 15 %, de la parité monétaire ou du cours des matières premières, de renégocier de bonne foi le prix convenu résultant de l'application du barème des prix unitaires mentionné dans les conditions générales de vente, lorsque celles-ci ont été acceptées sans négociation par l'acheteur, ou du prix convenu à l'issue de la négociation commerciale faisant l'objet de la convention prévue à l'article L. 441-7, modifiée le cas échéant par avenant, ou de la renégociation prévue à l'article L. 441-8. » ;

2° En conséquence, le 12° est complété par les mots : « et au 13° du présent article ».

Mme Élisabeth Lamure.  - Les prix de certaines matières premières connaissent une forte volatilité. Dans les secteurs de l'électroménager, de l'automobile ou encore du bricolage, les fabricants sont ainsi lourdement exposés aux variations importantes des cours de l'aluminium, de l'acier ou du cuivre. En outre, ces entreprises subissent de plein fouet la variation de la parité euro/dollar.

Comme les prix des produits industriels sont fixés une fois par an, les industriels ne peuvent répercuter ces différentes fluctuations dans le prix de vente. À cela s'ajoute le difficile accès des PME aux outils financiers pour sécuriser le prix des matières premières ou celui de la parité euro/dollar. 

L'amendement n°551 rectifié n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°597 rectifié ter, présenté par M. Revet, Mme Hummel et MM. Magras, de Nicolaÿ, Houel et Chaize.

M. Michel Magras.  - Défendu.

L'amendement n° 652 rectifié est retiré

Mme la présidente.  - Amendement n°599 rectifié bis, présenté par M. Revet, Mmes Gruny et Hummel et MM. Magras, de Nicolaÿ, Houel et Chaize.

Après l'article 10 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de commerce est ainsi modifé :

1° Après l'article L. 441-7 du code de commerce, il est inséré un article L. 441-7-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 441-7-1.  - La convention écrite prévue à l'article L. 441-7 comporte une clause de renégociation du prix convenu permettant de prendre en compte la variation significative de la parité monétaire ou du cours des matières premières.

« Cette clause, définie par les parties, précise les conditions de déclenchement de la renégociation ainsi qu'un délai de renégociation qui ne peut être supérieur à deux mois.

« La renégociation du prix convenu est conduite de bonne foi dans le respect du secret en matière industrielle et commerciale et du secret des affaires.

« Le fait de ne pas prévoir une clause conforme aux deux premiers alinéas du présent article est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. L'amende est prononcée dans les conditions prévues à l'article L. 465-2. Le maximum de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. » ;

2° Le 12° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par les mots : « et à l'article L. 441-7-1 ».

M. Michel Magras.  - Défendu.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Supprimer la sanction des pratiques obscures, c'est affaiblir le secteur. Défavorable à l'amendement n°598 rectifié bis, ainsi qu'aux amendements identiques nos383, 551, 597 et 652 : le plafond de 15 % est excessif. Il existe des instruments de couverture contre les risques de change.

Enfin, défavorable à l'amendement n°599 rectifié bis pour les mêmes raisons. Tous les produits ne sont pas affectés de la même manière par les variations de change. De plus, il est possible d'insérer des clauses de réajustement du prix à cause du change.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis défavorable.

L'amendement n°598 rectifié bis est retiré.

Mme Élisabeth Lamure.  - J'entends vos arguments, même s'ils n'ont pas pour effet de simplifier la vie des entreprises.

L'amendement n°383 rectifié est retiré, de même que les amendements nos597 rectifié ter et 599 rectifié bis.

ARTICLE 10 D (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°361 rectifié, présenté par MM. Vaspart, Commeinhes et Calvet, Mmes Lamure et Deromedi, MM. de Nicolaÿ et Charon, Mmes Deseyne et Duchêne et MM. Laménie, César et Vasselle.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le mot : « à », la fin de la troisième phrase du deuxième alinéa du III de l'article L. 442-6 du code de commerce est ainsi rédigée : « 1 % du chiffre d'affaires réalisé en France par l'auteur des pratiques incriminées. »

M. Michel Vaspart.  - Contre les pratiques commerciales abusives, le ministre chargé de l'économie et le ministère public peuvent demander une amende civile dont le montant ne peut être supérieur à 2 millions d'euros.

Les députés avaient porté l'amende à 5 % du chiffre d'affaires. La commission spéciale a, sur la proposition de son rapporteur, supprimé cette disposition, considérant à juste titre que cette sanction était trop lourde. Cependant, une sanction est nécessaire. Ramenons-là à 1 % du chiffre d'affaires, ce taux restant normalement inférieur au résultat annuel de l'entreprise.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°1663 rectifié à l'amendement n°361 rectifié de M. Vaspart, présenté par M. Raison et Mme Deromedi.

Amendement n° 361, alinéa 2

Remplacer le taux :

1 %

par le taux :

5 %

Mme Jacky Deromedi.  - Nous portons la sanction à 5 % du chiffre d'affaires.

Mme la présidente.  - Amendement n°437, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le mot : « à », la fin de la troisième phrase du deuxième alinéa du III de l'article L. 442-6 du code de commerce est ainsi rédigée : « 5 % du chiffre d'affaires réalisé en France par l'auteur des pratiques incriminées. » 

M. Jean Desessard.  - Les distributeurs exercent de fortes pressions sur les industriels. Il y a des pratiques abusives. 2 millions d'euros, c'est déjà relativement peu. Or, dans les faits, aucune sanction prononcée n'a jamais dépassée 300 000 euros. Au vu des sommes en jeu -plusieurs dizaines de millions d'euros-, il faut une sanction plus dissuasive. C'est un peu comme le stationnement à Paris autrefois : il était plus économique de ne pas mettre 1,50 euro par heure dans le parcmètre et de régler de temps en temps une amende de 11 euros !

Mme Sophie Primas.  - Supprimons les voitures...

M. Jean Desessard.  - La sanction, pour être efficace, doit être dissuasive et proportionnée.

Mme la présidente.  - Amendement n°1549 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La quatrième phrase du deuxième alinéa du III de l'article L. 442-6 du code de commerce est complétée par les mots : « ou, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 5 % du chiffre d'affaires hors taxe réalisé en France par l'auteur des pratiques lors du dernier exercice clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques mentionnées au présent article ont été mises en oeuvre ».

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Nous rétablissons l'article en précisant sa rédaction, conformément à l'engagement pris à l'Assemblée nationale : nous aurons une amende avec un plafond suffisamment élevé pour être dissuasif et une sanction proportionnée au manquement. Retrait ou Avis défavorable aux autres amendements.

Mme la présidente.  - Amendement n°1055, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À la première phrase du troisième alinéa de l'article L. 410-2 du code du commerce, après les mots : « des mesures temporaires motivées par », sont insérés les mots : « les analyses réalisées par l'observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires défini à l'article L. 692-1 du code rural et de la pêche maritime par ».

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Cet amendement propose que, par dérogation au principe de liberté des prix, l'article L. 410-2 du code de commerce autorise le Gouvernement à prendre par décret des mesures temporaires contre des hausses ou des baisses excessives de prix dans les situations précises, et sur la base des travaux de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires qui évalue les marges brutes.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteur.  - L'article L. 442-6 du code du commerce prévoit pour principale sanction aux pratiques restrictives de concurrence une amende civile de 2 millions d'euros. Les députés ont fixé l'amende à 5 % du chiffre d'affaires, l'amendement n°361 rectifié propose 1 %. On pourrait discuter à l'infini... Pour la commission spéciale, l'amende de 2 millions d'euros est suffisamment dissuasive (M. Jean Desessard le conteste), d'autant qu'elle s'accompagne d'une répétition de l'indu, d'une réparation du préjudice et d'une possibilité de triplement.

Avis défavorable à l'amendement n°361 rectifié, ainsi qu'au sous-amendement n°1663 et à l'amendement n°437 : une sanction de 5 % nous parait excessive. L'amendement n°1549 rectifié du Gouvernement rétablit le dispositif dans une version atténuée : la sanction doit être proportionnée aux avantages tirés du manquement ; cependant, il rend plus complexe la compréhension du droit en vigueur, qui résulte déjà de strates successives.

Est-il législativement souhaitable d'ajouter un étage supérieur à l'amende de 2 millions, à la répétition de l'indu, à la réparation du préjudice, à la cessation des pratiques abusives et à la compensation de l'abus ? En outre, que signifie une sanction « proportionnée » ? Enfin, par dérogation à la liberté des prix, l'article L. 410-2 du code du commerce autorise le Gouvernement à fixer les prix en cas de crise. L'élargissement que vous proposez du contrôle administratif des prix soulèverait de sérieuses difficultés au regard du droit communautaire.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Retrait, sinon avis défavorable aux amendements nos361 rectifié, 437 et au sous-amendement n°1663. Le dispositif répressif est très peu appliqué à l'heure actuelle. Le plafond de 5 % représente la moitié de celui prévu en cas d'abus de position dominante.

Les analyses de l'Observatoire des prix et des marges constituent un élément parmi d'autres que le Gouvernement peut mobiliser en cas de crise pour mettre en place un contrôle des prix. N'alourdissons pas le code.

Mme Sophie Primas.  - Mme la rapporteure a montré très clairement que les sanctions existantes forment déjà une armada répressive. Le problème vient plutôt de leur application car on peine à apporter les preuves des pratiques abusives, ceux qui les subissent ne les dénonçant pas toujours... Je ne voterai aucun de ces amendements.

Le sous-amendement n°1663 est retiré.

M. Michel Vaspart.  - Les sanctions sont insuffisantes...

M. Jean Desessard.  - Mais oui !

M. Michel Vaspart.  - J'ai été vingt ans chef d'entreprise : une sanction de 5 % du chiffre d'affaires risque de mettre en péril l'entreprise, et l'emploi qui va avec. Ma proposition de 1 % du chiffre d'affaires, plus raisonnable, ne présente pas cet inconvénient : cela correspond en général à un montant moindre que le résultat de l'entreprise.

M. Marc Daunis.  - Madame la rapporteure, si vous considérez que la discussion sur le pourcentage du chiffre d'affaires n'a pas lieu d'être, pourquoi ne pas discuter le montant de l'amende ? Pourquoi 2 millions et pas 1 million ou 3 millions ? 2 millions, ce n'est pas dissuasif ! (M. Jean Desessard renchérit)

Les pratiques abusives sont terribles. Une sanction de 5 % du chiffre d'affaires est supportable pour les grands groupes. Le Sénat doit envoyer un signal.

M. Jean Desessard.  - Je ne suis pas le seul à vouloir défendre les entreprises au Sénat tout de même ! Comment se fait-il que l'accord du 28 février soit déjà remis en question, dès le mois de mars ? Les industriels ont peur : vous l'avez dit. Il faut que la peur change de camp ! Une sanction vraiment dissuasive les incitera à se lancer dans un procès. L'amendement n°1544 rectifié du Gouvernement est équilibré ; je m'y rallie.

L'amendement n°437 est retiré.

M. Dominique de Legge.  - L'argumentation de Mme la rapporteure est justifiée. Cependant, je ne comprendrais pas que le Sénat ne profite pas de ce texte pour envoyer un signal. Une sanction équivalant à 5 % du chiffre d'affaires est excessive. (Mme Dominique Estrosi Sassone, co rapporteure, le confirme) On peut toujours se faire plaisir, évidemment, mais nous recherchons aussi une solution équilibrée. Je voterai l'amendement n°361 rectifié.

Mme Nicole Bricq.  - La position de la majorité de la commission spéciale, comme souvent, est l'immobilisme.

M. Dominique de Legge.  - Vous parlez en experte !

Mme Nicole Bricq.  - Votons l'amendement équilibré du Gouvernement, chacun sur ces bancs veut agir. Souvenez-vous de la fameuse affaire des yaourts : l'amende, jugée lourde, était tout à fait proportionnée aux abus commis durant des années !

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - La commission spéciale a travaillé dans un esprit de co-construction. Nous avons voulu faire bouger les lignes ; c'est tout sauf de l'immobilisme. (M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale, approuve) Ayant entendu les interventions, je me rallie à l'amendement de mon collègue Vaspart.

L'amendement n°361 rectifié est adopté.

Le sous-amendement n°1663 devient sans objet, de même que les amendements nos1549 rectifié et 1055.

L'article 10 D est rétabli et ainsi rédigé.

ARTICLE 10 (Supprimé)

Mme la présidente.  - Amendement n°1056, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le 2° du I de l'article L. 121-1 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...) Le recours à des arguments nutritionnels portant sur des caractéristiques accessoires du produit et visant à attribuer à celui-ci des avantages et propriétés qu'il ne possède pas, ou à masquer son impact sanitaire réel, ou les arguments visant à attribuer des caractéristiques nutritionnelles sans rapport avec l'incidence sanitaire réelle selon le mode de consommation généralement pratiqué ; ».

Mme Évelyne Didier.  - Cet amendement interdit les publicités commerciales qui présentent certaines caractéristiques des produits alimentaires de façon à leur attribuer des avantages et propriétés nutritionnelles sans rapport avec l'incidence sanitaire réelle. Cela contribuera à améliorer la santé publique, une politique qui a beaucoup progressé avec les bandeaux « manger, bouger », « manger cinq fruits et légumes par jour ». Cependant, elle est freinée par les industriels qui reprennent le vocabulaire de la santé pour prétendre que tel ou tel produit embellit la peau, renforce les os, facilite la digestion, le sommeil, ou que sais-je encore...

Mme la présidente.  - Amendement n°1550, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La section 1 du chapitre II du titre V du livre VII du code de commerce est complétée par un article L. 752-5-... ainsi rédigé :

« Art. L. 752-5-...  - L'Autorité de la concurrence peut être consultée, en matière d'urbanisme commercial, par le ministre chargé de l'économie ou par le représentant de l'État dans le département, sur les projets de schéma de cohérence territoriale, de plan local d'urbanisme ou de plan local d'urbanisme intercommunal ou sur les projets de modification ou de révision de ceux-ci, et par le ministre chargé de l'économie ou le représentant de l'État dans la région sur le projet de schéma directeur de la région d'Île-de-France ou sur les projets de modification ou de révision de celui-ci. L'avis doit être rendu avant l'ouverture de l'enquête publique.

« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. »

M. Emmanuel Macron, ministre.  - L'article 10 donne au ministre chargé de l'économie ou au préfet la possibilité de consulter l'Autorité de la concurrence sur tout projet ou toute modification de schéma de cohérence territoriale, plan local d'urbanisme ou plan local d'urbanisme intercommunal, ou sur le schéma de développement régional d'Ile-de-France. Il convient de la maintenir.

Soyons clairs : il ne s'agit pas de renforcer l'Autorité de la concurrence mais de permettre aux représentants de l'État de bénéficier d'un éclairage de celle-ci dans le cadre du contrôle de légalité. Cette possibilité n'est ouverte que de manière contournée actuellement.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Avis défavorable à l'amendement n°1056 : le Règlement européen suffit pour prohiber cette pratique.

Encore une fois, la commission spéciale déplore que le Gouvernement refuse tout débat avec la Haute assemblée. (M. Emmanuel Macron, ministre, s'exclame) Nous avons supprimé cet article contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales. (« Très bien ! » sur les bancs UMP)

Au plan technique, il ne précise ni la saisine ni ce qu'est l'urbanisme commercial. Un retour strict au texte de l'Assemblée nationale traduit une méfiance vis-à-vis des collectivités territoriales.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Retrait, sinon défavorable à l'amendement n°1056 : le droit national et communautaire vous donne satisfaction. Le contrôle de légalité n'est pas, que je sache, contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales.

Mme Évelyne Didier.  - Une règle communautaire existe, a-t-elle été transposée en droit interne ? Et comment ? Je suis comme Saint Thomas...

M. Emmanuel Macron, ministre.  - L'article L. 121-1-2° b du code de la consommation transpose la directive 2005-29 CE du 11 mai 2005. En outre, il existe le règlement 1924-2006 du 20 décembre 2006, d'application immédiate. Cela devrait contenter même Saint Thomas ! (Sourires)

L'amendement n°1056 est retiré.

M. Dominique de Legge.  - Que recherche cet amendement ? Nous sommes en droit positif, or il ne fait qu'ouvrir une faculté. Cela est dénué de portée normative et exprime une volonté de pur affichage.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Le ministre peut déjà saisir l'Autorité de la concurrence mais pas le préfet. Nous ne voulons pas rendre la saisine automatique, d'où le verbe « pouvoir ».

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - Une faculté, donc... Pour le contrôle de légalité aussi ? (Rires)

M. Yannick Vaugrenard.  - Il n'y a pas lieu d'opposer contrôle de légalité et libre administration des collectivités territoriales. De plus, il s'agit d'une simple possibilité. Pourquoi faire tout ce foin ?

L'amendement n°1550 n'est pas adopté.

L'article 10 demeure supprimé.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°441, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 10 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le mot : « animée, », la fin du premier alinéa de l'article L. 111-6-1 du code de l'urbanisme est ainsi rédigée : « est intégrée aux bâtiments affectés au commerce. »

M. Jean Desessard.  - 70 000 hectares de terres agricoles disparaissent chaque année : c'est l'équivalent d'un département tous les huit ans ! Cela tient à la bétonisation des périphéries urbaines, et notamment à la construction de grandes surfaces dotées de vastes parkings.

Mme la présidente.  - Amendement n°441, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 10 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le mot : « animée, », la fin du premier alinéa de l'article L. 111-6-1 du code de l'urbanisme est ainsi rédigée : « est intégrée aux bâtiments affectés au commerce. »

M. Jean Desessard.  - L'imperméabilisation des sols aggrave les phénomènes d'inondations. Les conséquences humaines et économiques sont de plus en plus lourdes : diminution de la biodiversité, détérioration de notre cadre de vie, de nos paysages et de notre attractivité touristique, régression de notre agriculture de proximité, de la qualité et de la diversité de notre alimentation et de notre identité gastronomique et culturelle.

Nous proposons une solution : intégrer les parkings au bâti commercial. Autrement dit, en sous-sol ou sur les toits des grandes surfaces. (On s'amuse sur les bancs de la commission) Cela ne devrait pas coûter trop cher, au regard des dégâts environnementaux !

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - La loi Alur comporte déjà des mesures sur les parkings pour lutter contre l'artificialisation des sols. Avis défavorable.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°441 n'est pas adopté.

ARTICLE 10 TER

Mme la présidente.  - Amendement n°1551, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Une modification du projet qui revêt un caractère substantiel au sens de l'article L. 752-15 du code de commerce, mais n'a pas d'effet sur la conformité des travaux projetés par rapport aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6 du présent code, nécessite une nouvelle demande d'autorisation d'exploitation commerciale auprès de la commission départementale. » ;

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Amendement rédactionnel qui articule clairement la procédure du permis de construire et de l'autorisation d'exploitation commerciale. La loi Alur laissait subsister un doute.

Mme Élisabeth Lamure.  - Ce n'est pas le seul ! (On renchérit à droite)

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Cette clarification est acceptable. Avis favorable.

L'amendement n°1551 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1743, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article 39 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises est complété par un III ainsi rédigé :

« III.  -  Lorsqu'un projet bénéficie d'une autorisation d'exploitation commerciale en cours de validité obtenue avant le 15 février 2015 pour tout projet nécessitant un permis de construire, cette autorisation vaut avis favorable des commissions d'aménagement commercial. » 

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Cet amendement sécurise les autorisations d'exploitation commerciale entre la loi du 18 juin 2014 et le décret du 15 février 2015 par lequel elle entre en vigueur.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Cet amendement a été déposé à 13 heures. La commission spéciale n'a pu se prononcer.

M. Roger Karoutchi.  - On peut le voter, l'objectif est de reprendre la loi Alur !

Mme Catherine Procaccia.  - Elle a été tellement mal faite...

Mme Nicole Bricq.  - Mme la rapporteure peut très bien réunir la commission spéciale pour examiner l'amendement. On reproche trop souvent au Gouvernement de tarder à prendre des décrets. Nous pouvons lui offrir cette commodité, ce n'est pas une question de droite ou de gauche.

M. Jean Desessard.  - Comme toujours !

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - Peut-être le ministre peut-il donner des explications supplémentaires à la rapporteure : combien de dossiers sont concernés ? Je propose de réserver cet amendement n°1743 après l'article 106.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Soit. Les mesures transitoires initialement présentées par le Gouvernement n'ont pas été validées par le Conseil d'État, une dizaine de cas sont remontés aux cabinets de Mmes Delga et Pinel ; je vous ferai parvenir toutes informations utiles.

La réserve de l'article 10 ter est ordonnée.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°395, présenté par M. Madec et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'article 10 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 752-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Après le 1°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° la création, sur un site protégé au titre de l'article L. 341-1 ou L. 341-2 du code de l'environnement ou protégé au titre de l'article L. 621-31 du code du patrimoine, d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 400 mètres carrés, résultant soit d'une construction nouvelle, soit de la transformation d'un immeuble existant ; »

2° À la première phrase du 3°, à la seconde phrase du 4°, aux 5°, 6° et 7°, après les mots : « 1000 mètres carrés », sont insérés les mots : « ou 400 mètres carrés lorsque le projet est situé sur un site protégé au titre de l'article L. 341-1 ou L. 341-2 du code de l'environnement ou protégé au titre de l'article L. 621-31 du code du patrimoine ».

M. David Assouline.  - Aux termes de l'article L. 752-6 du code du commerce, les CDAC examinent les projets commerciaux au regard d'un certain nombre de critères, notamment « la localisation du projet et son intégration urbaine ; (...) l'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ;(...) les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche ».

Cependant, en limitant le champ d'application des autorisations d'exploitation commerciale aux magasins d'une surface de vente de plus de 1 000 mètres carrés, l'article L. 752-1 exclut du contrôle des projets qui ont des conséquences environnementales, patrimoniales et urbanistiques importantes.

Cet amendement soumet à l'examen de la CDAC les projets de plus de 400 mètres carrés, situés dans les centres urbains historiques notamment, et plus largement sur l'ensemble des sites inscrits et classés. La CDAC bénéficiera de l'avis de l'architecte des bâtiments de France. 400 mètres carrés, c'est le seuil retenu par l'Insee pour définir un supermarché. À Paris, cela ne concerne que 2 % des commerces. Dans une petite rue piétonne, pavée, pleine de charme, un supermarché, même petit, dénature le cadre. Préservons notre attractivité touristique.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Il revient à la commission des sites et à l'architecte des bâtiments de France de veiller au respect de ces spécificités. Avis défavorable.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Un amendement comparable a été déposé à l'Assemblée nationale. Nous l'avons longuement étudié. Outre qu'elle n'est pas sans risque communautaire, une telle proposition ferait doublon ; à multiplier les seuils et dispositions dérogatoires, nous risquons de décourager nombre de projets en centre-ville. Retrait, sinon défavorable.

M. David Assouline.  - Je le maintiens. À Paris, les commerces de plus de 400 mètres carrés représentent 2 % du total seulement. Le seuil de 1 000 mètres carrés n'est pas adapté. Laissons la CDAC apprécier. Je suis très attaché à l'activité commerciale, mais aussi à la préservation de la beauté de nos sites historiques. Rien n'empêche que les enseignes s'installent à proximité. Il faut lutter contre la tendance naturelle à la dégradation.

M. Jean Desessard.  - Mon camarade socialiste parisien a très bien défendu cet amendement, je m'associe à son argumentaire. (Sourires)

Mme Évelyne Didier.  - Il ne faut pas tout voir sous l'angle du commerce, de la concurrence. Un magasin de 600 mètres carrés n'est pas hors-sol ! La CDAC, nous savons comment elle fonctionne entre élus et associations de consommateurs... Tout ce qui concourt à l'harmonie esthétique est bienvenu. Nous voterons cet amendement.

L'amendement n°395 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°379 rectifié nonies, présenté par Mme N. Goulet et les membres du groupe UDI-UC.

Après l'article 10 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les magasins de commerce de détail, d'une surface supérieure à 1000 mètres carrés, soumis à l'autorisation d'exploitation prévue à l'article L. 752-1 du code de commerce peuvent mettre en place une convention d'organisation de la collecte sécurisée des denrées alimentaires invendues encore consommables au profit d'une ou plusieurs associations d'aide alimentaire. Un décret fixe les modalités d'application du présent article.

Mme Nathalie Goulet.  - Ce matin, nous avons voté un droit universel au permis de conduire. Je vous propose ici une démarche citoyenne similaire visant à lutter contre le gaspillage alimentaire.

En 2012, 1 400 magasins ont participé à la campagne de dons et 32 000 tonnes de denrées alimentaires ont été récoltées, soit l'équivalent de 64 millions de repas. Alors que beaucoup de gens peinent à se nourrir, faute de moyens, les supermarchés jettent tous les soirs des aliments comestibles dans les poubelles - et parfois, procédé insupportable, y versent de l'eau de javel pour qu'on ne puisse les récupérer... Une pétition a collecté plus de 180 000 signatures.

Le groupe écologiste s'est rallié à cette proposition, comme de nombreux collègues de l'UMP. Il s'agit de permettre des conventions entre les supermarchés et les associations d'aide alimentaire. Cette démarche citoyenne doit être encouragée.

Mme Nicole Bricq.  - Très bien !

Mme la présidente.  - Amendement n°579 rectifié bis, présenté par MM. Fouché, Magras, Mayet, Duvernois et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. D. Laurent, Charon, G. Bailly, Morisset et Bizet, Mme Imbert, M. Mouiller, Mme Primas, MM. Karoutchi, Milon, Bouvard, de Raincourt et Calvet, Mme Mélot, MM. B. Fournier, Chasseing et Paul, Mme Troendlé, MM. D. Robert et Saugey, Mme di Folco, M. Houel, Mmes Gruny, Deromedi et Duchêne, MM. Doligé, Revet et Trillard, Mme Lopez, MM. Laufoaulu, Falco et Kennel, Mme Bouchart et MM. Grand, Houpert, Chaize et Commeinhes.

Après l'article 10 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 752-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 752-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 752-1-...  -  Les magasins de commerce de détail d'une surface supérieure à 400 mètres carrés soumis à l'autorisation d'exploitation prévue à l'article L. 752-1 peuvent mettre en place une convention d'organisation de la collecte sécurisée des denrées alimentaires invendues encore consommables au profit d'une ou plusieurs associations d'aide alimentaire. Un décret fixe les modalités d'application du présent article, sans remettre en cause les dispositifs de défiscalisation du don. »

M. Michel Magras.  - Je le retire au profit de l'amendement n°379 nonies de Mme Goulet.

L'amendement n°579 rectifié bis est retiré.

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Cet amendement a été rectifié pour viser les grandes surfaces de 1 000 mètres carrés, ce qui est plus raisonnable que 400. Il est pragmatique et répond à une grande cause à laquelle nul ne peut rester insensible. La commission spéciale ne s'étant pas prononcée, à titre personnel, sagesse.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Le Gouvernement partage évidemment vos préoccupations. La contribution du projet en matière sociale est un des critères d'autorisation commerciale. Nombre de grandes et moyennes surfaces travaillent avec les associations, sur la base du volontariat. Faut-il prévoir une obligation de collecte ? Qui a la charge de trier ? Les questions sont complexes.

Outre que la problématique du don et de ses implications fiscales ne relève pas du code de commerce, un rapport a été demandé au député Garrot ; il sera remis le 15 avril et sera rapidement traduit dans une proposition de loi qui traitera de la question de manière globale et structurée. Ce cadre sera plus approprié.

M. Roger Karoutchi.  - Il est dommage que le groupe UMP ait retiré son amendement. Mais nous voterons son jumeau.

Encore un délai ! Cet amendement avait été défendu à l'Assemblée nationale par Frédéric Lefebvre, qui avait déjà oeuvré en ce sens lorsqu'il était au Gouvernement, avec de bons résultats, les Restos du coeur avaient vécu plusieurs mois de cette collecte. À l'Assemblée nationale, vous l'avez renvoyé à la navette - mais nous n'avons qu'une lecture...

Un rapport dans quelques jours, une proposition de loi -même pas un projet de loi, cela veut tout dire- dont on ne sait pas quand elle viendra, pas avant un an, au mieux ! Encore un hiver sans mesure concrète... C'est presque comme si vous nous disiez que vous allez mettre en place une commission ! (Sourires)

Monsieur le ministre, dans tous les magazines, on lit que vous êtes un homme de coeur. (Sourires) Donnons un signal, vous ne pouvez pas demander le retrait d'un tel amendement transcourant. Faites un geste, dites : sagesse !

M. André Trillard.  - N'oublions pas l'aspect de l'hygiène alimentaire. Deux critères doivent être respectés : la non-rupture de la chaîne du froid et la marche en avant. La poubelle ne fait pas partie du circuit propre. Je souhaiterais que l'amendement soit rectifié pour ajouter « dans le respect de l'hygiène alimentaire ».

En 1950, les intoxications alimentaires en France tuaient 16 000 personnes par an. Aujourd'hui, ce chiffre est tombé à 200. Ne risquons pas de le faire remonter. 

M. Christophe-André Frassa.  - Si je ne figure pas dans la liste des signataires, c'est une erreur factuelle. Je souscris pleinement aux deux amendements.

M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale.  - Un homme de coeur ! (Sourires)

M. Christophe-André Frassa.  - L'essentiel, c'est la défense des personnes, de plus en plus nombreuses, qui ne peuvent pas se nourrir. Saluons les deux personnes qui ont le plus fait pour lutter contre le gaspillage alimentaire : Arash Derambarsh et Frédéric Lefebvre. Vous ne pouvez nous renvoyer à une proposition de loi. Lutter contre le gaspillage alimentaire participe à l'égalité des chances, nous le devons aux personnes qui n'ont pas la chance de pouvoir se nourrir décemment.

M. Yannick Vaugrenard.  - Je me félicite que le président de la commission spéciale n'a pas jugé nécessaire de réunir la commission sur un tel amendement... J'ai signé un rapport sur la pauvreté et rencontré nombre de responsables d'associations caritatives ; le constat est sans appel.

Que M. Trillard se rassure : toutes les précautions sont prises en matière d'hygiène ; mais si cela va mieux en le disant...

Le gaspillage alimentaire questionne notre modèle de société, alors que les mécanismes de solidarité fondent notre pacte républicain. Trop d'aliments sont jetés, voire détruits, plutôt que d'être donnés à des personnes qui sont dans le besoin.

Le rapport de M. Garrot sera rendu très prochainement et donnera lieu à une proposition de loi. Nous voterons néanmoins l'amendement de Mme Goulet pour envoyer un signal fort.

Mme Évelyne Didier.  - Nous soutenons cet amendement. Sur un tel sujet, faisons preuve de mesure et de modestie, il ne s'agit pas de faire un coup.

Il y a deux sujets : l'aide à la grande pauvreté et la limitation des déchets. Heureusement, la société civile ne nous a pas attendus !

M. Roger Karoutchi.  - C'est vrai.

Mme Évelyne Didier.  - Il y a belle lurette que des contrats sont signés localement entre des associations et des commerces. Mais s'il faut sécuriser les choses, soit. Le sujet est complexe, on ne peut pas faire n'importe quoi. Les associations ont des problèmes de logistique, elles manquent souvent de place pour stocker les aliments frais.

Le problème de la grande pauvreté n'appelle pas qu'une réponse charitable : c'est à l'ensemble de la société de s'en saisir. Les conventions devront tenir compte des lieux, de la taille des associations... De la mesure, donc, et point de triomphalisme. Nous voterons l'amendement, le reste viendra après.

M. Olivier Cadic.  - Monsieur le ministre, vous nous faites une réponse de Normand. Montrons que le Sénat sait faire preuve d'humanité. Selon une étude de l'Union européenne, le gaspillage alimentaire proviendrait à 42 % des ménages, à 44 % de l'industrie agro-alimentaire. Les grandes surfaces contribuent déjà aux dons à hauteur de 30 %, il y a une marge de progression, notamment pour les supermarchés de centre-ville. J'espère que cet amendement sera voté à l'unanimité.

Mme Sophie Primas.  - L'unanimité se dessine, je m'en réjouis. Ne sous-estimons pas toutefois les difficultés logistiques. Il était bienvenu de porter le seuil à 1 000 mètres carrés ; dans les petites supérettes, la place manque vite pour stocker... Ne sous-estimons pas non plus le risque juridique pour le gérant du magasin, en cas d'intoxication. Je m'étais heurtée à ce problème de responsabilité juridique quand j'avais tenté, dans une vie passée, d'organiser une telle collecte.

M. Marc Laménie.  - C'est une grande cause, qui nous interpelle. Individuellement, collectivement, il faut une prise de conscience. Les associations caritatives font déjà beaucoup, saluons-les. Ce sujet nous invite à la solidarité, mais aussi à l'humilité.

Le gaspillage est un vrai problème de société, de notre société de consommation. Cet amendement va dans le bon sens, je m'y associe.

M. Jean Desessard.  - Tout a été dit ; tout commentaire, à ce stade, sera un surplus... (Sourires)

M. Roger Karoutchi.  - Tant qu'on n'y met pas de la javel !

M. Jean Desessard.  - Je me limiterai à soutenir cet amendement.

M. Pierre Médevielle.  - Je m'associe moi aussi à cette démarche. Il faudra creuser d'autres pistes que celle de la grande distribution : je pense aux éleveurs de canards qui détruisent les carcasses parce que cela coûte moins cher ; aux traiteurs qui détruisent tous les soirs des plats cuisinés ; et aux services des douanes, qui détruisent quantités d'aliments parfaitement consommables.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - N'oublions pas le rôle des collectivités territoriales, qui font beaucoup malgré les contraintes qui pèsent sur elles. La précarité, la grande pauvreté explosent : la réponse ne peut être toujours dans l'assistanat. Il faut s'en prendre aux responsables, à la politique d'austérité qui prive les gens de leur emploi, puis de leur logement et les plonge, pour finir, dans la pauvreté... Est-ce là l'humanité que nous voulons construire ?

Mme Nathalie Goulet.  - Merci pour cette belle unanimité. Je salue M. Fouché, co-signataire, qui avait déposé une question orale à ce sujet.

Cet amendement, co-signé par M. Labbé et Mme Benbassa, n'est pas un amendement compassionnel mais un amendement de responsabilité, de dignité. La collecte sera « sécurisée », monsieur Trillard. Cet amendement vient du terrain, donnons une impulsion ici, aujourd'hui, sans attendre un énième rapport.

Mme Evelyne Yonnet.  - À Aubervilliers, deuxième ville la plus pauvre de France, nous avons mis en place une épicerie solidaire. Les Restos du coeur marchent malheureusement très fort, chaîne chaude et chaîne froide, Restos du coeur bébé, collecte alimentaire tous les mois avec le CCAS. Le problème est très profond, il faut aller plus loin, travailler avec les collectivités territoriales qui ont bien du mal à le gérer. Je voterai cet amendement de bon coeur.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Je suis, sinon un homme de coeur, un homme de parole. Je m'étais engagé à l'Assemblée nationale à ce qu'il y ait une réponse dans les deux mois. Le rapport de Guillaume Garot sera remis le 15 avril : je suis dans les temps. Quel que soit le vote, je souhaite que ce dossier progresse et je salue M. Lefebvre et tous ceux qui l'ont porté.

L'amendement n°379 rectifié nonies est adopté ; l'article additionnel est inséré.

Mme la présidente.  - C'est l'unanimité. (Applaudissements)

ARTICLE 10 QUATER

Mme la présidente.  - Amendement n°1691, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission.

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  - L'article L. 420-2 du code de commerce est ainsi modifié :

1° A la première phrase du deuxième alinéa, après les mots : « la structure de la concurrence, », sont insérés les mots : « à court ou à moyen terme, » ;

2° Il est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Une situation de dépendance économique est caractérisée, au sens de l'alinéa précédent, dès lors que :

«  - d'une part, la rupture des relations commerciales entre le fournisseur et le distributeur risquerait de compromettre le maintien de son activité ;

«  - d'autre part, le fournisseur ne dispose pas d'une solution de remplacement auxdites relations commerciales, susceptible d'être mise en oeuvre dans un délai raisonnable. »

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Les centrales d'achat se rapprochent et les fournisseurs subissent, par ricochet, la guerre des prix entre enseignes de la grande distribution. Le Sénat, comme le Gouvernement, a saisi l'Autorité de la concurrence, qui vient de rendre son avis. Elle préconise une redéfinition de l'abus de dépendance économique.

Aujourd'hui, la jurisprudence est tellement stricte qu'il est presque impossible d'établir la dépendance économique. Cela fait fi de la réalité des relations commerciales : il n'est pas si facile de remplacer un client par un autre... D'où la définition que nous proposons, qui reprend les recommandations de l'autorité de la concurrence. Cette épée de Damoclès pourrait conduire la grande distribution à limiter la pression qu'elle met sur ses fournisseurs.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Avis plutôt défavorable. Tout à l'heure, sur l'abus de pratique commerciale, vous disiez que mieux valait appliquer le droit existant que le complexifier. L'objectif de cet amendement est louable mais la création de cette nouvelle infraction vient s'ajouter au droit existant. 150 contentieux ont été engagés sur le fondement de l'article L. 442-6 ; plusieurs enseignes ont été condamnées à des amendes significatives.

Par souci de simplicité et d'efficacité, et compte tenu du vote de la Haute assemblée sur l'abus de pratique commerciale, retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°1691 est adopté.

L'article 10 quater, modifié, est adopté.

L'article 10 quinquies est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

Mme la présidente.  - Amendement n°978 rectifié bis, présenté par MM. Gabouty, Pozzo di Borgo et Médevielle, Mme Loisier et MM. Guerriau et Kern.

Après l'article 10 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport qui invite à prendre en compte dans les programmes de l'éducation nationale les principes de base d'éducation financière et budgétaire, et notamment les initiatives pour favoriser l'enseignement de ces connaissances dès le primaire et le secondaire.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Environ 80 % des Français sont favorables à l'enseignement des bases de l'économie et de l'économie financière dès l'école. Cela favoriserait le développement d'un esprit entrepreneurial et de responsabilité par rapport à l'administration et au monde du travail. Cet amendement va dans le sens d'une communication de la Commission européenne en date du 18 décembre 2007 soulignant que « l'école est certainement le vecteur adapté, si ce n'est le plus adapté ». L'OCDE souligne aussi dans ses rapports le rôle clef de l'école pour diffuser les bases nécessaires à la compréhension de l'économie. Il ne s'agit pas d'alourdir les programmes mais de veiller à ce qu'ils intègrent l'éducation financière et économique. Qu'en pense le Gouvernement ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, co-rapporteure.  - Défavorable, comme à toutes les demandes de rapport. La définition des programmes scolaires ne relève pas de la loi mais du Conseil supérieur des programmes.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Le rapport du comité consultatif pour le secteur financier, remis en février au ministre des finances, vous satisfait. Il préconise un enseignement dès l'école, tout au long de la vie, et un accompagnement des publics en situation de fragilité financière. Des échanges ont lieu à son propos avec le ministre de l'éducation nationale.

M. Roger Karoutchi.  - Je ne voterai certainement pas cet amendement. Cessons de charger la barque. Ce matin, on proposait de faire passer le code au lycée, pourquoi pas y construire les voitures ! (Sourires) Tout le monde se plaint déjà de la lourdeur des programmes ! Je le sais pour avoir été inspecteur général dans une vie antérieure. Le Conseil supérieur des programmes est assailli de demandes des ministres. Revenons-en aux fondamentaux !

M. Jean-Marc Gabouty.  - Cet amendement était d'appel. Il ne s'agit nullement de surcharger les programmes. Pour assurer notre croissance à l'avenir, une évolution culturelle sera nécessaire. L'inculture économique de certains hommes politiques atterre le chef d'entreprise que je suis.

L'amendement n°978 rectifié bis est retiré.

ARTICLE 11

Mme la présidente.  - Amendement n°11, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

M. Patrick Abate.  - Encore une fois, cet article renforce les pouvoirs d'une autorité administrative indépendante et dessaisit l'exécutif de ses prérogatives. Avec l'Autorité de la concurrence, l'intérêt général n'est plus pris en compte, sauf selon le prisme réducteur de l'intérêt économique. Plus le pouvoir du politique est réduit, plus la marge d'action du Parlement diminue.

M. François Pillet, co-rapporteur de la commission spéciale.  - Votre position sur les autorités administratives indépendantes est constante. Nous débattrons du renforcement des pouvoirs de l'Autorité de la concurrence en temps et en heure. Pour cela, ne supprimons pas l'article, fortement amélioré par la commission spéciale. Rejet.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°11 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1552, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l'article L. 464-8, après la référence : « L. 464-6-1 », est insérée la référence : « , L. 752-26 » ;

2° L'article L. 752-26 est ainsi rédigé : 

« Art. L. 752-26.  -  I.  -  En cas d'existence d'une position dominante et de détention par une entreprise ou un groupe d'entreprises exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail d'une part de marché supérieure à 50 %, qui soulève des préoccupations de concurrence du fait de prix ou de marges élevés que l'entreprise ou le groupe d'entreprises pratique en comparaison des moyennes habituellement constatées dans le secteur économique concerné, l'Autorité de la concurrence peut faire connaître ses préoccupations de concurrence à l'entreprise ou au groupe d'entreprises en cause, en précisant son estimation de la part de marché et du niveau de prix ou de marges qui justifie ces préoccupations. L'entreprise ou le groupe d'entreprises peut, dans un délai de deux mois, lui proposer des engagements dans les conditions prévues à l'article L. 464-2.

« La part de marché mentionnée au premier alinéa du présent I est évaluée selon le chiffre d'affaires réalisé dans le secteur économique et dans la zone de chalandise concernés ou selon les surfaces commerciales exploitées dans la zone de chalandise concernée.

« II.  -  Si l'entreprise ou le groupe d'entreprises conteste les préoccupations de concurrence soulevées, ne propose pas d'engagements, ou si les engagements proposés ne lui paraissent pas de nature à mettre un terme à ses préoccupations de concurrence, un rapport est notifié par l'Autorité de la concurrence à l'entreprise ou au groupe d'entreprises qui peut présenter ses observations dans un délai de deux mois.

L'Autorité de la concurrence peut, par une décision motivée, prise après réception des observations de l'entreprise ou du groupe d'entreprises en cause et à l'issue d'une séance devant le collège, lui enjoindre de modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé qui ne peut excéder six mois, tous accords et tous actes par lesquels s'est constituée la puissance économique qui permet les prix ou les marges élevés constatés. Elle peut, dans les mêmes conditions, lui enjoindre de procéder, dans un délai  qui ne peut être inférieur à six mois, à la cession d'actifs, y compris de terrains, bâtis ou non, si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir une concurrence effective. L'Autorité de la concurrence peut sanctionner l'inexécution de ces injonctions dans les conditions prévues à l'article L. 464-2.

« III.  -  Au cours des procédures définies aux I et II du présent article, l'Autorité de la concurrence peut demander communication de toute information dans les conditions prévues aux articles L. 450-3, L. 450-7 et L. 450-8 et entendre tout tiers intéressé. »

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Cet amendement ne fait pas que revenir au texte adopté par l'Assemblée nationale : nous avons entendu les arguments de votre commission spéciale et nous renforçons le caractère contradictoire de la procédure lors de la phase contentieuse.

Les préoccupations de concurrence ne peuvent pas consister à démontrer que l'entreprise dégage une rentabilité élevée par le constat de marges nettes anormalement élevées. La substitution d'un tel critère à celui de prix ou marge élevés rendrait la loi très facilement contournable. Il est en effet relativement aisé de diminuer artificiellement le résultat net par des artifices comptables. Il est plus facile de comparer le taux de marge.

En deuxième lieu, le texte rompt l'équilibre entre les deux phases négociée et contentieuse prévues en conférant à la phase négociée les caractéristiques d'une procédure contentieuse.

En revanche, comme le prévoit la commission spéciale, le Gouvernement veut contraindre l'Autorité de la concurrence à établir un rapport soumis au débat contradictoire lorsqu'elle souhaite prendre une mesure d'injonction structurelle alors que les entreprises contestent les préoccupations de concurrence, ne proposent pas d'engagements ou des engagements insuffisants. Il veut également faire passer de trois mois à un délai qui ne peut excéder six mois le délai dans lequel l'injonction de résiliation des accords ou actes ayant permis la constitution de la puissance d'achat qui s'est traduite par des prix ou marges élevés, doit être exécutée et passer la mise en oeuvre de l'injonction de cession d'actifs d'un délai laissé à l'appréciation de l'Autorité de la concurrence à un délai qui ne peut être inférieur à six mois.

En troisième lieu, votre texte exclut l'utilisation des informations lors de la procédure d'injonction structurelle dans le cadre d'une procédure ultérieure pour pratiques anticoncurrentielles. C'est excessif car l'Autorité de la concurrence ne peut pas juridiquement utiliser les pièces d'un dossier clos pour alimenter une procédure d'infraction dans un autre dossier. Ensuite, l'engagement d'une procédure d'injonction structurelle après un non-lieu pour abus de position dominante est une hypothèse d'école.

En effet, l'Autorité n'est pas liée par la qualification juridique des faits qui lui sont soumis. J'y insiste, il ne s'agit pas de rétablir purement et simplement le texte de l'Assemblée nationale. Nous avons pris en compte le point de vue des acteurs économiques et de votre commission spéciale.

Enfin, donner ce pouvoir à l'Autorité de la concurrence ne réduit pas les pouvoirs des ministères, car ils ne les possèdent pas. Pas de diminutio capitis de l'exécutif mais une procédure de plus !

M. François Pillet, co-rapporteur.  - Vous revenez au texte de l'Assemblée nationale, en tenant certes un peu compte, à la marge, de nos modifications. Toutefois, mon avis reste défavorable. Il faut encadrer l'injonction structurelle, pouvoir particulier donné à l'Autorité de la concurrence de s'immiscer dans les négociations en modifiant les accords conclus, à ordonner la cession d'actifs, bref autant d'entraves au droit de propriété tel que nous le connaissons depuis le droit romain, qui ne s'obsède pas sur l'idée qu'il puisse y avoir des abus en la matière.

Depuis 2008 existe l'abus de position dominante et, depuis 2013, une procédure similaire pour l'outre-mer. C'est pourquoi notre commission spéciale n'a pas retenu la suppression de l'article, en dépit des oppositions qui ne venaient pas seulement du groupe CRC mais aussi, par exemple, d'éminents professeurs de droit...

Notre démarche a été de canaliser ce pouvoir d'injonction sans le dénaturer. La cession forcée d'actifs présente un caractère de sanction. Qui dit sanction dit respect du contradictoire. L'entreprise aura connaissance des pièces à disposition de l'Autorité de la concurrence et sera appelée à échanger avec celle-ci.

Nous n'avons pas voulu de recours suspensif mais nous avons créé un sursis à exécution. Méfiez-vous des critiques si vous donnez de trop forts pouvoirs à l'Autorité de la concurrence. Le respect du contradictoire les contrebalance. On ne peut s'en remettre à son éthique, si exemplaire soit-elle.

Enfin, comment réparer le préjudice causé par une décision de l'Autorité de la concurrence au terme d'une longue procédure ? Mieux vaut se prémunir en amont.

Mme Nicole Bricq.  - Une collègue de la majorité a déploré l'excessive concentration du marché, dont 90 % sont aux mains de quatre groupes. Il faut lutter contre cette concentration. C'est pourquoi nous n'avons pas voulu la suppression de l'article.

L'injonction structurelle est une arme puissante pour stimuler la concurrence. L'amendement du Gouvernement vise à éviter les contournements, rendus possibles par la rédaction de la commission. On connait l'inventivité des entreprises !

En même temps, il est important de respecter le contradictoire, comme y a insisté à juste titre le rapporteur. Dans la rédaction du Gouvernement, celui-ci est plus développé. En outre, la commission spéciale exclut l'utilisation par l'Autorité de la concurrence des informations recueillis lors de la procédure.

Nous sommes d'accord sur les objectifs. Le Gouvernement a amélioré le texte issu de l'Assemblée nationale. J'invite le Sénat à adopter cet amendement qui reprend les apports du Sénat.

M. Jean Desessard.  - Le débat est très technique. Ai-je bien compris ? L'injonction structurelle vise à contrer un abus de position dominante, en cas de marges élevées. Le rapporteur préfère une démarche fondée sur un échange contradictoire entre l'Autorité de la concurrence et l'entreprise, très en amont. A priori, cette démarche parait sensée. Mon inclination naturelle me porte plutôt vers le Gouvernement mais, à ce stade du débat, le rapporteur me convainc davantage.

M. François Pillet, co-rapporteur.  - Madame Bricq, l'amendement gouvernemental repose sur deux critères alternatifs, le prix élevé ou la marge élevée, dépourvus d'unité de concept. Quand vous vendez un produit sur les Champs-Élysées, la marge peut être différente et justifier un prix élevé, qui s'explique par les frais, eux-mêmes plus élevés qu'ailleurs.

Mme Nicole Bricq.  - C'est vrai.

M. François Pillet, co-rapporteur.  - Notre rédaction apporte une unité conceptuelle qui manque dans la rédaction que propose le ministre. Je propose d'autre part des critères cumulatifs et non pas alternatifs.

Monsieur Desessard, pour vous donner des arguments supplémentaires, l'injonction structurelle ne s'applique pas seulement en cas d'abus de position dominante mais aussi lorsque l'Autorité de la concurrence a une préoccupation de concurrence. Il n'y a pas là forcément fraude ou abus. Ce qui fait de l'injonction structurelle une arme d'une exceptionnelle dureté et justifie une procédure scrupuleusement contradictoire.

M. Jean Desessard.  - On est moins bavard que sur le surplus alimentaire...

M. Roger Karoutchi.  - C'est trop technique pour nous, laissons-les entre eux ! (Sourires)

M. Emmanuel Macron, ministre.  - On ne comparera que ce qui est comparable au sein d'une même zone de chalandise. Il en existe 674 en France. Un prix ou une marge élevés dans une même zone, associé à une position dominante, quand donc cette entreprise détient plus de 50 % du marché dans le périmètre, peut donner à penser qu'il y a abus. C'est alors que l'Autorité de la concurrence se saisit et interroge l'entreprise. Le débat contradictoire intervient tout de suite. Faute de réponse satisfaisante, l'Autorité de la concurrence peut demander à l'entreprise de corriger la situation. Si l'entreprise n'obtempère pas, intervient alors, et alors seulement, l'injonction structurelle. Mieux vaut le contradictoire qu'une série de décisions susceptibles de donner lieu à un contentieux.

Prendre en compte la marge nette rendrait le dispositif inopérant car il existe bien des moyens de l'optimiser. La grande distribution passera à travers les mailles du filet. Voici pourquoi je préfère mon amendement.

M. Patrick Abate.  - Nous sommes pragmatiques : puisque l'article 11 est maintenu, autant qu'il soit efficace. Nous voterons l'amendement n°1552.

À la demande de la commission spéciale, l'amendement n°1552 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin n°133 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 337
Pour l'adoption 150
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Jean Desessard.  - Le rapporteur a eu le dernier mot !