Enchères publiques (CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi de libéralisation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.
Discussion générale
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour le Sénat de la CMP. - Nous arrivons à la dernière étape du long cheminement d'un texte indispensable et très attendu. Merci à MM. Marini et Gaillard de cette proposition de loi, déposée en... 2008. La France va enfin se mettre en conformité avec la directive Services, avec dix-huit mois de retard, juste avant d'être condamnée.
Le texte apporte aux opérateurs de ventes aux enchères des conditions plus compétitives, face à une forte concurrence internationale. La proposition de loi va au bout de la logique engagée en juillet 2000.
L'Assemblée nationale a largement validé les orientations du Sénat, notamment sur la présence de professionnels en exercice au conseil des ventes.
Restait en discussion le problème des opérateurs autorisés à organiser des ventes volontaires aux enchères publiques. Un huissier de justice de la Sarthe s'est vanté de faire des ventes volontaires son activité principale, alors même qu'existe un commissaire-priseur au chef-lieu !
M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. - Il aurait mieux fait de se taire !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Le Sénat a souhaité assurer une égalité de traitement entre les différentes professions. Pour les huissiers de justice, ces activités doivent rester accessoires. Le Sénat a voulu fixer un plafond de chiffre d'affaires ; l'Assemblée nationale l'a rejeté. La CMP a trouvé un accord grâce au ministre. L'accessoire devra se limiter au tiers du produit de l'office. Ce pourrait même n'être qu'autour de 20 % !
Les instances disciplinaires ou le juge devraient également se référer au volume des ventes réalisées dans un tribunal de grande instance donné, afin d'éviter les distorsions de concurrence. Il s'agit simplement d'appliquer la loi ! Le Parlement ne manquera pas d'y veiller.
Nous sommes parvenus à un équilibre satisfaisant. Ce texte est une réforme cruciale pour l'avenir des ventes aux enchères en France : le Parlement aura bien travaillé !
M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. - Je me réjouis que la CMP soit parvenue à un accord sur cette proposition de loi, qui parachève la transposition de la directive Services.
Il s'agit aussi de redonner à la France sa place dans le marché des ventes aux enchères. Le Sénat a enrichi significativement la proposition de loi initiale, en préservant les caractéristiques essentielles de ces ventes : l'intervention d'un tiers et l'adjudication. La création du Conseil des ventes volontaires est une avancée.
Les mesures de simplification sont propres à renforcer la compétitivité du secteur, comme la modernisation du statut des opérateurs. L'Assemblée nationale vous a très largement suivis.
La CMP s'est accordée sur le caractère « accessoire » de la part des enchères publiques effectuées par les huissiers et notaires. Le statut d'officier public est maintenu ; pour les ventes en gros, le rôle des différents opérateurs est équilibré. Ce texte va dans le bon sens. (Applaudissements à droite)
M. Jacques Mézard. - Trois ans après son dépôt, cette proposition de loi parvient au terme d'un processus législatif que j'avais qualifié de sinueux en avril. L'Assemblée nationale et le Sénat sont tombés d'accord sur un texte que nous voterons unanimement, en regrettant que la méthode de transposition de la directive Services tranche par tranche ne nous ait pas permis de tenir les délais. Mais la surcharge de notre ordre du jour nous contraint de travailler dans l'urgence... ce qui revient à dire que plus rien n'est urgent !
Notre système de ventes publiques est en crise : les ventes d'objets d'art ou de chevaux ont chuté. Les grandes maisons anglo-saxonnes dominent le marché de l'art. Après la fin du monopole des commissaires-priseurs, il fallait redonner de l'attractivité et du dynamisme au secteur.
Ce texte vise en fait surtout les petites sociétés de vente volontaire, présentes dans les zones rurales. Les effets de la concentration pourraient être désastreux pour elles. C'est pourquoi nous continuons à considérer que l'article 4 ne doit pas conduire à favoriser de façon disproportionnée les opérateurs dont ce n'est pas l'activité principale. La vente de gré à gré doit demeurer une fonction spécialisée requérant une formation précise. Nous aurions préféré une rédaction plus stricte.
Nous approuvons les articles 19 et 22 sur la nouvelle réglementation du secteur : celui-ci brasse plus de 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel, avec les tentations que cela induit.
L'ensemble du groupe RDSE votera ce texte.
M. Jean-Claude Peyronnet. - La discussion en CMP a porté seulement sur le point de savoir si le caractère « accessoire » allait s'exprimer par un pourcentage ou pas. Les choses avaient assez duré, il était sage d'en finir, monsieur le président. Nous étions favorables à un pourcentage et nous étions ralliés, en séance, à un amendement Des Esgaulx.
Tous ceux qui ont travaillé un peu sur cette matière aride en ont vu la complexité. Des privilèges existent encore, à un mois du 4 août. Mettons que ce ne sont pas des privilèges mais des avantages corporatifs... Avec internet et la mondialisation, les professions en question devraient évoluer plus que ne le préconise ce texte, qui apporte des évolutions intéressantes mais trop marginales pour qu'on puisse en attendre un coup de fouet au marché de l'art français.
Comme lors de la précédente lecture, nous nous abstiendrons.
M. Christophe-André Frassa. - Il s'agissait de transposer les dispositions de la directive Services concernant les ventes volontaires tout en approfondissant la libéralisation du secteur. Il s'agissait aussi de revenir sur la loi de 2000 sur les commissaires-priseurs. La transposition de la directive donne à la France l'occasion de renforcer ses positions face aux grandes sociétés internationales de vente aux enchères publiques.
Le Conseil des ventes volontaires recevra le statut d'établissement d'utilité publique doté de la personnalité morale. Il sera donc de droit privé. Nous avons jugé opportun de lui donner possibilité de proposer des modifications réglementaires et législatives. La CMP a précisé les critères d'appartenance à ce conseil, où la présence des professionnels en activité devrait rester marginale.
Les sanctions applicables sont graduées en fonction de la gravité des faits reprochés. La prescription a été ramenée de trois à deux ans.
La CMP n'a pas reconnu le caractère complémentaire d'activité de diffusion et de transport que pourraient accepter les sociétés de ventes volontaires.
Nous nous satisfaisons qu'un texte équilibré ait été retenu. Consciente que la Commission européenne est très attentive aux délais de transposition, l'UMP se réjouit de voter ce texte qui engage une réforme nécessaire. (Applaudissements sur les bancs UMP)
La discussion générale est close.
Vote sur le texte élaboré par la CMP
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - L'amendement Houillon, adopté en CMP, est moins satisfaisant que ce que proposait le président Hyest. L'objectif affiché était la préservation de la compétitivité de notre marché de l'art. Mais ce texte est issu du lobbying intense de Christie's et Sotheby's !
Les premiers touchés seront les acteurs répartis sur notre territoire. Le caractère représentatif de ces ventes sera renforcé et les petits acteurs n'auront qu'à mettre la clé sous la porte.
Persistant dans notre inquiétude, nous voterons contre.
M. Yann Gaillard. - J'avais été irrité que, du fait de la réforme constitutionnelle, ce soit le texte de la commission qui vienne en discussion, et pas celui de notre proposition de loi. Mais enfin, ce texte est satisfaisant. Notre marché de l'art doit être défendu, et ce n'était certainement pas en mettant les oeuvres d'art dans l'assiette de l'ISF qu'on l'aurait fait !
Les conclusions de la CMP sont adoptées.
La séance est suspendue à 16 h 55.
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La séance reprend à 17 heures.