Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle la réponse du Gouvernement à dix-huit questions orales.
Défense des sylviculteurs
M. Philippe Madrelle. - Deux tempêtes successives en dix ans ont mis bas la forêt en Gironde. Alors que le traumatisme causé par la tempête de 1999 n'était pas effacé, la forêt a été frappée une seconde fois par la tempête Klaus. Comme le note le président démissionnaire du syndicat des sylviculteurs du sud-ouest, les forestiers, qui ont le sentiment de défendre un intérêt général dont l'État a la garde, sont frappés par une double peine : la récolte a été détruite et l'État n'a pas indemnisé.
C'est un nouvel exemple du décalage entre les déclarations politiques et les actes. Le plan Barnier est un échec : seuls 20 des 600 millions de prêts bonifiés prévus ont été décaissés ! Les sylviculteurs n'ont toujours pas été indemnisés ; on comprend leur sentiment d'injustice, de désespoir et d'abandon. La filière forestière regroupe de nombreuses entreprises Les sylviculteurs devront attendre trente cinq à quarante ans avant de dégager de nouveaux revenus.
L'article 16 bis de la loi de modernisation agricole a confirmé le désengagement de l'État. On est loin du compte épargne investissement attendu.
Plus de 60 grands spécialistes de la biodiversité ont lancé un cri d'alarme et dénoncé l'écart entre les menaces qui pèsent sur la planète et les réponses apportées. Les sylviculteurs n'en peuvent plus d'attendre. Le Gouvernement entend-il mener une véritable politique forestière ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. - La tempête Klaus a frappé durement la forêt du sud-ouest. Le soutien financier de l'État a été conséquent : 121 des 223 millions de subventions ont déjà été débloqués et 150 des 245 millions de prêts bonifiés prévus, dans le cadre du plan national de solidarité.
Des milliers de tonnes de chablis ont été extraites et stockées. La quasi-totalité des volumes le sera fin 2010.
Maintenant que les bois de tempête sont évacués, il s'agit d'aider les sylviculteurs à reboiser : une enveloppe de 415 millions d'aides directes est prévue sur huit ans ; 90 millions sont consacrés cette année au nettoyage et au reboisement. D'ici à la fin de l'été, 40 0000 hectares supplémentaires seront concernés.
Enfin, un dispositif assurantiel, assorti d'incitations fiscales, a été introduit dans le projet de loi de modernisation de l'agriculture. Le marché de l'assurance forêt ne représente aujourd'hui que 5 % des surfaces.
M. Philippe Madrelle. - Il ne faut pas se voiler la face. La filière compte 45 000 forestiers en Aquitaine et emploie 35 000 personnes, pour un chiffre d'affaires comparable à celui du vin, ce qui n'est pas peu dire en Gironde !
La tempête de 2009 n'a pas permis de mettre au point un système assurantiel satisfaisant. L'État a reconnu sa responsabilité dans les ravages causés par la tempête Xynthia ; il ne le fait pas pour notre forêt. Les sylviculteurs accomplissent pourtant une tâche d'intérêt général.
Crédits versés aux zones d'éducation prioritaire
Mme Marie-France Beaufils. - Une fois de plus, c'est Mme Penchard qui me répond sur une question qui ne relève pas de sa compétence. Je regrette l'absence du ministre de l'éducation nationale.
En novembre 2005, le président de l'UMP d'alors, Nicolas Sarkozy, proposait de déposer le bilan des ZEP, affirmant que cette politique avait échoué. L'objectif de ces zones, créées en 1982, est de donner plus à ceux qui ont moins ; le nombre a été drastiquement réduit au prétexte d'en finir avec le saupoudrage des crédits. Le responsable national de la FSU a dénoncé le manque de crédits et d'encadrement éducatif. Depuis 2003, 62 000 postes d'enseignants ont été supprimés. La part du coût de l'éducation dans le PIB diminue, passant de 7,6 % en 1995 à 6,6 % en 2008.
Dans un contexte de crise, l'inspecteur d'académie d'Indre-et-Loire a décidé de « faire une pause » dans le versement des aides.
J'ai vérifié : les motifs qu'in invoque ne sont pas fondés. Une fois de plus, cette politique se mène au détriment des plus défavorisés. Les crédits ZEP sont indispensables pour mener des projets pédagogiques en faveur des élèves.
La décision de l'inspecteur d'académie de mon département est dans la droite ligne des orientations nationales : augmentation du nombre d'élèves par classe, recours à des non-titulaires, suppression de postes de Rased. Allez-vous mettre fin au dispositif des ZEP et le remplacer par le projet Clair ? Que compte faire le Gouvernement pour ne pas aggraver la situation des élèves en difficulté en Indre-et-Loire ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. - Je vous prie d'excuser M. Chatel.
L'inspection académique d'Indre-et-Loire a procédé à des ajustements budgétaires mais l'éducation prioritaire n'a pas été abandonnée -organisation de stages de remise à niveau, accompagnement éducatif, formation des enseignants. Le département d'Indre-et-Loire n'est pas le plus mal doté.
Les projets d'école arrivent à échéance. Les nouveaux arriveront en octobre 2010. Il n'a jamais été question de faire une pause dans le soutien à l'éducation prioritaire, qui reste au coeur de la politique éducative menée par le Gouvernement. Chaque élève doit avoir toutes les chances de réussir.
Mme Marie-France Beaufils. - Les crédits de l'éducation prioritaire doivent apporter des moyens spécifiques aux ZEP ; la formation des enseignants n'a rien à voir !
La réponse de l'inspecteur d'académie n'est pas aussi précise que la vôtre en ce qui concerne les ZEP. Les crédits semblent moins ciblés que vous le dites. La Cour des comptes estime que l'on a perdu en efficacité, notamment pour les maternelles et le primaire alors que c'est dès le plus jeune âge qu'il convient d'agir contre les handicaps sociaux.
Subventions versées par les départements aux associations
M. Christian Cambon. - La réforme des collectivités locales est une étape importante de la modernisation du pays. L'enchevêtrement des compétences ne permet plus de s'y retrouver et l'abstention croissante aux élections locales témoigne de l'incompréhension de nos compatriotes.
La réforme suscite cependant des inquiétudes ; les associations culturelles et sportives craignent de perdre les subventions des conseils généraux et régionaux.
Le 31 mai 2000, le Conseil d'État a admis que les associations sportives pouvaient légitimement bénéficier du soutien des collectivités. Des comités olympiques régionaux et départementaux ont dit leur inquiétude, encore entretenue par de savantes campagnes de désinformation. Le ministre a démenti. La rédaction adoptée à l'Assemblée nationale pour l'article 35 du projet de loi est de nature à rassurer les acteurs sportifs et culturels de notre pays. Confirmez-vous la volonté du Gouvernement de ne pas remettre en cause la possibilité pour les conseils généraux et régionaux de financer les pratiques sportives et culturelles, qu'il s'agisse de l'investissement ou du fonctionnement des associations ? Une communication spécifique à l'attention des associations n'est-elle pas nécessaire ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. - Il est nécessaire d'encadrer davantage les financements des collectivités. Malheureusement, une véritable campagne de désinformation a inquiété les associations sportives et culturelles. La réalité est tout autre. Certes, les collectivités doivent assurer une partie minimale du financement de leurs projets, cet encadrement ne concernant pas les maîtrises d'ouvrages privées. Les associations peuvent continuer à bénéficier du financement de chacune des trois catégories de collectivité territoriale. Les compétences en matière de culture, de tourisme et de sport continuent à être partagées.
Quoi qu'on puisse entendre sur ce sujet, la spécificité des associations culturelles et sportives a été respectée. Elles peuvent être rassurées.
M. Christian Cambon. - Merci de ces précisions qui calmeront nombre d'inquiétudes. Dans le Val-de-Marne, le président du conseil général a décidé de supprimer des subventions en vertu d'une loi pas encore votée... La plus large communication permettrait de rassurer les maires et les associations et de mettre fin à une exploitation politicienne de cette affaire.
Pays « Pays basque »
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - L'article 23 du projet de loi de réforme des collectivités envisage de supprimer les pays. Or, le pays « Pays basque » est déjà ancien et fonctionne bien. En décembre 2000, la convention 2001-2006 prend en compte 70 opérations qui ont été mises en oeuvre à 88 %.
Un nouveau projet de territoire a été retenu en 2008 pour la période 2008-2013 : 77 opérations ont été définies pour un budget de 213 millions. Le Pays basque compte 158 communes et 290 000 habitants. Il serait regrettable d'y mettre fin aujourd'hui.
La création des pôles métropolitains pourrait permettre à certains pays de poursuivre le travail commencé ; mais les critères démographiques retenus excluent le pays « Pays basque ». En outre, les pôles excluent la participation des départements et des régions, alors que le pays « Pays basque » s'est développé grâce à leur concours.
M. Mercier a déclaré que les pays qui fonctionnent seront maintenus. Mais comment sera-ce possible si leur régime juridique spécifique est supprimé ? Comment pourront-ils contractualiser ? Comment les pays pourront-ils se transformer en pôles métropolitains sans déroger aux critères actuels ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. - L'article 25 du projet de réforme des collectivités n'implique pas la suppression systématique des pays.
Mme Nathalie Goulet. - Dommage ! (Sourires)
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. - Le pays « Pays basque » n'est pas remis en cause. Il continuera à mettre en oeuvre les projets prévus dans les conventions signées avec l'État et pourra envisager une évolution vers une structure plus adaptée. Rien ne s'oppose à ce qu'un syndicat mixte compte département et région parmi ses membres.
Il ne sera pas imposé au Pays basque de se transformer en pôle métropolitain, même si une dérogation est prévue pour les régions frontalières.
Sur le mode de gouvernance, rien n'interdit à celui actuellement en place de perdurer.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Le Gouvernement reconnaît l'utilité du pays « Pays basque », qui pourra choisir son mode de gouvernance au-delà de 2013. Mais vous vous contraignez à demander des dérogations, ce qui est dommage. La règle républicaine impose une égalité de traitement. Je transmettrai votre réponse aux élus et à la population concernée.
Organisation de la gendarmerie en milieu rural
M. Gérard Bailly. - Depuis plusieurs années, la gendarmerie est organisée en comités de brigades. Jusqu'à présent, la présence des gendarmes dans les zones rurales était assurée en permanence. Mais aujourd'hui, nos concitoyens trouvent souvent porte close.
Les contacts entre maires et gendarmes s'espacent de plus en plus. La région des lacs, dans le Jura, passe de 6 000 à 20 000 habitants au cours de l'été. Le ministre nous avait promis des renforts. Qu'en est-il ?
La gendarmerie est regroupée en plusieurs brigades appelées à intervenir sur de vastes territoires. Les élus locaux déplorent ce recul en zone rurale et s'estiment moins bien protégés qu'auparavant. Le débat sur la gendarmerie, du 19 mai, a souligné ces problèmes. Le rapport prévu pour 2011 semble bien tardif.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. - La lutte contre la délinquance doit permettre d'assurer la sécurité de tous nos concitoyens. La nouvelle organisation de la gendarmerie répond à cet objectif, des directives ayant été données aux brigades pour développer les contacts avec la population.
L'efficacité du dispositif territorial repose sur les comités de brigades : présence physique et moyens matériels sont au rendez-vous. Pour les zones touristiques, des renforts supplémentaires sont prévus. Dans le Jura, il y aura sept militaires en plus. L'adaptation au maillage territorial est réelle et permet de lutter contre la délinquance. D'ailleurs, les chiffres en témoignent, notamment dans votre département. La détermination du ministre de l'intérieur est totale.
M. Gérard Bailly. - Merci pour cette réponse, qui me laisse néanmoins perplexe. L'organisation en comités de brigades ne fonctionne pas de manière satisfaisante : il faut souvent attendre longtemps avant l'intervention des gendarmes parce qu'ils sont en intervention ailleurs. Ce qui peut se comprendre pour une perception ou une poste ne peut s'admettre pour une gendarmerie : quand on demande l'intervention des gendarmes, il y a souvent urgence !
Crédit impôt recherche
Mme Anne-Marie Escoffier. - Vous connaissez mon attachement au développement économique. Créé en 1983, pérennisé en 2004 et modifié en 2007, le crédit d'impôt recherche a pour but de diminuer le coût de recherche et développement pour les entreprises.
Seules les PME soumises au régime des BIC ou de l'impôt sur les sociétés « au réel » peuvent bénéficier du crédit impôt recherche ; les entreprises de taille intermédiaires et les SARL en sont exclues. Pour quelles raisons, monsieur le ministre ? Le champ de cette mesure ne pourrait-il pas être élargi ?
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. - Ce dispositif est important, qui soutient la croissance à long terme ; 13 000 entreprises en bénéficient pour un coût de 4 milliards. Il a été simplifié dans la loi de finances pour 2008 et porte désormais sur le montant des dépenses de recherche et développement et non pas sur l'augmentation de l'effort ; son plafond a été supprimé et un nouveau régime de remboursement anticipé mis en place.
Ce dispositif est large : les PME n'en sont pas exclues, qui représentaient en 2009 83 % des entreprises bénéficiaires. Le régime de remboursement immédiat a été pérennisé à leur intention.
En ce qui concerne l'assiette, seules les activités de recherche fondamentale et appliquée sont prises en compte, pas la simple innovation. Dans le contexte actuel des finances publiques, une extension de ce régime ne paraît pas souhaitable.
Mme Anne-Marie Escoffier. - Merci pour ces précisions. Tout le monde rend hommage au crédit impôt recherche. Quid cependant du régime juridique ? Je vous écrirai pour avoir des précisions complémentaires.
Avenir du pacte automobile
M. Martial Bourquin. - En mai, les deux constructeurs français ont annoncé qu'ils remboursaient les 6 milliards de prêts bonifiés accordés par l'État dans le cadre du pacte automobile. Bonne nouvelle ! Mais cette annonce soulève des interrogations. Où en est réellement le remboursement de ces prêts ? A quel taux a-t-il été accordé ? La filière automobile en a besoin, en particulier les PME concernées. Et ce n'est pas tous les jours que l'État reçoit 6 milliards...
Ce remboursement met de facto fin au pacte automobile. Qu'en est-il des engagements chiffrés des entreprises sur le maintien des sites de production, la préservation des emplois, les bonnes pratiques avec les équipementiers et les sous-traitants ?
Les faits parlent. On fait appel à un équipementier turc à défaut d'un français pour produire les sièges de la Zoé et Carlos Ghosn déclare que Renault n'est plus une entreprise française !
Mme Nathalie Goulet. - Très bien !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. - Depuis 2009, la situation de la filière automobile s'est grandement améliorée grâce à la prime à la casse, et le marché continue de bien se porter en 2010 -plus 5,4 % au premier semestre 2010 par rapport à la même période de 2009 ; sur les quatre premiers mois de 2010, la production a augmenté de 40 %.
Dans ce cadre, les deux constructeurs ont envisagé de rembourser par anticipation une partie des prêts accordés par l'État ; le Gouvernement en a accepté le principe. Mais il veillera à ce que les engagements pris par Renault et PSA ne soient pas remis en cause. En cas de difficultés, les entreprises pourront faire appel au médiateur de la sous-traitance.
La mobilisation du Gouvernement pour la filière automobile ne se démentira pas.
M. Martial Bourquin. - Si cet élan des ventes automobiles ne profite pas à nos territoires et aggrave le déficit du commerce extérieur, cela pose problème. La Poste, entreprise entièrement publique, vient d'acheter 3 000 scooters taïwanais alors qu'une entreprise française était sur les rangs.
Quand on achète une Clio, aujourd'hui, il y a de bonnes chances qu'elle soit fabriquée à l'étranger. Renault ne se conduit pas comme une entreprise nationale, et son président s'en vante ! Les répercussions de ces pratiques se font sentir dans nos territoires, avec la mise au chômage de milliers de personnes.
Entreprise Produits céramiques de Touraine
Mme Jacqueline Gourault. - Le Loir-et-Cher vient de subir la fermeture d'un site de l'entreprise Matra et d'une usine du Giat. L'entreprise Produits céramiques de Touraine (PCT), fondée en 1919, est longtemps restée une entreprise familiale. Rachetée en 2000 par le groupe finlandais Sanitec, elle est confrontée à une menace de délocalisation en Pologne et en Italie ; les salariés se voient proposer un reclassement dans ces pays pour des salaires dérisoires et reçoivent des documents internes rédigés uniquement en anglais.
Selon les représentants des salariés, le carnet de commandes est plein et les budgets équilibrés.
La mairie de Selles-sur-Cher soutient les 118 salariés encore sur le site. L'État ne peut certes pas tout faire mais il peut tout de même agir...
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. - Le Gouvernement agit quotidiennement pour répondre aux inquiétudes des salariés menacés de délocalisations. En Loir-et-Cher, le président du conseil général et le député de la circonscription sont mobilisés ; le cabinet de M. Estrosi a rencontré, le 3 juin, une délégation des salariés et le maire de Selles ; une nouvelle rencontre est prévue après le 13 juillet, date à laquelle sera connue la décision du tribunal sur la réalité du motif économique des licenciements.
En attendant, PCT est soumise à une obligation de revitalisation. Si la situation du bassin d'emploi le justifie, le Fonds national de revitalisation pourra être sollicité. La suppression de la taxe professionnelle a déjà profité à des entreprises de ce type. Le dispositif de soutien à la réindustrialisation est également disponible.
Oui, il faut lutter contre la délocalisation ; cela passe aussi par un refus des propositions de reclassements indécents. Une proposition de loi du groupe Nouveau Centre a été récemment adoptée, qui les interdit.
Ne doutez pas de la détermination du Gouvernement ; en tant que ministre particulièrement concerné par ce territoire, je veillerai à ce que la situation ne s'aggrave pas.
Mme Jacqueline Gourault. - La Touraine vous touche de près, je le sais ! Élus et salariés de cette entreprise sont très inquiets, d'autant que les fondateurs n'ont pas pris la précaution de lier l'appellation au territoire : on pourra faire en Pologne des céramiques de Selles !
Je vais saisir le comité sur la délocalisation. Quand M. Estrosi rencontrera-t-il les élus ?
Haut-Karabagh
Mme Nathalie Goulet. - Depuis 1991, l'Arménie, chère à votre coeur, monsieur le président, occupe le Haut-Karabagh, territoire azerbaïdjanais. Le Conseil de sécurité a dénoncé cette occupation et exigé le retrait complet et inconditionnel de toutes les forces arméniennes.
Or, le 23 mai, des parlementaires français, à l'invitation du Président de la République fantôme du Haut-Karabagh, se sont rendus dans cette république qui n'a aucune existence légale, mais dispose pourtant d'une « ambassade » en France. La France ne devrait parler que d'une seule voix !
Les Azerbaïdjanais ne sont pas des Turcs et n'ont rien à voir dans le génocide arménien. La France, qui co-préside le groupe de Minsk, devrait être exemplaire dans une région prompte à s'enflammer.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. - De fait, la visite des parlementaires français a soulevé l'émotion. Cette visite n'engage qu'eux-mêmes. La France n'entretient aucune relation officielle avec les autorités autoproclamées de l'entité de facto du Haut-Karabagh, qui ne disposent d'aucun représentant accrédité auprès du gouvernement français.
Mme Nathalie Goulet. - Votre réponse m'enchante, mais la diaspora arménienne est très puissante. Le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan n'a que trop duré ; il n'a rien à voir avec le génocide arménien. Les camps de réfugiés azéris n'ont rien à envier à ceux de Tulkarem et de Gaza.
Il faut comprendre le désarroi des Azerbaïdjanais qui n'ont pas une diaspora importante et active pour les défendre ni des chanteurs mondialement célèbres pour les soutenir.
Production de pommes
M. Bernard Cazeau. - Des pommes achetées 80 centimes sont vendues le même jour 2,72 euros quelques kilomètres plus loin. Une marge de plus de 350 % est inacceptable !
Quand le prix payé au producteur ne couvre pas son prix de revient, cela ne peut durer longtemps !
Allez-vous effectivement agir contre les marges démesurées ? Allez-vous faire en sorte que les agriculteurs puissent vivre de leur travail ? Allez-vous mettre la filière sur les rails de la croissance ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. - La campagne 2009-2010 a commencé par 70 jours de crise conjoncturelle. Des solutions concrètes et immédiates ont été prises : assurance crédit à l'export, renforcement de la promotion de la pomme dans les points de vente. L'Association nationale pomme-poire a élaboré un plan d'action.
Ainsi conjuguées, ces actions ont contribué à un redressement sensible dès décembre 2010. En outre, il a été décidé d'alléger les charges sur les ouvriers agricoles temporaires et les distributeurs se sont engagés à limiter leurs marges en cas de crise.
M. Bernard Cazeau. - Tout cela, nous le connaissions. Le problème, c'est de modérer les marges et d'assurer aux producteurs un revenu décent : le producteur ne peut vendre longtemps moins cher que ce qu'il produit.
Nous restons sceptiques sur la réunion organisée par le Président de la République : il faut une volonté politique.
Trajet des avions vers Orly
Mme Claire-Lise Campion. - Il convient de réduire les nuisances sonores que subissent les populations à proximité des couloirs aériens. Hélas, la DGAC traîne les pieds. Malgré mes efforts, le comité départemental de l'Essonne n'a pas été entendu. Une réunion avec la DGAC doit avoir lieu ces jours-ci. Encore ne doit-elle pas se réduire à un monologue des ingénieurs de la DGAC.
Quel est le sentiment du Gouvernement en la matière ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. - Dans le cadre du Grenelle, il est envisagé de relever l'altitude d'arrivée des avions à Orly pour diminuer l'impact du trafic aérien sur la population. Le relèvement de l'altitude d'arrivée des avions suppose un changement de trajectoire.
Une concertation est en cours sous l'égide du préfet de l'Ile-de-France et se poursuivra jusqu'à l'automne ; la décision ministérielle devrait intervenir en fin d'année.
Je transmettrai à M. Bussereau votre demande d'approfondir la concertation.
Mme Claire-Lise Campion. - Hélas, les décisions prises seront contraires au Grenelle : on fera subir de nouvelles nuisances à d'autres populations, pour diminuer celles qui sont subies actuellement. Le changement de trajectoire prévu accroîtra la quantité de kérosène consommé et de gaz carbonique produit.
Les propositions très pertinentes qui ont été faites devraient enfin être entendues. Une véritable concertation est indispensable; le CCE d'Orly doit avoir à sa disposition tous les éléments nécessaires à sa décision.
Ligne grande vitesse vers la Normandie
M. Hervé Maurey. - Le Président de la République a annoncé la création d'une ligne à grande vitesse vers la Basse-Normandie à partir du Val-de-Reuil. Il est nécessaire qu'Évreux et Bernay soient intégrées à ce tracé : l'Eure va supporter les nuisances de la LGV, elle doit bénéficier de ses retombées ! Pouvez-vous nous rassurer ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. - L'amélioration des temps de parcours vers la Normandie est nécessaire mais un projet de LGV doit prendre en compte l'ensemble de l'aménagement du territoire concerné. M. Bussereau a donc appelé à ce que le débat public aborde tous ces points. Aucune option n'a encore été retenue ; différents scenarios seront élaborés pour tenir compte de tous les éléments en jeu.
M. Hervé Maurey. - Je tenais à sensibiliser le Gouvernement à l'importance de la question. Il est bon que les collectivités locales soient consultées. Si demain, Évreux et Bernay ne sont plus desservies par la ligne Paris-Caen, c'est tout l'ouest de l'Eure qui en pâtira.
PLU et agriculture
M. Yannick Botrel. - Les communes rurales dotées d'un PLU ont déterminé les zonages consacrés aux activités agricoles, dans lesquels les habitations des agriculteurs sont considérées comme des logements de fonction.
Lorsqu'ils partent en retraite, les agriculteurs concernés ne peuvent effectuer de travaux dans leur logement situé en zone A ! C'est injuste et absurde, tant pour les agriculteurs en cause que pour les maires, qui ont fait l'effort de se doter d'un PLU ! Comment mettre fin à cette situation ubuesque ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. - Effectivement, les PLU sont très restrictifs pour la construction en zone A afin de lutter contre les mitages des terres agricoles.
Une solution serait de créer de petites zones spécifiques mais ce micro-zonage a été refusé par le Conseil d'État au motif qu'il n'est prévu par aucun texte. Un amendement au Grenelle II y a pourvu et ce projet de loi a été définitivement adopté le 29 juin. Ces micro-zonages sont donc maintenant possibles, tout en étant strictement encadrés.
M. Yannick Botrel. - Merci pour cette excellence réponse.
Crue centennale à Paris
M. Yves Pozzo di Borgo. - Le risque d'une crue comparable à celle de 1910 est très réel. Les conséquences en seraient dramatiques et ruineuses : 500 000 Parisiens seraient touchés et le coût des dégâts est estimé à 12 milliards.
Le seul moyen efficace serait de construire le barrage de la Bassée, dont le coût serait de 500 millions, à charge pour 20 % aux Grands Lacs de Seine et cofinancé pour les 80 % restants. Le problème du financement n'est toujours pas résolu, le maire de Paris préférant aménager plutôt que protéger. Le barrage de La Bassée est-il une priorité de l'État ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. - Le Gouvernement est conscient qu'une crue analogue à celle de 1910 est possible à Paris. Elle toucherait 850 000 personnes et causerait 17 milliards de dégâts.
L'État et les collectivités territoriales ont engagé des travaux de protection après les crues de 1910 et de 1924. Cela ne suffit toutefois pas à assurer une protection totale. Quatre réservoirs ont été mis en service dans les dernières décennies du XXe siècle pour diminuer de 70 centimètres la hauteur d'eau à Paris en cas de crue centennale.
Le barrage de la Bassée est une des principales actions du contrat interrégional 2007-2013, avec 24 millions sur 33 à la charge de l'État.
L'application des plans de prévention des risques d'inondation permet de limiter strictement les constructions en zones inondables.
Le préfet de police de Paris assure la coordination des recours en cas de crise touchant plusieurs départements ; le maire s'occupe du dispositif municipal de crise.
M. Yves Pozzo di Borgo. - Depuis dix ans, j'ai toujours la même réponse ! Dans cette affaire là, il faut une volonté politique qui n'existe pas au Gouvernement. Nous devons aller vite, mais l'impulsion fait défaut : le financement traîne depuis des années...
Scolarisation des enfants handicapés
M. Jean-Paul Amoudry. - Les familles de Haute-Savoie ont du mal à scolariser leurs enfants handicapés faute d'auxiliaires de vie ou d'emplois de vie scolaire. La Maison départementale des personnes handicapées de Haute-Savoie estime que 50 enfants sont en attente de place.
Plus de cinq ans après l'entrée en vigueur de la loi du 11 février 2005, cette situation n'est pas acceptable. Il convient de professionnaliser les auxiliaires de vie scolaire. Un groupe de travail sur cette question a été mis en place en septembre. Les conclusions sont-elles déjà connues ?
Le Gouvernement entend-il professionnaliser les auxiliaires de vie scolaire et les postes nécessaires seront-ils pourvus en septembre en Haute-Savoie ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. - Les efforts portent leurs fruits : 185 000 enfants ont été scolarisés en milieu scolaire ordinaire.
Dans le cas de votre département, la commission se réunit deux fois par mois. L'effort est important : 22 000 ETP interviennent, 591 élèves sont pris en charge dans le primaire.
Aujourd'hui, près de 400 emplois d'emplois de vie scolaire et d'auxiliaires de vie scolaire sont employés. Enfin, 2 000 enfants handicapés sont scolarisés dans votre département.
Nous avons été confrontés à la rupture de contrats d'auxiliaires de vie scolaire mais le Gouvernement a signé une convention pour éviter ce problème. Le recrutement d'auxiliaires de vie scolaire est prévu. Vous voyez, tout est prévu pour la scolarisation de ces enfants.
M. Jean-Paul Amoudry. - Merci pour cette réponse précise que je transmettrai. Malgré tous ces chiffres, j'ignore encore les intentions gouvernementales sur la professionnalisation des auxiliaires de vie scolaire et des emplois de vie scolaire.
Malades psychiatriques dangereux
M. Claude Domeizel. - Le 12 novembre 2008, un étudiant de 26 ans a été mortellement agressé à Grenoble par un déséquilibré mental qui s'était soustrait à la surveillance d'un hôpital psychiatrique. Une enquête a été confiée à l'inspection générale des affaires sociales et sanitaires. Le rapport rendu est-il public ?
Le suivi des personnes déséquilibrées semble pâtir de graves lacunes, notamment un déficit de dialogue entre les autorités judiciaires, administratives et médicales.
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. - Le rapport a été remis à la ministre de la santé et il n'est pas communicable du fait de son caractère personnalisé. Le Gouvernement a pris diverses mesures pour améliorer le suivi des patients atteints de troubles psychiatriques dangereux. Le 5 mai, un projet de loi a été présenté en Conseil des ministres : les patients en soins sans consentement font l'objet d'un traitement particulier. Un collège de soignants est prévu pour les malades les plus difficiles.
Le plan de sécurité des établissements de santé est mis en oeuvre : 70 millions sont prévus. Plus de 300 établissements ont pu créer des unités fermées. L'établissement de Saint-Égrève a bénéficié de ce plan.
M. Claude Domeizel. - Merci pour cette réponse que je transmettrai aux proches de l'étudiant qui a été mortellement agressé.
Sécurité sociale minière
M. Jean-Claude Danglot. - La gratuité des soins accordés aux anciens mineurs est remise en cause par la modification, en 2009, du décret du 24 décembre 1992. Des parlementaires ont interpellé le Gouvernement, en vain ; des manifestations ont eu lieu devant le ministère, mais les délégués des mineurs n'ont été reçus que par un conseiller du ministre.
Des centaines de milliers personnes sont concernées, mais aucune information n'a été transmise aux parlementaires et aux syndicats.
Mme Bachelot a chargé M. Yves Bur, député du Bas-Rhin, de rédiger un rapport. Ce parlementaire a sans doute de grandes qualités mais l'Alsace connaît mal les problèmes des mineurs...
Vous détricotez les droits sociaux en vigueur depuis 1947 : il faut revenir sur cette mesure injuste.
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. - Le décret du 31 décembre 2009 ne remet pas en cause le principe de gratuité en vigueur pour le régime minier ; il se borne à aligner le régime des mineurs sur le régime général pour le transport en ambulance, les cures thermales et certaines dépenses pharmaceutiques. Pour garantir que la gratuité des soins sera préservée, Mme Bachelot a chargé M. Bur d'un rapport. En Alsace, il y a des mines de potasse et le nombre de retraités y est important. La sensibilité minière existe dont bien dans cette région aussi, monsieur Danglot.
Ce rapport sera remis à Mme la ministre dans les semaines qui viennent.
M. Jean-Claude Danglot. - Les explications ne sont pas satisfaisantes et ne rendent pas compte de la réalité : la gratuité des transports par ambulance est remise en cause et les anciens mineurs doivent mettre la main à la poche alors qu'ils souffrent souvent de poly-handicaps.
Cela fait trois semaines que les parlementaires du Nord-Pas-de-Calais demandent en vain à M. Bur de les recevoir. Il y a un problème ! Mme Bachelot avait promis des mesures transitoires : cet engagement n'est pas tenu.
Tribunal de commerce de Quimper
Mme Maryvonne Blondin. - En novembre 2009, j'ai interrogé Mme Alliot-Marie sur le coût de la réforme des tribunaux pour la seule région Bretagne. Le 7 janvier 2010, Mme la ministre m'avait répondu que les tribunaux regroupés bénéficient déjà de mesures immobilières adéquates.
Hélas, il n'en est rien. Le greffe du tribunal de commerce est logé depuis 1987 dans une cave insalubre. Certains personnels travaillent toute la journée dans des couloirs éclairés à la lumière artificielle. Les photocopieurs sont préservés de la pluie par des bassines et les archives sont exposées aux fientes des oiseaux. De coûteuses études de relogement ont été menées, sans résultat.
Le principe d'un regroupement de tribunaux d'instance, de grande instance et de commerce a été retenu. Le statut des tribunaux de commerce est hybride. Le loyer des locaux est actuellement payé par votre ministère, mais n'allez-vous pas y mettre un terme ? Faut-il craindre la suppression du tribunal de commerce, comme à Morlaix ?
Le greffe s'est récemment vu refuser un relogement, alors que la « situation provisoire » dure depuis vingt trois ans ! Ne serait-il pas temps d'agir ? Un regroupement est-il envisagé à Quimper ? Avec quels moyens et quel calendrier ?
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. - La Chancellerie est bien consciente du manque de fonctionnalité des locaux du tribunal de commerce de Quimper. Elle a décidé d'inclure cette juridiction dans le palais de justice de Quimper.
Dans l'attente de la mise en oeuvre de ce projet immobilier, nous envisageons le relogement provisoire dans des locaux plus adaptés, mais nous avons des divergences avec le président du tribunal sur le montant du loyer à prendre en compte. Les sommes en jeu sont importantes : la participation au loyer est aussi une question de principe.
Une de mes missions est de sillonner chaque semaine le territoire national pour faire le point sur la mise en place de la nouvelle carte judiciaire. Je porte une attention particulière à Quimper, madame la sénatrice : mais la situation actuelle -qui est inacceptable- va durer un certain temps...
Mme Maryvonne Blondin. - Merci pour votre franchise, monsieur le ministre. Je vous invite à venir visiter les archives : vous aurez le plaisir de voir les pigeons, les conditions de travail au sous-sol et l'eau gouttant sur les photocopieuses...