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Table des matières
Commissions (Démissions et candidatures)
Organismes extraparlementaires (Candidatures)
Engagement de procédure accélérée
Interdiction des maïs OGM (Procédure accélérée)
M. Daniel Raoul, rapporteur de la commission des affaires économiques
Discussion de l'article unique
Organismes extraparlementaires (Nominations)
Convention européenne contre les violences à l'égard des femmes
Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur de la commission des affaires étrangères
Discussion de l'article unique
Ordre du jour du mardi 6 mai 2014
SÉANCE
du lundi 5 mai 2014
93e séance de la session ordinaire 2013-2014
présidence de M. Jean-Pierre Raffarin,vice-président
Secrétaires : M. Jean Desessard, M. Jacques Gillot.
La séance est ouverte à 16 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Commissions (Démissions et candidatures)
M. le président. - J'ai reçu avis de la démission de : M. Michel Mercier, comme membre de la commission des lois ; M. Vincent Capo-Canellas, comme membre de la commission du développement durable ; et Mme Chantal Jouanno, comme membre de la commission des affaires sociales.
J'informe le Sénat que le groupe UDI-UC a fait connaître à la présidence le nom des candidats qu'il propose pour siéger : à la commission des lois, en remplacement de M. Michel Mercier, démissionnaire ; et à la commission du développement durable, en remplacement de M. Vincent Capo-Canellas, démissionnaire.
Ces candidatures vont être affichées et les nominations auront lieu conformément à l'article 8 du Règlement.
Commissions (Nominations)
M. le président. - Je rappelle au Sénat que le groupe UDI-UC a présenté une candidature pour la commission des lois et une candidature pour la commission du développement durable.
Le délai prévu par l'article 8 du Règlement est expiré.
La Présidence n'a reçu aucune opposition. En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame M. Vincent Capo-Canellas, membre de la commission des lois, en remplacement de M. Michel Mercier, démissionnaire, et Mme Chantal Jouanno, membre de la commission du développement durable, en remplacement de M. Vincent Capo-Canellas, démissionnaire.
Mandats sénatoriaux
M. le président. - En application des articles L.O. 319 et L.O. 320 du code électoral, le mandat sénatorial de Mmes Nicole Bricq, Hélène Conway-Mouret et Anne-Marie Escoffier et de M. Thierry Repentin, dont les fonctions gouvernementales ont pris fin le vendredi 2 avril 2014, a repris le samedi 3 mai, à 0 heure. En conséquence, le mandat sénatorial de Mmes Kalliopi Ango Ela et Hélène Lipietz et de MM. Stéphane Mazars et André Vairetto a cessé le vendredi 2 mai, à minuit.
Conformément à l'article premier de l'ordonnance n° 58-1099 du 17 novembre 1958 portant loi organique pour l'application de l'article 23 de la Constitution, le président du Sénat a pris acte de la cessation, le vendredi 2 mai 2014, à minuit, du mandat sénatorial de M. François Rebsamen, nommé ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social, par décret du 2 avril 2014 relatif à la composition du Gouvernement.
Conformément aux articles L.O. 325 et L.O. 179 du code électoral, M. le ministre de l'intérieur a fait connaître à M. le président du Sénat qu'à compter du samedi 3 mai 2014, à 0 heure, Mme Isabelle Lajoux est appelée à remplacer, en application de l'article L.O. 319 du code électoral, en qualité de sénateur de la Côte-d'Or, M. François Rebsamen, nommé ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social, par décret en date du 2 avril 2014 relatif à la composition du Gouvernement.
Organismes extraparlementaires (Candidatures)
M. le président. - Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de trois organismes extraparlementaires.
La commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Georges Labazée pour siéger, comme membre titulaire, au sein du Conseil d'orientation des retraites et pour siéger, comme membre suppléant, au sein du Conseil de surveillance du Fonds de réserve pour les retraites.
Par ailleurs, la commission du développement durable a fait connaître qu'elle propose la candidature de Mme Esther Sittler pour siéger au sein du Conseil national de la sécurité routière.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
Engagement de procédure accélérée
M. le président. - En application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l'examen de la proposition de loi facilitant le déploiement d'un réseau d'infrastructures de recharge de véhicules électriques sur l'espace public, déposée sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 25 février 2014.
Dépôt d'un document
M. le président. - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la convention entre l'État et le Centre national d'études spatiales relative au programme d'investissements d'avenir, action « Espace » du programme « projets thématiques d'excellence ». Acte est donné du dépôt de ce document, qui a été transmis aux commissions des finances et des affaires économiques.
Rappel au Règlement
Mme Nathalie Goulet . - Le 24 mars, j'ai déposé une proposition de résolution n°422 proposant la création d'une commission d'enquête sur la plateforme nationale d'interceptions judiciaires. Le système a été confié à Thalès. Or les délais n'ont pas été tenus, le budget est passé de 20 à 40 millions d'euros, tandis que la question de la sécurité des données n'est pas réglée. Les sociétés qui géraient la plateforme n'ont pas été payées et menacent d'interrompre leurs prestations, pourtant indispensables aux enquêtes des forces de l'ordre.
Je souhaite que la Conférence des présidents examine l'opportunité d'inscrire cette proposition de résolution à l'ordre du jour.
M. le président. - Acte vous est donné de ce rappel au Règlement. Je ne doute pas que lors de la prochaine réunion de la Conférence des présidents, le 14 mai, le président de votre groupe relaiera votre demande.
Interdiction des maïs OGM (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié.
Discussion générale
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement . - Nous avons déjà débattu de cette proposition de loi. Le moratoire sur la mise en culture des OGM fait l'objet d'un large consensus sur les bancs au Parlement. La France a toujours soutenu cette position. Or la législation européenne et le Conseil d'État ont remis en cause l'application de la clause de sauvegarde. Il fallait, dès lors, trouver un cadre juridique adapté.
La législation européenne ne convient à personne. Alors que 19 États membres s'opposaient à l'autorisation du maïs Pioneer TC1507, contre 4 abstentions et 5 votes pour, ce maïs est autorisé. La situation juridique à l'échelle de l'Union ne peut perdurer ; c'est l'objet des discussions qui se sont engagées.
La France a défendu dès le départ au Conseil européen une modification des règles d'autorisation de la mise en culture des OGM. Le débat avance. Comme pour les phytosanitaires, il faut que les États puissent décider d'autoriser ou non la mise en culture en fonction d'un bilan coût-bénéfice, des risques environnementaux, en particulier de dissémination, sur les productions de qualité et bio. J'espère qu'un texte sera adopté sous la présidence grecque.
Cette proposition de loi comble un vide juridique. L'autorisation de mise en culture du Monsanto 810 date de seize ans. Elle aurait dû être renouvelée au terme de dix ans. L'Agence européenne a elle-même considéré que la mise en culture pouvait avoir des effets négatifs qui n'avaient pas été évoqués lors de l'autorisation. Il y a donc de quoi contester celle-ci. En outre, notre Constitution permet de mettre en oeuvre le principe de précaution.
De plus, des études réalisées aux États-Unis sur l'impact à moyen terme des OGM montrent que la consommation de pesticides n'a pas baissé, comme attendu, mais augmenté de 7 %. Au début, le recours aux pesticides régresse en effet, mais il augmente à mesure que la résistance de certaines plantes et de certains insectes augmente.
Nous ne fermons pas la porte à la recherche. Les expérimentations en plein champ restent possibles.
Si le droit européen offre enfin la possibilité de débattre autour de critères précis, alors nous pourrons engager le débat de manière sereine et pleinement démocratique. Les OGM de première génération, résistants aux herbicides ou qui produisent des pesticides, ont montré leurs limites. Il pourrait être avantageux, en revanche, de développer des plantes résistantes au stress hydrique ou enrichies en vitamines - afin par exemple de prévenir la cécité. Sur les OGM de première génération, il faut admettre objectivement, scientifiquement, qu'une page doit se tourner. Nous en ouvrirons collectivement une autre. Je ne doute pas que ce débat sera, une fois de plus, de haute tenue. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)
M. Daniel Raoul, rapporteur de la commission des affaires économiques . - Cette proposition de loi du groupe socialiste de l'Assemblée nationale, a été adoptée le 15 avril par les députés. Il s'agit d'un texte distinct de celui auquel le Sénat a opposé, cet hiver, l'exception d'irrecevabilité ; mais le dispositif est le même : il s'agit d'interdire la mise en culture de maïs OGM. Il ne concerne pas les expérimentations ni les autres plantes génétiquement modifiées (PGM).
Veillons à ne pas nous contenter de slogans faciles et à ne pas mettre sur le même plan tous les OGM. Comme le rappelait notre collègue Pastor dans son rapport de 2003, des gènes étrangers ont été incorporés dans les bactéries dès les années 1960. Un médicament sur six est issu du génie génétique. De même, 80 % des fromages incorporent des OGM - la présure d'origine animale a été remplacée par des enzymes génétiquement modifiés - et personne ne s'en émeut. C'est, pourrait-on dire, le premier étage des OGM, dont l'utilisation est confinée et sous contrôle ; ils ne posent pas de risque de contamination dans l'environnement.
Au deuxième étage, il y a les plantes PGM, dont les maïs qui nous préoccupent aujourd'hui, qui produisent leurs propres toxines et, outre la pyrale, attaquent sans doute des papillons et peut-être les abeilles. D'autres espèces pourraient présenter un intérêt pour l'alimentation - elles ne sont pas concernées par le texte.
Le principe de précaution doit être un principe d'encouragement à l'approfondissement de la recherche ; il est devenu un principe d'inaction...
M. Jean Bizet. - Il a dérivé !
M. Daniel Raoul, rapporteur. - Le troisième étage, ce sont les animaux génétiquement modifiés ; ils ne retiennent pas assez l'attention. On en voit poindre pourtant dans le cadre du traité transatlantique. Et la Commission des biotechnologies brésilienne vient d'autoriser la dissémination de moustiques mâles génétiquement modifiés pour lutter contre la dengue. Les biotechnologies animales imposent une prudence encore plus grande.
La recherche n'est pas menacée. Rien ne justifiait la destruction, en août 2010, de cultures de l'Inra à Colmar, menées en toute transparence et sans aucun risque de dissémination ; les chercheurs se désolent de voir ainsi leur travail réduit à néant. Refuser la recherche, c'est refuser la connaissance et en perdre toute maîtrise. Le code de l'environnement comme la directive 2001/18/CE fixent un cadre juridique spécifique pour les essais d'OGM.
Sans mettre en cause l'évaluation scientifique, prenons garde aux conflits d'intérêts. L'avis de plusieurs instances, européennes et nationales, doit être sollicité. Surtout, la puissance publique ne peut se contenter de cette seule expertise, il faut examiner les conséquences économiques, sociales, environnementales d'une mise en culture, se garder de favoriser le développement des grandes exploitations et de soumettre nos agriculteurs aux grands semenciers. Nous manquons d'études de long terme traitant des effets des OGM sur l'alimentation humaine et animale, et leurs effets sur la biodiversité sont encore controversés. Toutes ces incertitudes avaient fondé l'adoption en commission de la proposition de loi Fauconnier.
Le texte d'aujourd'hui n'a ainsi rien de révolutionnaire. Un arrêté du 7 février 2008 a formulé une première interdiction du maïs Monsanto 810, suivi d'un deuxième le 16 mars 2012 et confirmé par un troisième le 14 mars dernier justifié, après une large consultation, par l'existence de nouvelles études et la proximité des semis. Certains exploitants ont semé avant le 15 mars, on sait ce qu'il en est advenu ; il eut mieux valu laisser la justice agir...
Après l'avis du Conseil d'État, l'intervention du législateur national était nécessaire, comme est nécessaire au niveau européen une révision du processus d'évaluation des autorisations de PGM. Aujourd'hui les États et les citoyens sont dessaisis. Lors de l'examen de la mise en culture du TC1507, la Commission est passée outre aux avis majoritaires du Conseil et du Parlement européen... La Grèce a fait des propositions pour faciliter les mesures nationales d'interdiction. La France a soulevé la fragilité juridique du mécanisme proposé, et fait une proposition alternative : une fois évaluée au niveau européen, la PGM pourrait encore faire l'objet d'analyses au niveau national. Le débat se poursuit à Bruxelles.
Le texte que nous examinons interdit toute mise en culture des maïs génétiquement modifiés. Les agents chargés du contrôle des végétaux contrôleront le respect de l'interdiction ; en cas de non-respect de celle-ci, c'est l'autorité administrative qui sera compétente pour décider la destruction des cultures. L'Assemblée nationale a adopté ce texte sans modifications. Nous proposons au Sénat de l'adopter. (Applaudissements sur les bancs socialistes, CRC et écologistes)
M. Robert Tropeano . - La position du groupe RDSE est très proche de celle exprimée par M. Fortassin à la tribune lors de l'examen de la proposition de loi de M. Fauconnier. Il souhaite un débat dépassionné et sans préjugé.
À deux reprises le Conseil d'État a annulé des arrêtés suspendant des autorisations de mise en culture du maïs Monsanto 810. La procédure de ce texte est inédite: elle interdit la mise en culture de tous les maïs OGM - entre-temps le TC1507 a été autorisé au niveau européen...
Peut-on voter des lois fragiles juridiquement ? M. Fortassin se demandait s'il ne s'agissait pas d'un geste purement politique en direction de l'opinion... Le débat doit être transparent et public. Toutes les positions sont respectables, mais nous avons été surpris par l'excès de certaines déclarations après le vote du Sénat le 17 février. L'agriculture intensive ne s'oppose pas nécessairement à l'agrobiologie, nous devons raison garder et ne pas céder aux sirènes médiatiques ni aux raccourcis des sondages. Les OGM ne présentent pas, par définition, un danger ; il faut poursuivre la recherche et ne pas céder à l'obscurantisme, qui serait une faute politique majeure. La France est en pointe dans le domaine de la génétique végétale, donnons à l'Inra les moyens et la liberté de procéder à des expérimentations. Certes, il existe des risques de résistance des OGM, les mesures de gestion et de surveillance de Monsanto ont été insuffisantes. Mais nos décisions doivent être cohérentes avec la législation européenne. Comment interdire la mise en culture d'OGM mais autoriser les importations de produits en contenant ?
L'intime conviction du RDSE n'est pas unanime. Certains, dont je suis, voteront cette proposition de loi, non sans avoir exprimé quelques réserves de droit. D'autres, qui voteront contre ou s'abstiendront, ne peuvent se résoudre à voter un texte sans raison d'être sur le plan juridique. Nous appelons, unanimement cette fois, à un débat objectif et dépassionné. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Joël Labbé . - Deux mois après la motion d'irrecevabilité de M. Bizet sur le texte de M. Fauconnier, nous réexaminons ce texte. L'arrêté de mars a été pris au nom de l'urgence. Je salue l'initiative du groupe socialiste de l'Assemblée nationale de redéposer ce texte. C'est un signe encourageant de la volonté de la France d'engager la transition de son modèle agricole vers l'agro-écologie et une agriculture plus respectueuse de l'environnement comme des dynamiques humaines et territoriales. J'ai renoncé, par pragmatisme, à déposer un amendement pour élargir l'interdiction de culture à toutes les PGM. Je m'en remets au Gouvernement et à notre ministre de l'écologie, très sensibilisée à ce sujet.
Nous devons garantir aux consommateurs qu'ils ne trouveront pas demain des OGM dans leur assiette.
M. Jean Bizet. - Ils y sont déjà !
M. Joël Labbé. - Il faudra s'en préoccuper en amont... les trois quarts des Européens sont contre les OGM en agriculture. Saluons la Fédération internationale des amis de la Terre : selon ses conclusions, les OGM, en raison de leur impact sur l'environnement, sont de moins en moins acceptés au niveau mondial ; à cause de la résistance développée par les adventices et les insectes, ils n'apportent pas de réelle protection contre les ravageurs agricoles. Le ministre de l'agriculture américain arrive aux mêmes constats après une étude sur quinze ans de développement des OGM ; et leurs effets économiques sont mitigés, en termes de rendement et de retour sur investissement. Les risques imposent de ne pas céder à la pression des lobbies. Selon Olivier De Schutter, rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l'alimentation, notre modèle d'agriculture intensive et forte consommatrice d'intrants est à bout de souffle. La nature, heureusement, s'adapte.
Face à cette forme de criminalité contre l'humanité, je pèse mes mots, qu'est l'agrochimie dans les pays du Sud et face au mouvement pour l'organisation mondiale de l'agriculture que vous animez, monsieur Bizet, je lancerai bientôt un appel à la création d'un mouvement mondial des parlementaires pour la défense de l'agro-écologie.
Nous voterons ce texte. (Applaudissements à gauche)
M. Jean Bizet . - Il y a trois mois, je défendais au nom du groupe UMP la motion d'irrecevabilité à l'encontre de la proposition de loi de M. Fauconnier ; j'avais alors démontré que ce texte était contraire à plusieurs dispositions constitutionnelles. Le Sénat, malgré l'avis du Gouvernement, l'avait adoptée.
Le texte dont nous débattons aujourd'hui est identique. Je ne reprendrai pas mes arguments, ils n'ont pas changé. Cette proposition de loi ne respecte ni le droit français, ni le droit européen. L'urgence n'est pas démontrée et la procédure européenne ad hoc n'a pas été suivie.
Le Gouvernement n'ose pas assumer ses choix et s'en remet à une proposition de loi. Pourtant, la loi d'avenir sur l'agriculture était le véhicule législatif parfait. Il fallait aller vite, me direz-vous. (M. Stéphane Le Foll, ministre, le confirme) Mais le présent texte est toujours en navette... Et l'arrêté d'interdiction est l'objet d'un référé-suspension. Mais certaines semences ont déjà été plantées...
M. Joël Labbé. - De la provocation !
M. Jean Bizet. - De la culture ! Le préjudice subi par les exploitants devra bien être pris en compte...
Votre volonté n'est pas fondée en droit. Pour interdire la mise en culture, il faudrait démontrer un risque urgent, mais ni les agences ni les académies ne confirment pareil risque. Pour légiférer, il faut des bases légales et scientifiques incontestables. Ce n'est pas le cas. Vous entretenez la confusion sur la qualité des avis des agences. L'initiative du Gouvernement nuit à la qualité de l'information à disposition des citoyens, à la sérénité du débat et à la confiance dans la recherche. C'est pourquoi, avec M. Accoyer, j'ai saisi le Haut Conseil des biotechnologies pour faire procéder à une analyse croisée des différents avis sur les risques pour l'environnement du maïs Monsanto 810.
On ne peut pas en outre considérer que cette proposition de loi est un texte de sauvegarde, conservatoire, pris en application du principe de précaution. La Charte de l'environnement prévoit, en cas de doute, une procédure d'évaluation et des mesures proportionnées.
Enfin, ce texte n'est pas conforme à la Charte de l'environnement qui prescrit des mesures proportionnées en cas de risques. Ce texte d'interdiction, au contraire, est arbitraire et constitue un défi à la raison et à la recherche scientifique. Comment inciter les chercheurs à mener des études si leurs champs de cultures expérimentales sont détruits ?
La loi de 2008, inspirée du rapport que j'avais rédigé avec M. Pastor, respectait un équilibre et sanctionnait ceux qui détruisent des cultures.
M. Daniel Raoul, rapporteur. - Le droit n'a pas changé.
M. Jean Bizet. - Malheureusement, il n'est pas appliqué.
Je ne suis pas opposé à une modification des règles européennes : on verra alors apparaître les incohérences dans l'Union européenne et quels pays font le choix de la modernité.
À l'heure du « redressement productif » cher à M. Montebourg, pourquoi ne pas avoir une approche plus ouverte des biotechnologies ? Les maïs transgéniques entrent déjà dans l'alimentation du bétail. Les OGM sont indispensables à la recherche. Un tiers des surfaces mondiales cultivées en maïs le sont pour des espèces génétiquement modifiées.
En agissant dans la précipitation, le Gouvernement s'enfonce dans une impasse. J'apprécie cependant, monsieur le ministre, que vous reconnaissiez l'intérêt des OGM de deuxième génération.
Les enjeux sont tels que notre débat ne saurait se perdre sur des amalgames. Encore un effort, monsieur le ministre !
M. Jean-Jacques Lasserre . - Merci au président Raoul pour la manière dont il anime les débats en commission. La liberté de tous y est la règle.
Les OGM touchent à de nombreux domaines. Le présent texte est semblable à la proposition de loi de M. Fauconnier, rejetée ici il y a quelques mois.
Gardons-nous des positions de principe. Nous sommes tous conscients des problèmes que soulèvent les OGM, mais aussi de leur intérêt pour la recherche. Le fauchage de parcelles expérimentales est intolérable. Cessons de faire fuir les chercheurs. La recherche permettra de réduire les apports en intrants chimiques et en eau, de nourrir une population mondiale en expansion. Pourquoi nous priver du progrès ? Le principe de précaution ne doit pas rimer avec stagnation.
Certes, il y a des risques de biorésistance, de propagation incontrôlée des pollens - mais il est possible de circonscrire celle-ci -, des risques pour la santé humaine.
Au lieu d'une loi pour chaque espèce, il faudrait un cadre général. Pourquoi n'avoir pas traité de la question dans le projet de loi d'avenir pour l'agriculture ? Évitons les textes d'affichage.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Il faut bien commencer par le plus urgent.
M. Jean-Jacques Lasserre. - Il faut donner des signes à la communauté scientifique. La France est dotée d'un Haut Conseil des biotechnologies. Il n'y a pas de consensus en Europe pour interdire la culture du maïs OGM.
Assez de textes de circonstance, portons le débat à un autre niveau. Le principe de précaution s'impose, mais nous voulons inscrire le droit à la recherche dans cette loi. En l'état, nous aurons du mal à voter ce texte.
M. Jean Bizet. - Très bien !
Mme Laurence Cohen . - Il y a quelques semaines, en rejetant une proposition de loi identique à celle-ci, le Sénat se déclarait favorable à la culture du maïs OGM. Le groupe CRC n'était pas de cet avis. Les deux variétés visées présentent des risques environnementaux avérés. Le maïs MON810 crée des résistances chez les insectes cibles, ce qui oblige à consommer des pesticides plus violents. En outre, il a des effets nuisibles sur d'autres insectes que ces cibles officielles. La culture d'OGM favorise l'agriculture intensive et nuit à la biodiversité. Il serait paradoxal de la soutenir aujourd'hui.
Les procédures d'autorisation sont fragiles : les mises en culture bénéficient d'une présomption d'absence de toxicité. Nous voulons une recherche publique indépendante des intérêts mercantiles.
Le débat sur les OGM est symptomatique du fossé qui se creuse entre la Commission européenne et les peuples. La Commission veut autoriser le maïs TC1507 contre l'avis du Parlement européen, de 19 États sur 28, d'une majorité de la population européenne...
Les plantes génétiquement modifiées sont couvertes par des brevets, ce qui a une incidence économique notable. La commission des affaires économiques a adopté une résolution appelant l'attention sur les dangers que présente la brevetabilité du vivant.
Nous voterons donc cette proposition de loi, malgré un champ d'application restreint. En outre, les autorisations se multiplient : Bruxelles vient d'autoriser la culture de dix nouveaux OGM. Enfin, le futur traité de libre-échange transatlantique permettra aux multinationales américaines de proposer aux agriculteurs européens leurs catalogues d'OGM, et leur donnera la possibilité de poursuivre les États qui prendraient des mesures contraires à leurs intérêts commerciaux. Ces questions ne pourront être éludées si l'Europe veut conserver son potentiel agricole. (Applaudissements à gauche)
Mme Renée Nicoux . - L'enjeu est crucial. Le Parlement doit éviter toute prise de risque pour l'environnement, la santé, l'équilibre économique de notre agriculture, liée à la mise en culture du maïs OGM. Le MON810 a un impact avéré sur l'environnement et la biodiversité. La toxine créée par la plante nuit à des insectes non ciblés et crée une résistance, obligeant les agriculteurs à utiliser des pesticides encore plus puissants. La question se pose aussi de la coexistence entre cultures OGM et autres cultures, notamment biologiques. En outre, ces semences protégées risquent de rendre nos paysans dépendants de grands semenciers. Enfin, le maïs OGM pourrait avoir un lourd impact sur les abeilles et la filière apicole.
La France a raison de se montrer prudente. À deux reprises, le gouvernement a prononcé un moratoire sur la culture de ces maïs OGM, chaque fois annulé par le Conseil d'État. Celui-ci vient en revanche de confirmer l'arrêté d'interdiction du MON810.
Nos marges de manoeuvre sont étroites, comme le montre le cas du TC1507 autorisé par la Commission européenne malgré l'opposition du Parlement européen et d'une majorité d'États membres. La France jusqu'ici n'est pas parvenue à faire évoluer les règles. Cette proposition de loi est nécessaire pour faire entendre la voix de la France. Prenons le temps d'approfondir les recherches et nous assurer que les consommateurs et les acteurs producteurs seront protégés.
Le vote de cette proposition de loi aidera M. le ministre dans ses démarches à Bruxelles. Le président de la République s'est d'ailleurs engagé lors de la Conférence environnementale de 2012 à prolonger le moratoire. Le groupe socialiste votera donc cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Jacques Mirassou . - Cette proposition de loi interdit la culture du maïs génétiquement modifié en France. Elle est identique au texte déposé ici même par M. Fauconnier. Le 14 mars 2014, M. le ministre a publié un arrêté allant dans le même sens.
M. Jean Bizet. - Illégal !
M. Jean-Jacques Mirassou. - Cette proposition de loi vient donner un cadre juridique à cette mesure. Elle conforte la position de la France en Europe, à quelques semaines des élections européennes.
Études contestées, majorités tellement qualifiées qu'elles sont disqualifiées (sourires), procédures complexes : la question des OGM fait débat en Europe. Entre obscurantisme et confiance aveugle dans la technique, il y a place pour l'esprit critique et le libre arbitre.
L'opinion, marquée par les affaires de l'amiante et de la vache folle, nous demande d'être vigilants. Nous voterons ce texte résolument. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Marie-Françoise Gaouyer . - Texte d'affichage, contraire au droit européen, tournant le dos à la recherche ? Non. Texte politique, oui. Lorsque les procédures dysfonctionnent, au point que l'on peut aller contre l'avis d'une majorité d'États et du Parlement européen, il est de notre responsabilité d'être fermes. On ne saurait se réfugier derrière un discours technico-juridique.
Un certain consensus a toujours existé en France sur les OGM. Cette proposition de loi vient d'ailleurs renforcer une mesure prise par le gouvernement Fillon.
Sur la recherche et l'innovation, le projet de loi d'avenir pour l'agriculture est clair : toutes les expérimentations d'OGM sont autorisées, à condition de faire l'objet de contrôles. Ce n'est pas le principe de précaution qui fait obstacle à la recherche, mais Monsanto, qui refuse que le MON810 soit utilisé à cette fin.
Ce maïs ravage les papillons et les abeilles. Sa culture est totalisante : son pollen se dissémine sans contrôle, on ne peut pas cultiver à proximité de façon biologique ou même conventionnelle. Impossible, dans ces conditions, de développer d'autres pratiques agricoles à proximité. En outre, les OGM renforcent la dépendance des agriculteurs vis-à-vis des industriels.
Nous n'avons rien à gagner à entrer dans la compétition internationale avec les mêmes armes que le Brésil ou les États-Unis.
Cette proposition de loi est un acte politique fort, qui servira de référence. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Stéphane Le Foll, ministre . - La France est le premier exportateur de semences au monde. Une société française, concurrente des semenciers américains, est en train de s'implanter dans toute l'Asie...
Les OGM ne font pas progresser les rendements. Quant à l'utilisation de pesticides, elle suit une courbe en J et baisse légèrement avant de remonter.
Nul ne conteste la nécessité de la recherche, y compris pour le développement de l'agro-écologie : le projet de loi d'avenir insiste sur ce point.
Nous souhaitons obtenir, sous présidence grecque, une résolution du Conseil. Nous plaidions à l'origine pour un système analogue à celui qui s'applique aux produits phytosanitaires ; faute d'avoir été suivis, nous demandons à présent que les autorités nationales puissent réévaluer les décisions, en fonction du rapport coût-bénéfice. Les États doivent aussi pouvoir renvoyer l'affaire devant la Cour en cas de litige. Les autorisations doivent pouvoir être réexaminées en faveurs d'éléments scientifiques nouveaux, et il doit être possible de revenir en arrière.
Je compte bien m'appuyer sur le HCB réformé. Je rappelle que le Conseil d'État vient de rejeter en référé une demande d'annulation du dernier arrêté.
Enfin, c'est bien pour faire face à l'urgence que nous avons fait le choix d'un texte distinct à ce sujet.
La discussion générale est close.
Discussion de l'article unique
ARTICLE UNIQUE
M. le président. - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Lasserre, Détraigne, Deneux, Capo-Canellas, Roche, J.L. Dupont, J. Boyer et Bockel, Mme Férat, M. Tandonnet, Mme Jouanno et MM. Namy et Merceron.
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les expérimentations de plein champ sous contrôle sont autorisées.
M. Jean-Jacques Lasserre. - Je m'en suis expliqué tout à l'heure. Il faut rassurer les chercheurs, sortir d'un débat manichéen et définir un cadre général.
M. Daniel Raoul, rapporteur. - Nous avons eu cette discussion en février. La proposition de loi n'interdit que la mise en culture à des fins commerciales. En outre, l'amendement est rédigé de telle sorte que les contrôles n'auraient plus lieu qu'a posteriori, contrairement à ce que prévoit le code de l'environnement. Avis défavorable.
M. Stéphane Le Foll, ministre. - Même avis.
À la demande du groupe UDI-UC, l'amendement n°1 rectifié est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°169 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 330 |
Pour l'adoption | 161 |
Contre | 169 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. Jean Bizet. - Cette proposition de loi n'entre pas dans le cadre juridique de l'interdiction prévue par le droit européen, et elle n'est pas conforme à notre Constitution. En outre, les semis ont déjà eu lieu. Pourquoi ne pas attendre la nouvelle législation européenne ? Le Premier ministre n'avait-il pas promis d'être plus vigilant sur la constitutionnalité des lois ?
J'ai quelques idées sur le fonctionnement du HCB. Il faudrait revenir à l'équilibre ancien. Bien entendu, je voterai contre ce texte.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Le débat est sociétal, environnemental et économique. Malgré vos arguties juridiques, monsieur Bizet, le Parlement est là pour exprimer la voix du peuple. Les Français sont échaudés par les scandales sanitaires à répétition.
Pour cette raison, même si je suis favorable au développement de la recherche, je souhaite que nous assumions nos responsabilités. En cas de doute, il faut appliquer le principe de précaution et renforcer notre cadre légal. C'est avec détermination que nous voterons cette proposition de loi.
Mme Chantal Jouanno. - Les positions au sein de l'UDI sont partagées. Les conditions n'ont pas changé depuis 2007-2008. L'intérêt économique du MON810 n'est pas avéré, tandis que nous évaluons mal ses conséquences sanitaires, et que son impact environnemental soit avéré.
Pour réduire l'importation de plantes OGM pour l'alimentation animale...
M. Jean Bizet. - 80 % de l'alimentation animale !
Mme Chantal Jouanno. - ... il faut développer en France la culture de protéagineuses et de légumineuses. Les agriculteurs ne doivent pas devenir les otages de semenciers.
M. Daniel Raoul, rapporteur. - Très bien !
M. Joël Labbé. - À l'unanimité, nous voterons ce texte. N'attendons aucune solution miracle mondiale. Les peuples européens, comme les lobbies, nous regardent. C'est avec fierté que j'affirme ma position et mon appartenance à la majorité présidentielle et gouvernementale.
À la demande du groupe UMP, l'article unique est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°170 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 319 |
Pour l'adoption | 172 |
Contre | 147 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, la proposition de loi est définitivement adoptée.
(Applaudissements à gauche ; Mme Chantal Jouanno applaudit aussi)
Organismes extraparlementaires (Nominations)
M. le président. - Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé une candidature pour le Conseil d'orientation des retraites, ainsi que pour le Conseil de surveillance du Fonds de réserve pour les retraites.
Par ailleurs, la commission du développement durable a proposé une candidature pour le Conseil national de la sécurité routière.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame M. Georges Labazée membre titulaire du Conseil d'orientation des retraites et membre suppléant du Conseil de surveillance du Fonds de réserve pour les retraites et Mme Esther Sittler membre du Conseil national de la sécurité routière.
La séance est suspendue à 18 h 10.
présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président
La séance reprend à 21 h 30.
Convention européenne contre les violences à l'égard des femmes
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l'égard des femmes et la violence domestique.
Discussion générale
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État auprès de la ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports . - Veuillez excuser Mme Vallaud-Belkacem, retenue pour l'instant.
Nous parlons d'un phénomène qui touche un tiers des femmes dans le monde, selon le rapport de l'OMS l'an dernier : les violences qui, toutes, sous toutes leurs formes, sont le fruit de représentations sexistes. En France, une femme sur six a subi des violences conjugales, et 148 femmes en sont mortes en 2012. Une sur dix également déclare avoir subi des rapports forcés, ou des tentatives de rapports forcés. Cela signifie que nous devons briser la loi du silence et baisser notre seuil de tolérance. Gestes déplacés, insultes sexistes, violences conjugales dans le voisinage... : ce qui est tristement banal n'en est pas moins choquant. Intimité ne doit plus rimer avec impunité, comme l'a dit Mme Vallaud-Belkacem au Conseil des ministres.
La convention d'Istanbul d'avril 2011 est un instrument contraignant précieux. La France en a été le premier signataire, elle veut en être la promotrice. Le seuil de dix ratifications a été franchi, la convention entrera en vigueur en août prochain. Ouverte à la signature de tous les États, elle représente, a dit l'ONU Femmes, la norme d'excellence. Elle est fondée sur la stratégie globale des trois « p » : prévenir, protéger et poursuivre.
La France a déjà adapté son droit pénal en introduisant dans la loi d'avril 2013 la sanction du mariage forcé et des mesures contre les mutilations sexuelles.
Cependant, la convention d'Istanbul ne s'arrête pas à des dispositions pénales. Elle propose une démarche globale, qui est soutenue au plus haut niveau de l'État. D'où le quatrième plan de lutte contre les violences faites aux femmes, doté d'un financement de 66 000 euros. Il comprend le renforcement des hébergements d'urgence, du numéro d'urgence, le soutien aux victimes et le suivi des auteurs de violences. Une mission interministérielle, créée en janvier 2013, recense les bonnes pratiques et oeuvre à la formation des professionnels.
La politique de la France, intégrée et globale, correspond donc à l'esprit de la convention d'Istanbul. Je remercie le Sénat et tout particulièrement Mme Garriaud-Maylam, rapporteur, et Mme Gonthier-Maurin, présidente de la délégation aux droits des femmes, pour leur soutien et leur engagement. (Applaudissements)
Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur de la commission des affaires étrangères . - Nous transposons, avec ce texte, la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l'égard des femmes et les violences domestiques, adoptée il y a trois ans. Les violences faites aux femmes, je les constate souvent lors de mes déplacements à l'étranger ; là aussi la coopération internationale est indispensable. Mais revenons au texte : la France l'a signé dès le 11 mai 2011. Nous plaidions pour une procédure simplifiée, pour aller plus vite, un autre choix a été fait. Ce qui est d'autant plus dommage qu'entre-temps, les violences faites aux femmes ont progressé, qu'elles soient physiques ou psychiques.
Depuis les années 1990, le Conseil de l'Europe se préoccupe de mieux combattre les violences faites aux femmes. Entre 2006 et 2008, il a mené une campagne pour les combattre, la task force chargée du suivi recommandant alors l'adoption d'un instrument juridique contraignant. En réponse, le comité des ministres a institué un comité ad hoc, le Cahvio, qui a élaboré un projet de convention finalement adopté par le comité des ministres le 7 avril 2011.
L'utilité de cette convention n'est plus à démontrer. L'enquête menée par l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne, auprès de 42 000 femmes, et publiée le 5 mars 2014, révèle une situation alarmante : un tiers des femmes victimes de violences depuis l'âge de 15 ans, un tiers des femmes victimes de violences durant leur enfance, 5 % des femmes violées et, c'est accablant, 67 % n'ont pas signalé à la police les violences qu'elles ont subies.
En France, nous ne disposons pas de données systématiques. La Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences (Miprof), créée en janvier 2013, doit combler cette lacune. Inspirons-nous des modèles étrangers. Nous devons faire courir le délai de prescription à partir de la déclaration de la victime pour une IVG forcée. Le Parlement devra s'y pencher.
Une femme sur dix, rappelait le ministre, est victime de violences. La convention du Conseil de l'Europe est un instrument régional novateur parce que contraignant - seule l'organisation des États américains et l'Union africaine en possédaient un - et parce que global, avec ses trois « p » : prévenir, protéger et poursuivre. Sur le deuxième point, j'insisterai sur la protection des témoins, y compris des enfants.
Au-delà de la réponse aux urgences, la France a encore des progrès à faire. Nous ne disposons pas d'un guichet unique, notre dispositif d'aide pour recouvrer une pension alimentaire dans les mariages mixtes, est insuffisant.
En conclusion, cette convention donnera un nouveau souffle aux politiques que la France mène depuis plusieurs années. Elle promeut une approche intégrée, que nous retrouvons dans la loi sur l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Elle aura des retentissements sur notre droit d'asile, en raison de ses articles 60 et 61 qui appellent à un examen sensible au genre des demandes d'asile. Nous devrons veiller à la conformité de la proposition de loi n°1856 relative à l'autorité parentale. Il reste du chemin à faire. En attendant, nous devons ratifier cette convention pour qu'elle entre en vigueur au plus vite. (Applaudissements)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes . - Adopter ce texte très attendu autorisant la ratification de la convention d'Istanbul en procédure simplifiée aurait été dommage ; ce débat sera utile, j'en suis sûre.
Je salue l'arrivée de Mme Vallaud-Belkacem.
La convention d'Istanbul est un texte complet s'attaquant au continuum des violences, des violences psychiques aux crimes dits d'honneur. Je note cependant une lacune : il y manque la prostitution. Nous y reviendrons lors de l'examen de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel.
Je me félicite, néanmoins, de la mention dans le préambule de la convention des violences sexuelles faites aux femmes lors des conflits armés - nous y avons consacré un rapport récemment. Les souffrances liées aux guerres doivent être traitées dans notre pays, de nombreuses femmes les ont connues avant d'achever leur parcours migratoire dans notre pays.
Les violences faites aux femmes découlent, il faut le marteler sans relâche, des inégalités entre hommes et femmes.
La convention insiste, avec raison, dans son article 14 sur la prévention dès le plus jeune âge ; au lycée, il est trop tard. La délégation aux droits des femmes travaille d'ailleurs depuis le début de l'année sur les stéréotypes véhiculés par les manuels scolaires. Les clichés sexistes enferment les jeunes filles dans des parcours de formation qui ne sont pas, loin s'en faut, des passeports pour le succès.
Autre point important de la convention, l'article 17-2. On sait les risques liés au contact avec des images violentes ou dégradantes qui, par exemple, banalisent le viol dans les jeux vidéo. Nous devons endiguer cette prolifération d'images non maîtrisées par des actions de prévention fermes.
Notre délégation sénatoriale ne peut que vous inviter à voter ce texte. (Applaudissements)
Mme Françoise Laborde . - Il est plus que jamais nécessaire d'harmoniser les politiques européennes de lutte contre les violences faites aux femmes. Le rapport de l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne, fondé sur une enquête auprès de 42 000 femmes, fait froid dans le dos : 33 % de femmes victimes de violences, 5 % de victimes de viol et, surtout, 67 % de femmes ne portant pas plainte - ce chiffre atteint 90 % en France.
Cette loi du silence signifie la double peine pour les victimes : la liberté de ces femmes est entravée : elles évitent certaines situations et certains lieux, de peur d'être agressées.
L'enquête révèle la diversité des formes de violence, qui n'épargnent aucun âge et se rencontrent dans la rue comme au sein du couple.
Enfin, toute la famille en pâtit, jusqu'aux enfants.
Je le rappelais dans mon récent rapport pour la délégation aux droits des femmes en présentant vingt préconisations - on les retrouve, pour la plupart, dans la loi sur l'égalité réelle entre hommes et femmes et dans la présente convention.
Briser la loi du silence, la honte pour les victimes et l'impuissance des autorités à poursuivre les auteurs des violences, c'est le but de ce texte qui comprend un catalogue de mesures en ligne avec la stratégie des trois « p ». Stratégie globale nécessaire car, comme le dit Gérard Lopez, formateur des services de police, « le cycle de la violence conjugale repose sur le déni, (...) c'est un long processus qui déstructure la personne ».
Cette convention est la plus contraignante jamais proposée aux États membres en la matière : c'est un instrument ambitieux, intégré et transversal.
La France s'honorerait à la ratifier avant les élections européennes, nous donnerions ainsi du sens à notre maison commune qu'est l'Union. Les violences conjugales ne sont pas à traiter comme de simples violences : si elles doivent être punies, il faut également aider les femmes à se reconstruire.
Vous ne serez pas surpris que le groupe RDSE du Sénat vote pour. (Applaudissements)
Mme Esther Benbassa . - La convention d'Istanbul d'avril 2011 représente le premier instrument complet, intégré et contraignant de lutte contre les violences faites aux femmes. La France s'honorerait, après l'Espagne, à être le dixième État à ratifier ce texte et, par là-même, à autoriser son entrée en vigueur. Trop souvent, les femmes violentées sont abandonnées par le corps médical insuffisamment formé au dépistage des troubles psycho-traumatiques. Il faudrait développer une approche empathique et bienveillante pour éviter que ces troubles ne deviennent chroniques.
Alors que 35 % des femmes qui se présentent aux urgences présentent des symptômes de violences conjugales, seules 2 % sont identifiées... Je vous invite à méditer l'ouvrage de Muriel Salmona Le livre noir des violences sexuelles.
À quelques jours des élections européennes, nous montrerions que l'Europe est celle de tous les citoyens. Le groupe EELV votera ce texte.
Pour finir, un témoignage : « On nous fait taire très rapidement, mais nous parlons quand même, nous parlons avec notre corps ; on ne se sent plus appartenir à notre espèce, l'espèce humaine ; on nous juge, nous nous terrons dans nos maisons. Nous ne vivons pas, nous survivons avec nos douleurs dans une solitude que vous n'imaginez même pas. Nos droits doivent être réels, et non pas de simples mots couchés sur le papier ». À nous, chers collègues, de les entendre. (Applaudissements)
Mme Muguette Dini . - Je dois l'avouer, je n'avais pas lu, il y a peu, l'intégralité de la convention d'Istanbul. Quelle erreur ! Les 81 articles sont riches. Je vous en épargnerai le détail pour insister sur le fait que les violences faites aux femmes touchent tous les États. Je vous renvoie au rapport de l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne de 2014.
Deuxième observation, la lutte contre ces violences est européenne et internationale. Voyez les travaux du Conseil de l'Europe et de l'ONU.
Troisièmement, la convention est intégrée dans notre législation. Cependant, quatrièmement, notre législation doit évoluer. Avec l'association Stop aux violences sexuelles, j'ai organisé des assises au Sénat pour élaborer une stratégie d'éradication. Cette dernière passe par une modification du délai de prescription dans notre législation.
Il ne suffit pas de libérer la parole des victimes, il faut la leur donner. C'est d'autant plus nécessaire quand les faits sont survenus durant l'enfance. D'où ma proposition de loi, conforme à l'article 58 de la convention, qui ferait démarrer le délai de prescription au dépôt de la plainte.
Mes chers collègues, je vous invite à la cohérence : soutenez ma proposition de loi comme vous adopterez, je n'en doute pas, ce projet de loi. (Applaudissements)
Mme Laurence Cohen . - Je suis heureuse que le Sénat, contrairement à l'Assemblée nationale, puisse débattre de ce texte important, qui doit bientôt entrer en vigueur suite à sa ratification par 11 États.
Les chiffres sont sans appel : les violences faites aux femmes sont un phénomène de masse reflétant la perpétuation de la domination masculine dans notre société. En deux ans, 300 000 femmes ont été victimes de violences sexuelles, une femme sur sept a fait l'objet d'insultes sexistes, une sur vingt de propos déplacés. Les faits sont trop souvent banalisés.
Cette convention exprime une prise de conscience et une volonté commune de lutte contre les violences : c'est le premier instrument juridique contraignant à cet effet. Il s'appliquera aux 47 pays membres et au-delà. À la veille des élections européennes, ces sujets doivent être présents dans les différents programmes, alors que les forces rétrogrades sont à l'oeuvre, qui tentent d'imposer leur vision moraliste et traditionnelle de la société. Elles manifestent contre le mariage pour tous, l'IVG.
En Espagne et ailleurs, on cherche à remettre en question le droit à l'avortement.
M. Roland Courteau. - Eh oui !
Mme Laurence Cohen. - En France même, ce droit reste fragile, en raison des manoeuvres d'obstruction d'extrémistes et de la disette budgétaire : 130 centres ont été fermés en dix ans, je le rappelais lors de l'examen de ma proposition de loi visant à imposer un moratoire sur la fermeture d'établissements de santé, je crains que cela ne s'aggrave. Les femmes qui peinent à obtenir un rendez-vous risquent de dépasser le délai légal. Il est donc regrettable que l'article 39 de la convention n'évoque pas les attaques contre l'IVG.
Nous ne comprenons pas non plus que ce texte fasse l'impasse sur la prostitution, cette violence extrême.
En France, 85 % des prostitués de rue sont des femmes, dont 90 % d'étrangères : c'est dire la mondialisation de ce fléau. Il aurait été bon que les Européens s'accordent contre la traite des êtres humains et le proxénétisme.
Les femmes sont aussi victimes de la violence économique : je vous renvoie au rapport - hélas rejeté par le Parlement européen - de l'eurodéputée portugaise Inês Zuber.
C'est l'effet de l'austérité galopante, que nous avions dénoncé en rejetant l'ANI.
Malgré ces manques, nous soutenons évidemment cette convention. Le groupe CRC a d'ailleurs déposé une proposition de loi sur le même sujet. Hélas, le format des niches parlementaires ne permettra pas de l'examiner. Une intervention du Gouvernement serait bienvenue.
La France se doit de combattre toutes les formes de violences faites aux femmes. Nous soutenons une clause de non-régression, ainsi qu'un débat sur la clause de l'Européenne la plus favorisée voulue par Gisèle Halimi, tendant à aligner les législations vers le haut. L'Europe sans violence sera un pas supplémentaire vers l'égalité réelle entre femmes et hommes. (Applaudissements)
Mme Maryvonne Blondin . - Représentante du Sénat à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe avec Mme Bourzai, elle-même membre du réseau parlementaire pour le droit des femmes à vivre sans violence, je suis très satisfaite de voir enfin ce texte arriver devant nous. Il complète l'arsenal dont la France dispose déjà, mais à une échelle paneuropéenne. Nous aurions pu être le dixième pays à la ratifier et permettre ainsi son entrée en vigueur si le calendrier législatif n'en avait pas décidé autrement.
La convention d'Istanbul est le premier instrument juridique contraignant, en Europe élargie, visant à protéger les femmes contre toutes les formes de violences. Pour la première fois, une convention énonce clairement que la violence à l'égard des femmes et la violence domestique ne peuvent plus être considérées comme des questions privées. Elle est l'aboutissement d'un long travail au sein du Conseil de l'Europe ; à ce jour 32 pays sur 47 l'ont signée.
Sur la prostitution, nous avons voté la transposition d'une directive européenne relative à la lutte contre la traite des êtres humains et le mariage forcé. Le Conseil de l'Europe a voté en avril dernier un rapport sur le sujet. Il y eut aussi le traité de Varsovie.
Depuis 2006, le réseau parlementaire pour le droit des femmes à vivre sans violence, qui compte 51 membres, est à l'oeuvre avec détermination. Intimité ne doit pas rimer avec impunité - ce n'est malheureusement pas toujours le cas. Une enquête de l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne confirme que la violence à l'égard des femmes est une violence à grande échelle : 33 % des femmes interrogées ont connu des violences physiques ou sexuelles dès l'âge de 15 ans ; 67 % victimes de leur conjoint disent ne pas l'avoir signalé.
Cette convention, novatrice, établit des normes contraignantes et rejoint sur bien des points les politiques menées en France. Sans revenir sur les trois piliers, je soulignerai seulement que les États devront veiller à ce que la culture, les traditions ou l'honneur ne soient pas considérés comme des justifications aux violences.
Des mécanismes de suivi sont prévus : observatoires nationaux, collecte de données. La France applique d'ores et déjà plusieurs des mesures prévues. Le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes va dans le même sens et tous les ministres sont impliqués dans une feuille de route pour l'égalité dans leur champ de compétence.
Des experts indépendants seront chargés d'évaluer le respect des normes par les États.
Le groupe socialiste votera ce texte avec conviction. (Applaudissements à gauche)
Mme Christiane Kammermann . - Je rends hommage à Mme Garriaud-Maylam, qui a accompli un formidable travail qui dépasse ce projet de loi de ratification ; elle défend toujours avec pugnacité les droits des femmes, aux niveaux national et international, et s'implique dans la lutte contre la traite des êtres humains. Son intervention en février à la Conférence Marmara à Istanbul témoigne de son engagement.
Cette convention est une étape importante. Elle a pour vocation d'éradiquer à terme les violences à l'égard des femmes au-delà des frontières de l'Europe, puisqu'elle pourra être ratifiée par des États extérieurs au continent.
Le chemin reste long. Le mois dernier, au Nigéria, des lycéennes de 12 à 15 ans ont été kidnappées pour semble-t-il être vendues 10 euros. Double perversité, puisque les auteurs organisés et armés de ces crimes, la secte Boko Haram, cherchent à empêcher leur émancipation et les priver d'un avenir dont elles seraient maîtresses.
La situation n'est pas meilleure au Pakistan, où la radicalisation religieuse progresse et rend de plus en plus difficile l'accès à l'école pour les jeunes filles. Selon l'Unicef, entre 2007 et 2011, 61 % des femmes entre 15 et 24 ans étaient alphabétisées. Mais les jeunes filles désertent les écoles à l'issue du primaire. Selon le gouvernement pakistanais, 26 % des femmes seulement savent lire et écrire - selon d'autres données, cette proportion est de 12 %, contre 26 % dans la population générale. Or la liberté des femmes est indissociable de l'éducation ; les priver du savoir est la première des violences qui leur sont faites.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation aux droits des femmes. - Absolument !
Mme Christiane Kammermann. - En Inde, la justice a condamné fermement les auteurs d'un viol collectif. Les victimes sont de moins en moins considérées comme des parias. Preuve qu'un changement sociétal est à l'oeuvre.
Que la France use de son influence pour faire ratifier cette convention par le plus grand nombre de pays. Trente-deux pays l'ont signée.
Ce texte n'est pas une énième déclaration, mais un instrument juridique contraignant, qui doit s'accompagner d'une modification du droit national. Sur ce point, la France n'a pas à rougir (M. Roland Courteau le confirme) puisque des mesures existent déjà en droit interne ou sont prévues par le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Nous en sommes au quatrième plan national contre les violences faites aux femmes depuis 2004, du fait de tous les gouvernements. Il y a des sujets où la France est en avance !
Le groupe UMP soutiendra pleinement le projet de ratification.
Revenons sur quelques points. La stratégie des trois « p » est très pragmatique. Il est également judicieux de prendre en compte les témoins, et notamment les enfants - qui, d'une manière générale, sont de plus en plus exposés aux violences faites aux femmes. Foin des polémiques sur le genre ou les stéréotypes des jouets, travaillons plutôt sur l'image de la femme dans la publicité, les clips ou les jeux vidéo.
Pour être crédible la France doit être exemplaire, en mettant en oeuvre une politique pénale plus adaptée. Les femmes victimes de violences ne peuvent se satisfaire de voir leurs bourreaux condamnés à des peines avec sursis.
Ce combat doit s'inscrire dans un combat global contre toute forme de violence faite à l'humanité. Nous formulons le voeu que d'autres pays nous rejoignent rapidement. (Applaudissements)
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports . - Un clin d'oeil d'abord : en sa qualité de coprince d'Andorre, François Hollande a contribué à la ratification par un dixième État de la convention d'Istanbul...(Sourires) J'aurais aimé, moi aussi, que la ratification de la convention intervienne plus vite.
Le fait que notre débat se tienne ce soir est loin d'être anodin, alors que nous venons de recevoir des nouvelles alarmantes des jeunes femmes enlevées au Nigéria. Vente des femmes et mariages forcés existent encore dans certaines parties du monde... C'est aussi aujourd'hui 5 mai que la justice militaire congolaise a rendu son jugement contre les 39 soldats mis en cause pour viol massif, en novembre 2012 ; 36 ont été acquittés. En quelques jours, 150 femmes avaient été violées. Soyons conscients de notre chance d'appartenir au continent européen qui a décidé, par cette convention, d'agir résolument contre les violences faites aux femmes.
Je vous confirme la mobilisation du Gouvernement. L'enquête Virage a été lancée, qui porte sur un échantillon de 17 000 hommes et femmes ; elle nous permettra de disposer de données fiables sur la réalité et la diversité des violences, que la mission interministérielle rendra publiques.
La réserve émise par la France sur le délai de prescription était nécessaire pour ne pas allonger le délai applicable à l'avortement forcé. Un programme national de formation des personnels médicaux et paramédicaux a été lancé en novembre dernier. Nous travaillons avec Gynécologie sans frontières, grâce à qui un manifeste contre les violences faites aux femmes a été signé par des représentants de toutes les spécialités. Mme Touraine et moi-même élaborons un protocole sanitaire de prise en charge des femmes victimes de violences.
Merci du travail accompli sur un texte long dans lequel il faut se plonger ; mais quand on le fait, ça fait du bien... (Applaudissements)
La discussion générale est close.
Discussion de l'article unique
ARTICLE UNIQUE
M. Roland Courteau . - Ce sujet me préoccupe au plus haut point depuis de nombreuses années. Comment admettre qu'au XXIe siècle, il faille voter de tels textes pour empêcher que des femmes soient violentées ? Les chiffres prouvent que ces textes sont plus que nécessaires. La France a déjà adapté sa législation. La loi contre les violences au sein du couple, qui m'est chère, a été suivie de la loi de 2010 et de la loi sur le harcèlement sexuel, puis du projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Mais il est encore des États où l'impunité perdure.
Notre pays s'engage à ce sujet sur la scène internationale, et je me félicite que la convention d'Istanbul reprenne de nombreux points de notre législation. Ce texte repose sur la stratégie globale des trois « p », je n'y reviens pas. La France est en avance, mais dans d'autres pays qui n'ont pas encore pris la mesure de ce fléau, les femmes ne se sentiront plus isolées et auront désormais les moyens de se battre pour leur dignité. Oui, intimité ne doit plus rimer avec impunité.
L'article unique est adopté.
Le projet de loi est définitivement adopté.
(Applaudissements)
Prochaine séance demain, mardi 6 mai 2014, à 9 h 30.
La séance est levée à 23 h 20.
Jean-Luc Dealberto
Directeur des comptes rendus analytiques
Ordre du jour du mardi 6 mai 2014
Séance publique
À 9 h 30
Présidence : Mme Christiane Demontès, vice-présidente
Secrétaires : M. Alain Dufaut - M. Hubert Falco
1. Questions orales
À 14 h 30 et le soir
Présidence : M. Charles Guené, vice-président M. Jean-Léonce Dupont, vice-président
2. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à renforcer la responsabilité des maîtres d'ouvrage et des donneurs d'ordre dans le cadre de la sous-traitance et à lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale (n° 397, 2013-2014)
Rapport de Mme Anne Emery-Dumas, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 487, 2013-2014)
Texte de la commission (n° 488, 2013-2014)
3. Suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, tendant au développement, à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires (n° 396, 2013-2014)
Rapport de M. Jean-Pierre Godefroy, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 458, 2013-2014)
Texte de la commission (n° 459, 2013-2014)
Analyse des scrutins publics
Scrutin n° 169 sur l'amendement n° 1 rectifié de M. Jean-Jacques Lasserre et plusieurs de ses collègues, à l'article unique de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié
Résultat du scrutin
Nombre de votants :340
Suffrages exprimés :330
Pour :161
Contre :169
Le Sénat n'a pas adopté.
Analyse par groupes politiques
Groupe UMP (130)
Pour : 129
Abstention : 1 - Mme Fabienne Keller
Groupe socialiste (129)
Contre : 127
N'ont pas pris part au vote : 2 - Mme Laurence Rossignol, membre du Gouvernement, M. André Vallini, membre du Gouvernement
Groupe UDI-UC (32)
Pour : 26
Contre : 2 - Mme Sylvie Goy-Chavent, M. Pierre Jarlier
Abstention : 1 - M. Jean-Paul Amoudry
N'ont pas pris part au vote : 3 - Mmes Nathalie Goulet, Jacqueline Gourault, M. Jean-Jacques Pignard
Groupe CRC (20)
Contre : 20
Groupe du RDSE (19)
Contre : 10
Abstentions : 8 - MM. Nicolas Alfonsi, Gilbert Barbier, Jean-Pierre Chevènement, Yvon Collin, Mme Françoise Laborde, MM. Jacques Mézard, Jean-Claude Requier, François Vendasi
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Anne-Marie Escoffier
Groupe écologiste (10)
Contre : 10
Sénateurs non inscrits (6)
Pour : 6
Scrutin n° 170 sur l'ensemble de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié
Résultat du scrutin
Nombre de votants :343
Suffrages exprimés :319
Pour :172
Contre :147
Le Sénat a adopté.
Analyse par groupes politiques
Groupe UMP (130)
Pour : 1 - M. François Grosdidier
Contre : 128
Abstention : 1 - Mme Fabienne Keller
Groupe socialiste (129)
Pour : 127
N'ont pas pris part au vote : 2 - Mme Laurence Rossignol, membre du Gouvernement, M. André Vallini, membre du Gouvernement
Groupe UDI-UC (32)
Pour : 4 - M. Vincent Capo-Canellas, Mme Nathalie Goulet, M. Pierre Jarlier, Mme Chantal Jouanno
Contre : 8 - MM. Jean-Marie Bockel, Vincent Delahaye, Marcel Deneux, Jean-Léonce Dupont, Mme Jacqueline Gourault, MM. Hervé Maurey, Gérard Roche, Henri Tandonnet
Abstentions : 20
Groupe CRC (20)
Pour : 20
Groupe du RDSE (19)
Pour : 10 - MM. Jean-Michel Baylet, Alain Bertrand, Christian Bourquin, Pierre-Yves Collombat, Philippe Esnol, François Fortassin, Robert Hue, Jean-Pierre Plancade, Robert Tropeano, Raymond Vall
Contre : 5 - MM. Nicolas Alfonsi, Gilbert Barbier, Jean-Pierre Chevènement, Jacques Mézard, Jean-Claude Requier
Abstentions : 3 - M. Yvon Collin, Mme Françoise Laborde, M. François Vendasi
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Anne-Marie Escoffier
Groupe écologiste (10)
Pour : 10
Sénateurs non inscrits (6)
Contre : 6