Retraites (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS APRÈS L'ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°134, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au I, le taux : « 4,5 % » est remplacé par le taux : « 12 % » ;

2° À l'avant-dernier alinéa du II, le taux : « 2,75 % » est remplacé par le taux : » 10,25 % ».

M. Michel Le Scouarnec.  - Certains qualifient notre opposition d'arrière-garde... (On s'en défend à droite)

M. Jean Desessard.  - De jeune garde !

M. Michel Le Scouarnec.  - ... et nous reprochent de toujours vouloir dépenser davantage. Nous persistons à nous intéresser à une mesure qui n'est guère tendance, semble-t-il, la taxation des revenus financiers. Nous portons le taux du prélèvement social de 4,5 à 12 % sur les revenus de capitaux mobiliers et les plus-values, gains ou profits, en particulier ceux réalisés sur les marchés financiers. Ce ne serait que justice. Cet amendement contribuera à inverser la tendance régressive et antisociale au creusement des inégalités.

La gauche reprend l'antienne de la compétitivité et de la baisse des charges, vieille lune du grand patronat qui n'a de cesse de rogner les acquis sociaux au nom de la mondialisation et d'une déréglementation généralisée.

M. Philippe Bas.  - C'est le programme du Front national ! (Huées sur les bancs CRC)

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Un peu de respect !

M. Michel Le Scouarnec.  - Qu'on ne s'étonne pas après que je dépasse un peu mon temps de parole... (Sourires) Les allégements de charges n'ont pas entraîné la hausse des salaires ni de créations massives d'emplois, mais bien une augmentation vertigineuse des sommes distribuées aux actionnaires.

Il faut agir contre la fracture sociale. La solidarité est une valeur essentielle du système par répartition. Il faut inverser la tendance à favoriser toujours les produits financiers...

M. le président.  - Veuillez conclure !

M. Michel Le Scouarnec.  - Nos propositions, justes socialement et efficaces économiquement, feront sortir notre pays de l'ornière dans laquelle s'enfonce notre société, qui brise l'espoir de notre jeunesse et de notre peuple. (Applaudissements sur les bancs CRC ; on applaudit aussi à droite)

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis défavorable. (On fait mine de s'en désoler à droite) Vous porteriez à 72 % le taux marginal maximal d'imposition du patrimoine, contre 57 % pour l'impôt sur le revenu, ce qui pourrait être sanctionné par le Conseil constitutionnel pour méconnaissance du principe d'égalité.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis. (Mêmes mouvements)

L'amendement n°134 n'est pas adopté.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - La droite a voté contre, évidemment...

M. le président.  - Amendement n°262, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa du I de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La période de référence de six mois mentionnée au premier alinéa augmente de deux ans pendant 12,5 ans à compter du 1er janvier 2014. »

Mme Catherine Procaccia.  - La période de référence de six mois retenue pour les fonctionnaires est devenue le marqueur d'un sentiment d'injustice. Nous proposons son alignement progressif sur celle qui s?applique aux salariés du privé. je sais qu'on m'opposera la question des primes ; mieux vaudrait les intégrer que laisser cohabiter les deux systèmes.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - C'est une obsession ! Vous n'avez cessé de le demander sans jamais le faire. (Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales, renchérit ; exclamations à droite)

Pour les fonctionnaires, les primes et indemnités ne sont pas prises en compte. La commission Moreau a montré que si les périodes de référence différaient, les taux de remplacement médians dans le public et le privé étaient proches : pour la génération née en 1942, par exemple, ils sont respectivement de 75 % et 74,5 %. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis. Ce sujet crée des crispations inutiles. L'important, ce n'est pas la règle de calcul, mais la situation qui en résulte. Les taux de remplacement sont en effet très proches.

M. Philippe Bas.  - Ce n'est pas vrai pour tous !

M. Gérard Longuet.  - L'argumentation de la rapporteure et de la ministre est superficielle. Vous citez la commission Moreau, qui était uniquement composée de hauts fonctionnaires compétents... (Exclamations à gauche) S'il n'y a pas de problème, faisons disparaître ce qui n'est selon vous qu'une vieille lune - mais cela reste à démontrer.

Notre idée est simple : il importe de rapprocher les salariés qui ont un employeur, que celui-ci soit public ou privé. Seules vos troupes les plus fidèles croient que les régimes sont identiques... Les situations des fonctionnaires varient selon les ministères. À Bercy, les primes sont importantes, ce qui n'est pas anormal si on veut éviter l'évaporation des talents vers le privé - on sait que les compétences des fonctionnaires du fisc sont particulièrement prisées. Le calcul fondé sur les six derniers mois permet aux fonctionnaires de percevoir des retraites convenables. L'égalité de traitement est peut-être la règle, mais ce n'est pas le sentiment des Français. Et vous créez apparemment, dans un autre article, un nouvel avantage pour les fonctionnaires. Jouez cartes sur table ! L'État s'arrange avec le statut des fonctionnaires, ce qui place ces derniers en position d'accusés alors que ce ne devrait pas être le cas. (Applaudissements à droite)

Mme Sylvie Goy-Chavent.  - Très bien.

Mme Catherine Génisson.  - C'est vous qui les accusez !

M. Philippe Bas.  - C'est un problème de cohésion sociale. Supposons que le Gouvernement parvienne à nous convaincre que le taux de remplacement est toujours le même entre un fonctionnaire et un salarié du privé : pourquoi alors ne pas faire la clarté, au lieu de laisser se diffuser ce venin toxique ? (Exclamations sur les bancs socialistes)

Mme Catherine Génisson.  - C'est vous qui l'instillez !

M. Philippe Bas.  - Il devrait être facile, si le taux de remplacement est le même, d'appliquer les mêmes règles et les mêmes procédures... Chaque Français aurait le sentiment de la justice.

Mais il y a des vaches sacrées, le système paramétrique hier, les fonctionnaires toujours... Si l'État employeur avait des difficultés à recruter, il ne serait pas anormal, à l'instar des grandes entreprises, qu'il offrît des avantages. Mais cela ne semble pas être le cas, se présentent aux concours administratifs des jeunes gens surqualifiés. Il n'y a donc pas de nécessité de les protéger pour l'avenir par des éléments de statuts devenus, si l'on vous suit, inutiles.

Il y a de l'excès, presque de l'abus à raisonner en moyenne. Pour ceux des agents de la fonction publique qui n'ont pas de prime importante, le taux de remplacement est supérieur à celui du secteur privé. Il y a quand même des mesures de justice à prendre qui amélioreront l'acceptabilité des règles du jeu, en cette période si douloureuse d'envolée du chômage depuis un an. Ne laissons pas perdurer ce sentiment d'injustice qui contribue au discrédit de la parole publique et à la montée des extrémismes.

Mme Marie-France Beaufils.  - Affirmations péremptoires... Que démontrez-vous ? Je participe aux réunions du COR où sont représentés les syndicats, le patronat, le secteur public et le secteur privé dans leur diversité. Les chiffres qui y sont établis sont très clairs et la rapporteure a raison de les rappeler : les taux de remplacement sont similaires.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Demandez à Mme Debré, qui est membre du COR...

Mme Marie-France Beaufils.  - Dans le privé, il y a beaucoup de carrières incomplètes. S'il y a inégalité, c'est le problème des entreprises et non pas celui de la fonction publique. Il faut poser les bonnes questions !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Absolument !

Mme Marie-France Beaufils.  - Vous voulez frapper la fonction publique sans améliorer en rien la situation du privé...

Monsieur Longuet, vous évoquez une minorité, les fonctionnaires d'État ; la grande majorité des fonctionnaires perçoit des salaires proches du smic. Et le blocage du point d'indice n'est pas sans incidence sur les retraites. Votre analyse manque de rigueur. (Applaudissements sur les bancs socialistes ; protestations à droite) C'est votre discours qui alimente le Front national ! (Applaudissements à gauche)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - S'il y avait un front uni public-privé, vos réformes ne seraient pas passées, d'où votre dénonciation de la situation des fonctionnaires et votre volonté d'opposer les Français entre eux. Notre société refuse le nivellement par le bas. La fonction publique est un verrou anti-dumping. Vous divisez les salariés comme vous avez divisé les Français ! (Protestations à droite)

M. Philippe Bas.  - Hors sujet !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. - C'est vous qui êtes hors sujet !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - La fonction publique d'État a majoritairement des cadres A ; les fonctionnaires territoriaux et les fonctionnaires hospitaliers, en revanche, ont en majorité des bas salaires, leurs retraites sont inférieures à celles du privé. Comparez ce qui est comparable. Le COR le dit, il n'y a pas de distorsion d'ensemble. Votre propagande tente d'opposer les salariés entre eux, de les rendre jaloux, pour empêcher une autre répartition des richesses et faire progresser les thèses libérales, individualisation, fragilisation des contrats, dispositions hors statut ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Catherine Procaccia.  - Je suis fière de porter avec constance dans cette assemblée la voix des salariés du privé, dont je suis, (exclamations sur les bancs CRC) qui ressentent l'injustice de la situation. Je l'ai fait avec le gouvernement précédent, je continuerai à le faire, quel que soit le gouvernement ! (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Sylvie Goy-Chavent.  - La continuité, c'est bien !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Le Gouvernement défend l'ensemble des salariés et des retraités, le public comme le privé. On peut défendre les salariés du privé sans s'attaquer aux salariés du public.

M. Bas se pose volontiers en donneur de leçons. (Protestations à droite) Il n'y a que pour les cadres du secteur public que le taux de remplacement apparaît plus favorable que dans le secteur privé, en raison de la part des primes, relativement importante. Le rapport Moreau, présente des données très précises et très complètes, catégorie socio-professionnelle par catégorie socio-professionnelle, hommes-femmes. Il suffit de le consulter. Il n'y a pas d'avantage au secteur public, en dehors de la catégorie que j'ai citée pour les raisons que j'ai dites.

L'amendement n°262 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°263, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 2° de l'article L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Le taux de cotisation, à la charge des agents visés à l'article L. 2 du présent code et mentionné au 2°, suit la même évolution que le taux de cotisations à la charge des assurés sociaux relevant de la Caisse nationale d'assurance vieillesse. »

M. Gérard Longuet.  - Cet amendement d'appel a pour objet de clarifier les intentions du Gouvernement.

Selon plusieurs annonces gouvernementales, la hausse de cotisations de 0,3 point que subiront tous les salariés devrait ne pas s'appliquer aux fonctionnaires au même rythme qu'aux salariés du privé. J'aimerais en avoir le coeur net.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - En effet, la hausse de 0,3 % des cotisations dans la fonction publique est étalée différemment pour tenir compte des augmentations décidées par les réformes précédentes, mais elle est la même que pour les salariés du privé. Les fonctionnaires en 2020 auront vu leurs cotisations augmenter de trois points, soit de 40 %. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Gérard Longuet.  - Merci pour la franchise de votre réponse, madame la rapporteure, qui met Mme la ministre en situation un peu difficile... Effectivement, nous avons, en 2008 et 2010, augmenté le taux de cotisation des fonctionnaires pour les rapprocher de celui des salariés du privé, en vertu de la convergence chère à Mme Procaccia. Je rends hommage à sa persévérance, ainsi qu'à l'expérience de M. Bas, qui parle avec toute l'autorité d'une maison, madame la ministre, que vous connaissez bien...

Je constate que votre opposition d'hier ne vous a pas empêchée de ne pas revenir sur des mesures que vous qualifiiez de « scélérates » et dont votre propre réforme montre la pertinence. Seulement, encore une minute, monsieur le bourreau... Votre tropisme vous conduit à créer un micro-avantage pour les fonctionnaires... Qui ne sont pas des privilégiés, j'en conviens, mais l'effet est parfois disproportionné avec le fait générateur. (Applaudissements à droite)

L'amendement n°263 n'est pas adopté.

M. Jean Desessard.  - La gauche unie a voté contre ! (Marques d'ironie à droite)

M. Alain Gournac.  - C'est rare !

M. le président.  - Amendement n°132, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement, un rapport évaluant les conséquences financières pour les comptes publics et les avantages pour les assurés sociaux, d'une revalorisation des pensions servies aux personnes en situation de handicap.

Mme Isabelle Pasquet.  - Notre système de retraite est injuste et ne corrige pas les inégalités qui touchent les salariés en situation de handicap, dont le départ en retraite ne se solde par aucune compensation. Les associations sont usées par les sempiternelles promesses non tenues. Quand pourrons-nous proposer la revalorisation de leurs pensions ? L'article 40 nous l'interdit. La gauche a toujours critiqué ce frein législatif. Je regrette que la réforme constitutionnelle n'en ait pas proposé l'abrogation.

Nous demandons un rapport pour nous éclairer sur le nécessaire rattrapage des retraites des personnes handicapées.

M. Alain Gournac.  - Très bien ! On votera pour !

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Défavorable.

M. Alain Gournac.  - Non !

M. Philippe Bas.  - Incompréhensible.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Non sur le fond, mais sur la forme. Ne multiplions par les rapports, il y a déjà celui du COR.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Ce projet de loi comporte des avancées significatives en faveur des personnes handicapées, notamment des mesures en faveur de celles qui travaillent dans les centres d'aide par le travail.

M. Philippe Bas.  - Le rapport Debré-Campion sur l'application de la grande loi voulue par le président Chirac et vous-même, monsieur le président, pour les personnes handicapées, a montré un progrès gigantesque de la scolarisation, une amélioration importante des conditions d'accès au droit, des progrès réels de l'accessibilité, mais aussi des résultats décevants sur l'accès à l'emploi, donc sur l'acquisition des droits à la retraite. Je suis heureux que ce projet de loi prévoie des mesures favorables aux personnes handicapées, moins que l'on refuse de braquer le projecteur sur leur situation. Un tel rapport ne réduit en rien les prérogatives du COR. Je m'étonne donc que l'on puisse hésiter à adopter cet amendement qui ne comporte aucun inconvénient. (Applaudissements sur plusieurs bancs à droite)

L'amendement n°132 est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements au centre et à droite)

M. le président.  - Amendement n°133, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le bénéfice, pour les assurés, d'un retour à la revalorisation des pensions par rapport à l'évolution des salaires. Le rapport évalue en outre l'impact qu'aurait une telle mesure sur la consommation des ménages concernés.

Mme Laurence Cohen.  - Une nouvelle fois, pour jouer notre rôle, nous sommes contraints par le scélérat article 40 de nous contenter d'une demande de rapport. Ce gouvernement, comme le précédent, considère la baisse des charges des entreprises comme la clé de notre compétitivité. Or nous savons bien que la source de nos maux est à chercher dans le déséquilibre entre les revenus du capital et du travail.

Acceptez de présenter un rapport sur un retour à l'indexation des pensions sur les salaires, pour irriguer notre économie, et jugez cet amendement sur le fond plutôt que sur la forme.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Le COR et le comité de suivi sont compétents sur le mode d'indexation des pensions. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Gérard Longuet.  - Le gouvernement Jospin, où siégeaient nos collègues communistes, n'a pas augmenté de 11,4 % les retraites, alors que le passage aux 35 heures revenait à augmenter d'autant les salaires. À tout péché miséricorde... Sur cet amendement, suivez la sagesse du Gouvernement et du rapporteur !

L'amendement n°133 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°261, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement un rapport, dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, sur la création d'une caisse de retraite pour la fonction publique d'État, chargée de recouvrer les cotisations et d'assurer le versement des pensions des agents de l'État.

M. Dominique de Legge.  - Rien n'est dit ici du déficit des régimes de retraite de la fonction publique. La création d'une caisse spécifique serait un gage d'équilibre.

Souvenons-nous que la création d'un emploi public représente un coût pour la collectivité jusqu'au terme de la retraite. Cette caisse rendrait possible une gestion prévisionnelle des effectifs et de la dépense.

Enfin, cela irait dans le sens de la sincérité budgétaire.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Dans la loi de 2010, la précédente majorité avait prévu la remise d'un tel rapport avant le 30 septembre 2011. Celui-ci n'a jamais été rendu.

M. Roland Courteau.  - Tiens donc !

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Il n'est pas sûr que la création d'une caisse change quoi que ce soit à la situation. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Philippe Bas.  - Nous sommes déçus que ce projet de loi ne prévoie rien pour réduire le déficit des régimes publics de retraite. Au moins, facilitez la tâche de vos successeurs, comme Michel Rocard l'avait fait ! Instaurez un peu de transparence et de lisibilité. En créant une caisse, on ferait partager aux représentants des fonctionnaires la responsabilité des décisions à prendre. Pourquoi s'y refuser ? Cela n'enlèverait rien à personne.

M. Claude Domeizel.  - Nous voterons contre. Les fonctions publiques territoriale et hospitalière ont d'ores et déjà un régime spécifique. Les fonctionnaires d'État, eux, n'ont pas de régime à proprement parler. Leurs retraites sont « couchées sur le grand livre de la dette publique ». Nul besoin d'un rapport. Déposez donc une proposition de loi ! Que n'avez-vous créé cette caisse quand vous étiez au pouvoir ?

M. Philippe Bas.  - Nous avons fait d'autres choses.

M. Gérard Longuet.  - Oui, les fonctionnaires de l'État bénéficient de la pérennité de l'État. Leurs droits à pension sont inscrits en livre de la dette que l'on conçoit comme un beau et grand volume recouvert de moleskine noire, retraçant les comptes en débit et en crédit. Il en allait ainsi sous l'Ancien Régime. Loin de ce soupçon de poésie historique, l'État français a perdu, depuis Maastricht, le pouvoir de battre monnaie - ce dont je me réjouis. Il ne peut donc plus atténuer sa dette par l'artifice de la dévaluation, il est devenu un débiteur comme un autre. La dette des retraites pèse sur les fonctions publiques et nous devrons peut-être en rendre compte, non pas devant les « gnomes de Zurich », mais devant les marchés internationaux. La fonction publique a des droits, il faut les évaluer de façon notoire, car ils sont supportés par la Nation, en contrepartie du service de l'État. (Applaudissements à droite)

L'amendement n°261 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°264, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

En considération des taux des cotisations à la charge des assurés sociaux relevant de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés et des institutions de retraite complémentaire, l'alignement des taux de cotisation à la charge des assurés sociaux relevant des différents régimes spéciaux de retraites est accéléré pour être harmonisé dans un délai de six ans à compter de la promulgation de la présente loi, selon des modalités définies par décret en Conseil d'État.

M. Gérard Longuet.  - Mme Procaccia, qui se faisait un plaisir de défendre cet amendement, a dû s'absenter un instant. Je vais tenter de la suppléer avec mes modestes moyens, qui ne m'offrent certes pas sa technicité passionnée en la matière.

Nous avons engagé en 2008 l'alignement des taux des régimes spéciaux, d'ici 2026. Nous proposons d'accélérer le rythme.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis évidemment défavorable. La hausse de 0,3 point de cotisations s'appliquera aux régimes spéciaux comme aux autres. Nul besoin d'accélérer car la charge est déjà lourde pour les cotisants.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Gérard Longuet.  - Mme la ministre refuse encore de répondre à la question que nous lui posons avec insistance de ce qu'elle abroge dans la loi de 2008 qu'elle déclarait alors scélérate. Son silence d'aujourd'hui vaut hommage.

L'amendement n°264 n'est pas adopté.

L'amendement n°329 rectifié est retiré.

(On le déplore à droite)

ARTICLE 4 BIS

M. le président.  - Amendement n°135, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

Mme Isabelle Pasquet.  - Les marins sont attachés au mécanisme de revalorisation de leurs pensions fondé sur le salaire forfaitaire, garant de l'égalité des rémunérations et pensions de ceux qui appartiennent à une même catégorie. Il n'est pas exclu que le salaire forfaitaire augmente plus vite que l'inflation.

Pour les marins comme pour les autres, nous sommes opposés au report de six mois de la revalorisation.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis défavorable, par cohérence.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Cet article met en conformité le droit avec la pratique, laquelle correspond aux attentes des marins. Retrait ou rejet.

M. Gérard Longuet.  - Je comprends mal. L'article 4 bis ne fait-il pas référence à la revalorisation instaurée par l'article 4 supprimé ?

Mme Laurence Cohen.  - Bonne question !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - L'article 4 bis fait référence au droit commun, quel qu'il soit.

M. Philippe Bas.  - Comment voter sans être parfaitement informés ? Je comprends que cet article concerne seulement la marine marchande et pas les marins pêcheurs. Il y aurait pourtant beaucoup à dire sur les conditions de travail et de retraite de ceux-ci. Les marins souhaitent-ils consolider l'indexation au 1er avril de leurs pensions - ce qui paraît souhaitable -, ou l'alignement sur les autres régimes ? Défavorables au report d'indexation pour l'ensemble des salariés, nous le sommes aussi pour les marins, et ne pouvons donc que voter l'amendement.

L'amendement n°135 est adopté et l'article 4 bis est supprimé.

ARTICLE 5

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Sur la pénibilité, l'un des amendements de la délégation aux droits des femmes a été déclaré irrecevable en vertu du funeste article 40, qui ne cesse décidément de juguler l'initiative parlementaire.

La pénibilité des emplois féminins reste très sous-évaluée ; je pense en particulier au temps partiel corrélé à une large amplitude horaire. Il contribue à aggraver l'état de santé physique et morale des femmes. Les arrêts de travail, plus longs pour les emplois à temps partiel, en témoignent. Les femmes souffrent de maladies professionnelles spécifiques aux tâches répétitives et aux stations fixes prolongées, classées parmi les troubles musculo-squelettiques. Des études ont montré l'exposition différenciée aux risques des hommes et des femmes. Ceux-ci sont plus exposés à certaines pathologies, aux troubles psychologiques, aux facteurs managériaux. C'est l'effet de la division sexuée des emplois.

La chute de cet amendement est une occasion manquée.

M. Alain Milon .  - La création d'un compte pénibilité, saluée par certains, inquiète les autres, qui craignent une usine à gaz coûteuse et sans utilité. C'est reconnaître toutes les formes de pénibilité ! La loi de 2010 se fondait sur l'incapacité. Le compte pénibilité ne crée des droits que pour l'avenir, et n'apportera aucune solution immédiate. Que prévoit-on pour les salariés proches de la retraite ?

La définition de la pénibilité reste floue. Les critères seront précisés par décret ; ils restent vagues. Ce dispositif pourrait coûter très cher aux entreprises, et provoquer les mêmes difficultés que les 35 heures.

L'urgence est plutôt de mieux prévenir la pénibilité. (Applaudissements à droite)

M. Dominique Watrin .  - Après tant de dispositions régressives, voici enfin, avec cet article 5, une avancée, cependant trop timide. Plus de 3 millions de salariés seraient concernés, certes, mais ceux qui auraient été exposés au moins vingt-cinq ans à un facteur de pénibilité ne pourront bénéficier que d'un départ anticipé de deux ans, à condition qu'ils aient plus de 52 ans. Il n'est d'ailleurs pas tenu compte du sort de ceux qui sont exposés à plus de deux facteurs de pénibilité.

Mme Laurence Cohen .  - Cet article constitue un compromis. On a voulu limiter le coût de la mesure, au nom de la compétitivité des entreprises. Pourtant, l'espérance de vie des ouvriers est inférieure de sept ans à celle des cadres. Les employeurs ont d'ailleurs l'obligation de protéger leurs salariés. En déplafonnant le nombre de points sur le compte, on les inciterait à agir.

La prévention est en grande partie absente de cet amendement. Les troubles psychosociaux qui résultent de certains modes de management ne sont pas pris en compte. Nous sommes d'autant plus réservés que nous constatons la baisse du budget consacré à la branche AT-MP dans le projet de loi de financement.

M. Claude Domeizel .  - Mesure phare de ce projet de loi, le compte pénibilité n'a plus pour seul objectif la réparation, comme les dispositifs existants, mais la prévention. C'est une différence de philosophie.

Entre les ouvriers et les salariés travaillant dans un bureau, l'écart d'espérance de vie en bonne santé est de sept ans. Cette espérance de vie en bonne santé est d'ailleurs en baisse.

La participation des employeurs variera selon les risques auxquels leurs salariés sont exposés. Une concertation s'ensuivra l'an prochain. Il appartient au monde du travail de se saisir de cette belle avancée.

Mme Gisèle Printz .  - Enfin, une loi reconnaît vraiment le problème de la pénibilité ! À la suite du rapport Poisson, la loi de 2010 a fixé dix critères, mais il n'y a que cinq branches et 4 800 entreprises à avoir trouvé un accord. Jusqu'ici, on s'est préoccupé de la réparation des dégâts plutôt que de prévention, parce qu'on se plaçait du point de vue du patronat. Grâce à François Hollande, on se place enfin au point de vue des salariés. Jusqu'à 20 % d'entre eux seront concernés par le compte pénibilité, qui ouvrira droit à des formations ou à une retraite anticipée.

Cet amendement protège ceux qui risquent leur vie au travail.

M. Roland Courteau .  - Je soutiens cette juste initiative. Comment ne pas distinguer un salarié qui met en péril sa santé d'un cadre ? Les mesures votées en 2010 n'ont pas produit les résultats escomptés. Elles ne s'appliquaient d'ailleurs qu'aux salariés des entreprises de plus de 50 salariés. L'espérance de vie à 50 ans des ouvriers est plus faible de neuf ans que celle des cadres.

La loi de 2010 ne visait que l'incapacité avérée. Cet article encouragerait les salariés à accepter des travaux pénibles, dit-on à droite. Incroyable !

Oui, le travail exposé à la chaleur excessive et au bruit, le travail de nuit, la manutention de lourdes charges, cela existe !

Le compte pénibilité ouvrira droit à une retraite anticipée, à une formation pour changer de travail, ou à un temps partiel assorti du maintien de la rémunération.

Il s'agit de mesures justes et nécessaires, pour réparer et compenser. Je les soutiens, car il n'y a pire inégalité que de réserver à certains salariés une retraite plus courte, parce que leur vie est abrégée par des travaux pénibles. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Yves Leconte .  - Je salue le courage de nos otages qui viennent d'être libérés au Niger. Dans un autre registre, nos compatriotes à l'étranger peuvent être exposés à des conditions de travail dont la pénibilité varie selon les pays. La Caisse des Français de l'étranger (CFE) assure une continuité avec la sécurité sociale française, en particulier pour la retraite. Le travail sur plateformes, sur des sites miniers ou pétroliers, dans des conditions pénibles, n'est pas rare. Les ressortissants de la CFE devraient pouvoir avoir accès aux dispositions relatives au compte pénibilité. L'amendement que j'avais proposé est tombé sous la coupe de l'article 40, ce qui me paraît quelque peu excessif. Madame la ministre, par voie réglementaire, pour assurer une continuité, est-il possible d'appliquer ce projet de loi aux Français de l'étranger, de manière volontaire ?

M. Philippe Bas .  - Nous recherchons tous les voies d'une meilleure intégration de la pénibilité dans notre droit. Nous l'avons fait en 2003, puis en 2010. À côté des retraites, il y a la prévention des risques et maladies professionnels, dont le système est percuté par cet article, à tel point que les organisations syndicales et patronales qui le pilotent s'en sont inquiétées. Trois séries de directives sur les conditions de travail ont été traduites dans notre droit. Notre système vise le risque zéro. Il s'applique à tous les travailleurs. Et voici que fait irruption un dispositif ne concernant que 18 % d'entre eux, absorbant ce système patiemment construit avec les partenaires sociaux. Je crains un affaiblissement de la protection des travailleurs dans leur ensemble. Je m'étonne que le ministre du travail n'ait pas pris de position plus ferme dans ce débat. La dimension retraites laisse de côté les autres dimensions de la prévention des risques. Les risques psychosociaux et le stress ne sont pas pris en compte dans le compte pénibilité. Remettons l'ouvrage sur le métier. Ne fragilisons pas la sécurité des travailleurs.

M. Gérard Longuet .  - Combattre la pénibilité est un devoir absolu. C'est une tâche très difficile, que nous avons engagée en 2003. Les négociations ont avancé à un rythme mesuré. Vous proposez madame la ministre un compte pénibilité, hommage au système de retraites par points, puisque vous individualisez les efforts.

J'insiste sur le risque de transferts de charges de l'employeur vers le système de retraites. La pénibilité reconnue se traduit - à juste titre - par des dispositions salariales plus avantageuses, comme on le voit en Lorraine. Un paternalisme qui paraît désuet de nos jours, mais animé de bonnes intentions, a donné lieu à des accords patronaux. N'exonérons pas l'employeur d'obligation de récompenser spécialement le travail réalisé dans des conditions difficiles. Cela se traduit aussi par des avantages en termes de retraites. (Applaudissements sur divers bancs au centre et à droite)

M. le président.  - Amendement n°265, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP.

Rédiger ainsi cet article :

À compter de la promulgation de la présente loi, les branches professionnelles négocient sur la définition de critères d'évaluation de la pénibilité ainsi que sur la mise en place de dispositifs de compensation de la pénibilité et sur leur financement, dans le respect des principes généraux de prévention, d'amélioration des conditions de travail et de droit à l'information.

M. Gérard Larcher.  - Les difficultés rencontrées depuis la réforme des retraites de 2003 ne sont pas réglées. La pénibilité n'est pas définie et nous butons là-dessus. Une loi peut-elle régler ce problème, madame la ministre ? La prévention relève de l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact). La pénibilité a fait l'objet d'un travail empirique au fil du temps et du développement des risques, du changement des conditions de travail... comme on l'a vu avec l'amiante.

Ne réinventons pas le livret ouvrier, facteur de discrimination indirecte. En référence à l'agenda social de janvier 2007 qui m'est cher, renvoyons la négociation aux partenaires sociaux, en leur fixant l'objectif et une date, et s'ils n'aboutissent pas, que le Parlement se saisisse de la définition de la pénibilité. (Applaudissements au centre et à droite)

M. le président.  - Amendement n°137, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Michel Le Scouarnec.  - Rappelez-vous le « le fût du canon », de Fernand Raynaud... qui met un « certain temps » à refroidir ! Ce type de disposition m'y fait penser. Madame la ministre, vous êtes interpellée sans cesse par les salariés de l'amiante. Je pense aussi aux salariés exposés à la radioactivité, sur une longue période, mais sous les seuils fixés ; EDF vient d'être condamnée. La définition des seuils est laissée au décret. Or ce sont les salariés qui sont les mieux placés pour définir la pénibilité qu'ils subissent. Faisons-leur confiance ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. le président.  - Amendement n°138, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

a) À la première phrase, après les mots : « travailleur exposé », sont insérés les mots : « , au-delà de certains seuils déterminés par décret après avis conforme des organisations représentant les salariés et les employeurs » ;

Mme Michelle Demessine.  - Cet amendement n'est pas de pure forme. Il exprime une grande inquiétude. Nous souhaitons que les décrets soient pris après avis conforme des organisations de salariés et d'employeurs. N'avez-vous pas fait du dialogue social votre marque de fabrique ? Vous l'avez si bien sacralisé que vous n'avez pas permis à la représentation nationale de modifier l'Accord national interprofessionnel (ANI) qui a ouvert la voie à une libéralisation du marché du travail et aux abus des employeurs que nous avions annoncés. Les salariés peuvent être remerciés manu militari, sans pouvoir se défendre. Certains groupes n'hésitent pas à provoquer des faillites de filiales pour se séparer à moindre coût de leur personnel.

L'histoire de la pénibilité dans notre pays est jonchée d'expériences douloureuses, auxquelles ma région, le Nord-Pas-de-Calais a payé un lourd tribut, avec la silicose, puis l'amiante. Les syndicats seraient satisfaits de l'adoption de cet amendement.

M. le président.  - Amendement n°139, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) À la première phrase, après le mot : « santé, », sont insérés les mots : « et après consultation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, dans le cadre de ses missions définies à l'article L. 4612-2 du présent code, ou des délégués du personnel dans les entreprises de moins de cinquante salariés » ;

Mme Annie David.  - Il faut associer en amont les institutions représentatives du personnel, tant les employeurs ont tendance à sous-estimer la pénibilité. Combien de suicides a-t-il fallu à France Telecom, avant de reconnaître que c'est l'organisation même du travail qui a créé le stress qui en est à l'origine ? Oui, la pénibilité est chose trop sérieuse pour être laissée aux employeurs.

M. le président.  - Amendement n°330 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) À la même phrase, après le mot : « santé, », sont insérés les mots : « et après consultation du médecin du travail » ;

M. Jean Desessard.  - Me voici revenu avec plaisir à la gauche de l'hémicycle. (Exclamations) La fiche de prévention de la pénibilité et la définition des seuils marquent une avancée majeure. Nous saluons l'initiative (« Très bien ! » sur les bancs socialistes) et serons attentifs aux décrets d'application. Le dialogue doit avoir lieu en amont pour être efficace. La médecine du travail doit être consultée avant la rédaction de la fiche, conformément à ses missions. Notre amendement ajoute un éclairage médical, qui renforcera la transparence et la clarté du processus. Les risques de contentieux en seront réduits. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

M. le président.  - Amendement n°407, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) À la même phrase, après les mots : « les conditions de pénibilité » sont insérés les mots : « résultant de ces facteurs » et après les mots : « disparaître ou réduire » sont insérés les mots : « l'exposition à » ;

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement apporte des précisions rédactionnelles : ce sont les conditions de pénibilité résultant des facteurs de risques professionnels qui doivent être suivies et les efforts de l'employeur doivent porter sur la réduction de l'exposition des salariés à ces facteurs.

M. le président.  - Amendement n°141, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

L'ensemble des fiches individuelles est présenté chaque année au comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail, ou à défaut aux délégués du personnel.

Mme Isabelle Pasquet.  - Cet amendement améliore la mise en oeuvre pratique de la fiche de pénibilité, qui servira de base à la reconnaissance des droits des travailleurs. Le CHSCT doit jouer pleinement son rôle. L'Assemblée nationale a enrichi le projet de loi à cet égard. Il faut le compléter, pour éviter qu'un employeur peu scrupuleux ne transmette des données erronées.

M. le président.  - Amendement n°142 rectifié, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le non-respect des dispositions du précédent alinéa est puni d'une amende de 3 750 €.

Mme Laurence Cohen.  - J'ai rectifié mon amendement en tenant compte des remarques qui m'ont été faites, en retirant la peine d'emprisonnement d'un an.

Il faut décourager les patrons voyous et encourager les entrepreneurs vertueux. Des mesures aussi justes soient-elles ne peuvent aller sans contraintes : pas d'obligation sans sanction. La peine que nous proposons n'est pas exorbitante mais peut être dissuasive.

M. le président.  - Amendement n°143, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la dernière phrase du second alinéa, après le mot : « travailleur, » sont insérés les mots : « ou d'incapacité supérieure à un taux fixé par décret, le conjoint, le concubin, la personne avec laquelle il a signé un pacte civil de solidarité ainsi que » ;

M. Dominique Watrin.  - L'information et la formation sur les risques professionnels sont une obligation de l'employeur. Les salariés doivent les connaître, grâce à une formation pratique et appropriée, adaptée à la nature, à la taille et à l'activité de l'entreprise. Ce document unique des risques professionnels, obligatoire, est l'outil indispensable. Nous ouvrons le droit à la famille du salarié exposé aux risques d'être informée, afin de pouvoir le cas échéant se retourner contre l'employeur.

L'amendement n°308 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°423, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 11

Remplacer les mots :

dans des conditions définies par décret en Conseil d'État

par la phrase :

. Les conditions dans lesquelles les entreprises utilisatrices transmettent ces informations et les modalités selon lesquelles l'entreprise de travail temporaire établit la fiche de prévention des expositions sont définies par décret en Conseil d'État.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Cet amendement répond à la préoccupation de M. Patriat au sujet des intérimaires.

L'amendement n°307 n'est pas défendu.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Les amendements tentent tous d'améliorer le dispositif relatif à la pénibilité sans le remettre en cause, tant chacun est convaincu de son importance.

L'amendement n°265 propose une négociation au niveau des branches professionnelles. Monsieur le président Larcher, c'est là qu'est le problème : certaines d'entre elles, comme l'Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM) ou l'Union des industries chimiques (UIC) ont mis en place leur propre négociation. On risque toutefois d'écarter des métiers où les salariés sont exposés à des facteurs de risques mais qui ne sont pas organisés en branches professionnelles. Expérimenter, avant de généraliser, telle est l'idée. Cela nous a paru risqué. Le projet de loi n'empêche aucune négociation de branche, seulement il ne la rend pas automatique. Un rapport récent de la direction générale du travail sur la réforme de la représentativité patronale met en évidence la diversité qui prévaut entre les branches professionnelles. Avis défavorable.

L'amendement n°137 supprime les seuils minimaux d'exposition, qui constituent une avancée importante du projet de loi, afin que la définition de l'exposition ne soit pas laissée au seul employeur. Mme la ministre pourra préciser la méthode de définition de ces seuils. Pour les établir, un dialogue devra s'engager entre l'administration et les partenaires sociaux, sur la base de la loi. Avis défavorable à l'amendement n°137.

L'amendement n°138 plaide pour une co-élaboration de la norme. Les partenaires sociaux seront consultés. La ministre pourra le confirmer. Faut-il leur donner un droit de veto ? La commission pense que non, d'où son avis défavorable.

L'amendement n°139 pose un problème de forme : tel qu'il est rédigé, il n'a pas pour effet d'associer le CHSCT. Celui-ci est déjà consulté avant toute décision de modification des postes et conditions de travail. Cette institution représentative du personnel n'a pas à se prononcer sur des cas particuliers, mais sur la stratégie de l'entreprise. L'employeur devra lui remettre un rapport annuel sur lequel le CHSCT émettra un avis. Retrait ou rejet.

Sur l'amendement n°330 rectifié, le médecin du travail joue déjà un rôle important : la fiche de prévention lui est communiquée. La médecine du travail, dispose de moyens limités...

M. Jean Desessard.  - Donnons-lui en plus !

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - ... Il est souhaitable que l'entreprise la consulte sur la stratégie et la définition des postes, mais la commission a émis un avis défavorable.

La rédaction de l'Assemblée nationale satisfait l'amendement n°141. Retrait ou rejet.

L'amendement n°142 ayant été rectifié après avis de la commission, je demande l'avis du Gouvernement.

L'amendement n°143 est satisfait par le code du travail actuel sur l'information des ayants droit ; le salarié peut demander la fiche à tout moment. Retrait ou rejet.

La commission n'a pas examiné l'amendement n°423. À titre personnel, j'y suis favorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Cet article est l'une des pièces maîtresses du projet de loi. La prévention de la pénibilité passe par la création du compte pénibilité, qui ne s'applique pas au seul départ en retraite, puisqu'il ouvre l'accès à des formations, les vingt premiers points devant obligatoirement y être consacrés, sauf pour les salariés proches de la retraite.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - C'est une avancée majeure.

Sur l'amendement n°265, avis défavorable. La négociation globale a eu lieu et a abouti à la définition des critères de pénibilité, si elle ne s'est pas mise d'accord sur la façon de faire. Rien n'interdit des négociations par branche.

Il n'y a pas de seuils aujourd'hui. Leur définition, monsieur Le Scouarnec, est une garantie d'égalité de traitement. Certains employeurs éprouvent des difficultés à caractériser la pénibilité.

Il y aura une consultation formelle du Conseil d'orientation sur les conditions de travail (COCT). Avis défavorable à l'amendement n°137. Même avis sur l'amendement n°138. L'avis conforme des partenaires sociaux n'est ni possible ni souhaitable. Cela donnerait un droit de veto aux employeurs. Le consensus est illusoire sur ce thème.

Retrait de l'amendement n°139. Le code du travail prévoit que le CHSCT débat de la pénibilité.

Avis défavorable à l'amendement n°330 rectifié. Le médecin du travail ne doit pas se transformer en producteur de fiche pénibilité. Son rôle de conseil est collectif et non individuel. Il conseille l'employeur sur la stratégie globale de prévention de la pénibilité.

Avis favorable à l'amendement n°407.

Quant à l'amendement n°141, autant il appartient au CHSCT de se saisir des situations collectives de pénibilité, autant il n'est pas question de lui transmettre des données individuelles. Avis très fermement défavorable.

Même avis sur l'amendement n°142 : nul besoin de créer une nouvelle catégorie d'amendes. Ce que prévoit l'amendement n°143 est déjà prévu en cas de décès ; en cas d'incapacité, laissons l'intéressé décider.

Mme Annie David.  - Les CHSCT ont bien pour rôle de veiller aux conditions de travail dans les entreprises. Ils ne doivent pas être exclus de la nouvelle procédure « pénibilité ». Nous maintenons nos amendements. Et nous voterons évidemment contre l'amendement de M. Larcher : ne renvoyons pas la définition des critères à de futures négociations. Chacun sait que les rapports de forces, dans les branches, sont déséquilibrés.

M. Gérard Longuet.  - M. Cardoux, qui a beaucoup travaillé sur ce sujet, regrette de ne pouvoir assister à nos débats. Nous sommes opposés par principe à la nationalisation de la pénibilité. Seule la négociation, dans les branches en particulier, permettra de définir plus exactement la pénibilité.

M. Claude Domeizel.  - Rien dans la loi n'empêche les négociations de branche, dit Mme la rapporteure. Le confirmez-vous, madame la ministre ? La Cnil s'est-elle prononcée sur ces nouvelles fiches ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Rien ne s'oppose à ce que des branches engagent des négociations ; nous ne souhaitons pas les imposer.

Les fiches existent déjà, sans que les critères soient nettement définis. La loi impose dix critères sur le fondement des négociations entre les partenaires sociaux qui ont abouti en 2008. Une concertation définira les seuils à partir desquels ces critères seront considérés comme remplis.

Mme Catherine Procaccia.  - À titre personnel, je voterai l'amendement n°139 de Mme David, qui donne un rôle au comité d'entreprise et au CHSCT, même si je ne partage pas son exposé des motifs qui dénonce les entreprises. Je voterai également l'amendement de M. Desessard. Nous ne cessons de plaider pour que le rôle des médecins du travail soit renforcé. Il n'y a pas de raison de l'exclure du processus.

M. Jean Desessard.  - Madame la ministre, la fiche actuelle prévue par l'article L. 4121-3-1 est présentée au médecin du travail. Celle que vous créez - si vous en créez une nouvelle - est-elle individuelle et secrète, ou publique et relative au poste de travail ? Je comprends mal. Merci pour vos éclaircissements.

Mme Éliane Assassi.  - On n'y comprend rien !

M. Alain Milon.  - Moi aussi, je voterai les amendements nos139 et 330 rectifié : les conditions de travail relèvent du CHSCT, la santé au travail du médecin du travail.

L'amendement n°265 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos137 et 138

M. Jean Desessard.  - Mme la ministre peut-elle, oui ou non, nous éclairer ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - J'attendais la mise aux voix de votre amendement. Nous parlons bien de la même fiche. Pour l'instant, les employeurs ne disposent pas de critères précis, ils ne la remplissent pas. Désormais, on saura que tant de nuits travaillées par an ouvrent droit à la qualification de travail pénible.

Il appartient évidemment au médecin du travail de veiller à l'état de santé des salariés, mais il ne doit pas se transformer en auxiliaire de l'employeur pour l'élaboration des fiches individuelles d'exposition, son rôle est la définition d'une politique globale de prévention.

L'amendement n°139 est adopté.

Mme Catherine Deroche.  - Je voterai l'amendement de M. Desessard. La loi de 2010 se fondait aussi sur une approche médicale. Je déplore en outre que Mme la ministre mette en cause l'honnêteté et l'objectivité des médecins du travail.

M. Jean Desessard.  - D'après l'article L. 4121-3-1, la fiche est transmise au médecin du travail, qui n'est cependant que consulté sur les critères de pénibilité... Comprenne qui pourra !

M. Jean-François Husson.  - C'est surréaliste !

M. Jean Desessard.  - Il est pourtant le mieux placé ! En quoi sa consultation contrecarre-t-elle vos objectifs ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je n'accepte pas vos propos, madame Deroche. Je ne mets nullement en cause l'impartialité ou la compétence des médecins du travail, je dis seulement que cela ne relève pas de leurs compétences.

Monsieur Desessard, les critères seront objectifs, définis au niveau national, ouvrant des droits comme le travail à temps partiel ou le départ à la retraite anticipé, et ne sauraient être adaptés selon les entreprises. C'est là l'avancée que nous proposons. Quant à l'appréciation de la pénibilité d'un poste, un recours est possible. Votre amendement conduirait à une appréciation médicalisée et individuelle de la pénibilité, celle que promouvait la droite en 2010 et contre laquelle nous nous sommes élevés. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Gérard Roche.  - Le rôle du médecin du travail est de veiller à ce que la santé des salariés ne soit pas mise en danger par leurs conditions de travail. Les critères de pénibilité, eux, doivent être généraux - et l'on ne peut se passer de l'avis des médecins pour les définir. Nous avons tous un peu raison...

Mme Kalliopi Ango Ela.  - D'accord pour des critères nationaux. Mais chaque individu réagit différemment ; la consultation d'un médecin du travail est toujours utile.

L'amendement n°330 rectifié est adopté, ainsi que l'amendement n°407.

L'amendement n°141 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos142 et 143

L'amendement n°423 est adopté.

Mme Annie David.  - Nous nous abstiendrons sur l'article, qui représente certes une avancée, mais qui soulève encore bien des questions. Comment les fiches seront-elles remplies ? Quel sera le rôle du médecin du travail, du CHSCT ? Pour faire usage de ses points, le salarié devra recueillir l'accord de l'employeur.

Certains facteurs de pénibilité sont déjà bien définis. Mais c'est l'employeur qui rédigera les fiches, et le salarié n'aura que des moyens limités de faire valoir ses droits. Les choses sont encore trop floues.

M. Jean-François Husson.  - C'est qu'il y a un loup !

Mme Annie David.  - Nous restons persuadés de la nécessité de prendre en compte la pénibilité, et non seulement l'incapacité.

M. Jean Desessard.  - Je comprends ces interrogations, mais l'article est une avancée. Nous le voterons.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Nous nous abstiendrons, faute de connaître les modalités de mise en oeuvre de ce compte pénibilité. Il ne suffit pas de se référer, en écho au code du travail, aux délégués du personnel ou au CHSCT. Concrètement, qu'est-ce qui incitera les employeurs à remplir correctement les fiches ?

M. Gérard Longuet.  - Il faudrait progresser dans la lutte contre la pénibilité. Mme la ministre veut des normes nationales, mais nous sommes soucieux de l'adaptation à la situation des branches et des entreprises. Certes, les négociations menées depuis 2010 n'ont pas suffi, mais nous restons persuadés que c'est la meilleure voie. Nous craignons une nationalisation de la pénibilité. À ce stade de la discussion, nous voterons contre l'article, parce que l'équilibre entre le rôle de l'État et celui des entreprises n'est pas clarifié. Il faudra y revenir pendant la navette.

L'article 5, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°313, présenté par M. Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les organismes en charge de la prévention transmettent à l'Observatoire de la pénibilité du Conseil d'orientation sur les conditions de travail, un bilan annuel des mesures financées de prévention de la pénibilité, au plus tard le 30 juin.

L'observatoire de la pénibilité du Conseil d'orientation sur les conditions de travail est chargé de synthétiser ces rapports afin d'établir un bilan global de la prévention de la pénibilité.

Ce bilan sera transmis au Conseil d'orientation des retraites pour alimenter ses travaux.

M. Claude Domeizel.  - Défendu.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis favorable de la commission à cet amendement dont je suis signataire.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Le rapport est déjà prévu à l'article 5 bis. Sagesse.

L'amendement n°313 est retiré.

ARTICLE 5 BIS

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - L'article prévoit le dépôt d'un rapport sur l'évolution des conditions de pénibilité. C'est bien, mais nous ne devons pas ignorer la dimension genrée de celle-ci. Je vous renvoie au rapport de 2012 de la délégation aux droits des femmes qui relève l'invisibilité de la pénibilité des métiers exercés par des femmes. On considère en général que les travaux des femmes sont moins pénibles et moins dangereux que ceux des hommes. À la question « Portez-vous une charge ? », un homme qui porte des colis de 20 kilos répondra oui, une aide-soignante amenée à porter des patients à domicile répondra non...

Des statistiques adaptées éviteraient la sous-évaluation systématique de la pénibilité de l'emploi des femmes. En outre, hommes et femmes devraient être représentés à égalité lors de la renégociation des critères. C'est le sens des amendements inspirés par les travaux de la délégation.

M. le président.  - Amendement n°408, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales.

I.  -  Première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Tous les sept ans à compter de la promulgation de la loi n° garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, le Gouvernement présente au Parlement, après avis du Conseil d'orientation sur les conditions de travail, un rapport sur l'évolution des conditions de pénibilité auxquelles les salariés sont exposés et sur l'application du titre VI du livre Ier de la quatrième partie du code du travail.

II.  - Seconde phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - La commission souhaite que le rapport soit remis tous les sept ans pour tenir compte des évolutions du monde du travail. Quant à la deuxième phrase, elle est satisfaite. Les partenaires sociaux ne sont d'ailleurs pas demandeurs d'une négociation interprofessionnelle sur la pénibilité.

L'amendement n°408, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°319 rectifié bis, présenté par Mmes Rossignol et Gonthier-Maurin, M. Courteau, Mmes Génisson, Printz et Sittler, M. C. Bourquin et Mmes Cartron, D. Michel, Bouchoux et Meunier.

Après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Ce rapport prend en compte les conditions de pénibilité auxquelles sont plus particulièrement exposées les femmes.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure de la délégation aux droits des femmes.  - La délégation a en effet mis en avant l'invisibilité de la pénibilité du travail des femmes - domestique ou professionnel. La dimension sexuée de la pénibilité doit être prise en compte. Les critères actuels correspondent au monde de l'industrie et du travail masculin.

M. le président.  - Amendement n°350 rectifié bis, présenté par Mmes Rossignol et Gonthier-Maurin, M. Courteau, Mmes Génisson, Printz et Sittler, M. C. Bourquin et Mmes Cartron, D. Michel, Bouchoux et Meunier.

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Cette concertation s'appuie sur une représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein des délégations syndicales.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure.  - Lors des discussions entre partenaires sociaux ayant une incidence sur le travail des femmes, les délégations devraient être paritaires. Un jour, il faudra considérer que toute décision d'un organe qui ne serait pas composé d'au moins 30 % de femmes est nulle et non avenue.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis favorable à l'amendement n°319 rectifié bis, sous réserve que la périodicité prévue par l'amendement de la commission soit prise en compte.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure.  - Soit !

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Quant à l'amendement n°350 rectifié bis, il n'a plus d'objet, mais pourra être repris ultérieurement.

M. le président.  - En effet.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Favorable à l'amendement n°319 rectifié bis.

L'amendement n°350 rectifié bis est devenu sans objet.

M. Gérard Longuet.  - Sexuer l'analyse de la pénibilité ? Je le comprends très bien, il y a une pénibilité spécifique ; ce sont surtout des femmes qui travaillent dans la confection textile... Après tout, il y a deux sexes principaux... Mais n'oublions pas la pénibilité liée à l'âge. Passé 60 ans, le travail posté n'est pas supporté aussi facilement qu'à 25 ans...

Mme Laurence Rossignol, rapporteure.  - Comme quoi, l'allongement de la durée du travail n'a rien d'évident.

Mme Catherine Génisson.  - Précisons qu'il n'y a pas d'emplois féminins ou masculins, mais des emplois occupés majoritairement par des femmes ou par des hommes.

M. Gérard Longuet.  - Vous avez raison.

L'amendement n°319 rectifié bis est adopté.

L'article 5 bis, modifié, est adopté.

La séance est suspendue à 19 h 30.

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

L'amendement n°358 n'est pas défendu.

L'article 5 ter est adopté.

ARTICLE 6

M. Dominique Watrin .  - Permettre aux salariés à espérance de vie plus faible de partir en retraite plus tôt est une exigence de justice. Cet article est donc une indéniable avancée : pour la première fois on reconnaît vouloir rompre avec la logique précédente. Suscitant un grand espoir, cet article peut aussi provoquer des déceptions.

Ce compte personnel pénibilité s'inscrit dans la lignée des précédentes réformes : la liberté des salariés s'arrête là où commence celle des employeurs. Les formations accessibles par ce mécanisme sont censées favoriser un changement de poste ou d'affectation, dont les salariés n'ont en réalité pas la maîtrise. Le salarié pourrait en outre être rendu responsable d'une mauvaise adéquation des ressources aux postes, s'il refuse une offre de reconversion dans un emploi moins pénible.

Nous aurions préféré que les salariés soient propriétaires de leur compte pénibilité, comme de leur compte individuel de formation. Ce texte n'apporte pas toutes les réponses aux questions de pénibilité.

Mme Annie David .  - Les responsables de la droite et du Medef trouvent ce dispositif trop coûteux, cela ne doit pas nous étonner. Celui qui avait été mis en place en 2010 n'était ouvert qu'à un très petit nombre de salariés. Les critères très restrictifs ont eu l'effet attendu : comme n'ont été touchés que 5 366 salariés au lieu des 30 000 annoncés, le coût a été faible. C'est aussi que le dispositif était ainsi rendu quasiment inopérant.

Le présent mécanisme est plus ambitieux mais demeure insuffisant : sa mise en oeuvre n'est prévue qu'en 2015, et les premiers départs anticipés sur son fondement ne pourront avoir lieu qu'en 2040, ce qui est trop tardif.

Certains facteurs de pénibilité sont pourtant connus depuis longtemps et ont fait l'objet de décisions de justice. Ainsi du travail de nuit, auquel est consacrée une fiche sur le site du ministère du travail : y sont par exemple associés des troubles digestifs et nutritionnels, des prises de surpoids, des pathologies cardiovasculaires.

Une action plus rapide et à effet rétroactif serait plus efficace et socialement juste. Elle est possible.

Mme Laurence Cohen .  - Le compte individuel de pénibilité a vu le jour grâce à nos travaux. Mais il n'appartient pas au salarié puisqu'il est encadré par l'employeur. Son utilisation pour une formation est conditionnée à l'accord de l'employeur. Les contentieux seront tranchés par les conseils de prud'hommes, qui devront évaluer si la demande du salarié est recevable au regard de la situation économique de l'entreprise, alors qu'on leur a retiré, avec L'ANI la vérification du bien-fondé des licenciements. De plus, quelle forme prendra la réparation du salarié si sa demande n'est pas formulée dans les temps ? Aura-t-il droit à indemnisation ?

M. le président.  - Amendement n°266, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP

Supprimer cet article.

Mme Catherine Deroche.  - La mise en place du compte personnel de pénibilité pose plusieurs problèmes.

Un problème de financement d'abord : le dispositif devrait coûter près de 2,5 milliards d'euros en 2040, pour un rendement bien inférieur des deux nouvelles cotisations employeurs. Ce problème se double d'un problème de hausse du coût du travail. D'ici 2020, les entreprises auront été mises à contribution à hauteur de 2,2 milliards d'euros au titre de la hausse des cotisations et d'au moins 500 millions au titre de la pénibilité. Et ces contributions s'ajoutent aux investissements déjà consentis par les entreprises après la loi de 2010.

Un problème d'application ensuite, puisque la création de ce compte risque d'alourdir les charges administratives des entreprises. Or les TPE-PME, qui constituent la majeure partie de notre tissu économique, ne disposent pas de la ressource humaine pour tenir au jour le jour les fiches d'exposition des salariés.

Un risque de multiplication des contentieux enfin, puisque la loi ne pourra empêcher les différences d'appréciation entre employeurs et salariés quant à de la pénibilité des travaux.

Enfin, cette dispositions se greffe sur les dispositifs déjà existants : la prise en charge de la pénibilité sur la base d'une incapacité constatée, et le dispositif « carrières longues », créé en 2003, qui compense la pénibilité du travail subie par les travailleurs entrés très jeunes sur le marché du travail et ayant effectué des métiers physiques.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - La commission est défavorable à cet amendement de suppression. Le compte pénibilité est un pilier de ce texte. Il est étonnant d'en appeler aux personnes ayant commencé à travailler jeunes lorsqu'on a reculé l'âge de départ en retraite, madame Deroche.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable également. Ce dispositif permettra aux salariés de se former, de disposer d'un temps partiel payé comme un temps plein ou de partir plus tôt en retraite.

Madame David, ce dispositif produira ses effets dès 2015 pour des départs anticipés dès 2016. Un mécanisme provisoire doublera les points des salariés. Les salariés poly-exposés seront particulièrement concernés. Votre horizon de 2040 renvoie éventuellement au rythme de croisière atteint par ce dispositif, mais nous avons tenu à ce qu'il produise ses effets rapidement.

Mme Kalliopi Ango Ela.  - Cet article est au coeur du projet de loi. Nous l'attendions depuis longtemps. Certes, les seuils ne sont pas aisés à chiffrer et nous serons attentifs au décret qui sera pris. Mais la concertation a porté ses fruits. Le ciblage du temps partiel ou du départ anticipé est opportun.

Toutefois, je m'interroge sur le projet politique sous-jacent. La gauche ne devrait pas renoncer à l'utopie face à la logique gestionnaire : son objectif doit rester une suppression de la pénibilité.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Celle du travail !

Mme Kalliopi Ango Ela.  - Notre économie doit évoluer vers un modèle plus respectueux de l'environnement et de l'individu. Nous voterons contre cet amendement de suppression.

M. Claude Domeizel.  - Cet amendement est consternant. On peut trouver le mécanisme imparfait, pas le rayer d'un trait de plume au motif qu'il coûterait cher. Les entreprises bénéficient de mesures fiscales qui équilibrent largement ce coût.

L'objectif est de sortir les salariés de la pénibilité, d'en finir avec la peine : faible qualification, travaux pénibles, bas salaire, espérance de vie réduite. Le compte pénibilité exprime la considération que nous devons à tous ceux qui travaillent dans des conditions difficiles. Il y va de la justice la plus élémentaire.

Chers collègues de l'UMP, ressaisissez-vous ! Vous ne pouvez balayer cet article d'un revers de main. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Laurence Cohen.  - Nous avons reconnu que la pénibilité était un problème s'imposant à tous. Depuis lundi, nos prises de position divergent mais nous avons bien entendu la voix des salariés en difficulté. Nous voterons contre cette suppression.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Nous sommes favorables à la prise en compte de la pénibilité. Cet article présente des aspects positifs et aussi des lacunes, ne serait-ce que de ne concerner que le privé. Dans le cadre d'une réforme systémique, il faut revoir cette question de manière universelle.

Ensuite, la reconstitution d'une période d'exposition aux risques est très compliquée, car les carrières ne sont pas linéaires. Il faut que les comptes soient bien tenus. Une heure par jour au marteau-piqueur peut alterner avec plusieurs heures de construction d'un mur, travail qui n'est pas considéré comme pénible.

Troisième lacune : la cotisation de base des entreprises est la même, sans tenir compte de la cotisation supplémentaire pénibilité. C'est assez obscur.

Enfin, on mélange prévention et réparation. Comment aide-t-on un tourneur-fraiseur très spécialisé à se reconvertir ? Vers quoi ?

Ce sont des erreurs conceptuelles, croyez-en ma longue expérience dans les entreprises. Je ne suis pas certain que tous ici aient une claire conscience de la réalité concrète qui est derrière ces mots. (Murmures sur les bancs socialistes)

Mme Annie David.  - Cet article est positif. Nous ne voterons pas sa suppression...

M. Michel Le Scouarnec.  - Mais il faut l'améliorer.

Mme Annie David.  - Oui, car une frange de salariés ne pourra en bénéficier tout de suite. Bien qu'ayant effectué un travail pénible, ils ne pourront partir plus tôt à la retraite. L'alinéa 23 prend certes en compte les salariés âgés de 52 ans et plus, mais tous ne seront pas concernés. D'où nos amendements.

L'amendement n°266 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°289, présenté par M. Milon et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 6

Après la seconde occurrence du mot :

privé

insérer les mots :

à l'exception des salariés des établissements de santé

Mme Catherine Deroche.  - Les gestionnaires des établissements de santé ont contribué à la maîtrise des dépenses de l'assurance maladie. L'application de ce dispositif aux établissements de santé conduira à une augmentation de l'Ondam, afin de compenser leur déficit d'exploitation.

En imposant sans distinction à tous les secteurs d'activité n'ayant pas les mêmes contraintes, l'obligation de mise en oeuvre de ce compte, vous ne tenez pas compte des spécificités de fonctionnement qu'implique l'intérêt général pour les employeurs de la santé.

Certaines composantes de la pénibilité au travail ont déjà fait l'objet de négociation de branche, voire d'entreprises induisant la mise en oeuvre de mécanismes de compensation, notamment financiers et en temps. L'article 6 remet ainsi en cause l'équilibre des dispositifs de prévention, nés du dialogue social.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Le principe d'universalité du compte est essentiel. Exclure les salariés d'établissements de santé ne se justifie pas et d'autres pourraient en demander autant. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Claude Domeizel.  - Je suis à nouveau consterné. Exclure ces salariés, soumis à de multiples tâches pénibles, est scandaleux ! Nous voterons contre des deux mains.

Mme Laurence Cohen.  - Je suis tout à fait d'accord. C'est une discrimination inadmissible. Des professions comme celles d'infirmière ou d'aides-soignantes sont principalement féminines. Nous sommes farouchement contre cet amendement.

M. Gérard Roche.  - Ce compte pénibilité aura un coût, qui sera répercuté sur l'Ondam. La discrimination que fait cet amendement est insupportable. Les professions hospitalières sont d'une grande pénibilité : les horaires sont lourds avec le travail de nuit, il faut porter les malades. Quand ceux-ci sont en fin de vie, qu'ils se souillent, qu'il faut passer trois quarts d'heure à les faire manger, ce n'est pas pénible ? Cet amendement témoigne d'un manque de reconnaissance pour ces métiers de santé, et, tout simplement, d'un manque de réflexion. (Applaudissements à gauche)

Plusieurs voix à gauche.  - Il faut le retirer !

Mme Catherine Deroche.  - Il y a une discrimination à l'encontre du secteur privé du fait que le public n'est pas concerné. Nous ne nions pas la pénibilité - nous avons engagé le mouvement en 2010...

Mme Catherine Deroche.  - ... mais ce compte individuel mettra les établissements privés en difficulté, faute d'harmonisation avec le public.

L'amendement n°289 n'est pas adopté.

Les amendements nos317 et 405 rectifié ne sont pas défendus.

M. le président.  - Amendement n°271, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 8, première phrase

Remplacer les mots :

dès lors qu'un salarié a acquis

par les mots :

pour chaque travailleur dans les entreprises de dix salariés et plus dès lors qu'il s'est constitué

M. Gérard Longuet.  - Le nouveau compte personnel de prévention de la pénibilité présente deux risques importants pour les très petites entreprises et les petites entreprises : le surcoût financier, puisque ce compte sera à leur seule charge, et la complexité administrative

Les plus petites des entreprises devraient être exonérées de cette nouvelle obligation.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Et pourquoi donc ? Cet amendement instaure une rupture d'égalité des salariés. Et que dire des salariés qui passeront d'une petite à une grande entreprise ? Ce ne sont pas les employeurs mais les Caisses d'assurance retraite et de santé au travail qui géreront ce compte.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis défavorable.

M. Gérard Longuet.  - Vous ne m'avez pas convaincu. L'emploi dans les très petites entreprises est créé par des entrepreneurs polyvalents. Ce sont souvent des techniciens et ils doivent s'initier aux arcanes du commerce, de l'administration, de la trésorerie, des ressources humaines. Ce livret donnera lieu à de très nombreux contentieux sur la façon dont la pénibilité sera reconnue.

Devant l'évidente complexité du dispositif, les employeurs renonceront à l'embauche, ce qui déprimera l'emploi dans notre pays.

Mme Catherine Génisson.  - Les chefs de TPE n'ont pas de services de ressources humaines aussi importants que les grands groupes, mais ils entretiennent des relations plus proches avec leurs salariés et exercent le même métier...

M. Gérard Longuet.  - Absolument ! Nous avons la même analyse, mais une conclusion opposée.

M. Dominique Watrin.  - Vous êtes rétrograde : face à la pénibilité, vous raisonnez encore comme à propos de l'invalidité. À vous entendre, il faudrait, pour accéder au dispositif sur la pénibilité avoir une main coupée ! Vous freinez des quatre fers, créez des discriminations au motif que « cela va coûter cher ». Est-ce ainsi que l'on traite les salariés ? Amendement après amendement, vous dévoilez votre projet de société. On a compris mais on ne vous suivra pas !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Les choses ne seront pas simples. Même les petits patrons tiendront ces comptes personnels et cotiseront.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - C'est un gros mot !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Non, mais il y a de l'argent en jeu. Je connais l'entreprise : certains auront des tentations, des deux côtés. Ce texte ne prend pas en compte la réalité des petites entreprises, qui est difficile. Cela dit, je ne m'opposerai pas au principe d'égalité.

L'amendement n°271 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°269, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

I.  -  Alinéa 9

Après la référence :

L. 4161-1

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ouvre droit à l'attribution de points sur le compte personnel de prévention de la pénibilité dans des conditions définies par un accord national de branche. Cet accord fixe les modalités de prise en compte de la pénibilité en tenant compte des mesures de prévention déjà mises en oeuvre le cas échéant par des accords en vigueur à la date de promulgation de la loi n°   du    garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

II.  -  Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Cet accord doit intervenir avant le 30 juin 2014. À défaut d'accord, il appartient au travailleur de demander l'ouverture du compte personnel de prévention de la pénibilité auprès de la caisse mentionnée à l'article L. 215-1 du code de la sécurité sociale dans des conditions fixées par décret. Ce décret détermine notamment les conditions dans lesquelles la commission mentionnée à l'article L. 351-1-4 du même code examine les justifications apportées par l'assuré sur le niveau, la fréquence et la période minimale d'exposition.

M. Gérard Longuet.  - Cet amendement part d'un principe de réalité. On ne peut tout demander aux employeurs, ce sont des êtres humains dépourvus de la science infuse et de la polyvalence familières aux hauts responsables de l'État.

Cet amendement confie aux partenaires sociaux le soin de négocier les seuils, le niveau, la fréquence, la durée minimale d'exposition aux facteurs de pénibilité. S'appuyant sur le dialogue social, ce mécanisme se rapproche de la réalité, à l'inverse d'un décret.

M. le président.  - Amendement n°270, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 9

Après les mots :

définis par

insérer les mots :

accord de branche ou d'entreprise, conclu avant le 31 décembre 2014, ou, à défaut, par

M. Gérard Longuet.  - Plutôt que de définir par décret des critères de pénibilité, laissons les branches le faire. La transition serait assurée avec les accords négociés sur le fondement de la loi de 2010.

M. le président.  - Amendement n°288, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation à l'application des seuils précités à l'alinéa précédent, l'accord collectif de branche étendu visé à l'article L. 4163-4 peut caractériser l'exposition effective des travailleurs à un ou plusieurs des facteurs de risques professionnels mentionnés à l'article L. 4161-1 par des « scénarios types d'exposition », faisant notamment référence aux postes occupés ou aux situations de travail.

M. Gérard Longuet.  - Ces « scénarios d'exposition » se substitueraient ainsi à l'application de seuils prévus par décret, pour tout ou partie des salariés, pour tout ou partie des entreprises. Faute d'un tel accord de branche, ces seuils d'exposition définis par décret s'appliqueraient.

Ces amendements relèvent de la même logique : ils seront donc également censurés par le Gouvernement.

Ces trois amendements restituent pourtant l'esprit harmonieux des petites entreprises, où patrons et salariés ne souhaitent pas qu'on leur impose des décisions de l'extérieur : les grenouilles ne veulent pas de roi !

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Nous en avons débattu avec M. Gérard Larcher qui souhaitait renvoyer à la négociation de branches la définition des critères de pénibilité et des seuils, l'amendement n°269 a le même objet. L'ouverture du compte doit être automatique pour le salarié exposé. Avis défavorable. Même avis sur l'amendement n°270. Mme la ministre a rappelé que la définition des seuils serait nationale. L'amendement n°288 remplace les seuils par des scénarios types. Nous restons attachés à une définition égalitaire. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Gérard Longuet.  - Merci, madame la rapporteure pour la précision de votre réponse. Je reste convaincu de votre bonne volonté, comme de la proximité de l'entreprise que défend notre collègue Cardoux et que vous méconnaissez.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Allons ! Il y a ceux qui savent et ceux qui ne savent pas ?

M. Gérard Longuet.  - Vous voulez imposer un décret. Si les entreprises avaient le sentiment que les critères tiennent compte de leurs réalités, elles adhéreraient davantage... Vous autres socialistes vous en remettez à l'autorité de l'État ; nous sommes pour le contrat et le dialogue.

L'amendement n°269 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos270 et 288.

M. le président.  - Amendement n°272, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il précise également la période minimale d'exposition permettant la validation de points.

M. Gérard Longuet.  - Le temps fait la différence : la durée d'exposition est essentielle. Tel ou tel métier peut connaître, durant une période donnée, un environnement différent.

Le décret fixant les règles d'attribution de points résultant des seuils d'exposition aux facteurs de pénibilité, doit préciser quelle période minimale autorise l'attribution de points au salarié exposé.

Ce n'est pas l'exercice d'un métier qui occasionne l'attribution de points mais bien la durée d'exposition à des facteurs de pénibilité.

Ne décourageons pas les jeunes. Ainsi une fonderie, sans revenir au mythe de Vulcain, a quelque chose d'inquiétant, alors que le travail du fer procure une vraie fierté. (Murmures sur les bancs socialistes)

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Pourquoi une période minimale d'exposition ? Les points sont calculés à partir de la première exposition. Les facteurs de risques professionnels ont des effets différés sur la santé, même pour des périodes d'exposition courte. Avis défavorable.

Oui, les métiers industriels souffrent souvent d'une mauvaise image, ce qui est injuste. L'instauration du compte de prévention de la pénibilité n'y change rien. Il faut trouver les moyens de rendre ces métiers attractifs.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Le décret d'application sera précédé d'une concertation avec les partenaires sociaux. Si l'on veut donner une bonne image d'une profession, on doit s'engager à ce qu'elle n'apparaisse pas comme une trappe à pénibilité.

L'amendement n°272 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°267, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 4162-3. - Les points sont attribués au vu des expositions du salarié déclarées par l'employeur, auprès de la caisse mentionnée à l'article L. 215-1, à l'article L. 222-1-1 du code de la sécurité sociale ou à l'article L. 723-2 du code rural et de la pêche maritime dont il relève. Un décret fixe les modalités selon lesquelles la déclaration par l'employeur est réalisée.

M. Gérard Longuet.  - Cet amendement établit un lien entre la fiche de prévention de la pénibilité établie par la loi de 2010 et le droit général à compensation. Or cette fiche avait pour objet la prévention. Dans un souci de simplification et de faisabilité pour les entreprises, nous proposons d'intégrer la déclaration des expositions dans le cadre existant des déclarations sociales.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Le Gouvernement pourra vous rassurer : c'est bien ce qui est envisagé, afin que cette déclaration nouvelle ne soit pas source de complexité. Votre amendement est satisfait. Retrait ou rejet.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Oui, je le confirme.

L'amendement n°267 est retiré.

L'amendement n°268 devient sans objet.

M. le président.  - Amendement n°273, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 20, seconde phrase

Remplacer le nombre :

55

par le nombre :

57

M. Gérard Longuet.  - Il ne s'agit pas de remplacer un département lorrain par un autre... (Sourires). L'Assemblée nationale a prévu que la liquidation des points, sous réserve d'un nombre suffisant, puisse occasionner une liquidation des droits sept ans avant l'âge légal de départ en retraite, afin de permettre aux assurés qui en rempliraient les conditions de bénéficier pleinement du dispositif carrières longues.

Or le projet prévoit également un dispositif dérogatoire à l'âge légal de départ en retraite pour les salariés ayant été exposés à la pénibilité. Il convient de rationaliser le nombre de dispositifs permettant des départs anticipés.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - L'âge de 55 ans a été fixé par l'Assemblée nationale par coordination avec l'âge de départ anticipé pour carrière longue. Il ne faut pas le relever. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°273 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°274, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 22

Rédiger ainsi cet alinéa :

« III. - Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'utilisation des points inscrits au compte. Il fixe le barème de points spécifique à chaque utilisation du compte en priorisant le 1° puis le 2° du I. Il précise les conditions et limites dans lesquelles les points acquis peuvent être affectés, en cas d'usure précoce, à l'utilisation mentionnée au 3° du I.

Mme Catherine Deroche.  - Cet amendement reprend les préconisations du rapport Moreau sur l'utilisation des points : « Les équivalences points/périodes seraient déterminées de façon à encourager l'utilisation de ces points d'abord pour financer des périodes de formation, ensuite des périodes de temps partiel de fin de carrière, enfin le rachat de trimestres pour le départ en retraite. »

Le dispositif créera un appel d'air car, si l'on exclut le minimum des vingt points fléchés obligatoirement vers une action de formation, le reste des points disponibles conduira mécaniquement à des départs anticipés.

Nous encadrons davantage l'utilisation de ces points afin qu'ils servent en priorité à la prévention de la pénibilité, par des actions de formation.

Cet amendement réserve les possibilités de départ anticipé aux seuls cas de salariés qui auraient été exposés à certains facteurs de pénibilité ayant occasionné un vieillissement précoce médicalement constaté.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement restreint l'application du compte pénibilité aux cas, peu aisés à déterminer, « d'usure précoce ». Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Également, car notre logique est totalement différente de celle de l'amendement.

M. Gérard Longuet.  - Vous contournez l'âge minimum de départ à la retraite. (Mme la rapporteure s'exclame) Tel est votre choix. Libéral, je laisserais volontiers à chaque salarié le choix entre des formations pour se reconvertir ou un départ anticipé mais le vrai sujet, c'est l'éradication de la pénibilité.

M. Claude Domeizel.  - Bien sûr !

M. Gérard Longuet.  - En réalité, vous ne le traitez pas, vous favorisez les départs anticipés. Choisissez d'investir, de financer l'amélioration des conditions de travail plutôt que de ne rien changer... Cela est possible, par l'automatisation dans l'industrie. Le nettoyage, avec des équipements adaptés, atteint une productivité synonyme de meilleures qualifications et conditions de travail des salariés. (Murmures sur les bancs CRC)

M. Dominique Watrin.  - Quelle générosité ! Qu'entendez-vous, au juste, par « prise en compte de l'usure précoce » ? En 2010, ce furent quelques milliers de départs anticipés...

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis.  - Dix mille !

M. Dominique Watrin.  - ... pour des salariés usés. Ils devaient avoir une incapacité permanente de 20 %, l'équivalent d'une main coupée, et pour une incapacité entre 10 et 20 %, avoir été exposés pendant dix-sept ans à des facteurs de pénibilité. ça ne risquait pas de créer aucun appel d'air, c'est sûr.

L'amendement n°274 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°275, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 23

Remplacer le nombre :

52

par le nombre :

57

M. Gérard Longuet.  - Nous souhaitons améliorer les conditions de travail, au cours d'une carrière complète.

Le coût de votre dispositif nous inquiète : environ 500 millions d'euros en 2020, 2 milliards d'euros en 2030 et 2,5 milliards en 2040. Comment sera-t-il financé ?

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - S'il n'est pas possible de reconstituer intégralement l'exposition à la pénibilité des salariés au cours de la carrière, nous souhaitons faciliter l'acquisition de points. Il appartient aux entreprises de former leurs salariés et d'améliorer leurs conditions de travail. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis. Une période de transition permettra aux salariés concernés de bénéficier de ce système. Le compte sera financé par une contribution des entreprises, à deux étages, provenant pour une part de l'ensemble des entreprises et pour une autre part de celles qui exposent leurs salariés à des conditions de travail pénibles.

Il y a des pénibilités qui ne disparaîtront pas, comme le travail de nuit dans les aéroports...

M. Gérard Longuet.  - L'économie globale, non pas seulement l'entreprise, mais le consommateur en profitent. Les disc-jokeys travaillent de nuit. C'est leur choix - cas marginal, je le reconnais... Les conducteurs ou conductrices des transports nocturnes rendent service à leurs concitoyens. Si certaines personnes acceptent de travailler le soir ou les jours fériés, les consommateurs en bénéficient. (Exclamations sur les bancs CRC) Demander aux seules entreprises de payer la pénibilité n'est pas juste. Les salaires supérieurs la nuit et le dimanche justifient des droits à retraite supérieurs. Plutôt que de les taxer, laisser les entreprises investir dans des procédés et services qui réduisent la pénibilité. (Protestations sur les bancs CRC ; M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis, ironise)

L'amendement n°275 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°378 rectifié, présenté par MM. Mézard, Barbier, Baylet, Bertrand, Collin, Collombat, Esnol et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 23

Remplacer les mots :

peuvent être aménagés

par les mots :

sont aménagés

M. Jean-Claude Requier.  - Cet amendement vise à rendre obligatoire - et non plus simplement facultatif - les aménagements par décret en Conseil d'État de l'acquisition de points, dans le compte de prévention de la pénibilité pour les personnes âgées d'au moins 52 ans au 1er janvier 2015.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis favorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je tiens à vous rassurer. Le Gouvernement en tiendra compte pour rédiger les décrets d'application. Écrire « peuvent » est la meilleure façon, sur le plan juridique, d'autoriser des dérogations à la règle de droit commun. Sagesse. Le juge interprétera la loi à la lumière de nos travaux.

M. Gérard Longuet.  - Cet amendement est excellent : la loi est normative. L'indicatif présent s'impose.

L'amendement n°378 rectifié est adopté

M. le président.  - Amendement n°151, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après l'alinéa 26

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« À l'issue de cette formation, le salarié bénéficie d'une priorité de reclassement dans un poste n'exposant plus les salariés aux facteurs de risques auxquels il était probablement exposé.

Mme Cécile Cukierman.  - Nous demeurons sceptiques sur la formation prévue par cet alinéa. Nous nous félicitons qu'elle puisse ouvrir aux salariés concernés la possibilité de ne plus être exposés aux risques.

Mais une telle formation ne constitue pas une réponse suffisante si elle n'est pas accompagnée d'un droit effectif au changement de poste.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Les formations envisagées pour les titulaires d'un compte visent à réorienter leurs parcours professionnels. L'alinéa visé par cet amendement constitue bien une incitation à se former. On sait que les salariés qui se forment le plus sont les plus qualifiés. Il y a des personnes qualifiées qui travaillent dans des postes exposés, mais aussi des personnes peu ou non qualifiées. C'est pourquoi je suis favorable à cet amendement, sans ignorer les problèmes qu'il pose. Il faut veiller à ce qu'il ne crée pas de discriminations, mais demeure incitatif.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - En effet, cet amendement entraîne des difficultés d'application. Oui, il faut inciter les salariés à se former, en utilisant leurs points pour se réorienter. Comment ce dispositif de formation va-t-il s'articuler avec la formation professionnelle « classique », qui fait l'objet d'une négociation en cours ? Attendons qu'elle soit menée à son terme. Avis défavorable. (On le regrette sur les bancs CRC)

M. Gilbert Barbier.  - Je comprends le souci des auteurs de l'amendement. Mais il y a un problème de priorité. Je vois mal comment l'appliquer. Je suis d'accord avec la ministre.

Mme Annie David.  - J'entends bien que des négociations sont en cours sur la formation professionnelle. Si la formation du salarié exposé ne lui permet pas d'obtenir une priorité de reclassement dans l'entreprise, à quoi sert-elle ? À revenir sur son poste ? Ce serait du temps perdu. Le salarié peut utiliser ses points pour obtenir un temps partiel ou un départ anticipé.

M. Gérard Longuet.  - La rédaction de cet amendement prête à malentendu. Ne faut-il pas lire « préalablement » plutôt que « probablement » exposé ?

Mme Annie David.  - Oui, en effet.

M. Gérard Longuet.  - Je le voterai.

Mme Cécile Cukierman.  - Nous rectifions cette coquille. La concertation engagée sur la formation professionnelle est indispensable. Les négociations en cours ne doivent toutefois pas freiner l'initiative parlementaire.

L'amendement n°151 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°333 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 31

Après les mots :

l'employeur

insérer les mots :

après avoir consulté les délégués du personnel,

Mme Kalliopi Ango Ela.  - Cet amendement encadre le refus par les employeurs du passage au temps partiel d'un employé ayant accumulé suffisamment de points sur son compte personnel de prévention de la pénibilité. Il limitera les contentieux qui pourraient paralyser les entreprises.

Cet alinéa a fait l'objet de débats animés à l'Assemblée nationale. L'argument de l'activité économique pourrait être utilisé par l'employeur pour refuser des formations. La nouvelle rédaction adoptée par les députés, qui limite la possibilité de refus dans le temps, a été rejetée au nom de la recevabilité financière des amendements. Ce texte n'est pas moins catastrophique, puisque trop peu de contraintes pèsent sur les employeurs.

À notre tour nous nous sommes vu opposer la recevabilité financière à notre amendement, en raison de l'intervention financière de l'État. Notre amendement de repli aidera à limiter les abus des employeurs.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Le refus du temps partiel est conditionné à l'activité économique de l'entreprise. Votre amendement ne modifie pas fondamentalement la donne, mais fait entrer le dialogue social dans la procédure. Avis favorable sous réserve d'ajouter « quand ils existent » car toutes les entreprises ne disposent pas de délégués du personnel.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - L'encadrement adopté par l'Assemblée nationale est plus protecteur que le droit commun et que le projet de loi initial. Nous avons atteint un point d'équilibre. Avis défavorable.

Mme Kalliopi Ango Ela.  - Je rectifie l'amendement comme l'a souhaité la rapporteure.

M. Gérard Longuet.  - Je soutiens Mme la ministre. Le délégué du personnel défend les intérêts de celui-ci mais il n'est pas cogestionnaire. S'il l'était, il devrait assumer les décisions de l'entreprise, ce qui n'est pas dans la tradition syndicale française. En Allemagne au contraire, les représentants du personnel siègent au conseil d'administration des entreprises au-delà d'une certaine taille.

Si le refus est motivé, il y a une base juridique à une éventuelle contestation.

Restons dans la rédaction de l'Assemblée nationale : la cogestion n'est pas dans notre culture.

Mme Annie David.  - Je remercie M. Longuet de sa vigilance passée... Je suis toutefois en désaccord avec lui. Le salarié doit pouvoir s'adresser aux délégués du personnel en cas de refus, ou à son comité d'entreprise, car ces derniers sont au courant de la situation économique de l'entreprise.

M. Gérard Longuet.  - Vous avez raison pour le comité d'entreprise.

L'amendement n°333 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°334 rectifié bis, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

I.  -  Alinéa 31

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pour justifier de cette impossibilité, l'employeur réunit, informe et consulte les délégués du personnel.

II.  -  En conséquence, après l'alinéa 31

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de contestation du refus de passage à temps partiel, le salarié peut saisir la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés dans des conditions précisées à l'article L. 4162-13.

Mme Kalliopi Ango Ela.  - Cet amendement encadre le dispositif de refus par l'employeur du passage au temps partiel en prévoyant également des conditions de contestation auprès de la Cnav. Le recours devant les prud'hommes implique une action en justice, à laquelle de nombreux salariés ne veulent pas avoir recours. La procédure devant la Cnav est plus simple, et celle-ci dispose des moyens de les traiter. Délégués du personnel, Cnav, prud'hommes : cet amendement offre des conditions de recours complémentaires aux salariés.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Il est satisfait. Les prud'hommes sont plus compétents que la Cnav, laquelle n'a pas les moyens de peser sur l'employeur.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis. La Cnav n'a aucune compétence pour apprécier la situation économique d'une entreprise.

L'amendement n°334 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°148, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Alinéa 31

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le comité d'entreprise et la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi vérifient le caractère réel et sérieux des motifs de l'employeur.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Il s'agit d'assurer l'effectivité d'un droit. Nous proposons que le comité d'entreprise et la Dirrecte vérifient le caractère réel et sérieux du refus de l'employeur. Celui-ci est juge et partie, il importe qu'un tiers intervienne. Si cet amendement n'était pas adopté, nous serions très inquiets sur l'effectivité du compte pénibilité.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Le comité d'entreprise n'a pas droit de regard sur les décisions prises par l'employeur dans le cadre de la relation individuelle de travail. La Direccte a d'autres missions. En cas de refus infondé, les prud'hommes peuvent être saisis. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Gérard Longuet.  - Nous suivrons l'avis de la rapporteure. Chacun son rôle, aux prud'hommes de jouer le leur.

L'amendement n°148 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°371 rectifié bis, présenté par Mmes Deroche, Procaccia et Bruguière, MM. Milon et Husson, Mme Debré et MM. Cardoux et Gilles.

Alinéa 42, première phrase

Après les mots :

sur pièces et sur place

Supprimer la fin de cette phrase.

Mme Catherine Deroche.  - L'effectivité du contrôle prévu par le texte implique que l'employeur se soumette à des investigations poussées. L'intervention d'organismes habilités aux caractéristiques juridiques non définies soulève de nombreuses difficultés. Le législateur leur confie des prérogatives de contrôle sans s'être assuré qu'elles peuvent être exercées par des personnes autres que les « organismes gestionnaires mentionnés à l'article L. 4162-10 ». La constitutionnalité de cette disposition est incertaine.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Les Carsat n'ont pas les moyens de mener de tels contrôles : elles doivent s'appuyer sur d'autres organismes, publics ou privés. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette question importante ?

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Les Carsat n'ont pas l'expertise requise, elles doivent pouvoir s'appuyer sur l'appréciation d'un tiers. La puissance publique habilitera les organismes chargés de cette expertise. Un tel mécanisme existe déjà dans notre droit à l'article L. 4722-2 du code du travail.

M. Gérard Longuet.  - L'État peut toujours s'appuyer sur des expertises, mais il n'en faut pas moins s'interroger sur l'indépendance et la compétence des organismes qui les délivrent et des prérogatives de puissance publique dont ils pourraient être dotés, comme la faculté de mener des contrôles sur pièces et sur place. Pareille inquisition peut aller fort loin. Attention à ne pas donner à d'autres entités le pouvoir de prendre des décisions qui n'appartiennent qu'aux autorités publiques. Les comités d'entreprise font souvent appel à des bureaux d'études, connus pour être rattachés à des organisations ouvrières. L'habilitation devra être fondée sur des critères transparents. Nous aurons certainement à suivre l'application de cet article.

L'amendement n°371 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°152, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Alinéa 42, dernière phrase

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

dix

M. Michel Le Scouarnec.  - Cet article autorise les gestionnaires à effectuer des contrôles sur pièces et sur place. Mais le délai de recours est très court : cinq ans à compter de la fin de l'année d'inscription des points au compte pénibilité. Cet amendement porte ce délai à dix ans. Les fusions de Carsat rendent notamment cette mesure nécessaire afin de préserver l'effectivité du droit au recours.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - L'Assemblée nationale a déjà porté ce délai de trois à cinq ans. Les salariés peuvent avoir quitté leur entreprise après dix ans... Et les informations sur l'exposition seront-elles encore disponibles ? Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

Mme Annie David.  - C'est une possibilité, non une obligation. Il s'agit de donner plus de droits aux salariés en leur offrant la possibilité de remonter plus loin dans le temps.

M. Jean Desessard.  - C'est de l'archéologie !

M. Gérard Longuet.  - La réponse du Gouvernement et de la rapporteure me préoccupe. En matière pénale, je suis partisan de la prescription car l'oubli fonde la paix sociale. Mais en matière civile, il n'y a pas de prescription. Je suis d'accord avec Mme David. S'il y a un droit, pourquoi priver les personnes d'en jouir ? Je voterai l'amendement.

L'amendement n°152 est adopté.

M. Jean Desessard.  - Collusion ! (Sourires)

M. le président.  - Amendement n°370 rectifié bis, présenté par Mmes Deroche, Procaccia et Bruguière, MM. Milon et Husson, Mme Debré et MM. Cardoux et Gilles.

Alinéa 42

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les contrôles mis en oeuvre en vertu du présent article sont diligentés dans le respect des principes du contradictoire et des droits de la défense.

Mme Catherine Deroche.  - C'est essentiel pour éviter les abus.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement est satisfait par la jurisprudence comme par la pratique.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Gérard Longuet.  - Ce qui va sans dire...

M. Jean Desessard.  - Vous avez beaucoup d'avis !

M. Gérard Longuet.  - Rappeler la jurisprudence ne coûte rien et fait du bien aux droits de l'homme.

L'amendement n°370 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°276, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

I. - Alinéa 44, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

II. - Alinéa 66

Supprimer les mots :

, ainsi que la prise en charge des dépenses liées aux frais des expertises mentionnées à l'article L. 4162-12

M. Gérard Longuet.  - Le futur fonds pénibilité ne doit pas être mobilisé pour financer les contentieux éventuels liés au compte personnel de prévention de la pénibilité. Dans la mesure où le coût du dispositif est encore très incertain, cet amendement propose de ne pas faire financer les frais d'expertise par les tribunaux des affaires de sécurité sociale par le fonds pénibilité, c'est-à-dire par les entreprises qui en seront les financeurs exclusifs, et donc revenir au droit commun, où ces frais sont pris en charge par l'État et la Cnav.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cette prise en charge est une vraie avancée. Les cotisations versées à titre de compensation de la pénibilité doivent financer les expertises : avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°276 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié ter, présenté par Mme Lienemann, MM. Godefroy et Labazée, Mme Claireaux et M. Rainaud.

Alinéa 45, première phrase

Remplacer les mots :

que s'il

par les mots :

que si lui-même ou un représentant du personnel choisi par lui

M. Georges Labazée.  - Cet amendement précise les conditions de réclamation du salarié sur le compte pénibilité. Le texte conditionne la saisine à une contestation préalable devant l'employeur. Le salarié pouvant être représenté ou assisté par une personne de son choix au sein du personnel de l'entreprise, la contestation effectuée par ce représentant pour le compte du salarié devant l'employeur doit remplir la même condition.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - La situation est différente dans la saisine de la Carsat. La démarche doit être celle du salarié lui-même, les délégués du personnel ne peuvent se substituer à lui. Retrait ou avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis : la démarche doit être entreprise par le salarié.

L'amendement n°13 rectifié ter est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°153, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Alinéa 45, seconde phrase

Après le mot :

appartenant

insérer les mots :

ou non

Mme Michelle Demessine.  - L'alinéa 45 équilibre le dispositif. Mais le salarié doit pouvoir, dans le contentieux avec son employeur, se faire assister par toute personne de son choix, qu'elle soit salariée ou non de l'entreprise.

Beaucoup d'entreprises n'ont pas de représentants du personnel. Le dispositif est compliqué et les contestations sont à craindre. Le droit doit s'appliquer de la même façon partout. Cette situation est déjà prévue par le code du travail.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Avis favorable, sous réserve d'une précision ; il faudrait ajouter : « ou, lorsqu'il n'y a pas d'institution représentative du personnel dans l'entreprise, par le conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative ».

M. le président. - Ce sera l'amendement n°153 rectifié.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Ce n'est pas à l'occasion du débat sur la pénibilité que nous pouvons aborder cette question. Avis défavorable.

Mme Annie David.  - Ce n'est pas une mesure nouvelle. Le dispositif existe en cas de licenciement : le salarié peut se faire aider par des conseillers munis d'une carte et inscrits sur des listes. Ce n'est pas un droit nouveau. Je remercie Mme la rapporteure de sa proposition.

M. Jean Desessard.  - La politique, c'est l'art de répéter les choses... mais aussi d'aller ensemble... (Sourires) On se cherche...

M. Gérard Longuet.  - Surtout vous !

M. Jean Desessard.  - Les téléspectateurs trouveraient peut-être nos débats répétitifs. (Rires) Vous avez dit « ou non »... C'est un peu court, vous auriez pu dire « une certaine personne qui s'y connaît ». (On s'amuse sur les bancs CRC) Merci au groupe CRC pour son amendement d'appel ! Merci, madame la rapporteure, pour votre rectification, qui motive mon vote enthousiaste.

M. Gérard Longuet.  - Un conseiller de salarié est compétent en droit du travail, un droit qui s'applique à tous les salariés. L'application des règles de pénibilité doit tenir compte de la spécificité de chaque entreprise. Nous nous abstiendrons.

Le débat au sein de la majorité illustre en réalité le caractère inapplicable du texte. Les grands sites industriels ne sont pas les entreprises de moins de dix salariés : vous n'avez pas ici les compétences que vous avez là. Désigner une personne extérieure non compétente affaiblirait le dispositif.

L'amendement n°153 rectifié est adopté.

L'amendement n°245 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°154, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Alinéa 50, première phrase

Remplacer le mot :

trois

par le mot :

cinq

Mme Annie David.  - Rien ne justifie que le délai de prescription imposé aux salariés soit plus court que celui dont disposent les organismes. Les deux délais doivent coïncider, sans quoi l'action des caisses serait limitée.

L'amendement n°277 est retiré.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - L'Assemblée nationale a fait passer le délai de deux à trois ans. C'est le délai de droit commun. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable. Plus on s'éloigne des faits, plus il est difficile de démontrer la situation de pénibilité. Restons aussi près que possible du droit commun pour rendre effectifs les droits des salariés.

Mme Catherine Génisson.  - Pourquoi les délais sont-ils différents pour les employeurs et les salariés ?

M. Jean Desessard.  - Je ne sais pas répondre à cette question... (Sourires) Mais j'en ai une autre. Je suppose que les critères de pénibilité seront actualisés. Si la pénibilité du travail d'un salarié est reconnue tardivement, y a-t-il rétroactivité ? Il vaut mieux, dans cette hypothèse, porter le délai à cinq ans...

M. Michel Le Scouarnec.  - Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Il n'y a pas de rétroactivité, c'est un principe fondamental du droit. Madame Génisson, le salarié connaît sa situation. La caisse elle - et non l'employeur - ne vérifie pas chaque situation en continu. Elle effectue des contrôles inopinés ou statistiques. Il lui faut donc plus de temps.

M. Gérard Longuet.  - Je suis un peu perdu. Les salariés qui ont des droits doivent avoir le temps de les faire reconnaître. Trois ans avant de perdre ses droits, je trouve cela court. C'est l'opposition de Créon à Antigone. L'État a intérêt à une prescription rapide, mais pas l'individu. Or ici, l'ordre public n'est pas menacé, il s'agit de droits patrimoniaux, de liberté individuelle. Nous sommes en matière civile.

M. Jean Desessard.  - Pourquoi vous abstenir alors ?

M. Gérard Longuet.  - Car je ne comprends pas tout ! Je ne veux pas regretter mon vote...

M. Claude Jeannerot.  - Ce délai des trois ans est en harmonie avec les règles contenues dans le code du travail, adoptées notamment dans le cadre de la loi de sécurisation de l'emploi.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°154, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°363, présenté par M. Vanlerenberghe et les membres du groupe UDI-UC.

Après l'alinéa 71

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ces recettes ne peuvent excéder un montant déterminé annuellement en loi de financement de la sécurité sociale.

M. Gérard Roche.  - Cet amendement limite les fonds collectés pour financer la pénibilité à une enveloppe déterminée en loi de financement de la sécurité sociale, afin de prévenir tout emballement non maîtrisé de la montée en charge financière du dispositif.

Selon les estimations du Gouvernement, 300 000 personnes profiteront du dispositif à l'horizon 2035, pour un montant supérieur à 2,5 milliards d'euros.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Il est difficile de prévoir chaque année le niveau de financement. Fixer un plafond ferait courir le risque de ne pas faire face aux remboursements en fin d'année. Aucun emballement n'est à craindre. Avis défavorable à défaut d'un retrait.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Gérard Roche.  - Non, je le maintiens.

M. Gérard Longuet.  - Le groupe UMP est favorable à cet amendement qui montre l'équivoque du dispositif, dont il est difficile d'évaluer la portée financière. Vous ne pourrez le financer qu'en ponctionnant encore les entreprises, au détriment de l'emploi.

M. Jean Desessard.  - Je voterai contre l'amendement. Évaluer à l'avance les montants en jeu est contraire à l'esprit du dispositif.

M. Gérard Roche.  - Pourquoi ne pas fixer ces sommes en loi de finances ? Cela permettrait de coller à la réalité comme pour l'Ondam. Ce serait judicieux et salutaire pour les finances de l'État.

Mme Catherine Deroche.  - Le dispositif ne s'emballera pas selon la rapporteure, mais on ne peut le chiffrer : c'est contradictoire. Nous dénonçons ce mécanisme depuis le début. Je n'étais pas très favorable à cet amendement, mais M. Longuet m'a convaincue.

L'amendement n°363 n'est pas adopté.

M. le président.  - Nous allons passer au vote sur l'article 6.

M. Dominique Watrin.  - Le compte pénibilité est un progrès par rapport au système issu de la loi de 2010.

Cela étant, ce n'est pas la panacée. Trop de questions n'ont pas trouvé de réponse. Trop d'alinéas renvoient à des décrets, de sorte que nous nous exprimons sur un mécanisme dont nous ignorons les modalités.

Nous remercions la rapporteure d'avoir fait en sorte que soient adoptés deux de nos amendements. Le reclassement prioritaire après une formation est une avancée. Mais nous regrettons que vos amendements relatifs au contrôle par le comité d'entreprise, à la définition des seuils et au rôle du CHSCT, n'aient pas été adoptés. Nous craignons enfin que les employeurs n'échappent au financement du compte pénibilité.

Nous nous abstiendrons par conséquent.

M. Jean Desessard.  - Nous voterons l'article 6, qui marque une avancée importante. On constitue un passeport social, dont les droits issus de la pénibilité font partie. Il faut de la transparence. Les personnes en situation précaire concentrent les inquiétudes. La tenue de leurs fiches demandera un effort administratif certain. Il faudra que les services concernés s'adaptent.

Mme Kalliopi Ango Ela.  - Très bien !

M. Gérard Longuet.  - Cet article est important. Nous avions commencé en 2003, continué en 2010, à défricher le terrain de la pénibilité, sans obtenir un résultat tout à fait satisfaisant. Le problème est plus compliqué qu'il n'y paraît. L'une des dix causes de pénibilité concerne 18 % des salariés et, si l'on considère la conjonction de deux de ces causes, ils sont encore 2 ou 3 % à être concernés. C'est dire l'enjeu financier, à la charge des entreprises si l'on vous suit. D'ici 2020, on va dans une impasse qui ne pourra être comblée que par des cotisations des entreprises ou des financements de l'État.

Le dispositif ouvrant droit à un départ anticipé à 52 ans crée une aspiration et des effets pervers : l'acceptation de la pénibilité. Celle-ci doit être réduite, éradiquée ; cela coûte cher, en investissement, en formation, en organisation. Nous avons vécu cela avec l'amiante. La bataille pour la pénibilité sera ouverte à chaque rentrée sociale. Ce sera une source permanente de conflits dans l'entreprise. Dans les petites entreprises, elle découragera l'emploi.

Nous ne voterons donc pas l'article 6 en l'état. Nous aurions voulu progresser, nous ne sommes pas hostiles à une évolution. Je regrette le recours à la procédure d'urgence qui nous prive d'une possibilité d'amélioration du texte. La CMP n'aboutira pas. Ne restera qu'un effet d'affichage sur la pénibilité, une bombe à retardement qui explosera lors de la prochaine alternance.

M. Claude Domeizel.  - Cet article est très important. Les amendements ont cerné les contours de ce compte pénibilité. Le groupe UMP voulait le supprimer. Nous le voterons, même si quelques modifications nous chagrinent.

M. Gilbert Barbier.  - À titre personnel, je ne le voterai pas. L'inconnue financière n'est pas maîtrisable. La rapporteure a eu la franchise de le reconnaître. (Mme la rapporteur le conteste)

On ne traite pas le problème de la pénibilité. D'autres aspects auraient dû être abordés. Ce texte sera difficile et complexe à interpréter. On renvoie à des décrets incertains. Qui souffrira de cette complexité ? Pas les grandes entreprises, qui ont des DRH et des conseils, mais les petites, qui réfléchiront encore plus avant d'embaucher.

M. Gérard Roche.  - Le groupe UDI-UC se félicite de ce que ce projet de loi se saisisse de la pénibilité de façon objective. Nous nous sommes abstenus sur l'amendement de suppression pour laisser fleurir le débat. Il n'a pas apporté ce que j'aurais souhaité. Il y a confusion entre deux volets qui devraient être distingués, la prévention et la réparation. Le travail devait être mieux préparé : incertitude sur les décrets, incertitude financière. Nous ne voterons pas cet article.

M. Claude Jeannerot.  - Ne laissons pas s'installer une contrevérité, selon laquelle nous prendrions des risques financiers inconsidérés. La loi de 2010 établissait un lien conceptuel entre pénibilité et retraite...

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Oui.

M. Claude Jeannerot.  - Il est aujourd'hui traité concrètement, sous l'angle de la prévention, qui a pour objectif d'éradiquer toute pénibilité, et celui de la réparation. Une dépense ? Un investissement plutôt, qui à terme produira des économies, quand la pénibilité aura été supprimée.

Cet article 6, sous réserve de ses décrets d'application, marque une avancée considérable.

À la demande du groupe UMP, l'article 6, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 326
Pour l'adoption 156
Contre 170

Le Sénat n'a pas adopté.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 31 octobre 2013, à 10 heures.

La séance est levée à une heure.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du jeudi 31 octobre 2013

Séance publique

À 10 heures

1. Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, garantissant l'avenir et la justice du système de retraites (n° 71, 2013-2014).

Rapport de Mme Christiane Demontès, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 95, 2013-2014).

Rapport d'information de Mme Laurence Rossignol, fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (n° 90, 2013-2014).

Résultat des travaux de la commission (n° 96, 2013-2014).

Avis de M. Jean-Pierre Caffet, fait au nom de la commission des finances (n° 76, 2013-2014).

À 15 heures

2. Questions d'actualité au Gouvernement.

À 16 h 15

3. Suite de l'ordre du jour du matin.

SCRUTINS PUBLICS DU MERCREDI 30 OCTOBRE 2013

Scrutin n° 35 sur l'amendement n°255, présenté par M. Gérard Longuet et les membres du groupe UMP, tendant à supprimer l'article 3 du projet de lois sur les retraites.

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 346

Suffrages exprimés : 326

Pour : 170

Contre : 156

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Union pour un Mouvement Populaire (132)

Pour : 131

N'a pas pris part au vote : 1 - M. J.P. Raffarin, président de séance

Groupe socialiste et apparentés (127)

Contre : 127

Groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC (32)

Pour : 32

Groupe communiste républicain et citoyen (20)

Abstentions : 20

Groupe du RDSE (19)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 17

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Robert Hue

Groupe écologiste (12)

Contre : 12

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (6)

Pour : 6

Scrutin n° 36 sur l'amendement n°260, présenté par M. Gérard Longuet et les membres du groupe UMP, sur l'amendement n°327 rectifié, présenté par M. Jean Desessard et les membres du groupe écologiste, sur l'amendement n°359, présenté par M. Jean-Marie Vanlerenberghe et les membres du groupe UDI-UC, sur l'amendement n°376 rectifié présenté par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues et sur l'amendement n°397 présenté par M. Gilbert Barbier, tendant à supprimer l'article 4 du projet de lois sur les retraites.

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 347

Suffrages exprimés : 346

Pour : 221

Contre : 125

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Union pour un Mouvement Populaire (132)

Pour : 132

Groupe socialiste et apparentés (127)

Pour : 1 - Mme M.N. Lienemann

Contre : 125

Abstention : 1 - M. J.P. Godefroy

Groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC (32)

Pour : 32

Groupe communiste républicain et citoyen (20)

Pour : 20

Groupe du RDSE (19)

Pour : 18

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Robert Hue

Groupe écologiste (12)

Pour : 12

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (6)

Pour : 6

Scrutin n° 37 sur l'article 6 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 346

Suffrages exprimés : 326

Pour : 156

Contre : 170

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe Union pour un Mouvement Populaire (132)

Contre : 132

Groupe socialiste et apparentés (127)

Pour : 127

Groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC (32)

Contre : 31

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Léonce Dupont, président de séance

Groupe communiste républicain et citoyen (20)

Abstentions : 20

Groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen (19)

Pour : 17

Contre : 1 - M. Gilbert Barbier

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Robert Hue

Groupe écologiste (12)

Pour : 12

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (6)

Contre : 6