Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle dix-huit questions orales.
Service civique
Mme Christiane Demontès. - Le service civique, créé par la loi du 10 mars 2010 à l'initiative du Sénat, a fait l'objet d'une enquête de satisfaction. Il remporte du succès ; en revanche, associations et jeunes déplorent le manque de moyens et l'insuffisance du nombre de missions proposées -25 000 pour 45 000 demandes, très loin des objectifs initiaux du Gouvernement. Le service civique permet à de nombreux jeunes de s'investir pour la collectivité tout en construisant leur orientation et en valorisant leur parcours professionnel. Alors qu'il est indispensable de renforcer la mixité et la cohésion sociales, ce dispositif sera-t-il enfin correctement doté ?
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. - Je rends hommage à la Haute assemblée d'avoir créé le service civique. Ce dispositif, qui correspond à un engagement du président de la République, est une contribution majeure de ce Gouvernement à la politique de la jeunesse dans un contexte budgétaire contraint. Le budget pour 2011 est de 100 millions. L'augmentation entre 2010 et 2013 atteint pas moins de 300 %. L'objectif est d'accueillir 75 000 jeunes en 2014, soit 10 % d'une classe d?âge ; 20 000 le seront en 2012.
Le Gouvernement, vous le voyez, accorde les moyens nécessaires à la montée en charge du service civique. En outre, le conseil d'administration de l'Agence a décidé le 9 juin que 20 000 mois supplémentaires sur agréments locaux seraient distribués d'ici la fin de l'année. Mme Pécresse prépare un décret sur la validation des acquis de l'expérience.
Mme Christiane Demontès. - Merci de cette réponse. Pour autant, l'objectif initial du Gouvernement était de 70 000 postes dès 2012, non de 20 000. Dans ce domaine comme dans tant d'autres, le président de la République doit tenir ses engagements. Le taux de chômage des jeunes en France est anormalement élevé. Notre pays doit s'en préoccuper. C'est un enjeu de société.
Fermeture de classes en Gironde
Mme Françoise Cartron. - En Gironde, à la rentrée prochaine, 42 classes doivent fermer, dont 11 classes en maternelle, malgré l'augmentation du nombre d'enfants scolarisés. Ainsi, l'application stricte du principe d'un départ sur deux à la retraite non remplacé augmentera les effectifs moyens par classe et fera obstacle tant à l'accompagnement personnalisé des élèves qu'à la scolarisation des enfants de deux ans. Or, l'on sait le rôle fondamental que joue la scolarisation précoce pour la réussite des enfants issus de milieu modeste. Les économies de bout de chandelle coûteront cher à la France de demain !
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Chatel. Alors que le budget est contraint, le principe du « un sur deux », courageux et responsable, a été appliqué avec un grand discernement. (On en doute à gauche)
Votre département, à la rentrée 2011, connaîtra 42 fermetures de classes mais 23 créations, dont 14 en maternelle, 6 en élémentaire et 3 classes spécialisées. Le taux d'encadrement en Gironde est stable, étant donné que les enfants de deux à trois ans ne sont pas comptabilisés. La totalité des élèves de trois ans sont accueillis. L'accompagnement personnalisé n'est pas remis en cause ; il est au contraire mis en oeuvre à tous les stades de la scolarité ; plus de 230 000 élèves auront bénéficié des stages de remise à niveau.
Enfin, cette année, 17 000 postes sont créés dans l'Éducation nationale.
Mme Françoise Cartron. - On retiendra seulement deux chiffres : 42 fermetures de classes pour seulement 23 ouvertures. La fermeture de classe n'est jamais un choix « courageux et responsable ». Chaque fois qu'un village perd une classe, un instituteur, c'est un recul.
Fermeture de classes dans l'Aude
M. Marcel Rainaud. - Dans l'Aude, 23 postes d'enseignant sont supprimés, 174 emplois de vie scolaire : les classes en surnombre mettent en péril la sécurité des élèves et entraînent le creusement des inégalités sociales et scolaires. Au collège de Lézignan-Corbières, qui compte 1 100 élèves, les contrats d'insertion ont presque totalement disparu ; il n'y a qu'un surveillant pour 150 élèves, le poste d'aide-laborantin est supprimé -quid des travaux pratiques ? Je ne peux me résigner à une carte scolaire qui est le résultat d'un nivellement par le bas ; je ne peux me résigner à la disparition de l'école en milieu rural. Élus et populations se mobilisent. Quel avenir pour les jeunes Audois ? Quelle ambition pour l'éducation ?
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. - Je vous prie, également, d'excuser l'absence de M. Chatel. La France a dû emprunter 180 milliards sur les marchés, soit trois fois le budget de l'Éducation nationale. Le bon sens et la bonne gestion lui commandent d'assainir ses finances. Pour autant, notre pays compte 35 000 enseignants de plus qu'au début des années 1990 pour 540 000 élèves de moins...
Conformément aux préconisations du rapport de la Cour des comptes, le ministère de l'Éducation nationale a procédé avec les recteurs à l'examen de l'utilisation des moyens de l'État. Ses priorités pour la rentrée 2011 dans votre département sont la préservation de l'éducation prioritaire et en zone rurale, ainsi que le rééquilibrage entre l'ouest et l'est.
Contrairement à ce que vous affirmez, les taux d'encadrement sont stables dans l'Aude.
M. Roland Courteau. - Nous ne devons pas avoir les mêmes chiffres !
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État. - Nous mettons l'accent sur les ZEP -seuls deux postes y sont supprimés- et les zones rurales. Une gestion responsable des moyens impose de les concentrer là où ils sont le plus nécessaires.
M. Marcel Rainaud. - Les promesses n'engagent que ceux qui y croient. Nous sommes loin de la révolution copernicienne annoncée. Plus rien ne tourne rond ! C'en est fini de l'objectif de l'égalité des chances !
Salle de l'Élysée Montmartre
Mme Catherine Dumas. - Quel avenir pour la salle de l'Élysée Montmartre après l'incendie du 22 mars 2011 ? Le bâtiment, dont les décors sont inscrits au registre des monuments historiques, est un lieu emblématique de la vie culturelle et artistique à Paris depuis 1807. La société exploitante s'est vue notifier une procédure d'éviction par le propriétaire des lieux ; une opération immobilière est possible. Que comptez-vous faire pour préserver l'existence de cette salle, sa vocation et la situation des salariés et intermittents ?
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. - M. Mitterrand m'a prié de vous répondre. Après le sinistre de mars 2011, tout a été fait avec le concours de la ville de Paris pour programmer dans d'autres lieux les spectacles prévus. L'État fera, fin 2011, les premières préconisations pour assurer la conservation des parties protégées ; la possibilité de reconstruction est encore à expertiser, après avis de la commission de désaffection prévue par l'ordonnance de 1945 relative aux spectacles. Sous réserve des intentions de la société propriétaire, l'État pourrait, le moment venu, prendre à sa charge une partie du coût des travaux.
Mme Catherine Dumas. - Élue parisienne et membre de la commission de la culture du Sénat, je serai, comme M. Bournazel, conseiller de Paris, particulièrement attentive au devenir de cette salle et au maintien de sa vocation culturelle.
LGV Montpellier-Perpignan
M. Roland Courteau. - Quel feuilleton que cette ligne à grande vitesse dont le sud de la France a tant besoin ! Nous avons perdu vingt ans au terme d'un feuilleton plein de rebondissements, commencé en 1990 avec le rapport Querrien.
Or, l'un des derniers tracés prévus par Réseau ferré de France (RFF) ne tient pas compte du risque d'inondation dans les basses plaines de l'Aude -le remblai prévu est tout à fait insuffisant-, ni de la proximité de vignobles de qualité et de zones d'activité, ni des nuisances que subiraient les riverains de très nombreuses communes, Salses, Fitou, Lapalme ou Cuxac. Ne mettons pas en péril les populations ! La responsabilité du Gouvernement serait clairement engagée. De manière plus générale, élus et populations sont déterminés à se faire entendre. Il serait dommage d'en arriver à une épreuve de force alors que des solutions existent. Il est nécessaire d'arriver à un consensus sur le tracé.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. - Cette ligne est un maillon stratégique du réseau européen de LGV. Le 12 mars dernier, M. Mariani a tenu à assister à la signature de la convention actant le financement des études préalables à la déclaration d'utilité publique, à hauteur de 42 millions ; l'enquête publique devrait être lancée en 2015. Les différents tracés seront présentés aux collectivités territoriales le 16 juin ; le fuseau de passage sera arrêté à l'automne.
Bien évidemment, le Gouvernement tiendra compte de l'impératif de sécurité des populations au regard du risque hydraulique et sollicitera des financements européens.
M. Roland Courteau. - Je transmettrai ce message. Quoi qu'il en soit, nous jugerons aux actes. Élus et populations ne sont pas opposés au maillon Montpellier-Perpignan ; ils attendent seulement que leurs préoccupations légitimes et de bon sens soient prises en compte. A ce propos, quid de la ligne à grande vitesse Toulouse-Carcassonne-Narbonne ? Son abandon, d'autant que la réalisation de la ligne Bordeaux-Toulouse est confirmée, remettrait en cause la liaison Atlantique-Méditerranée. Ce serait une ineptie. J'attends des apaisements de la part du Gouvernement.
Desserte ferroviaire des villes du Jura
M. Gérard Bailly. - La mise en service de la ligne à grande vitesse entre Mulhouse et Dijon, en décembre prochain, compliquera la desserte de la ville de Lons-le-Saunier -alors que la ligne a récemment été électrifiée grâce à des financements des collectivités territoriales- et de celle de Dole. Annulations de correspondances, suppressions de liaisons directes, changements obligatoires de trains sont au programme pour les Jurassiens. J'espère en outre que le projet Lyria ne verra jamais le jour. Il y a plus de dix ans, la SNCF avait promis le maintien de la qualité des dessertes. Nous en sommes loin d'autant que l'on diminue par ailleurs le nombre d'autorails sur la ligne de montagne entre Andelot et La Cluse.
Le Jura s'inquiète de l'abandon de toute politique d'aménagement du territoire, d'autant que ses administrés participent à hauteur de 50 millions au financement de la ligne Rhin-Rhône.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. - Un nouveau système de circulation ferroviaire sera en effet mis en place en décembre 2011. La mise en place de TER de substitution aux dessertes nationales supprimées peut faire l'objet d'une compensation financière par l'État ; il appartient à la région de déterminer la nouvelle offre. La région Franche-Comté travaille à maintenir la desserte de Lons-le-Saunier.
L'offre quotidienne sur Paris-Dole passera de six à cinq allers et retours. La liaison TGV Paris-Lausanne par le Jura n'est pas remise en cause même si la SNCF fera passer certains trains par Genève ; aucune décision définitive n'est prise à ce jour. Le Gouvernement souhaite une desserte équilibrée du Haut-Doubs. La grille TER pour la desserte d'Oyonnax ne comportera plus qu'un seul aller-retour ferroviaire quotidien, complété par des rotations d'autocars ; 500 usagers fréquentent chaque jour ces lignes, avec un taux d'occupation moyen de 20 passagers par circulation.
M. Gérard Bailly. - Nous serons vigilants. Les Jurassiens, comme les autres, ont besoin de venir souvent à Paris. Il serait dommage qu'ils doivent prendre la voiture pour parcourir 80 km avant d'atteindre une gare, faute de correspondances.
Fret ferroviaire à Saint-Pierre-des-Corps
Mme Marie-France Beaufils. - Où sont passées les promesses du Grenelle de l'environnement ? La part modale du fret ferroviaire est tombée de 22 % en 2000 à 14 % en 2009. Dans cette enceinte, j'ai souvent relayé les inquiétudes des PME du Centre concernant les fermetures de lignes et le devenir de la gare de Saint-Pierre-des-Corps.
Il faut relancer le fret ferroviaire, a dit Mme la ministre ; nous avons aujourd'hui besoin d'actes. Je lui demande d'intervenir auprès de la direction du fret SNCF pour que la gare de Saint-Pierre-des-Corps soit réintégrée dans le système national « multi-lots multi-clients ». Le trafic vers l'Espagne pourrait être nettement amélioré -le fret ferroviaire représente à peine 4 % des échanges à Hendaye. Les choix politiques sont en cause, plus que la crise économique. Le port de Nantes-Saint-Nazaire a besoin de débouchés, les routes sont surchargées. Il est temps de concrétiser le Grenelle !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. - En complément de l'engagement pour le fret ferroviaire pris par le Gouvernement, la SNCF a proposé un nouveau schéma directeur depuis 2009. Cette nouvelle offre, alors que le secteur a été ouvert à la concurrence, met l'accent sur le développement de flux industriels en trains complets. L'offre « multi-lots multi-clients » pour répondre aux besoins en wagons isolés est en place depuis décembre 2010.
S'agissant de Saint-Pierre-des-Corps, la difficulté tient à l'absence de grands chargeurs ferroviaires sur place ; la gare est cependant maintenue dans le catalogue de l'offre « wagon isolé ». Elle reste active. Quant au port sec de Vierzon, l'implantation d'une plate-forme multimodale pourra être examinée si l'activité de chargement le justifie.
L'État est déterminé à développer le transport ferroviaire ; la SNCF doit y prendre sa part, en modernisant son organisation pour obtenir une offre compétitive.
Mme Marie-France Beaufils. - J'entends dire que la SNCF doit respecter des objectifs économiques d'équilibre. Mais l'exigence de trains complets ne va pas dans le sens de l'aménagement du territoire. Mieux vaudrait fonder le raisonnement sur les besoins objectifs des clients ; ainsi pourrait-on développer une logique de réseau associée à une logique d'axes, pensée sur l'ensemble du pays. L'étude prospective du comité central d'entreprise de la SNCF serait une bonne base de raisonnement.
Travailleurs saisonniers
Mme Annie David. - La France accueille 78 millions de touristes, qui ont rapporté 145 milliards d'euros. Pourtant, les 400 000 salariés en CDD saisonniers subissent de nombreuses inégalités de traitement. Un amendement que j'avais fait adopter par le Sénat, pour y remédier, lors de l'examen du texte relatif aux territoires ruraux a été malheureusement supprimé par l'Assemblée nationale. Le travail saisonnier n'est pas défini par la loi ; la reconduction des contrats n'est pas automatique ; les CDD saisonniers ne donnent pas lieu à la prime de 10 % en fin de contrat.
Il faut construire un cadre pour la saisonnalité. Le médiateur de la République a formulé des propositions de réforme, dont ont été destinataires de nombreux membres du Gouvernement. Celui-ci est donc bien informé. Que compte-t-il faire ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. - Ce rapport propose de définir le caractère légal de la saisonnalité -ce qui ne paraît pas s'imposer puisque la jurisprudence de la Cour de cassation est claire et constante. Il propose aussi de poser en principe la reconduction annuelle du contrat et le versement de la prime de 10 % ; des études préalables s'imposent, de même qu'une concertation avec les partenaires sociaux.
Le Gouvernement se félicite que la convention du 6 mai 2011 sur l'indemnisation du chômage ait permis d'améliorer celle des saisonniers.
Mme Annie David. - Le Gouvernement connaît déjà les positions des partenaires sociaux ! La jurisprudence est claire ? Sans doute mais la saisonnalité se développe dans des domaines nouveaux, grande distribution par exemple. Les saisonniers vivent dans une précarité inacceptable. J'invite le Gouvernement à relire les propositions du Médiateur.
Situation sanitaire en Guyane
M. Georges Patient. - Le 11 juin, s'est tenue à Cayenne une conférence régionale sur le rattrapage sanitaire. La situation de la Guyane est grave : l'espérance de vie y est quatre ans plus basse qu'en métropole, la mortalité infantile plus de deux fois plus importante, des pathologies comme le VIH ou la tuberculose y ont des prévalences plus élevées. Nous manquons de professionnels de santé et avons 2,5 fois moins de structures sanitaires que la Corse, à population comparable.
Mme Dini, présidente de notre commission des affaires sociales, a regretté, de retour d'une mission aux Antilles et en Guyane, le retard pris dans la mise en oeuvre du plan de santé outre-mer. Et ce retard s'accentue alors que la croissance démographique atteint 3,9 % par an et que les caractéristiques géographiques de mon département rend malaisé l'accès de tous aux soins.
Que compte faire le Gouvernement ?
M. Marc Daunis. - Très bien !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. - Mme Berra m'a transmis sa réponse.
Le plan santé outre-mer évalue les retards de nos régions ultramarines. En rattrapage et en mesures exceptionnelles la Guyane a reçu plus de 110 millions ; des mesures structurelles sont engagées. Les études médicales se développent en Antilles-Guyane, avec un numerus clausus élargi et une généralisation des techniques modernes, comme la télémédecine.
Pour accompagner le passage à la T2A, l'ARS a mis en place un comité de veille. Le programme stratégique régional de santé du 24 mai 2011 mis en oeuvre tiendra compte des retours d'expérience. Fruit d'une longue concertation, il prolongera les efforts importants réalisés en Guyane.
M. Georges Patient. - Les élus guyanais unanimes attirent l'attention du président de la République et du Gouvernement sur les enjeux urgents, à Cayenne, Saint-Laurent et pour la construction d'un hôpital de 165 lits dans l'ouest. Ils ont adopté une motion le 11 juin, soutenue par l'ensemble des responsables de structures hospitalières de Guyane, que je vais vous remettre, monsieur le ministre.
Fiscalité des non-résidents
M. Richard Yung. - Selon l'article 164 A du code général des impôts, les personnes ayant leur domicile fiscal hors de France ne peuvent déduire aucune charge de leur revenu global imposable. Cela fait problème quand la personne en question ne perçoit aucun revenu de source étrangère.
Saisi de ce problème, lors de la discussion de la dernière loi de finances, Bercy s'est engagé à publier une instruction fiscale. Où en est la préparation de ce document ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. - Les personnes résidant en France sont astreintes à une déclaration en France, avec contribution illimitée mais assortie d'avantages fiscaux, les non-résidents, imposés sur leurs revenus de seule source française ont une obligation fiscale limitée et ne se voient pas reconnaître la possibilité de bénéficier d'avantages fiscaux.
La jurisprudence Schumacker de la Cour de justice conduit à prendre en compte le cas des non-résidents ayant des revenus de source exclusivement française qui pourront bénéficier d'allègements de charges à condition de ne pas en bénéficier dans leur État de résidence. L'instruction fiscale est en préparation et sera publiée très prochainement.
M. Richard Yung. - Le cas de figure auquel je pense est celui du retraité modeste qui vit à l'étranger et doit verser une pension alimentaire. Celle-ci n'est pas déduite de son revenu imposable ; Bercy pourrait traiter avec doigté ces situations particulières.
Demandeurs d'asile
M. Marc Daunis. - Qu'il s'agisse de la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur les demandeurs d'asile, du Cedesa ou de la directive du 27 juillet 2003, les textes ne manquent pas, qui imposent d'héberger et d'accompagner les demandeurs d'asile durant la procédure. Ce droit n'est pas appliqué, l'État ne remplit pas ses obligations.
Dans les Alpes-Maritimes, aucune solution pérenne n'est proposée aux 200 demandeurs d'asile. La notion de « départ volontaire » recouvre des réalités différentes, avec des familles qui se trouvent éclatées par des gestes de désespoir.
Le nombre de demandeurs d'asile n'est pourtant pas considérable : les Alpes-Maritimes sont le quinzième département. En outre, la France pratique un jeu à somme nulle, entre les demandeurs qu'elle reçoit et ceux qu'elle renvoie vers d'autres États européens depuis la directive du 22 février 2003, qui rend obligatoire le dépôt de la demande d'asile dans le pays d'arrivée. Au reste, la Cour européenne des droits de l'homme conteste cette procédure.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - M. Guéant m'a chargée de vous répondre sur ce sujet grave. Le Gouvernement ne cesse de proposer des améliorations que vous refusez systématiquement. Le droit d'asile est une tradition républicaine. Tout demandeur bénéficie d'un accueil approprié. Chacun sait que l'évolution de la demande d'asile est liée à des facteurs extérieurs. L'augmentation est incessante depuis 2007.
Les centres d'accueil, avec plus de 21 000 places répondent parfaitement aux besoins des demandeurs d'asile. Votre région est la quatrième de la métropole pour les capacités d'accueil. L'État assume ses devoirs en appliquant les textes que vous avez votés entre 1997 et 2002 et refusés depuis !
M. Marc Daunis. - Je regrette le ton de cette réponse. Je peux adopter le même et évoquer la distance entre les actes et les promesses du candidat Sarkozy ! En outre, votre réponse contient deux inexactitudes. Il y avait 200 places en Cada en Alpes-Maritimes ; il n'y en a pas davantage. Le projet, financé, d'en créer 80, a été abandonné.
Une progression du nombre de demandeurs d'asile ? Pas en 2011 dans mon département.
Il est inadmissible que le préfet ne juge pas devoir répondre à la demande d'un parlementaire : mes deux interpellations sont restées sans réponse. Des enfants sont à la rue, des familles sont éclatées. Un Tchétchène de 26 ans qui allait se marier, qui était innocent de quoi que ce soit, s'est défenestré à Nice, il y a quelques semaines, par peur d'une action diligentée par un juge antiterroriste. De tels drames ternissent l'image de la France.
Sécurité routière
M. Jacques Mézard. - Enlever les panneaux avertisseurs de radars n'aidera pas les automobilistes à contrôler leur vitesse. Nos routes et autoroutes font l'objet de limitations de vitesse qui varient sans cesse, au point que les conducteurs ne savent plus à quelle vitesse ils doivent rouler à tel endroit.
Les constructeurs continuent à développer des voitures moyennes qui peuvent dépasser les 220 km/h. Cela n'a aucun sens.
Réduire à zéro le taux d'alcool toléré serait un moyen efficace d'améliorer la sécurité routière, quitte à déplaire à certains lobbies.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - La sécurité routière est une priorité absolue pour le Gouvernement. Notre fermeté a sauvé 23 000 vies et évité 300 000 blessés. Une dégradation ayant été constatée au début de l'année, le comité interministériel de la sécurité routière du 11 mai a pris des décisions : dissuader la vitesse excessive et la conduite en état d'ébriété ou sous l'emprise de stupéfiants, sécuriser l'usage des deux-roues.
Les panneaux avertisseurs de radar n'ont plus d'effet préventif. Leur suppression a donc été engagée, en concertation avec les commissions locales de la sécurité routière. Ils seront remplacés par des radars pédagogiques. Les avertisseurs de radar ne doivent fonctionner que pour prévenir des zones dangereuses et des limitations de vitesse. Le Gouvernement a donné instruction aux préfets de mettre en cohérence les vitesses sur les réseaux routiers.
Des éthylomètres embarqués sont prévus. La Loppsi 2 prévoit la confiscation obligatoire de véhicules conduits sous l'emprise de l'alcool ou d'un stupéfiant.
Vous le voyez, prévention et répression se combinent pour faire baisser le chiffre des tués.
M. Jacques Mézard. - Les radars étaient posés dans des zones accidentogènes, d'où l'utilité des panneaux avertisseurs : ces zones demeurent.
Au-delà de la répression, l'alcoolémie est une affaire de taux.
Quant aux constructeurs, le Gouvernement ne va évidemment pas les mettre en cause.
Intercommunalité dans les Hautes-Pyrénées
Mme Josette Durrieu. - Le schéma intercommunal prévu par le préfet des Hautes-Pyrénées maintenait les trois communes de Séron, Luquet et Gardères, des enclaves historiques du XIe siècle, dans le canton d'Ossun. Hélas, le préfet des Pyrénées-Atlantiques, sur instruction du ministère, veut les intégrer dans la communauté d'Ousse-Gabas.
Quelle méthode allez-vous utiliser pour résoudre le problème posé par ces enclaves historiques ? Le critère de la continuité territoriale ne doit pas bouleverser l'organisation historique de ces territoires. L'important est de maintenir la cohérence et d'entendre les demandes légitimes des élus et des populations.
Quelle est la position du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - Notre objectif est de supprimer les enclaves territoriales. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques s'est conformé au code général des collectivités territoriales (CGCT) qui ne prévoit aucune dérogation à cet objectif, qui a fait l'objet d'un large consensus parlementaire. Certaines intercommunalités, constituées il y a plusieurs années, ne sont pas cohérentes. Elles ont été acceptées parce qu'elles engageaient le mouvement. Mais cette considération ne se justifie plus. La discontinuité n'est plus acceptable.
Dans le cas que vous évoquez, le préfet des Hautes-Pyrénées a été informé par celui des Pyrénées-Atlantiques de sa proposition de rattachement, qu'il a trouvée logique. Il dispose de trois mois pour se prononcer après saisine de la Commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) en juillet. Des contre-propositions pourront être faites par les communes, mais celles-ci ne sauraient aller contre le principe de continuité territoriale.
Mme Josette Durrieu. - Quelle rigidité ! Quelle fermeture ! Quelle hâte ! Je regrette que vous refusiez de prendre en compte l'histoire et les projets. La cohérence géographique ne peut être imposée à des élus qui ont, à une certaine époque, oeuvré au développement de leur territoire.
Aucun de vos arguments ne trouve place dans un raisonnement cohérent. Les deux préfets proposent, la CDCI va se prononcer et les deux tiers des élus choisiront. Je crois qu'ils seront unanimes à rejeter la demande du préfet des Pyrénées-Atlantiques, c'est-à-dire du ministre.
L'efficacité, dites-vous ? Laquelle ? Une efficacité politique peut-être, et non d'aménagement du territoire...
Indemnisation des délégués communautaires
M. Claude Léonard. - La multiplication des structures intercommunales a retenti sur le nombre de réunions imposées aux élus. Les membres d'exécutifs sont indemnisés mais pas les autres, qui subissent pourtant aussi cette pression chronophage.
La dotation « élu local » pourrait être majorée sans que les finances publiques soient mises à mal : elle ne représente que 65 millions.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - Les fonctions électives sont gratuites mais des indemnités peuvent être perçues par les responsables d'exécutifs, selon un barème correspondant à la strate de population. Le législateur a exclu les simples délégués communautaires du bénéfice d'une telle indemnisation. Toutefois, ceux-ci peuvent avoir un droit à crédit d'heures, à une formation, à une compensation de perte de ressources en cas d'absence professionnelle ; ils sont protégés contre toute discrimination de leur employeur.
Le Gouvernement, conscient des difficultés rencontrées en raison de la charge de travail, a trouvé une solution dans la récente loi sur le conseiller territorial pour mieux indemniser les conseillers des communautés de communes sans alourdir le budget des collectivités, en prenant sur l'enveloppe des indemnités accordées aux président et vice-présidents.
M. Claude Léonard. - Merci infiniment de cette réponse à cette question plus que jamais d'actualité avec la première élection des conseillers territoriaux en 2014.
Statistiques sur la sécurité
M. Jean-Paul Fournier. - Le maire tient désormais un rôle central dans la sécurité. Ne faudrait-il pas affiner les statistiques pour refléter cette évolution ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - M. Guéant, retenu ce matin, se déplacera bientôt dans votre ville ; ce sera l'occasion d'approfondir ce sujet.
La sécurité est l'affaire de tous. Depuis la Révolution française, et la loi de 1884, le maire est doté de pouvoirs de police. La loi du 5 mars 2007 a pris acte de cet héritage pour faire du maire un acteur incontournable de la politique de sécurité. Celle-ci, contrairement aux idées préconçues, n'est pas affaire d'idéologie ; sa réussite tient à la coopération étroite entre État et collectivités territoriales. Depuis plus de mille conseils locaux de sécurité ont été créés, 400 contrats signés, mille conseils des droits et devoirs des parents installés, des maires pratiquent le rappel à l'ordre et ont recours à la transaction, des cellules de citoyenneté et de tranquillité publique vont voir le jour à Chateaurenard. Voilà l'enjeu de cet impératif quotidien pour protéger la sécurité de nos concitoyens.
M. Jean-Paul Fournier. - Lorsque M. Guéant viendra à Nîmes, lundi prochain, assister à la mise en place du conseil des droits et devoirs des parents, je lui soumettrai des propositions. L'important est le partage au plan local des informations entre les différents maillons de cette politique : gendarmerie, police nationale et police municipale.
Missions locales
Mme Bernadette Bourzai. - La circulaire du 19 janvier 2011 remet en cause l'existence des missions locales et leur gouvernance partagée entre État et collectivités. De fait, avec elle, on passe d'une logique de conventionnement à une approche de financement par projet, dans un esprit de marché public, d'un accompagnement global du jeune à un suivi centré sur l'emploi.
L'Union nationale des missions locales (UNML), relayée par l'Association des régions de France, vous a alerté sur les dangers de ce texte en février. Allez-vous appliquer le moratoire demandé et renégocier le texte ?
Le groupe de travail doit rendre ses conclusions à la mi-juin. Nous sommes le 14. Où en est-on ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - Les moyens alloués aux missions locales en 2011 sont constants par rapport à l'an passé : 198 millions. En revanche, pour répondre aux besoins, un rééquilibrage est intervenu entre régions et départements, comme l'avaient souhaité les missions locales elles-mêmes.
Une nouvelle logique est nécessaire pour professionnaliser le réseau des missions locales, comme l'avait proposé le rapport de l'IGF qui reconnaissait la capacité du réseau à accompagner les jeunes vers l'emploi, gage de leur insertion.
Enfin, la circulaire, qui fait débat, fera l'objet d'une consultation après que le groupe de travail aura rendu ses conclusions.
Mme Bernadette Bourzai. - Cette réponse reste insuffisante. Quand connaîtra-t-on ces conclusions ? La situation est critique dans le Limousin, où la charte interfinanceurs est menacée. Nous suivons 20 % des jeunes de 15 à 24 ans. Un pays qui ignore sa jeunesse n'a plus d'avenir !
Services publics à Hendaye
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - D'après les estimations, 30 % des résidents de la ville d'Hendaye ne sont pas de langue française. La situation de cette ville frontalière, qui accueille également de nombreux voyageurs, doit être prise en compte.
Il faut prévoir un système dérogatoire pour les services publics, de l'Éducation nationale à la gendarmerie. En 2010, une mission parlementaire sur la politique transfrontalière a préconisé un schéma de service transfrontalier à l'échelle des bassins de la population. Comptez-vous adopter cette préconisation ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - Le Gouvernement se saisit de ce problème. La coopération interrégionale et transfrontalière s'est développée depuis 20 ans et notre code général des collectivités locales a été modifié par la loi de 2008 pour permettre la création de groupements européens de coopération : le premier concernera la frontière du Luxembourg. Cela constitue une piste sérieuse.
Le Gouvernement travaille, inspiré par le rapport de la mission parlementaire de 2010, en s'appuyant sur la Datar et l'ambassadeur à la coopération transfrontalière.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - J'aurais aimé plus de précisions...
Hendaye n'est pas une ville frontière mais une frontière qui est une ville. On y parle trois langues : le français, l'espagnol et le basque. Les frontières nationales y font obstacle à l'accès aux services publics. Puisse l'intégralité des dix-neuf préconisations du rapport être mise en oeuvre rapidement ! La population a besoin de services publics, et en particulier de conserver son commissariat, compte tenu de l'étendue des problèmes de toxicomanie et de délinquance.
Dérogation à l'interdiction d'épandage aérien
M. Alain Houpert. - La loi du 12 juillet 2010 a interdit l'épandage aérien de produits phytosanitaires tout en autorisant des dérogations. Hélas, le décret n'a pas été publié, ce qui pénalise les viticulteurs bourguignons. Le ministre va-t-il prévoir un système transitoire, comme l'an dernier, afin que les viticulteurs ne pâtissent pas de dysfonctionnements administratifs ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - L'arrêté du 31 mai 2011, qui fait l'objet d'une large concertation, a fixé les conditions de dérogation : l'existence d'un danger, l'impossibilité de le combattre par voie terrestre. Cette dérogation peut être ponctuelle ou annuelle. Dans ce dernier cas, la dérogation fait l'objet d'un arrêté préfectoral concernant certains couples cultures/nuisibles (vigne, maïs, banane...). Cet arrêté répondra aux attentes des viticulteurs bourguignons !
M. Alain Houpert. - La vigne a besoin d'amour et d'eau fraîche pour vivre... mais aussi d'intrants, en l'occurrence, des produits phytosanitaires. Le viticulteur qui élève sa vigne la soigne pour pouvoir offrir un vin de qualité. En Côte-d'Or, en raison des caractéristiques géographiques, un épandage aérien s'impose.
La séance est suspendue à midi cinq.
*
* *
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 14 h 30.