Action publique territoriale (Deuxième lecture - Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Hervé Marseille .  - La région Capitale est une puissance économique et démographique à l'échelle européenne. C'est 30 % du PIB français et le premier bassin d'emploi européen. Sa gouvernance doit être adaptée à ses ambitions. Or, l'absence d'un cap stratégique nuit à l'efficacité de l'action publique. Le retour de l'État est source de conflits. Ce texte contribuera-t-il à rendre à la puissance publique son efficacité, à résoudre la crise du logement ? Non car c'est une vision anachronique, d'un autre siècle, ravivant le conflit entre Paris et sa banlieue, qui nous est proposée.

L'établissement d'une nouvelle structure intercommunale tentaculaire crée méfiance et suspicion. Le projet du Grand Paris manque sa cible. Il ne fédère pas les énergies. Je plaide, comme l'écrasante majorité des acteurs locaux, pour un vrai projet, inscrivant son évolution dans les principes de la décentralisation, au premier rang desquels la subsidiarité.

Revenir sur l'acquis du suffrage universel direct pour diriger la région Métropole est une erreur. La structure que l'on met en place ne sera qu'une fiction technocratique, loin des enjeux du quotidien. Le consentement à l'impôt impose la lisibilité institutionnelle. Or, tout restera, pour le citoyen, illisible.

C'est autour des instances existantes qu'il faut structurer les choses. La métropole du Grand Paris pourrait devenir un EPCI s'appuyant sur les intercommunalités existantes. Je salue les efforts de M. Vandierendonck pour rapprocher les points de vue. Les citoyens veulent être associés aux enjeux. Les associations d'élus ont dit leur volonté d'une dynamique ascendante et partagée, loin de ce projet. Notre assemblée, qui représente les collectivités, s'honorerait à faire sienne ces vues. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Christian Favier .  - La marche forcée s'accélère, qui va bouleverser nos institutions locales. Les grandes associations d'élus s'émeuvent.

M. Pélissard, président de l'AMF, voit dans la métropole un danger de marginalisation pour les maires. (Applaudissements sur de nombreux bancs UMP)

Les états généraux de la démocratie territoriale avaient permis aux élus d'exprimer leur désarroi et leurs attentes : respect de tous les échelons, statut de l'élu, chacun s'accordant sur le rôle primordial des communes et le besoin d'une présence forte de l'État à leurs côtés. Vous avez choisi un vote rapide et tronqué, sous injonction de Bruxelles : il faut réduire les dépenses. J'en veux pour preuve la récente communication du Conseil européen, en mai, qui appelle à une rationalisation des différents niveaux de compétences et voit dans la loi de décentralisation le moyen de l'effectuer.

M. Éric Bocquet.  - Limpide !

M. Christian Favier.  - Cette loi n'a pas été écrite ici mais à Bruxelles, sous le diktat des marchés financiers. Peu importe la vie locale et l'avis des élus. A six mois des élections municipales, on ne sait quelles compétences seront dévolues aux élus.

Comment concilier le principe de développement équilibré des territoires avec les métropoles, qui concentreront les ressources ? C'est le choc des territoires, par leur mise en concurrence, que vous organisez. Deux mondes vont se côtoyer, avec des rapprochements forcés en pôles, urbains d'un côté, ruraux de l'autre, au détriment du vivre ensemble. Au lieu de l'action, reconnue, des élus locaux, vous nous proposez une recentralisation technocratique, froide.

Sur la Conférence territoriale, nous avions soutenu le texte du Sénat, mais qui s'inscrit dans un ensemble -dans lequel serait remis en cause le principe d'égalité des citoyens. Car la mise en oeuvre des compétences dévolues à l'État se ferait à partir de territoires, selon des modalités très diverses. Nous voulons faire confiance à l'intelligence locale et c'est pourquoi nous rejetons le projet de métropole du Grand Paris, monstre technocratique auquel les trois quarts des maires sont hostiles, qui lui préfèrent une construction fondée sur les intercommunalités existantes. Nous défendrons des amendements porteurs d'une logique solidaire. Ce qui devait constituer l'acte III de la décentralisation n'est qu'un rendez-vous manqué. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Que reste-t-il des espoirs suscités par les états généraux il y a juste un an ? L'enthousiasme est retombé. Statut de l'élu ? Pour l'heure, rien que l'assujettissement de leurs indemnités à cotisations, sans garantie supplémentaire. La gouvernance départementale ? Le mode de scrutin binominal est défavorable aux territoires dont une partie est urbanisée, et il délie le conseiller départemental de son territoire. (Marques d'approbation à droite)

En multipliant les métropoles, on aboutira à ce paradoxe que leurs représentants gèreront la politique des territoires non métropolitains. L'assemblée départementale deviendra muette sur les compétences qu'elle aura transférées. Autant on peut comprendre la solution retenue à Lyon, dans un territoire très urbanisé, autant elle ne vaut pas ailleurs. La richesse va ruisseler des métropoles vers les communes rurales ? C'est affaire de foi. Sans compter que 75 % des emplois dépendent non de l'international mais des débouchés locaux.

Le Haut conseil des territoires ? Comment ne pas y voir le brouillon du futur Sénat voulu par Lionel Jospin ? (Applaudissements à droite)

Les collectivités territoriales seront réduites au rôle de chambres d'enregistrement des décisions du Haut conseil, puisqu'il peut faire toute proposition de réforme des politiques publiques qu'elles conduisent. Cela rappelle la Constitution consulaire de l'An 8 : le Tribunat discutait sans les voter les projets de loi préparés par le Conseil d'État, et que le Corps législatif votait sans les discuter. C'est probablement ce qu'on appelle, en Terra nova, modernisation de la vie publique. Notre groupe ne saurait s'accommoder de cette marginalisation du Sénat. (« Très bien ! » à droite)

Je salue toutefois le rapporteur Vandierendonck pour son travail de Sisyphe : le pire a été évité. Je n'oublie pas non plus les efforts du Gouvernement pour promouvoir une politique efficace de prévention des inondations. Il y a certes ceux qui préfèrent le statu quo -que les inondations continuent. Les sinistrés apprécieront.

« Il faut imaginer Sisyphe heureux », prêchait Albert Camus. Nous verrons comment il sortira de ce débat. (Applaudissements sur les bancs RDSE, au centre et à droite)

M. Gérard Collomb .  - Je suis heureux du déroulement de ce débat en commission et dans l'hémicycle. Nous nous y sommes tous engagés avec notre point de vue. Mais nous avons tenté de construire des convergences, pour avancer, en évitant les faux débats, pour prendre en compte les réalités de la France d'aujourd'hui, qui est diverse. Il y a celle des petites villes, que nous avons essayé de renforcer avec l'intercommunalité et des communautés urbaines. Il y a celle des métropoles, une dizaine, qui peut lui donner sa place dans la compétition internationale.

Il y a la France rurale, enfin, de l'Est aux Pyrénées en passant par le Massif central, qui doit aussi pouvoir agir. Dans cette France-là, il faut renforcer les pouvoirs du département. (« Très bien ! » à droite)

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Très bien.

M. Gérard Collomb.  - Je suis heureux que ce que nous avons fait avec M. Mercier à Lyon ait donné une impulsion. Je suis sensible, madame Joissains, à la façon dont vous exprimez votre conviction de représenter vos concitoyens mais je suis persuadé que le territoire d'Aix-Marseille n'avancera pas sans réunir ses forces.

Sur l'Ile-de-France, beaucoup considéraient que le texte initial manquait d'ambition parce qu'il manquait de consensus. Le texte de l'Assemblée nationale a le mérite d'exister. La fragmentation est un vrai problème en Ile-de-France. En dix ans, Londres a gagné quinze points de PIB supplémentaires. Il faut donc aller de l'avant. Le rapporteur a essayé de rechercher des convergences. Rien ne serait pire que de sortir de cet examen sans accord sur un texte. C'est tout notre travail ici qui pourrait être mis en cause. Dans ce travail, c'est l'intelligence des territoires qui s'est exprimée. Il est de notre responsabilité, parce que nous représentons les collectivités territoriales dans leur diversité, que nous indiquions la voie de l'avenir. (Applaudissements à gauche)

M. Roger Karoutchi .  - Le texte de départ était inacceptable. Je salue les efforts du rapporteur pour avancer. Pour autant, ce texte n'est pas satisfaisant. Nous n'entendons par rendre copie blanche car il n'est pas question que l'Assemblée nationale nous impose son texte initial. Il faut donc réécrire l'article, ou du moins le modifier.

Oui, l'Ile-de-France a des difficultés. Mais ce qui intéresse nos concitoyens, c'est le logement, les transports, le traitement des déchets, pas les structures. Depuis cent ans, on a laissé se concentrer la population sur la capitale, d'où les difficultés qu'il nous faut aujourd'hui traiter. Je suis Gérard Collomb quand il plaide pour des solutions diverses. Mais le problème, c'est que la loi ne permet pas d'établir un EPCI Métropole coexistant avec les EPCI locaux. Ce qu'il faut regarder, c'est le travail considérable des élus locaux, qui ont une rude tâche à accomplir. (On approuve sur plusieurs bancs à droite) Ils font un immense travail, cessons de dire que les choses ne se font pas. Ce n'est pas en créant une métropole que l'on aura, d'un coup, des logements en nombre, des transports performants. Peut-être eût-il mieux valu, au départ, créer une région Métropole plus étroite et plus intégrée, mais on ne va pas changer la carte des régions aujourd'hui.

M. Bruno Sido.  - Pourquoi pas ?

M. Roger Karoutchi.  - Créons une métropole sur Paris et la petite couronne mais ne tuons pas les EPCI. Les équipes fonctionnent, qui ont une habitude de travail en commun. Le citoyen à qui l'on faire croire que la métropole va tout changer, quand il verra que le métro ne marche pas mieux, ni les services publics de proximité, et que son maire lui répondra qu'il n'a plus aucune responsabilité, il sera bien déçu.

Il faut avancer en créant une métropole sur le territoire de Paris et de la petite couronne, sans tuer les communes ni les EPCI. Ne soyons pas injustes avec les élus qui sont confrontés, comme sur d'autres territoires, à des problèmes ici aggravés par la taille de la région. Commençons par créer un établissement public respectant les EPCI existant. Nous sommes en retard sur le grand Londres, faute de volonté politique et de décisions économiques réfléchies.

Mesdames les ministres, je sais que le Parlement n'est pas toujours le plus efficace mais que la ministre du logement ait déjà envoyé une lettre au directeur de l'établissement public foncier d'Ile-de-France pour lui dire qu'il serait chargé de la préfiguration de la métropole, c'est un camouflet pour le travail que nous tentons de faire ici ! (Applaudissements à droite)

M. Vincent Capo-Canellas .  - Quelles solutions pour le Grand Paris ? La commission des lois a amélioré le texte de l'Assemblée nationale. Je proposerai des amendements pour l'améliorer encore, notamment en donnant une existence juridique aux territoires.

L'Assemblé nationale a voulu imposer le fait métropolitain, autour d'un périmètre clair, avec une mutualisation des moyens. Un financement puissant et autonome est possible sans pulvériser la coopération intercommunale. C'est le but de deux de mes amendements.

Dans la version du rapporteur, le territoire équivaut à l'arrondissement, mais est au-dessus de la commune : cela ne tient pas debout. (M. Philippe Bas approuve) Un autre schéma est possible, qui dote la métropole d'un financement propre sans assécher le financement de proximité des EPCI. On évite ainsi le yo-yo. Le symbole, aussi, fait débat. La métropole, dans ce schéma, ne peut être qu'un syndicat mixte. Mais c'est un syndicat mixte d'un type nouveau, qui permet des évolutions d'avenir.

Cette solution, nous dit-on, est proche de celle du Gouvernement en première lecture. Qu'il s'y rallie alors avec panache ! En réalité, nous allons plus loin, en finançant la métropole pour qu'elle existe vite et soit efficace. C'est une bonne façon, pour le Sénat, de réengager le débat avec l'Assemblée nationale. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Vincent Eblé .  - Sur le fait métropolitain, nous nous sommes retrouvés en première lecture mais sans trouver de solution consensuelle pour Paris. Nous avons, depuis, évolué et nos débats devraient aboutir.

Vient d'abord la question du périmètre. Certains restent binaires, la métropole d'un côté, le reste de l'autre. Je serai plus nuancé. Il est des zones qui subissent l'impact de la ville et des territoires ruraux. Le nombre d'amendements déposés me rassure. Le sujet de la relation de la métropole avec sa périphérie sera traité. Les zones denses de la grande couronne sont connectées au coeur de la métropole. Or, si la carte intercommunale est achevée, certains EPCI sont encore de trop petite taille face à ce que sera la métropole. Il faut susciter des EPCI de taille critique : d'où le seuil de 100 000 habitants que nous proposons. Les zones denses sont aussi l'interface avec la ruralité, qui contribue pour beaucoup à la vie de la métropole : prélèvement de sable et d'eau, dépôt de déchets, installation de plates-formes aéroportuaire et de zones logistiques, et j'en passe. Ils devront demain protéger la grande métropole des crues. Ceux qui vivent sur ces territoires craignent la relégation. Il faut tisser des liens, qui ne peuvent s'établir dans la confrontation spatiale. Gardons-nous de briser la fonction d'interface que jouent les zones denses de la grande couronne. Le périmètre métropolitain ici défini répond à ce besoin. Il faut aller plus loin. D'où mon amendement sur les Conférences territoriales départementales, chargées de représenter les départements de la grande couronne. Les pôles d'équilibre proposés par M. Filleul sont une avancée, mais il sera difficile d'associer les conseils généraux. La réflexion sur la solidarité financière doit se poursuivre. Il faut stabiliser la gouvernance, en prenant mieux en compte les attentes des territoires. Puissent nos débats nous aider à atteindre nos objectifs. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mlle Sophie Joissains .  - Penchons-nous un instant sur la commune, bâtie au fil des siècles par l'homme.

M. Charles Revet.  - On l'oublie.

Mlle Sophie Joissains.  - Voilà qui lui donne la plus haute légitimité. Elle a bâti un pouvoir particulier, celui du maire, qui trouve son onction dans les urnes, dans la proximité. Où est la proximité dans la métropole ? Demain, dans la métropole d'Aix-Marseille, la collecte des ordures ménagères à Aubagne ou Martigues dépendra de Marseille. A qui les commerçants s'adresseront-ils en cas de problème ? Avec les listes de conseillers communautaires désignés par les partis, on va perdre le lien direct avec le citoyen. Ce texte vise, un peu, à satisfaire des objectifs financiers. M. Favier l'a dit. L'Europe le veut. Mais on ne répondra pas à son souhait car ce mécanisme sera coûteux.

Pas de tutelle, pas de curatelle, ont dit le président et le rapporteur de la commission. Quand j'ai entendu cela, j'ai cru rêver. Quand on voit le nombre d'élus qu'aura la cité phocéenne, on voit bien qui gouvernera. Où est la démocratie ?

Les grandes associations d'élus se mobilisent. M. Destot s'émeut au nom des maires des grandes villes, M. Pélissard pour toutes les communes. Nous serions des égoïstes, prêts à laisser Marseille à ses cruels problèmes ? Nullement. Nous travaillons sur des projets communs. Nous avons consenti à Marseille des charges de centralité conséquentes mais nous ne voulons pas d'une métropole intégrée qui nous ôte toute autonomie de gestion, tout lien direct avec nos populations. Marseille est une ville formidable mais blessée et nous ne voulons pas que ses problèmes gagnent le reste du territoire.

Or, la métropole sera compétente en matière de sécurité et de politique de la ville. Aujourd'hui, nous arrivons à maintenir la sécurité dans nos villes. Demain, tous les moyens iront à Marseille ! Tout le reste du département sera en péril. Que le président de la République écoute les élus et respecte les communes !

La gauche a gagné le Sénat contre la loi de 2010. Les élus locaux ont la mémoire longue. Le PLUI, prévu par la loi Alur, suscite déjà des pétitions. Réfléchissez-y. (Applaudissements à droite)

M. Philippe Kaltenbach .  - Ce texte a été profondément bouleversé d'une lecture à l'autre. Certains, comme M. Karoutchi, semblent regretter le texte initial du Gouvernement... (M. Roger Karoutchi dément) Je crois, au contraire, que la solution trouvée répond aux difficultés des habitants de la zone dense et préserve la commune comme lieu de la démocratie locale.

Le texte de la commission des lois est audacieux. Les inégalités en Ile-de-France sont telles qu'il faut agir : la métropole révolutionnera la solidarité entre Paris et sa proche banlieue.

Les départements de la petite couronne ont-ils vocation à subsister ? Je ne le crois pas. Je proposais de les fusionner avec la métropole ; on m'a opposé l'article 40. On n'a pas opposé le même article à l'amendement de M. Dallier...

M. Philippe Dallier.  - C'est que je suis membre de la commission des finances ! (Sourires)

M. Philippe Kaltenbach.  - Le risque est que nos concitoyens ne comprennent plus rien, que certains départements cherchent à s'opposer à la métropole : je suis élu des Hauts-de-Seine, volontiers isolationniste et accroché à ses privilèges... J'ai rencontré des maires UMP inquiets de la perte de la compétence logement et de la péréquation...

M. Roger Karoutchi.  - On la subit déjà !

M. Claude Dilain, rapporteur pour avis.  - Pas assez !

M. Philippe Kaltenbach.  - Il est urgent de mieux répartir les recettes fiscales : on construit, à Puteaux, grâce aux retombées de La Défense, un conservatoire pour 70 millions d'euros alors que d'autres territoires sont à la peine !

Mainmise de Paris sur la banlieue ? C'est plutôt l'inverse, vu la proportion d'élus parisiens au sein de la métropole. Je serais élu à Paris, je m'inquiéterais plutôt...

Fin des communes ? Au contraire, puisque tous les maires seront membres du Conseil de métropole. C'est beaucoup plus satisfaisant que la seule représentation des EPCI. Faisons confiance aux maires pour prendre les bonnes décisions dans l'intérêt des citoyens.

Le groupe socialiste votera ce texte. C'est à mes yeux une étape décisive... en attendant la fusion des départements. (Applaudissements au banc des commissions)

M. Philippe Dallier .  - (« Ah ! » sur divers bancs) En première lecture, je vous avais fait part de mon immense déception : on nous proposait un vague syndicat mixte, sur un périmètre improbable, sans moyens financiers propres, une couche supplémentaire au millefeuille au lieu d'une véritable métropole. Heureusement, le Sénat a rejeté le texte, par une conjonction astrale particulière... Dont les composantes seraient bien incapables de proposer ensemble une alternative...

Il a été beaucoup critiqué d'avoir rendu une page blanche. Mais il aura été un catalyseur. Et nous examinons enfin un texte qui propose une vraie métropole !

Le texte transmis par l'Assemblée nationale était imparfait. La commission des lois a commencé à corriger le tir. Renverrons-nous encore une page blanche ? Ce serait nous ridiculiser. Adopterons-nous un des amendements qui reviennent peu ou prou au texte initial ? On nous propose un syndicat mixte sans fiscalité propre, on conserve les intercommunalités existantes en petite couronne et on nous renvoie aux calendes grecques... Impossible.

Troisième solution : améliorer encore le texte. Fusionner d'abord Paris et les départements de petite couronne puis redistribuer les compétences eût été plus simple, c'est la solution que je défends avec constance depuis 2008. Mais je ne m'y accrocherai pas. Ce qui est en jeu dépasse les calculs politiciens. Ce n'est pas seulement l'avenir des élus, ce n'est pas seulement la vie des 7 à 8 millions d'habitants de la métropole ou des 12 millions de Franciliens, c'est l'intérêt national. Il y va en effet de l'intérêt national que notre ville-monde s'organise pour mieux répondre aux attentes de ses habitants et de ses entreprises.

Il n'y a pas d'autre solution que d'amender le texte de la commission. C'est ce à quoi je vous appelle. (Vifs applaudissements à gauche, sur quelques bancs au centre et à droite et sur les bancs des commissions)

M. Alain Richard .  - Ce texte contient de nombreuses dispositions utiles mais ce n'est pas un moment créateur. Depuis trente ans, la décentralisation progresse. On entend beaucoup d'appels à la rupture... pour finir par des reprises -sans chercher à vérifier le bien-fondé de cette rupture.

Ce texte réaffirme la compétence générale, qui ne conserve cependant qu'un caractère complémentaire, voire résiduel. Voilà qui n'est pas perturbateur. Ainsi comprise, elle est utile pour partager légalement les financements, par exemple pour que chacun mette son écot pour financer un théâtre ou un tramway. (M. Roland Courteau confirme)

La notion de chef de file est une avancée, modeste. Peut-être est-il acceptable de créer le néologisme de « chef de filat », mais qu'on l'écrive au moins correctement -reste du supin latin, il n'y a aucune raison qu'il porte un accent circonflexe...

Le seul vrai débouché du système des conférences, c'est le contrat entre collectivités ; le droit public le permet, le reste n'est qu'accompagnement. Nous créons des outils supplémentaires pour l'intercommunalité, notamment les nouvelles compétences des métropoles. Mais plus le temps va, plus la délégation de compétences au cas par cas a laissé la place à des « paquets cadeaux ». Les élus ne peuvent-il s'entendre sur l'étendue des compétences partagées ?

Le transfert de compétences sur le réseau électrique m'inquiète. Il faut faire la différence entre la volonté de mener une politique énergétique au niveau local et la compétence « réseau ». Par nature, celui-ci doit être unifié et péréquateur. Il faut assortir le droit de récupérer la compétence à l'obligation de rester membre des syndicats départementaux.

Je salue l'exemple lyonnais, processus méthodique et progressif. MM. Collomb et Mercier ont été capables de convaincre les autres élus, c'est pourquoi cela a marché.

On crée des autorités centrales en région, à Paris, à Lyon, à Marseille. A cela s'ajoute le PLU intercommunal. A mon sens, le Gouvernement a tort de vouloir décider pour tous les territoires ce qui est bien pour eux. Je ne reconnais plus la décentralisation qui m'est chère.

Il est une question plus profonde encore. Que penseront nos concitoyens, acteurs de la démocratie locale ? La commune est l'espace du dialogue et du contrôle. Les citoyens savent l'utilité des intercommunalités, mais ils comptent sur leurs élus municipaux pour les représenter. Que penseront-ils demain de ces intercommunalités crées d'autorité, de ces compétences transférées de même ? (Applaudissements sur de nombreux bancs)

Mme Marylise Lebranchu, ministre .  - Je salue moi aussi la performance de la commission des lois. Et j'appelle moi aussi le Sénat à ne pas rendre une page blanche. Oui, il faut maintenir le lien entre les citoyens et le maire. Avec le dispositif des conventions, nous redonnons toute sa place à ce dernier. Sur le stationnement, il faudra être très pédagogue, le dossier n'est pas simple. Le Gouvernement a choisi de répondre favorablement au Sénat.

Cette discussion générale fut très intéressante. De fortes questions ont été posées. Certains points dépassent les clivages politiques. Pour un membre du Gouvernement, travailler avec le Sénat, sur des textes aussi compliqués, est un grand enrichissement. Quoi qu'il arrive, je vous en remercie. Ce projet de loi marquera une nouvelle étape de la décentralisation.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Je demande l'examen disjoint, par priorité, des amendements nos193 rectifié, 46 rectifié bis, 148 rectifié, 183 rectifié bis, 184 rectifié ter et 339 rectifié, à l'article 12.

A cet article, 100 amendements sont en discussion commune. Comment débattre de façon cohérente ? Je propose de commencer par examiner ces six amendements, qui réécrivent tout l'article.

Il en est ainsi décidé.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER AA

M. Christian Favier .  - Nous regrettons que le Sénat n'ait pas été saisi en première lecture de la création du Haut conseil des territoires. Cette disposition devait figurer dans le troisième projet de loi -dont nous attendons toujours le calendrier...

Nous proposerons que le Haut conseil puisse se réunir quand il l'entend et espérons qu'une large concertation présidera à la rédaction du décret. Nous ne voulons pas en outre que l'Observatoire de la gestion publique locale se transforme en annexe de la Cour des comptes pour promouvoir les bonnes pratiques en matière d'austérité, ce qui serait dangereux pour les institutions locales et les services publics locaux. Mais sur le principe, nous sommes d'accord.

M. le président.  - Amendement n°174 rectifié, présenté par MM. Delahaye et Pozzo di Borgo.

Supprimer cet article.

M. Vincent Delahaye.  - On compte assez d'instances consultatives et autres comités Théodule en France. Et puis, je croyais que c'était le Sénat qui représentait les territoires ! Le Gouvernement veut-il la fin du Sénat ? Qu'il parle clair !

M. le président.  - Amendement identique n°355 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collombat, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

M. Jacques Mézard.  - Cet amendement ne vous surprendra pas. Notre position est connue, même si le Gouvernement n'en tient aucun compte, pas plus qu'il ne considère nos propositions en matière institutionnelle. J'aimerais au moins qu'il dise les choses clairement, que le débat soit loyal. Aux termes de l'article 24 de la Constitution, le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales. Et l'on veut créer à son côté une instance présidée par le Premier ministre, dotée de prérogatives majeures, y compris celle de débattre, à la demande de l'exécutif, de tout projet de loi relatif à l'organisation et aux compétences des collectivités territoriales. Je vous laisse imaginer la latitude que nous conserverons dans nos débats sur ces textes... Je vous entends déjà, madame la ministre, nous opposer l'avis du Haut conseil territorial...

Il faut bien comprendre comment s'articulent vos différentes réformes, nous ne sommes pas dupes. Ce sont autant de briques d'un édifice. Certains veulent voir disparaître le Sénat et ne s'en cachent pas. D'autres veulent le moderniser... Ah, la modernisation ! Pour notre part, tout cela est inacceptable parce que nous sommes attachés à l'institution sénatoriale avec sa compétence générale et son rôle supplémentaire de représentant des collectivités territoriales.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - On nous parlera bientôt de sénateurs à vie...

M. Jacques Mézard.  - Je ne peux accepter de tels arguments. Sachez, monsieur le rapporteur, que certains ici, voyant ce qui se passe, ne voient pas arriver la fin de leur mandat d'un mauvais oeil...

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - La majorité de la commission est favorable à la suppression de l'article.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - C'est le rapporteur de l'Assemblée nationale qui a tenu à insérer dans ce premier texte la création du Haut conseil des territoires, et avec lui la Commission nationale d'évaluation des normes, qu'il ne voyait pas prospérer assez vite. Cette disposition s'inspire d'un rapport transpartisan et très bien documenté du Sénat. Avec le Haut conseil, il s'agit de créer un lieu dévolu non pas à l'examen des lois mais à la concertation entre l'exécutif national et les exécutifs locaux, à l'évaluation de l'impact des textes législatifs ou réglementaires au niveau local. On a cité l'exemple de la réforme des rythmes scolaires... (Exclamations à droite) Et l'opposition elle-même souhaitait qu'il eût existé un lieu de discussion !

Mme Sophie Primas. - Nous sommes là pour ça !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - En aucun cas, cela ne remet en cause le Sénat.

Le Gouvernement ne s'arc-boutera pas sur cette proposition. Nous allons obtenir que le texte sur les normes soit bientôt examiné à l'Assemblée nationale. Dans ces conditions, nous n'allons pas vous imposer un organe dont vous ne voulez pas. (« Très bien ! » sur divers bancs) Mais préservons le comité des finances locales.

M. Gérard Longuet.  - C'est un organe spécialisé.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Sagesse. Au Sénat de dire ce qu'il pense être le mieux pour les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les bancs de la commission, à gauche et sur plusieurs bancs au centre)

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Remarquable.

Mme Sophie Primas.  - Je voterai les amendements. Au fil des textes, par petites touches, on remet en cause l'existence même du Sénat. Un peu d'honnêteté ne nuirait pas de la part du Gouvernement... (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. René-Paul Savary.  - Cet article est sidérant. C'est une reprise en main, on cherche à rétablir une tutelle sur les collectivités territoriales ! C'est un manque de confiance évident ! Assez de Hauts conseils ! C'est au Parlement qu'il appartient d'évaluer les politiques publiques !

Le problème des collectivités territoriales est un problème de moyens. On empoisonne la vie des élus sans régler les problèmes de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Dominique de Legge.  - Fallait-il tant de circonlocutions pour aboutir à un avis de sagesse ? Je ne vous ferai pas l'affront de penser qu'il n'y a pas de cohérence entre les textes que vous présentez. Vous avez commencé par modifier le corps électoral des sénateurs. Puis vous avez voulu interdire le cumul. Et puisque le Sénat ne représenterait plus les collectivités territoriales, vous créez un Haut conseil...

Créer une instance présidée par le Premier ministre, est-ce décentraliser ? Prévoir des membres nommés, est-ce renforcer la démocratie ? Écrire que le Haut conseil « peut » être consulté, cela n'a guère de sens en droit ; il aurait fallu avoir le courage de dire qu'il « doit » l'être...

Vous dites, la main sur le coeur, que vous aimez le Sénat, que vous respectez le Sénat. Alors écoutez-le, et qu'on ne parle plus de ce Haut conseil ! (Applaudissement sur les mêmes bancs)

M. Michel Mercier.  - On peut savourer le moment : la ministre reconnaît le rôle du Sénat et dit ne pas vouloir nous forcer la main. Nous sommes tellement habitués à ce que le rôle du Sénat soit méconnu. Reconnaissons la bonne volonté du Gouvernement.

M. Louis Nègre.  - L'enfer est pavé de bonnes intentions. Le Haut conseil territorial est un « Sénat bis ». Voilà un message catastrophique adressé à la Haute assemblée ! Six sénateurs sur 70 membres... Sommes-nous devenus inutiles ? Mme la ministre Escoffier fut sénatrice, c'est sans doute pourquoi elle s'incline devant la sagesse du Sénat. Je m'en félicite. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. François Fortassin.  - Michel Mercier m'a pris les mots dans la bouche. Le mot de sagesse prend ici tout son sens. La vraie sagesse serait de voter au plus vite. (Sourires approbateurs)

M. Jacques Mézard.  - Ce qui est rare est cher. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse, nous y sommes sensibles. Mais c'était mettre le doigt sur l'objectif qui ressortira. Car les projets sont imbriqués. Avec le Haut Conseil, il s'agissait de créer un substitut au Sénat pour assurer la représentation des collectivités territoriales, qui ne le seront plus au Sénat si n'y siègent plus ni maires ni présidents d'exécutif.

Soyons satisfaits, puisque le Gouvernement entend le Sénat. Mais pour être pleinement satisfaits, il faudrait que ce message de sagesse soit répété devant l'Assemblée nationale. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Claude Peyronnet.  - Je vais faire entendre une voix discordante. Je rappelle que cette instance a été demandée par les élus. Il existe un comité des finances locales, il existe les CSFPT pour le personnel mais il n'existe pas d'instance comparable pour les normes. D'où cette demande. Peut-être la composition proposée n'est-elle pas idéale mais n'allons pas faire un procès d'intention. N'oubliez pas que le Sénat n'est pas compétent pour examiner les textes réglementaires. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation.  - Le Gouvernement a été ici philosophe, au sens premier du mot. Je ne puis donc que répéter qu'il appelle à la sagesse.

A la demande des groupe UDI-UC et RDSE, les amendements identiques nos174 rectifié et355 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 220
Pour l'adoption 187
Contre 33

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements sur les bancs UMP)

Les autres amendements n'ont plus d'objet.

ARTICLE PREMIER AB

M. Christian Favier .  - L'article renforce le contrôle financier des collectivités territoriales, tout de suite après un article visant la concertation ! Le message est clair, et s'inscrit dans la continuité des propos tenus naguère. Certes, les collectivités territoriales ne doivent pas dépenser à tout va, et nous avons été les premiers à souscrire à la création des chambres régionales des comptes. Nous ne voterons pas cet article.

M. le président.  - Amendement n°356 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collombat, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

M. Jacques Mézard.  - Amendement de coordination.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - La commission était défavorable mais, par cohérence avec le vote précédent, il faut suivre.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée.  - Même avis.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Il faudrait aussi supprimer la dernière phrase de l'alinéa 2, qui vise le Haut conseil territorial.

M. Jacques Mézard.  - Je rectifie en ce sens

M. le président.  Amendement n°356 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collombat, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

I.- Alinéa 2, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

II.- Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

L'amendement n°356 rectifié bis est adopté.

L'article premier AB, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER A (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°402, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La commune occupe une place fondamentale dans l'architecture locale de notre République. Elle est le pivot de l'organisation et du dialogue territorial, située au plus près des besoins des populations, et un premier échelon de la vie démocratique.

L'intercommunalité est un outil de coopération et de développement au service des communes, dans le respect du principe de subsidiarité.

L'autonomie financière des collectivités territoriales est une garantie constitutionnelle pour leur permettre de bénéficier de ressources propres. Par ailleurs, la compensation intégrale des transferts de compétences de l'État vers les collectivités doit être réellement assurée.

M. Christian Favier.  - Nous rétablissons cet amendement adopté à peu de chose près par notre Haute assemblée, qui réaffirme le rôle des communes et les garanties constitutionnelles en matière d'autonomie financière des collectivités territoriales. La question de l'autonomie financière est sensible : il faut réaffirmer le principe constitutionnel, trop souvent oublié dans certaines lois.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Je comprends la motivation politique de M. Favier mais le rapporteur de la commission des lois fait du droit et doit dire que cet amendement déclamatoire n'a pas à figurer dans un tel projet de loi.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée.  - Le Gouvernement est sensible à la place des communes dans l'intercommunalité mais le code général des collectivités territoriales le dit déjà. Retrait.

M. Louis Nègre.  - Pas de redondance, d'accord. Mais on peut être inclus dans la métropole la plus intégrée qui soit et avoir une charte qui précise cela.

L'amendement n°402 n'est pas adopté.

L'article premier A demeure supprimé.

ARTICLE PREMIER B

M. le président.  - Amendement n°403, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Lorsqu'il est envisagé de créer une nouvelle collectivité territoriale dotée d'un statut particulier ou de modifier le périmètre d'une collectivité territoriale existante, il doit être procédé à la consultation, par voie référendaire, des électeurs inscrits dans les collectivités intéressées.

Un décret en Conseil d'État précise les conditions de cette consultation.

Avec le concours de la commission nationale du débat public, une consultation des habitants d'une région peut être organisée sur des projets stratégiques identifiés et désignés par l'exécutif du conseil régional. Les communes concernées par ces projets accueillent cette consultation.

M. Christian Favier.  - Il s'agit de développer les possibilités d'intervention des citoyens sur les modifications institutionnelles locales sur les enjeux stratégiques de développement de la région.

La métropole de Lyon est passée par la loi, pour ne pas passer devant le jugement des citoyens. Après ce qui s'est passé en Alsace, le peuple fait peur. Nous insistons ici pour que le peuple donne son avis en de telles circonstances. De même pour les projets stratégiques. La consultation sur le Grand Paris Express a laissé des souvenirs...

M. le président.  - Amendement n°380 rectifié, présenté par MM. Collombat, Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'autonomie financière des collectivités territoriales est une garantie constitutionnelle pour leur permettre de bénéficier de ressources propres. Par ailleurs la compensation intégrale des transferts de compétences de l'État vers les collectivités doit être réellement assurée.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je crains que cet amendement ne prospère pas. Il s'agit de réaffirmer l'autonomie financière des collectivités territoriales et d'assurer une réelle compensation financière de l'État en cas de transfert de compétence. C'est peut-être déclamatoire mais il est bon de rappeler certains principes, parfois.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Défavorable, pour les mêmes raisons que ci-devant.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée.  - Le Gouvernement comprend l'intention mais le premier amendement est déclamatoire et le second ne fait que rappeler une règle constitutionnelle. Retrait ?

L'amendement n°380 rectifié est retiré.

M. Philippe Dallier.  - Nos collègues du CRC auraient pu aller au bout de leur logique : pourquoi ne pas imposer aussi un référendum pour la création d'un EPCI ?

Mme Éliane Assassi.  - On est allé au bout de notre logique.

M. Philippe Dallier.  - L'exemple alsacien a certes été traumatisant, mais de là à inscrire dans la loi une obligation de consultation...

M. René-Paul Savary.  - Et les modifications de périmètre ? C'est une compétence d'aménagement du territoire qui doit être partagée. Les élus doivent être consultés : nous le proposerons.

A propos de l'amendement Collombat, je dirai que le terme de transfert de compétence est mal choisi. Voyez le RSA ou l'APA. Comment mesurer la réalité de la compensation ?

M. Bruno Sido.  - Dans mon département, il s'agissait de créer une commune nouvelle en fusionnant avec une autre une commune qui n'avait plus que 17 habitants ; comme elles n'étaient pas dans le même canton, il a fallu remonter jusqu'au Conseil d'État. On a failli ne pas pouvoir le faire avant les municipales alors que tout le monde était d'accord.

Je ne suis pas contre les référendums mais il ne faut pas pousser le bouchon.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée.  - L'article 72-2 de la Constitution prévoit un transfert de ressources au temps zéro. Ensuite, tout s'organise dans la loi de finances. Pour les allocations de solidarité, le projet de loi pour 2014 prendra en compte l'effet ciseaux.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Ce qui est inscrit dans la Constitution, c'est une arnaque ! Le coût des transferts évolue de façon exponentielle et la part de la compensation, on l'a vu sur l'APA, baisse. Pas de double discours, donc, sauf à entamer la confiance dans la parole de l'État.

L'amendement n°403 n'est pas adopté.

L'article premier B demeure supprimé.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°138 rectifié, présenté par MM. Maurey et Détraigne et Mme Morin-Desailly.

Supprimer cet article.

M. Yves Détraigne.  - Nous ne sommes pas favorables au rétablissement d'une clause générale de compétence qui ne serait que symbolique au vu des moyens actuels des collectivités locales, et plus encore futurs puisque le Gouvernement s'apprête à réduire leurs dotations.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Il vaudrait la peine de se poser la question des blocs de compétence. Cela dit, la complexité étant de mise, je vous propose de suivre l'avis défavorable de la commission des lois.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée.  - Le Gouvernement est défavorable. Le corollaire de la clause de compétence générale, c'est les moyens de l'organiser, pour lui donner un sens. C'est l'esprit de la Conférence territoriale de l'action publique. Défavorable.

M. Bruno Sido.  - Les auteurs de cet amendement méconnaissent les mécanismes qui président à la décision sur nos territoires. Chaque fois que l'État veut faire quelque chose, il s'adresse au département. Veut-on minorer l'action de certaines collectivités territoriales ? Je ne voterai pas l'amendement.

M. René-Paul Savary.  - Président de l'association des maires de la Marne, j'apprécie l'action du département. N'allons pas fabriquer un prétexte pour que le département ne soutienne pas l'action des communes. C'est grâce à cette clause que le département de l'Aube a réussi à fixer sa population jeune, en soutenant la création d'une université technologique. Maintenons cette clause, dont département et région font d'ailleurs un usage modéré.

M. Michel Mercier.  - Cette querelle est récurrente. C'est la loi du 16 décembre 2010 qui a supprimé la clause de compétence générale, et le Sénat l'a votée.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Dans la douleur.

M. Michel Mercier.  - C'est toujours dans la douleur que l'on vote. Parfois aussi, que l'on défend un texte depuis le banc du Gouvernement et que l'on prend une volée de bois vert.

Le Gouvernement veut ici la « rétablir ». Mais soyons clairs : la loi de 2010 prévoyait que la Conférence territoriale pourrait bien en rétablir un équivalent. Ici, on rétablit mais, patatras, l'alinéa d'après dit le contraire. Pas de faux débat, ce que vous proposez ici, c'est la même chose que la loi de 2010. Nous aurions pu gagner du temps...

La clause de compétence générale n'a jamais existé, elle a été inventée dans des colloques. Elle est d'ailleurs placée sous le contrôle du juge, que l'on préfère à l'électeur. Foin des mauvaises querelles. Adoptons l'amendement.

M. Jean-René Lecerf.  - Je voterai l'amendement Détraigne. La clause de compétence générale a pour vertu de permettre aux collectivités territoriales de faire des grands coups, à grand coût pour le contribuable.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°138, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°404, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.

Alinéa 3, première phrase

Remplacer les mots :

des communes 

par les mots :

du département, des arrondissements, des cantons, des communes et la désignation de leur chef-lieu

Mme Éliane Assassi.  - Nous sommes à la veille d'un redécoupage des limites cantonales, suite à la réforme du scrutin départemental.

M. Philippe Dallier.  - Au lendemain, plutôt.

Mme Éliane Assassi.  - Il n'est pas validé, que je sache.

Sous couvert de permettre aux départements la possibilité de donner leur avis sur les limites cantonales, on leur ôte le droit d'opiner sur les découpages électoraux. L'Assemblée des départements de France a lancé l'alerte et j'espère que nous saurons, ici, nous retrouver là-dessus. Les départements doivent être associés à toute modification territoriale et donner leur avis sur le choix des chefs-lieux de canton.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Défavorable. Plusieurs articles du code général des collectivités territoriales prévoient la consultation des départements : les articles L 3112-1, L 3113-1, L 3113-2, L 211-6. L'amendement est satisfait.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée.  - Même avis.

M. Alain Richard.  - Les lanceurs d'alerte sont respectables mais ce sont parfois de fausses alertes.

Mme Éliane Assassi.  - Allez le dire à l'ADF !

M. Alain Richard.  - Tout le monde peut se tromper.

Mme Éliane Assassi.  - Vous aussi.

M. Alain Richard.  - Le corporatisme croissant au sein des collectivités territoriales m'amène à rappeler que la décision revient au législateur.

L'amendement n°404 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°513 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéas 4 à 7

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

1° La troisième partie du code est abrogée.

Mme Hélène Lipietz.  - Si nous proposons de supprimer les départements, ce n'est pas que nous ayons une dent contre eux. Ils ont, au temps de leur création, utilement remplacé les provinces d'Ancien Régime, pour donner une cohérence au territoire, mais depuis, de l'eau a coulé sous les ponts, les strates du millefeuille se sont multipliées. Il faut se demander laquelle supprimer et le département n'a plus la même utilité.

M. le président.  - Amendement n°514 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Hélène Lipietz.  - Si nous ne les supprimons pas, ne leur laissons que des compétences résiduelles.

L'amendement n°166 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°575 rectifié bis, présenté par MM. Miquel, Krattinger, Guérini, Lozach, Boutant, Daudigny et Jeannerot, Mme Bataille et MM. Labazée et Camani.

Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Il donne son avis sur tous les objets sur lesquels il est consulté en vertu des lois et règlements ou dont il est saisi par les ministres et notamment sur les changements proposés aux limites territoriales du département, des arrondissements, des cantons et des communes et sur la désignation de leur chef-lieu.

M. Gérard Miquel.  - Les gouvernements successifs ont donné au département une compétence globale dans le domaine social. Pourquoi la reconnaître ici à la région ?

L'amendement n°49 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°405, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

Mme Cécile Cukierman.  - La compétence générale est au fondement du principe de libre administration. C'est ce qui fait la différence entre l'administrateur lié et l'élu. Mais on ne peut s'en tenir à une compétence interstitielle. Or le texte restreint la portée de cette clause, en proposant une liste succincte de compétences.

M. le président.  - Amendement n°406, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.

Alinéa 7

Après le mot :

départemental

insérer les mots :

pour assurer la défense des intérêts de son territoire et des habitants qui y vivent

Mme Cécile Cukierman.  - Amendement de repli. La distinction ici donnée laisse au juge la charge de trancher. Ce n'est pas satisfaisant. D'où la définition, traditionnelle, que nous proposons d'introduire ici. Nous procéderons de même, par deux amendements à venir, pour les régions.

M. le président.  - Amendement n°408, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.

Alinéas 11 et 16

Supprimer ces alinéas.

Mme Cécile Cukierman.  - Il est défendu.

L'amendement n°167 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°576 rectifié bis, présenté par MM. Miquel, Krattinger, Guérini, Lozach, Boutant, Daudigny et Jeannerot, Mme Bataille et MM. Labazée et Camani.

Alinéa 11

Supprimer le mot :

social,

M. Gérard Miquel.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°409, présenté par M. Favier et les membres du groupe CRC.

Alinéas 11 et 16

Remplacer les mots :

la préservation de son identité

par les mots :

la défense des intérêts de son territoire et des habitants qui y vivent

Mme Cécile Cukierman.  - Il est défendu.

L'amendement n°357 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°358 rectifié, présenté par MM. Mézard, Barbier, Chevènement et Collombat.

Alinéa 11

Après les mots :

dans le respect

insérer les mots :

de l'unité de la République,

M. Pierre-Yves Collombat.  - La préservation des identités régionales et des langues régionales ne peut se concevoir que dans le respect du principe d'unité de la République. Cela va de soi mais, par les temps qui courent, il convient de l'inscrire dans la loi.

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Avis favorable aux amendements nos405, 408, 576 rectifié bis et 409, défavorable aux autres.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée.  - Le Gouvernement n'est pas favorable à la suppression des départements, qui ont toute leur place dans l'action de terrain. Ce que nous voulons, c'est faire en sorte d'éviter les redondances et favoriser les complémentarités. Défavorable donc aux amendements nos513 rectifié et 514 rectifié.

Avis favorable à l'amendement n°576 rectifié bis : les compétences sociales relèvent du département. Quant à l'amendement n°405, il est essentiellement symbolique. Avis défavorable. Retrait des amendements nos406 et 408. Avis défavorable à l'amendement n°409. Retrait de l'amendement n°358 rectifié.

M. Bruno Sido.  - Les écologistes, pour exister ou se faire remarquer, ne sont pas à court de provocation. Madame Lipietz, êtes-vous allée au-delà du périphérique ? Vous ne connaissez assurément rien au milieu rural, qui ne peut vivre sans les départements. Je voterai contre vos amendements.

M. Louis Nègre.  - Aujourd'hui, vous voulez supprimer les départements. Récemment, vous vouliez supprimer de fait les communes, via le suffrage universel direct. Mais par quoi les remplacerez-vous?

M. Gérard Miquel.  - Je ne voterai pas les amendements écologistes. Le département exerce des compétences indispensables au maintien du lien territorial, surtout dans les campagnes.

J'ai d'excellents rapports avec les Verts dans mon département. Ils me demandent même de leur faire une petite place sur ma liste... (Rires et exclamations à droite) Quel paradoxe ! On ne peut demander la suppression du département et vouloir y siéger ! (Applaudissements à droite)

M. François Fortassin.  - C'est surréaliste. Chacun reconnaît que les départements font bien leur travail. Est-il raisonnable de détruire ce qui fonctionne ? Par quoi le remplacera-t-on ? Les écologistes ont des pensées foisonnantes qui dépassent les pauvres mortels que nous sommes... (Rires)

L'amendement n°513 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°514 rectifié.

M. Jean-Claude Requier.  - M. Miquel s'est trompé : l'amendement porte sur les limites des départements.

L'amendement n°575 rectifié bis n'est pas adopté.

L'amendement n°405 est adopté.

L'amendement n°406 n'a plus d'objet.

L'amendement n°408 est adopté.

L'amendement n°576 rectifié bis n'a plus d'objet, non plus que les amendements nos409 et 358 rectifié.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée.  - Je demande que soit réservé jusqu'à demain après-midi, au retour de Mme Lebranchu, à 16 h 30, l'examen des articles et amendements de l'article 10 jusqu'à l'amendement n°51 portant article additionnel après l'article 19 bis.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Nous comprenons que Mme la ministre ait des obligations et soutenons cette demande.

M. Michel Mercier.  - Cela signifie-t-il que Lyon viendra avant Paris ?

M. René Vandierendonck, rapporteur.  - Oui.

M. le président.  - Tout arrive.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Lyon montrera encore une fois le chemin !

La réserve est ordonnée.