Disponible au format PDF Acrobat


Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Nomination du président du CNRS

Dépôt de rapports

Délégation aux droits des femmes (Démission et candidature)

CMP (Détecteurs de fumée)

Transmission d'une proposition de résolution européenne

Accompagnement d'une personne en fin de vie

Discussion générale

Discussion des articles

Article premier

Délégation aux droits des femmes (Nomination)

Conférence des Présidents

Débat sur le service minimum dans les transports




SÉANCE

du mercredi 13 janvier 2010

57e séance de la session ordinaire 2009-2010

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

Secrétaires : MM. François Fortassin et Marc Massion.

La séance est ouverte à 14 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Nomination du président du CNRS

Mme la présidente.  - J'informe le Sénat que M. le Premier ministre, par lettre en date du 12 janvier 2010, a estimé souhaitable, sans attendre l'adoption des règles organiques qui permettront la mise en oeuvre de l'article 13 de la Constitution, de permettre à la commission intéressée d'auditionner M. Alain Fuchs, qui pourrait être prochainement nommé président du Centre national de la recherche scientifique, en remplacement de Mme Catherine Bréchignac, dont le mandat est arrivé à échéance.

Ce courrier est transmis à la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.

Acte est donné de cette communication.

Dépôt de rapports

Mme la présidente.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur l'état des lieux de l'évolution du dialogue social dans les transports publics de voyageurs autres que les transports terrestres réguliers et de l'impact de celle-ci sur l'amélioration de la continuité du service public, prévu par l'article 13 de la loi du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.

Il a également reçu de M. François Bourguignon, président du comité d'évaluation du revenu de solidarité active, le rapport d'évaluation intermédiaire pour l'année 2009, établi en application de l'article 32 de la loi du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

Le premier a été transmis à la commission des affaires sociales et à la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, le second à la commission des affaires sociales et à la commission des finances. Ils seront disponibles au bureau de la distribution.

Acte est donné du dépôt de ces rapports.

Délégation aux droits des femmes (Démission et candidature)

Mme la présidente.  - Je vous informe que Mme Esther Sittler a démissionné de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Le groupe Union pour un mouvement populaire a présenté la candidature de Mme Sylvie Goy-Chavent pour la remplacer. Cette candidature a été affichée. Elle sera ratifiée si la Présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure.

CMP (Détecteurs de fumée)

Mme la présidente.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Transmission d'une proposition de résolution européenne

Mme la présidente.  - En application de l'article 73 quinquies, alinéa 3, du Règlement, a été transmise le 12 janvier 2010 à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, la proposition de résolution européenne examinée par la commission des affaires européennes, contenue dans le rapport (n°197, 2009-2010) de M. Hubert Haenel sur la proposition de résolution européenne présentée par MM. Louis Mermaz, Richard Yung, Mme Bariza Khiari, M. Simon Sutour, Mme Catherine Tasca, MM. Robert Badinter, Michel Boutant, Mmes Alima Boumediene-Thiery, Monique Cerisier-ben Guiga, Christiane Demontès, Virginie Klès, Claudine Lepage, MM. Jean-Noël Guérini, Bernard Piras, Marcel Rainaud, Jean-Pierre Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, portant sur la protection temporaire (n°159, 2009-2010).

Accompagnement d'une personne en fin de vie

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à créer une allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie. Je vous rappelle que M. le Président de la République présentera ses voeux aux membres du Parlement cet après-midi à 17 h 30. Si la discussion de cette proposition de loi ne pouvait être achevée avant la cérémonie, nous la reprendrions demain soir.

Discussion générale

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - Permettez-moi de vous présenter tous mes voeux pour une fructueuse année de travail parlementaire.

M. François Autain.  - Merci, madame la ministre !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Ce n'est pas sans émotion que je m'adresse à vous pour évoquer à nouveau la question de la fin de vie. Il s'agit cette fois de la situation des accompagnants. Issue des travaux conduits par le député Jean Leonetti au titre de l'évaluation de la loi du 22 avril 2005, la proposition de créer une allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie est en parfaite adéquation avec mes propres objectifs et ceux du Gouvernement. Comme je l'ai dit à l'Assemblée nationale en février dernier, je veux que les personnes qui accompagnent les mourants puissent mieux vivre ce moment si singulier. Quoi de plus naturel, de plus compréhensible ou de plus légitime que de vouloir se tenir aux côtés d'un être aimé jusqu'au terme de sa vie ?

Or ces personnes, déjà bouleversées par l'approche d'une disparition, sont aujourd'hui soumises à toutes sortes de contraintes pratiques ; elles doivent en particulier assumer les conséquences financières d'un arrêt de travail. Pour rester fidèle aux valeurs humanistes qui fondent notre pacte républicain, notre société doit évoluer. Pourquoi ajouter au chagrin l'inquiétude liée à la situation matérielle ? Pourquoi entraver le cheminement vers l'acceptation de la perte en y mêlant des considérations d'un autre ordre ? Pourquoi ne pas permettre aux proches d'être plus disponibles au moment où ils aspirent à se recentrer sur l'essentiel ?

A ces questions, nous devons apporter des réponses précises et adaptées. Cette proposition de loi y contribue. Elle répond au souhait de la majorité des Français qui préféreraient mourir chez eux plutôt qu'à l'hôpital. Une interruption d'activité est déjà possible grâce au congé de solidarité familiale ; cette allocation permettra d'y recourir plus facilement. Ce sera également une façon de reconnaître l'importance de l'accompagnement des personnes en fin de vie et de contribuer au développement de la culture des soins palliatifs dans notre pays. Il s'agit enfin de construire un avenir où la mort ne soit plus occultée.

Loin des traditionnels clivages politiques, nous nous sommes accordés sur la nécessité de faire évoluer la législation. Je salue la qualité des travaux menés par M. Barbier et la commission, dans un esprit de consensus qui avait déjà inspiré les travaux de l'Assemblée nationale. Au-delà des améliorations rédactionnelles, le texte que vous avez élaboré me semble à la fois plus cohérent et plus ouvert. Vous avez rapproché les régimes applicables aux salariés de droit privé et aux fonctionnaires, précisé la situation des bénéficiaires du congé de solidarité familiale et sécurisé leur couverture sociale, étendu le bénéfice de l'allocation aux personnes de confiance -car il ne faut laisser personne seul, surtout pas les malades sans famille- et permis qu'elle soit versée à plusieurs accompagnants, tout en précisant que cela ne devra pas alourdir excessivement la gestion des caisses. Vos propositions sont conformes aux objectifs du Gouvernement et je m'en réjouis.

Pour autant, vous avez appelé de vos voeux plusieurs clarifications de la part du Gouvernement.

C'est pourquoi j'ai proposé des amendements permettant de préciser la durée de versement de l'allocation, les règles applicables en matière de cumul avec d'autres revenus ou prestations, les modalités de gestion de la prestation par la caisse de l'accompagnant. Autant d'avancées qui ont permis d'aboutir à un texte tout à fait satisfaisant.

L'adoption de cette allocation sera une avancée, pour les malades, bien sûr : rassurés et chez eux, ils pourront partir plus sereinement. Avancée également pour l'entourage : plus disponible et partiellement libéré des contingences matérielles, il pourra accompagner un proche dans de meilleures conditions, et engager un travail de deuil plus apaisé. Avancée, enfin, pour une société qui, en accompagnant mieux la fin de vie, sera plus harmonieuse, plus ouverte et plus attentive aux autres. Une société qui, peut-être, apprendra à envisager différemment le deuil et l'absence. Une société qui saura donner à ces étapes de la vie et de la condition humaine toute la place qui doit leur revenir. (Applaudissements sur tous les bancs).

M. Gilbert Barbier, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Dans nos sociétés occidentales, le moment de la mort est trop souvent un moment de solitude. Or, l'accompagnement d'un proche en fin de vie est l'ultime moyen de lui manifester ce supplément d'humanité qui lui permettra d'affronter ses derniers instants et parfois ses souffrances ; c'est aussi souvent la moins mauvaise manière de se préparer au deuil. Pour la société, l'organisation convenable de l'accompagnement des mourants est une exigence éthique ; elle permet également d'éviter des hospitalisations et diminue le nombre des arrêts maladie auxquels ont recours les accompagnants pour se rendre disponibles.

Cette proposition de loi crée une allocation journalière pour les personnes qui s'arrêtent temporairement de travailler pour accompagner un proche en fin de vie. Déposée par quatre députés issus de tous les groupes politiques, elle a été votée à l'unanimité par l'Assemblée nationale le 17 février dernier. Elle se propose de compléter un dispositif déjà ancien. Depuis 1999, les salariés et les fonctionnaires ont le droit de prendre un congé pour accompagner un proche en fin de vie, mais ce droit est très peu exercé, ce congé étant non rémunéré.

Notre commission a tout d'abord gommé les différences entre secteurs privé et public. La définition de l'état de santé de la personne accompagnée sera dorénavant homogène entre les différents textes législatifs. De même, nous avons étendu aux fonctionnaires la faculté de renouveler le congé de solidarité jusqu'à six mois et de le fractionner.

Notre second objectif a été de sécuriser la couverture sociale des accompagnants, notamment au moment de leur retour dans l'emploi. Notre formulation est sans doute perfectible, mais évite de fragiliser encore la situation des accompagnants. Je me félicite de l'amendement du Gouvernement qui conforte notre dispositif.

Notre commission se félicite que le Gouvernement ait accepté le principe d'une allocation apportant un revenu de substitution aux accompagnants : en 1999, le Gouvernement d'alors avait opposé l'article 40 à une proposition similaire, qui émanait du Sénat.

En l'état, cette allocation n'est qu'un premier pas : sa durée est limitée à trois semaines, contre trois mois, renouvelable une fois, pour le congé de solidarité familiale ; la date de fin du versement est fixée, brutalement, au jour suivant le décès ; surtout, elle ne concerne que l'accompagnement à domicile. Or environ 75 % des malades en phase avancée ou terminale sont hospitalisés. Même si nous souhaitons favoriser le maintien à domicile, cette allocation ne bénéficiera qu'à un nombre restreint de personnes.

Certaines dispositions demeurent floues : possibilité de cumul avec d'autres ressources, nombre d'allocations pouvant être versées pendant les trois semaines, caractère imposable ou non de cette nouvelle allocation. Les deux premiers points font l'objet d'amendements. Pour le dernier, quelles sont les intentions du Gouvernement ?

Notre commission, qui s'est heurtée aux règles de recevabilité financière des amendements, a néanmoins clarifié la rédaction et facilité l'attribution de l'allocation. A l'initiative du groupe socialiste, elle a par exemple permis qu'une personne de confiance bénéficie de l'allocation et que celle-ci soit attribuée à plusieurs bénéficiaires, dans la limite des trois semaines.

Nous pourrons faire mieux encore, notamment en confirmant que les demandeurs d'emploi seront éligibles à l'allocation ou en élargissant le bénéfice du congé aux personnes de confiance éventuellement désignées par le patient.

Enfin, je m'interroge sur le financement par le régime d'assurance maladie de l'accompagnant. A l'Assemblée nationale, Mme la ministre a estimé que cette allocation diminuerait le recours aux arrêts maladie et ne serait donc qu'un redéploiement de dépenses. Mais si les accompagnants utilisent les arrêts maladie, c'est parce que le congé n'est pas rémunéré ! Ne serait-il pas plus pertinent que l'État prenne à sa charge cette dépense de solidarité nationale, comme pour la plupart des autres allocations analogues ?

Ce risque relève-t-il de la branche maladie ou de la branche famille ? L'allocation doit-elle être à la charge du régime de l'accompagnant ou de celui du patient en fin de vie ? Ces questions devront être davantage approfondies.

L'aménagement du congé de solidarité familiale et la création d'une allocation sont des avancées importantes. Seul le Gouvernement peut les perfectionner. Plus largement, l'examen de la proposition de loi fait apparaître la grande diversité des dispositifs existants. Il serait utile d'appréhender la question de manière globale. Sous ces réserves, notre commission a adopté le texte. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. François Autain.  - Cette proposition de loi est la traduction d'une recommandation du groupe de travail présidé par M. Leonetti, suite à l'affaire Chantal Sébire, cette femme atteinte d'une tumeur qui réclamait avec insistance une aide active à mourir. Ce texte ne règle pas ce genre de cas. Mais c'est un autre débat sur lequel nous reviendrons bientôt, je l'espère, car la prise en charge de la fin de vie ne se résume pas à l'accompagnement par les proches.

A nous de poursuivre la réflexion entamée au sein de la commission des affaires sociales. Je profite de cette occasion pour demander à la présidente Dini de réactiver le groupe de travail qui avait été constitué sur ce sujet, et qui ne s'est pas réuni depuis le 31 mars 2009...

Cette proposition de loi, cosignée par des députés des quatre groupes, est malheureusement insuffisante. L'allocation journalière d'accompagnement ne concerne que les personnes décédant à leur domicile, alors que 75 % décèdent à l'hôpital. Selon M. Leonetti, cette nouvelle allocation ne concernerait au mieux que 20 000 décès par an, soit 4 %.

Accueillir à domicile les personnes en fin de vie suppose de disposer de ressources financières et matérielles suffisantes, ce qui exclura de fait les familles les plus démunies, mal logées ou ne disposant pas d'une pièce supplémentaire.

Nous redoutons que ce dispositif ne renforce l'écart entre ceux qui ont les moyens financiers d'une fin de vie matériellement confortable, et ceux qui ne les auront pas.

Comment bien informer les bénéficiaires, dès lors que la loi en restreint le champ à ceux qui meurent à domicile ? Il faut préciser les conditions de publicité de cette nouvelle allocation, j'espère que ce sera fait dans la navette parlementaire.

Enfin, le délai de trois semaines a été dicté par des raisons comptables, plutôt que par le souci de répondre aux besoins des familles.

Ce texte est insuffisant, surtout quand on le rapporte aux lacunes dans l'accès aux soins palliatifs dans notre pays. La Cour des comptes estime que deux demandes d'accès sur trois sont écartées, alors que les Français sont désormais neuf sur dix à se déclarer favorables aux soins palliatifs, qu'ils associent à l'atténuation de la souffrance plutôt qu'au refus de la mort.

Il faut donc multiplier les unités de soins palliatifs, nous savons que le Gouvernement en a fait une priorité et que toutes les régions en sont dotées, même si ces services ne sont pas encore tous ouverts. Les agences régionales de l'hospitalisation demandent que chaque département accueille au moins une unité de soins palliatifs, il faudrait même aller jusqu'à une unité de soins palliatifs par hôpital de 400 lits, comme le suggère Marie de Hennezel dans son rapport au Premier ministre paru en 2005, La France palliative.

Pour finir, nous félicitons la commission pour les améliorations qu'elle a apportées à ce texte. Aussi, malgré nos réserves sur la portée de cette loi, nous la voterons ! (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Nicolas About.  - La manière dont une société organise l'accompagnement de la fin de vie de ses membres en dit long sur la nature de son lien social et sur son rapport à la mort : voilà quels sont les considérants philosophiques à ce texte consensuel, qui ne représente qu'un premier pas vers la mise en place d'un droit global de l'accompagnement de fin de vie. Nous devons poursuivre ce travail et chacun peut faire confiance à Mme la présidente de la commission pour veiller à ce que le groupe de travail dont j'ai la charge fasse son boulot ! (Sourires)

Nous ne saurions rompre l'oecuménisme parlementaire rare qui entoure ce texte, et qui est parfaitement justifié.

Contrairement à ce que son intitulé peut laisser croire, il vise non seulement à créer une allocation journalière d'accompagnement, mais également à améliorer le cadre juridique du « congé d'accompagnement » qui lui préexistait. Créé par la loi du 9 juin 1999, ce congé devait constituer un progrès vers un droit de l'accompagnement digne de ce nom, mais il n'a guère été utilisé, parce que son régime juridique était flou et parce qu'il n'était pas rémunéré. Cette proposition de loi améliore les choses en sécurisant le régime juridique, mais pour ne prévoir qu'une allocation a minima.

Ce texte apporte des améliorations notables au congé d'accompagnement en élargissant son bénéfice aux frères et soeurs, en unifiant sa dénomination et en permettant son fractionnement. Notre commission est allée plus loin encore, en étendant aux fonctionnaires le bénéfice du régime plus protecteur des salariés : l'état de santé du proche à accompagner est inclus dans le fait générateur du congé, et les fonctionnaires obtiennent le droit de renouveler une fois ce congé, tout comme de le fractionner. Notre commission a également sécurisé la couverture sociale des bénéficiaires du congé, c'est un progrès.

Ce texte, ensuite, créé une allocation journalière, répondant à la principale critique envers le dispositif actuel : l'absence de toute rémunération pousse, chacun le sait, à divers contournements, en particulier le recours à des arrêts maladie par les accompagnants.

Cependant, le champ des bénéficiaires en est borné très strictement, pour des raisons strictement comptables. Cette allocation, d'abord, sera accordée seulement pour des accompagnements à domicile. Heureusement, cette restriction majeure a été atténuée par l'Assemblée nationale, qui a permis le maintien du versement de l'allocation durant les jours éventuels d'hospitalisation d'une personne accompagnée à domicile.

En quoi les personnes hospitalisées auraient-elles moins besoin d'un accompagnement que les autres ? La seule raison, c'est celle du coût !

Autre limitation de taille, le versement de l'allocation ne pourra pas dépasser trois semaines. Or, quiconque a été confronté à ces situations sait que le temps d'accompagnement peut être largement supérieur.

Si donc le coût de la mesure est raisonnable, c'est pour ces restrictions comptables : la réforme est bonne, mais a minima, nous la soutenons comme un jalon.

Disposez-vous, madame la ministre, d'une simulation du coût d'une allocation universelle d'accompagnement ? Cette information est très importante pour achever le travail amorcé.

Il ne me reste plus qu'à féliciter notre commission pour l'excellence de son travail ! (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Cette proposition de loi a été cosignée par les quatre groupes politiques représentés à l'Assemblée nationale et votée à l'unanimité le 17 février dernier. Le sujet est-il pour autant consensuel ? Pas tout à fait.

Le droit à congé est peu utilisé, car il n'est pas rémunéré et les personnes confrontées à la maladie d'un être proche se retrouvent contraintes de prendre une partie de leurs congés payés ou de demander un arrêt maladie à leur médecin.

La nouvelle allocation est donc bienvenue. Pour autant, ce texte laisse un goût d'inachevé.

Premièrement, il ne règle pas, en soi, le problème de la fin de vie et ne solde pas non plus le débat sur l'aide active à mourir.

Dans son livre de 2004 Je ne suis pas un assassin, le docteur Chaussoy écrit : « Il faut une sage-femme pour mettre l'homme au monde, il faut aussi des passeurs, des hommes et des femmes sages, pour l'accompagner dans ce monde et l'aider à bien le quitter ». La question du passage est essentielle : certains meurent « paisiblement », dans leur lit, d'autres sont surpris en pleine activité, d'autres encore doivent affronter de grandes souffrances parfois pendant très longtemps, certains meurent à l'hôpital, d'autres à domicile, certains meurent seuls, d'autres entourés de leurs proches. Et finalement peu meurent comme ils auraient pu se l'imaginer.

Je suis intimement convaincu qu'au lieu de se demander ce qui est permis ou défendu aux tierces personnes -médecins, soignants, famille, proches, notamment- en matière de lutte contre la douleur, d'acceptation ou de refus de traitement, voire d'euthanasie, il faut se demander quels sont les droits des êtres humains sur la fin de leur vie. Ces droits devraient être absolus, parce que la vie n'appartient ni aux médecins, ni aux philosophes, ni aux procureurs, ni aux juges, ni aux hommes de religion, ni aux techniciens chargés des machines destinées à maintenir artificiellement en vie des hommes et de femmes : c'est de la volonté du patient et de lui seul qu'il faut tenir compte.

Si l'on peut se féliciter de la création d'une allocation d'accompagnement, elle ne constitue pas l'aboutissement de notre dispositif législatif. Elle ne règle pas la question des soins palliatifs, auxquels trop peu ont accès : le département de la Manche ne possède aucune unité de soins palliatifs mais seulement quatre équipes mobiles et 27 lits pour 500 000 habitants. Des progrès ont été accomplis ces dernières années mais il faut encore que l'accès aux soins palliatifs devienne une réalité pour tous. Reste notamment à régler la question du financement alors que les systèmes de tarification privilégient les actes lourds. Les soins palliatifs ne suffiront pas à répondre à la question de l'accompagnement en fin de vie : les deux ne sont pas alternatifs mais complémentaires.

Le texte comporte des manques et des incohérences. Il vise à favoriser l'accompagnement du malade, mais aussi, selon le rapport de l'Assemblée nationale, à éviter des hospitalisations non désirées. Il s'agit donc aussi de soulager les hôpitaux et de réaliser des économies. (Mme la ministre s'étonne)

L'allocation est plus restrictive que le congé de solidarité familiale. Elle ne s'appliquera que pendant trois semaines, soit quinze jours effectifs, contre trois mois pour celui-ci, et son montant n'est pas très incitatif. Enfin et surtout, elle ne sera valable que pour l'accompagnement à domicile, y compris quand il est impossible de faire sortir le patient de l'hôpital, soit parce que le domicile est inadapté, soit pour des raisons objectives et pour la qualité de la fin de vie. Les risques qui en découlent sont multiples, à commencer par celui que l'allocation reste une bonne intention. Risque aussi pour les accompagnants d'être exposés à la double peine de la culpabilité de ne pouvoir assurer l'accompagnement ni être présent à l'hôpital. Risque enfin de leur isolement : livrés à eux-mêmes, ils devraient faire face à toutes les difficultés.

La commission des affaires sociales, qui a accompli un travail important, a accueilli plusieurs amendements du groupe socialiste. Nous remercions de leur écoute la présidente et le rapporteur de la commission. Des points importants font encore débat ; c'est l'objet de ceux de nos amendements qui ont survécu à l'article 40. Nous regrettons que l'allocation ne soit pas versée en cas d'accompagnement de la fin de vie à l'hôpital. Nous voterons cependant le texte. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Jean Louis Masson.  - Cette proposition de loi consensuelle est excellente dans son inspiration, au rebours de bien des textes récents, très discutables. On ne peut que s'en réjouir car l'on ne pouvait se contenter de continuer à encourager ceux qui persistent à s'occuper de leur famille au sens large du texte, sans strictement rien faire de concret pour les y aider. Si l'on veut rétablir des liens que se sont distendus, il faut absolument prendre des mesures pour ceux qui continuent à se dévouer pour leurs malades ou leurs anciens. Cette allocation journalière d'accompagnement ouvre donc une porte. Jusqu'à présent, en effet, on incitait les gens à prendre des congés, toutes les charges possibles reposaient sur leurs épaules et outre leur abnégation, il fallait qu'ils se collètent à tous les problèmes financiers et matériels.

Je voterai ce texte parce qu'il constitue une porte ouverte. Il ne règle pas l'ensemble des problèmes ; il est limité dans le temps alors que la fin de vie se prolonge au-delà de quelques semaines ; son plafonnement, 50 euros, est relativement faible -mais il n'y avait rien auparavant ; surtout, dans une société où la plupart des personnes en fin de vie se retrouvent hospitalisées, ne pas appliquer l'allocation à l'hôpital apparaît très régressif puisque cela concerne 90 % des personnes en cause. Il faudra donc absolument concrétiser cette avancée en accordant l'allocation journalière pour un accompagnement à l'hôpital, quitte à fixer un montant moins élevé. Il conviendra également d'élargir les conditions de durée. C'est en formulant ce souhait que je voterai le texte.

M. Gérard Dériot.  - Il résonne dans nos mémoires ce poignant refrain d'Aznavour :

« Ils sont venus, ils sont tous là,

« Dès qu'ils ont entendu ce cri :

« Elle va mourir la mamma. »

Cette description des derniers instants au cours desquels la famille et les proches se rassemblent autour de celui ou celle qui va mourir ne correspond que rarement à la réalité vécue aujourd'hui. Le mourant des siècles passés, entouré de ses proches recueillis, cède la place au défunt anonyme, abandonné dans l'indifférence à l'hôpital. Car c'est là, désormais, que surviennent deux morts sur trois. Si l'hôpital offre une meilleure prise en charge de la douleur, il symbolise cette mort anonyme, solitaire et surmédicalisée que redoute l'immense majorité d'entre nous.

La loi du 22 avril 2005 a établi un cadre législatif. Cette proposition de loi complète utilement le dispositif existant. Cette initiative bienvenue correspond à notre volonté de tout faire pour conserver à chacun sa dignité jusqu'au dernier instant et d'apaiser les douleurs morales et physiques.

La mort est une expérience humaine inévitable, mystérieuse, et qu'il faut préparer -on ne sait plus penser à la mort. L'individu souffrant est trop souvent dans l'isolement ; son entourage reste impuissant et réticent car la mort fait peur, de sorte qu'aux souffrances physiques s'ajoute la souffrance morale de quitter le domicile où l'on a vécu et son environnement quotidien, pour se retrouver seul à l'hôpital où, même si cela ne remet pas en cause le dévouement de l'équipe soignante, l'absence des proches se fait sentir.

D'un montant de 49 euros, l'allocation d'accompagnement journalière sera versée à l'accompagnant pendant 21 jours. Elle est destinée aux descendants, ascendants, frères et soeurs et à ceux qui ont partagé le domicile. Grâce à cette nouvelle allocation, nous allons améliorer un système qui n'était pas satisfaisant. En considérant les frères et les soeurs, on prendra en compte toutes les situations vécues.

De plus, le dispositif précédent était inégalitaire. En effet, créé par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, le congé de solidarité familiale n'est pas rémunéré, ce qui constituait un obstacle pour la majorité de nos concitoyens, même si le dispositif constituait un progrès.

Enfin, certaines catégories n'avaient pas accès à ce congé, notamment les travailleurs indépendants et les exploitants agricoles. Il convenait de remédier à cette injustice et c'est chose faite. Pourtant, cette allocation ne concerne que l'accompagnement à domicile et non celui des personnes hospitalisées. Certes, l'Assemblée nationale a assoupli la règle, en prévoyant que l'hospitalisation d'une personne accompagnée à domicile ne fera pas cesser le versement de l'allocation, mais elle n'a pas prévu de la généraliser. Ce pourrait être l'une des pistes de réflexion de notre groupe de travail sur la fin de vie.

Si cette allocation ne permettra pas à elle seule de développer les soins palliatifs à domicile, elle s'inscrit dans la même logique et semble tout à fait complémentaire. Nous appelons d'ailleurs de nos voeux le développement de ces soins. D'ici 2012, le programme voulu par le Président de la République sera abondé de 229 millions, en plus des 800 millions consacrés chaque année par l'assurance maladie à ces soins.

Enfin, je me félicite que cette proposition de loi rassemble au-delà des clivages politiques habituels : elle est le fruit d'une initiative de parlementaires d'horizons politiques différents. Si nous n'avons pas tous la même conception de la fin de vie, nous partageons une même volonté de prendre en compte la dignité humaine et de lutter contre la solitude des personnes parvenues à ce stade. A défaut d'empêcher la mort, cette allocation permettra de soulager chacune et chacun de « la crainte de la mort » dont nous savons, depuis Épictète, qu'il s'agit bien de « la source de toutes les misère de l'homme ». (Applaudissements sur la plupart des bancs)

M. Jean Milhau.  - Le RDSE votera ce texte car l'accompagnement de la fin de vie est un devoir de solidarité et d'humanité. Selon plusieurs enquêtes, les Français désirent mourir chez eux. II est donc important de permettre à chacun de ne pas mourir dans la solitude et l'angoisse, de vivre ses derniers moments le plus dignement et humainement possible. Or, le retour au domicile pour y mourir favorise une fin paisible. Le plaisir de se retrouver chez soi permet d'appréhender la mort avec moins d'angoisse. Les proches ont un sentiment d'utilité qui permet souvent d'alléger une culpabilité latente, si fréquente dans l'entourage d'une personne qui va mourir. Cette mesure met enfin un terme à une véritable inégalité entre les personnes qui peuvent interrompre leur activité professionnelle et assumer une perte de revenus et les autres qui, le plus souvent, sont obligées de réclamer un arrêt de travail pour pouvoir accompagner un proche.

Certes, nous regrettons qu'il n'ait pas été prévu de le rendre renouvelable, comme le congé de solidarité familiale. En outre, ce texte ne concerne que l'accompagnement à domicile. Pourtant, si 80 % des Français déclarent vouloir mourir chez eux, dans les faits, les trois quarts des patients en fin de vie décèdent dans des établissements hospitaliers. Il s'agit d'un nouveau pas dans le difficile et douloureux problème de l'accompagnement de la fin de vie.

Mais ce petit pas laisse encore de nombreux problèmes sans réponse. La majorité des sénateurs de mon groupe en appelle à une grande loi qui aborderait le délicat problème de l'aide active à mourir. Malgré certaines avancées, notre législation n'est pas adaptée aux personnes qui réclament le droit à mourir dans la dignité. Mettons un terme à cette hypocrisie : ouvrons le débat sur l'euthanasie ! Il existe des situations indignes, attentatoires au respect de l'individu. Comment ne pas reprendre en cet instant ce passage du très beau texte préfacé par François Mitterrand de La mort intime de Marie de Hennezel : « Au moment de plus grande solitude, le corps rompu au bord de l'infini, un autre temps s'établit hors des mesures communes. En quelques jours parfois, à travers le secours d'une présence qui permet au désespoir et à la douleur de se dire, les malades saisissent leur vie, se l'approprient, en délivrent la vérité. Ils découvrent la liberté d'adhérer à soi. Comme si, alors que tout s'achève, tout se dénouait enfin du fatras des peines et des illusions qui empêchent de s'appartenir. Le mystère d'exister et de mourir n'est point élucidé, mais il est vécu pleinement »

Même si la portée de cette proposition de loi est faible, j'espère qu'elle permettra de vivre pleinement ce mystère d'exister et de mourir. (Applaudissements sur de nombreux bancs)

M. Claude Jeannerot.  - Mme Schillinger s'était beaucoup investie dans la préparation de ce débat, auquel elle aurait aimé participer. Hélas, elle est retenue à l'aéroport de Mulhouse en raison des intempéries.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Que fait le Gouvernement ? (Sourires)

M. Claude Jeannerot.  - Elle m'a donc demandé d'intervenir à sa place.

La loi du 9 juin 1999 visant à garantir le droit d'accès aux soins palliatifs avait instauré un congé d'accompagnement de la fin de vie, mais il n'était pas rémunéré, ce qui empêchait un certain nombre d'accompagnants ayant une activité professionnelle de le prendre. Certains avaient recours à des arrêts de travail pour rester auprès de leur proche. Dans la pratique, ce droit à congé a ainsi été peu utilisé car il était inadapté. Aujourd'hui, des inégalités demeurent entre ceux qui peuvent se permettre d'arrêter de travailler et ceux qui ne le peuvent pas.

On ne peut donc que se féliciter de la création d'une allocation journalière d'accompagnement d'un proche en fin de vie qui permettra la présence d'un membre de la famille.

Cependant, ce texte comporte des lacunes et reste limité. En effet, il exclut les personnes qui accompagnent des malades dans les hôpitaux ou les établissements spécialisés, alors que 75 % des personnes meurent à l'hôpital, le plus souvent seuls. De plus, 85 % décèdent en dehors de tout parcours de soins palliatifs.

Pourquoi limiter l'allocation journalière au seul accompagnement à domicile d'un patient en fin de vie ? L'immense majorité de nos concitoyens seraient ainsi privés de la présence de leurs proches. Ce texte ne s'adressera donc qu'à un très faible nombre de personnes, environ 20 000 selon les estimations de Jean Leonetti. Or 200 000 personnes pourraient bénéficier chaque année de soins palliatifs. Limiter l'allocation aux seuls aidants à domicile constitue une réelle discrimination.

Bien souvent, il s'avère impossible de sortir le patient de l'hôpital pour des raisons matérielles ou médicales. L'accompagnant risque également de se sentir isolé car il doit surmonter des problèmes matériels de toutes sortes.

En effet, les moyens déployés à domicile sont nécessairement moindres qu'à l'hôpital, notamment pour la lutte contre la douleur. Dans le besoin d'accompagner un proche en fin de vie à domicile, il y a la volonté d'être là jusqu'au bout et, en même temps, un doute permanent sur la pertinence médicale et morale de cette prise en charge à domicile. Le besoin d'accompagner un proche ne dépend pas du lieu, il est constitutif de la condition humaine. C'est un droit et un devoir universels qui transcendent le lieu où ils s'exercent et il nous incombe de donner la possibilité aux proches d'accompagner la personne dans ses derniers instants, quel que soit le lieu de la prise en charge. Nous avions déposé des amendements allant dans ce sens, mais malheureusement ils ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution.

La durée de versement de l'allocation est limitée à trois semaines, alors que le congé de solidarité familiale dure trois mois, renouvelable une fois. Ces trois semaines seront en réalité limitées en jours ouvrables. Nous présentons donc un amendement qui apporte plus de cohérence et de souplesse dans la prise en compte du nombre de jours de versement. La notion de semaine est floue, d'autant que les décomptes de sécurité sociale s'opèrent en jours. Sur quels critères s'est-on basé pour fixer ces trois semaines ?

Pourquoi cette mesure ne peut-elle pas être renouvelable une fois, comme le congé de solidarité ?

Par ailleurs, l'interruption du versement de l'allocation, fixée au plus tard au jour suivant le décès de la personne accompagnée, est brutale. Pourquoi ne peut-elle pas durer trois jours après le décès comme le congé de solidarité ?

Cette proposition de loi comporte certaines avancées et c'est pourquoi nous le soutiendrons mais il reste beaucoup à faire dans l'amélioration des soins palliatifs et l'aide active à mourir. Aujourd'hui, trop peu de personnes ont accès aux soins palliatifs. II faut entendre le Parlement européen qui, dans sa résolution de janvier 2009, a souhaité que les soins palliatifs offrent la perspective d'une mort digne pour les patients qui ont abandonné tout espoir de traitement curatif mais qui acceptent d'être soulagés de leur douleur et d'avoir un soutien social. Malheureusement, la proposition de loi ne corrige pas cette inégalité. Il est sans doute temps de se doter d'un nouvel ensemble législatif qui aille au-delà de l'accompagnement en fin de vie et reprenne dans sa globalité la question de l'aide à mourir. Tout se tient. C'est un grand et difficile sujet de société. Mais nous sommes prêts à nous y engager à vos côtés. (Applaudissements à gauche et sur quelques bancs à droite)

M. Alain Fouché.  - Cette proposition de loi est née de l'émotion suscitée par Chantal Sébire, cette femme défigurée, atteinte d'une tumeur au cerveau et qui souhaitait finir dignement sa vie entourée de sa famille, ce que lui interdisait la loi française. A l'issue de ce drame, le Gouvernement a mis en place une mission d'évaluation de la loi du 22 avril 2005, relative aux droits des malades et à la fin de vie, mission qui a proposé une allocation de congé d'accompagnement. Il s'agit de donner à un salarié qui accompagne un proche en fin de vie à domicile -et à la condition qu'il soit inscrit dans un parcours de soins palliatifs- une allocation de 47 euros par jour pendant trois semaines. C'est un progrès et, bien entendu, je voterai ce texte.

Néanmoins, cette mesure qui concernera 20 000 allocataires est incomplète puisqu'elle exclut le cas des accompagnants qui ne sont pas salariés -c'est-à-dire les artisans et professions libérales- et de tous ceux qui ne bénéficient pas de soins palliatifs et ne sont pas à domicile. Or, en France, moins de 15 % des personnes qui peuvent y prétendre, bénéficient de soins palliatifs, du fait de manque de crédits, et parce que tous les accompagnants n'ont pas la possibilité d'accueillir des lits médicalisés chez eux. Il faut aller plus loin. Notre République ne pourra pas faire plus longtemps l'impasse sur une vraie législation qui permettra à chacun de nos concitoyens, comme c'est déjà le cas aujourd'hui aux Pays-Bas, en Belgique, au Luxembourg et dans plusieurs États américains, de choisir en conscience pour lui-même et pour lui seul, les conditions de sa propre fin de vie, qu'il opte pour un accompagnement en soins palliatif ou pour une aide active à mourir.

En octobre 2008, j'ai déposé une proposition de loi « Aide active à mourir dans le respect des consciences et des volontés ». Ce texte cosigné par plusieurs sénateurs, apporte une réponse à la question de la fin de vie en imposant un certain nombre de conditions sécuritaires.

J'ai accueilli favorablement l'initiative parlementaire votée par 203 députés. De nombreux Français le demandent. Nous sommes dans la même configuration que pour l'interruption volontaire de grossesse ou le Pacte civil de solidarité : de nombreux responsables politiques qui n'avaient pas voté alors ces textes, disent qu'ils les voteraient aujourd'hui. Madame la ministre, qu'on le veuille ou non, l'issue du combat de familles -soutenues par des associations- qui ont vécu la souffrance physique et morale de l'un des leurs, est inéluctable. Chaque frein, chaque refus d'écouter la demande de réformes ne fait qu'engendrer des souffrances intolérables. Ce n'est pas un combat de boutiques politiques, c'est un débat de société. Il faudra donc légiférer sur l'ultime choix, celui de fixer la date de sa disparition. (Applaudissements)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je remercie tous les sénateurs pour la très haute tenue de leurs propos. J'ai apprécié.

Vous avez raison, monsieur Fouché, ce n'est pas là une affaire de boutiques politiques. Chacun se souvient que le débat sur la fin de vie et sur l'euthanasie a été ouvert ici même ; il a été suivi d'une proposition de loi. Ce débat est légitime, mais ce n'est pas celui d'aujourd'hui.

Le rapporteur m'a interrogée sur le caractère imposable de cette allocation. L'arbitrage sera fait en loi de finances, pas ici.

Le financement par l'assurance maladie est recevable, justifié par la diminution du nombre d'hospitalisations ou d'arrêts de maladie de complaisance. L'élargissement aux proches ou à une personne de confiance, souhaité par tous, exclut -il faut être logique- le financement par la branche famille.

Je ne peux répondre à la question du président About sur la simulation du coût d'une allocation universelle. Mais je ne doute pas, madame la présidente de la commission des affaires sociales, que vous vous saisirez de cette question afin d'éclairer le Gouvernement.

M. Masson a parlé de « restaurer les liens familiaux ». Je n'ai pas l'impression que ces liens soient détruits, ils ont seulement changé et, au contraire, tout prouve que, en cas de crise, la famille reste une valeur refuge. Cette proposition de loi résulte d'une évolution de la société. Je ne saurais, comme Montesquieu, décider si c'est la loi qui fait les moeurs ou si ce sont les moeurs qui font la loi. L'objectif est seulement de permettre à une personne qui souhaite accompagner un proche en fin de vie, de ne pas en être empêchée par des obstacles pécuniaires.

Le développement des soins palliatifs est une des trois grandes priorités décidées par le Président de la République et je tiens à la disposition de votre commission le bilan d'étape du programme 2008-2012 qui avance à un bon rythme.

Monsieur Jeannerot, nous n'avons pas voulu instituer cette allocation pour les personnes hospitalisées parce que, précisément, un des objectifs est de diminuer le nombre des malades qui restent à l'hôpital parce qu'ils n'ont pas la possibilité d'avoir un accompagnement à leur domicile.

Je vous renouvelle mes remerciements pour la qualité de ce débat. Nous commençons bien l'année. (Applaudissements à droite)

Discussion des articles

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Avant de commencer cette discussion, je veux dire un mot des problèmes que pose une nouvelle fois l'application de l'article 40. Depuis le 1er juillet 2007, le Sénat a mis en place une procédure de vérification de la recevabilité financière des amendements, tirant en cela la décision du Conseil constitutionnel du 14 décembre 2006. Il existe maintenant une jurisprudence, mais les décisions de la commission des finances sont parfois difficiles à comprendre.

En l'espèce, cinq des neufs amendements déposés par le groupe socialiste ont été déclarés irrecevables au motif qu'ils aggravaient la charge publique. Pour au moins deux d'entre eux, les n°s4 et 5, cette décision est contestable. Permettez-moi de les présenter brièvement et de dire pourquoi ils auraient dû passer le barrage de l'article 40.

Pour pouvoir bénéficier de l'allocation, le texte prévoit que le proche en fin de vie doit être accueilli à domicile par l'accompagnant. Il nous semblait nécessaire de prévoir deux dérogations : lorsque le transfert d'une personne en fin de vie hors d'un environnement sanitaire est techniquement impossible et lorsqu'il y a une carence de places en matière de soins palliatifs et d'hospitalisation à domicile. Dans ces cas, ni le malade ni ses proches n'ont le choix. Comme cela a été dit à l'Assemblée nationale pour justifier la recevabilité financière de la proposition de loi, il ne s'agit pas de la création ou de l'aggravation d'une charge mais d'un simple report, puisque les personnes aujourd'hui concernées prennent des congés maladie financés par la sécurité sociale. Ce sera la même chose après le vote de ce texte. Si on les autorisait à percevoir l'allocation dans les deux hypothèses que nous envisagions, ces personnes ne prétendraient plus à un arrêt maladie et le coût serait neutre.

Je ne mets en cause personne, mais il faudra bien un jour que nous réfléchissions aux conditions d'application de l'article 40 selon qu'on l'invoque en commission ou en séance, sur une proposition de loi ou un projet de loi, avant ou après l'examen du texte par l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Article premier

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À l'intitulé du livre VIII, après les mots : « Allocation aux adultes handicapés  -  », sont insérés les mots : « Allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie - » ;

2° Après le titre II du livre VIII, il est inséré un titre II bis ainsi rédigé :

« TITRE II BIS

« ALLOCATION JOURNALIÈRE D'ACCOMPAGNEMENT D'UNE PERSONNE EN FIN DE VIE

« Art. L. 822-1.  -  Une allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie est versée aux personnes qui accompagnent à domicile une personne en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, et qui remplissent les conditions suivantes :

« 1° soit être bénéficiaire du congé de solidarité familiale ou l'avoir transformé en période d'activité à temps partiel comme prévu aux articles L. 3142-16 à L. 3142-21 du code du travail ou du congé prévu au 9° de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, au 10° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, au 9° de l'article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ou à l'article L. 4138-6 du code de la défense ;

« 2° soit avoir suspendu ou réduit son activité professionnelle et être un ascendant, un descendant, un frère, une soeur, une personne de confiance au sens de l'article L. 1111-6 du code de la santé publique ou partager le même domicile que la personne accompagnée.

« Art. L. 822-2.  -  (Supprimé)

« Art. L. 822-3.  -  (Supprimé)

« Art. L. 822-3-1 (nouveau).  - L'allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie est également versée dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1.

« Art. L. 822-4.  -  L'allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie est versée dans la limite d'une durée maximale de trois semaines dans des conditions prévues par décret. Si la personne accompagnée à domicile doit être hospitalisée, la période de versement de l'allocation inclut, le cas échéant, les journées d'hospitalisation, sans dépasser la durée maximale de trois semaines.

« Le montant de cette allocation est fixé par décret.

« L'allocation cesse d'être due à compter du jour suivant le décès de la personne accompagnée.

« L'allocation peut être versée à plusieurs bénéficiaires, au titre d'un même patient, dans la limite totale maximale fixée au premier alinéa.

« Art. L. 822-5.  -  Les documents et les attestations requis pour prétendre au bénéfice de l'allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie, ainsi que les procédures de versement de cette allocation, sont définis par décret.

« Art. L. 822-6.  -  L'allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie est financée et gérée par le régime d'assurance maladie dont relève l'accompagnant.

[ ]

« Lorsque l'intervention du régime d'assurance maladie se limite aux prestations en nature, l'allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie est financée et servie par l'organisme compétent, en cas de maladie, pour le service des prestations en espèces ou le maintien de tout ou partie de la rémunération. »

Mme la présidente.  - Amendement n°15, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 2

Supprimer cet alinéa

II. - Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

Après le chapitre VII du titre VI du livre Ier est inséré un chapitre VIII ainsi rédigé :

III. - Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Chapitre VIII

IV. - Alinéa 6

Remplacer la référence :

L. 822-1

par la référence :

L. 168-1

V. - Alinéa 11

Remplacer la référence :

L. 822-3-1

par la référence :

L. 168-2

VI. - Alinéa 12

Remplacer la référence :

L. 822-4

par la référence :

L. 168-3

VII. - Alinéa 16

Remplacer la référence :

L. 822-5

par la référence :

L. 168-4

VIII. - Alinéa 17

Remplacer la référence :

L. 822-6

par la référence :

L. 168-5

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - C'est un amendement de codification.

M. Gilbert Barbier, rapporteur.  - L'insertion de ces dispositions dans le chapitre VIII confirme le financement de l'allocation par l'assurance maladie. L'amendement n'a pas d'incidence juridique et apporte davantage de cohérence. Sagesse.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je voterai cet amendement, en regrettant que l'État ne prenne pas une partie du coût à sa charge.

L'amendement n°15 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°6, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 10

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

« Art. L. 822-3. - Les personnes mentionnées aux articles L. 5421-1 à L. 5422-8 du code du travail peuvent bénéficier de l'allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie dans des conditions fixées par décret.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous précisons que les bénéficiaires de l'assurance chômage peuvent percevoir l'allocation d'accompagnement. La réécriture de l'article premier par la commission a conduit à la suppression de l'article L. 822-3 ; or les bénéficiaires de l'assurance chômage, à la différence des autres personnes mentionnées dans la précédente rédaction de l'alinéa, ne peuvent a priori remplir la condition de suspension ou de réduction d'activité -elles n'ont pas par définition d'activité professionnelle.

M. Gilbert Barbier, rapporteur.  - La précision est utile. Avis favorable.

L'amendement n°6, accepté par le Gouvernement, est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°13, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 12

Après les mots :

personne en fin de vie est

rédiger comme suit la fin de l'alinéa :

servie dans la limite d'une durée maximum fixée par décret. Elle est due pour chaque jour ouvrable ou non. Le nombre maximum d'allocations journalières versées est égal à 21. Si la personne accompagnée à domicile doit être hospitalisée durant le congé, l'allocation est servie, le cas échéant, les jours d'hospitalisation. Les conditions du service de l'allocation sont définies par décret.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - La durée de versement serait exprimée en nombre d'allocations journalières plutôt qu'en jours ou en semaines. Cette rédaction devrait apaiser les inquiétudes du groupe socialiste et satisfaire son amendement n°8.

Mme la présidente.  - Amendement n°8, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 12, première phrase

Remplacer les mots :

trois semaines

par les mots :

vingt et un jours

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous voulons apporter précision et cohérence, d'autant les décomptes de sécurité sociale se font en jours. Que signifient « trois semaines » ? S'agit-il de vingt-et-un jours calendaires, de dix-huit jours ouvrables ou de quinze jours ouvrés ? Il serait choquant qu'on retînt les hypothèses les plus défavorables. L'accompagnement est nécessaire sept jours sur 7sept et 24 heures sur 24. Si l'amendement du Gouvernement m'a rassuré sur ses intentions, je maintiens le mien.

Cela précisé, je regrette à nouveau la fixation arbitraire d'une durée maximale qui, même de vingt-et-un jours, sera insuffisante. Quid si le temps de la fin se prolonge ? L'accompagnement devra-t-il s'arrêter en chemin ? Parce que nul ne peut prévoir le moment ultime, nous avions déposé des amendements pour permettre la prise en compte de situations différentes et adapter en conséquence la durée de versement. Ces amendements ont été déclarés irrecevables au motif qu'ils pourraient potentiellement aggraver les charges publiques.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Nous poursuivons le même objectif. Ad angusta per angusta... Je pense toutefois l'amendement du Gouvernement meilleur, qui répond mieux à l'argumentation développée par M. Godefroy lui-même. Il est préférable de raisonner en nombre d'allocations journalières qu'en jours.

M. Gilbert Barbier, rapporteur.  - L'amendement n°8 a l'avantage de la simplicité, tandis que celui du Gouvernement nous semble compliquer inutilement les choses -il renvoie notamment deux fois à un décret dans le même alinéa. Il présente en outre un inconvénient majeur. L'Assemblée nationale a précisé que l'allocation continuerait à être versée si la personne accompagnée était hospitalisée ; l'amendement limite ce bénéfice aux accompagnants en congé de solidarité familiale, ce qui exclut de fait les professions indépendantes et libérales.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - Je rectifie mon amendement pour tenir compte de cette pertinente remarque.

M. Gilbert Barbier, rapporteur.  - Il faudrait aussi supprimer l'un des renvois au décret.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.  - D'accord.

Mme la présidente.  - Il s'agira de l'amendement n°13 rectifié, qui se lira comme suit :

Alinéa 12

Après les mots :

personne en fin de vie est

rédiger comme suit la fin de l'alinéa :

servie dans la limite d'une durée maximum fixée par décret. Elle est due pour chaque jour ouvrable ou non. Le nombre maximum d'allocations journalières versées est égal à 21. Si la personne accompagnée à domicile doit être hospitalisée, l'allocation est servie, le cas échéant, les jours d'hospitalisation.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je souhaite une suspension de séance pour pouvoir examiner cet amendement. Le premier membre de phrase continue de nous poser problème.

Mme la présidente.  - Compte tenu de l'heure, je suspends la séance qui sera reprise à 21 heures pour un débat sur l'évaluation de la loi relative au service minimum dans les transports. Nous reprendrons demain soir la discussion de la présente proposition de loi.

Mme Muguette Dini, président de la commission.  - La commission pourrait se réunir un quart d'heure avant pour examiner les amendements.

Délégation aux droits des femmes (Nomination)

Mme la présidente.  - Le groupe UMP a présenté la candidature de Mme Sylvie Goy-Chavent pour remplacer Mme Esther Sittler, démissionnaire, au sein de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Je n'ai reçu aucune opposition ; cette candidature est donc ratifiée et je proclame Mme Goy-Chavent membre de la Délégation.

La séance est suspendue à 16 h 20.

présidence de M. Roger Romani,vice-président

La séance reprend à 21 h 10.

Conférence des Présidents

M. le président.  - Voici les conclusions de la Conférence des Présidents sur l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat.

JEUDI 14 JANVIER

A 9 heures :

Espace réservé au groupe socialiste :

- Proposition de loi organique portant application de l'article 68 de la Constitution.

- Question orale avec débat sur l'application de la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale.

A 15 heures :

- Questions d'actualité au Gouvernement.

A 16 heures 15 et le soir :

Espace réservé au groupe Union centriste :

- Proposition de loi relative à la création des maisons d'assistants maternels.

Suite de l'espace réservé au groupe UMP :

- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux délais de paiement des fournisseurs dans le secteur du livre.

- Suite de la proposition de loi visant à créer une allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie.

Semaines réservées par priorité au Gouvernement

MARDI 19 JANVIER

A 14 heures 30 et le soir :

le matin étant réservé aux questions orales et des questions cribles thématiques prévues à 17 heures sur le plan de relance et l'emploi ;

ainsi que

MERCREDI 20 JANVIER

A 14 heures 30 et le soir :

- Projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

JEUDI 21 JANVIER

A 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :

- Deuxième lecture du projet de loi ratifiant l'ordonnance portant répartition des sièges et délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés.

- Suite du projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

MARDI 26 JANVIER

A 14 heures 30 et le soir :

le matin étant réservé aux questions orales et des questions cribles thématiques prévues à 17 heures sur « Copenhague et après ? »

ainsi que

MERCREDI 27 JANVIER

A 14 heures 30 et le soir :

JEUDI 28 JANVIER

A 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :

MARDI 2 FÉVRIER

A 14 heures 30 et le soir, le matin étant réservé aux questions orales :

MERCREDI 3 FÉVRIER

A 14 heures 30 et le soir :

JEUDI 4 FÉVRIER

A 9 heures 30, l'après-midi après les questions d'actualité au Gouvernement et le soir :

- Suite du projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

Semaine d'initiative sénatoriale

MARDI 9 FÉVRIER

A 14 heures 30 :

- Question orale avec débat sur le renforcement des droits des personnes placées en garde à vue.

- Question orale avec débat sur la situation des personnes prostituées.

De 17 heures à 17 heures 45 :

- Questions cribles thématiques

MERCREDI 10 FÉVRIER

Espace réservé au groupe socialiste :

A 14 heures 30 :

- Proposition de loi relative aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants.

- Proposition de résolution européenne portant sur la protection temporaire.

JEUDI 11 FÉVRIER

A 9 heures :

Espace réservé au groupe CRC-SPG :

- Proposition de loi relative à l'indemnisation des accidents du travail.

A 15 heures :

Espace réservé au groupe UMP :

- Deuxième lecture de la proposition de loi renforçant la lutte contre les violences de groupes.

- Proposition de loi relative à la solidarité des communes dans le domaine de l'alimentation en eau et de l'assainissement des particuliers.

Semaines réservées par priorité au Gouvernement

LUNDI 15 FÉVRIER

A 14 heures 30 et le soir :

MARDI 16 FÉVRIER

A 14 heures 30 et le soir, le matin étant réservé aux questions orales :

- Projet de loi de finances rectificative pour 2010.

MERCREDI 17 FÉVRIER

A 14 heures 30 et le soir :

JEUDI 18 FÉVRIER

A 9 heures 30, l'après-midi après les questions d'actualité au Gouvernement et le soir :

- Projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle.

LUNDI 22 FÉVRIER

A 14 heures 30 et le soir :

- Projet de loi relatif à l'action extérieure de l'État.

MARDI 23 FEVRIER

A 14 heures 30 et le soir, avec des questions cribles thématiques à 17 heures :

- Projet de loi relatif aux jeux d'argent et de hasard en ligne.

MERCREDI 24 FEVRIER

A 14 heures 30 et le soir :

- Suite de l'ordre du jour de la veille.

JEUDI 25 FEVRIER

A 9 heures 30, 14 heures 30 et, éventuellement, le soir :

- Deuxième lecture des projets de loi organique et ordinaire relatifs à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

- Navettes diverses.

L'ordre du jour est ainsi réglé.

M. le président.  - Je vous rappelle que le Sénat suspendra ses travaux en séance plénière du dimanche 28 févier au dimanche 21 mars 2010.

En outre, la Conférence des Présidents a procédé à la répartition des espaces réservés aux groupes politiques jusqu'au mois de juin. Ces dates vous seront adressées.

Débat sur le service minimum dans les transports

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat d'initiative sénatoriale sur l'évaluation de la loi sur le service minimum dans les transports. Je devrai lever la séance avant minuit, car celle de demain commencera à 9 heures ; je vous prie donc de respecter scrupuleusement votre temps de parole.

Mme Catherine Procaccia, pour le groupe UMP auteur de la demande d'inscription à l'ordre du jour.  - Lorsque la loi sur le service minimum dans les transports fut votée en 2007, 70 à 80 % des Français y étaient favorables, car ils souhaitaient pouvoir se rendre librement au travail, en revenir, aller chez le médecin ou chercher leurs enfants à l'école. Pas moins de quinze propositions de loi avaient été déposées sur le sujet en vingt ans. Le Président de la République voulut, dès l'été 2007, concrétiser cet engagement de campagne.

C'est une loi sur le dialogue social dans les transports terrestres de voyageurs que nous avons votée, par pragmatisme. Il n'a jamais été question de remettre en cause le droit de grève garanti par la Constitution, mais de le concilier avec d'autres principes tout aussi fondamentaux : la continuité d'accès au service public, la liberté d'aller et venir, la liberté du commerce et de l'industrie, et enfin la liberté du travail.

Jusqu'alors, la France se singularisait en Europe par son droit de grève très libéral, son dialogue social atone et son peu de soin à garantir la continuité du service public. La moitié des États membres de l'Union européenne, comme l'Italie, le Portugal, l'Espagne ou la Grèce, ont déjà instauré un service minimum dans les secteurs essentiels ; ailleurs, soit le dialogue social est efficace et les conflits rares comme en Suède ou en Allemagne, soit le droit de grève est très encadré comme au Royaume-Uni.

Une réelle obligation de service minimum aurait pu être censurée par le Conseil constitutionnel ; la loi du 21 août 2007 s'est donc contentée de fixer des règles favorisant le dialogue social et garantissant aux usagers en cas de perturbation un service réduit mais prévisible. Elle est entrée en application six mois après son adoption. Il est temps aujourd'hui d'en faire le bilan. Je l'ai demandé bien avant les grèves de décembre, qui prouvent néanmoins l'actualité de cette question.

La loi encourage d'abord le dialogue social. L'accord de branche instituant une procédure de prévention des conflits s'applique aux entreprises de transport public urbain. En revanche, aucun accord n'a été obtenu dans le secteur des transports interurbains ; un décret a donc été promulgué. Ces nouvelles règles d'organisation des négociations visent à éviter les conflits sociaux, car comme le soulignait le rapport Mandelkern en 2004 « la bonne grève est celle qui n'a pas lieu parce que le dialogue l'a prévenue ».

A en croire le rapport remis en 2008 au Parlement, la loi a permis d'éviter des grèves. A la RATP, le nombre d'alarmes sociales a augmenté d'un quart au cours du premier semestre 2008 ; neuf sur dix n'ont été suivies d'aucun préavis de grève. On a enregistré quatre fois moins de préavis qu'au cours des cinq années précédentes. A la SNCF, tous les préavis doivent désormais être précédés d'une demande de concertation immédiate ; ces demandes ont été trois fois plus fréquentes en 2008 qu'en 2007, les préavis moins nombreux de 30 %. Je me réjouis de ces résultats, qui montrent que la grève n'est plus une fatalité. Peut-être M. le ministre nous donnera-t-il des chiffres plus récents.

En cas d'échec de la négociation, il fallait assurer la continuité du service pour éviter que les usagers se trouvent pris à témoin d'un conflit auxquels ils sont étrangers, voire pris en otage. Tous les salariés doivent désormais déclarer 48 heures à l'avance leur intention de faire grève, ce qui permet à l'entreprise de connaître précisément le nombre de grévistes, de réaffecter des agents non grévistes sur les lignes prioritaires et d'informer les usagers des horaires de passage : aucun Français ne devrait plus attendre des heures sur un quai un train hypothétique.

La loi prévoit également des plans de transport adaptés à l'ampleur de la grève. En ce qui concerne la SNCF, les plans de transports sont approuvés par l'État au niveau national et par les régions au niveau régional, sauf en Ile-de-France où c'est le Syndicat des transports d'Ile-de-France qui s'en charge. Le plan de transport adapté Transilien prévoit par exemple trois niveaux de service de 60 %, 50 % et 33 % afin d'assurer au moins un aller-retour dans la journée. Je regrette que sept régions seulement aient intégré un tel plan dans leur convention ; le désengagement des régions, souvent de gauche -puisqu'il y en a très peu de droite- à l'égard d'un système qui a pour but de faciliter la vie quotidienne des habitants sans remettre en cause le droit de grève me paraît incompréhensible. Espérons que les assemblées élues en mars se montreront plus coopératives.

M. Hervé Mariton constatait dans son rapport sur l'application de la loi que lors de deux grandes grèves du 22 mai 2008 et du 29 janvier 2009, les niveaux de service annoncés avaient été globalement respectés. Les usagers ont été informés par divers moyens : un numéro vert, des tracts, internet, les médias... Lorsqu'on connaît les problèmes de communication de la SNCF, on mesure le chemin parcouru ! Lors de la grève du mois dernier sur le RER A, la plus suivie depuis 1995 puisqu'on a compté entre 90 et 95 % de grévistes, un train sur deux a été maintenu aux heures de pointe. En disant que la loi a prouvé son efficacité, je choquerai peut-être les usagers qui ont attendu sur les quais par un froid polaire. Mais j'ajoute que ce conflit a montré qu'il faut aller plus loin, dans les transports terrestres, aériens et maritimes.

Dans les transports terrestres de voyageurs, la loi -que les journalistes appellent « loi sur le service minimum » mais qui institue en fait un service garanti minimal adapté au nombre de grévistes- n'empêche pas les grèves « émotionnelles » qui ont généralement lieu en réaction à l'agression d'un agent. Il y a un an, le 13 janvier 2009, la gare Saint-Lazare était fermée suite à l'agression d'un conducteur la veille à Maisons-Laffitte. On peut comprendre l'émotion des salariés lorsqu'un de leurs collègues est victime de violences inacceptables et incompréhensibles ; mais la grève l'est tout autant pour les voyageurs surpris en milieu de journée. Parfois une agression au sud de Paris donne lieu à un arrêt de travail au nord ou à l'est... N'oublions pas cette grève sur le RER B suite à une fausse agression qui a fait rater leur avion à des centaines de passagers !

Le Gouvernement devrait inciter les entreprises à mettre au point avec les syndicats une procédure applicable dans de telles circonstances, afin d'apporter une réponse appropriée et proportionnée sans entraîner la paralysie du trafic. Le non-respect de cette procédure devrait être sanctionné par une pénalité financière ; un délai de préavis de 48 heures devrait être imposé à tous ceux qui ne sont pas réellement concernés par le droit de retrait.

Les conditions climatiques extrêmes devraient également être prises en compte en cas de grève. En dessous de zéro, est-il acceptable de mettre en danger la santé des usagers ?

Dans le secteur ferroviaire, la loi n'a pas résolu le problème des arrêts de travail à répétition, qui ont lieu le plus souvent lors de la prise de service et dont la durée est inférieure à une heure. M. Portelli évoquera sans doute la proposition de loi qu'il a déposée au début de l'année dernière, et M. le ministre nous fera savoir si la SNCF a élaboré une parade.

Enfin la loi ne garantit pas de service minimum en cas de grève massive.

Pour y parvenir, il aurait fallu prévoir un véritable droit de réquisition, difficile à mettre en oeuvre. Une autre piste serait d'obliger l'entreprise de transport à assurer un service minimal de substitution, par exemple en louant des autocars pour conduire les usagers jusqu'aux gares ou aux portes de Paris.

Faut-il faire confiance à la concertation, ou préférez-vous laisser la voie libre à l'imagination des parlementaires ? (Sourires) On pourrait ainsi inventer des mesures dissuasives prenant en compte la pollution causée par ces grèves.

L'extension aux transports maritimes et aériens du dispositif de dialogue social, d'alerte et d'information me tient à coeur. Lors du débat de 2007, plusieurs de nos collègues avaient souhaité que la loi soit étendue à la desserte de certaines îles. Le Gouvernement s'était refusé à légiférer avant une concertation approfondie.

Le Parlement avait exigé un rapport sur l'opportunité d'étendre le service minimum aux autres modes de transport, qui devait être remis avant le 1er mars 2008. Deux ans plus tard, il ne nous avait toujours pas été remis ! Faute de réponse gouvernementale, j'ai déposé, en juin 2009, une proposition de loi, cosignée par une cinquantaine de sénateurs dont le président Longuet, qui étend aux transports maritimes et aériens le dispositif applicable dans les transports terrestres : dialogue social, préavis de grève, déclaration 48 heures à l'avance et information des passagers.

Miracle, nous avons enfin reçu ce rapport... hier ! Il est difficile de l'analyser en si peu de temps, et j'apprécie peu de le découvrir au dernier moment.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - Vous avez raison.

Mme Catherine Procaccia, pour le groupe UMP auteur de la demande d'inscription à l'ordre du jour.  - J'ai cru comprendre que la loi serait inutile dans le maritime « faute de conflits », et difficilement applicable dans l'aérien pour cause de multiplicité des conventions collectives, mais aussi d'une concurrence qui ferait échec à la notion de service public...

Selon ce rapport, « 2008 et 2009 n'ont connu dans l'ensemble que des perturbations limitées du service public de transport maritime de voyageurs. Seule la Corse a été affectée de mouvements sociaux conduisant à des arrêts prolongés de trafic ». (Sourires) A mes yeux, mieux vaut prévenir les conflits !

S'agissant de l'aérien, la loi ne pourrait s'appliquer qu'aux « liaisons sous obligations de service public et celles assurant la continuité territoriale avec l'outre-mer ». Dans ce cas, faisons-le déjà pour ces destinations ! Fin 2007, lors d'une grève à Air France, M. Bussereau avait d'ailleurs indiqué que le Gouvernement étudierait la possibilité d'étendre l'obligation de se déclarer gréviste 48 heures avant le déclenchement d'un conflit...

Rien n'empêche un État d'imposer des obligations de service public sur des services aériens réguliers si ces liaisons sont vitales. Plusieurs villes non desservies par des trains rapides pourraient être concernées. Quid de l'impact de l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire ? Si l'exploitation de certaines lignes relève désormais d'une logique purement commerciale, la réglementation actuelle du droit de grève conservera-t-elle sa légitimité ?

La loi de 2007 a marqué une réelle avancée. Les partisans du statu quo, qui pensaient la loi inapplicable, ont été démentis. La loi est correctement appliquée, les salariés en ont compris la justification et les usagers en apprécient les avantages, mais ils les jugent limités. Elle peut toutefois être améliorée. Il arrive que des passagers restent bloqués dans un train pendant des heures, sans information, comme récemment dans l'Eurostar. Pourquoi le principe de précaution n'imposerait-il pas aux transporteurs d'avoir toujours suffisamment d'eau à disposition en cas de retard important ?

Si le dialogue social doit être privilégié, le Parlement ne peut a priori refuser de légiférer. Nos concitoyens ne comprendraient pas que l'on refuse d'étendre un système qui a fait ses preuves. Au législateur de faire évoluer le droit !

Je souhaite que notre débat permette de faire un bilan et de dégager de nouvelles pistes pour préserver la liberté de circuler et de travailler. La solution à ces problèmes ne peut être purement technique, comme multiplier les métros automatiques... (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Raymonde Le Texier.  - Élue du Val-d'Oise, je connais les problèmes des usagers du RER A. Les désagréments et les retards les plus courants ne sont pas dus à des grèves, mais à des dysfonctionnements techniques, des suppressions de trains, des matériels vétustes et des infrastructures surchargées. Le problème n'est pas l'instauration d'un service minimum, mais le sous-investissement chronique dans l'entretien et le fonctionnement du réseau et du matériel.

Faute d'investissement de l'État, la région a hérité en 2006 d'un réseau saturé, incapable de répondre à la demande croissante. Elle a lancé un programme de renouvellement des matériels et d'ouverture, de renforcement ou de prolongation de nouvelles lignes qu'elle assume seule, sans soutien de l'État. Le Gouvernement a refusé en 2006 d'aider la région à renouveler le matériel roulant. L'État n'a pas davantage tenu les engagements du contrat signé avec la région, bloquant nombre de projets. Il a refusé de s'associer au plan de modernisation des transports en Ile-de-France alors qu'il ne lui était pas demandé de financement supplémentaire. La décision du Gouvernement de transférer à la RATP le patrimoine du Stif laisse ce dernier sans aucun actif lui permettant d'emprunter : un vrai coup porté à la capacité d'investir.

Pendant ce temps, l'État se lance dans des projets pharaoniques : la ligne de métro prévue dans le cadre du Grand Paris coûtera 21 milliards ! Une somme qui permettrait de résoudre les problèmes du transport ferroviaire en Ile-de-France et de financer de nouveaux projets. Or le Gouvernement décide seul du tracé, au mépris des besoins des usagers, instaurant un système de transport à deux vitesses : d'un côté, un réseau qui se dégrade, de l'autre, un TGV urbain, destiné à des privilégiés. Cerise sur le gâteau, ces 21 milliards ne sont, bien entendu, pas financés. Si l'État refuse d'associer les collectivités aux décisions, il n'a aucun scrupule à siphonner leurs moyens !

Réduire la problématique des transports à la seule question du service minimum relève de l'imposture. Ce débat vise surtout à susciter la polémique sur le droit de grève pour mieux contourner la question de l'organisation du transport ferroviaire en Ile-de-France.

La notion de service minimum -dans les faits, un service restreint- permet surtout à la RATP et la SNCF de s'exonérer de tout remboursement ou de diminution de tarifs. Malgré la demande insistante du président Huchon, aucune modification tarifaire n'a pris en compte la gêne subie par les usagers du RER A. C'est encourager l'irresponsabilité de l'entreprise. D'ailleurs, quelle aubaine pour les ministres candidats aux régionales de pouvoir ainsi critiquer la région, alors que le dialogue social est à l'évidence du ressort du management de la SNCF -comme l'écrit le député Mariton !

Les présidents de région ont été clairs : « la gestion du service de transport relève des entreprises de transport, de même que ces entreprises sont seules responsables du dialogue social avec leurs salariés ». Rendre les élus responsables des conséquences pour les usagers du mauvais climat social régnant dans des entreprises de transport, sans leur donner le pouvoir d'intervenir dans leur management, est une aberration !

Quand on reconnaît une pleine liberté d'action à l'entreprise, il faut reconnaître aussi sa responsabilité.

Les critiques des ministres-candidats lors de la grève du RER A ont été injustes tout en témoignant au mieux de l'ignorance des sujets concernés, au pire d'une malhonnêteté intellectuelle ou encore d'un électoralisme déplacé.

Un véritable service minimum consiste à assurer une circulation quasi normale aux heures de pointe dans les grandes agglomérations, ce qui nécessite la présence des trois quarts des agents : autant dire un échec de la grève.

Une fois de plus, la loi et le discours sur le « service minimum » sont rhétoriques et les usagers, en plus des difficultés de circulation, ont le sentiment détestable d'avoir été une fois encore manipulés par un gouvernement qui leur vend des engagements qu'il sait pertinemment ne pouvoir tenir.

Et pour ne pas assumer les effets désastreux de lois inopérantes, la droite se met en quête de boucs émissaires : les collectivités territoriales sont toutes désignées, en tant qu'autorités organisatrices de transport, alors qu'elles ne maîtrisent en rien la situation interne des entreprises concernées. Pour respecter les usagers, les ministres-candidats et leur coach présidentiel devraient cesser d'instrumentaliser des situations difficiles !

Le Bureau international du travail, de son côté, a déclaré la loi non conforme à la Convention n°87 de l'OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. Selon le BIT, « la fixation d'un service minimum négocié devrait être limitée aux opérations strictement nécessaires pour que la satisfaction des besoins de base de la population ou des exigences minima du service soit assurée, car elle limite l'un des moyens de pression essentiels dont disposent les travailleurs pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. »

Le BIT a estimé également que les organisations de travailleurs devraient pouvoir participer à la définition du service minimum, comme les employeurs et les pouvoirs publics et il a demandé d'amender le texte dans ce sens.

Mais la loi n'ayant pas d'autre objectif que de faire parler du Gouvernement, gageons que ces recommandations du BIT ne seront pas suivies d'effets !

Aujourd'hui, la grève du RER A est terminée, mais les difficultés demeurent pour les usagers : retards, suppressions de trains, pannes... Quand on passe trois heures par jour dans les transports, il est sage d'y ajouter 30 à 45 minutes de marge, pour ne pas être en retard ! Le service minimum, dans ces conditions, n'est qu'un rideau de fumée : on prétend que les difficultés des usagers viennent de salariés irresponsables et privilégiés, tandis que le Gouvernement et l'entreprise s'exonèrent de leurs responsabilités, en particulier vis-à-vis de l'entretien du réseau et des matériels.

Le groupe socialiste n'est pas dupe de telles manoeuvres : je doute qu'aucun de vous ne le soit ! (Applaudissements à gauche)

M. Yvon Collin.  - La loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs devait prévenir les conflits sociaux par le dialogue social, et garantir, en cas de grève, un service réduit mais connu par avance des usagers. Il a concilié la liberté d'aller et venir, l'accès aux services publics et le respect du droit de grève.

Selon les entreprises concernées, en particulier la RATP et la SNCF, la loi a eu un impact positif sur le dialogue social : elle a renforcé les accords préalablement conclus entre partenaires sociaux et elle a eu un impact positif sur le service assuré aux usagers. Du reste, monsieur le ministre, il semble que certaines interconnexions soient mieux assurées en période de grève, où les trains de réserve sont à l'heure, qu'en période normale !

A la SNCF, le nombre de journées perdues pour raison de grève est le plus bas depuis quatre ans ; en 2008 à la RATP, seuls 63 agents n'ont pas averti dans les formes requises de leur intention de faire grève, sur 3 051 agents concernés.

Ce bilan « globalement positif » ne signifie pas que tout aille bien. En cas de grève massive, le service n'est pas assuré, puisque la loi de 2007 n'a pas institué de service minimum et qu'il requiert la réquisition. En cas de grève illégale, le service est également perturbé. Mais surtout, le service normal est très souvent perturbé par des pannes, dues à l'obsolescence de certains matériels. Aussi, c'est la capacité des entreprises publiques à investir qui est en jeu. Quand le service est perturbé, c'est le plus souvent du fait du mauvais état du réseau. L'entretien et la rénovation des TER exigeraient 500 millions par an, mais les collectivités, qui financent déjà 80 % du réseau, sont déjà lourdement mises à contribution !

Monsieur le ministre, pour assurer la continuité du service public, donnez aux opérateurs les moyens de financer le réseau ferré et un équipement en bon état de marche ! Les usagers deviennent des clients exigeants, qui attendent un service comparable à celui que délivrent les entreprises privées. Et il faut encore que les décisions soient prises au plus près des citoyens, sous leur contrôle.

Tout débat sur le service minimum serait vain s'il opposait les salariés et les usagers. Aussi, monsieur le ministre, avant de revoir l'ensemble du dispositif avons-nous tout intérêt à faire preuve de sagesse et de prudence. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

M. Hugues Portelli.  - Monsieur le ministre, vous avez déclaré pendant la grève du RER A, tout comme M. Woerth, qu'avec la loi sur le service minimum, le service minimum était possible sauf si tous les conducteurs étaient en grève. De fait, la loi du 21 août 2007 n'organise pas de service minimum. Nous étions 80 sénateurs à le demander alors, mais M. Bertrand, qui avait vos fonctions actuelles, a explicitement repoussé tout service minimum, allant jusqu'à dire qu'il ne voulait pas en entendre parler. Nous avons donc eu une loi sur le dialogue social dans les entreprises publiques de transport terrestres : la focale s'était resserrée !

Ce texte oblige à négocier avant tout préavis de grève et il organise un service garanti en cas de grève ou de perturbation prévisible. Cependant, il ne définit pas le service minimum : c'est aux autorités organisatrices de le faire, en fonction du contexte local. Enfin, il oblige les salariés à dire, deux jours à l'avance, s'ils seront ou non grévistes et il autorise l'organisation d'un vote à bulletin secret après huit jours de grève, pour décider de sa poursuite ou du retour au travail.

Quel en est le bilan ? La question est directement celle du dialogue social. De quel dialogue social parle-t-on dans des entreprises comme la RATP et la SNCF, où les organisations de salariés sont balkanisées et divisées par des oppositions catégorielles ?

Quel dialogue social y a-t-il quand des responsables syndicaux avouent benoîtement que la prolongation de la grève du RER A est motivée par les élections syndicales ? Quel dialogue social y a-t-il quand en dehors de tout mouvement social déclaré, des trains sont annulés en raison « d'équipages non-complets » -comme s'il s'agissait d'avions !- parce que des salariés n'ont pas pris leur travail à l'heure, parce que du personnel ne travaille pas. Quel dialogue social y a-t-il quand la bonne foi n'est pas partagée et que, comme à la gare Saint-Lazare, les règles sont tournées par des grèves de moins d'une heure. Nous avons d'ailleurs déposé plusieurs propositions sur les grèves de 59 minutes. Sont-elles susceptibles d'être regardées avec intérêt dans le cadre du dialogue social entre le Gouvernement et sa majorité ? (Sourires)

L'information est assurée correctement. Même si les écrans de ma gare sont en panne depuis trois mois, on sait, en consultant les sites internet, à quoi s'en tenir. En revanche, la loi n'est pas appliquée en matière de remboursement : elle ne l'a été qu'une fois, au terme d'un long mouvement social. Mais quand les trains ne sont pas à l'heure ? Quand ils sont supprimés ? Je suis obligé de partir avec trois trains d'avance pour être sûr d'être à l'heure le matin et je pense aux employés qui n'ont pas le choix parce que l'A 15 est saturée dès 6 h 30 : les employeurs répugnent à engager des personnes qui viennent du Val-d'Oise et certains salariés préfèrent aller habiter ailleurs.

Le dernier point n'est pas dans la loi, c'est l'horaire. Je partage l'avis de Mme Le Texier sur l'insuffisance des investissements pour les transports collectifs. Nous sommes plus intéressés par des trains de banlieue que par des TGV qui profitent à peu de monde. Mais j'ajoute que cela continue avec la région. Celle-ci peut commander des Bombardier qui n'ont qu'un étage et qui ne passent que toutes les quatorze minutes : nous aurons des trains plus petits et moins fréquents et le problème ne sera pas réglé. Les dysfonctionnements sont quotidiens et quand le Stif sanctionne la SNCF, les trains ne s'arrêtent plus dans les gares : ils arrivent à l'heure mais sans voyageurs, et le service public ne fonctionne pas. Si l'on supprime les conducteurs comme le proposent certains et que les trains ne s'arrêtent plus, le problème sera réglé. (Applaudissements à droite)

Mme Mireille Schurch.  - Le service minimum est un serpent de mer. Ce serait la solution aux dysfonctionnements des services publics mais cela permet surtout de faire l'impasse sur les véritables maux dont souffrent les services publics, le sous-financement chronique et le désengagement de l'État, tout en pointant du doigt le statut des agents du service public, que vous vivez comme une hérésie. Méfions-nous des amalgames : une démocratie ne peut, sans se dénaturer, porter atteinte à un droit fondateur de la citoyenneté.

Le débat semble d'actualité après la grève dans le RER qui a démontré l'inefficacité d'une loi que Nicolas Sarkozy considère pourtant comme un succès personnel. L'initiative du groupe UMP et les déclarations de la candidate de ce parti aux régionales procèdent d'une démarche politicienne. Mme Pécresse prend appui sur un conflit pour porter ses attaques contre M. Huchon accusé, non sans démagogie, de mettre de l'huile sur le feu et de demander la nomination d'un médiateur, comme si ce n'était pas prévu par l'article 6 de la loi de 2007. Elle a estimé, sans autre forme de procès, qu'il aurait fallu financer des bus de nuit : elle oublie que la décentralisation a transféré la compétence transports sans les moyens adéquats. On ne peut sans mauvaise foi discréditer les efforts des régions pour assurer un service public de qualité. Elles ont investi des millions d'euros pour pallier le désengagement de l'État et si les ralentissements ont diminué, c'est à elles qu'on le doit, notamment en Midi-Pyrénées. (Mme Anne-Marie Escoffier approuve)

Il est étonnant de parler maintenant de la loi de 2007 comme loi sur le service minimum alors qu'elle portait sur le dialogue social et la continuité du service public des transports. Ce choix des mots est éclairant : il s'agissait bien de limiter le droit de grève et non de moderniser le dialogue social. Nous craignons que ce débat serve de ballon d'essai pour des dispositions encore plus régressives. Les récentes grèves ont démontré l'inefficacité du dispositif et les partenaires sociaux continuent à penser que le dialogue social n'a pas été amélioré. Le bilan doit donc comporter un volet là-dessus.

Nous avions regretté le caractère polémique d'un texte qui ne réglait rien. L'impératif de la continuité du service public ne peut se penser uniquement en temps de grève : c'est tous les jours la galère pour les usagers ! L'écrasante majorité des perturbations résulte de défaillances du matériel roulant, d'insuffisance des moyens, de l'état des infrastructures. Le texte ne répond à aucune de ces préoccupations. Rien ne sert de traiter les conséquences de la conflictualité ; c'est un emplâtre sur une jambe de bois si on ne s'attaque pas aux causes.

Malgré la décision rendue par le Conseil constitutionnel, nous continuons à penser que le texte porte une atteinte disproportionnée au droit de grève. Alors que celui-ci est un droit individuel qui s'exerce collectivement, la déclaration préalable oblige à se désolidariser. Cela reste contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation. Le préavis de huit jours au préavis de cinq jours n'est qu'une restriction supplémentaire qui n'améliore en rien le dialogue social. La seule disposition positive, introduite à l'article 12 par un amendement de notre groupe, est la référence aux critères sociaux et environnementaux. Nous regrettons de n'avoir aucun bilan sur une mesure de nature à diminuer la conflictualité. L'article 10 stigmatise les grévistes en rappelant le principe du non-paiement des jours de grève, comme si les premières victimes économiques des grèves n'étaient pas les grévistes.

Je regrette que nous ayons manqué d'éléments, faute de bilan gouvernemental et d'auditions par la commission des affaires sociales. Nous avons dû nous appuyer sur deux rapports d'information établis à l'Assemblée nationale.

Sur le fond, si les deux rapports se félicitent de l'amélioration de l'information des usagers, leurs préconisations sont radicalement différentes : le premier préconise la restriction absolue du droit de grève, le second souhaite le renforcement du dialogue social grâce à un observatoire des relations sociales, à une meilleure démocratie sociale au sein des entreprises ferroviaires et à une meilleure intégration des représentants des usagers.

Le rapport du député Mariton préconise des dispositions particulièrement dangereuses, qui n'ont trait ni au dialogue social, ni à la continuité du service. De plus, notre rapporteur estime que les grèves de 59 minutes ne désorganisent pas les services publics. Nous regrettons l'absence de bilan sur le dialogue social. Enfin, les obligations ne pèsent que sur les salariés et non sur les directions d'entreprises.

Parallèlement, des parlementaires ont déposé des propositions de loi qui réduisent de façon abusive le droit de grève en élargissant le service minimum, en l'étendant aux transports maritimes et aériens, comme le souhaite Mme Procaccia, ou en sanctionnant financièrement les grévistes, comme le veut M. Portelli, ce que M. Mariton estime trop sévère. Enfin, le député Ciotti propose la réquisition de personnels. Puisque cette idée a l'air de séduire un certain nombre de nos collègues, la réquisition, sous réserve de quelques dérogations très limitées, est contraire à un exercice normal du droit de grève, la jurisprudence tant administrative que judiciaire ne l'admettant que lorsqu'il est question de sécurité publique.

Mme Raymonde Le Texier.  - Très bien !

Mme Mireille Schurch.  - Ce texte prévoit aussi l'élaboration d'une liste d'agents volontaires pour suppléer les collègues en cas de grève. Cette proposition hallucinante conduirait des agents à se priver par avance d'un droit inaliénable : ce serait une atteinte inacceptable au droit de grève.

Nous déplorons que le dialogue social soit à ce point marginalisé. Il permettrait pourtant de limiter les conflits au sein des entreprises.

Tant que la SNCF présentera des plans tels que celui dit de « sauvegarde du fret » et tant qu'elle préparera sa future privatisation, les agents continueront à faire grève. La SNCF ne cherche qu'à accroître sa rentabilité économique : en sept ans, 21 500 emplois y ont été supprimés, ce qui explique en partie les conflits et les problèmes de continuité du service public. Aujourd'hui, de simples aléas météorologiques désorganisent le service public de transport.

La seule question qui compte est celle de la continuité du service public des transports au quotidien. Or, celle-ci est mise à mal, non par les grèves à répétition, mais par le sous-investissement chronique dont souffre ce secteur d'activité et la libéralisation imposée par Bruxelles. Ainsi, selon le rapport de M. Mariton, le nombre de jours de grève par agent était de 0,18 en 2008. Faire des grèves l'unique mal dont souffre la continuité du service public est une contrevérité : elles ne représentent que 3 % des incidents qui perturbent les transports. Les services publics de transports pâtissent avant tout de l'insuffisance des investissements depuis les années 1970.

Les conflits sont également nourris par la dégradation des conditions sociales, du fait de la déréglementation du secteur. La précarité de l'emploi se développe dans les transports du fait de recours accru au temps partiel. Les salariés sont donc fondés à exiger une autre politique des transports.

Avec les associations d'usagers, nous demandons un plan Marshall des transports lancé par l'État et les collectivités. Les financements des collectivités, notamment celles des régions, vont être affectés par la réforme des collectivités et la suppression de la taxe professionnelle. C'est pourquoi l'État devrait reprendre la dette de RFF. Nous regrettons que le grand emprunt ne prévoie pas de financer les transports et que les déclarations d'intention du Grenelle de l'environnement ne se traduisent pas par des investissements.

Nous défendons le service public, la qualité et la sécurité des prestations aux usagers. Les conditions de travail des personnels doivent s'améliorer, les droits collectifs et les droits syndicaux être respectés et les négociations d'entreprise relancées. Nous sommes donc fermement opposés à toute atteinte au droit de grève, droit indispensable à chaque citoyen salarié. (Applaudissements à gauche)

M. Michel Teston.  - Lors de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait annoncé son intention d'instaurer un service minimum dans les transports : « Je garantirai trois heures de transport en commun pour aller au travail, et trois heures pour en revenir. Il est inacceptable que les Français soient pris en otage par les grèves ».

M. Pierre Hérisson.  - C'est vrai qu'il l'a dit !

M. Louis Nègre.  - Bravo !

M. Michel Teston.  - Peu de temps après son élection à la Présidence de la République, de manière quelque peu démagogique, (M. Louis Nègre le conteste) suivant la logique des effets d'annonce ou des lois déclaratives, il a fait déposer, le 7 juillet 2007, un projet de loi qui a été examiné en session extraordinaire par le Sénat et adopté par le Parlement selon la procédure d'urgence.

M. Pierre Hérisson.  - On dit la procédure accélérée, maintenant ! (Sourires)

M. Michel Teston.  - Ce texte, qui est en retrait par rapport aux engagements du candidat Sarkozy, comprend trois volets.

Le premier prévoit que les entreprises de transports et les organisations syndicales de salariés négocient, avant le 1er janvier 2008, un accord concernant l'organisation obligatoire d'une négociation avant le dépôt de tout préavis de grève.

Le deuxième volet prévoit un service garanti en cas de grève ou de perturbation prévisible. Ce service minimum est défini par les autorités organisatrices de transport en fonction des spécificités locales. Deux mesures principales sont mises en place : l'obligation pour les salariés de déclarer 48 heures avant le début d'une grève s'ils ont l'intention d'y participer et la possibilité, après huit jours de grève, d'organiser un vote à bulletin secret sur sa poursuite. Un amendement adopté par le Sénat prévoit qu'un médiateur pourra intervenir dès le début de la grève.

Le troisième volet oblige l'entreprise de transport d'informer préalablement les usagers en cas de grève ou de perturbation prévisible. Celle-ci peut être tenue de rembourser, en tout ou partie, les usagers si un plan de transport n'a pas été mis en oeuvre.

Le texte rappelle enfin que les jours de grève ne peuvent donner lieu à paiement.

Ce projet de loi a suscité de fortes réactions de la part des organisations syndicales de salariés qui considèrent que l'objectif du Gouvernement n'est pas d'améliorer le dialogue social mais de restreindre le droit de grève. Si nous avons approuvé l'idée de prévenir plus efficacement la survenance des conflits sociaux par l'instauration d'un dispositif de négociation collective obligatoire, nous avons vivement critiqué toutes les autres dispositions du texte qui n'évoquent d'ailleurs pas la dégradation du service public des transports et le vieillissement du réseau ni les multiples incidents, notamment des dégradations volontaires à l'origine de nombreuses perturbations.

Nous avons aussi relevé que ce texte ignore les grèves émotionnelles déclenchées dans l'instant, à la suite d'agressions d'agents. En outre, il fait peser sur les élus, à savoir les autorités organisatrices de transport, des responsabilités qui ne sont pas les leurs : les entreprises de transport sont responsables du dialogue social avec leurs salariés. Plus généralement, nous avons dénoncé « une loi d'affichage », reprenant ainsi l'expression de Denis Mazeaud, professeur de droit à Assas.

Nous avons aussi formulé trois autres critiques majeures : alors que la majorité avait déjà fait adopter la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, et celle du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social, elle a voulu une troisième loi ! Les deux précédentes n'étaient-elles pas à la hauteur des enjeux ?

Deuxième critique : ce projet de loi réduit la portée du droit de grève et le débat sur l'amélioration du dialogue social est un trompe l'oeil. Peut-on parler d'amélioration du dialogue social avec la mise en place de sanctions disciplinaires à l'encontre des salariés grévistes lorsqu'ils n'ont pas respecté l'obligation de déclaration préalable sur leur intention de faire grève ?

Troisième critique : cette loi ne permet pas d'assurer un service minimum effectif mais un service restreint et hypothétique car si beaucoup de salariés sont en grève, le service ne sera pas assuré. Il faut en effet 80 % d'agents pour assurer un service normal aux heures de pointe, notamment dans les grandes agglomérations.

Le groupe socialiste a donc voté en juillet 2007 contre l'adoption du texte. Si le Conseil constitutionnel a validé la loi, le Bureau international du travail l'a déclarée non conforme à la convention n°87 de l'OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. En effet, selon le BIT, « la fixation d'un service minimum négocié devrait être limitée aux opérations strictement nécessaires pour que la satisfaction des besoins de base de la population ou des exigences minimales du service soit assurée, car elle limite l'un des moyens de pression essentiels dont disposent les travailleurs pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux ». Comme cette loi touche au droit de grève, les salariés ont développé de nouvelles formes d'action qui en contrecarrent les effets. L'article 10 dispose que « la rémunération des salariés participant à la grève, y compris les avantages directs et indirects, est réduite au prorata de la durée non travaillée, à l'exclusion des suppléments pour charges de famille ».

Cette rédaction ouvre une brèche dans laquelle s'est engouffré le syndicat SUD, en janvier 2009, lors des grèves à la gare Saint Lazare à Paris et à Nice. Des salariés se sont déclarés grévistes pendant 59 minutes par jour, ce qui limitait leur perte de salaire tout en désorganisant le trafic. De même, les cheminots ont davantage utilisé leur droit de retrait à la suite d'agressions, ce qui a notamment provoqué la complète fermeture de le gare Saint-Lazare le 12 janvier 2009 et bloqué 400 000 voyageurs.

Quant à l'obligation faite au salarié d'annoncer 48 heures à l'avance son intention de faire grève sous peine de sanction disciplinaire, elle l'incite à se déclarer d'avance gréviste, même si cette déclaration n'est pas suivie d'effet, ce qui a pour conséquence de donner une information erronée à l'usager.

M. Louis Nègre.  - C'est complètement tordu!

M. Michel Teston.  - Autre effet négatif de la loi : les entreprises de transport ne sont pas contraintes par l'Autorité organisatrice de rembourser des titres de transport si elles ont mis en place un plan de transport qui a fonctionné et, ce, même si les usagers ont subi une gêne considérable. La RATP a donc refusé tout remboursement après la récente grève du RER A...

Quel bilan pouvons-nous dresser de ce service dit « minimum » deux ans après son entrée en vigueur ? Globalement, si les demandes de concertation -obligatoires- ont bien été effectuées, il n'en reste pas moins que le nombre de conflits a augmenté. En 2008, les préavis ont été davantage suivis de conflits qu'en 2007. Le dispositif a montré ses limites en cas de grève massive. Enfin, il a été contrecarré par de nouveaux modes d'action des salariés : grèves de 59 minutes, usage plus systématique du droit de retrait, grèves tournantes.

En mars 2009, nos collègues députés Jacques Kossowski et Maxime Bono ont déposé un rapport sur l'application de la loi de 2007. S'ils estiment que, globalement, ce texte est correctement appliqué, ils rappellent également qu'il n'a pas créé de réel service minimum, celui-ci nécessitant la réquisition de personnels. Avec l'organisation de ce débat, l'objectif réel du groupe UMP du Sénat n'est-il pas de préparer le terrain au vote d'une nouvelle loi restreignant encore le droit de grève dans les entreprises de transports ?

M. Jackie Pierre.  - Ce serait bien !

M. Michel Teston.  - J'en veux pour preuve le dépôt, en février 2009, de la proposition de loi du député Ciotti et de plusieurs de ses collègues UMP. Cette proposition a pour but de mettre en place un pouvoir de réquisition dévolu au préfet, de contraindre les Autorités organisatrices à établir des listes d'agents volontaires pour suppléer leurs collègues en cas de grève spontanée. Alors qu'Éric Ciotti et ses collègues pensent que la loi de 2007 est insuffisante, le rapport Kossowski-Bono s'oppose à l'idée de légiférer dans l'urgence.

D'abord, le texte de 2007 n'est en vigueur que depuis deux ans, il faut lui laisser « le temps de vivre et d'être socialement bien accepté ». Ensuite, la grève n'est pas -loin s'en faut- la cause principale des perturbations de trafic. Par exemple, le président de la RATP rappelle que les causes de perturbation sont, dans l'ordre, les suicides et tentatives de suicide, les utilisations abusives du signal d'alarme, les malaises d'usagers, les colis suspects, les problèmes d'infrastructures, les défaillances matérielles et, enfin, les causes sociales. Dernière raison, enfin : légiférer dans l'urgence en pensant qu'un énième texte empêchera les conflits, c'est oublier que le problème de fond, celui du dialogue social, doit être traité en priorité.

Au final, le texte de 2007 est loin d'avoir eu les effets promis par le Gouvernement. Le directeur du transport public à la SNCF a évoqué « l'apparition d'une nouvelle forme de conflictualité, peu pénalisante pour les grévistes et très déstabilisante pour l'entreprise ». En d'autres termes, cette loi, censée renforcer le dialogue social et la continuité dans les services publics a produit l'effet contraire à savoir l'exacerbation de la conflictualité, ce qui ne justifie en aucun cas une nouvelle réduction du droit de grève. La proposition de loi Ciotti paraît attentatoire à ce droit et, donc, contraire aux principes constitutionnels.

Les nombreux désagréments subis par les usagers n'ont pas pour origine les mouvements sociaux mais résultent d'un sous-investissement dans l'entretien des réseaux et des matériels qui multiplie les retards et les pannes. La vraie question est donc celle des moyens dégagés par l'État et par les entreprises pour faire fonctionner les transports dans de bonnes conditions.

Tout doit être fait pour renforcer le dialogue social, comme le préconisait en 2004, le rapport Mandelkern, partant de l'hypothèse qu'il était impossible de mettre en place un service minimum continu.

Notre position reste la même qu'en 2007 : il faut renforcer le dialogue social et non attiser les conflits, comme l'a fait la loi de 2007. (Applaudissements à gauche)

Mme Catherine Procaccia.  - Vous exagérez !

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Ce débat est opportun au lendemain de la longue grève du RER A. Loin de moi l'idée de critiquer le principe d'un service minimum qui existe dans d'autres secteurs -comme l'hôpital et la télévision- ou dans la moitié des États européens. Il n'est pas absurde d'envisager de garantir deux principes constitutionnels, le droit de grève et la libre circulation des personnes. Mais l'élaboration de cette loi ne s'est pas faite sans ambiguïté, ce qui explique que, à cette époque, les membres du RDSE se sont partagés entre le non et l'abstention.

Aujourd'hui, quelle évaluation peut-on faire de l'efficacité de ce service minimum ? Lors de la récente grève du RER A, les voyageurs n'ont bénéficié que d'un train sur cinq ou six au lieu d'un train sur trois comme prévu. En outre les horaires de ce service minimum -qui, le soir, se terminait à 19 h 30- étaient peu compatibles avec ceux de nombreux salariés qui, rentrant chez eux bien plus tard, ont pris leur voiture ou le métro ; d'où des embouteillages et des bousculades. Aux voyageurs ayant payé un coupon hebdomadaire, assez onéreux, la RATP a fait valoir que, puisqu'il y avait eu service minimum, il n'était pas question de les rembourser. Monsieur le ministre, votre administration confirmera-t-elle cette réponse ?

Aux dires mêmes de la RATP et de la SNCF, le bilan de l'application de cette loi est mitigé. Si, globalement, les départements ayant en charge les transports interurbains et scolaires rencontrent peu de difficultés à assurer le service continu, il en va autrement dans certaines régions ou dans certaines entreprises de transport urbain. La difficulté est encore amplifiée lors de grèves de 59 minutes ou de ces grèves spontanées, dites « émotionnelles », déclenchées à la suite d'une agression. C'est là une des failles de la loi.

La commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a souhaité créer un observatoire des relations sociales dans les transports terrestres, appelé à faire un bilan de l'état du dialogue social en France. La multiplication des grèves révèle un malaise lié à la mauvaise qualité des transports. L'augmentation exponentielle du nombre des voyageurs, le vieillissement des équipements, le besoin de formation des conducteurs, les problèmes de sécurité nuisent à la bonne marche des trains. Bien plus que les conflits sociaux, ils provoquent la majorité des retards ou perturbations.

Le Président de la République a parlé de la nécessité d'un plan d'amélioration de la ligne A. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire les objectifs, les modalités de financement, le calendrier ? Je veux croire que vous voulez assurer un service public de transport de qualité dont bénéficieront aussi bien les voyageurs que des salariés respectés pour leur engagement quotidien au service du public. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

M. Louis Nègre.  - L'organisation de ce débat montre la réactivité de notre assemblée, l'attention que nous portons au quotidien de nos concitoyens et notre sensibilité à la préservation de services publics de qualité. Ceux-ci sont en effet un élément majeur de l'attractivité de la France, donc de son développement économique.

La loi du 21 août 2007 n'impose pas un niveau de service minimal mais porte sur « le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs ». Cette loi, voulue par le Président de la République en raison des graves dysfonctionnements dans les transports collectifs, était nécessaire. Elle a eu un impact positif sur le dialogue social ; le dispositif de prévention des conflits a globalement bien fonctionné. Lorsque des grèves ont eu lieu, le service assuré a été plus important que ce qui était prévu. Enfin, les plans de transport adapté et les plans d'information des usagers ont été généralement respectés.

Pour autant, peut-on en déduire « que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes » ? Malheureusement, non. La très grave perturbation qu'a connue pendant près de deux mois la région Provence-Alpes-Côte d'Azur l'année dernière ou les récents évènements en Ile-de-France, je songe à la grève sur la ligne du RER A, ont montré que la loi de 2007, nécessaire, n'était pas suffisante pour garantir les droits constitutionnels de liberté de circulation et de liberté d'accès aux services publics.

Le respect minimum dû aux usagers est constitutionnellement reconnu à travers la continuité du service public. La Constitution précise que le droit de grève s'exerce dans le cadre de la loi : il n'est pas absolu mais relatif, fonction du domaine où il s'exerce. Il existe du reste un service minimum dans les secteurs du nucléaire, de l'audiovisuel, de la santé, du contrôle aérien. La distinction actuelle privilégie les Français d'en haut, ceux qui prennent l'avion, sur les Français d'en bas, soumis aux aléas des transports terrestres...

Considère-t-on ou non que les transports publics terrestres sont essentiels pour le pays et pour les Français ? Pauvres usagers, oubliés permanents, otages des conflits du travail dont ils sont les premières et principales victimes. Qui pense à eux ?

M. Louis Nègre.  - Je rappelle qu'en cas de grève de la totalité du personnel, les usagers ne bénéficient même plus d'un minimum de service ! En Europe, des pays tout aussi démocratiques que la France ont choisi un régime plus favorable aux usagers. En Allemagne ou en Autriche, la grève est interdite aux salariés de la fonction publique. Solution excessive compte tenu de notre culture ? Mais en Italie ou en Espagne, le droit de la communauté aux prestations vitales -dont le transport- est prioritaire sur le droit de grève.

Les intérêts particuliers de quelques centaines d'employés s'imposent-ils à un million de voyageurs qui ont droit au respect de leur dignité et de leur droit au travail ? Les usagers doivent-ils être pris en otage par une infime minorité de travailleurs qui ont des droits mais aussi des devoirs ?

La récente grève a durement pénalisé des centaines de milliers de Français. Est-ce normal et légitime ? Non. Ce dysfonctionnement majeur l'illustre, la loi de 2007 ne sanctionne pas le déséquilibre manifestement excessif entre deux principes constitutionnels de même niveau, ni le déséquilibre entre une infime minorité qui fait peser une contrainte excessive sur une énorme majorité. Les sans-grade, le vulgus pecum ne méritent pas une telle indifférence. Il appartient donc au législateur de faire évoluer cette loi dans un sens plus équitable.

Sans aller à contester le droit de grève comme en Autriche ou en Allemagne, sans aller jusqu'à la réquisition par les préfets des salariés du secteur, mais pour tenir compte de l'état de souffrance et d'abandon des usagers, des naufragés des transports publics, je propose six mesures : prévoir pour les grèves de moins d'une heure une retenue financière égale au montant dû pour la durée totale du service ; confirmer par la loi la jurisprudence considérant comme illicites les grèves tournantes ; fixer la déclaration à 48 heures avant le début théorique de la grève et non 48 heures avant le moment de la participation personnelle du salarié ; dans les mouvements de grève nationaux, supprimer l'alarme sociale pour ne conserver que le préavis de cinq jours et la procédure de déclaration des grévistes ; fixer plus précisément les limites des grèves émotionnelles pour éviter les abus du droit de retrait. L'alternance répétée, à l'intérieur d'une période couverte par un préavis, d'arrêts de travail et de reprises d'activité par un même salarié est interdite.

M. Teston a demandé quel était l'objectif du groupe UMP : c'est de défendre le peuple ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jacques Gautier.  - Il me semble que certains refont ce soir le débat de 2007. Certes, le matériel vieillit et le confort laisse à désirer, oui, il y a des efforts à faire.

M. Yvon Collin.  - Très bien !

M. Jacques Gautier.  - Mais ce n'est pas le sujet d'aujourd'hui. Après deux ans d'application, nous faisons le bilan de la loi sur le dialogue social et la continuité du service public de transport. Ce texte visait, tout en respectant le droit de grève, à permettre aux usagers de se déplacer, d'aller travailler et de rentrer chez eux. Le bilan est globalement positif. Par exemple, le 29 janvier 2009, 35 % des salariés de la SNCF ont fait grève mais 50 % des trains ont circulé. Le renforcement du dialogue social a aussi évité des grèves. Mais les arrêts de travail de 59 minutes à répétition et les évènements sur la ligne A du RER ont montré que le service garanti est insuffisant. Entre le 10 et le 27 décembre, un million de Franciliens ont subi la plus longue grève depuis 1995. Ils se sont rabattus sur les trains, forcés de partir très tôt et de rentrer très tard. Certains n'ont pas pu se rendre à leur travail. La paralysie a été évitée, sans doute grâce à la loi, mais les plus modestes ont été pris en otages et le service public n'a pas été à la hauteur de ce que nous sommes en droit d'attendre. Dans une conjoncture économique difficile, et au moment des fêtes, les répercussions ont été lourdes pour les entreprises et les commerçants. La RATP a perdu 5 millions d'euros, les entreprises commerciales, 50. Ce n'est pas acceptable. En outre, en Ile-de-France, le partage des transports entre SNCF et RATP pénalise encore plus les usagers. La commission du Grand Paris vient d'être mise en place. La double boucle de transports en commun prévoit un pilotage automatique dont quelques techniciens pourraient à eux seuls perturber le fonctionnement !

La loi de 2007 ne prend pas en compte le transport aérien ni la desserte maritime des îles le long des façades maritimes. Mais les grèves dans le secteur aérien comme sur la liaison Corse-continent ont montré que la loi doit englober ces services.

Mme Catherine Procaccia.  - Merci !

M. Jacques Gautier.  - Il convient de rappeler les devoirs de chacun et de faire respecter le droit constitutionnel des usagers. Ils paient mais sont pénalisés. C'est pourquoi j'ai cosigné la proposition de loi de Mme Procaccia Nous comptons sur votre soutien, monsieur le ministre, pour faire progresser ce texte. (Applaudissements à droite)

M. Philippe Dominati.  - Je rends moi aussi hommage à Mme Procaccia.

Je suis un peu gêné, car j'ai un discours de 142 pages... (Marques d'étonnement) Je suis un élu parisien et comme à Paris, il n'existe pas de presse régionale, c'est dans un grand quotidien national qu'il faut chercher des informations sur ce que vit chaque jour l'usager francilien des transports en commun.

J'ai donc relevé, dans un journal populaire uniquement consacré à l'Ile-de-France, 142 articles consacrés aux grèves dans les transports. Je n'y retrouve pas les chiffres que je viens d'entendre. Vous parlez de 3 % de grève dues à des dysfonctionnements, mais cela correspond à 56 pages sur 142 pour le lecteur ! Soit, il y a des problèmes d'investissement, mais un article est publié tous les deux jours sur les problèmes de transport collectif, dont trois fois en « une » le mois passé, voilà la réalité pour 12 millions de Franciliens ! (Applaudissements à droite)

Mme Raymonde Le Texier.  - Ridicule !

M. Philippe Dominati.  - Je vous épargne la lecture d'extraits de ce dossier de presse, mais je le tiens disponible pour ceux qui veulent en savoir plus en attendant la création de l'observatoire.

Je veux d'abord dénoncer l'attitude de connivence de nos collègues de l'opposition nationale et régionale avec les syndicats. Ils s'étonnent de l'apparition d'un tel débat aujourd'hui avant de se plaindre du manque d'investissements pour défendre aussitôt le service public. Mais leur vision des transports, c'est le monopole, comme pour le ministère ! Nous serons en 2038 la seule région d'Europe à conserver le monopole, au prix d'une exception sur le territoire national. Avec le monopole, vous vous interdisez de trouver de nouveaux moyens en refusant la liberté du marché, ce qui pousse le législateur à adopter des lois de plus en plus sévères. Nous avons commencé avec une loi sur le service minimum d'inspiration libérale.

Mme Raymonde Le Texier.  - Nous avions remarqué !

M. Philippe Dominati.  - C'est un texte que nous défendons ardemment depuis le gouvernement Jospin, M. Huchon était déjà président de la région alors. En fait, il y a une réelle incohérence entre vos propos pour la défense des usagers et votre complicité avec les syndicats pour créer des dysfonctionnements. En Ile-de-France, nous pourrions séparer les réseaux des transports ferroviaires et des transports de surface. Pourquoi un monopole pour avoir le droit de conduire des bus ? Ce système a été hélas maintenu depuis des années par les gouvernements. Monsieur le ministre, vous tentez habilement de nous faire croire que vous avez une vision libérale des transports. En réalité, vous partagez la vision rétrograde de l'opposition ! (Rires francs à gauche) Ce n'est pas d'une loi sur le service minimum dont nous avons besoin, mais d'une loi sur le service maximum !

M. Louis Nègre.  - Bravo !

M. Philippe Dominati.  - Merci à Mme Procaccia de nous avoir invités à ce débat. Le meilleur moyen de ne pas remettre en question la liberté syndicale, comme certains le craignent, est d'ouvrir le marché. Car, nous l'avons vu, quand le marché est libéralisé, cela fonctionne ! La même remarque vaut pour les aiguilleurs du ciel, que nous avons déjà évoqués dans cet hémicycle. La France est un des deux seuls pays d'Europe à leur accorder un statut si particulier. Bref, en matière de transports, le Gouvernement n'est pas assez audacieux ! (Applaudissements à droite)

M. Serge Dassault.  - (Marques d'encouragement à droite) Le service minimum dans les services publics n'est jamais appliqué, faute d'avoir défini la notion, en particulier concernant les transports. Les grèves étant odieusement déclenchées quand elles créent le plus de problèmes -je pense au début des vacances-, le service minimum est soit inutile, soit inapplicable.

Soit, le droit de grève est reconnu dans la Constitution, mais à condition de s'exercer « dans le cadre des lois qui le réglementent ».

M. Louis Nègre.  - Exact !

M. Serge Dassault.  - Or rien n'a été fait. On ne devrait pas tolérer les grèves des étudiants et des lycéens, et encore moins celle des professeurs ! Résultat, la grève est devenue un moyen de pression non seulement contre l'employeur, mais aussi contre le Gouvernement. C'est inadmissible ! Une grève a même débouché sur l'annulation de la loi sur le contrat première embauche, qui donnait une chance intéressante aux jeunes. Donner le pouvoir à la rue contre les parlementaires, c'est ouvrir la voie à l'anarchie et à la révolution. (Sarcasmes à gauche ; sourires entendus à droite)

Mme Raymonde Le Texier.  - Vive la chienlit !

M. Serge Dassault.  - Les grèves devraient être interdites dans le public, et sérieusement encadrées dans le privé. Aux États-Unis, des grèves ont été déclarées illégales et les syndicats sérieusement sanctionnés.

Mme Raymonde Le Texier.  - Sortez la guillotine !

M. Serge Dassault.  - Les mouvements de grèves devraient être individuels afin que personne ne soit empêché d'aller travailler. Pour ce faire, il faudrait interdire les piquets de grève, les occupations d'usine et d'université.

Bref, pour protéger la démocratie, il faut encadrer sérieusement le droit de grève, sanctionner les syndicats qui appellent à des grèves politiques et faire comprendre aux salariés que les grèves se retournent toujours contre eux, que leur intérêt est de travailler...

Mme Raymonde Le Texier.  - Que de clichés !

M. Serge Dassault.  - ...car les clients mécontents des grèves iront s'approvisionner ailleurs. Les syndicats, loin de défendre les intérêts des salariés compromettent leur avenir. Il nous faut une véritable réglementation du droit de grève, en parfait accord avec notre Constitution ! (Applaudissements sur la plupart des bancs à droite)

M. Jean Bizet.  - La loi du 21 août 2007, en conciliant droit de grève et continuité dans les services publics, nous a permis de franchir un cap. Depuis, les journées de grève ont été diminuées par deux, notamment grâce à la mise en place des demandes de concertation immédiate rendues obligatoires par la SNCF. Pour autant, des dysfonctionnements persistent et ceux-ci apparaissent d'autant moins supportables qu'ils se superposent, dans certaines régions, à une diminution de la qualité et du confort des infrastructures et des matériels roulants.

A la lecture du rapport d'information de MM. Kossowski et Bono, trois points m'apparaissent essentiels. Tout d'abord, le détournement de la loi au moyen des grèves de courte durée -celles inférieures à 59 minutes, à seule fin de désorganiser le trafic- et d'une utilisation abusive du droit de retrait, inscrit à l'article L. 4131 du code du travail. Contrairement à nos collègues députés, j'estime que ces abus, intolérables, doivent être sanctionnés, sinon la loi sur le service minimum perd beaucoup en lisibilité. Ensuite, il est indispensable d'obtenir l'engagement de négociations collectives pour garantir le service du soir lorsque le service du matin a été assuré et interdire tout nouveau préavis avant l'expiration des négociations engagées. Enfin, il faut poursuivre la politique de décentralisation de la SNCF, ce qui n'enlèvera rien à l'autorité de son président.

L'Ile-de-France n'est pas seule concernée par la diminution du confort, de la fiabilité et de la sécurité des lignes. Ainsi, monsieur le ministre, malgré les propositions que vous aviez faites lors de votre déplacement à Caen le 6 avril dernier, la SNCF continue de sacrifier délibérément la ligne Paris-Granville. La Basse-Normandie a dû investir les 150 millions nécessaires à l'achat du matériel roulant devant équiper la ligne à partir de 2013, la SNCF s'y refusant au prétexte que la ligne est déficitaire à hauteur de 7 à 8 millions chaque année. Comment pourrait-il en être autrement ? La SNCF oublie, tel jour, de mettre du carburant dans la motrice, tel autre, de prévoir un conducteur ou encore une rame supplémentaire les jours d'affluence. Ainsi, le 3 janvier, 75 personnes ont été prises en otage durant deux heures en gare d'Argentan, le temps que l'on récupère une rame venant de Granville.

Où en est le projet de fonds de péréquation ? Investira-t-on 2 milliards d'euros par an comme Mme Idrac l'a annoncé en 2007 pour que les motrices n'aient pas plus de cinq ans d'ancienneté ? Ancienneté ne rime pas nécessairement avec vétusté, mais sur la ligne Paris-Granville le matériel tombe régulièrement en panne...

Pardon de m'être écarté du sujet, mais si l'on ajoute à la faible qualité des infrastructures et du matériel sur certaines lignes l'abus du droit de grève et des grèves courtes, on constate que la qualité du service public s'est dégradée. La loi du 21 août 2007 est une bonne loi, mais si elle continue d'être détournée il faudra l'amender. Les salariés de la SNCF ont le droit de faire grève, mais ils ont surtout le devoir de respecter les usagers. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - Je vous remercie pour la qualité de vos interventions. La loi du 21 août 2007 n'a pas d'autre objet que le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs. Ce texte d'un esprit nouveau a été élaboré par M. Bertrand et moi-même afin d'inciter les partenaires sociaux au dialogue et de prévenir ainsi les conflits.

Il impose une concertation préalable à tout préavis de grève. Cette mesure a fait la preuve de son efficacité : 80 % des entreprises de transports publics urbains appliquent cette procédure qui a permis d'éviter un préavis de grève dans 40 % des cas. A la RATP, évoquée par M. Dominati avec amour, le nombre de préavis est passé de 180 en 2003 à 59 en 2008 et 80 en 2009, si l'on excepte le mois de décembre. A la SNCF, il a baissé de 30 % par rapport à 2007. Ce dispositif joue également son rôle au niveau local : mise à part la longue grève scandaleuse de Provence-Alpes-Côte-d'Azur...

M. Louis Nègre.  - Merci d'en faire état !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État.  - ...le nombre de journées de grève a baissé de moitié en 2009 par rapport à 2007.

En outre, la loi encadre l'exercice du droit de grève en imposant une déclaration individuelle d'intention 48 heures à l'avance, ce qui permet à la direction de s'organiser : c'est le volet « prévisibilité et continuité » de la loi.

Enfin les usagers, ou plus exactement les clients, puisque ceux qui empruntent les transports publics, leurs employeurs et les contribuables paient ce service, (marques d'approbation à droite) ont droit à une information gratuite, précise et fiable en cas de perturbation. L'entreprise de transport doit élaborer un plan d'information des voyageurs et leur faire connaître le niveau de service assuré au plus tard 24 heures à l'avance. Ce fut le cas lors des grèves nationales des 22 mai 2008 et 29 janvier 2009 : la SNCF a alors assuré strictement le service annoncé. A la RATP, lors de la plupart des grèves qui ont eu lieu en 2009, un plan de transport et d'information des voyageurs a été élaboré et les engagements de service respectés ; dans les six cas où la RATP a été jugée responsable de n'avoir pas assuré de service minimum, les clients ont été remboursés, ce qui lui a coûté près de 2 millions d'euros.

En dehors de l'Ile-de-France, les autorités organisatrices des transports se sont également impliquées dans la mise en oeuvre de la loi. Je regrette que certaines régions se soient montrées rétives pour des raisons politiques.

Ce premier bilan montre donc que la loi a répondu aux objectifs initiaux. (M. Louis Nègre se montre dubitatif) Certains en attendaient l'impossible : si tous les agents exercent leur droit de grève, il est évident que les services ne peuvent pas fonctionner. C'est pourquoi plusieurs d'entre vous ont émis le souhait que cette loi soit complétée.

Madame Procaccia, vous avez proposé que ses dispositions soient étendues aux secteurs maritime et aérien. En 2008 et 2009 les liaisons maritimes intérieures de passagers n'ont pas connu de perturbations, hormis pour la desserte de la Corse. Dans ce dernier cas, l'effet des grèves à la Société nationale maritime Corse-Méditerranée (SNCM) et à la Compagnie méridionale de navigation (CMN) a été atténué par l'existence de compagnies concurrentes comme Corsica Ferries, aujourd'hui majoritaire. (M. Philippe Dominati le confirme) Il n'existe aucune procédure formalisée pour prévenir les conflits sociaux, mais la loi du marché pénalise les entreprises où ces derniers sont trop fréquents. D'ailleurs la convention de délégation de service public avec la SNCM précise qu'« en cas de conflit social chaque délégataire s'efforce de parvenir par la négociation à un règlement amiable du conflit, ou à défaut de mettre en place (...) un service réduit répondant aux besoins essentiels de l'île ». A la CMN, l'accord de prévention des conflits internes signé en 2006 avec les syndicats est toujours en vigueur. Toutes les petites entreprises qui participent à la desserte de nos îles -non seulement la Corse, mais aussi les îles du Ponant et les autres- entretiennent un dialogue social permanent.

Dans le secteur aérien, trois activités pourraient être concernées par cette extension. Pour ce qui est du transport public aérien, les notions de « transport public » et de « service public » ne se confondent pas au regard de la loi d'organisation des transports intérieurs du 31 décembre 1982. En vertu de la réglementation européenne, le transport public aérien est entièrement libéralisé depuis 1997 ; les transporteurs exploitent les lignes dans un cadre commercial. Seules pourraient être concernées par une extension de la loi du 21 août 2007 les entreprises exploitant des liaisons sous obligation de service public -celles qui sont destinées à éviter l'isolement de la Corse, des départements et territoires d'outre-mer et de Mayotte- et le personnel nécessaire à leur exploitation.

Quant à la navigation aérienne, son personnel est composé de fonctionnaires d'État dont le droit de grève est régi par la loi du 31 décembre 1984 et le décret en Conseil d'État du 17 décembre 1985. Cette loi permet à l'administration de maintenir en fonctions un certain nombre d'agents pour garantir l'exercice de missions régaliennes et un niveau minimum de trafic, ce qui constitue un véritable pouvoir de réquisition. Le décret donne la liste des aéroports concernés et fixe à 50 % le seuil minimum de trafic. Ces dispositions s'appliquent ce soir même. Mais les grévistes ne sont pas obligés de se déclarer à l'avance, ce qui rend difficile l'estimation du niveau de service et conduit parfois à annuler plus de vols que nécessaire. Peut-être faudrait-il modifier en ce sens la loi de 1984.

Enfin les missions de sûreté aéroportuaire peuvent, aux termes de l'article L. 213-3 du code de l'aviation civile, être assurées par des entreprises ou organismes agréés, dans le cadre de contrats conclus avec le gestionnaire d'aéroports. Les employés du gestionnaire sont eux-mêmes agréés par l'État et n'effectuent leurs tâches que sous les ordres des officiers de police judiciaire. La sûreté est une mission de police exercée en vue de l'intérêt général et les personnes qui y concourent participent à une mission de service public. Toute interruption de service étant susceptible de perturber gravement le transport aérien, le législateur pourrait juger opportun d'étendre la loi du 21 août 2007 au personnel des entreprises spécialisées dans ce domaine.

L'un d'entre vous a suggéré de porter le délai de déclaration individuelle d'intention de 48 à 72 heures. Mais le Conseil constitutionnel, dont on parle beaucoup ces jours-ci, a opéré dans sa décision du 16 août 2007 un rigoureux contrôle de proportionnalité et vérifié si certaines mesures ne portaient pas une atteinte injustifiée à l'exercice du droit de grève. Cette proposition intéressante pourrait donc poser problème au plan juridique.

Les règles de rémunération des agents de la RATP et de la SNCF n'étant pas celles applicables à la fonction publique, une retenue sur salaire ne peut s'écarter considérablement de la rémunération du travail non effectué sans encourir la censure du juge. Il faudra trouver un équilibre entre droit de grève et droit de chacun de circuler : la marge de manoeuvre est étroite.

En matière de droit de retrait, l'événement le plus spectaculaire a été la fermeture de la gare Saint-Lazare le 14 janvier 2009, tous les conducteurs ayant cessé le travail en réaction à l'agression d'un collègue. Ce type d'action n'est précédé d'aucune des procédures et formalités relevant de l'exercice du droit de grève dans les services publics, or elle produit des effets identiques à ceux d'un conflit collectif. Il en résulte une incertitude pour l'employeur qui entend sanctionner l'usage du droit de retrait pour un motif qu'il n'estime pas fondé. En 2008, la Cour de cassation a jugé que tant que les agresseurs n'avaient pas été arrêtés, l'exercice collectif du droit de retrait ne pouvait être sanctionné.

Un article de loi pourrait conditionner l'usage du droit de retrait à une exigence de proportionnalité entre l'usage individuel, voire collectif, de ce droit et les exigences de la continuité du service. Le but des grévistes est de prendre à témoin les clients : pourquoi ne pas envisager un droit de pétition, des gestes permettant aux clients de manifester leur solidarité, comme dans certains pays ? (M. Philippe Dominati ironise)

M. Dassault a suggéré l'opportunité d'encadrer le droit de grève dans les transports. Le droit de réquisition est fondé sur la loi du 11 juillet 1938 portant organisation générale de la Nation en temps de guerre, prolongée par l'ordonnance du 7 janvier 1959 portant organisation générale de la défense, (sourires) selon lesquelles le droit de requérir les personnes est ouvert au Gouvernement « en cas de menace portant notamment sur une partie du territoire, sur un secteur de la vie nationale ou sur une fraction de la population ». Une entreprise n'est donc pas habilitée à réquisitionner ses personnels grévistes.

En revanche, l'assignation au travail consiste pour l'employeur à désigner nominativement les salariés obligés de travailler pour assurer le service minimal au regard de l'ordre public, sous peine de sanctions disciplinaires. Ayant pour conséquence de restreindre le droit de grève, elle s'effectue sous le contrôle du juge. Sur la base du droit actuel, il est donc déjà possible de prévoir des dispositifs d'assignation et de maintien au service en cas de grève.

M. Gautier est revenu sur la grève récente du RER A. Cette ligne transporte environ un million de voyageurs par jour, d'où des problèmes de capacité. Le Président de la République a demandé des investissements importants, qui se traduiront par la mise en service de trains à deux étages à partir de 2011. La ligne E sera également prolongée jusqu'à Etoile.

M. Philippe Dominati.  - Cela fait vingt ans qu'on en parle !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État.  - Et c'est ce gouvernement qui le fait !

La grève a duré du 10 au 24 décembre 2009, dans des conditions météorologiques détestables. Le nombre des grévistes a atteint 90 à 95 % des effectifs. La substitution des personnels de maîtrise et d'encadrement aux conducteurs grévistes a cependant permis d'assurer environ 60 % des trains aux heures de pointe. Je rends hommage à leur dévouement.

Malgré l'ampleur de la grève, la RATP a tenu les engagements prévus par la loi du 21 août 2007 en garantissant un minimum de 50 % du trafic aux périodes de pointe et en assurant une information préalable des usagers. Dans ces conditions, elle n'est pas tenue à rembourser les usagers. Le président du Stif peut toujours le faire, s'il le souhaite...

Madame Le Texier, je ne partage pas votre point de vue sur la qualité des services rendus par la RATP. Jamais l'offre de services n'a été aussi développée, jamais les investissements n'ont été aussi importants : 450 millions au titre du plan de relance, modernisation des lignes, 60 rames ! En 2010, cet investissement massif se poursuit. On peut ne pas aimer la RATP, on ne peut pas ignorer cet effort.

M. Philippe Dominati.  - J'adore la RATP, comme tous les Parisiens ! Mais il faut la libérer pour qu'elle soit plus performante !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État.  - M. Bizet a évoqué le transport ferroviaire en région Basse-Normandie. Le Président de la République a annoncé une ligne nouvelle desservant les deux Normandies, avec Paris-Caen en 1 heure 30. Concernant la ligne Paris-Granville, je rends hommage au président Garrec, qui a mené d'importants travaux de modernisation. Toutefois, la suppression de certaines sections à deux voies était mal avisée. J'ai demandé au préfet de région de piloter les études sur les nouvelles infrastructures. Des crédits supplémentaires seront engagés par l'État dès 2010. Concernant le matériel, vos propos sont injustes : la SNCF va payer plus qu'initialement prévu.

De manière plus générale, le Gouvernement s'est engagé pour le financement pérenne des trains Corail, Corail intercités et trains de nuit, aujourd'hui déficitaires. L'État signera avec la SNCF une convention d'exploitation avant le 30 juin 2010.

La loi du 21 août 2007 n'a pas restreint le droit de grève. Elle respecte les droits des salariés, mais introduit un nouveau droit : celui des clients du service public à être dûment informés et dignement traités, en leur garantissant au moins un service minimum. Laissons-lui le temps de produire tous ses effets sur les relations sociales, notamment dans les grandes entreprises. Dans leur rapport d'information, MM. Kossowski et Bono relèvent qu'au terme d'une année d'application, la loi a atteint ses objectifs. En conséquence, le Gouvernement n'envisage pas de la modifier, mais reste attentif à vos propositions.

La diminution du nombre de préavis et de grèves est preuve de l'amélioration du dialogue social. C'est d'abord ce dialogue qu'il faut développer : sans doute aurait-il empêché qu'une grève s'éternise durant quatorze jours !

Attention à toute limitation des conditions d'exercice du droit de grève, constitutionnellement garanti. La loi n'a certes pas réglé toutes les difficultés. Elle n'est pas une assurance tout risque contre la grève, mais elle prône le dialogue, l'esprit de responsabilité et le respect des clients des services de transports, ce qui est déjà beaucoup. Si vous pensez que l'on peut faire mieux, le Gouvernement est à votre écoute. (Applaudissements à droite et au centre)

Prochaine séance demain, jeudi 14 janvier 2010, à 9 heures.

La séance est levée à 23 h 45.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du jeudi 14 janvier 2010

Séance publique

A 9 HEURES

1. Proposition de loi organique portant application de l'article 68 de la Constitution, présentée par MM. François Patriat et Robert Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés (n°69, 2009-2010).

Rapport de M. Jean-Jacques Hyest, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (n°187, 2009-2010).

2. Question orale avec débat n°53 de M. Jean-Louis Carrère à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, sur l'application de la loi n°2009-971 du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale.

M. Jean-Louis Carrère attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur l'application de la loi n°2009-971 du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale.

Les craintes alors exprimées concernant les conséquences du « rattachement » de la gendarmerie au ministère de l'intérieur sont hélas en voie de confirmation. La mutualisation des moyens entre la police et la gendarmerie, les synergies induites par le « rattachement » en matière de matériels et de formation mènent de manière rampante vers une fusion des forces, vers la force unique hors statut militaire.

La gendarmerie perdra 1 300 emplois en 2010 par l'application brutale de la révision générale des politiques publiques. Cette évolution, faite de réductions d'effectifs et de menaces de fermeture de brigades, est dangereuse pour le maillage du territoire et néfaste pour la présence de la gendarmerie auprès des populations rurales. Il apparaît que ce processus de « rattachement » et ses déclinaisons budgétaires conduisent progressivement au démantèlement du service public de la sécurité.

Il s'interroge sur la volonté du Gouvernement de maintenir et consolider le statut militaire de la gendarmerie. Il s'interroge sur la détermination du Gouvernement d'avoir une force de sécurité à statut militaire et une force de sécurité à statut civil et de laisser à l'autorité judiciaire le libre choix entre les deux services. Il est nécessaire de faire un bilan d'étape et une première évaluation des conséquences du rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur.

Il souhaite que la présente question orale avec débat permette de débattre des méthodes et des objectifs de la politique du Gouvernement à l'égard de la gendarmerie.

A 15 HEURES

3. Questions d'actualité au Gouvernement.

A 16 HEURES 15 ET LE SOIR

4. Proposition de loi relative à la création des maisons d'assistants maternels, présentée par M. Jean Arthuis et plusieurs de ses collègues (n°133, 2009-2010).

Rapport de M. André Lardeux, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°185, 2009-2010).

Texte de la commission (n°186, 2009-2010).

5. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux délais de paiement des fournisseurs dans le secteur du livre (n°125, 2009-2010).

Rapport de Mme Colette Mélot, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n°165, 2009-2010).

Texte de la commission (n°166, 2009-2010).

6. Suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à créer une allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie (n°223 rectifié, 2008-2009).

Rapport de M. Gilbert Barbier, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°172, 2009-2010).

Texte de la commission (n°173, 2009-2010).