Loi de finances pour 2013 (Nouvelle lecture)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2013, adopté par l'Assemblée nationale.
Discussion générale
Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur . - Trois priorités fonderont l'action du Gouvernement, qui inspire ce budget pour 2013 : sortir de la crise de l'Europe, redresser nos finances publiques, améliorer la compétitivité de nos entreprises. D'emblée, le Gouvernement s'est mobilisé pour sortir de la crise de l'Europe ; le sommet de juin a abouti à la signature du pacte de croissance qui complète la TSCG, lequel passe par une hausse du capital de la Banque européenne d'investissement (BEI) et la mobilisation des fonds structurels. Le MES sera désormais autorisé à recapitaliser directement les banques dès lors qu'elles se soumettent à la surveillance commune et la dette grecque a été récemment restructurée. Nous avons aussi trouvé un consensus la semaine dernière à Bruxelles sur la douloureuse affaire Dexia dont nous héritons. Ce budget s'en ressent : 4,4 milliards sont mobilisés pour les fonds structurels. Un amendement a été adopté à l'Assemblée nationale pour accroître le prélèvement européen de 837 milliards afin de tenir compte des rectificatifs au budget européen de 2012.
Le redressement des finances publiques est primordial : l'effort porte sur 30 milliards d'euros dès 2013. La refonte de nos prélèvements dans un esprit de justice doit se conjuguer à la maîtrise des dépenses. L'État s'astreint à la norme zéro valeur. En tout, l'économie sera de 30 milliards dès 2013 et de 60 milliards d'euros en 2017 si l'on tient compte des 10 milliards d'économies complémentaires pour le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).
Le comité interministériel de la modernisation de l'action publique (MAP)...
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - La nouvelle RGPP !
Mme Nicole Bricq, ministre. - ...a fixé ce matin le cap et la méthode : des réformes de structures plutôt qu'un coup de rabot indifférencié. Nous procéderons à des réformes de structure, que vous appelez de vos voeux, monsieur le président de la commission, mais en concertation, comme ne l'a pas fait le précédent gouvernement.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Bien sûr !
Mme Nicole Bricq, ministre. - Enfin, le renforcement de la compétitivité de notre économie passe par le CICE, que les entreprises pourront inscrire à leur bilan dès 2013.
La première lecture a enrichi le texte. Le solde a été amélioré de 400 millions à l'Assemblée nationale, grâce à plus de justice fiscale et au plafonnement des niches. Des mesures de croissance et de justice ont été adoptées, pour le logement, la presse, les titres de séjour...
Malgré le rejet du texte par le Sénat, certains de ses amendements ont été intégrés à d'autres textes ou à celui-ci, comme la modulation tarifaire de la TGAP, l'exonération des baux emphytéotiques, etc.
J'espère que ce débat permettra d'achever l'élaboration de ce projet de loi, dans un souci partagé de redressement de nos comptes. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances . - Je me réjouis de vous retrouver au banc du Gouvernement, madame la ministre.
La CMP sur le projet de loi de finances pour 2013 a échoué. L'Assemblée nationale a donc réexaminé le texte qu'elle avait voté, modifiant 51 articles. Mon appréciation est positive : l'essentiel des apports du Sénat ont été repris en première partie, mis à part les articles additionnels qui ont cependant été intégrés au projet de loi de finances rectificative pour 2012 : transformation du crédit d'impôt en réduction d'impôt pour les cotisations aux organisations syndicales, modalités de fixation des bases maximales du CFE en 2012. L'Assemblée nationale n'a pu reprendre nos apports à la seconde partie car nous ne l'avons pas examiné.
Les députés ont apporté d'autres modifications : des précisions utiles ou des mesures attendues. Je m'étonne cependant de celles apportées à l'article 69 sur la répartition des fonds de péréquation des DMTO et de la CVAE entre les départements.
A l'article 2, les plafonds de revenus déterminant les montants d'abattements à l'impôt sur le revenu dont bénéficient les contribuables âgés ou handicapés ont été relevés.
A l'article 4 ter, l'Assemblée nationale a adopté un amendement portant de six à sept chevaux-vapeur fiscaux le plafond du barème kilométrique.
A l'article 4 quater, le régime du crédit d'impôt PPRT a été modifié comme nous le souhaitions.
A l'article 5, la date limite de dépôt des demandes de dispense de paiement du prélèvement servant d'acompte à l'imposition des intérêts et des dividendes a été reportée au 30 novembre.
A l'article 6, relatif à la fiscalité de la plus-value de cession, l'Assemblée nationale a repris des amendements de notre commission, des groupe socialiste et RDSE.
A l'article 11, l'Assemblée nationale a créé un prélèvement sur recettes au profit des communes et EPCI ayant institué une taxe d'habitation sur les logements vacants afin de compenser la perte de recettes pour celles-ci résultant de la réforme de la taxe sur les logements vacants mais l'a inscrit dans l'enveloppe normée.
Les députés ont supprimé l'article 13 bis.
A l'article 15, l'Assemblée nationale a exclu les charges financières afférentes aux biens acquis ou construits par les concessionnaires et délégataires de service public ainsi que par des partenaires privés de partenariats publics-privés du champ d'application de l'article 15. L'exclusion est limitée aux seuls contrats déjà signés.
A l'article 30, l'Assemblée nationale demande un rapport sur la rénovation des logements des propriétaires aux revenus modestes, vu la situation du Crédit immobilier de France.
A l'article 39, les députés ont porté la hausse de la contribution à l'audiovisuel public de 2 euros à 4 euros.
L'Assemblée nationale n'a pas voulu fixer l'abattement exceptionnel sur les plus-values immobilières à 15 % ; il sera de 20 %. Elle a également réduit la niché Copé.
A l'article 19, les députés ont diminué les allocations compensatrices d'exonération de fiscalité locale.
La hausse de la contribution au budget de l'Union européenne explique la dégradation du solde.
En deuxième partie, l'Assemblée nationale a modifié les règles d'alimentation du FCTVA et les règles de péréquation des DMTO.
Enfin, nous avons beaucoup réfléchi à la garantie apportée par l'État au Crédit immobilier de France et souhaité que l'accession sociale à la propriété ne pâtisse pas de la crise que traverse l'établissement. L'Assemblée nationale a demandé un rapport d'ici six mois.
J'ai recommandé à la commission l'adoption du texte sans modification. Ce projet de loi de finances exigeant doit nous ramener sous le seuil du déficit de 3 % du PIB. Le courage du Gouvernement, en cette première année, force notre respect. Mais la commission des finances, ce matin, a appelé à la majorité de ses membres présents à rejeter ce projet de loi de finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Mais à adopter la première partie !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. - Pour ma part, je le voterai. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et RDSE)
Mme Michèle André . - Ce budget volontariste favorisera le redressement de notre pays. Il est combattu par ceux qui ont multiplié les cadeaux fiscaux, creusé la dette et demandé aux Français de payer les pots cassés. Quelle impudence ! En dix ans, la dette a doublé ! Le premier budget de l'État, c'est le paiement des intérêts de la dette.
Redresser nos comptes est une condition sine qua non pour retrouver des marges et continuer à emprunter à taux bas.
L'effort sera réparti entre 20 milliards d'euros de recettes nouvelles et 10 milliards d'économies.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Où ça ?
Mme Michèle André. - Le Gouvernement a rompu avec la logique comptable et aveugle de la RGPP.
Il s'agit aussi d'un budget pour l'emploi, qui préserve les classes moyennes et les PME. Trois priorités sont fixées : l'enseignement, la sécurité, la justice, sans oublier le logement social comme nous venons de le voir.
Les revenus du capital seront imposés comme ceux du travail, les plus riches sont mis à contribution, tandis qu'un dégrèvement est prévu pour les ménages que le gel du barème rendrait imposables. De même, l'impôt sur les sociétés est rééquilibré entre grandes et petites entreprises.
Le groupe socialiste regrette que le Sénat ait rendu copie blanche.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Ayons donc un débat en deuxième lecture !
Mme Michèle André. - Nous assumerons nos responsabilités. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Albéric de Montgolfier . - La situation est pour le moins cocasse. En ce moment même, l'Assemblée nationale examine le projet de loi de finances rectificative pour 2012. Or, il est en pleine contradiction avec le projet de loi de finances pour 2013 ! Que s'est-il passé entre les deux ? Le rapport Gallois ! Une prise de conscience tardive mais le virage est bien timide...
M. Jean-Pierre Caffet. - Vous vouliez 50 milliards de plus de TVA !
M. Albéric de Montgolfier. - On envisage désormais -timidement- la fiscalité sous l'angle de la compétitivité de nos entreprises. Mais ce projet de loi de finances pour 2013 prévoit de ponctionner les entreprises de 10 milliards d'euros ! Le CICE va leur rapporter 20 milliards Où est la logique ?
De même, le projet de loi de finances ne prévoit aucune hausse de TVA ; le Gouvernement l'excluait naguère. Or le collectif en prévoit une !
De même, on parlait d'un « choc de l'offre immobilière », mais la surtaxe des plus-values prévue par le collectif le réduira à néant.
Du point de vue des hypothèses macro-économiques, on est proche de l'insincérité. Nous allons dépasser la courbe de Laffer. Au-delà d'un certain niveau d'impôts, les recettes s'effondrent.
M. Jean-Pierre Caffet. - Rien à voir avec la conjoncture.
M. Albéric de Montgolfier. - Parlons-en : le ralentissement de la croissance vous obligera à trouver plusieurs milliards de plus. Le matraquage fiscal aura un effet récessif.
M. François Rebsamen. - Moins que les coupes budgétaires inconsidérées.
M. Albéric de Montgolfier. - La Cour des comptes et la Commission européenne préconisent de porter l'effort sur la réduction de la dépense. Il représentera non 10 milliards mais 5,7 milliards en valeur. En réalité, vous dépensez moins par anticipation de la hausse des prix en tenant compte de l'inflation. Même avec cette astuce, le compte n'y est pas, ce n'est pas une baisse réelle mais une diminution de la hausse tendancielle du volume des dépenses.
Le financement du CICE, dont l'Assemblée nationale débat, est reporté à plus tard...
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Comme la fiscalité écologique.
M. Albéric de Montgolfier. - En fait, votre seul volontarisme est celui du recours à la massue fiscale. J'en veux pour preuve l'épisode de cet acteur français célèbre. (On le conteste à gauche)
M. Jean-Pierre Caffet. - D'autres reviennent !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Vous niez la réalité.
M. Albéric de Montgolfier. - Les jeunes créateurs d'entreprises quittent la France.
Le capital est plus taxé que le travail : il est taxé sur le flux et le stock. La France est devenue la championne du matraquage fiscal. Plus que jamais, nous avons besoin d'une harmonisation européenne.
Si notre groupe est contre ce projet de loi, il veut examiner la première partie. (Exclamations amusées à gauche) M. Patriat a déposé des amendements, nous aussi.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - C'est encore possible !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. - Quel Pinocchio !
M. Albéric de Montgolfier. - Ensuite, on dit que le Sénat ne sert à rien.
M. Jean-Pierre Caffet. - Vous l'avez prouvé !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Supportez que l'opposition existe ! La France n'est pas un régime de parti unique !
M. Albéric de Montgolfier. - Nous sommes prêts, nous, au débat.
M. Éric Bocquet . - On ne parlait pas encore de choc de compétitivité lors de l'examen de ce texte en première lecture. Le choc remet en question le contenu de ce projet de loi.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Juste !
M. Éric Bocquet. - Déjà qu'il souffrait de sérieuses limites par rapport au contre projet de la majorité sénatoriale, un projet manifeste, le Gouvernement a cédé aux sirènes de la maîtrise de la dépense publique que de plus en plus d'économistes dénoncent : l'abandon des 750 millions de recettes pour céder aux « pigeons » est emblématique, comme les 300 millions perdus sur l'ISF.
Pour un contribuable possédant un hôtel particulier de 18 millions à proximité de ce palais et un patrimoine de 30 millions, le gain de votre disposition n'est pas négligeable : plus de 283 000 sous M. Sarkozy, 248 000 environ aujourd'hui ; en tout, entre le renoncement à réforme l'ISF-PME et le dispositif Dutreil, on aura perdu 1,7 milliard de recettes sur l'ISF. L'instauration d'une tranche à 75 % n'est pas la solution : un célèbre acteur aurait dû s'en rendre compte. Une tranche de 50 % avec une modulation complémentaire aurait suffi, d'autant plus si l'impôt sur le revenu a vocation à être fusionné avec la CSG.
Pourquoi cette réforme inachevée ? Ce texte reste au milieu du gué, malgré une nouvelle lecture à l'Assemblée nationale. On aurait dû faire plus pour rétablir la prospérité de l'impôt.
Pour toutes ces raisons, nous maintenons notre position de première lecture. (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Aymeri de Montesquiou . - L'accouplement des convictions socialistes et des certitudes françaises...
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. - Ça commence fort !
M. Aymeri de Montesquiou. - ...étonne nos partenaires européens. Après les dévaluations de 1981, les 35 heures de 1998, voici le matraquage fiscal en 2012. Le terme de benchmarking n'est plus limité aux entreprises : vous faites le contraire de nos voisins, l'exact contraire, qui ne peut conduire qu'à la catastrophe!
M. Alain Néri. - La catastrophe, c'est vous !
M. Aymeri de Montesquiou. - Il fallait des réformes structurelles pour couper dans les dépenses de l'État et le Gouvernement fait peser l'effort budgétaire sur les ménages et les entreprises, aux confins du soutenable...
M. Alain Néri. - Parlez-nous du bouclier fiscal !
M. Aymeri de Montesquiou. - Vous avez préféré faire peser l'effort sur les ménages et les entreprises. La France compte 90 fonctionnaires pour 1 000 habitants, contre 50 en Allemagne.
M. François Rebsamen. - Les femmes n'y travaillent pas.
M. Yvon Collin. - Et ne font pas d'enfants.
M. Aymeri de Montesquiou. - Peut-être la RGPP était-elle trop systématique et sans nuances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Elle n'en avait que trop !
M. Aymeri de Montesquiou. - Vous vous contentez d'un artifice sémantique, comme s'il suffisait d'appeler votre démarche « modernisation de l'action publique » pour que l'on croie à une rupture.
Où trouverez-vous les 10 milliards d'économie ? Il faut, pour reprendre le mot de Paul Quilès paraphrasant Robespierre, dire quelles têtes couper. Le Premier ministre doit dire dans quelles dépenses il va trancher. Le bon sens, la Cour des comptes, la Commission européenne, le FMI, les politiques suivies par nos partenaires, tous se retrouvent pour diminuer les dépenses publiques. Cette unanimité devrait ébranler vos certitudes fondées sur la seule idéologie.
Ce texte comporte des mesures confiscatoires, il décourage l'esprit d'entreprise et fait fuir des contribuables...
M. Albéric de Montgolfier. - Depardieu n'est pas seul.
M. Aymeri de Montesquiou. - ...et de futurs chefs d'entreprises.
M. Alain Néri. - Quand on aime la France, on ne la quitte pas !
M. Aymeri de Montesquiou. - Vous étiez contre la TVA sociale, vous la faites revenir, édulcorée, avec pour seule vertu l'absence de décimales. Vous en avez abandonné le corollaire : réduire les charges pour restaurer la compétitivité des entreprises.
Où allez-vous trouver les 20 milliards pour financer les retraites ? Vous ne pourrez vous contenter de pirouettes médiatiques. Vous serez obligés de refaire la réforme du précédent gouvernement
Mme la présidente. - Veuillez conclure.
M. Aymeri de Montesquiou. - Le CICE est un jeu de bonneteau dans lequel les banques financent les engagements de l'État.
Les finances françaises sont une synthèse d'idéologie, d'absence d'incitations et de méthode Coué. La politique du nouveau quinquennat doit fixer des priorités, être empreinte de justice et d'efficacité.
M. François Rebsamen. - C'est le cas !
M. Aymeri de Montesquiou. - L'UDI-UC votera contre.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. - On s'en doutait !
M. Yvon Collin . - Avec le rejet du projet de loi de finances pour 2013, la procédure parlementaire accidentée nous a privés d'un débat démocratique essentiel. Ce texte, en conséquence, porte peu l'empreinte du Sénat, je le regrette. Au reste, les députés ont repris certaines de nos propositions, dont cinq des amendements du RDSE. Je pense au relèvement de 6 à 7 chevaux fiscaux pour le barème kilométrique au bénéfice des habitants du monde rural. Nous avions également supprimé l'article 13 bis sur la modulation de la TGAP compte tenu de la crise. Sur l'article 6 et les plus-values, les choses ne sont pas totalement figées. Nous pouvons avancer, après des années de faux-semblants, dans la justice fiscale.
Le retour du déficit à 3 % du PIB en 2013 est un objectif intangible. L'effort structurel en dépenses atteindra 0,3 % du PIB en 2013. L'opposition juge cet effort trop faible. Mais qu'ont fait les précédents gouvernements ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. - Parlons-en !
M. Yvon Collin. - Beaucoup d'annonces et peu d'effets, avec une dette publique toujours croissante. Ils se prétendaient fourmis quand ils se faisaient cigales. La Cour des comptes a écrit qu'en 2011, « l'effort structurel sur les seules dépenses primaires avait été nul ».
Le Gouvernement prend des mesures courageuses en protégeant le pouvoir d'achat des ménages et les PME. A cela s'ajoute le CICE, dont j'ai souligné la pertinence en regrettant son ciblage insuffisant sur l'industrie.
La plupart des membres du RDSE voteront ce texte de rupture et de changement. Le pacte républicain nous oblige. Toutefois, pour que le budget soit adopté dans les temps, il faut voter la question préalable. Nous y sommes prêts. (Applaudissements à gauche)
M. Joël Labbé . - Je remplace au pied levé M. Placé qui a perdu la voix. (Exclamations amusées) Très momentanément, je vous rassure !
Un effort de 30 milliards est demandé aux Français de manière relativement équitable dans la loi de finances pour 2013 afin de tenir l'objectif de déficit à 3 % du PIB. Cet équilibre est cependant remis en cause par les 10 milliards d'économies à trouver pour le CICE.
Je ne partage pas du tout les analyses de mon collègue de droite sur les fonctionnaires. Le budget n'est toutefois pas extensible. Nous sommes inquiets pour les crédits de la culture, de l'écologie, de la santé. Comment financera-t-on la transition écologique ? Le MAP ? La gauche a tant dénoncé la RGPP que nous lui faisons confiance pour ne pas tomber dans les mêmes errements.
Cependant, nous approuvons le maintien du malus automobile et la hausse de la DDU à la suite de la manifestation du maire écologiste de Sevran. Hélas, nos taxes sur l'aspartame et l'huile de palme, l'augmentation de la contribution des sociétés autoroutières n'ont pas été retenues.
Les Verts veulent être mieux entendus l'an prochain. En attendant, par loyauté, ils voteront ce texte. (Applaudissements à gauche)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances . - Revenons un peu au fond des choses, c'est-à-dire au cadre macro-économique dans lequel s'inscrit ce texte. L'hypothèse de croissance, disais-je, était très optimiste il y a un mois ; au vu des éléments disponibles aujourd'hui, elle apparaît complètement irréaliste. Cela entache ce texte d'insincérité. Cette hypothèse était de 0,8 % quand le consensus des prévisionnistes tablait sur 0,3 %. Comme la plupart de ses prédécesseurs, le Gouvernement était volontariste. Un peu plus tout de même qu'à l'habitude : en général, l'écart est de 0,3 point. Nous sommes bien au delà. La quasi-totalité des organismes de prévision affichent une hypothèse comprise entre moins 0,5 % et plus 0,4 %. Certes, personne ne possède de boule de cristal mais ces calculs reposent sur des données déjà connues. Avec une croissance nulle au quatrième trimestre 2012, il faudrait une croissance de 0,3 % chaque trimestre, soit 1,2 % en rythme annualisé, pour atteindre votre objectif. Est-ce concevable ?
Le Gouvernement entend, à juste raison, réduire le déficit structurel de deux points.. Malgré nos divergences, il faut entendre l'extrême gauche : l'effort de redressement, il est vrai, atténuera la croissance. Le cadre de ce texte est donc loin d'être plausible.
Le CICE achève de vider de son sens la loi de finances initiale pour 2013 et la loi de programmation 2012-2017. D'un côté, je comprends l'inquiétude des écologistes : l'horizon d'une fiscalité selon leurs voeux est bien flou. De l'autre, mes amis s'inquiètent de ce que les économies ne soient pas documentés et que l'on ne sache rien de la MAP.
Comment l'opposition pourrait-elle ne pas faire entendre sa voix dans cette situation ? Intervient l'aléa de procédure ce soir : une motion défendue par ceux qui sont les plus attachés au texte du Gouvernement. Singulier paradoxe !
M. Jean-Pierre Caffet. - C'est pour sauver le texte...
M. François Rebsamen. - ...et la France !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Nous sommes prêts, nous, à discuter de ce texte toute la semaine malgré notre profonde opposition. Nous avons le temps d'examiner les amendements. (Exclamations sur les bancs socialistes)
Madame la ministre, quand et comment le Gouvernement entend-il rectifier ce projet de loi irréaliste et hors des clous ?
Mme Nicole Bricq, ministre. - Vous êtes un spécialiste des lois de finances rectificatives !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Ce texte va contre nos engagements européens, il faudra une loi de finances rectificative. Dans les circonstances actuelles, il n'est pas anormal qu'il y ait plusieurs par an.
M. François Rebsamen. - Nous vous demanderons des conseils.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Le groupe UMP, en tout cas, est ouvert à la discussion ! (Applaudissements à droite)
M. Alain Néri. - Tartuffe !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - La commission des finances doit se réunir pour examiner la motion mais avant cela, nous écouterons avec attention la réponse de Mme la Ministre.
Mme Nicole Bricq, ministre . - Merci au rapporteur général de son soutien. J'ai rappelé les mesures introduites au Sénat et reprises à l'Assemblée nationale. Je reviens sur un point important pour le Sénat : la répartition des fonds de péréquation entre les départements. On allait encore pénaliser les territoires industriels. Il fallait un critère de population pour corriger les effets de la réforme de la taxe professionnelle. Nous l'avions dit : nous en avons pour dix ans !
M. de Montgolfier exagère : aucun document précis n'étaye ses affirmations sur l'exil fiscal. En revanche, le bouclier fiscal n'a eu aucune incidence, cela est établi. M. Carrez a demandé la transparence, M. Cahuzac s'est engagé à transmettre toutes les informations, contrairement au précédent gouvernement.
La justice fiscale, monsieur Bocquet ? La tranche à 45 % et le rééquilibrage de la fiscalité entre capital et travail ne sont pas à négliger.
M. de Montesquiou parle de matraquage fiscal. Il oublie que M. Sarkozy avait promis quatre points de baisse d'impôts et qu'en réalité, il a augmenté de 1,4 point les prélèvements obligatoires. C'est votre majorité qui a porté le taux d'imposition cumulée à 38,5 %. Et les deux paquets fiscaux que vous avez votés étaient lourds. Un peu de mémoire !
Monsieur Collin, merci pour votre soutien. Vous avez bien fait de rappeler que les apports du RDSE avaient été retenus par l'Assemblée nationale.
La modernisation de l'action publique sera concertée, ciblée et intelligente, monsieur Labbé, et le Parlement y sera pleinement associé. La fiscalité écologique sera revue dans le cadre de la conférence environnementale ouverte ce matin même.
Monsieur Marini, vous savez bien que les incertitudes européennes ont pesé sur l'appréciation des perspectives économiques par les prévisionnistes. La sortie de la crise de la zone euro avec la restructuration de la dette grecque et le mécanisme de supervision bancaire lèvent ces incertitudes qui pèsent sur la croissance. Quant au CICE, il est intégralement financé et ne rend nullement caduque ce projet de loi de finances initiale.
La période est difficile, les Français acceptent des efforts à condition que le cap de la justice fiscale soit maintenu. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et RDSE)
La discussion générale est close.
La séance est suspendue à 20 h 10.
présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président
La séance reprend à 20 h 40.
Question préalable
M. le président. - Motion n°I-80, présentée par M. Rebsamen et les membres du groupe socialiste et apparentés.
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement du Sénat, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2013, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
M. François Rebsamen . - Décidément, il se passe toujours quelque chose au Sénat, vers lequel sont maintenant braqués les feux des projecteurs. Il est certes étrange que le président du principal groupe de la majorité considère qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la discussion sur ce projet de loi de finances pour 2013.
Cette décision s'impose cependant non par désaveu du Gouvernement, que nous avons soutenu tout au long de la discussion budgétaire, mais par refus des artifices : nous aurions dû et pu débattre de l'ensemble des missions lors de la première lecture, sur la base du travail des rapporteurs spéciaux et pour avis qui avaient beaucoup travaillé. Le 28 novembre au soir, je disais à l'opposition qu'elle n'avait pas le droit d'interdire l'examen des missions et le travail de fond engagé par le Sénat sur celles-ci.
Nous faisons aussi un constat de blocage : par ce rejet de la première partie, le Sénat a rendu impossible le débat et laissé à l'Assemblée nationale le soin de reprendre certaines de nos préconisations.
Aujourd'hui, nos collègues de l'opposition veulent reprendre la discussion en s'abstenant sur la première partie. Tout le monde sait qu'elle serait totalement artificielle. Si c'est pour faire du théâtre, dans le but d'empêcher le Gouvernement d'agir, nous nous y opposons. C'est faire peu de cas du travail réalisé en octobre et novembre.
Ce choix purement tactique de l'opposition aurait été justifié en première lecture -certains membres de l'opposition l'ont d'ailleurs fait-, il ne l'est plus. M. Adnot disait alors qu'en s'abstenant, il voulait laisser le Sénat jouer pleinement son rôle : fort bien. Mais comment défendre cette position à trois jours de la suspension de nos travaux ? M. Marini disait, en première lecture, que l'opposition devait prendre ses responsabilités. Aujourd'hui, il fuit ses responsabilités institutionnelles et joue les agitateurs ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Philippe Marini. - Vous exagérez !
M. François Rebsamen. - M. Marini a vite pris les habits de l'opposant.
M. Philippe Marini. - Ce n'est pas désagréable !
M. François Rebsamen. - M. Arthuis envisageait lui aussi de s'abstenir, mais son groupe a finalement voté contre. Nemo auditur propriam turpitudinem allegans !
Votre démarche hypocrite vise en réalité à empêcher l'adoption du projet de loi de finances dans les délais constitutionnels, tout le monde l'a compris. Il fallait entendre les rapporteurs spéciaux et pour avis quand il était temps, quand nos travaux pouvaient peser sur ceux de l'Assemblée nationale ! L'article 61 de la Constitution impose de laisser au Conseil constitutionnel un délai d'examen de huit jours. Voulez-vous que nous procédions par ordonnances, comme Raymond Barre ? Cela ne lui a guère réussi.
La situation économique exige l'application de ces mesures de justice sociale et fiscale. Vous pensez tactique, nous pensons aux Français ! Songez à l'état dans lequel vous nous avez laissé le pays il y a à peine sept mois ! François Mitterrand disait : quand la gauche arrive au pouvoir, c'est que la droite a laissé le pays en faillite.
Mme Michèle André. - Bravo !
M. François Rebsamen. - C'était vrai en 1981, c'était vrai en 1997 quand la France ne pouvait pas entrer dans la zone euro.
M. Albéric de Montgolfier. - Votre nez s'allonge !
M. François Rebsamen. - Le rapporteur général a obtenu des avancées. Allez plus loin dans le débat serait vain car le projet de loi de finances sera rejeté par le Sénat. Je renvoie chacun à ses responsabilités et à ses incohérences. J'espère que la majorité sénatoriale refusera ces manoeuvres dilatoires. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)
M. Philippe Marini . - M. le président Rebsamen, lorsque vous étiez dans l'opposition, avez-vous jamais voté la première partie de la loi de finances ? Avez-vous jamais voté l'article d'équilibre ? Je n'en ai pas le souvenir.
MM. Jean-Pierre Caffet et François Rebsamen. - Pourquoi le faites-vous maintenant ?
M. Philippe Marini. - La responsabilité de l'opposition est d'argumenter pour l'avenir. D'ailleurs, ce n'est pas à cause d'elle que l'article d'équilibre a été rejeté mais d'un groupe qui se dit encore membre de la majorité sénatoriale...
Nous nous livrerions, avez-vous écrit dans un communiqué de presse, à je ne sais quelles manoeuvres, vous me qualifiez d'agitateur. Mais le groupe UMP a proposé une vingtaine d'amendements, le groupe CRC aussi. Si la nouvelle lecture s'entamait, compte tenu de ce petit nombre et du fair play sénatorial (exclamations à gauche), nous en aurions fini en deux jours, et la loi de finances pourrait devenir exécutoire.
La ficelle est un peu grosse ! La difficulté tient à la division de la majorité, qui n'est plus que négative aujourd'hui, du moins sur les textes économiques, financiers et fiscaux. Vous faites un usage différent de cette majorité négative par cette motion...
Le groupe UMP, comme d'autres, est prêt à examiner les articles. La raison en est que le Gouvernement a introduit en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale un bon nombre d'amendements qui concernent directement les collectivités ; la péréquation des ressources des départements a notamment été substantiellement modifiée. Par une sorte de gentlemen's agreement, ne pourrions-nous examiner exclusivement ces dispositions ? Il faudrait retirer la motion. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances . - L'Assemblée nationale a intégré certaines de nos propositions sur la première partie, mais nous n'avons pas pu examiner la seconde : ce furent treize journées de travail perdues. Nos collègues de l'opposition sont aujourd'hui pris de remords et veulent enfin présenter aux députés la vision du Sénat. En commission ce matin, ils ont dit en substance : bon sang, mais c'est bien sûr ! Nous avons pris la mauvaise décision ! Nous aurions dû laisser le Sénat travailler ! En d'autres termes, ils voudraient se remettre au travail pour quelques heures et examiner une centaine d'articles-après avoir perdu treize jours... Ce travail n'aurait de sens que si le projet de loi de finances était adopté. On sait qu'il ne le sera pas.
M. Philippe Marini. - Vous ne pouvez demander à l'opposition de voter le budget ! Tournez-vous vers les responsables !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. - Où est la logique ? Vous recherchez le blocage.
M. Philippe Marini. - 63 amendements votés en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. - Nous voulons, nous, que le Gouvernement puisse agir au plus vite. Je crains qu'un virus malfaisant se soit diffusé dans certaines formations politiques ces dernières semaines : faire durer les palabres et les votes sans fin... (Exclamations à droite) Le Sénat doit refuser de se faire inoculer ce virus. Au nom de l'efficacité, il faut voter cette motion que la commission des finances a adoptée par 23 voix contre 13. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Nicole Bricq, ministre . - M. le président Rebsamen l'a dit clairement : cette motion répond à l'obstruction de la droite qui veut prolonger un débat stérile et vain. Cette motion est nécessaire pour que le Parlement puisse adopter ce projet de loi de finances dans les délais constitutionnels. Son dépôt est un acte de responsabilité, je remercie la majorité du Sénat de le faire.
Malgré le rejet du texte, le Sénat a pris toute sa place dans l'élaboration de cette loi de finances. Ses propositions ont été entendues. A la majorité de faire en sorte qu'il soit appliqué rapidement pour faire progresser la justice sociale. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)
M. Joël Labbé . - Je m'exprimerai avec la même gravité que le président Rebsamen. Malgré quelques réserves qui se veulent constructives, le groupe écologiste, membre de la majorité, a voulu voter ce projet de loi de finances. Hélas, il fut rejeté en première lecture. Il est dommage que le Sénat n'ait pu se prononcer, notamment sur les articles qui concernent les collectivités territoriales.
Le texte présenté aujourd'hui ne diffère qu'à la marge du texte initial. La composition politique de cette assemblée n'a pas été modifiée depuis quelques jours. Nous n'avons donc aucune raison de changer d'avis. Or, ce matin, l'opposition a décidé contre toute attente de voter différemment au motif qu'elle veut maintenant débattre de la deuxième partie. Le président Marini nous a fait un grand numéro d'acteur ; l'un d'entre eux ne fait pas honneur à la France en ce moment, il serait bon de ne pas l'imiter...
M. Philippe Marini. - Je n'ai pas l'intention de m'en aller ! Je resterai ici, en France !
M. Albéric de Montgolfier. - Ce n'est pas Depardieu !
M. Joël Labbé. - Pourquoi solliciter un débat quand il ne peut plus avoir lieu et l'avoir refusé quand il pouvait se tenir ? Le peuple français nous regarde. Le Sénat ne sort pas grandi de ces basses manoeuvres politiciennes.
M. Philippe Marini. - Parlez aux responsables !
M. Joël Labbé. - Une majorité, parfois, est à construire...
M. Philippe Marini. - Priez Notre-Dame-Des-Landes !
M. Joël Labbé. - ...et elle va se construire. Le comportement de l'opposition est indigne ! Parce que le débat parlementaire est une affaire sérieuse, nous voterons cette motion. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)
M. Vincent Delahaye . - Jeune sénateur, je suis surpris par ce qui se passe aujourd'hui. En première lecture, j'ai plaidé pour l'abstention sur l'article d'équilibre parce qu'il me semblait préférable de poursuivre la discussion ; mais le groupe UDI n'a pas voulu cautionner le matraquage fiscal de la partie recettes et a voté contre. Il n'y a pas de majorité au Sénat : c'est l'opposition du groupe communiste, non celle de l'UDI-UC ou de l'UMP, qui a entraîné le rejet du texte.
Les députés ont modifié le texte en nouvelle lecture, certes marginalement, mais cela concerne les collectivités. Pourquoi ne pas examiner ces seules dispositions ? Nous pouvons nous entendre, nous n'avons nullement l'intention de bloquer l'institution. Cela donnerait une bonne image de notre travail.
Je suis donc surpris de cette motion, émanant de la majorité, qui nous prive d'un débat essentiel. J'étais prêt à travailler quelques jours supplémentaires...
M. Albéric de Montgolfier. - Nous aussi !
M. Jean-Jacques Mirassou. - Nous ne sommes pas à votre disposition !
M. Vincent Delahaye. - Je voterai contre la motion (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Marie-France Beaufils . - La procédure n'est pas nouvelle : elle a été utilisée à l'automne 1995 pour les ordonnances Juppé sur la sécurité sociale.
Mais la forme ne doit pas faire oublier le fond : une réforme fiscale durable ne peut se réduire à un partage de l'effort entre ménages et entreprises. Le Gouvernement ne fait pas preuve, à nos yeux, de l'audace nécessaire. La plus-value, c'est d'abord -je ne vous renvoie pas aux classiques- le fruit du travail des salariés avant d'être celui de l'imagination débordante des entrepreneurs. Il aurait fallu ne pas céder aux pigeons qui ont tenu la plume de Bercy à l'article 6. La justice fiscale est un impératif qui surpasse l'objectif de redressement des comptes publics imposés par les traités européens contre notre volonté. Vous savez combien les services publics sont essentiels aux ménages les plus modestes ; tout le monde a reconnu qu'ils avaient joué un rôle d'amortisseur de la crise. Il suffirait que les États puissent se refinancer directement auprès de la BCE pour faire des économies de plusieurs milliards d'euros d'intérêts -imaginez ce que serait la charge de la dette à un taux compris de 0,75 % ou de 1 %... Mais le traité l'interdit.
Quand l'UMP et l'UDI-UC veulent discuter, c'est toujours pour réduire les dépenses publiques. Il est certes plus commode de crier haro sur le baudet-fonctionnaire ou le baudet-allocataire social que de s'attaquer à la rente des marchés financiers... Mais la récession est toujours là. Vous vous faites les chantres de l'Europe de la concurrence, non de la coopération.
Cela dit, nous voterons cette motion pour que la gauche, dans sa pluralité, puisse se retrouver dans la politique de changement attendue par nos concitoyens, la politique de justice sociale et fiscale à laquelle nous sommes attachés. (Applaudissements à gauche)
M. Albéric de Montgolfier . - Y a-t-il encore une majorité au Sénat ?
M. Claude Haut. - Vous allez le voir !
M. Albéric de Montgolfier. - Nous avons eu la réponse samedi : le CICE a été rejeté par 203 voix contre 144...
Le groupe UMP a déposé 23 amendements sur 76. Est-ce de l'obstruction ? Onze seulement sont de suppression. Deux portent sur la seconde partie, preuve que nous voulons en discuter. M. Patriat à lui seul en a déposé trois... A l'Assemblée nationale, le Gouvernement a déposé 63 amendements : qui est raisonnable ?
Le groupe UMP vous fait une proposition : il retire tous ses amendements sur la première partie pour consacrer exclusivement l'examen de la deuxième partie aux dispositions relatives aux collectivités territoriales, et notamment aux amendements de MM. Jarlier et Germain. La version qui nous vient de l'Assemblée nationale est catastrophique pour les départements. (Applaudissements à droite)
M. Philippe Marini. - Retirez la motion ! Nous aurions fini à minuit !
M. François Rebsamen. - Trop tard ! Que vous êtes fins manoeuvriers...
M. Jean-Pierre Caffet . - Cette motion, insolite, ne vise qu'un but : sauver cette loi de finances initiale que nous croyons utile aux Français. Nous voulons des crédits pour l'éducation, l'enseignement supérieur et la recherche, l'emploi. La stratégie de ce gouvernement est claire : nous sommes convaincus qu'elle amènera le redressement du pays. Responsables de 600 milliards de dettes supplémentaires en cinq ans, d'un déficit du commerce extérieur de 70 milliards et de la destruction de 700 000 emplois industriels, vous nous faites la leçon sur ce que nous devrions faire... Nous, nous voulons le redressement du pays dans la justice sociale et fiscale.
Vous faites mine de découvrir que le rejet de la première partie du budget impliquait celui de la seconde.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Vous saviez que nous voterions contre ! Tournez-vous vers les responsables, et non vers la droite !
M. Jean-Pierre Caffet. - Les dispositions concernant les collectivités territoriales mériteraient d'être examinées, j'en conviens avec M. Miquel.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. - Suspendons la séance !
M. Jean-Pierre Caffet. - Nous ne prendrons pas le risque de ne pas respecter les délais constitutionnels.
M. Philippe Marini. - Il n'y en a pas !
M. Jean-Pierre Caffet. - Ce budget, première étape du redressement du pays, doit être appliqué. (Applaudissements à gauche)
M. Yvon Collin . - Il est trop tard pour refaire le match.
M. François Rebsamen. - Belle formule !
M. Yvon Collin. - J'ai dit mon regret du rejet de la loi de finances initiale qui nous a empêchés d'examiner la deuxième partie. Reprendre l'ouvrage pour un marathon n'est pas sérieux ; nous sommes fatigués de vos manoeuvres. Notre groupe votera cette motion pour mettre un terme à ce psychodrame.
La motion n°80 est mise aux voix par scrutin public de droit.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 174 |
Pour l'adoption | 177 |
Contre | 169 |
Le Sénat a adopté.
M. le président. - Le projet de loi est donc rejeté. (Applaudissements à gauche)