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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.
Table des matières
Financement de la sécurité sociale pour 2009 (Conclusions de la CMP)
Revenu de solidarité active (Conclusions de la CMP)
Revenus du travail (Conclusions de la CMP)
Réforme de l'audiovisuel public
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement
Taux variable et endettement des communes
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi
Crise du secteur de l'automobile
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi
Lutte contre la grande pauvreté
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi
Dangers d'internet pour les enfants
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille
Rachat de British Energy par EDF
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi
Modes de transport alternatifs
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports
Mise au point au sujet d'un vote
Loi de finances pour 2009 (Deuxième partie)
Écologie, développement et aménagement durables (et articles 60 et 61)
Article additionnel avant l'article 60
SÉANCE
du jeudi 27 novembre 2008
30e séance de la session ordinaire 2008-2009
présidence de M. Roland du Luart,vice-président
La séance est ouverte à 9 h 40.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Financement de la sécurité sociale pour 2009 (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
M. Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire - Nous voici réunis dans l'intimité -il est vrai que les parlementaires sont très sollicités par les temps qui courent- pour examiner les conclusions de notre commission mixte paritaire.
Le projet de loi de financement, qui comprenait initialement 80 articles, en comporte aujourd'hui 121. Il a donné lieu à des débats d'une grande richesse, notamment au sein de notre assemblée qui, comme chaque année, a contribué à améliorer le texte en adoptant pas moins de 119 amendements, dont 60 à l'initiative de notre commission des affaires sociales.
Plusieurs amendements du Gouvernement ont également été adoptés dans le but, pour la majeure partie d'entre eux, de rectifier les équilibres du projet de loi de financement. C'est en effet devant le Sénat que le Gouvernement a annoncé de nouvelles prévisions économiques pour 2009 et 2010. La croissance est désormais fixée à 0,5 % en 2009 et la progression de la masse salariale est ramenée à 2,75 %. Au total, le déficit prévisionnel du régime général pour 2009 est donc aggravé de 1,9 milliard et les perspectives d'équilibre des comptes sont repoussées de 2012 à 2013, voire 2014.
Pour la première fois, un débat thématique a été organisé cette année. Nous avons mis l'accent sur l'hôpital, notamment pour tirer les enseignements des nombreuses réflexions menées récemment sur ce sujet, à commencer par le rapport de la mission conduite, à la demande du Président de la République, par M. Gérard Larcher et par les travaux de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) que j'ai l'honneur de présider. Nous avons aussi fait le point sur le projet de loi « hôpital, patients, santé, territoires » que nous examinerons bientôt : chaque groupe s'est exprimé, dix questions précises ont été posées.
Malgré leur grand intérêt, l'organisation de nos travaux a été difficile, et c'est pourquoi je réitère mon souhait d'examiner le PLFSS une semaine entière et d'un seul bloc. Les débats de ces deux dernières années confirment le bien-fondé de cette demande. J'en viens à nos travaux.
A l'issue de la lecture au Sénat, 75 articles restaient en discussion. La commission mixte paritaire est parvenue mardi à un accord sur ces dispositions. Elle a maintenu la suppression de deux articles par le Sénat, adopté 48 articles dans notre rédaction et trois dans celle de l'Assemblée nationale, et supprimé deux articles introduits par le Sénat. Elle a enfin élaboré un nouveau texte pour 20 articles, dont cinq méritent d'être mentionnés.
Ainsi, la commission mixte paritaire a supprimé la compensation à l'euro près des dépenses exposées par la Cnam au titre de la couverture maladie universelle complémentaire, introduite à l'article 12. Dans cette affaire, nous avons cédé à la pression amicale exercée par le Gouvernement sur l'Assemblée nationale et le Sénat, dont les deux commissions souhaitaient une compensation intégrale. Nous attendrons le retour de la conjoncture à meilleure fortune...
Conformément à notre souhait, la CMP a étendu le forfait social de 2 % aux primes exceptionnelles versées dans le cadre des accords d'intéressement. Ainsi, la non-compensation sera partiellement atténuée.
Par ailleurs, la commission mixte paritaire a rétabli à l'article 15 la surtaxe sur les alcools forts, introduite par l'Assemblée nationale mais supprimée au Sénat.
L'article 52 bis A, introduit par notre assemblée à l'initiative de Dominique Leclerc, demandait qu'un rapport soit élaboré sur l'éventuelle introduction d'un régime de retraite s'inspirant des comptes notionnels suédois. La CMP en a confié l'élaboration au conseil d'orientation des retraites (COR) plutôt qu'à la commission de garantie des retraites.
Enfin, la CMP a modifié dans un sens plus équilibré l'article 72 bis, introduit à l'initiative d'André Lardeux, afin de recentrer le crédit d'impôt famille sur l'accueil des jeunes enfants.
Je voudrais maintenant résumer les apports considérables du Sénat au projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ils concernent toutes les branches de la sécurité sociale.
Ainsi, nous avons mieux encadré la taxation des parachutes dorés d'un montant élevé. La CMP nous a suivis. Il en fut de même pour l'instauration d'une visibilité sur trois ans de la taxation des entreprises pharmaceutiques, souhaitée par notre collègue Jean-Jacques Jégou, qui a dû se battre.
Je crois important de souligner les modifications importantes introduites par le Sénat dans la quatrième partie, relative aux dépenses pour l'année 2009.
Ainsi, diverses mesures accompagnent le redressement financier des établissements de santé, prolongeant ce que nous avions adopté l'année dernière, pour franchir une nouvelle étape. En effet, il n'est plus possible de repousser encore l'amélioration de la situation financière des hôpitaux. Ainsi, nous avons accéléré, contre l'avis du Gouvernement, la facturation directe à l'assurance maladie des dépenses résultant de prescriptions médicales, en espérant que les services ministériels pourront faire diligence afin de d'obtenir des résultats en six mois.
Comme l'a expliqué M. About, l'indication du prix de revente des dispositifs médicaux dans les devis établis par les médecins et les chirurgiens rendra plus transparente la fixation du prix des prothèses, en appliquant un principe appliqué l'an dernier aux audioprothésistes. Reste l'indication d'origine géographique, mais ce sujet relève d'accords internationaux. Nous attendons du Gouvernement qu'il agisse en ce domaine.
L'intégration des dépenses de médicaments dans le forfait soins des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) répond aux préconisations de notre mission d'information commune sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque.
En matière d'assurance vieillesse, le Sénat a notamment précisé les conditions permettant au personnel navigant technique ou commercial de poursuivre son activité au-delà des limites actuelles. Nous n'avons pas voulu aller au-delà des engagements signés avec les partenaires sociaux, mais je regrette que 117 pilotes soient sacrifiés sur l'autel de la négociation, la nouvelle mesure n'entrant pour eux en application que le 1er janvier 2010 au lieu du 1er janvier 2009, parce que les accords n'ont pas été signés en temps et en heure, privant ainsi les pilotes pendant un an des dispositions applicables aux PNC. Le Gouvernement ne peut-il trouver une solution ? Je sais que M. Jégou partage ce point de vue.
Nous avons enfin consolidé l'extinction progressive des indemnités temporaires de retraite outre-mer.
Outre le recentrage du crédit d'impôt famille, le Sénat a adopté deux modifications concernant la branche famille. Ainsi, un plafond horaire remplacera le plafond journalier limitant la prise en charge par la Paje des cotisations sociales des assistantes maternelles. Ce dispositif aidera tout autant les parents et rémunérera au moins aussi bien les assistantes maternelles.
Par ailleurs, le regroupement des assistantes maternelles est limité à quatre.
Pour conclure, je me félicite de l'excellent climat de nos débats et du dialogue fructueux noué avec le Gouvernement, alternativement représenté par cinq ministres. Je remercie les rapporteurs et tous les orateurs, sans oublier les présidents de séance qui ont dirigé nos débats.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale a pris beaucoup d'ampleur dans son nouveau cadre organique. Il répond largement à nos souhaits, ce qui est pour nous une source de grande satisfaction. Nous avons esquissé des pistes d'amélioration. Votre commission des affaires sociales sera aux côtés du Gouvernement pour en assurer la réalisation.
Au nom de la commission des affaires sociales, je vous demande d'adopter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 dans la rédaction de la commission mixte paritaire. (Applaudissements à droite et au centre)
M. le président. - Je vous remercie pour vos propos fort civils.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. - Ce projet de loi, sur lequel un accord est intervenu mardi en commission mixte paritaire, a en effet été enrichi par de nombreux amendements à l'Assemblée nationale et au Sénat.
En matière d'assurance maladie, la généralisation de la facturation directe des hôpitaux est fixée au 1er juillet 2011, ce qui représente un objectif ambitieux vu les délais exigés par cette réforme complexe dans tous les établissements de santé. Elle sera expérimentée dès l'année prochaine.
Vous avez aussi sensiblement recentré le crédit d'impôt famille au service de la garde d'enfant, conformément à sa vocation initiale. Vous l'avez porté de 25 % à 50 % pour les crèches d'entreprises, en prévoyant une sortie progressive des dépenses de congés parentaux et de maternité, ce qui améliore son efficacité. Je vous présenterai tout à l'heure un amendement technique à ce propos.
Vous vous êtes mis d'accord pour augmenter la cotisation sur les alcools forts, votée contre l'avis du Gouvernement à l'Assemblée nationale, et que vous aviez supprimée. Prenant acte de votre sagesse, je vous proposerai tout à l'heure d'en tirer les conséquences sur les prévisions. Le déficit du régime général de la sécurité sociale atteindrait donc 10,5 milliards d'euros en 2009, après 9,3 milliards cette année.
Je vous proposerai par ailleurs de réévaluer de 100 millions d'euros les crédits budgétaires affectés à la compensation des exonérations, pour les porter à 3,5 milliards compte tenu des débats sur le projet de loi de finances à propos de la mission « Travail et emploi ».
Le Gouvernement veut clarifier encore les relations financières entre l'État et la sécurité sociale. Cette budgétisation sincère en est un élément fort. Les crédits ouverts et les apurements de dettes dans le projet de loi de finances rectificative pour 2008 sont un autre signe tangible de cette volonté, puisque l'État y consacrera 1,7 milliard.
Le Gouvernement sera également très attentif à la situation financière et à la gestion de trésorerie de la sécurité sociale. La reprise de la dette sociale par la Cades commencera dès le mois prochain, à hauteur de 10 milliards d'euros. Cette reprise anticipée améliorera plus rapidement la trésorerie de l'Acoss, réduisant par là-même la pression sur le marché des liquidités à court terme, si tendu dans la période actuelle.
Ce projet de loi conforte et diversifie le financement de la sécurité sociale. Il donne à notre système de santé les moyens de se moderniser et renforce l'efficacité du recours aux soins.
Nous prévoyons avec réalisme une baisse des recettes pour tenir compte de la forte dégradation de la conjoncture, et donc un déficit conjoncturel plus important en 2009. Les efforts structurels vont cependant se poursuivre pour parvenir à maîtriser durablement les dépenses : l'Ondam devra être tenu à 3,3 % ; j'y veillerai tout au long de l'année avec M. Woerth.
Nos débats ont été cette année un peu particuliers, puisque nous allons bientôt débattre du projet de loi fondateur « hôpital, patients, santé, territoires ». Certains de ses aspects ont été discutés de façon anticipée, notamment lors de nos très riches échanges sur l'hôpital. Les deux textes sont complémentaires ; il faut en effet trouver les moyens financiers de mieux articuler l'hôpital avec, en amont, les soins ambulatoires, et, en aval, le médico-social. Mesures financières et mesures structurelles doivent se compléter si nous voulons préparer notre système de soins aux dix années qui viennent.
Je remercie les rapporteurs, tout particulièrement M. Vasselle, et le président de la commission, en soulignant l'esprit de responsabilité qui a présidé à nos débats. J'invite le Sénat à adopter ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements à droite)
M. Guy Fischer. - Ce texte est marqué par le refus du Gouvernement et de la majorité de permettre à notre système de protection sociale d'assurer sa survie et par la généralisation de l'individualisation des rapports sociaux. En autorisant les salariés qui le souhaiteraient à travailler au-delà de l'âge légal de départ à la retraite, vous avez franchi un pas décisif.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Croyez-vous à ce que vous dites ?
M. Guy Fischer. - L'individualisation des rapports sociaux est votre credo, vous ne cessez de réduire les droits et protections collectifs comme vous aviez commencé à le faire en 1993. Vous multipliez les mécanismes d'intéressement et de participation qui dispensent les employeurs d'augmenter les salaires. Après avoir individualisé les conditions de travail, vous individualisez tout naturellement les conditions d'accès à la retraite. Vous autorisez maintenant les hôtesses et stewards à travailler jusqu'à 55 ans, les pilotes jusqu'à 65 et tous les salariés jusqu'à 70, mettant ainsi en place un processus insidieux...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. - Mais non !
M. Guy Fischer. - ... et plutôt intelligent...
M. Nicolas About, président de la commission. - Mais oui !
M. Guy Fischer. - ... qui aboutira à repousser l'âge légal de départ à la retraite. Vous parlez de liberté, mais la réalité est plus douloureuse, celle de ces millions d'hommes et de femmes qui ne parviennent pas, après une vie de travail, à vivre de leur retraite. Est-on libre lorsqu'on est obligé de continuer à travailler pour se garantir le minimum, pour boucler ses fins de mois, pour repousser le moment où on va plonger dans la précarité ? On a vu récemment dans un reportage ce qui se passe aux États-Unis : des retraités de plus de 80 ans contraints pour survivre à de petits boulots. Dans le débat, le Gouvernement a fait état du souhait de salariés de continuer à travailler ; cette situation existe, certes, mais elle est minoritaire.
Un jour, la retraite à 70 ans ne sera plus un choix, mais une obligation. Votre politique a échoué. Parce que le Gouvernement est incapable de garantir une retraite digne aux salariés de notre pays, il leur permet de la cumuler avec un emploi. Il leur dit en substance : « la sécurité et la dignité que l'État n'est pas capable de vous garantir, construisez-la vous-même ». Ainsi le champ de la solidarité nationale est-il réduit au bénéfice du chacun pour soi ; ainsi ceux qui n'auront pas souscrit à votre projet volontaire de départ retardé à la retraite seront-ils considérés comme les seuls responsables de leur situation. Il y a pour vous une pauvreté méritante et une pauvreté méritée.
En réalité, nous le savons, cette disposition n'est qu'une étape dans le processus de l'allongement de la durée de cotisations, un processus qui a commencé avec le passage à 41 annuités d'ici à 2012 et se poursuit, avec ce texte, par la mort organisée du dispositif des carrières longues. Certes, les trimestres rachetés seront pris en compte dans le calcul de la pension, mais jusqu'à quand ? Ces cinq ans de plus, aujourd'hui volontaires, seront demain obligatoires, nous en sommes convaincus. Il s'agit de déshabituer les Français à la règle du départ à la retraite à taux plein à 60 ans.
Durant les débats, nous vous avons fait des propositions qualifiées d' « utopiques » : retour aux 37,5 annuités, taux de remplacement correspondant à 85 % du salaire brut, indexation des pensions sur les salaires, augmentation du minimum contributif jusqu'au-delà du seuil de pauvreté, refonte de l'assiette des cotisations. Vous les avez toutes refusées. Votre contre-réforme sociale aura un coût pour l'assurance maladie, et pèsera sur l'emploi des plus jeunes. Je veux enfin noter votre incohérence (M. Alain Vasselle, rapporteur, s'étonne) : vous dites vouloir favoriser l'emploi des seniors, mais vous renoncez à sanctionner les entreprises ; pire, lorsque l'État est employeur, il masque ses plans sociaux par des départs volontaires et des départs à la retraite anticipée -comme il le fait dans l'audiovisuel public dans le seul but de réduire la masse salariale.
J'en viens au triste sort que vous réservez à l'hôpital public. L'article 40 du projet de loi de financement prévoit de mettre sous la tutelle du directeur de l'ARH, et demain de l'ARS, les établissements en déficit qui n'auraient pas accepté d'élaborer un plan de redressement, ou ceux qui, l'ayant élaboré, ne seraient pas parvenus à rétablir leur situation financière. Cet article préfigure les objectifs de la loi « hôpital, patients, santé, territoires ». Nous continuons à dénoncer le passage à la tarification à l'activité à 100 % -aucun pays de l'Union européenne n'est allé aussi vite aussi loin- et la convergence public-privé, qui ont plongé les établissements publics de santé dans une situation insoutenable. Ils ont dû faire face, hier, à des dotations globales insuffisantes ; il leur faut aujourd'hui supporter les règles d'une mise en concurrence avec le secteur privé à but lucratif, qui n'applique pas les mêmes règles de fixation des coûts et n'est pas assujetti aux mêmes contraintes qu'eux. Les présidents des comités consultatifs médicaux de l'APHP ont lancé un cri d'alarme : « la politique déployée sur nos hôpitaux depuis plusieurs mois ressemble de plus en plus à un étranglement financier pur et simple ». Votre seule réaction aura été cet article 40, dont l'une des dispositions les plus scandaleuses est de sanctionner personnellement les directeurs qui ne seraient pas parvenus à rétablir l'équilibre financier de leur établissement.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Vous travestissez la vérité !
M. Guy Fischer. - Le débat sur l'hôpital reviendra au premier rang de l'actualité, ne serait-ce qu'à cause des suppressions d'emplois à venir.
Je vais conclure.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - On ne se lasse pas de vous entendre ! (Sourires)
M. Alain Vasselle, rapporteur. - C'est un vrai bonheur !
M. Guy Fischer. - J'en viens aux complémentaires.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - En défenseur de l'assurance privée, monsieur Fischer !
M. Guy Fischer. - Vous avez assuré que les cotisations d'assurance complémentaire n'augmenteraient pas.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - J'ai répété l'engagement du président des mutuelles. Vous ne croyez pas M. Davant ?
M. Guy Fischer. - Ce n'est pas cela, c'est seulement que je vois la lettre que le groupe Apicil a écrite à ses adhérents, qui annonce une augmentation sensible des cotisations annuelles « pour maintenir la qualité des prestations ».
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Cela n'a rien à voir avec la contribution exceptionnelle !
M. Guy Fischer. - Le Gouvernement nous avait certifié que cette charge ne pèserait pas sur les assurés sociaux et les mutualistes.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Vous pratiquez un amalgame injustifié !
M. Guy Fischer. - Tout cela fait que nous voterons contre ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements à gauche.)
M. Richard Tuheiava. - Après une première lecture dans des conditions un peu difficiles, nous nous retrouvons pour examiner en dernière lecture un texte qui ne nous satisfait toujours pas. Loin de faire le choix de la responsabilité, le Gouvernement a fait celui de l'imprévoyance et de l'injustice.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Voilà des propos mesurés !
M. Richard Tuheiava. - Vous déployez des trésors d'imagination pour masquer la dégradation et l'échec de votre politique et contenir la hausse du déficit qui apparaît de plus en plus comme une fatalité. Le déficit s'aggrave, vous le reconnaissez et pourtant vous n'en tirez pas les conclusions. La valse des chiffres, des transferts de recettes et des déficits en tout genre donne le tournis. Ce budget n'est pas sincère, il repose sur des hypothèses, qui, même si elles sont révisées au Sénat, restent irréalistes. La masse salariale va diminuer dans l'année à venir, nous le savons. Tous les jours, des centaines de personnes vont se retrouver au chômage et vous refusez d'augmenter la contribution sur les stocks-options, sur les retraites chapeaux ou les parachutes dorés.
Votre texte ne comporte aucune des réformes de structure propres à garantir dans la durée une sécurité sociale solidaire. Vous multipliez les mesures coercitives qui jettent la suspicion sur les assurés sociaux, vous continuez à taxer les malades. Négligeable pour les plus fortunés, la taxation sera très douloureuse pour les plus pauvres, ceux qui se soignent le moins, pour les retraités, les handicapés et des millions de familles dont les fins de mois seront encore plus amputées.
La médecine de ville a peu de marges de manoeuvre, l'hôpital public est étranglé et le secteur médico-social voit ses besoins monter en flèche. Vous n'avez aucune considération pour les accidentés du travail et les salariés atteints de maladies professionnelles, notamment les victimes de l'amiante. Vous travaillez par redéploiement et vous profitez des petits excédents de la branche famille pour combler le déficit de l'assurance vieillesse.
Le déficit de la caisse nationale de retraite atteindrait 8 milliards sans mesures correctrices ; vous ramenez ce déficit à 5 milliards par des mesures d'économie sur les prestations : les conditions d'accès à la retraite anticipée sont durcies, tout comme la condition d'âge pour obtenir une pension de réversion, vous revalorisez le minimum vieillesse mais vous le réservez aux personnes seules et en excluez les couples. Et que dire des mesures insidieuses arrivées par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, pour repousser l'âge du départ à la retraite à 70 ans !
Toutes les mesures que vous proposez visent à allonger le temps de cotisation et à reculer le moment du départ à la retraite. Et vous nous parlez de liberté de choix ! C'est vraiment mal connaître le système qui repousse les salariés hors des entreprises et ne tient aucun compte de ceux qui exercent des métiers difficiles. Nous sommes tous pour la liberté, mais nous voulons qu'elle se conjugue avec la solidarité et la justice sociale.
J'ajouterai quelques observations sur les surpensions de retraite en outre-mer. « Diviser pour mieux régner », telle semble avoir été la ligne adoptée par le secrétaire d'État à l'outre-mer. D'abord diviser les Polynésiens entre eux, en disant froidement à RFO Polynésie ne pas comprendre qu'on défende des « nantis » alors que les « petits » seraient dans l'attente. Parler ainsi, c'est méconnaître la situation sociale et économique de la Polynésie française, et surtout faire preuve de dédain pour ces fonctionnaires dévoués qui ont travaillé, et travaillent encore, pour le bien de tous, et qui participent, par leur pouvoir d'achat, à l'activité économique nécessaire à ces « petits ».
Diviser les fonctionnaires de l'État ensuite, en prenant appui sur la volonté initiale du Président Sarkozy, et de la classe politique dans son ensemble, de corriger les abus de quelques fonctionnaires métropolitains qui ont dévoyé le système pour bénéficier de retraites dorées sous les cocotiers, sans avoir oeuvré en Polynésie française au préalable. En profiter pour faire l'amalgame et étendre la mesure aux fonctionnaires polynésiens, qui ne sont pas responsables des abus, c'est se tromper de cible. C'est aussi faire preuve d'un zèle excessif. On prétend que cette réforme était inscrite dans le programme présidentiel, c'est inexact. On oublie que ce qui était réellement inscrit, à savoir la réforme des régimes spéciaux, n'est pas réalisé. Plutôt que de réaliser ce qu'avait promis le Président de la République, M. Jégo défait ce qu'il n'avait jamais été question de défaire.
On veut diviser les fonctionnaires d'État polynésiens, enfin, en proposant des aménagements qui ne profitent qu'à certains, pour aboutir hier à la signature partielle d'un protocole d'accord qui n'a toujours pas fait l'unanimité, et pour cause. Dresser les enseignants contre les autres fonctionnaires d'État est une manoeuvre indigne des relations que les habitants d'outre-mer sont en droit d'attendre de leur secrétaire d'État.
Que peuvent encore attendre les fonctionnaires d'État de l'outre-mer, de cette France qu'ils respectaient et de ce Gouvernement ? Après le dédain que le secrétaire d'État a manifesté à leur égard, ils attendent un geste de respect, de réconciliation, d'apaisement, du seul interlocuteur en qui ils veulent aujourd'hui placer leurs espoirs : le Président de la République.
Trop d'inconnues subsistent. Trop de préalables ont été ignorés. Trop peu de concertation et de travail chiffré et objectif ont caractérisé cette réforme qui a mis la charrue avant les boeufs. Je me fais ici l'écho des milliers de Polynésiens qui demandent au Président de la République de sursoir aux décrets d'application de cette réforme. Avec 15 000 actifs et 8 000 retraités, plus de 40 000 Polynésiens vous demandent de préserver une possibilité de travailler ensemble, de transformer une réforme injuste et subie en une réforme concertée et acceptable par tous.
A cette heure, un courrier unanime, signé par tous les groupes politiques présents au sein de l'Assemblée de Polynésie française, est adressé au Président de la République. Nous n'osons pas imaginer que le Président de la République, dont l'un des trois axes de sa politique pour l'outre-mer est le développement économique, puisse rester sourd à l'appel unanime de la représentation politique de Polynésie française. J'espère donc de tout coeur que le Président de la République accédera à la demande de rencontre qui lui est adressée par l'Assemblée de Polynésie française, la présidente de notre conseil économique, social et culturel, le conseiller économique et social de Polynésie française, nos deux députés, mon collègue Flosse et moi-même. J'espère que cette rencontre permettra au Président Sarkozy de renouer avec les valeurs de respect et de confiance qu'il invoquait avec conviction dans ses discours à l'adresse de l'outre-mer, valeurs mises à mal par le zèle, confinant à l'acharnement sourd, de notre secrétaire d'État.
Le groupe socialiste ne votera pas ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements à gauche)
La discussion générale est close.
M. le président. - En vertu de l'article 42 alinéa 12 du Règlement, le Sénat, étant appelé à se prononcer après l'Assemblée nationale sur le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il est procédé à un vote unique sur l'ensemble du texte en ne retenant que les amendements ayant reçu l'accord du Gouvernement.
Article 9
(Texte du Sénat)
Est approuvé le rapport figurant en annexe B à la présente loi décrivant, pour les quatre années à venir (2009-2012), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.
M. le président. - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.
I. - Rédiger comme suit le tableau constituant le quatrième alinéa du 3 de l'annexe B de cet article :
(en milliards d'euros)
Régime général |
||||||
|
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
Maladie |
||||||
Recettes |
144,4 |
150,8 |
156,0 |
162,1 |
169,3 |
176,7 |
Dépenses |
149,0 |
155,0 |
160,6 |
166,3 |
172,4 |
178,7 |
Solde |
-4,6 |
-4,20 |
-4,6 |
-4,2 |
-3,2 |
-2,0 |
AT/MP |
||||||
Recettes |
10,2 |
10,9 |
11,2 |
11,7 |
12,3 |
12,9 |
Dépenses |
10,6 |
10,6 |
11,4 |
11,6 |
11,8 |
12,0 |
Solde |
-0,5 |
0,3 |
-0,1 |
0,2 |
0,5 |
0,9 |
Famille |
||||||
Recettes |
54,6 |
56,7 |
58,2 |
60,4 |
62,9 |
65,5 |
Dépenses |
54,5 |
56,4 |
58,7 |
60,8 |
62,8 |
64,4 |
Solde |
0,2 |
0,3 |
-0,5 |
-0,3 |
0,1 |
1,1 |
Vieillesse |
||||||
Recettes |
85,7 |
89,8 |
94,7 |
100,7 |
107,2 |
111,6 |
Dépenses |
90,3 |
95,6 |
100,0 |
104,9 |
109,7 |
114,6 |
Solde |
-4,6 |
-5,77 |
-5,3 |
-4,2 |
-2,5 |
-3,1 |
Toutes branches consolidées |
||||||
Recettes |
290,0 |
303,0 |
314,3 |
328,9 |
345,4 |
360,3 |
Dépenses |
299,5 |
312,3 |
324,9 |
337,4 |
350,4 |
363,4 |
Solde |
-9,5 |
-9,3 |
-10,5 |
-8,6 |
-5,0 |
-3,1 |
II. - Rédiger comme suit le tableau constituant le cinquième alinéa du 3 de l'annexe B de cet article :
(en milliards d'euros)
Ensemble des régimes obligatoires de base |
||||||
|
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
Maladie |
||||||
Recettes |
167,6 |
175,2 |
181,8 |
188,0 |
195,9 |
204,3 |
Dépenses |
172,7 |
179,4 |
185,6 |
192,1 |
199,0 |
206,2 |
Solde |
-5,0 |
-4,1 |
-3,8 |
-4,1 |
-3,2 |
-1,9 |
AT/MP |
||||||
Recettes |
11,7 |
12,6 |
13,0 |
13,5 |
14,1 |
14,8 |
Dépenses |
12,0 |
12,2 |
13,0 |
13,2 |
13,5 |
13,8 |
Solde |
-0,4 |
0,4 |
0,0 |
0,3 |
0,6 |
1,0 |
Famille |
||||||
Recettes |
55,1 |
57,2 |
58,7 |
61,0 |
63,5 |
66,1 |
Dépenses |
54,9 |
56,9 |
59,2 |
61,3 |
63,4 |
65,0 |
Solde |
0,2 |
0,3 |
-0,5 |
-0,3 |
0,1 |
1,1 |
Vieillesse |
||||||
Recettes |
169,0 |
175,6 |
182,5 |
191,6 |
201,2 |
208,7 |
Dépenses |
172,9 |
181,2 |
189,7 |
197,9 |
206,1 |
214,2 |
Solde |
-3,9 |
-5,6 |
-7,2 |
-6,3 |
-4,9 |
-5,5 |
Toutes branches consolidées |
||||||
Recettes |
398,3 |
415,2 |
430,0 |
447,8 |
468,1 |
487,2 |
Dépenses |
407,4 |
424,3 |
441,4 |
458,2 |
475,5 |
492,6 |
Solde |
-9,1 |
-9,0 |
-11,4 |
-10,4 |
-7,4 |
-5,4 |
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Vous vous êtes mis d'accord, pour adopter la mesure d'augmentation de la cotisation sur les alcools forts, votée contre l'avis du Gouvernement à l'Assemblée et que vous aviez supprimée. Je vous propose d'en tirer les conséquences sur les prévisions de recettes et de déficit. Le déficit du régime général de la sécurité sociale serait donc ainsi de 10,5 milliards en 2009, après 9,3 milliards cette année.
Article 24
(Texte du Sénat)
Pour l'année 2009, les prévisions de recettes, réparties par catégorie dans l'état figurant en annexe C à la présente loi, sont fixées :
1° Pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et par branche à :
(En milliards d'euros) |
|
|
Prévisions de recettes |
Maladie |
181,7 |
Vieillesse |
182,5 |
Famille |
58,7 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
13,0 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
429,9 |
2° Pour le régime général de sécurité sociale et par branche à :
(En milliards d'euros) |
|
|
Prévisions de recettes |
Maladie |
156,0 |
Vieillesse |
94,7 |
Famille |
58,2 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
11,2 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
314,3 |
3° Pour les organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale à :
(En milliards d'euros) |
|
|
Prévisions de recettes |
Fonds de solidarité vieillesse |
14,0 |
M. le président. - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.
Rédiger comme suit le tableau constituant le second alinéa du 1° de cet article :
(en milliards d'euros)
Prévisions de recettes |
|
Maladie |
181,8 |
Vieillesse |
182,5 |
Famille |
58,7 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
13,0 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
430,0 |
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Amendement de coordination.
M. le président. - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.
I. - Rédiger comme suit le tableau constituant le septième alinéa du 1 de l'annexe C de cet article :
(en milliards d'euros)
|
Maladie |
Vieillesse |
Famille |
AT-MP |
Total par catégorie |
Cotisations effectives |
77,2 |
99,7 |
33,6 |
9,4 |
219,8 |
Cotisations fictives |
1,2 |
38,9 |
0,1 |
0,3 |
40,4 |
Cotisations prises en charge par l'État |
1,8 |
1,4 |
0,7 |
0,1 |
4,0 |
Cotisations prises en charge par la sécurité sociale |
0,0 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
0,0 |
Autres contributions publiques |
0,4 |
6,2 |
7,0 |
0,1 |
13,7 |
Impôts et taxes affectées |
82,8 |
15,3 |
16,6 |
2,1 |
116,9 |
Dont CSG |
59,9 |
0,0 |
12,3 |
0,0 |
72,2 |
Transferts reçus |
15,8 |
20,0 |
0,0 |
0,1 |
30,6 |
Revenus des capitaux |
0,0 |
0,2 |
0,2 |
0,0 |
0,5 |
Autres ressources |
2,5 |
0,9 |
0,3 |
0,8 |
4,5 |
Total par branche |
181,8 |
182,5 |
58,7 |
13,0 |
430,0 |
II. - Rédiger comme suit le tableau constituant le septième alinéa du 2 de l'annexe C de cet article :
en Md€
|
Maladie |
Vieillesse |
Famille |
AT-MP |
Total par catégorie |
Cotisations effectives |
68,9 |
64,5 |
33,2 |
8,7 |
175,4 |
Cotisations fictives |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
Cotisations prises en charge par l'État |
1,6 |
1,3 |
0,6 |
0,0 |
3,5 |
Cotisations prises en charge par la sécurité sociale |
0,1 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
0,2 |
Autres contributions publiques |
0,4 |
0,2 |
7,0 |
0,0 |
7,6 |
Impôts et taxes affectées |
68,3 |
10,4 |
16,6 |
2,0 |
97,3 |
Dont CSG |
52,4 |
0,0 |
12,3 |
0,0 |
64,7 |
Transferts reçus |
14,4 |
17,9 |
0,0 |
0,1 |
27,2 |
Revenus des capitaux |
0,0 |
0,0 |
0,2 |
0,0 |
0,2 |
Autres ressources |
2,4 |
0,4 |
0,3 |
0,4 |
3,4 |
Total par branche |
156,0 |
94,7 |
58,2 |
11,2 |
314,3 |
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Amendement de coordination.
Article 25
(Texte du Sénat)
Pour l'année 2009, est approuvé le tableau d'équilibre, par branche, de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :
(en milliards d'euros)
Prévisions derecettes |
Objectifsde dépenses |
Solde |
|
Maladie |
181,7 |
185,6 |
- 3,8 |
Vieillesse |
182,5 |
189,7 |
- 7,2 |
Famille |
58,7 |
59,2 |
- 0,5 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
13,0 |
13,0 |
0,0 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
429,9 |
441,4 |
- 11,5 |
M. le président. - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.
Rédiger comme suit le tableau constituant le second alinéa de cet article :
(en milliards d'euros)
|
Prévisions de recettes |
Objectifs de dépenses |
Solde |
Maladie |
181,8 |
185,6 |
-3,8 |
Vieillesse |
182,5 |
189,7 |
-7,2 |
Famille |
58,7 |
59,2 |
-0,5 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
13,0 |
13,0 |
0,0 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
430,0 |
441,4 |
-11,4 |
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Amendement de coordination.
Article 26
(Texte du Sénat)
Pour l'année 2009, est approuvé le tableau d'équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :
(en milliards d'euros)
Prévisions derecettes |
Objectifsde dépenses |
Solde |
|
Maladie |
156,0 |
160,6 |
- 4,7 |
Vieillesse |
94,7 |
100,0 |
- 5,3 |
Famille |
58,2 |
58,7 |
- 0,5 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
11,2 |
11,4 |
- 0,1 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
314,2 |
324,9 |
- 10,7 |
M. le président. - Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.
Rédiger comme suit le tableau constituant le second alinéa de cet article :
(en milliards d'euros)
|
Prévisions de recettes |
Objectifs de dépenses |
Solde |
Maladie |
156,0 |
160,6 |
-4,6 |
Vieillesse |
94,7 |
100,0 |
-5,3 |
Famille |
58,2 |
58,7 |
-0,5 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
11,2 |
11,4 |
-0,1 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
314,3 |
324,9 |
-10,5 |
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Amendement de coordination.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Avis favorable.
Article 23
Est approuvé le montant de 3,4 milliards d'euros correspondant à la compensation des exonérations, réductions ou abattements d'assiette de cotisations ou contributions de sécurité sociale, mentionné à l'annexe 5 jointe au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
M. le président. - Amendement n°6, présenté par le Gouvernement.
Dans cet article, remplacer le montant :
3,4 milliards
par le montant :
3,5 milliards
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Amendement de coordination. A l'Assemblée nationale, a été adopté un amendement de M. Lefebvre au projet de loi de finances qui a supprimé une mesure d'économie sur les exonérations liées aux services à la personne -la mesure consistait à réduire de 15 à 10 points l'abattement pour les particuliers employeurs qui déclarent au réel. A la suite de l'adoption de cet amendement, le Gouvernement avait déposé en seconde délibération un amendement à l'article 35 du projet de loi de finances visant à majorer de 93 millions la mission « Travail et emploi » pour assurer une juste compensation à la sécurité sociale de l'exonération. Nous proposons de faire de même dans la loi de financement.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - La commission est favorable à tout ce qui améliore la compensation.
Article 72 bis
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - Le I de l'article 244 quater F du code général des impôts est ainsi rédigé :
« I. - 1. Les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 50 % de la somme des dépenses ayant pour objet de financer la création et le fonctionnement d'établissements mentionnés aux deux premiers alinéas de l'article L. 2324-1 du code de la santé publique et assurant l'accueil des enfants de moins de trois ans de leurs salariés.
« 2. Elles peuvent également bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 25 % de la somme des dépenses engagées au titre de l'aide financière de l'entreprise mentionnée aux articles L. 7233-4 et L. 7233-5 du code du travail.
« 3. Elles peuvent également bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 10 % de la somme :
« a) Des dépenses de formation engagées en faveur des salariés de l'entreprise bénéficiant d'un congé parental d'éducation dans les conditions prévues aux articles L. 1225-47 à L. 1225-51 du code du travail ;
« b) Des dépenses de formation engagées par l'entreprise en faveur de nouveaux salariés recrutés à la suite d'une démission ou d'un licenciement pendant un congé parental d'éducation mentionné à l'article L. 1225-47 du code du travail, lorsque cette formation débute dans les trois mois de l'embauche et dans les six mois qui suivent le terme de ce congé ;
« c) Des rémunérations versées par l'entreprise à ses salariés bénéficiant d'un congé dans les conditions prévues aux articles L. 1225-8, L. 1225-17, L. 1225-25, L. 1225-26, L. 1225-36 à L. 1225-38, L. 1225-40, L. 1225-41, L. 1225-43, L. 1225-44, L. 1225-47 à L. 1225-51 et L. 1225-61 du code du travail ;
« d) Des dépenses visant à indemniser les salariés de l'entreprise qui ont dû engager des frais exceptionnels de garde d'enfants à la suite d'une obligation professionnelle imprévisible survenant en dehors des horaires habituels de travail, dans la limite des frais réellement engagés. »
Le présent I s'applique aux crédits d'impôts calculés au titre des dépenses exposées à compter du 1er janvier 2009. Le 3 du I de l'article 224 quater F du code général des impôts s'applique aux dépenses exposées jusqu'au 31 décembre 2009.
II. - Les pertes de recettes pour l'État qui pourraient résulter de l'application du I sont compensées, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 402 bis, 438 et 520 A du code général des impôts.
M. le président. - Amendement n°7, présenté par le Gouvernement.
Supprimer le II de cet article.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Nous levons le gage sur les dispositions introduites par le Sénat et codifiées par la CMP sur le crédit d'impôt famille.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Favorable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Avant de passer au vote du projet de loi, je voulais préciser à M. Vasselle que l'âge du départ à la retraite des stewards et hôtesses sera reporté dès 2009, parce qu'il dépend d'un décret français de 2004 et que leurs organisations syndicales en ont fait la demande. S'agissant des pilotes, l'âge de départ à la retraite est fixé dans une réglementation européenne qui vient d'évoluer et que la France est en train de transposer. Par ailleurs, leurs organisations syndicales ont demandé que le dispositif s'applique en 2010, bien que 117 pilotes se soient prononcés pour une application dès 2009.
M. Nicolas About, président de la commission. - Ce sont des associations, pas des syndicats !
Vote sur l'ensemble
M. Bernard Fournier. - Nos débats ont permis d'enrichir la loi de financement pour 2009. A preuve, la commission mixte paritaire a repris la plupart des amendements sénatoriaux, lesquels améliorent des dispositifs précisés par l'Assemblée nationale -je pense à l'amendement de M. Vasselle relatif à l'assujettissement à la CSG et à la CRDS des parachutes dorés supérieurs à 1 million. De même, le crédit d'impôt famille sur les dépenses qui développent l'offre d'accueil des jeunes enfants a-t-il été utilement recentré à l'initiative de M. Lardeux.
Les principes de responsabilité et de justice sociale, qui sous-tendent ce texte, ont orienté nos votes au cours de la discussion. Au-delà de l'objectif d'assainissement des comptes publics, nous avons eu à coeur de soutenir les salariés, en leur donnant la liberté de travailler jusqu'à 70 ans par la suppression de la retraite-couperet que subissent tant d'entre eux à 65 ans, et les assurés les plus modestes par la revalorisation des petites retraites agricoles, du minimum vieillesse et des pensions de réversion, qui feront l'objet d'une concertation dans le cadre des travaux du conseil d'orientation des retraites, comme M. Xavier Bertrand s'y est engagé.
En conclusion, je remercie, au nom du groupe UMP, le président de la commission des affaires sociales et les rapporteurs de la qualité de leurs travaux ainsi que les ministres pour leur écoute et le travail accompli. C'est avec conviction (exclamations ironiques à gauche) que notre groupe votera ce texte ! (Applaudissements à droite)
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Nous voilà rassurés !
A la demande du groupe CRC, les conclusions de la CMP, modifiées, sont mises aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 324 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 163 |
Pour l'adoption | 183 |
Contre | 141 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements à droite)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je vous remercie de ce vote à une très large majorité. Je salue les apports de votre commission, le travail du Sénat et l'atmosphère cordiale qui a régné ici -elle est de mise dans la République. (Applaudissements au centre et à droite)
M. le président. - C'est à regret que nous vous laissons partir. (Mme la ministre quitte l'hémicycle sous les applaudissements venus des bancs du centre et de la droite)
Revenu de solidarité active (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. - La commission mixte paritaire est parvenue à un accord sur ce texte essentiel pour réduire la pauvreté en réconciliant travail et solidarité. Nous nous réjouissons que l'on sorte d'une logique de statut pour désormais retenir le niveau de revenus et la situation familiale. C'est infiniment plus juste !
La discussion parlementaire a enrichi le projet de loi initial : le volume de celui-ci a presque doublé, preuve de l'intérêt porté par les deux assemblées. La protection des droits des bénéficiaires a été renforcée, les responsabilités clarifiées ; nous avons pris des mesures contre la précarisation des emplois et assoupli les contrats aidés destinés aux plus âgés ou aux handicapés.
Vingt-cinq articles restaient en discussion. La CMP en a adopté quatorze dans la rédaction du Sénat et a élaboré une rédaction commune pour les onze autres. Elle a réintégré les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi dans la liste des organismes associés à la gestion du RSA en tenant compte de nos réserves sur l'absence de personnalité juridique. Elle a autorisé les centres communaux et intercommunaux d'action sociale à instruire les demandes de RSA sans être liés par une délégation du président du conseil général -mais ils devront formellement décider d'exercer cette compétence.
Sur proposition des commissaires socialistes, le patrimoine professionnel sera pris en compte dans les éléments du train de vie des bénéficiaires du RSA. La CMP a enfin donné une base légale aux « groupes économiques solidaires ».
Restait l'obligation d'emploi des personnes handicapées. Cette disposition ne figurait pas dans le projet du Gouvernement et elle a un lien très ténu avec le RSA. Or elle nous a donnés beaucoup de difficultés et le Gouvernement a été amené à déposer des amendements aux conclusions de la CMP ! Le sujet correspond néanmoins à l'une de nos préoccupations constantes.
Les stages offrent une première expérience professionnelle, le temps partiel facilite le recrutement de personnes lourdement handicapées. Les entreprises ne sauraient pour autant s'exonérer de leur obligation légale, 6 % de salariés handicapés, en comptabilisant de la même manière stages, temps partiels ou temps complets. La CMP a décidé à l'unanimité de remettre en cause cette disposition qui n'était finalement pas si consensuelle ! La rédaction était imparfaite. Les amendements du Gouvernement, élaborés après concertation avec les associations, y pourvoient. La solution me semble équilibrée.
Telles sont les conclusions des travaux de la CMP que je vous demande d'approuver. Dans la crise économique que nous traversons, ce projet de loi est un rempart, il renforce l'accompagnement des personnes en insertion vers l'emploi et augmente le pouvoir d'achat des travailleurs les plus modestes. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. - Ce projet de loi comporte deux réformes importantes, pour les salariés modestes et les travailleurs pauvres et pour les titulaires du RMI et de l'allocation spécifique solidarité. Je rends hommage au travail du Parlement, du président de la commission et des rapporteurs. Il se traduit par des avancées sur au moins dix sujets.
Les garanties aux départements, quant à la compensation du coût de l'extension des compétences, ont été renforcées grâce à votre Haute assemblée, en particulier M. Doligé et tous les autres présidents de conseil général qui siègent ici. L'aide personnalisée de retour à l'emploi a été créée en complément du RSA pour prendre en charge des coûts exposés lors de la reprise d'une activité professionnelle, transport, vêtements de travail, etc. Elle sera financée par l'État à hauteur de 150 millions d'euros.
Les droits connexes locaux seront mieux pris en compte. Le Premier ministre désignera bientôt Mme Desmarescaux comme sénateur en mission à ce titre.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. - Très bien !
M. Guy Fischer. - Cela n'augure rien de bon.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Le rôle des centres communaux d'action sociale a été nettement affirmé. Les aides des collectivités aux entreprises pourront désormais être conditionnées à un engagement de création d'emplois à temps plein. Et l'augmentation de la durée du travail entrera dans le champ de la négociation collective.
Un statut légal a enfin été reconnu aux organismes qui, telles les communautés d'Emmaüs, font participer les personnes qu'ils accueillent à une activité d'économie solidaire. C'est une réponse à une demande exprimée depuis à peine... soixante ans. (Sourires) Le contrat unique d'insertion pourra être prolongé au-delà de vingt-quatre mois, notamment pour les plus de 50 ans ; la mesure sera applicable, dès le 1er janvier 2009, aux contrats actuels. Les pactes territoriaux d'insertion ont été rendus systématiques. Un fonds d'expérimentation pour les jeunes a été créé au Sénat. Il sera doté par l'État de 10 millions d'euros dès 2008. Plusieurs régions et départements ont déjà demandé à participer à des programmes expérimentaux. Enfin, le principe du plafonnement global des niches fiscales a été introduit lors de l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale et il déjà trouvé une traduction dans le projet de loi de finances pour 2009. C'est une mesure de justice ! La rédaction actuelle prend en compte des demandes provenant de tous les bancs. Sur les questions du handicap, nous sommes parvenus à un équilibre qui représente une avancée importante.
Vingt ans exactement après la création du RMI, des améliorations très sensibles ont été apportées, au bénéfice des plus modestes.
Vingt ans après, j'y insiste. Quand on remplace un dispositif, on suscite bien souvent la nostalgie. Le soutien qu'ont apporté les promoteurs du RMI au RSA est chose rare. Hommage leur soit rendu. La preuve est faite que l'on peut s'adapter en restant fidèle à l'esprit de solidarité nationale, qui transcende les époques.
Certains craignaient un effet négatif du RSA sur les contrats aidés. Vous avez vu que nous y parons, puisque leurs crédits augmentent dans le budget 2009. Certains craignaient une confiscation de la prime de Noël : elle vient d'être augmentée. Aucun crédit n'est diverti dans le prochain budget pour financer le RSA.
Certains craignaient un désengagement de l'État pénalisant les conseils généraux : nous avons reconduit, à hauteur de 500 millions, les crédits du Fond de mobilisation pour l'insertion. Certains craignaient le manque d'engagement des partenaires : avec l'Association des départements de France, nous avons mis en place un comité de pilotage qui rassemble les acteurs dans un vrai partenariat, sans qu'aucun puisse prédominer. Et je serai dans quelques jours aux côtés du président du Luart pour le mettre en place dans son département.
Dans un contexte économique difficile, le RSA est plus que jamais un recours. Il permettra aux salariés de sortir de la pauvreté ou de ne pas y tomber, car le dispositif, c'est son originalité, marche dans les deux sens.
Au-delà des clivages politiques, c'est une mesure de progrès que vous rendrez possible en adoptant ce texte. Je vous remercie pour ce que vous lui avez apporté, au service de ceux qui connaissent les plus grandes difficultés. (Applaudissements à droite et au centre)
M. le président. - Je serai heureux de vous accueillir sous peu dans la Sarthe.
M. Guy Fischer. - Je salue, monsieur le haut-commissaire, votre réaction face à la situation faite au DAL, condamné à une amende de 12 000 euros pour avoir installé des tentes rue de la Banque.
M. Nicolas About, président de la commission. - Il est vrai que ce n'est pas très heureux...
M. Guy Fischer. - Je considère comme vous qu'il est indigne de mettre à genoux une association en usant de l'arme de l'argent. Alors que les SDF sont de plus en plus nombreux, que les difficultés s'accroissent, j'apprécie votre prise de position. Mais le problème reste entier.
Avec ce texte décevant au regard de ce qu'il aurait pu être, vous allez mettre fin à ce que vous aviez vaillamment défendu, depuis 2005, aux côtés des associations et des syndicats. Car le RSA met un terme à deux minima sociaux, le RMI et l'allocation de parent isolé.
Il était certes nécessaire, pour plus d'équité et de solidarité, de réformer le système. Alors que l'on prévoit 200 000 à 400 000 chômeurs de plus en 2009 et que ce mois de décembre sera placé sous le signe du chômage partiel, votre texte doit nous interpeller. Car le RSA, c'est bien là ce qui nous oppose, loin d'être un outil d'insertion, pourrait bien se révéler un simple mode de traitement social du chômage, qui aura pour double conséquence, dans les départements, de stigmatiser les plus pauvres en conditionnant plus sévèrement encore le versement de l'aide et d'offrir au patronat une main-d'oeuvre à bon marché.
Pas d'aide sociale, dites-vous, sans contrepartie ? Pas d'aide sociale sans parcours d'insertion ? Certes, votre intention n'est pas de cautionner un discours culpabilisateur. Car vous savez bien que le retour à l'emploi ne dépend pas de la seule volonté des salariés et que le droit au travail ne peut pas toujours s'exercer.
En ces temps de crise, votre texte est déjà décalé. Nous devrons être particulièrement vigilants sur les débuts de son application. Quelle sera l'attitude des employeurs ? Joueront-ils le jeu ou poursuivront-ils, malgré la crise, la course aux dividendes ? Quelle sera la réaction de l'État face à leurs politiques industrielles, à leurs politiques de l'emploi ?
En installant le RSA, n'êtes-vous pas en train d'ouvrir les trappes à bas salaire ? Vous assurez que non. Espérons-le, car pour 7 millions de pauvres, sans doute le double de salariés cabossés par la vie et les difficultés au travail, il ne faudrait pas que le temps partiel et l'intérim aggravent l'émiettement en devenant un mode de gestion. Il ne faudrait pas que le RSA devienne cette « subvention à la précarité » que nous craignons de voir apparaître. Nombre d'économistes ont donné l'alerte : un RSA sans encadrement précis -même si nos assemblées ont tenté de l'améliorer- morcellera le travail. Miettes d'emploi contre allocation sous contrôle, est-ce bien là une ambition pour sortir les plus démunis de la pauvreté ? Un article paru dans Libération ce matin montre déjà comment l'inacceptable devient possible.
Nous redoutons en outre que le RSA ne soit prétexte à revenir sur les droits connexes servis par l'État et le département.
On a vu, avec la bataille sur les articles 13 bis et 13 ter, à quoi sont prêts les employeurs. Si l'on avait laissé faire, ils seraient parvenus, en utilisant des stagiaires handicapés, à s'exonérer partiellement de leur obligation d'employer des personnes en situation de handicap. Le piège a heureusement été déjoué, mais comprenez nos inquiétudes : ils sont prêts à user de tous les artifices !
Depuis, nous avons reçu de nombreux courriers, à commencer par l'Association des paralysés de France, qui dénonce « une mesure inacceptable » qui va faire « remonter mathématiquement mais artificiellement, le taux d'emploi des personnes en situation de handicap ».
Avant de conclure, je voudrais remercier le haut-commissaire pour l'invitation qu'il nous a faite de participer à l'anniversaire de la création du RMI, RMI que nous enterrons aujourd'hui. Nous n'y participerons pas, mais je tiens tout de même à profiter de cette invitation, pour vous dire combien nous nous sommes, avec ce projet de loi, considérablement éloigné de ce que fut le RMI.
M. Nicolas About, président de la commission. - C'est en effet beaucoup mieux !
M. Guy Fischer. - Je ne me lancerai pas dans ce débat, monsieur le président...
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Il ne faut pas être plus royaliste que les Rmistes !
M. Guy Fischer. - Il y a vingt ans, le RMI était financé par un prélèvement effectué sur l'impôt sur les grandes fortunes. C'était tout de même autre chose que le financement proposé pour le RSA ! Nous restons donc sur nos positions et je crains que nous n'institutionnalisions la précarité alors qu'une crise financière et sociale frappe notre pays.
M. Yves Daudigny. - « Au possible nous sommes tenus ». Telle est la ligne de conduite, monsieur le haut-commissaire, que vous faites figurer en tête de vos courriers et que vous vous êtes assignée. Et au possible, vous vous êtes effectivement tenu, au sein du Gouvernement auquel vous avez choisi d'appartenir, pour présenter ce projet de loi généralisant le revenu de solidarité active. Il y a peu encore, votre marge de manoeuvre était plus qu'étroite. Vous avez, malgré tout, été autorisé à soumettre votre projet au Parlement, en session extraordinaire et en urgence. Mais l'implosion du système financier et la crise économique vous ont rattrapé et posent clairement les limites de la réussite du RSA, celles de la montée du chômage et de la raréfaction de l'offre d'emploi.
A quel possible vous en êtes-vous pour autant tenu ? Vous avez ouvert un véritable débat à l'Assemblée nationale et au Sénat qui s'est poursuivi jusqu'en commission mixte paritaire dont les travaux apportent quelques améliorations.
Ainsi sont maintenus sept amendements du groupe socialiste en faveur de l'obligation d'établir le caractère clairement intentionnel d'une fraude avant l'ouverture d'une procédure de sanction, de la compensation à l'euro près des dépenses exposées par les départements pour 2009. Sur ce point, il est paradoxal d'entendre sans cesse l'échelon départemental mis en cause et de lui confier toujours plus de responsabilités importantes. Que se passera-t-il si le département disparaît ? (Marques d'approbation sur les bancs socialistes)
La commission mixte paritaire a également conservé nos amendements prévoyant la participation des organisations représentatives du monde du travail et de l'entreprise à l'élaboration du pacte territorial pour l'insertion et la possibilité offerte aux collectivités territoriales de conditionner leurs aides aux entreprises à la création d'emplois par celles-ci.
L'accord trouvé sur les articles restant en discussion est également globalement satisfaisant : les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi (Plie) sont reconnus comme concourant à la mise en oeuvre du RSA. Les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (Ccas et Cias) pourront instruire de plein droit des demandes de RSA, sans qu'il leur soit nécessaire de passer préalablement une convention avec le département.
La question du décompte des stagiaires et des travailleurs handicapés dans le quota d'emploi obligatoire de 6 % des entreprises appelle plus de réserves. Le Sénat avait limité cette prise en compte aux stages d'une durée minimale de quatre mois. La CMP a finalement décidé de limiter leur prise en compte aux stages à temps complet. Un amendement du Gouvernement en demande la suppression mais s'engage à fixer par décret à 40 heures la durée minimale des stages pris en compte.
S'agissant des travailleurs handicapés, la CMP a tranché en faveur de leur prise en compte au prorata du temps travaillé tandis que le deuxième amendement du Gouvernement décompte le temps de travail égal ou supérieur à la moitié de la durée légale comme un temps complet et celui en deçà équivalent à un mi-temps. L'accord de CMP nous semblait pourtant satisfaisant. Nous verrons à l'usage si cette nouvelle contrainte favorise le recrutement de stagiaires et de travailleurs handicapés en plus grand nombre dans les entreprises.
L'avenir proche confirmera ou infirmera également nos craintes de voir le scénario du RMI, sous-compensé à hauteur de 2 milliards, se rejouer avec le RSA au détriment des départements et donc des contribuables locaux. Une garantie de juste compensation a pu être obtenue pour 2009 mais pas au-delà. Or, selon I'OCDE, 8 millions de chômeurs supplémentaires sont attendus.
Nous déplorons également le maintien de l'application de l'offre valable d'emploi au bénéficiaire du RSA qui perdra ainsi tous droits après deux refus. Il est en effet regrettable que ce projet s'inscrive dans cette rhétorique ancienne fondée sur le dogme que l'autonomie de la volonté serait également distribuée à tous les individus, sans considération de la réalité et de la diversité des situations socio-économiques, et qui fait que chaque droit est désormais systématiquement adossé à une obligation. Ainsi, sous couvert d'un vertueux discours de responsabilisation, seront plus exclus encore ceux qui, parce qu'ils le sont déjà, bénéficieraient du RSA. Comme l'ont dit les députés, la lutte contre la pauvreté n'est pas seulement une question de retour à l'emploi.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Absolument !
M. Yves Daudigny. - Bien sûr, il faut les réinsérer, mais nous devons aussi les aider à se reconstruire et à cheminer dans notre société. La très grande majorité des Rmistes veut travailler, contrairement à ce que l'on entend dire ici et là. La construction de la personne demande du temps.
M. Alain Vasselle. - Pas d'assistanat ! (Exclamations courroucées à gauche)
M. Jean Desessard. - Provocateur !
M. Jean-Jacques Mirassou. - Il faut de la solidarité !
Mme Raymonde Le Texier. - De l'accompagnement !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - De la solidarité active !
M. Yves Daudigny. - Le financement du RSA ne relevait-il pas de vos compétences ? Il est profondément injuste et risque de gâcher le bénéfice attendu des compléments de salaires par la nouvelle ponction qu'il opère sur les revenus modestes. Aurait-il été anormal que les contribuables les plus riches aient aussi l'obligation de participer à l'effort de solidarité nationale ? La décision de les en exempter est une faute morale et sociale !
M. Alain Vasselle. - Démago !
M. Yves Daudigny. - L'absence de tout dispositif en direction des moins de 25 ans n'est pas acceptable, alors même que votre troisième amendement prévoit la création d'un fonds d'appui aux expérimentations en leur faveur dès la publication de la loi. Comment expliquerez-vous à un jeune de 24 ans qui travaillera à côté d'un autre jeune de 26 ans que ce dernier perçoit le RSA et pas lui ?
M. Nicolas About, président de la commission. - Il le percevra un peu plus tard.
M. Alain Vasselle. - Et que dira celui qui a 17 ans ?
M. Yves Daudigny. - Nous aurions pu être d'accord avec le RSA si en parallèle, nous n'avions assisté à la disparition des services publics et des franchises médicales, à la baisse du pouvoir d'achat, à l'abandon de la politique du logement...
A votre devise, monsieur le haut-commissaire, une autre fait écho : « A l'impossible, nul n'est tenu ». Tous vos efforts et vos mérites sont impuissants à dissimuler les conséquences de cinq années de décisions en faveur des seuls profits individuels (Mme Raymonde Le Texier applaudit) et ne peuvent suffire à faire passer pour néo-sociale l'équipe ultralibérale et conservatrice qui nous gouverne. (Applaudissements à gauche)
Mme Isabelle Debré. - Ca, c'est un peu trop !
M. Alain Vasselle. - Provocateur !
M. Jean-Pierre Fourcade. - Le Sénat s'honore de pratiquer le sens de la nuance. (Sourires)
La discussion générale est close.
M. le président. - En application de l'article 42, alinéa 12, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte élaboré par la commission mixte paritaire, en ne retenant que les amendements ayant reçu l'accord du Gouvernement.
Article 13 bis
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - L'article L. 5212-7 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-7. - L'employeur peut s'acquitter partiellement de l'obligation d'emploi en accueillant en stage, à temps complet, dans des conditions fixées par un décret précisant la durée minimale de ce stage, des personnes handicapées, dans la limite de 2 % de l'effectif total des salariés de l'entreprise. »
II. - Le I est applicable à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés des années 2009 et suivantes.
M. le président. - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.
Dans le texte proposé paragraphe le I de cet article pour l'article L. 5212- du code du travail, supprimer les mots :
, à temps complet
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Si vous le permettez, je présenterai les trois amendements du Gouvernement en même temps. Les deux premiers portent sur la situation des personnes handicapées. Nous devons concilier deux éléments antinomiques. D'un côté, faire en sorte que les personnes très handicapées ne soient pas négligées par les entreprises sous prétexte qu'elles ne pourraient pas travailler à plein temps. De l'autre, ne pas assouplir les obligations qui pèsent sur les entreprises à tel point qu'elles n'embaucheraient plus de personnes handicapées. Nous pensions avoir atteint un point d'équilibre, mais certaines associations, dont l'Association des paralysés de France, n'étaient pas satisfaites. Nous les avons rencontrées une nouvelle fois et c'est pourquoi nous vous présentons ces deux amendements : le premier supprime la notion de temps plein pour les stages et le deuxième prévoit que les personnes handicapées qui travaillent à mi-temps seront comptabilisées comme travaillant à plein temps et celles qui ont une faible activité le seront à mi-temps. Ces dispositions feront l'objet d'un décret qui sera rédigé en plein accord avec les associations.
Le troisième amendement avance la mise en oeuvre du fonds d'expérimentation : j'ai bien entendu ce que suggérait M. Daudigny et je suis tout à fait d'accord pour qu'une expérimentation ait lieu dans l'Aisne afin que les jeunes de 24 et de 26 ans travaillent ensemble. Cela vous aidera peut-être à approuver ce dispositif. (Sourires)
Article 13 ter
(Rappelé pour coordination)
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - L'article L. 5212-14 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5212-14. - Pour le calcul du nombre de bénéficiaires de l'obligation d'emploi, chaque personne est prise en compte à due proportion de son temps de présence dans l'entreprise au cours de l'année civile, quelle que soit la nature ou la durée de son contrat de travail, dans la limite d'une unité. »
II. - Le I est applicable à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés des années 2009 et suivantes.
M. le président. - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 5212-14 du code du travail :
« Art. L. 5212-14. - Pour le calcul du nombre de bénéficiaires de l'obligation d'emploi, chaque personne est prise en compte à due proportion de son temps de présence dans l'entreprise au cours de l'année civile, quelle que soit la nature ou la durée de son contrat de travail, dans la limite d'une unité et dans les conditions suivantes :
« - les salariés dont la durée de travail est supérieure ou égale à la moitié de la durée légale ou conventionnelle sont décomptés dans la limite d'une unité comme s'ils avaient été employés à temps complet ;
« - les salariés dont la durée de travail est inférieure à la moitié de la durée légale ou conventionnelle sont décomptés dans des conditions fixées par décret sans que leur prise en compte puisse dépasser une demi-unité. »
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Il est présenté.
Article 14
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - Sous réserve de l'inscription en loi de finances des dispositions prévues au premier alinéa du II de l'article 3, la présente loi entre en vigueur le 1er juin 2009, à l'exception des deux derniers alinéas de l'article L. 262-40 du code de l'action sociale et des familles, des 1° à 3° de l'article 9, des articles 10, 11 et 12 et du 4° de l'article 13 qui entrent en vigueur le 1er janvier 2010. Toutefois, le fonds national des solidarités actives est constitué à compter du 1er janvier 2009.
II. - A. - 1. La contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale, instituée par l'article L. 262-23 du code de l'action sociale et des familles, s'applique aux revenus des années 2008 et suivantes.
2. La contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l'article L. 245-15 du code de la sécurité sociale, instituée par l'article L. 262-23 du code de l'action sociale et des familles, s'applique, à compter du 1er janvier 2009, aux produits de placements mentionnés au I de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale et aux produits de placements mentionnés au II du même article pour la part de ces produits acquise et, le cas échéant, constatée à compter du 1er janvier 2009.
3. Le 7° de l'article 6 s'applique pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter de l'année 2008.
B. - Les 2° à 5°, a et c du 6° et 8° de l'article 6 sont applicables à compter des impositions établies au titre de 2009. Les 1° et b du 6° du même article sont applicables à compter des impositions établies au titre de 2010.
Pour les redevables ayant cessé d'être bénéficiaires du revenu minimum d'insertion au cours de l'année 2008, le premier alinéa du III de l'article 1414 et le 2° de l'article 1605 bis du code général des impôts dans leur rédaction en vigueur au 1er janvier 2008 sont maintenus pour les impositions correspondantes établies au titre de l'année 2009.
III. - À compter du 1er juin 2009, des conventions individuelles se rapportant aux contrats d'avenir prévus à la section 3 et aux contrats d'insertion-revenu minimum d'activité prévus à la section 6 du chapitre IV du titre III du livre Ier de la cinquième partie du code du travail peuvent être conclues, pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active financé par les départements, pour les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique et les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés, jusqu'au 31 décembre 2009.
Les conventions individuelles qui concernent des bénéficiaires du revenu de solidarité active financé par le département sont conclues par le président du conseil général.
À compter du 1er juin 2009, le montant de l'aide versée à l'employeur mentionnée à l'article L. 5134-51 du code du travail est égal au montant forfaitaire prévu au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable pour une personne isolée dans sa rédaction issue de la présente loi. Pour les contrats d'avenir conclus avec des bénéficiaires du revenu de solidarité active, ce montant est pris en charge par l'État à hauteur de 12 %.
À compter du 1er juin 2009, le montant de l'aide versée à l'employeur mentionnée à l'article L. 5134-95 du code du travail est égal au montant forfaitaire prévu au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable pour une personne isolée dans sa rédaction issue de la présente loi. Pour les contrats d'insertion-revenu minimum d'activité conclus avec des bénéficiaires du revenu de solidarité active, ce montant est pris en charge par l'État à hauteur de 12 %.
À compter du 1er janvier 2009, le contrat d'avenir et le contrat d'accompagnement dans l'emploi peuvent, aux fins de développer l'expérience et les compétences du salarié, prévoir par avenant une période d'immersion auprès d'un autre employeur dans les conditions prévues à l'article L. 8241-2 du code du travail. Un décret détermine la durée, les conditions d'agrément et d'exécution de cette période d'immersion.
Par exception au deuxième alinéa du I de l'article L. 262-23 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction issue de la présente loi, lorsque, au sein du foyer, une personne bénéficiaire du revenu de solidarité active financé par le département a conclu entre le 1er juin et le 31 décembre 2009 une des conventions mentionnées aux articles L. 5134-38, L. 5134-39 ou L. 5134-75 du code du travail, l'allocation de revenu de solidarité active est, pendant la période mentionnée au 5° de l'article L. 262-3 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction issue de la présente loi, intégralement à la charge du fonds national des solidarités actives.
IV. - À compter du 1er janvier 2009, à titre exceptionnel, lorsque des salariés âgés de cinquante ans et plus ou des personnes reconnues travailleurs handicapés embauchés dans des entreprises d'insertion, des ateliers et chantiers d'insertion ou des associations intermédiaires rencontrent des difficultés particulières qui font obstacle à leur insertion durable dans l'emploi, le contrat de travail conclu en application de l'article L. 1242-3 du code du travail, le contrat d'avenir ou le contrat d'accompagnement dans l'emploi qu'ils ont conclu peut être prolongé au-delà de la durée maximale. Cette prolongation est accordée par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du même code ou par le président du conseil général lorsque, dans le cas des contrats d'avenir, celui-ci a conclu la convention individuelle mentionnée à l'article L. 5134-38 dudit code associée à ce contrat, après examen de la situation du salarié au regard de l'emploi, de la capacité contributive de l'employeur et des actions d'accompagnement ou de formation conduites dans le cadre de la durée initialement prévue du contrat.
V. - À compter du 1er janvier 2009, les actions de formation destinées aux personnes bénéficiant d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi et d'un contrat d'avenir, dans les collectivités territoriales ou les établissements publics en relevant, peuvent être financées, pour tout ou partie, au moyen de la cotisation obligatoire versée par les collectivités territoriales et leurs établissements publics, en application de l'article 12-2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
M. le président. - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.
Compléter le I de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Le fonds d'appui aux expérimentations en faveur des jeunes créé par l'article 13 bis A de la présente loi est constitué à compter du lendemain de la publication de la présente loi au Journal Officiel de la République française.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Il est présenté.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur. - Avis favorable aux trois amendements.
M. le président. - En vertu de l'article 42, alinéa 12, je mets aux voix les conclusions de la CMP assorties de trois amendements du Gouvernement.
Vote sur l'ensemble
M. Nicolas About, président de la commission. - Je suis très heureux de ce texte qui fait suite aux travaux que mène notre commission depuis des années et au rapport de notre ancienne collègue Valérie Létard sur les minima sociaux. Ce projet de loi rendra plus attractive la reprise d'un travail. Je remercie Mme le rapporteur d'avoir contribué à améliorer le texte initial, ainsi que le haut-commissaire d'avoir accepté ces améliorations. Je le félicite aussi d'avoir confié à Mme Desmarescaux une mission sur les avantages connexes. Je remercie enfin tous les sénateurs qui par leur travail et leur vote vont permettre l'adoption d'un texte majeur qui donne enfin un sens à l'insertion et à la lutte contre la pauvreté. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Alain Vasselle. - Au nom du groupe UMP, je salue l'excellent travail de Mme le rapporteur et de la commission des affaires sociales permettant d'aboutir à ce texte, un texte majeur.
Moi-même rapporteur du volet expérimental, lors de l'examen de la loi Tepa, j'avais appelé l'attention du haut-commissaire sur deux éléments à expertiser. La situation des travailleurs pauvres, tout d'abord. Certains pensaient préférable d'attendre et de mener à son terme l'expérimentation. Monsieur le haut-commissaire, vous avez choisi de légiférer le plus tôt possible, et vous avez eu raison car nos concitoyens sont impatients, surtout ceux qui ont vu passer le train de l'emploi sans pouvoir monter dedans.
J'avais ensuite appelé l'attention sur les droits connexes locaux, si bien que je me félicite de la mission que vous confiez à Mme Sylvie Desmarescaux. Ces droits seront intégrés dans le dispositif du RSA pour respecter une plus grande équité.
La réflexion va se poursuivre, et notamment sur l'allocation d'adulte handicapé (AAH) dont les bénéficiaires n'auront pas le même pouvoir d'achat que ceux du RSA. Il y a là une indéniable inégalité de traitement mais la situation spécifique des handicapés ne permet pas un alignement pur et simple. Je souhaite donc qu'on réfléchisse à cette question, complexe car potentiellement coûteuse.
Le débat sur les moins de 25 ans, que nous n'avons pu résoudre au moment du RMI, devra aussi se poursuivre.
Pour financer ce RSA, plutôt que d'une taxe supplémentaire de 1,1 %, j'aurais été personnellement partisan d'un redéploiement de mesures budgétaires concernant le travail, en jouant sur les allègements de cotisations sociales -ceux de la grande distribution, par exemple, qui en est la principale bénéficiaire tout en employant la grande majorité des travailleurs pauvres. Mais je sais, monsieur le haut-commissaire, que vous avez été soumis à un arbitrage au plus haut niveau... Je regrette ce choix de financement.
Cela ne m'empêchera pas, d'approuver ce texte, avec l'ensemble du groupe UMP. Nous vous remercions encore une fois, monsieur le haut-commissaire, de cet excellent travail. (Applaudissements à droite)
M. Joseph Kergueris. - Ce projet de loi est à nos yeux un grand texte, l'un de ceux qui marqueront le plus la législature de leur empreinte. Depuis longtemps nous appelions de nos voeux une réforme qui s'attaque de façon structurelle et pertinente aux deux grandes insuffisances de notre système de minima sociaux que sont, d'une part, la faiblesse de l'intéressement jusqu'ici prévu en cas de reprise d'une activité professionnelle et, d'autre part, l'effet indirect des droits sociaux connexes aujourd'hui attachés au statut de Rmiste et non aux revenus des personnes. Cette question des droits connexes avait fait l'objet d'un rapport de notre collègue Valérie Létard, avant qu'elle n'entre au Gouvernement. En outre, il était impératif de simplifier l'architecture des contrats aidés, comme l'avait souligné le rapport Mercier-Raincourt de décembre 2005.
Se dégageaient donc, à notre avis, trois nécessités : améliorer l'intéressement pécuniaire à la reprise d'activité, déconnecter les droits sociaux du statut des personnes et simplifier les politiques d'insertion. Or, reprenant pour une part nos propositions, c'est exactement ce que fait ce projet de loi.
Le texte initial laissait subsister de grosses interrogations et des zones d'ombre : financement, compensation départementale, rapports des institutions gestionnaires entre elles, articulation du régime des droits connexes nationaux et locaux. A l'enthousiasme soulevé dès l'origine par la généralisation du RSA se mêle aujourd'hui la satisfaction de constater que les assemblées ont pu grandement remédier aux insuffisances techniques du texte.
C'est évidemment le cas pour la question du financement. La solution finalement adoptée semble équilibrée : il fallait que tout le monde contribue à cette mesure de solidarité, les plus aisés comme les autres. Le plafonnement des niches fiscales ouvert par ce projet, était, lui aussi, réclamé depuis longtemps par certains membres de notre groupe.
L'autre point problématique était la compensation du dispositif au département. Des garanties claires ont été apportées quant au contrôle comptable du département sur les sommes qu'il versera au titre du RSA. Notre Haute assemblée avait adopté la proposition de loi de Michel Mercier améliorant ce contrôle comptable. Nous nous réjouissons de constater que, finalement, ce projet de loi en sera le véhicule législatif puisque, à l'issue de la CMP, nos amendements reprenant les articles de la proposition de loi de Michel Mercier sont définitivement adoptés.
M. Alain Vasselle. - M. Mercier est toujours entendu !
M. Michel Mercier. - Jaloux !
M. Joseph Kergueris. - Autre point sur lequel nous nous réjouissons d'avoir été entendus : les droits connexes. Alors que le texte initial ne visait que les droits connexes nationaux, notre amendement déconnectant également les droits connexes locaux du statut de leurs éventuels bénéficiaires, a été retenu par la CMP.
L'examen parlementaire a aplani les questions techniques et poussé plus loin la réforme là où elle péchait par excès de timidité. La CMP a respecté ce volontarisme législatif. Elle a dû, en outre, trancher la délicate question des articles 13 bis et 13 ter relatifs à l'obligation d'emploi des personnes handicapées. Nous saluons la modification apportée par la CMP à l'initiative de Nicolas About. Les personnes handicapées n'auraient pas compris qu'on les comptabilise dans le quota d'emplois obligatoire lorsqu'elles auraient été embauchées à temps partiel ou très partiel.
Nous sommes en droit d'attendre beaucoup de ce projet de loi mais il ne règle pas la question des trappes à inactivité et de la précarité. Au contraire, beaucoup reste à faire. D'abord, le dispositif comporte une importante lacune : c'est celle de l'accompagnement. Il n'est pas certain qu'à budget constant, et malgré le dynamisme du dispositif RSA, l'on soit en mesure d'accompagner comme il le faudrait les personnes les plus éloignées de l'emploi dans leur parcours de réinsertion professionnelle. Ce chantier reste à ouvrir, faute de quoi l'on pourrait perdre une partie des effets bénéfiques du RSA.
Deuxièmement, il faudra poursuivre la réforme des droits connexes, afin de les déconnecter du statut. Ce chantier n'est qu'entamé.
Troisièmement, la question des jeunes subsiste, puisque restent exclus ceux de moins de 25 ans n'ayant pas d'enfant. La création d'un fonds d'expérimentation à leur intention est un progrès, encore faut-il qu'en sortent des dispositifs pertinents. Nous y serons attentifs.
M. le président. - Il est temps de conclure.
M. Joseph Kergueris. - Enfin, le RSA pourrait avoir un effet pervers exerçant une pression à la baisse des salaires tout en précarisant l'emploi. Cette principale critique adressée au dispositif n'est pas infondée. Nous devons absolument faire en sorte qu'elle ne devienne pas réalité. C'est pourquoi l'obligation légale de rendez-vous annuel entre chaque allocataire du RSA en activité et son référent du service public de l'emploi est une chose excellente, de même que l'intégration dans la négociation annuelle obligatoire de l'augmentation du temps de travail des salariés à temps partiel.
Nous voterons ce texte, en remerciant le haut-commissaire pour son écoute et l'ouverture dont il a fait preuve. (Applaudissements au centre et sur divers bancs à droite)
M. François Fortassin. - Ce projet de loi comporte un piège : nous ne pouvons qu'être favorables à la lutte contre la précarité...
M. Jean-Pierre Plancade. - In cauda venenum.
M. François Fortassin. - ... mais certains jugent le texte imparfait. Je l'estime bourré de malfaçons. J'y vois un mélange de générosité et d'utopie, celle-ci pouvant traduire une forme d'aveuglement. Ainsi, les départements sont mis en avant, bien qu'ils ignorent à quelle sauce ils seront mangés dans quelques mois.
M. Nicolas About, président de la commission. - Piquante ou aigre-douce.
M. François Fortassin. - Par ailleurs, le risque d'effets pervers est réel.
M. Alain Vasselle. - C'est le grand sujet.
M. François Fortassin. - Faute de mesures d'accompagnement, vous mettrez le feu au sein des entreprises entre des salariés au savoir-faire établi et ceux dont la productivité souffre d'un éloignement trop prolongé de l'emploi.
Monsieur le haut-commissaire, je sais que l'utopie l'emporte chez vous sur le sens des réalités, mais elle peut vous donner raison. La majorité de mon groupe votera donc ce texte, sans enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs du RDSE, au centre et à droite.)
M. Alain Vasselle. - Les radicaux sont des utopistes.
M. Yves Daudigny. - Nous partageons l'analyse faite par M. Vasselle au sujet de la grande distribution, mais pas ses conclusions.
A propos des amendements n°s1 et 2, nous partageons votre volonté de faire en sorte que les stagiaires handicapés soient mieux et plus largement accueillis dans les entreprises.
Nous avons entendu le haut-commissaire quant à l'amendement n°3, dont nous étudierons l'application dans l'Aisne. (Sourires)
Qui ne partagerait l'inspiration humaniste du texte ? Lors de la discussion générale, j'ai exposé nos réserves. Cette loi est en progrès, mais il faut la resituer dans un cadre politique global. Je regrette qu'elle ne comporte rien en faveur des personnes qui ne recherchent pas d'emploi : comme auparavant, les intéressés continueront à percevoir un minimum forfaitaire.
Les sénateurs socialistes s'abstiendront sur ce projet de loi qui ne constitue pas un plan global de lutte contre la pauvreté.
M. Alain Vasselle. - Quel exercice d'équilibristes !
Les conclusions de la commission mixte paritaire sont mises aux voix par scrutin public à la demande de la commission.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 222 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 112 |
Pour l'adoption | 196 |
Contre | 26 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements à droite et au centre.)
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Je tiens à exprimer ma reconnaissance pour votre contribution et ma gratitude pour la manière dont vous avez amélioré ce texte.
Cette première étape sera suivie par d'autres, que nous parcourrons peut-être ensemble.
Je remercie tous les orateurs et les présidents de séance, en relevant avec satisfaction qu'un président de conseil général assume cette tâche aujourd'hui.
Merci à tous ceux qui ont rendu cette réforme possible ! (Applaudissements)
Revenus du travail (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif aux revenus du travail.
Mme Isabelle Debré, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. - Réunie le 4 novembre, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord sur ce projet de loi que nous avions examiné en urgence au mois d'octobre.
Le dispositif est divisé en trois volets, qui portent respectivement sur l'intéressement, la participation et l'épargne salariale, sur la fixation du Smic et sur la conditionnalité des allégements de charges, mais il poursuit un seul objectif : soutenir le pouvoir d'achat de nos concitoyens.
La discussion parlementaire a considérablement enrichi le projet du Gouvernement : originellement limité à cinq articles, il en comportait quinze à l'issue de son examen par l'Assemblée nationale et 28 après son passage au Sénat.
L'Assemblée nationale a encouragé par plusieurs dispositions la diffusion de la participation et le développement de l'épargne retraite. Nous avons conforté ses orientations. Ainsi, le Conseil supérieur de la participation sera remplacé par un organisme placé auprès du Premier ministre : le Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié.
A l'initiative du Gouvernement, l'attribution de stock-options aux mandataires sociaux sera conditionnée à la présence dans l'entreprise ou le groupe d'un dispositif associant l'ensemble des salariés aux profits de l'entreprise. Enfin, l'entrée en vigueur de l'article 5, qui sanctionne les entreprises ou les branches qui n'auraient pas réussi à porter leurs minima salariaux au niveau du Smic, est subordonnée à l'absence d'amélioration significative de ces minima d'ici fin 2010.
Je salue la riche contribution aux débats de la commission des finances et de son rapporteur, M. Dassault (M. Nicolas About, président de la commission, approuve)
La CMP s'est prononcée sur vingt articles ; elle en a adopté seize dans la rédaction du Sénat, un dans celle de l'Assemblée nationale et a élaboré un texte commun sur les trois autres. Elle a décidé de supprimer l'abondement de fidélisation que nous avions introduit afin d'inciter les salariés à bloquer leur épargne plus longtemps que ce que la loi leur impose ; cette disposition risquait en effet de créer une forme de concurrence entre le plan d'épargne d'entreprise (PEE) et le plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco), qui est le véhicule naturel de l'épargne longue.
Elle a ensuite supprimé notre proposition de dispenser les fonds communs de placement d'entreprise d'actionnariat salarié mis en place par les PME de l'agrément préalable de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Nous souhaitions alléger les procédures, mais l'AMF vient de se doter d'une procédure simplifiée, plus rapide et tout aussi fiable. Notre objectif étant atteint, nous n'avons pas voulu prendre le risque de réduire les garanties offertes aux salariés.
La CMP a en outre assoupli notre dispositif relatif aux stock-options pour le rendre plus opérationnel. Comme le périmètre d'un groupe de sociétés évolue constamment, il est apparu difficile d'exiger que 100 % de ses salariés soient couverts en permanence par un dispositif les associant aux résultats de l'entreprise ; nous avons retenu finalement 90 %.
Dans un contexte de ralentissement économique et de critique généralisée contre le capitalisme, ce projet de loi, qui s'inscrit dans la tradition gaullienne d'association du capital et du travail, apparaît plus nécessaire que jamais. Je vous invite à l'approuver. (Applaudissements à droite)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. - Ce projet de loi est le fruit d'un long travail de concertation avec le Parlement. En agissant sur tous les leviers de la politique salariale, iI contribuera à revaloriser le travail dans notre pays, surtout pour les classes moyennes et modestes. Je salue la contribution importante du Sénat, le travail de Mme Debré et de la commission des affaires sociales, avec laquelle le Gouvernement a toujours plaisir à travailler, et l'investissement de M. Dassault. Je remercie également Mmes Annie Jarraud-Vergnolle et Annie David qui ont été très présentes pendant nos débats.
Le projet de loi met en place un crédit d'impôt pour encourager le développement de l'intéressement dans les PME, avec l'objectif d'en doubler le montant d'ici 2012. La règle sera le libre choix du salarié, disposer des sommes considérées ou les bloquer. Je me félicite que le débat parlementaire ait permis d'élargir le champ des bénéficiaires, notamment à l'initiative de Mme Catherine Procaccia. Mme Isabelle Debré a souhaité à bon droit que le dispositif soit évalué ; le nouveau conseil d'orientation se substituera au Conseil supérieur de la participation. Nous avons également tenu à ce que figure dans le texte un volet sur la moralisation des rémunérations des dirigeants.
Un groupe d'experts indépendants se prononcera chaque année sur l'évolution du Smic ; nous sortirons ainsi d'une pratique démagogique, celle des coups de pouce, qui est déconnectée des attentes des salariés comme de la réalité économique. La conditionnalité des allègements de cotisations stimulera la négociation salariale. Il n'est pas acceptable qu'un quart des entreprises ne respecte pas leurs obligations en la matière. Pour celles qui continueraient à s'y dérober, les allègements diminueront de 10 % chacune des deux premières années et seront supprimés la troisième. Au niveau des branches, les allégements seront calculés en fonction du premier niveau de la grille, l'objectif étant qu'aucun minimum salarial ne soit inférieur au Smic en 2010. Mme Isabelle Debré a souhaité qu'on tienne compte de la réalité et de la dynamique des branches et qu'on articule mieux les niveaux entreprise-branche. Je crois que nous avons trouvé une solution équilibrée.
Ce texte utilise tous les leviers disponibles de façon pragmatique, afin que les salariés modestes et des classes moyennes retrouvent des perspectives salariales. (Applaudissements à droite)
Mme Annie David. - Nous parvenons aujourd'hui au terme de nos travaux sur un texte abusivement intitulé « projet de loi en faveur des revenus du travail ».
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. - Ça commence fort !
Mme Annie David. - Il tourne le dos à l'aspiration première et légitime de nos concitoyens, l'augmentation de leur pouvoir d'achat. Les chiffres du chômage pour le mois d'octobre sont alarmants, Mme Lagarde, M. Wauquiez ont parlé de plus de 40 000 demandeurs d'emploi et confirmé que le chômage allait encore augmenter pendant plusieurs mois. Un nombre de plus en plus grand de femmes et d'hommes, salariés du public comme du privé, chômeurs ou retraités ont des fins de mois difficiles, malgré tous les textes adoptés ces derniers mois. Face à la crise, alors que l'urgence est d'augmenter considérablement les retraites, les aides sociales et le Smic, le Gouvernement préfère prévoir la revalorisation de celui-ci au 1er janvier et la fonder sur des critères purement techniques -en attendant de le supprimer, ce que suggère un rapport du Conseil d'analyse économique à la grande joie du Medef.
Ce texte ne permettra pas aux ménages d'augmenter leur pouvoir d'achat ; il donne en revanche au Gouvernement l'occasion d'accorder aux employeurs de nouveaux cadeaux fiscaux tout en organisant durablement le gel des salaires. Intéressement et participation sont en effet par nature des mécanismes individualisés, inégalitaires, discriminants...
Mme Isabelle Debré, rapporteur. - Tout ça !
Mme Annie David. - ... souvent inintéressants pour les salariés. L'employeur n'est pas tenu d'y recourir uniformément. Au principe simple et égalitaire de la rémunération collective, vous préférez des règles toujours plus individuelles, espérant déconstruire ainsi la solidarité salariale. Vous répondez encore une fois à une commande patronale, l'individualisation des rapports employé-employeur, afin de réduire le rapport de forces. Ces mécanismes sont en outre inintéressants pour les salariés, puisqu'ils permettent aux employeurs de refuser toute augmentation des salaires au nom de la compétitivité.
Pourtant, selon une enquête du magazine Capital d'octobre dernier, la rémunération moyenne mensuelle des dirigeants industriels de notre pays serait de 383 000 euros, soit plus de 310 fois le Smic ; et les rémunérations des employeurs ont augmenté de plus de 20 %. La rémunération du deuxième patron le mieux payé de France a bondi de 32 % entre 2007 et 2008, alors que les profits de sa société n'ont progressé que de 8 %. Pour Pierre-Henri Leroy, président fondateur de Proxinvest, « ces rémunérations ne sont pas choquantes. (...) La hausse des profits des sociétés en 2007 légitime cette progression modérée ». Une hausse de 20 %, modérée ? Les salariés, les retraités de notre pays sauraient s'en satisfaire !
J'en viens à la proposition, introduite en cours de débats, de conditionner l'octroi aux employeurs de stock-options à l'existence de mécanismes d'intéressement ou de participation, voire à la distribution de stock-options à l'ensemble des salariés. Dans le contexte actuel de crise, c'est une véritable provocation. Vous généralisez, sans l'encadrer, l'actionnariat salarié, faisant ainsi de chaque salarié actionnaire le responsable de son propre licenciement ; nous savons bien ce à quoi conduit la recherche effrénée du profit par les actionnaires majoritaires.
La détention d'actions de leurs entreprises ne les protégera pas des licenciements boursiers. De plus, quelle serait la situation des salariés si une partie de leur rémunération était assise sur les placements boursiers ? Regardez la crise boursière et l'effondrement des actions. Aux États-Unis, les retraités qui ont étés contraints de placer une partie de leur pension sur des fonds spéculatifs le regrettent. Au plein coeur de la crise, vous entendez généraliser cette catastrophe à nos salariés !
Quant à l'obligation d'adhésion à un Perco, je ne vois pas en quoi cela va augmenter leur pouvoir d'achat. Cela va bénéficier aux différents fonds de placement, en revanche. Je parle bien d'obligation d'adhésion, car le mécanisme habituel et logique qui consiste à faire le choix d'adhérer, est inversé : le salarié est présumé vouloir adhérer à ces mécanismes de retraites par capitalisation, histoire de mêler plus encore dans les têtes retraite par répartition, assise sur la solidarité nationale, et retraite par capitalisation, assise sur la capacité d'épargne de chacun et sur le mouvement spéculatif. Cette modification apportée de façon discrète par le Sénat ouvre une brèche dans le droit en vigueur : il ne faut pas extraire la question du Perco du champ global des négociations collectives, qui ont pour objet aujourd'hui les questions salariales, l'épargne salariale, l'intéressement, et donc le Perco. Or les partenaires sociaux n'ont pas été consultés sur ce point.
Votre proposition d'autoriser le déblocage permanent de l'épargne salariale est la preuve de l'inefficacité de ce texte : Nicolas Sarkozy l'avait déjà utilisée alors qu'il était en charge du budget ; en février 2008, vous nous l'avez resservie avec la loi en faveur du pouvoir d'achat. Mais vous ne convaincrez pas les salariés qu'en piochant dans leur épargne, ils gagneront durablement du pouvoir d'achat.
Selon Ephraïm Marqueur, président de l'Association française de la gestion financière, « la crise financière pourrait peser sur l'épargne salariale et conduire, en cas de déblocage, à des moins-values ». Il ajoute que « l'évolution de l'encours d'épargne salariale montre que le phénomène ne devrait pas être rare. Au 30 juin dernier, la participation fêtait ses quarante ans sur un record historique de l'épargne salariale qui affichait au total près de 94 milliards détenus par 11 millions de porteurs. Fin décembre, la valeur de cet encours aurait perdu 9 milliards ». On n'était qu'au 31 décembre 2007, alors que nous n'étions pas au coeur de la crise. Il estimait pourtant déjà que « les systèmes d'épargne salariale ne sont pas des systèmes sur lesquels il faut faire des interventions conjoncturelles pour régler des questions de pouvoir d'achat ».
Lorsque nous vous proposions de rendre obligatoire la tenue de réelles négociations sur les conditions salariales, vous nous répondiez qu'il était impossible pour le Gouvernement de s'immiscer dans la relation contractuelle qui lie l'employeur au salarié. Comme si l'augmentation générale des salaires en mai 1968 n'avait pas résulté de l'implication directe de l'État ! Et pourtant, la commission mixte paritaire a décidé de créer une commission chargée de promouvoir, auprès des employeurs, et sans doute des salariés, l'intéressement et la participation. Lorsqu'il s'agit de favoriser votre conception de la rémunération, l'immersion dans une relation privée, contractuelle, ne vous effraye plus !
Ce projet de loi ne sera donc pas bénéfique aux salariés. Il est par contre utile au patronat qui bénéficie d'un nouvel outil de pression pour maintenir les bas salaires, et qui en profitera. Et ce ne sont pas les deux derniers articles qui me feront changer d'avis : ils légitiment l'inacceptable, l'existence d'une grille en dessous du Smic.
Nous sommes opposés à ce projet de loi car il ne répond pas à la vraie question, celle qui nous réunit aujourd'hui et que vous n'assumez pas, celle de la répartition des richesses, de la répartition de la plus-value entre le travail et le capital. Le partage que vous proposez, c'est 10 % pour le travail, 90 % pour le capital ! (Applaudissements sur les bancs CRC)
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Le moins que l'on puisse dire, c'est que vous avez des difficultés à améliorer le pouvoir d'achat des Français !
M. Nicolas About, président de la commission. - Ce n'est pas simple.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - On aurait presque envie de vous encourager, si nous ne vous soupçonnions pas d'avoir pour seul objectif de permettre au Président de la République de devenir le « président du pouvoir d'achat » !
M. Guy Fischer. - Slogan mensonger !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Ce texte renforce notre inquiétude. Pas par esprit de contradiction. Pas par souci d'opposition frontale. Vous réitérez un vain remue-ménage, comme avec la loi Tepa et son effet non convaincant sur la majoration des heures supplémentaires, sur les exonérations fiscales et sociales, dont l'extrême complexité a provoqué la réticence des employeurs, puis de nombreux effets d'aubaine. Début 2008, vous reveniez à la charge avec votre loi visant au rachat des RTT. Pas plus d'une entreprise sur cinq propose le rachat des jours de RTT, et peu de salariés le demandent. Vous vouliez déjà débloquer la participation jusqu'à 10 000 euros avant le 30 juin 2008, et prétendiez nous faire croire que la consommation en serait favorisée. Pas de chance. Le miracle ne s'est pas produit ! Les sommes débloquées sont allées principalement en placement en assurance-vie.
Il est difficile de prôner une épargne de longue durée en vue d'une retraite par capitalisation, stabilisatrice pour le financement des entreprises, tout en multipliant les mesures de déblocage pour inciter les salariés à soutenir la consommation en dépensant immédiatement cette épargne de longue durée !
Enfonçant le clou avec le RSA, vous prétendez une fois de plus vous occuper du pouvoir d'achat des plus démunis, sans convaincre mais étiez-vous vous-mêmes convaincus ? Sans doute pas encore assez, puisqu'au même moment vous créez un comité d'observation de ce bon vieux Smic, afin d'évaluer la nécessité de revaloriser ce dispositif pérenne qui n'a pas à prouver son utilité et son importance.
Entre-temps, la crise est survenue. Au lieu de vous convaincre de l'urgence qu'il y a à revoir toutes vos copies, voilà qu'une nouvelle idée germait : réinventer le capitalisme. Belle coïncidence ! Je me suis demandé quel était le sens de cette formule : « en faveur de revenus du travail ». Mon pressentiment a été confirmé : il y a au mieux une confusion, au pire de l'imposture dans le titre même de ce projet de loi.
M. Guy Fischer. - Une imposture !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Le revenu du travail, ce n'est ni plus ni moins que le salaire. Dans ce groupe nominal, le terme générique « revenu » est précisé par le complément de nom « travail » qui en spécifie la nature. Par un subtil glissement sémantique, presque une tautologie, vous procédez d'un glissement de sens communicant, comme avec « travailler plus pour gagner plus » qui n'était qu'un consternant sophisme, d'ailleurs inopérant. En somme, vous n'inventez rien, vous emballez mieux. C'est clinquant mais on a eu le temps de s'habituer au produit, assez pour le repérer avant de se faire avoir.
Trois aspects de ce projet de loi nous renseignent. D'abord, votre confusion entre intéressement et participation. Même en dehors du contexte qui s'est considérablement dégradé depuis que vous promettiez la sauvegarde de l'économie réelle, rares sont les PME qui disposent de la trésorerie nécessaire pour entrer dans le dispositif de cette loi. Le PEE est un engagement à long terme. Pensez-vous que vos bonnes intentions suffiront à convaincre ? Sinon, à qui exactement s'adresse ce dispositif ? Tandis que vous nous vendiez le RSA, vous mettiez en place un comité d'experts chargé de réévaluer le Smic. Quand on compte parmi les plus démunis, ce n'est pas très lisible : entre le RSA qui suspecte les chômeurs de profits indus et de confort dans la précarité, et un Smic soumis à évaluation, on ne peut pas dire que le pouvoir d'achat apparaisse comme une priorité absolue. On a le temps, au mieux, de venir grossir les chiffres du chômage, et au pire, d'aller mourir de froid dans le bois de Vincennes en attendant la parution des décrets d'application !
M. Nicolas About, président de la commission. - Un peu violent !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Certes. Ce discours s'adressait à M. Bertrand, que j'ai entendu ce matin à la radio.
Enfin, pour ce qui relève des branches dans lesquelles certains salaires sont encore inférieurs au Smic, vous proposez en guise de garantie préalable à l'exonération de charges, la seule ouverture de négociations au sein de l'entreprise. Comme si sa mise en oeuvre pouvait égaler le résultat. On n'avait pas fait plus lacunaire depuis le code de bonne conduite des banquiers de Mme Lagarde !
N'est pas devin qui veut, vos bonnes paroles n'engagent que ceux qui veulent bien y croire. Vos bonnes intentions n'enthousiasment que les plus naïfs. Monsieur le ministre, vous direz à M. Bertrand que l'excès d'enthousiasme aboutit à l'infatuation.
Pour la réinvention du capitalisme, j'ai des suggestions à vous faire : augmentons les bas salaires et essayons de convaincre les très hauts revenus que la répartition est une bonne chose, conditionnons les exonérations de charges à des embauches ou des salaires corrects. Alors vous aurez agi concrètement en faveur du pouvoir d'achat. (Applaudissements à gauche)
La discussion générale est close.
M. le président. - En vertu de l'article 42 alinéa 12 du Règlement, le Sénat étant appelé à se prononcer en second sur le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il procède à un vote unique sur l'ensemble du texte.
Les conclusions de la CMP sont adoptées.
M. Nicolas About, président de la commission. - Je rappelle aux membres de la commission que nous nous réunissons sitôt la séance suspendue.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Encore !
La séance est suspendue à 12 h 30.
présidence de M. Gérard Larcher
La séance reprend à 15 heures.
Questions d'actualité
M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement aux questions d'actualité. J'appelle chacun à respecter son temps de parole.
Réforme de l'audiovisuel public
M. Jack Ralite . - Ma question s'adressait à M. le Premier ministre, mais il est absent. Les députés discutent actuellement du projet de loi sur le service public de l'audiovisuel, qualifié d'historique par M. Sarkozy, qui fut son annonciateur illuminé un certain 8 janvier, et qui depuis fait tout, en direct ou par intermédiaires éblouis, pour être le berger de la jouissance et de l'éducation du peuple. (Applaudissements amusés à gauche ; marques d'indignation à droite) La première sera confiée à la télévision commerciale de son ami régalé Martin Bouygues ; la seconde à ce qui restera de la télévision publique, dont il nommera et révoquera le président muselé.
Cela nous vaut d'écoper des paroles d'or de M. Copé, qui fabriquent du plomb. (Sourires) Après la démission de sa commission des élus de l'opposition, le rejet roboratif du représentant de la BBC, huit professionnels, qui en étaient, ont écrit : « Ce groupe de télévision, indispensable à la bonne marche de la Cité, va être amputé. Il va devoir vivre avec des béquilles. »
Dans cette affaire, il est question de pensée, de création, d'information, d'innovation, de désir ! Sur ces dimensions capitales de la vie nationale qui, bafouées, transformeraient notre République en démocratie au plafond bas, on nous oblige à un demi-débat d'urgence pour attacher le peuple au quotidien, rêvant qu'il renonce à l'usage de sa volonté. « L'homme symbolise comme il respire. ». Vous trafiquez le monde des symboles, la fabrication de l'imaginaire populaire, selon la maxime « On noue les boeufs par les cornes et les hommes par le langage ». (Marques d'approbation admirative à gauche ; protestations à droite)
Au sujet du financement du service public, l'État répond toujours qu'il compensera la suppression de la publicité. Je n'en crois rien : les services publics de l'hôpital, de La Poste, de l'éducation nationale sont tous sacrifiés par la RGPP. Mais je rêve d'être convaincu, aimant la télévision comme 98 % des Français. J'aimerais avoir de vrais chiffres, tenant compte de la compensation en programmes du temps libéré par la publicité, ainsi que des indispensables crédits de développement, non sur un an mais sur dix -comme à la BBC- pour garantir la survie de l'audiovisuel public.
Voix à droite. - C'est trop long !
M. Jean-Pierre Sueur. - Mais c'est intéressant !
M. Jack Ralite. - Je ne puis faire confiance à Mme Albanel, quand elle prétend qu'aucun emploi ne sera supprimé ; j'en crois plutôt le ventriloque du projet, M. Lefebvre, (rires à gauche) qui, en annonçant deux mille licenciements, a provoqué la légitime colère de l'intersyndicale de France Télévisions. Démontrez-nous, mesdames et messieurs les ministres, que la suppression de la publicité qui pollue ne va pas se transformer en absence de publicité qui va tuer le service public. (Applaudissements vifs et prolongés à gauche)
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement . - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Albanel, qui défend en ce moment même le projet de loi sur l'audiovisuel public à l'Assemblée nationale.
Monsieur Ralite, je vous rappelle que les 450 millions d'euros nécessaires pour compenser la suppression de la publicité ont été inscrits au budget de l'État, déjà voté par l'Assemblée nationale. (Applaudissements à droite)
M. Bernard Piras. - C'est insuffisant !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - D'ailleurs ce n'est pas l'État qui a déterminé le montant de cette compensation, c'est la direction de France Télévisions ! Le budget du groupe sera donc équilibré.
Mme Raymonde Le Texier. - La commission Copé avait parlé de 650 millions d'euros !
M. Bernard Piras. - L'État ne respecte pas ses engagements !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Dois-je vous rappeler qu'en 1968, lorsque l'un gouvernement de droite avait proposé d'autoriser la publicité à la télévision, la gauche avait déposé une motion de censure ? (Applaudissements et quolibets à droite ; protestations à gauche)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Vous êtes drôle, vraiment !
M. Bernard Piras. - Cela fait quarante ans !
Mme Catherine Tasca. - Il n'y avait pas de chaînes privées en 1968 !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - La suppression de la publicité va permettre la création d'une télévision publique de qualité...
Voix à gauche - Tenue par l'Elysée !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - ... qui diffusera des programmes culturels, du théâtre, du cinéma...
Mme Raymonde Le Texier. - Des programmes choisis par vous !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Vous protestez contre la nomination du président de France Télévisions par l'État...
M. Bernard Piras. - Par l'Élysée !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Vous avez refusé de voter la dernière révision constitutionnelle, mais je vous rappelle que les commissions parlementaires auront leur mot à dire sur ces nominations !
M. David Assouline. - Avec quels pouvoirs ?
M. Bernard Piras. - C'est une plaisanterie !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Nous voulons créer une télévision publique de qualité, qui ne soit pas dépendante de l'audimat. (Vis applaudissements à droite ; protestations à gauche)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Chat échaudé craint l'eau froide !
Taux variable et endettement des communes
M. Serge Dassault . - Ma question... (Des huées sur les bancs de la gauche couvrent la voie de l'orateur)
M. David Assouline. - Voici le grand capital, l'information verrouillée !
M. Jean-Louis Carrère. - C'est M. Dassault qui aurait dû répondre à la question précédente !
M. Serge Dassault. - Ma question s'adresse à Mme Lagarde. Je souhaite attirer votre attention sur un problème qui concerne toutes les collectivités locales. Celles-ci ont contracté des emprunts à taux variable sur des produits structurés. Sur un encours de dettes de 1,38 milliard d'euros en 2007, les collectivités locales détiennent entre 20 et 25 milliards de produits structurés.
L'évolution des taux variables, souvent liée à des critères sensibles comme les parités de change, peut entraîner une augmentation insupportable du montant des mensualités. Pour certaines collectivités, ces produits risqués représentent parfois plus de 60 % de leur endettement global.
Les maires et les présidents d'agglomération souhaitent renégocier leurs conditions de prêts et transformer des emprunts à taux variable en emprunts à taux fixe. Or les pénalités imposées par les établissements bancaires, dont certains sont soutenus par l'État, coûtent trop cher ! Madame la ministre, pouvez-vous agir auprès des banques finançant les collectivités territoriales pour que le passage des taux variables à taux fixes se fasse sans pénalité ? (Applaudissements à droite)
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi . - Les collectivités locales sont un acteur majeur de l'économie, et le Gouvernement se soucie bien entendu de leur financement.
Premièrement, l'État est venu à l'aide de Dexia, financeur traditionnel des collectivités locales, en entrant au capital à hauteur de 1 milliard, aux côtés de la Belgique et du Luxembourg. Deuxièmement, la Caisse des dépôts et consignations a émis pour 5 milliards d'obligations la semaine dernière afin que les collectivités locales soient approvisionnées en liquidités.
Le 4 novembre, avec Mme Alliot-Marie, j'ai réuni les représentants des collectivités locales et des banques qui les financent -Dexia, Caisse d'épargne, Crédit agricole- afin d'examiner la situation secteur par secteur, département par département, banque par banque, et porter un diagnostic partagé. Certaines collectivités sont en difficulté, non pas tant à cause des taux variables, mais parce qu'elles ont pris des produits structurés toxiques, dont la part dans leur bilan est estimée à 6 %. Les banques proposeront des solutions spécifiques, au cas par cas, avant la fin de l'année.
Par ailleurs, nous examinons les bonnes pratiques pour retenir les meilleures.
M. Jacques Mahéas. - Il fallait le faire avant !
Mme Christine Lagarde, ministre. - Il n'est jamais trop tard pour bien faire ! Je vous sais attachés au principe d'autonomie en matière de financement.
Enfin, nous mettons en place un observatoire des pratiques, produit par produit et collectivité locale par collectivité locale.
Voilà le travail du Gouvernement : financement, information, mise en concurrence, coopération avec les banques. (Applaudissements à droite et au centre)
Crise du secteur de l'automobile
M. Jean-Pierre Chevènement . - Le sauvetage de notre industrie automobile, qui emploie directement et indirectement plus de 3 millions de personnes et représente 10 % du PIB, doit devenir une priorité absolue.
La baisse de 7 % des ventes en octobre par rapport à 2007 est très préoccupante. De longues périodes de chômage technique sont programmées. Dans ma région, nombre d'entreprises sont en difficulté, comme Sonas ou Key Plastics.
Le temps presse ! Sur son marché naturel de l'Europe occidentale, l'automobile française est dominée par l'Allemagne pour le haut de gamme, et de plus en plus concurrencée sur la basse et moyenne gamme.
La logique libre-échangiste risque d'entraîner la disparition des sites de production français : toute la production française destinée à l'Europe occidentale peut être réalisée en Europe centrale et orientale ou en Asie ! Nous serions alors doublement perdants, à l'importation et à l'exportation.
Un plan européen pour soutenir et protéger l'industrie automobile européenne et française s'impose. Les États-Unis ont annoncé 25 milliards en faveur de leur propre industrie. La Commission européenne a évoqué 40 milliards, mais ce n'est que l'addition de plans nationaux. Qu'en est-il vraiment ? Pouvez-vous nous donner des chiffres précis et nous décliner les modalités concrètes d'une telle aide ? Cette aide, qui ne peut se limiter à une baisse de la TVA profitant aux voitures étrangères et à quelques incitations à produire des véhicules propres, ne pourra être accordée sans contreparties précises, notamment en matière d'emploi.
La puissance publique va-t-elle s'impliquer dans le capital des entreprises françaises, notoirement sous-capitalisées ? Envisagez-vous une taxe anti-dumping social et une écotaxe pour égaliser les conditions de concurrence avec les pays à bas coûts, peu soucieux de l'environnement ? La France va-t-elle poser la question de la protection du marché européen, seule à même de garantir la pérennité de notre industrie, lors du prochain Conseil européen ? (Applaudissements sur les bancs RDSE et sur quelques bancs socialistes)
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi . - Nous n'avons pas attendu le prochain Conseil européen pour engager le dialogue avec nos partenaires européens, mais aussi avec les pays du G20. Il s'agit de la stratégie industrielle de la France en Europe mais aussi du développement de l'ensemble des pays du monde ! Parmi les résolutions prises à Washington figure le refus de recourir au protectionnisme, qui ne peut que mener à des crises plus graves.
Je partage votre diagnostic sur le marché automobile français, même si j'estime le nombre d'emplois concernés plutôt à 2,5 millions. Dans une crise mondiale -Ford, Chrysler, General Motors sont touchés- le Gouvernement tente de soutenir le marché français. Le bonus-malus, instauré par Jean-Louis Borloo à la suite du Grenelle de l'environnement, a permis de soutenir les ventes de véhicules français.
Il faut bien s'en souvenir.
Nous avons engagé depuis un an des mesures structurelles fortes : le crédit d'impôt recherche, revalorisé et simplifié, profite d'abord à l'industrie automobile car c'est elle qui dépose le plus de brevets : plus de 350 millions pour l'un de nos constructeurs, près de 400 millions pour l'autre ! (Marques d'impatience à gauche)
Voix à gauche. - Cinq minutes ! (Protestations à droite)
Mme Christine Lagarde, ministre. - Je peux m'arrêter si cela ne vous intéresse pas, mais cela semble intéresser M. Chevènement !
M. le Président. - Poursuivez, madame la ministre : je suis seul comptable du temps.
Mme Christine Lagarde, ministre. - Il va y avoir des suppressions d'emplois et d'importantes mesures de chômage technique. Nous prendrons des mesures de soutien et, quand nous les prendrons, nous les assortirons de contreparties et d'engagements en matière d'emploi, de recherche et développement sur le territoire ainsi que de localisation des productions. Vous le voyez, le Gouvernement ne reste pas les bras ballants. (Applaudissements à droite ; exclamations sur les bancs socialistes)
M. François Zocchetto . - Si le marché et la concurrence sont nécessaires, le secteur agricole et agroalimentaire traverse des crises alarmantes. Nous avons sans doute sous-estimé l'impact de la suppression des outils de régulation européens : toute légère variation de production génère d'importantes fluctuations de prix. Mais ni le producteur ni le consommateur ne profitent de cette nouvelle donne. Lorsque les prix de production augmentent, ceux des linéaires aussi ; cependant, lorsque les coûts diminuent, les prix ne baissent pas dans les linéaires. Non seulement ce n'est pas bon pour le pouvoir d'achat des consommateurs, mais encore les distributeurs obligent parfois les producteurs à baisser leurs prix sans répercuter cette baisse. Il est donc indispensable que la France se dote d'un observatoire des marges.
L'agriculteur gagne moins, l'industrie agro-alimentaire gère de façon serrée et les prix augmentent. L'argent doit bien passer quelque part... L'observatoire des marges nous aiderait à veiller à une juste répartition de la valeur ajoutée et permettrait enfin au consommateur de savoir comment se décompose le coût d'un produit en linéaire de supermarché. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi . - (Applaudissements à droite) Vous avez parfaitement raison de poser la question de la détermination des marges. C'est pourquoi, avec Luc Chatel, nous avons mis en place en mars dernier un observatoire des prix et des marges.
M. Didier Boulaud. - Il ne reste plus qu'à créer une table ronde...
M. René-Pierre Signé. - Et une commission !
Mme Christine Lagarde, ministre. - Il est désormais possible d'accéder très rapidement sur le site du ministère aux relevés des prix ainsi qu'à des rapports et analyses sur les marges. Nous avons observé...
M. Didier Boulaud. - C'est normal, avec un observatoire !
Mme Christine Lagarde, ministre. - ... que la non-discrimination est facteur d'inflation : quand un distributeur augmente un prix, il doit le répercuter à tous les clients et quand il veut le baisser, il doit s'entendre avec chacun. C'est pourquoi nous avons mis fin à l'interdiction des pratiques discriminatoires, sans pour cela que le fournisseur dispose d'une totale liberté : il doit justifier ses prix, mais n'est pas tenu à une uniformisation. Nous avons également réformé l'autorité de la concurrence, car il ne peut y avoir de liberté contractuelle que dans un cadre régulé, avec la possibilité de sanctionner les comportements prédateurs.
M. Barnier et moi avons étudié comment, avec l'observatoire des prix et des marges, élaborer des recommandations...
M. Jean-Louis Carrère. - Ce n'est pas suffisant !
Mme Christine Lagarde, ministre. - ... et faire en sorte...
M. le Président. - Si vous voulez bien conclure...
Mme Christine Lagarde, ministre. - ... que les prix des produits agroalimentaires soient déterminés de manière convenable. (Applaudissements à droite)
Lutte contre la grande pauvreté
M. Louis Mermaz . - J'avais adressé ma question à M. le Premier ministre mais je crois savoir que c'est Mme Lagarde qui me répondra.
Un SDF vient de mourir : c'est un pic dans la détresse qui s'étend. Faute de structures adaptées et de personnel en nombre suffisant, les conditions d'accueil des plus pauvres ne permettent pas de répondre à un excès de détresse et d'abandon. Le Gouvernement doit prendre immédiatement des initiatives. Comment allez-vous humaniser des conditions d'accueil compromises par une promiscuité qui suscite le recul des SDF ? Les ONG et les organisations caritatives lancent un cri d'alarme car la crise et le chômage accroissent le nombre des nouveaux pauvres en situation de déshérence ; des centaines de milliers de familles, ne parviennent plus à boucler le mois, à se nourrir, à se loger, à se soigner, à vivre.
Je rends hommage à tous ceux, fonctionnaires de l'État, agents des collectivités locales, bénévoles des associations, qui ont à coeur de pallier les insuffisances de notre société et sont au service des plus démunis tout au long de l'année. Le Gouvernement annonce des plans de relance pour tel ou tel secteur, mais chacun a le sentiment que la crise s'aggrave et se prolongera peut-être jusqu'en 2010 ou 2011. Il y a urgence de nous porter au secours de ceux qui n'en peuvent plus ! Qu'attendez-vous pour dégager les moyens financiers nécessaires comme vous avez su en trouver pour d'autres ?
M. le président. - Votre question...
M. Louis Mermaz. - Elle s'adresse aussi à vous, monsieur le Président : qu'attendez-vous pour mobiliser les administrations, mobiliser les préfets et soutenir concrètement les ONG ? Qu'attendez-vous pour lancer un plan de lutte contre la misère à hauteur du drame qui est en train de se nouer ?
M. le président. - S'il vous plaît, monsieur Mermaz !
M. Louis Mermaz. - Ferez-vous enfin ce qu'il est de votre responsabilité de faire ? (Vifs applaudissements à gauche)
M. le président. - Les questions s'adressent au Gouvernement, et non au président.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. - Le Gouvernement est sensible à toutes les situations de détresse. Tous les services de l'État sont mobilisés.
M. Jean-Louis Carrère. - Par le bouclier fiscal !
M. Bernard Piras. - Pour faire payer des amendes aux associations !
Mme Christine Lagarde, ministre. - Ma collègue Christine Boutin est sur le pont jour et nuit !
M. René-Pierre Signé. - Cela ne se voit pas !
Voix sur les bancs socialistes. - Et sous les ponts ?
Mme Christine Lagarde, ministre. - Mais l'histoire économique nous apprend que, pour que l'économie fonctionne, que les investissements se réalisent, que les emplois soient préservés, il faut que le système financier fonctionne. (Vives protestations à gauche, qui couvrent la voix de l'oratrice) C'est notre priorité.
M. Bernard Piras. - Et entre temps ?
Mme Christine Lagarde, ministre. - Deuxième priorité, défendre l'emploi, pour éviter que le chômage ne gagne. C'est pourquoi le Sénat a voté le RSA. (Applaudissements sur les bancs UMP ; vives protestations à gauche)
M. Jacques Mahéas. - Vous appelez cela une réponse ?
M. Bernard Piras. - Pour quel résultat ?
Mme Christine Lagarde, ministre. - Ce dispositif doit rendre aux plus fragiles, aux plus indigents, un revenu et la dignité au travail. (Vives protestations à gauche)
M. Jean-Louis Carrère. - C'est votre réponse qui est indigente !
Mme Christine Lagarde, ministre. - Car l'activité est, pour eux, la première réponse. (Nouvelles protestations sur les mêmes bancs)
Nous devons tous être mobilisés...
M. Bernard Piras. - Que croyez-vous que nous faisons ? Que croyez-vous que font les maires ?
Mme Christine Lagarde, ministre. - ... et faire oeuvre de solidarité. (Nouvelles protestations sur les mêmes bancs)
M. Bernard Piras. - Lamentable !
Bilan de santé de la PAC
Mme Élisabeth Lamure . - Le rendez-vous 2008 du bilan de santé de la PAC, prévu dès la dernière réforme de 2003, constitue, monsieur le ministre de l'agriculture, une révision à mi-parcours d'autant plus délicate qu'elle intervient dans un contexte économique et financier difficile.
Souvenons-nous que l'an dernier, la PAC a représenté la moitié du revenu de nos agriculteurs, avec près de 9 milliards au titre du premier pilier.
C'est sous votre présidence du conseil des ministres de l'agriculture des Vingt-sept, qu'après un an de négociations, un accord solide est intervenu, le 20 novembre dernier, sur la base de propositions améliorées et équilibrées. Elles prennent en compte les principales priorités de la France et d'une majorité d'États membres. Nous pouvons tous ici vous féliciter, tant sur la forme que sur le fond. D'autant que les orientations initiales de la Commission européenne étaient loin d'être satisfaisantes. Nous retiendrons votre méthode, tendant à associer le Parlement européen bien en amont, votre volonté de consolider la dimension économique de la PAC et d'assurer une régulation bien comprise, sans pour autant ignorer le défi d'une agriculture durable. Vous vous êtes battu pour plus de prévention, plus d'équité, plus d'équilibre territorial. (M. Bernard Piras fait mine de jouer du violon)
M. René-Pierre Signé. - Allô, allô ?
Mme Élisabeth Lamure. - L'agriculture doit rester une activité de production, alors même que les désordres alimentaires mondiaux deviennent cruciaux. Les sujets difficiles n'ont pas manqué. Je pense aux mécanismes d'intervention ou aux quotas laitiers.
L'enjeu est de prévoir l'adaptation du système de la PAC aux évolutions très rapides de notre temps, pour mieux préparer l'échéance 2013 qui verra la révision des politiques communes.
Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous préciser les grands axes de cet accord ? Quels succès, quel cadre financier, pour quelle application, selon quel calendrier ? Cet accord répond-il aux attentes de nos paysans, qui, dès 2009, auront un cap difficile à passer ? (Applaudissements à droite)
M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche . - C'est en effet jeudi au petit matin, après quatorze heures d'une négociation menée pour la première fois à Vingt-sept, que nous sommes parvenus à un accord sur l'adaptation d'une politique de soutien à ce secteur productif de l'économie, dont la naissance remonte à quarante ans, sous les auspices d'Edgar Pisani, alors ministre de l'agriculture.
M. Jean-Louis Carrère. - M. Mermaz l'a bien défendue aussi.
M. Michel Barnier, ministre. - J'ai eu le souci de vous en informer le matin même. Qu'avons-nous obtenu ? Nous avons préservé l'ensemble des outils d'intervention. Je l'ai dit, je ne laisserai pas le secteur agricole et alimentaire se transformer en un simple marché. (Applaudissements sur les bancs UMP )
M. Charles Gautier. - Gauchiste !
M. Michel Barnier, ministre. - Nous conservons, dans le budget européen, les moyens de créer ces outils destinés à mieux protéger les exploitants agricoles que sont l'assurance récolte et le fonds sanitaire. Quant aux quotas laitiers, dont il avait été décidé en 2003 qu'ils seraient supprimés en 2014, la responsabilité m'était échue, si nous ne revenions pas là-dessus, d'en préparer la sortie. Nous avons mis leur évolution sous pilotage politique, quand la Commission proposait un pourcentage annuel automatique. Nous pourrons ainsi mieux aider, avec le même argent, les secteurs et les territoires qui en ont le plus besoin : j'ai souvenir d'avoir été souvent interpellé ici sur l'élevage bovin et la production laitière. Nous nous sommes enfin donné les moyens de répondre aux nouveaux défis du développement durable.
Nous sommes parvenus à un bon accord, qui préserve notre politique agricole, et qui a su faire bouger les lignes, au départ très libérales, de la Commission.
Quant au calendrier, nous irons vite. Pour utiliser cette boite à outils, il faudra faire preuve de vision et de courage, afin que dès le 1er janvier 2010, une nouvelle PAC plus durable et plus équitable se mette en route. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Licenciements liés à la crise
M. François Rebsamen . - La grave crise que nous traversons a accéléré les plans sociaux et les licenciements. Ces destructions sans précédent d'emplois nous touchent tous. L'industrie automobile, M. Bourquin l'a rappelé hier, relayé aujourd'hui par M. Chevènement, est lourdement frappée : 3 500 emplois chez Peugeot, dont 1 750 à Rennes, 4 900 chez Renault, 1 500 chez Ford... La liste est longue. L'industrie agroalimentaire est elle aussi frappée : 296 suppressions d'emplois sont programmées chez Amora-Maille à Dijon. Dans l'industrie électrique, ce sont des unités entières qui vont être fermées ou délocalisées. Même tableau dans l'industrie textile en Ariège. Sans oublier la distribution avec La Redoute et la Camif.
Plusieurs mesures auraient dû être rapidement mises en oeuvre pour soutenir la croissance économique, comme vient de l'annoncer le gouvernement de Gordon Brown.
Les parlementaires socialistes ont présenté de nombreuses propositions : un plan européen massif de soutien aux investissements par de grands travaux dans les transports, des baisses de TVA ciblées pour soutenir les secteurs économiques en difficulté, des réductions d'impôt sur les sociétés pour celles qui investissent et créent des emplois, l'abrogation du paquet fiscal pour assurer un effort efficace et équitable de tous...
M. Josselin de Rohan. - Ben voyons !
M. François Rebsamen. - Vous prétendez, madame la ministre, être aux avant-postes avec le Gouvernement pour anticiper cette crise. Manifestement, à ce jour, aucune réponse opérationnelle n'a été apportée. Le Gouvernement s'agite, mais n'agit pas, alors que les salariés et les entreprises attendent des réponses concrètes.
Que comptez-vous faire pour soutenir la croissance économique et donner à nos entreprises des raisons d'espérer, d'investir, d'embaucher et de produire ? Comment allez-vous redonner confiance et offrir des perspectives aux salariés au chômage ou menacés de l'être ? Allez-vous laisser des entreprises, qui ont bénéficié de fonds publics, licencier, sans exiger d'elles le remboursement de l'argent du contribuable ?
M. le président. - Il est temps de conclure !
M. François Rebsamen. - Au moment où notre pays s'enfonce chaque jour davantage dans la crise, les Français attendent de vous des réponses précises. (Applaudissements à gauche)
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi . - Le Gouvernement agit sur tous les fronts.
M. Jean-Louis Carrère. - C'est ça !
Mme Christine Lagarde, ministre. - Vous m'avez parlé de Ford. Depuis neuf mois, je suis en négociations avec les dirigeants de Blanquefort en liaison étroite avec M. Rousset et M. Juppé pour trouver une solution industrielle.
M. Jean-Louis Carrère. - Mais il ne peut rien faire, Juppé !
Mme Christine Lagarde, ministre. - Il est extrêmement actif sur ce dossier, monsieur le sénateur ! Nous essayons de trouver une solution industrielle pour que les 1 300 emplois menacés par une fermeture partielle de Ford à Blanquefort soient sauvés.
Vous m'avez interrogée sur Renault. A Sandouville, nous travaillons depuis plusieurs mois avec les organisations syndicales et la direction de Renault pour trouver des solutions.
M. Jean-Louis Carrère. - Chacun ses fréquentations !
Mme Christine Lagarde, ministre. - Nous élargissons à 19 bassins d'emplois les contrats de transition professionnelle pour répondre aux besoins de l'industrie automobile confrontée à une baisse de la demande et à une modification technologique dans laquelle ce secteur doit s'engager.
En juillet, nous avons signé avec l'industrie automobile un plan auquel nous consacrons 150 millions pour former tous les personnels de ce secteur. Lors du Mondial de l'automobile, le Président de la République a annoncé un plan de 400 millions consacré aux transformations technologiques de l'industrie automobile afin qu'elle devienne compétitive et puisse s'adapter aux nouvelles technologies.
Le Gouvernement a donc anticipé et il travaille en très étroite collaboration avec les acteurs locaux. J'ai voulu vous donner une réponse très pratique sur une question de fond qui nous préoccupe tous. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Bernard Piras. - Rien sur les chômeurs et la moutarde ! Ce n'est pas une réponse, ça !
Dangers d'internet pour les enfants
Mme Brigitte Bout . - La semaine dernière a été marquée par deux temps forts : le mercredi 20 novembre, journée anniversaire de la signature de la convention internationale des droits de l'enfant, le CSA a lancé à vos côtés une campagne de signalétique à la télévision et destinée à la jeunesse.
Le vendredi 22 novembre, vous avez lancé, madame la ministre, un clip de sensibilisation aux dangers potentiels d'internet.
M. Jean-Louis Carrère. - Quelle brosse à reluire !
Mme Brigitte Bout. - Ce sujet est sérieux et mérite mieux que des ricanements !
Votre démarche, madame, a malheureusement coïncidé avec un nouveau fait divers mettant en cause un pédophile qui avait pris contact sur internet avec une jeune adolescente que l'on a retrouvée à Nevers. Il y a eu d'autres cas semblables, sans parler des suicides sur internet.
Pouvez-vous, madame la ministre, nous expliquer le sens de la campagne que vous organisez ? (Applaudissements à droite et au centre)
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille . - Merci pour cette question qui pourra réunir, je l'espère, l'ensemble de votre assemblée sur un sujet qui nous interpelle tous et qui concerne la protection de nos enfants sur internet. Ce sujet n'est pas franco-français, puisque les 27 ministres de la famille de l'Union que j'ai réunis le 18 septembre à Paris nous ont permis de dégager des pistes de travail commun et de prendre des mesures de prévention, de protection et de sensibilisation des parents. Nous avons donc décidé de diffuser un clip sur les dangers d'internet, d'autant qu'une étude démontre que, sur 1 600 collégiens, 90 % d'entre eux ont été confrontés à des images violentes, dégradantes ou pornographiques. Ce clip portera sur les jeux violents en ligne, la pornographie et la pédophilie. Il sera diffusé sur tout le territoire européen.
Je veux ici rendre hommage au CSA qui participe à ce film et à toutes les chaînes de télévision qui diffuseront gratuitement ce clip, avant la période de Noël, afin de sensibiliser les parents qui achètent des ordinateurs pour qu'ils activent le contrôle parental. Il ne faut pas laisser les enfants sans surveillance quand ils sont sur internet. Avant, nous éduquions nos enfants sur les dangers à l'extérieur de la maison. Aujourd'hui, il faut savoir que le danger peut se trouver à l'intérieur de nos foyers. N'oublions pas que 62 % des parents ignorent que leurs enfants tiennent un blog sur internet.
En partenariat avec M. Darcos, nous avons distribué une plaquette d'information aux parents dont les enfants sont dans le primaire. La détermination du Gouvernement est totale sur cette question et votre assemblée doit soutenir ces initiatives, car la protection des enfants n'est ni de gauche, ni de droite, mais relève de la responsabilité des adultes. (Applaudissements à droite et au centre)
Rachat de British Energy par EDF
M. Roland Courteau . - Qu'est-ce qui a bien pu pousser EDF à s'embarquer dans l'aventure aussi folle que ruineuse du rachat de British Energy ? Voulant acquérir les 35 % d'actions de l'État britannique, EDF doit lancer une OPA sur toutes les actions. Coût total de l'aventure : 16 milliards !
C'est plus qu'une erreur, c'est une faute : 16 milliards pour acquérir des centrales nucléaires proches de la retraite ! C'est démentiel pour se procurer un ticket d'entrée sur le marché britannique, où EDF est pourtant déjà présente.
C'est d'autant plus cher et surévalué, de 7 à 9 milliards, que nous sommes dans un contexte de crise qui tire les prix des actifs vers le bas.
C'est surtout démentiel et extravagant pour s'emparer de ce qui n'est qu'une gloire passée : sur les 15 réacteurs nucléaires de British Energy, 14 relèvent d'une technologie dépassée, obsolète, et devraient être déclassés d'ici dix ans. Personne ne veut de ces centrales vieillissantes, seule EDF est candidate. C'est tout dire.
Quant au financement, il se ferait, m'a-t-on dit, par l'endettement Or, le service de la dette ne serait même pas couvert par les revenus de British Energy, laquelle est déjà dans le rouge ! C'est donc une pure folie qui va hypothéquer l'équilibre et la santé financière d'EDF et, ainsi, apporter un atout de plus aux tenants de sa privatisation. (« Et voilà ! » sur les bancs socialistes) Cela aura des conséquences sur les tarifs de l'électricité, la qualité du service public et l'entretien des infrastructures, à propos duquel EDF vient d'être épinglée par l'Autorité de sûreté nucléaire.
Pour les socialistes, le service public de l'électricité et la sûreté nucléaire sont des enjeux d'intérêt national. Ne serait-il pas plus utile de consacrer ces milliards à lutter contre la pauvreté énergétique de cinq millions de foyers français ? Bref, allez-vous mettre un terme à cette opération ruineuse ? Ou allez-vous, une fois de plus, laisser faire ?
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi . - Toute la filière nucléaire est stratégique pour la France et elle contribue à son attractivité et à ses exportations. Il faut donc la soutenir, il faut que l'État demeure présent et il faut qu'elle ait une stratégie de développement extérieur. EDF, de même qu'elle a souhaité pénétrer le territoire américain, sera amenée à poursuivre la prise de participation, puis l'OPA sur British Energy, pour pénétrer le territoire britannique. L'État restera présent dans ce secteur et le Fonds d'investissement stratégique interviendra, comme dans chaque secteur stratégique, chaque fois que cela apparaîtra nécessaire. (Applaudissements à droite)
Modes de transport alternatifs
M. Louis Nègre . - En tant qu'élu local et premier vice-président du Groupement des autorités locales responsables de transports publics, le Gart, je me permets de vous interpeller sur les modes de transport alternatifs à la voiture particulière. Les transports en commun ont fait l'objet d'une légitime priorité, mais il existe des modes de déplacement alternatifs dont l'efficacité énergétique est également très élevée.
Dans les déplacements de courte distance, le vélo a fait ses preuves et le décret du 30 juillet 2008, généralisant le double sens cyclable dans les « zones 30 » facilitera son utilisation en ville.
M. René-Pierre Signé. - Un progrès !
M. Louis Nègre. - C'est un premier pas important et positif qui a été ainsi franchi avec la mise en application du « code de la rue » .Pour autant, monsieur le ministre, afin de développer encore ce mode de déplacement, quels autres dispositifs réglementaires, voire financiers, pourriez-vous mettre en place ?
Le covoiturage est lui aussi un mode de déplacement alternatif, complémentaire des transports en commun, que les sénateurs connaissent bien, eux qui le pratiquent pour aller ensemble à l'aéroport, y compris avec ses collègues d'une autre sensibilité politique. Dans mon département des Alpes-maritimes, je constate que ce système, mis en place à l'initiative du président du conseil général, Christian Estrosi, répond parfaitement aux attentes de ses utilisateurs. Le système fonctionne mais, là encore, nous pourrions être plus ambitieux pour lutter contre l'auto-individualisme. Un dispositif réglementaire spécifique assurerait certains avantages à cette pratique, comme par exemple des voies de circulation routières réservées, des dégrèvements fiscaux, des emplacements de stationnement appropriés et toute autre mesure favorable.
Enfin, avec l'autopartage ...
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est une conférence !
M. Louis Nègre. - ... une association, généralement, met à la disposition de ses membres une flotte de véhicules. Ainsi, le coût d'achat, l'entretien des véhicules et les places de stationnement sont mutualisées. C'est une piste intéressante qu'il conviendrait de promouvoir.
Voilà trois modes de déplacement alternatifs à la voiture particulière qui compléteraient utilement l'effort des pouvoirs publics en faveur des transports en commun. Comment le Gouvernement compte-t-il lever les freins, notamment réglementaires, voire législatifs, pour promouvoir encore davantage ces modes alternatifs ? (Applaudissements à droite ; M. Paul Raoult et Mme Marie-Christine Blandin applaudissent aussi)
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports . - Toutes les collectivités locales encouragent le vélo conformément aux impératifs du Grenelle de l'environnement. Nombre d'entre elles mettent également en place le covoiturage pour leur personnel. Il faut encourager les entreprises à faire de même, y compris par des incitations financières. Reste cependant à régler les problèmes d'assurance que pose ce mode de transport. Peut-être pourrait-on lui réserver des voies, comme nous l'envisageons pour l'autoroute A 1 et l'accès à Roissy, avec une voie dédiée aux taxis, aux transports en commun ?
Quant à l'autopartage, les PLU et les Scot doivent en tenir compte et créer des emplacements spécifiques dans les villes. Le Sénat sera saisi d'un projet à ce sujet, dès janvier prochain. Le budget pour 2009 le prévoit déjà. En tout cas, je vous remercie d'avoir soulevé ce sujet d'importance à l'occasion du présent Congrès des maires. (Applaudissements à droite)
M. le président. - Je remercie les membres du Gouvernement pour leurs réponses et, particulièrement Mme Lagarde qui a été très sollicitée cet après-midi. (Applaudissements à droite)
La séance est suspendue à 16 heures.
présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente
La séance reprend à 16 h 20.
Mise au point au sujet d'un vote
M. Philippe Adnot. - Lors du vote sur la première partie du projet de loi de finances, Mme Desmarescaux vous prie de bien vouloir noter qu'elle souhaitait voter pour.
Mme la présidente. - Je vous en donne acte.
Loi de finances pour 2009 (Deuxième partie)
Mme la présidente. - Nous poursuivons l'examen du projet de loi de finances pour 2009.
Écologie, développement et aménagement durables (et articles 60 et 61)
Mme la présidente. - Le Sénat va maintenant examiner la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».
Interventions des rapporteurs
M. Alain Lambert, rapporteur spécial de la commission des finances. - Quatre rapporteurs spéciaux vont s'exprimer sur cette mission : c'est dire l'intérêt que porte le Sénat aux hautes fonctions qui sont les vôtres, monsieur le ministre d'État. Sur ses 10 milliards d'euros de crédits, un tiers correspond à des dépenses de personnel, soit 70 000 emplois à temps plein. La maquette budgétaire a été révisée pour tenir compte du Grenelle de l'environnement et de la nouvelle organisation du ministère ; les programmes recouvrent pour l'essentiel les nouvelles directions. Je souhaite que cette maquette soit durable afin de nous permettre un suivi rigoureux des moyens et des résultats des politiques menées. Le cofondateur de la Lolf que je suis regrette en outre qu'on n'en ait pas tiré toutes les conséquences, les moyens en personnel étant toujours centralisés dans un programme de soutien. Cela ne me semble plus nécessaire.
Pour la première fois nous est présentée une programmation pluriannuelle, dans laquelle on note, pour les crédits de paiement, une augmentation de 1,28 % en 2010 et une baisse de 8,41 % en 2011. Cette baisse concernera le programme « Infrastructures et services de transports » ; j'y reviendrai.
Sur les 7,3 milliards consacrés au plan triennal de financement du Grenelle, seuls 17 % sont des crédits budgétaires nouveaux ou redéployés ; 38 % viendront d'allégements fiscaux nouveaux et 45 % de ressources affectées aux opérateurs ou de contributions de la Caisse des dépôts. Les « silences du Grenelle » perdurent : les quatre cinquièmes du financement d'une des réformes les plus ambitieuses de la législature échapperont à l'autorisation budgétaire et à la démarche de performance.
Les crédits du nouveau programme « Infrastructures et services de transports » s'élèvent à 4,39 milliards en crédits de paiement. Plusieurs questions se posent. Les fonds de concours, soit 2,17 milliards, sont versés par l'Agence de financement des infrastructures des transports de France (Afitf), qui reçoit elle-même une subvention de fonctionnement de 1,2 milliard. Ces crédits ne sont-ils pas pris deux fois en compte ? Des éclaircissements sur ces circuits financiers complexes seraient les bienvenus.
Ensuite, les engagements pris et non couverts fin 2009 atteindront 4,45 milliards, soit 101,3 % des crédits ouverts en 2009. Comment expliquer cette situation ? Comment les engagements pris pourront-ils être honorés ? Est-il d'autre part normal que l'action « Développement des infrastructures routières » ne fasse l'objet d'aucune dotation initiale en 2009 ? Elle est intégralement financée par l'Afitf à hauteur de 726 millions et par les collectivités territoriales pour 474 millions. La justification au premier euro est impossible, ce qui est un des effets pervers de « l'agencisation », pratique que n'apprécie guère la commission des finances.
Les documents budgétaires contiennent peu d'informations sur la réalisation des objectifs de l'action « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires », alors que les crédits atteignent 3,6 milliards -soit des subventions de 1,2 milliard à l'Afitf et de 2,4 milliards à Réseau ferré de France (RFF). C'est une nouvelle illustration de « l'agencisation », qui voit des pans entiers de l'action publique confiés à des opérateurs. Il serait plus judicieux de rebudgétiser les crédits versés à l'Afitf au lieu d'allonger ainsi les circuits. Faute de ressources pérennes depuis la privatisation des autoroutes, l'Afitf est-elle d'ailleurs encore utile ? Je proposerai un amendement pour que nous en débattions.
Enfin, comment rendre de la visibilité à la politique des transports collectifs et ferroviaires depuis que les informations relatives à la dette de RFF ont disparu du bleu ? RFF devrait être considéré comme opérateur principal du programme.
Je vous renvoie pour l'essentiel à mon rapport sur le programme « Sécurité et affaires maritimes ». Après transfert des crédits de personnels et de soutien, les moyens alloués à cette politique passent de 134,5 à 367,432 millions d'euros. Comment expliquer cet écart ? Les moyens de l'action de soutien connaissent une baisse de 5,39 % ; nous suivrons avec attention la mise en oeuvre de l'objectif de rationalisation des dépenses qu'elle traduit.
Les crédits du programme « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité » s'élèvent à 333,3 millions soit, à périmètre constant, une augmentation de 9 %. Je souhaite en premier lieu savoir quand le déversement analytique sera exprimé en personnels, et non seulement en crédits, ce qui nous permettrait d'apprécier les moyens humains mis au service du programme.
Ensuite, comment juger l'action relative à l'appui technique apporté aux collectivités territoriales ? Initialement privée de dotation, elle a été pourvue, après déversement, de 405,5 millions, soit plus de crédits que le programme tout entier et plus de la moitié de ses objectifs !
Enfin, a-t-on tiré toutes les conséquences, notamment pour les petites communes et les conseils généraux, de l'abandon de l'ingénierie publique concurrentielle pour une économie de 40 millions et la suppression de 1 000 postes en 2009 ?
Sous la réserve des amendements que la commission des finances vous présentera, elle a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements à droite)
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances. - Les dotations du programme « Sécurité et circulation routières », qui recouvre les moyens que l'État met en oeuvre pour réduire les accidents de la circulation, sont stables depuis 2007, à périmètre constant. Après application du schéma de déversement analytique, c'est-à-dire après répartition des crédits de soutien dont 2 317 ETPT, ses crédits atteignent 257,61 millions, dont 23,8 % sont justifiés au premier euro. On peut regretter que les crédits de personnel et de fonctionnement soient réunis au sein du programme « Soutien », ce qui fait obstacle à une meilleure gestion des personnels et à l'exercice de la fongibilité asymétrique prévue par la Lolf, j'y reviendrai.
Les dispositifs du permis à un euro par jour enregistrent les mêmes résultats qu'en 2008. En revanche, le nombre de dossiers de prêts prévus accuse une nouvelle diminution, 91 000 contre 102 550 l'an passé. En outre, la commission déplore que la réforme de l'organisation du permis de conduire, prévue au terme de la RGPP afin de réduire les délais de présentation aux épreuves et d'améliorer les taux de réussite, ne soit pas traduite sur le plan budgétaire. Enfin, pour être complet, il faut rappeler que ce programme s'intègre dans un dispositif interministériel de lutte contre l'insécurité routière, dont les crédits de paiement s'élèvent à 2,5 milliards.
J'en viens au compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ». Les remarques que j'avais faites l'an passé sur sa présentation ont été entendues : (on s'en réjouit au banc de la commission ainsi que sur les bancs du groupe UMP) le programme « Radars » est maintenant composé de trois actions au lieu d'une, afin de distinguer le contrôle des infractions de leur traitement.
La fraction du produit des amendes perçues par la voie de systèmes automatisés réservée au compte d'affectation spécial passant de 194 à 212,05 millions à l'article 25 de ce texte, les crédits du programme « Radars » augmentent de 10 %. Cette hausse doit permettre de remplir l'objectif fixé par le Président de la République d'installer 560 nouveaux dispositifs par an jusqu'en 2012. Ces dispositifs, qui concerneront pour l'essentiel d'autres infractions que celles relatives à la vitesse -respect des feux rouges, des passages à niveaux ou des distances de sécurité dans les tunnels-, sont plus onéreux. Quant au coût du maintien en condition opérationnelle, il augmente de 25 % entre 2008 et 2009.
Le programme « Fichier national du permis de conduire » finance la gestion du droit à conduire -retrait et restitution des points. La diminution de ses crédits par rapport à 2008 -il s'élève à 10,35 millions- s'explique par le retard pris sur le projet Faeton. Ce projet, qui vise à remplacer l'actuel fichier national du permis de conduire par un système national, sera financé par des reports de crédits de façon à limiter les inscriptions budgétaires aux seuls besoins restant à financer.
Enfin, le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire », qui regroupe essentiellement les emplois et les dépenses de personnels, est stable, à périmètre constant. Les dépenses de personnel représentent 85,7 % des crédits de paiement, soit 3,2 milliards -après application du schéma de déversement analytique, 210,26 millions. Leur regroupement au sein d'un programme unique ne se justifie plus depuis que le ministère de l'écologie s'est réorganisé et doté d'un secrétariat général, d'un commissariat général au développement durable, de cinq directions générales de « métier », et d'une délégation à la sécurité et à la circulation routières. La commission a donc déposé un amendement pour répartir ces crédits entre les programmes de la mission. (Applaudissements à droite et sur les bancs socialistes)
M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances. - Les programmes « Météorologie » et « Information géographique et cartographique » sont essentiellement consacrés aux subventions versées aux deux établissements publics que sont l'IGN et Météo-France.
Tout d'abord, la commission se réjouit que le responsable du programme « Météorologie » ne soit plus le PDG de Météo-France, ce qu'elle déplorait, mais la commission générale au développement durable, placée sous l'autorité du ministre. La subvention pour charge de service public versée à Météo-France augmente de 5,7 % de 2008 à 2009. Cette augmentation ne suffira pas à couvrir la hausse incompressible des dépenses de personnel, liée à l'augmentation des versements au compte d'affectation spéciale « pensions » et à la progression du point de la fonction publique et obligera Météo-France à améliorer sa productivité. Cela passera, entre autres, par la fermeture de la moitié de ses 107 centres départementaux d'ici 2017 -les premières fermetures sont prévues en 2012- et le non-remplacement de 500 départs à la retraite. Cette réorganisation, souhaitée dans le cadre de la RGPP, se justifie par les progrès technologiques. Le ministre nous éclairera sur la liste des centres concernés qui n'est pas encore connue. Pour matérialiser cette réorganisation, un nouveau contrat d'objectifs sera passé avec Météo-France.
A propos de contrat d'objectifs, la commission regrette que l'IGN n'en ait pas signé depuis fin 2006. Malgré la légère diminution des effectifs de cet établissement entre 2008 et 2009, sa subvention de fonctionnement progresse de 10 % afin, nous a expliqué le ministère, de financer l'évolution du site Géoportail. Le Gouvernement pourrait-il nous éclairer sur ce point ?
J'en viens à au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Son architecture a été profondément modifiée. L'an passé encore, ce budget recouvrait l'activité de prestations de service, financée par les redevances payées par les compagnies aériennes, que la direction générale de l'aviation civile assure pour le compte de l'État. Il intègre désormais les dépenses liées à l'activité proprement régalienne de la DGAC, autrement comprises dans le programme « Transport aérien » de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables ». Au regard de la Lolf, l'argument selon lequel la distinction opérée autrefois était artificielle -les deux programmes concernant la sûreté et la sécurité aériennes- et mal commode pour la DGAC, n'est pas satisfaisante.
Cette extension de périmètre explique la forte hausse des crédits qui passent de 1,73 à 1,93 milliards de 2008 à 2009. Ensuite, au regard de la performance, on peut s'interroger sur le regroupement des dépenses de personnel au sein du programme « Soutien ». Si comme mes collègues l'ont relevé, cela est probablement commode pour les services gestionnaires, il ne permet plus aux responsables de programme d'arbitrer entre les dépenses de personnels et les autres, ce qui contrevient aux objectifs de la Lolf.
Je vous présenterai donc un amendement pour répartir les dépenses de personnel de ce programme entre les programmes opérationnels du budget annexe.
La programmation pluriannuelle des crédits jusqu'en 2011 fait apparaître une augmentation de 7,1 % des crédits sur deux ans, principalement due à la hausse des cotisations retraites du budget annexe ainsi qu'à une progression de 30 millions d'euros des dépenses d'investissement, liée à la croissance du trafic aérien. (Applaudissements au centre, à droite et au banc des commissions)
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances. - Il me revient d'achever ce tour d'horizon, en évoquant brièvement les programmes consacrés à la prévention des risques, à l'énergie et à l'après-mines, ainsi qu'au nouveau fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres, traduction en mode Lolf du bonus-malus automobile.
Avec 270 millions d'euros, la politique de prévention des risques représente moins de 3 % des crédits de la mission. Il s'agit néanmoins d'une priorité pour le Gouvernement : les crédits de paiement consacrés à cette politique augmenteront de près de 30 % en 2010 et en 2011, et serviront à l'élaboration des plans de prévention des risques technologiques (PPRT), à la mise en oeuvre des orientations du Grenelle de l'environnement en matière de santé-environnement, et à la gestion des risques liés à l'après-mines.
S'agissant des PPRT, le Gouvernement s'est fixé l'objectif très ambitieux de 50 % de plans approuvés en 2010. Nous ne sommes pas sûrs que cette prévision soit réaliste : l'approbation définitive des plans est une tâche difficile, qui requiert des procédures complexes. L'État n'est pas entièrement maître du calendrier, puisque les industriels et les collectivités territoriales participent au financement des mesures foncières impliquées par ces plans.
Votre commission est depuis longtemps attentive au respect des engagements pris par l'État, au lendemain de la catastrophe survenue dans l'usine AZF de Toulouse, sur le renforcement de l'inspection des installations classées : c'est la quatrième fois que je reviens sur ce sujet dans cette enceinte. Pas moins de 400 nouveaux postes devaient être créés entre 2004 et 2007 ; le compte n'y est pas, puisqu'à l'heure actuelle 206 postes seulement ont été créés ou redéployés. Le ministère a annoncé un programme stratégique de l'inspection des installations classées pour la période 2008-2012, qui devrait s'accompagner de la création de 200 postes entre 2009 et 2012. De nouveaux engagements chassent les anciens : nous veillerons à ce qu'ils soient remplis.
La politique de la prévention des risques repose également sur des ressources extrabudgétaires non négligeables. Je pense au Fonds de prévention des risques naturels majeurs, dont le projet de loi de finances porte les recettes annuelles à près de 160 millions d'euros par an. Nous y sommes favorables. Mais quel sera l'impact financier de l'augmentation des plafonds de contribution et de la prorogation de certaines interventions votée par l'Assemblée nationale ? Quelle réforme de la gouvernance du fonds est envisagée pour améliorer la lisibilité de ses actions et les inscrire dans le dispositif d'évaluation de la performance du programme 181 ? Quel est le calendrier et quel sera le contenu de la réforme du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles ?
J'en viens à la politique énergétique. Je ne m'attarderai pas sur les crédits du programme 174, dont 95 % sont consacrés à l'indispensable gestion économique et sociale de l'après-mines, un impératif de solidarité nationale. Les mesures favorisant le développement des énergies renouvelables et les économies d'énergie se matérialisent plutôt par des dépenses fiscales et l'affectation de crédits aux opérateurs que par des « bleus » budgétaires. Entre 2009 et 2011, 2,5 milliards d'euros d'allégements fiscaux nouveaux seront consentis pour l'aide à l'acquisition de logements neufs à basse consommation énergétique et la rénovation thermique du parc privé, dont 1,5 milliard d'euros correspondant à la prorogation du crédit d'impôt dit « 200 quater », recentré sur les équipements les plus performants, et élargi aux bailleurs, aux diagnostics de performance énergétique et aux frais de main-d'oeuvre pour l'isolation.
La politique énergétique s'appuiera également sur l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), véritable « bras armé » du ministère. L'Ademe consacrera 330 millions d'euros entre 2009 et 2011 à la création du « fonds chaleur », et 80 millions d'euros à des actions de communication auprès du grand public et des professionnels. Au total, pas moins de 818 millions d'euros de ressources supplémentaires seront attribuées à l'Ademe en trois ans, pour la poursuite des objectifs du Grenelle de l'environnement. Cela doit nous inciter à nous pencher sur le fonctionnement de cet établissement public et l'emploi de ses ressources. C'est pourquoi j'effectuerai en 2009, au nom de la commission des finances, un contrôle sur pièces et sur place de I'Ademe, en étant particulièrement attentive aux relations de l'agence avec les collectivités territoriales.
Un mot enfin sur le Fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres, abondé par les recettes du malus automobile et destiné à financer le bonus octroyé aux véhicules peu émetteurs de CO2. Ce dispositif, qui avait été présenté à l'origine comme autofinancé, présentera un coût net de 259 millions d'euros en 2008. La raison en est simple, et il faut s'en réjouir : le bonus a mieux marché que le malus ! Les immatriculations de véhicules émettant au maximum 130 grammes de CO2 par kilomètre ont progressé de plus de 50 %, celles de voitures émettant plus de 160 grammes de CO2 par kilomètre ont diminué de près de 40 %. Pour 2009, le projet annuel de performances fait état de 328 millions d'euros de recettes, de 473 millions d'euros de dépenses au titre du bonus, auxquels s'ajoutent 5 millions au titre de la prime au rebut. La « familialisation » du malus -dont je me réjouis à titre personnel-, l'exonération consentie aux personnes handicapées, l'abattement en faveur des véhicules « flex-fuel », et l'annualisation du malus des véhicules les plus polluants dans le cadre du collectif budgétaire auront un impact sur les recettes du fonds, dont le Gouvernement pourra peut-être nous donner une évaluation.
Ce PLF, par son volet écologique sans précédent, est une sorte de « Grenelle III » avant l'heure. Faire l'unanimité sur des objectifs écologiques ambitieux est une tâche délicate, mais leur donner une consistance législative, fiscale et budgétaire est beaucoup plus difficile encore. Il faut donc féliciter le Gouvernement d'avoir présenté un des PLF les plus « verts » depuis longtemps. Sous réserve de l'adoption d'un certain nombre d'amendements, la commission des finances invite le Sénat à adopter les crédits de la mission, du budget annexe et des comptes spéciaux, ainsi que les articles qui y sont rattachés.
Je terminerai en vous adressant mes voeux de succès dans les discussions que vous allez entamer avec nos partenaires européens au sujet du paquet Énergie climat. Soyez assurés de notre soutien.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. - Merci !
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - Nous en aurons besoin !
Mme Fabienne Keller. - Souhaitons que l'Union européenne, sous présidence française, sache se montrer exemplaire. (Applaudissements au centre, à droite et au banc des commissions)
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. - Bravo !
M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. - La commission des affaires culturelles s'intéresse à l'écologie, car la préservation de la qualité des paysages et du cadre de vie est un enjeu essentiel pour nos concitoyens, et donne une dimension culturelle à l'impératif de développement durable.
Je ne m'attarderai pas sur l'analyse strictement budgétaire, que nos rapporteurs spéciaux ont brillamment présentée. Je note cependant avec intérêt l'apparition de la notion de « paysage » dans l'intitulé du programme 113 consacré par ailleurs à l'urbanisme, à l'eau et à la biodiversité : j'avais regretté que cette notion soit absente des débats du Grenelle, mais elle est désormais au coeur de l'approche transversale de la nature et de l'urbain que le Gouvernement a souhaité traduire dans ce programme. La mise en place de la « trame verte » montre combien la préservation des ressources et des milieux naturels doit s'intégrer dans les politiques d'aménagement.
Je salue également l'effort significatif en faveur de la préservation de la biodiversité et de la protection des espaces naturels. Il ne suffit pas de créer des réserves et des parcs : il faut leur donner les moyens de remplir leurs missions scientifiques et éducatives. Or près d'un quart des réserves fonctionnent avec moins d'un poste à temps plein. Le réseau existant sera-t-il consolidé ? Près d'un an après le vote d'une loi sur le parc naturel de Camargue, où en est la situation sur place ? La révision de la charte est-elle en bonne voie ?
J'en viens à la question de l'affichage publicitaire extérieur, qui rejoint celle de la préservation du paysage. La loi de 1979 sur la publicité, les enseignes et pré-enseignes reste d'une grande actualité. Elle est perçue comme un outil équilibré, aussi bien par les défenseurs du paysage que par les professionnels de l'affichage. Elle a permis un véritable saut qualitatif, notamment dans les centres-villes. De nombreux élus ont également adopté des règlements locaux de publicité. Toutefois cette réglementation a ses failles. La police de l'affichage manque parfois de rigueur, comme nous pouvons nous en apercevoir aux abords des zones commerciales ou le long des axes routiers, par exemple de la Nationale 10, bien connue de M. le ministre.
A cet égard, je salue le rappel à la loi adressé aux préfets en juin. Il faut mieux informer les maires, car la réglementation est complexe et mal connue.
Dans mon rapport sur les entrées de ville, j'avais dénoncé la multiplication des pré-enseignes dérogatoires, signalant hôtels, garages ou restaurants, aux bords de nos routes ; malgré la loi Barnier de 1995, des progrès restent à faire, par exemple en soumettant ces panneaux à déclaration préalable, ou en les regroupant dans le cadre de la signalisation d'information locale. La réforme de la taxation locale sur la publicité, engagée à l'initiative de M. Philippe Marini, permet désormais aux maires de taxer ces pré-enseignes.
Un amendement de l'Assemblée nationale au projet de loi « Grenelle I » substituant au régime de déclaration une autorisation préalable des dispositifs d'affichage par le maire, a suscité de fortes réserves : outre le risque d'arbitraire, cela supposerait un suivi très étroit en mairie, alors que la déclaration préalable est peu exploitée... Cet amendement relance néanmoins le débat.
Je salue la réactivation du Conseil national du paysage : dans ce cadre, envisage-t-on d'adapter la loi de 1979, par exemple en favorisant une approche intercommunale ? Où en sont les réflexions du Gouvernement sur ce sujet, qui est au coeur de la politique des paysages ?
La commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. - Soyez-en remerciés.
M. Jean Bizet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Depuis un an, le ministère du développement et de l'aménagement durable a fait l'objet de nombreuses modifications, que reflète cette mission. Notre commission approuve les efforts de rationalisation et de réduction de la dépense publique, mais ne peut que relayer les vives inquiétudes que suscitent certaines décisions chez les élus locaux. Selon un sondage réalisé à la demande de l'AMF, 70 % des élus estiment que la réorganisation de l'État sur le territoire compromettra la qualité de ses prestations aux collectivités territoriales.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. - C'est vrai !
M. Jean Bizet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Premièrement, comment se passe la fusion des directions départementales de l'équipement et des directions départementales de l'agriculture, dont les métiers et les cultures sont très différents ?
Deuxièmement, la suppression progressive des prestations d'ingénierie réalisées par les services de l'État risque de coûter cher aux collectivités, qui devront payer pour un service jusque-là gratuit et qui, dans certains cas, auront du mal à trouver localement des bureaux d'étude. Quel est le champ exact des prestations visées, le calendrier et la méthode envisagés pour cette suppression ? Combien de collectivités seront touchées ? Vous aviez précisé que les petites collectivités seraient épargnées...
Outre ces réorganisations, 2008 a été marquée par les suites du Grenelle de l'environnement. La commission se félicite du renforcement des moyens consacrés à la biodiversité et à la prévention des risques. Le groupe n°3 du Grenelle a demandé que les moyens des corps de contrôle des installations classées soient renforcés. Or, sur les 400 postes d'inspecteurs annoncés au moment de la catastrophe d'AZF, seuls 206 ont été créés depuis 2004. Une hausse d'effectifs est-elle prévue en 2009 ?
Enfin, le budget prévoit l'aide à l'élaboration de 30 PLU intercommunaux. C'est un objectif très ambitieux, alors qu'aucune aide financière n'est prévue pour l'élaboration des Scot, dont la carte est loin d'être achevée et qui seront essentiels pour mettre en cohérence les politiques du Grenelle à l'échelle du bassin d'habitat.
La loi Urbanisme et habitat de 2003 avait institué une aide d'un euro par habitant, jusqu'au 1er janvier 2008, sans laquelle beaucoup de Scot ruraux ou de pays, voire périurbains, n'auraient pu être engagés. Le délai de trois ans s'étant révélé un peu court, notre commission a adopté un amendement visant, conformément aux objectifs du Grenelle, à soutenir les collectivités qui se lancent dans la réalisation d'un Scot.
Sous réserve de ces observations, notre commission a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Charles Revet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Je concentrerai mon propos sur trois problématiques : les suites de la loi portant réforme portuaire votée en juillet dernier ; l'avenir de l'Agence de financement des infrastructures de transport en France (Afitf) ; le budget de Réseau ferré de France (RFF).
De par sa géographie, la France possède des atouts considérables pour profiter pleinement de l'essor du commerce maritime mondial et créer des dizaines de milliers d'emplois. Lors de sa visite au Havre -qui pourrait devenir à la France ce que Hambourg est à l'Allemagne- (M. Alain Gournac applaudit) le président Sarkozy a estimé à 30 000 le nombre d'emplois liés à la réforme portuaire. Pour que celle-ci soit un succès, il faut concilier l'indispensable protection de l'environnement et le développement économique de nos ports, qui devront pouvoir implanter des zones logistiques raccordables aux réseaux ferré et routier et au transport fluvial.
Dès janvier, je m'attacherai au suivi de l'application de la loi. Je salue d'ores et déjà la rapidité de parution des décrets d'application et le sens des responsabilités des syndicats qui ont signé l'accord-cadre sur le transfert des salariés exploitant ou entretenant les outillages portuaires.
La moitié du budget de l'Afitf proviendra de subventions d'équilibre pendant au moins trois ans, compte tenu des retards dans la mise en place de la taxe poids lourds, ce qui risque de retarder l'exécution des travaux financés par l'agence. Le vrai débat n'est pas tant celui de l'existence de l'agence que celui de la pérennité et du montant de ses ressources, si l'on veut tenir les engagements du Grenelle. Il n'est pas illégitime de relever le montant -très modeste- de la redevance domaniale acquittée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes, qui est affectée à l'Afitf, d'autant que ces sociétés vont bénéficier d'un report de trafic avec la taxe poids lourds.
Enfin, je salue la signature le 31 octobre 2008 du contrat de performance 2008-2012 entre l'État et RFF, mais l'effort en faveur du renouvellement du réseau ne permettra, d'ici 2015, que de rattraper le retard accumulé.
J'anticipe sur le débat que le Parlement aura bientôt sur le schéma national des infrastructures de transport : ne pourrait-on imaginer un grand périphérique extérieur à la région parisienne, conciliant réseaux routiers et ferroviaires, afin de désengorger Paris et faciliter les déplacements des personnes qui ne font que transiter ? Seconde suggestion : ne faudrait-il pas encourager le transport collectif par fer, à l'image du Tram-Train cadencé, qui a fait ses preuves chez nos voisins et qui s'inscrit parfaitement dans les orientations du Grenelle ? La croissance économique de notre pays dépendra de notre capacité à saisir le rendez-vous de la « révolution verte » !
La commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, en remplacement de M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis. - M. Le Grand, malheureusement empêché, devait présenter les crédits relatifs au transport aérien. Avec la nouvelle architecture budgétaire, le programme « Transport aérien » a été supprimé, de sorte que les crédits des infrastructures du transport aérien ne se distinguent désormais plus de ceux d'autres types d'infrastructures, ce qui rend leur suivi particulièrement délicat.
Il faut particulièrement regretter la disparition d'un indicateur mesurant l'effort de l'État en faveur du désenclavement des territoires par le soutien à une desserte aérienne adaptée. La plupart des autres crédits ont été transférés dans le budget annexe dont les autorisations d'engagement atteignent 1 934 millions, en hausse de 1,6 % en 2009 et de 7 % d'ici 2012.
Le budget annexe regroupe l'ensemble des crédits de la direction générale de l'aviation civile, laquelle a des activités régaliennes telles que la négociation des droits de trafic ainsi que des activités de service dans la circulation aérienne, la surveillance ou l'information. Il convient de séparer nettement la production et la régulation, ce qui serait source de lisibilité en vue du contrôle parlementaire, et gage de meilleure adaptation. Je m'associe à l'amendement adopté à l'Assemblée nationale pour que le Gouvernement présente l'an prochain un rapport sur l'évolution statutaire de la direction générale de l'aviation civile.
M. Le Grand insiste sur la nécessaire réactivité dans la tourmente qui menace ce secteur. Le transport aérien est en effet très sensible à la conjoncture : le prix du carburant et la crise financière pèsent sur ses résultats : l'Association internationale du transport aérien prévoit 3 milliards de pertes, la baisse de trafic touchant encore plus le fret.
L'Europe est handicapée par la fragmentation de son espace alors que les États-Unis forment un territoire unifié, avec un nombre réduit de points de contrôle. La politique du ciel unique européen mérite donc d'être approuvée mais il faut aussi aller vers un élargissement tout en respectant les impératifs de défense nationale et européenne.
Les rapports des aéroports avec leur voisinage constituent un enjeu environnemental. Il faut à cet égard approuver l'évolution de l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires. Mais un aéroport constitue aussi une technopole apportant une forte valeur ajoutée. Loin de se résumer à une piste, il forme un noeud de communications intermodales, un vecteur de développement. Un outil existe pour prévenir les conflits en faisant dialoguer tous les acteurs intéressés : ce sont les communautés aéroportuaires de la loi du 23 février 2001, qu'il faut mettre en application.
La commission des affaires économiques a voté en faveur de la mission « Ecologie » et du budget annexe « Contrôle et exploitations aériens ». (Applaudissements à droite et au centre)
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Le programme « Sécurité et circulation routières » disposera en 2009 de crédits de paiement en augmentation de 8 %. Un constat encourageant : 4 838 tués de moins en 2007 soit une baisse de 2,1 % ; l'effort ne doit pas être relâché, ainsi que le montre la forte hausse constatée le mois dernier. Nous devons soutenir l'objectif fixé par le Président de la République de passer en deçà de 3 000 morts sur les routes d'ici 2012. Je considère à titre personnel qu'il faudrait interdire totalement l'usage du téléphone portable au volant, qui serait responsable de 300 décès.
Le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanctions automatisés des infractions au code de la route » passera de 194 millions à 212 millions en 2009. Les sanctions contre les auteurs de vandalisme contre les radars devraient être exemplaires.
M. Alain Gournac. - Tout à fait !
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis. - Ils provoquent en effet la moitié des coûts de maintenance.
Je tiens à exprimer ma déception devant le retard à mettre en oeuvre la taxe poids lourds. La commission des affaires économiques se préoccupe depuis longtemps de ce qui constitue plutôt une redevance d'utilisation du réseau routier puisqu'aussi bien un camion dégrade autant la route que 100 000 voitures.
L'Afitf constitue un outil de financement d'une politique de transport moderne et durable. Le Gouvernement doit oeuvrer rapidement pour la révision des directives eurovignette 1 et 2 car il est actuellement impossible d'appliquer la taxe poids lourds sur les routes et autoroutes à péage faute d'avoir de droit de tenir compte des coûts internes. Il faudra relever dès 2009 la redevance domaniale des sociétés d'autoroute qui vont bénéficier de reports de trafics. Cependant, cela ne règlera pas le financement de l'Afitf ; aussi la mission d'information a-t-elle exploré d'autres pistes telles que la part de l'Agence dans les amendes forfaitaires ou la modulation des péages ferroviaires.
Je dois encore évoquer les difficultés auxquelles se heurtera la taxe poids lourds. S'il faut lutter efficacement contre la fraude, il convient également que tous les transporteurs soient placés sur un pied d'égalité et que les petites entreprises aient les moyens de la reporter en pied de facture. Quid enfin de l'interconnexion des fichiers des douanes européennes ? Nous resterons vigilants sur tous ces chantiers dans l'intérêt des 44 000 transporteurs français.
Malgré ces réserves, la commission a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Le périmètre de la mission « Energie et après mines » a été modifié cette année. Si les prestations sociales aux mineurs en activité ou retraités en représentent 95 %, il est un peu exagéré d'affirmer que le programme recouvre l'ensemble des actions de l'État concourant à satisfaire les besoins en énergie des consommateurs puisque les crédits du personnel affecté au suivi de la politique de l'énergie n'y figurent pas.
La sécurité de l'approvisionnement du secteur électrique national est satisfaisante : grâce à un parc de 117 gigawatts, pour l'essentiel hydraulique et nucléaire, nous avons exporté 57 térawattheures d'électricité en 2007. L'année 2008 a été marquée par une nouvelle hausse sur les marchés libéralisés, provoquée par un accès de fièvre sur les énergies fossiles : le térawattheure a atteint 90 euros. Cette hausse doit être relativisée compte tenu du faible nombre de contrats calés sur ces prix mais la situation est plus problématique pour les gestionnaires de réseaux, obligés d'acquérir les pertes, qui représentent des volumes d'électricité non négligeables. Certes, les tarifs d'utilisation des réseaux répercutent ce coût mais sur la base d'un prix de marché nettement inférieur. Aussi la Commission de régulation de l'énergie a-t-elle récemment adressé au Gouvernement une proposition d'évolution des tarifs des réseaux publics d'électricité sur laquelle il devrait se prononcer d'ici la fin de l'année. J'ai conscience de la nécessité pour la qualité et la sûreté de nos réseaux de prendre en compte l'ensemble des coûts et je serai attentif aux prochains tarifs. Pouvez-vous me donner quelques indications sur les intentions du Gouvernement ?
Le nucléaire, ensuite. Plusieurs incidents ont émaillé la gestion des activités nucléaires en France : il faut donc être transparent et rigoureux quant au contrôle des installations. Or je m'interroge sur les conditions de recours à la sous-traitance pour la maintenance. Comment celle-ci est-elle contrôlée ?
L'Autorité de sûreté nucléaire a récemment épinglé EdF et Areva.
L'augmentation de la part des énergies renouvelables, forte d'une justification énergétique et environnementale, s'inscrit dans la double perspective du Grenelle et du paquet Énergie-climat. Nous sommes loin du compte, tant dans le domaine électrique que dans celui de la chaleur. Pour autant, l'évolution constatée en 2007 est encourageante : plus 85 % pour l'énergie éolienne, plus 70 % pour le solaire photovoltaïque. L'évolution de 2007 à 2008 a été marquée par la poursuite de la mise en place des zones de développement éolien, qui ont permis de dépassionner un peu le débat, puisque seuls huit recours ont été déposés. Reste cependant une difficulté : tous les types d'éolien sont astreints à cette procédure administrative et politique, qui peut durer jusqu'à 29 semaines.
M. Jean Desessard. - C'est trop.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. - Ne devrait-on pas en dispenser les petites éoliennes, qui devraient même pouvoir échapper au zonage ? (M. Jean Dessessard approuve)
La commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission, contre lesquels, personnellement, j'appellerai à voter, pour marquer mon désaccord avec les orientations de fond de la politique énergétique du Gouvernement. Je pense en particulier à la libéralisation totale du marché et à la privatisation d'EDF. (Applaudissements à gauche ; Mme Fabienne Keller applaudit aussi)
Interventions des orateurs
M. Jean Desessard. - Nous saluons l'augmentation de 5 % consentie cette année au budget de l'écologie, qui passera de 19,3 milliards en 2008 à 20,2 milliards en 2009. Cependant...
M. Charles Revet. - Ah ! Dommage...
M. Jean Desessard. - ... cette progression ne saurait masquer trois carences. En premier lieu, la hausse des crédits 2009 mérite d'être relativisée au regard des restrictions prévues par la loi de programmation des finances publiques à l'horizon 2011, date à laquelle, après une diminution de 7 % des crédits dans les deux prochaines années, l'écologie aura cessé d'être une priorité gouvernementale. (Mme Fabienne Keller le conteste) 1 400 équivalents temps plein ne seront pas remplacés au sein des effectifs du ministère, sous prétexte de rationalisation de son action. Et ce ne sont pas les 423 emplois redéployés vers les politiques du Grenelle qui compenseront ce non-remplacement de départs en retraite. C'est à l'action, non aux restrictions que devaient pousser les orientations du Grenelle.
Car là est bien la deuxième carence : ce budget ne tient pas compte des engagements du Grenelle. Nous débattons au reste de ce budget avant même que le projet de loi Grenelle I soit venu devant notre assemblée. Le Grenelle est partout, sauf dans le budget, ainsi que l'a fait observer la commission des finances. Le président Arthuis relevait ainsi que les quatre cinquièmes du financement de l'une des réformes les plus ambitieuses de cette législature échappent à l'autorisation budgétaire annuelle, donc à la démarche de performance qui lui est attachée. De fait, l'essentiel du financement procèdera de ressources extrabudgétaires. Où sont, avec cela, les principes d'unité et de sincérité budgétaires ?
Les prévisions de croissance ont été largement revues à la baisse, et l'année 2009 risque fort d'être une année de récession. Les Verts ne sont pas sourds à ce contexte économique difficile. Mais cette crise économique et financière ne doit pas être traitée indépendamment de la triple crise de la biodiversité, de l'énergie et du climat, qui appelle à une véritable révolution écologique dont ce budget ne reflète absolument pas l'ambition.
Les engagements du Grenelle offrent l'opportunité d'aller vers un modèle de développement soutenable. Les mesures improvisées que nous propose le Gouvernement montrent qu'il n'a pas su la saisir.
Troisième carence, la politique des transports. Le budget 2009 devrait porter les premières traductions concrètes de l'engagement du Président de la République, repris du Grenelle, de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici à 2020. Or, la ligne budgétaire consacrée à la politique des transports diminue de 70 millions par rapport à 2008.
Le développement des transports urbains figurait également dans les engagements du Grenelle, notamment les lignes de transports en site propre. Leur mise en place dans plusieurs grandes villes de province, dont le réseau est aujourd'hui saturé, réclame un engagement significatif de l'État aux côtés des collectivités locales, qui ne pourront y pourvoir seules. Les associations d'élus évaluaient le coût de la création de 1 500 km de couloirs de bus et de lignes de tramway à 4 milliards. Le Grenelle n'en prévoyait déjà plus que 2,5 et, au final, il n'en reste plus grand-chose dans le budget que vous nous soumettez.
Ces inquiétudes sont renforcées par la menace que font planer certains parlementaires de la majorité sur le dispositif de la taxe « poids lourds » prévu à l'article 60. Je salue, madame la ministre, votre résistance et celle de M. Borloo face aux multiples amendements déposés par votre majorité à l'Assemblée nationale et qui visaient à affaiblir un dispositif pourtant essentiel. Cependant, des concessions trop importantes ont été déjà été faites : diminution de la fourchette de perception, ramenée de 5-30 centimes à 2,5-20 centimes ; réduction de 25 % des péages dans certaines régions périphériques ; exonérations pour les routes nationales à faible trafic ou encore réduction de 13 % pour usage fréquent.
Ce budget devait constituer une première étape vers le « verdissement » de la fiscalité dans notre pays. Nous sommes au regret de constater que ce budget ne répond pas à cette grande ambition. Ce qu'il faut désormais, c'est opérer une véritable révolution écologique de la fiscalité. Ce n'est pas ce que vous nous proposez. Nous en sommes profondément déçus. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Évelyne Didier. - Nous serons d'autant plus attentifs à ce budget que dans quelques semaines, le Sénat devrait examiner le projet de loi Grenelle I. Les crédits, accordés pour 2009 à cette mission, se répartissent en neuf programmes et s'inscrivent dans le cadre d'un plan triennal des finances. A cela s'ajoute une importante réforme de l'organisation des administrations et des personnels rattachés à cette mission, bien problématique au regard des ambitions du Grenelle.
Nous regrettions l'an passé le manque de lisibilité de ce budget : nous n'y voyons pas plus clair cette année. Si une vision transversale est certes nécessaire, reste que les changements de périmètres et les fusions de programmes nuisent à la lisibilité des crédits d'une année sur l'autre. Pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, que les périmètres resteront pérennes à l'avenir ?
Si la hausse des crédits affectés à la mission mérite, dans le contexte actuel, d'être saluée, elle doit, ainsi que l'a relevé M. Desessard, être relativisée puisqu'à l'horizon 2011, nous retomberons à 9,34 milliards. J'ajoute qu'un amendement gouvernemental, voté à l'Assemblée nationale, prévoit une minoration de 45,3 millions, destinée à financer les mesures annoncées par le Président de la République en faveur de l'emploi, et dont 2,2 millions seront prélevés sur le programme « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité ». Il est vrai que la situation de l'emploi est dramatique en France, mais l'urgence écologique est aussi une réalité, et la réduction de la biodiversité, objet de plusieurs engagements du Grenelle, est tout aussi grave que le réchauffement climatique. Dans une communication sur ce sujet, n'avez-vous pas, d'ailleurs, madame la ministre, confirmé l'engagement du Gouvernement en faveur de cet « enjeu majeur » ? Comment comptez-vous l'honorer ? Comment financerez-vous, par exemple, les futurs parcs nationaux ?
Ce budget prévoit un gel des dotations des collectivités territoriales. Or, une partie des mesures du Grenelle repose sur leur engagement. Ainsi de l'inventaire des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique. Croyez-vous sincèrement que les collectivités chargées de leur mise à jour auront les moyens de le faire ?
Nous regrettons, enfin, de voir se confirmer l'habitude de financer vos choix par la dépense fiscale, ce qui est loin d'être la solution pour conduire une politique cohérente et efficace à long terme. La mise en garde présentée l'an dernier par nos rapporteurs spéciaux n'a pas été suivie d'effet puisque ce sont les quatre cinquièmes du financement du Grenelle qui ne figurent pas au budget.
Sur les 7,3 milliards prévus sur trois ans, seuls 17 % sont des crédits budgétaires, tandis que 38 % proviennent d'allégements fiscaux nouveaux et 45 % de ressources affectées aux opérateurs ou de contribution de la Caisse des dépôts et consignations.
Les dépenses censées être faites en faveur du développement durable ne sont parfois qu'un moyen détourné d'atteindre d'autres objectifs. Ainsi, l'article 47 prévoit d'augmenter la dépense fiscale de 940 millions en raison de la montée en charge de la loi Tepa. Mais cette dépense risque fort de diminuer l'année prochaine à cause de l'éco-conditionnalité : on utilise donc le Grenelle pour faire baisser la dépense fiscale Tepa.
Nous sommes fortement opposés aux coupes franches de personnels voulues par le Gouvernement dans le cadre de la RGPP.
M. Jean Desessard. - Eh oui !
Mme Évelyne Didier. - Depuis plusieurs mois, vos personnels se battent pour défendre le service public de l'environnement, de l'aménagement du territoire et du développement durable. Les transferts massifs d'agents vers les conseils régionaux et les nouveaux services interdépartementaux, la mutualisation des services et la réorganisation de diverses directions se sont accompagnés de suppressions massives de postes et contribuent à mettre à mal l'ingénierie publique et à fragiliser le réseau scientifique et technique.
Comment pouvez-vous justifier de telles mesures, alors que vous promettez dans le projet de loi Grenelle I de fournir aux collectivités une aide technique ? N'ayant plus assez de personnel, les DDE ne pourront la leur apporter. (M. Jean Desessard le confirme)
J'en viens aux différents programmes. En ce qui concerne le programme 174, il faut croire que la mise en oeuvre de la politique énergétique échappe au budget de l'État. Ainsi remarque-t-on un recours significatif à la dépense fiscale et aux ressources extrabudgétaires. Nous estimons qu'une forte maîtrise publique des outils industriels que sont EDF, GDF et Areva permettrait de faire face à la raréfaction des matières premières énergétiques et à l'épuisement des ressources naturelles et qu'elle contribuerait à l'indépendance énergétique de la France ainsi qu'à la réduction des gaz à effet de serre. A contrario le Gouvernement poursuit la privatisation de toutes ces entreprises nationales, se privant de leviers d'action importants.
Aujourd'hui, les efforts budgétaires ne sont pas suffisants et l'État ne pourra atteindre les objectifs fixés par le Grenelle. Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Jean Desessard. - Excellente intervention !
M. Louis Nègre. - Le projet de loi sur le Grenelle de l'environnement a suscité un immense espoir pour adapter notre pays au défis du XXIe siècle.
M. Jean Desessard. - Ca commence fort !
M. Jacques Blanc. - Il a raison !
M. Louis Nègre. - En préparant l'avenir, en s'inscrivant dans une démarche environnementale volontariste, ce texte donne un nouvel élan à la politique des transports. La première priorité du Grenelle est de favoriser les modes alternatifs à la route.
M. Jean Desessard. - Il ne va pas assez loin !
M. Louis Nègre. - Plus que les poids lourds, les véhicules particuliers produisent trop de gaz à effet de serre. Comme l'indique l'article 2 du projet de loi, la lutte contre le changement climatique est la grande priorité. La France a pris l'engagement de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre entre 1999 et 2050 en réduisant de 3 % en moyenne par an ses rejets dans l'atmosphère.
En se fixant pour objectif de devenir d'ici 2020 l'économie la plus efficiente en équivalent carbone de tous les pays européens, la France s'engage dans un véritable défi qui est tout à l'honneur de notre pays mais qui nécessitera un effort exceptionnel, comparable à celui fourni en temps de guerre : il faudra changer les attitudes et les habitudes, faire évoluer les mentalités, former les personnels. Tout cela sera sans doute aussi difficile que de trouver les financements indispensables.
Avec des émissions de gaz à effet de serre d'un tiers du total, les transports constituent, comme le bâtiment, un secteur prioritaire dans la lutte contre le changement climatique. Madame la ministre, vous vous êtes fixé comme objectif de ramener en 2020 les émissions de gaz à effet de serre au niveau qu'elles avaient atteint en 1990, soit 20 % de moins ! Désormais, vous veillez à ce que l'augmentation des capacités routières soit limitée au traitement des points de congestion et des zones dangereuses.
La mise en place d'une éco-redevance prélevée sur les poids lourds à compter de 2011 permettra d'alimenter l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf).
Cette politique est ambitieuse mais va à l'encontre de bon nombre de nos pratiques actuelles. Là encore, nos pires ennemis seront la routine et les conservatismes...
Vous prévoyez des investissements massifs dans le ferroviaire, avec 2 000 km de lignes nouvelles à grande vitesse d'ici 2020 soit 16 milliards à la charge de l'État sur 60 milliards au total. En tant que sénateur des Alpes-Maritimes, j'attends avec impatience l'annonce du lancement de la ligne LGV Paca. Il est totalement anormal que cette partie de la France qui compte plusieurs millions d'habitants ne possède pas une ligne grande vitesse qui nous relierait à l'Italie afin d'assurer la continuité de l'arc méditerranéen. De plus, vous envisagez une deuxième étape de 2 500 km supplémentaires de LGV après 2020. Vous avez également prévu trois autoroutes ferroviaires à haute fréquence qui permettront de développer le transport combiné pour offrir une alternative aux trafics de transit. Il s'agit donc d'un programme exceptionnel d'amélioration et de modernisation de nos infrastructures ferroviaires, d'autant que l'État investira plus de 13 milliards dans la régénération du réseau ferroviaire national entre 2008 et 2015. Ces montants figurent dans le contrat de performance de RFF signé le 3 novembre. En 2015, un quart du réseau aura ainsi été régénéré, ce qui devrait permettre de faire passer à terme la part de marché du non routier de 14 % à 25 %
Parallèlement, le développement de lignes d'autoroutes de la mer sur la façade méditerranéenne entre la France, l'Espagne et l'Italie permettra enfin d'offrir une alternative crédible à la traversée du massif alpin. L'objectif d'un report modal de 5 à 10 % des trafics concernés est un premier pas nécessaire mais insuffisant. Le département des Alpes-Maritimes est traversé chaque jour par une noria de poids lourds qui génère une pollution très importante et provoque une congestion quasi permanente de l'A8. Pour préserver le littoral méditerranéen, les habitants de la Côte-d'azur vous demandent de faire tout votre possible pour favoriser le report modal de ce trafic sur la voie maritime. Les 80 millions prévus ne seront pas suffisants s'ils ne sont accompagnés d'autres mesures pour inviter les transporteurs à utiliser la voie maritime.
M. Jean Desessard. - Vous voyez bien qu'il n'y a pas assez d'argent !
M. Louis Nègre. - L'État investit dans le fluvial.
M. Jacques Blanc. - Il a raison !
M. Louis Nègre. - Ces investissements s'inscrivent dans la logique du Grenelle de l'environnement. Le canal à grand gabarit Seine Nord Europe permettra ainsi le report vers la voie d'eau de 4,5 milliards de tonnes-kilomètres par an soit 250 000 tonnes annuelles de dioxyde de carbone en moins. Ces travaux coûteront environ 4 milliards, ce qui favorisera l'emploi et les entreprises. Vous prévoyez aussi un débat public avant 2012 sur la réalisation d'une liaison fluviale à grand gabarit entre les bassins du Rhône et de la Moselle.
Enfin, l'État investit dans les transports urbains. Le succès du report modal que nous souhaitons tous passe par l'usage massif des transports collectifs de personnes. C'est prioritaire et les collectivités locales sont, monsieur le ministre, à vos côtés pour porter les transports collectifs en site propre en quinze ans de 329 à 1 800 km. Le coût de ce programme est estimé à 18 milliards d'investissement hors Ile-de-France. Je me félicite que le Gouvernement ait rétabli sa participation au financement des projets de métro, de tramway, et de bus. Cet engagement de l'État à concurrence de 2,5 milliards d'ici 2020 constitue un effort sans précédent.
M. Jean Desessard. - D'ici 2020 !
M. Louis Nègre. - Au nom des collectivités locales je me réjouis de l'appel à projet Transports urbains qui prévoit 450 millions d'engagement, lesquels s'ajoutent aux 260 millions inscrits dans le plan Espoir banlieue.
Tout cela est du fort et du concret. Le Gouvernement a la volonté d'inscrire la « mobilité durable » au coeur du budget et, s'il reste encore quelques interrogations, notamment sur les moyens dévolus à l'Afift, il y a là un projet ambitieux et des moyens exceptionnels pour réussir ce que d'aucuns appellent la « révolution verte ». Bien entendu, je voterai les crédits de cette mission. (Applaudissements à droite)
M. Paul Raoult. - Vous ne serez pas surpris que, en ma qualité de président du Comité opérationnel du Grenelle de l'environnement chargé de la trame verte et bleue, j'aie souhaité évoquer le programme « Aménagement, paysage, eau et biodiversité » et plus spécifiquement cette dernière. Le budget de ce programme s'élève globalement à 341 millions d'autorisations d'engagement et à 333 millions de crédits de paiement, soit une hausse respective de 12,3 % et de 10,3 %. Dans un contexte de rigueur, voire d'austérité, je m'en réjouis, même si cela ne représente que 3,3 % du montant total de la mission.
Les dépenses de fonctionnement progressent de 4,2 % et, parmi elles, je soulignerai celles qui portent sur la protection des sites et des paysages, notamment sur les procédures de classement ou d'inscription pour 1,65 million, et les 2,9 millions destinés au renforcement de la biodiversité en application des engagements du Grenelle de l'environnement. En outre, 1,3 million doit être consacré à la trame verte et bleue, 4 millions étant prévus pour la préservation des espèces animales et végétales et 7,3 millions au réseau Natura 2000.
Les dépenses d'investissement augmentent de 19,5 % et sont surtout axées sur la politique de l'eau. Les dépenses d'intervention passent à 130 millions, soit un accroissement de près de 21 %.Elles sont constituées de transferts aux ménages, aux entreprises et aux collectivités territoriales. Il s'agit notamment de soutenir celles-ci pour l'élaboration des Scot, des plans locaux d'urbanisme intercommunaux et des projets d'innovation énergétique ainsi que la restauration de sites classés ou exposés à de fortes fréquentations. En outre, 7 millions sont inscrits dans le cadre de la politique de l'eau, essentiellement sous forme d'aides vers les Agences de l'eau et l'Onema. Enfin, c'est là que se retrouvent les dépenses pour le réseau de réserves naturelles, le soutien aux dispositifs partenariaux de protection comme les parcs naturels régionaux et les conservatoires régionaux d'espaces naturels.
Je salue la traduction dans le budget de l'État de certains engagements du Grenelle, il est vrai relativement peu coûteux. Mais je crains que la réorganisation des services conduise à une pénurie de personnel et que la fusion des services ne soit l'occasion, pour ceux de l'équipement, de prendre leur revanche sur ceux de l'environnement...
Ce budget ne soutient pas assez les collectivités dans leur politique d'acquisition de zones humides. Espaces de transition entre la terre et l'eau, elles remplissent quantité de fonctions qui leur confèrent un intérêt biologique, hydrologique, économique et sociologique irremplaçable. Ce sont des milieux de vie remarquables pour leur biodiversité. De nombreuses espèces végétales et animales y sont attachées et bien qu'elles ne couvrent que 3 % du territoire, elles hébergent un tiers des espèces végétales remarquables ou menacées, la moitié des espèces d'oiseaux et la totalité des espèces d'amphibiens et de poissons. Ce sont des lieux d'abri, de nourrissage et de reproduction pour de nombreuses espèces, indispensables à la reproduction des batraciens. Elles constituent des étapes migratoires, des lieux de reproduction ou d'hivernage pour de nombreuses espèces d'oiseaux aquatiques et de poissons. En outre, elles contribuent à la régulation des cours d'eau. Elles alimentent les nappes d'eau souterraines et superficielles, contribuent à la qualité des eaux, sont des lieux de pêche, de production d'osier, de sel et de tourbe. (M. Jean Desessard le confirme) Ce sont des espaces de détente, de loisir, de navigation, de chasse et de pêche.
Pourtant, souvent perçues comme insalubres et malsaines, elles sont détruites, asséchées, curées, drainées, urbanisées et leur surface diminue sans cesse. Nous sommes les champions du monde de l'artificialisation des sols dont plus de 60 000 hectares sont détruits chaque année. Un rapport de 1994 avait conclu que la moitié des zones humides avait disparu en 30 ans, du fait des politiques publiques. Il n'en restait plus qu'un million et demi d'hectares et elles disparaissaient au rythme de 10 000 hectares par an.
Depuis, les pouvoirs publics ont semblé prendre conscience de la nécessité de préserver ces milieux ce que confirment la loi Littoral, la loi sur l'eau de 1992 et celle de décembre 2006, les lois Pêche, les lois d'orientation pour l'agriculture ou l'aménagement du territoire. Le Plan national d'action pour les zones humides adopté en 1995 est encore insuffisamment appliqué, y compris pour l'inventaire qu'il prévoit, dans la mesure où de nombreuses zones de faible superficie sont ignorées et, de ce fait, souvent supprimées. Ce plan s'appuie sur des outils existants de planification comme les Sdage, les Sradt, sur des instruments de protection tels que les réserves naturelles, les zones de protections spéciales, les réserves biologiques domaniales, les réserves de chasse et de pêche, mais aussi sur des labels internationaux comme Ramsar ou Natura 2000. Cependant, face aux pressions dont elles font l'objet, les zones humides doivent disposer d'une véritable protection d'ordre économique, et bénéficier d'incitations financières. Certes, ces dix dernières années, celles-ci ont été nombreuses : les fonds européens avec le programme Life, les contrats d'agriculture durable, les fonds de gestion des milieux naturels, les aides des agences de l'eau, le fonds national de solidarité sur l'eau et la taxe départementale sur les espaces naturels sensibles. Diverses subventions ou crédit d'impôt peuvent aussi aider les propriétaires et gestionnaires à protéger les zones humides ou à les intégrer dans la trame verte, en étant exonérés de 50 à 75 % de la taxe foncière sur la propriété non bâtie, voire de 100 % en zone Natura 2000, réserve nationale ou parc naturel. Enfin, l'arme absolue pour défendre ces zones, c'est bien sûr la maîtrise foncière avec le conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, les conservatoires régionaux d'espaces naturels, la fondation pour la protection des habitats de la faune sauvage, ou encore les collectivités territoriales. Cependant, l'argent manque pour sanctuariser ces zones comme le demandent des directives européennes datant parfois de près de 30 ans, comme celle qui a trait aux oiseaux, ou datant de bientôt 40, comme la Convention de Ramsar de 1971. Il est vrai que, à l'occasion, le Gouvernement lui-même n'a pas montré l'exemple, qui, par une circulaire du 7 février 2006 rendait déductibles les dépenses de drainage et comblement de fossés...
Alors, monsieur le ministre, je vous demande de mieux prendre en considération cet objectif. Et puisque désormais les politiques publiques sont liées à des indicateurs de performance, il semble judicieux, voire nécessaire, que les zones humides fassent l'objet d'une telle mesure de l'efficacité de l'action de l'État. Certes, deux des trois objectifs du programme, regroupés dans l'action Gestion des milieux et biodiversité, semblent répondre à cette attente, puisqu'il s'agit d'« améliorer l'efficacité biologique et l'efficience du réseau des espaces protégés au titre de la nature » (objectif n°6) et d'« inciter, par le biais d'actions partenariales, à la conservation des espaces naturels et des espèces animales et végétales menacées » (objectif n°7). Mais dans l'un et l'autre cas, il n'est question que d'apprécier le coût annuel, pour le ministère chargé de l'écologie, de l'hectare d'espace protégé. Faut-il donc souhaiter qu'il augmente ou qu'il diminue ? Ne serait-il pas plus lisible de nous donner des objectifs en termes d'évolution des surfaces d'une année sur l'autre ? Certes, pour définir ces zones, pendant longtemps, les définitions ont été différentes selon qu'on adoptait le point de vue du ministère de l'environnement ou celui du ministère de l'agriculture. La cause est désormais entendue avec le « Grenelle 1 ».
Les prochaines lois de finances devront comporter des objectifs quantifiables en termes de surfaces protégées, pour les zones humides en particulier ; déclinés localement, ces indicateurs pourraient être intégrés au « point biodiversité » sur lequel travaille votre ministère en liaison avec Bercy afin de moduler la DGF selon les efforts consentis par les collectivités.
On gaspillera d'autant moins l'espace qu'on respectera les milieux naturels et agricoles, qu'on arrêtera le mitage et l'étalement périurbain. Il faut pour cela mener une politique courageuse de zonage pérenne, généralisé, soutenir les efforts des collectivités territoriales dans l'élaboration de leurs documents d'urbanisme. Cela suppose connaissance des milieux, labellisation, contractualisation et protection. (Applaudissements à gauche)
Mme Mireille Schurch. - La mission « Écologie, développement et aménagement durables » devait amorcer cette année une dynamique de changement du modèle économique centrée sur le développement durable. L'approche multimodale de la politique de transports retenue lors du Grenelle de l'environnement doit logiquement participer à ce changement. On ne peut que l'approuver, compte tenu de la responsabilité du transport routier dans les émissions de gaz à effet de serre et de la nécessité de réduire ces émissions de 20 % d'ici 2020.
Nous attendions donc des crédits conséquents pour le programme « Infrastructures et services de transports » ; le budget 2009 n'est pas au rendez-vous, malgré tous les espoirs qu'avait fait naître le Grenelle de l'environnement.
Les 5 milliards de crédits de paiements pour les programmes de transports seraient, d'après le rapport Saddier, en hausse de 30,2 %. La hausse annoncée de 1,2 milliard, après l'amputation de 30,8 millions qu'a subie le budget à l'Assemblée nationale, n'est due qu'à la budgétisation de la subvention d'équilibre à l'Afitf. Or l'État abondait l'agence de 1,26 milliard d'euros : sa participation diminue donc de 60 millions. Si les ressources de l'Afitf augmentent, c'est grâce à l'augmentation de la redevance des sociétés d'autoroutes, qui passe de 170 à 475 millions. Les ressources extrabudgétaires augmentent ainsi au détriment de l'égalité du citoyen devant l'impôt.
Le rapport « Infrastructures de transport » du Sénat a relevé la nécessité d'augmenter de façon significative l'enveloppe financière. Pour prendre en compte le Grenelle de l'environnement, il préconise de doter l'Afitf d'un budget annuel de 3 milliards d'ici à 2012 et de 3,6 milliards à compter de 2013. On est loin du compte. Par la voix de M. Billout, le groupe CRC s'est déjà inquiété de l'avenir de l'agence, l'État s'étant privé de moyens en privatisant imprudemment les sociétés d'autoroutes. Même si son avenir est assuré en 2009, l'agence ne pourra financer un véritable programme d'investissement fondé sur une approche multimodale intégrée.
Certes, la création de l'écotaxe sur les poids lourds, dont nous approuvons le principe, devrait favoriser le financement de structures innovantes, mais avec la diminution de la fourchette initialement prévue, la baisse de 25 % des péages dans certains départements et l'exonération des routes nationales à faible trafic une politique des transports donnant la priorité aux modes alternatifs à la route est reportée sine die. Comment envoyer un « signal prix » au transport routier si on compense par le biais de la taxe à l'essieu ? De plus, la taxe ne sera perçue qu'à compter de 2011 et ne rapportera que 880 millions d'euros ; et le ministre a précisé qu'il fallait un appel d'offres et des vérifications techniques : de quoi laisser planer quelques incertitudes...
L'État réduira sa participation à RFF de 63 millions. Il a signé un contrat de performance avec l'établissement le 3 novembre dernier, par lequel il s'engage à hauteur de 13 milliards sur la période 2008-2013. Mais cette somme n'est que la somme de ses concours précédents cumulés sur cinq ans... et amputés de 63 millions. Le contrat est en outre particulièrement inquiétant pour les lignes secondaires et de proximité. Quid de l'amélioration de la desserte des agglomérations enclavées ou des zones rurales, quid du maillage du territoire ? Pourtant le réseau se dégrade, les zones de ralentissement se multiplient, 1 500 kilomètres au total dont 200 en Auvergne. Je pense aux tronçons entre Clermont et Paris où les trains circuleront à 10 km/h, aux gares menacées de fermeture, à la suspension, pour ne pas dire la fermeture du tronçon Montluçon-Ussel et de la liaison Montluçon-Clermont par Volvic, dont le fret se retrouve maintenant sur les routes. Si le contrat de performance signé avec RFF est bienvenu, l'établissement ne pourra faire davantage qu'en s'endettant ; la question de sa dette n'est donc pas réglée.
Plus généralement, quelle crédibilité accorder à un projet qui se veut ambitieux, mais dont les crédits de paiement baisseront de 22,2 % entre 2009 et 2011 ? L'urgence écologique d'aujourd'hui sera-t-elle oubliée demain ? Comment faire passer la part de marché du non routier de 14 % à 25 % à l'horizon 2022 si le financement des infrastructures alternatives à la route n'est pas assuré ? Le constat est largement partagé : la traduction budgétaire des orientations du Grenelle n'est pas au rendez-vous. Vous proposez une politique intermodale, mais vous organisez le désengagement de l'État ; l'enjeu est pour vous de première importance... à condition de respecter des contraintes économiques et budgétaires dont les dérives de l'idéologie libérale ne s'embarrassent guère ! Les priorités du Gouvernement sont ailleurs, les 360 milliards pour les banques, le paquet fiscal pour les plus privilégiés, les exonérations fiscales à tout va. Or certains secteurs ne peuvent être confiés au marché, la solidarité nationale doit jouer en faveur du transport ferroviaire, de l'entretien des lignes, de la création de nouvelles lignes, des transports collectifs. Le groupe CRC ne peut accepter de lier le sort du développement durable à des impératifs de rentabilité financière. Il votera contre la partie « transports » de ce budget. (Applaudissements à gauche)
M. Gérard Longuet. - L'amendement de suppression de l'Afitf déposé par M. le rapporteur spécial permet d'ouvrir le débat sur le financement des infrastructures de transport.
L'histoire est longue. En 1951, tandis que l'automobile se démocratisait et qu'explosaient les besoins en équipement routier, l'État a créé le Fonds spécial d'investissement routier, alimenté par la TIPP, qui a vécu trente ans -ce qui n'est pas si mal. Puis les besoins ont évolué : est né en 1982 le Fonds spécial de grands travaux, lui aussi financé par un prélèvement sur la TIPP, qui s'est aussi tourné vers le ferroviaire et le fluvial. Il a tenu cinq ans. Lui a succédé en 1995 le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN), qui a lui aussi vécu cinq ans, financé par les recettes de l'hydroélectricité.
Le CIADT du 18 décembre 2003, sous l'autorité de M. Raffarin, a décidé un grand programme d'infrastructures : de la route, un peu, du ferroviaire, beaucoup, et un grand projet fluvial dont on ne savait pas s'il serait réalisé, la liaison Seine nord. L'idée était que l'argent des routes, au travers des dividendes des sociétés d'autoroute, allait financer le reste. L'Afitf a vu le jour en janvier 2005. Mais les sociétés d'autoroute ont été privatisées...
M. Paul Raoult. - Quelle erreur !
M. Gérard Longuet. - ...et l'Afitf a été privée des dividendes. Fallait-il alors la supprimer ?
L'Afitf est-elle utile ? Je remercie M. Lambert d'avoir posé la question, ce qui me permet de répondre clairement : oui, et elle sera demain indispensable !
Tout d'abord, parce qu'elle permet un fléchage des crédits publics vers des investissements d'infrastructure en ce qu'elle les met à l'abri des régulations et abattements, ce qui garantit la continuité de l'investissement, indispensable quand il s'agit d'infrastructures, grâce à ses fonds propres. Ceux-ci se constituent essentiellement de la taxe d'aménagement du territoire et de la redevance domaniale acquittées par les concessionnaires d'autoroutes et de 100 millions de recettes des radars pour un total de 900 millions. L'Agence a vécu sur un patrimoine de 4 millions issu de la cession des autoroutes que le Premier ministre d'alors, M. de Villepin, lui avait confié. Cet outil a permis de financer les projets d'infrastructures retenus par le Ciadt, enrichis d'autres demandes gouvernementales. Il fonctionne bien, avec un taux de consommation des crédits de 96 %, ce qui est plutôt rassurant.
D'aucuns déplorent légitimement une « agencisation » de l'État et une atteinte au principe d'universalité ; effectivement, ces crédits pourraient être versés dans le grand chaudron de la recette publique, une louche étant prélevée de temps à autre pour les infrastructures. Mais l'Agence, avec son conseil d'administration insolite constitué pour moitié de hauts fonctionnaires et de parlementaires, ...
M. Jacques Blanc. - Et un grand président ! (Sourires)
M. Gérard Longuet. - ... a permis ce fléchage.
Quant à la difficulté de suivre les crédits, je partage l'opinion du rapporteur spécial tout en tenant à le rassurer : il n'y a pas de double compte dans le budget des 1,2 milliards versés à l'Afitf, une fois comme subvention, une fois en tant que budget de l'agence. Quant aux fonds de concours, il est vrai que leur part a été importante ces deux dernières années, car l'Agence a effectué, pour le compte de l'État, la réalisation des contrats de plan 2000-2006, lesquels consistaient en des projets routiers financés sous forme de fonds de concours. Avec le programme ferroviaire, le programme des transports collectifs en site propre et un partenariat avec des maîtres d'ouvrage privés, la part des fonds de concours diminuera de 60 à 30 % ces prochaines années. Ce sera plus conforme à l'identité de l'Afitf qui a vocation à être l'interlocuteur de tous ceux qui ont besoin de partenaires à l'intérieur de l'État.
L'existence de l'agence se justifie également à long terme. Lieu de proposition et de réflexion, elle contribuera à la mise en oeuvre des objectifs fixés par le projet de loi « Grenelle 1 » en matière de transport collectif d'ici 2020, qui représenteraient des centaines de milliards, dont 25 % assurés par l'État. Dans cette perspective, l'Agence, outil de transformation de la route vers le multimodal, représentera l'État pour ses partenaires, un État qui tient sa parole en matière de continuité du financement. Je pense au projet de liaison Rhin-Rhône ou encore au contournement de Montpellier ou de Nîmes...
M. Jacques Blanc. - Très bien !
M. Gérard Longuet. - Pour conclure, permettez-moi quelques réflexions sur de futures sources de financement pour l'Agence. Les infrastructures de transport constituent une condition indispensable au développement. La progression des échanges dématérialisés n'absorbe pas totalement les besoins de contacts entre les personnes et d'échanges de bien. De ce point de vue, la France constitue pour les échanges européens un trait d'union. Nous aurions tort de ne pas valoriser cet atout et je déplore, monsieur Raffarin, que votre grand projet d'autoroutes de la mer sur l'arc atlantique accuse tant de retard. (M. Jean-Pierre Raffarin hoche la tête) Mais, si les infrastructures sont utiles, elles ne sont pas rentables à court terme. Leur retour sur investissement n'est pas de ceux qu'exigeaient, hier encore, les financiers et qui sont cause, pour grande partie, de la crise que nous traversons. Or, en ces temps où l'économie mondiale est déstabilisée, il existe des produits qui ont besoin de temps, de sérénité et s'accommodent d'un rendement plus faible, l'épargne des retraites, que l'on pourrait utilement adosser à ces investissements pérennes, car les lignes à grande vitesse se construisent pour un siècle. Ce serait un moyen d'assurer le financement de cet outil singulier qu'est l'Agence, qui associe le meilleur de l'administration...
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - ... au meilleur du Parlement ! (Sourires)
M. Gérard Longuet. - ... et constitue l'interlocuteur naturel de RFF et des concessionnaires d'autoroutes ! (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Paul Raoult. - Vous ne défendez plus le libéralisme, mais l'économie encadrée !
M. Jean Desessard. - Ils ont mis de l'eau dans leur vin...
M. Michel Teston. - Les crédits de l'action relative aux transports collectifs et ferroviaires, inscrits au programme « Infrastructures et services de transports », doivent être examinés à la lumière du Grenelle de l'environnement et de sa première traduction législative, le « Grenelle 1 » en cours d'examen. Lors du Grenelle, ont été fixés pour objectifs la réalisation de 2 000 km de lignes à grande vitesse d'ici 2020, le développement du fret ferroviaire, l'ancrage européen avec la constitution d'un réseau de transport européen ferroviaire, la participation à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il ne faudrait pas que ces objectifs, qui font l'objet d'un relatif consensus -les députés socialistes ont voté le « Grenelle 1 »-, restent au stade des bonnes intentions. Or les besoins de financement sont énormes : 16 milliards pour les seules lignes à grande vitesse ! Et, pour remplir les objectifs de développement durable, le réseau existant devra être régénéré, comme l'a préconisé le rapport Rivier en 2005.
A première vue, on pourrait croire que ce budget traduit ces engagements, puisque les crédits de l'action augmentent de 38 %. En réalité, cette hausse correspond à la subvention de 1,2 milliards que l'État doit verser à l'Afitf pour que l'agence équilibre ses comptes, après avoir consommé les 4 milliards d'euros issus du produit de la vente des concessionnaires d'autoroutes. Pourquoi le gouvernement précédent s'est-il privé de la rente autoroutière ? C'est plus qu'une erreur, c'est une faute ! Le tout a été cédé pour 14 milliards, dont seulement 4 pour l'Agence, alors que les concessionnaires d'autoroutes devraient enregistrer 35 à 40 milliards de dividendes d'ici 2032...
Autre point d'insatisfaction : les subventions de l'État aux transports collectifs en site propre et aux plans de déplacements urbains n'ont pas été rétablies, bien que le Grenelle l'ait prévu à hauteur de 2,5 milliards mais, il est vrai, d'ici 2020.
J'en viens à la régénération du réseau existant, indispensable pour atteindre les objectifs du Grenelle.
Selon un audit réalisé en 2005 par le professeur Rivier, directeur de l'École polytechnique fédérale de Lausanne, une dotation supplémentaire annuelle de 500 millions d'euros pendant vingt ans était nécessaire « pour aboutir à un coût moyen annuel de maintenance qui soit minimal à long terme tout en garantissant un réseau de qualité ». A la suite de cet audit, un plan de renouvellement des voies a été mis en place sur la période 2006-2010. Des enveloppes supplémentaires ont certes été votées dans le cadre des dernières lois de finances, mais elles ne respectaient pas tout à fait les objectifs du plan, qui se situaient déjà en deçà du scénario optimal préconisé par le professeur Rivier. Le Grenelle a pourtant donné la priorité au fret non routier pour le transport de marchandises, et l'État s'est engagé à entretenir et à renouveler le réseau ferroviaire. L'objectif est d'atteindre, en 2015, un niveau de 400 millions d'euros supplémentaires par rapport au plan de 2006-2010, ce qui est encore en deçà des préconisations des experts.
Les besoins de financement pour le renouvellement du réseau sont en effet très importants : des ralentissements ont dû être imposés sur 1 200 kilomètres de lignes pour des raisons de sécurité, et plusieurs kilomètres de câbles de contact de caténaire doivent être remplacés. Or les crédits sont en baisse de 1,8 % par rapport à la loi de finances initiale de 2008 : comment donc pourrions-nous faire confiance au Gouvernement, qui vient de signer avec RFF un contrat de performance de 13 milliards d'euros sur 5 ans ? L'aide de l'État n'augmentant pas, RFF devra améliorer sa productivité et ses recettes. Le contrat prévoit la vente de terrains, des gains de productivité, l'augmentation des péages. En réalité, l'État compte sur les régions pour financer le renouvellement des lignes de TER. Or l'entretien et la régénération du réseau relèvent de la compétence de l'État. N'oublions pas que les régions financent déjà intégralement le renouvellement et la modernisation du matériel des TER !
La dette de RFF n'apparaît plus dans le bleu budgétaire. Il est donc très difficile d'apprécier la situation comptable réelle de RFF. La Cour des comptes, dans un rapport d'avril 2008, invitait l'État à délester RFF d'au moins 12 de ses 28 milliards d'euros de dette, mais cette suggestion n'a pas été retenue.
En un mot, ce budget n'est pas une première traduction concrète du Grenelle de l'environnement. Nous voterons donc contre les crédits du programme 203. (Applaudissements à gauche)
M. Jacques Blanc. - (Applaudissements à droite) Nous sommes face à une nouvelle donne : le développement durable est désormais au coeur des politiques publiques. C'était la volonté du Président de la République, et nous sommes heureux de contribuer à sa réalisation.
Notre débat a lieu après l'adoption par l'Assemblée nationale de la loi « Grenelle I », mais avant son examen par le Sénat. Contrairement à ce que prétend l'opposition, le « Grenelle I » n'est pas une simple déclaration d'intentions : ce texte pose des principes qui engagent l'État, qui seront déclinés en une série de mesures par la loi « Grenelle II », et qui se traduisent déjà par des choix budgétaires.
Nous sommes à la veille d'un plan de relance national et européen. Il faut mettre le développement durable au coeur de ce plan de relance, et investir dans les nouvelles technologies afin de relancer l'activité : c'est d'ailleurs le souhait de M. Barroso, président de la Commission européenne.
L'Union européenne adoptera sous peu le paquet Energie-climat, que vous défendez avec pugnacité, mesdames et messieurs les ministres. Il faut espérer que les négociations aboutiront avant la fin de la présidence française.
Enfin, des perspectives nouvelles s'ouvrent devant nous depuis l'élection de Barack Obama, qui s'est engagé à mettre en oeuvre une politique résolue en faveur des nouvelles énergies et de la préservation de l'équilibre climatique.
J'aborderai seulement quelques thèmes chers à l'élu de terrain que je suis.
M. Jean Desessard. - Vous êtes l'Obama du Languedoc !
M. Jacques Blanc. - Je salue l'augmentation des crédits affectés à la défense de la biodiversité et à l'entretien des réserves et parcs nationaux.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. - Ah !
M. Jacques Blanc. - J'aurais pourtant un reproche à vous faire. La loi du 14 avril 2006 a confirmé que les parcs nationaux, à la différence des parcs régionaux, avaient pour vocation de contribuer à la préservation de nos exceptionnelles richesses naturelles. Mais elle a également intégré le développement durable parmi leurs objectifs : l'environnement humain doit être pris en considération. Les élus de mon département, qui comprend le parc national des Cévennes, ont considéré cette réforme avec intérêt. Mais les décrets d'application de cette loi restent à publier ; nous souhaitons que le Gouvernement tienne compte des suggestions du conseil d'administration du parc. La loi prévoit d'ailleurs de mieux associer les élus locaux et les acteurs de terrain à la gestion des parcs.
En ce qui concerne les routes, je souhaite que les nouveaux plans de développement et de modernisation d'itinéraires prennent en compte les efforts des collectivités en matière de développement durable. Dans le cas de la nationale 88, sur l'axe Lyon-Toulouse, les élus ont pris le temps de définir une charte de développement durable : cela devrait vous inciter à retenir ce dossier en priorité.
Venons-en à la question du TGV, notamment du TGV Méditerranée.
M. Jean Desessard. - Êtes-vous ici pour parler de votre région ?
M. Jacques Blanc. - Nous sommes à la veille d'un plan de relance européen. Or les grands projets de croissance lancés par MM. Delors et Chritophen en 1994, et adoptés à Corfou et à Essen, n'ont guère avancé. Je l'ai dit à M. Barroso, et je le répète sans cesse : saisissons l'occasion du plan de relance pour faire progresser ces chantiers.
Nul ne conteste l'importance du transport ferroviaire pour le développement durable ; mais, comme M. Nègre nous l'a fort opportunément rappelé, le transport fluvial a aussi son rôle à jouer. Il est regrettable que Mme Voynet, lorsqu'elle était ministre, ait renoncé au projet de canal Rhin-Rhône...
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Eh oui !
Mme Marie-Christine Blandin. - A la place, nous construisons le canal Seine-Nord !
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Mais le projet de canal Rhin-Rhône est également intéressant.
M. Jacques Blanc. - Peut-être est-il encore temps de le relancer : il y a dans ma région le canal du Rhône à Sète, et les connexions entre ces canaux permettraient de dessiner un véritable réseau européen.
Je dirai un mot du paquet Energie-climat. Nous sommes confrontés à un défi climatique, et je puis dire, en tant que président du groupe d'études sur les montagnes, que ces territoires sont parmi les plus exposés.
Toutes les études insistent sur la nécessité d'une veille active concernant les risques naturels dans ces territoires, la préservation de la ressource en eau, la fonte des neiges, le développement de transports en commun adaptés, ou encore la production d'énergie à partir de la biomasse.
Ce budget traduit bien une situation nouvelle. Nous pouvons être fiers que la France soit à la pointe du combat pour le développement durable...
M. Jean Desessard. - La France ? A la pointe ?
M. Jacques Blanc. - ... et que la présidence française ait fait avancer l'Europe dans ce sens.
La présidence française a montré que l'Union pouvait exister, que ce soit lors de la crise géorgienne ou lors de la crise bancaire et économique. Cette capacité d'entraînement de la France, c'est aussi créer une dynamique nouvelle pour préparer l'avenir de nos enfants. Nous devons être les champions du développement durable ! Merci de ce que vous faites. Nous voterons bien entendu votre budget. (Applaudissements à droite)
Mme Marie-Christine Blandin. - (M. Jean Desessard applaudit) Dans le champ élargi du Meeddat, il ne faut pas que, grâce à la RGPP, les grands corps d'État, qui n'ont laissé que des équipements non durables, prennent la main sur ceux qui connaissent et défendent la nature, le vivant, le paysage.
M. Paul Raoult. - Très bien !
Mme Marie-Christine Blandin. - De même, nous comptons sur votre vigilance pour que les 200 milliards du plan de relance qui se prépare à Bruxelles ne se traduisent pas par le bétonnage du continent et la promesse de pollution de l'air et de l'eau...
M. Jean Desessard. - Voilà !
Mme Évelyne Didier. - Très bien !
Mme Marie-Christine Blandin. - Depuis Robert Poujade en 1971, chaque gouvernement a annoncé le doublement du rythme de création des réserves naturelles et des espaces protégés. Jean-Louis Borloo s'est ainsi engagé à ce que la diversité biologique bénéficie des mêmes moyens que la lutte contre les changements climatiques, et une augmentation de 25 % du budget pour la biodiversité d'ici 2011 a été entérinée -ce qui ne représente que 132 millions, vu la faiblesse des sommes de départ...
Vous créez trois parcs, mais les crédits de paiement destinés aux parcs nationaux -2,3 millions- ne sont pas à la hauteur des besoins ; un quart des espaces protégés n'ont pas même un équivalent temps plein pour leur gestion ; on prévoit 4 millions pour les plans de restauration des espèces, mais on tire sur les loups et les ours, et dans les documents du comité permanent de la Convention de Berne, la France est le seul pays cité trois fois pour manquements : tortue des Maures (Testudo hermanni), crapaud vert (Bufo viridis) et grand hamster d'Alsace (Cricetus cricetus).
Les moyens consacrés aux programmes internationaux et conventions sont catastrophiques, tout comme ceux du ministère des affaires étrangères pour les programmes de coopération en matière de diversité biologique.
Combien y avait-il d'espèces menacées en France il y a cinq ans ? Quels crédits ont été engagés, sur ceux qu'annonçait le ministère ? Combien de dérogations pour des routes ou des carrières ? Quand chacun aura regardé la vérité de l'érosion des milieux et des espèces, nous serons en mesure d'auditer les insuffisances, les dysfonctionnements, les renoncements pour enfin exiger de chaque acteur des engagements plus responsables pour la nature !
Le Parc de Guyane est la plus grande zone protégée au monde. Protéger ce paradis naturel, c'est protéger l'homme, car les services rendus par la forêt primaire à l'écosystème planétaire sont inestimables. Mais ce paradis est aujourd'hui devenu un enfer du fait de l'orpaillage sauvage.
M. Jean Desessard. - Absolument.
Mme Marie-Christine Blandin. - La France a pris ses responsabilités pour qu'une multinationale ne broie pas les sous-sols de la montagne de Kaw, et ne les soumette pas à la morsure du cyanure. Elle doit aujourd'hui enrayer la déforestation à coup de lances à eau, la transformation de la moindre rivière en bourbier acidifié et stérilisé, les émanations massives de mercure gazeux au-dessus des chaudrons des orpailleurs. Elle ne peut laisser agresser les peuples indigènes du Haut Maroni, attaqués dans leur mode de vie en symbiose avec la forêt, la santé de leurs enfants ravagée par les neurotoxiques, leur sécurité menacée par des garimperos ivres et violents.
Le développement durable butte sur la corruption et l'absence de coopération. Il faut négocier plus fermement avec le Surinam et le Brésil pour faire cesser les arrivées de matériels et d'orpailleurs. Si l'on veut que la Guyane soit la France, il faut garantir la sécurité, l'eau potable, l'air respirable !
Il n'y a pas de protection de la biodiversité sans prise en compte de l'homme, et il n'y a pas de protection des hommes sans protection de leur environnement. Il faut un vrai plan durable, appuyé sur le parc et les autorités locales, en collaboration avec les autochtones, pour garantir leur survie, celle de la forêt primaire, et, partant, la nôtre. A vous d'accorder les moyens et de lancer la collaboration interministérielle nécessaire. (Applaudissements à gauche et sur certains bancs au centre)
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - Le budget 2009 du Meeddat ouvre les moyens nécessaires à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, dont vous débattrez en janvier. Il consacre la volonté du Président de la République et du Gouvernement de faire du développement durable la pierre angulaire d'un nouveau modèle de croissance, qui soutienne l'activité et l'emploi à court terme et consolide notre potentiel de développement à moyen terme. Ce sont des investissements générateurs de croissance, dans des secteurs riches en emplois non délocalisables : bâtiment, énergies renouvelables, transports.
C'est un budget des engagements tenus, puisque tous les engagements de l'État dans le cadre du Grenelle sont intégralement financés ; un budget d'action immédiate, puisqu'il propose des mesures opérationnelles permettant de lancer sans délai tous les programmes du Grenelle.
Avant d'entrer dans le détail, je salue la qualité du travail de vos rapporteurs.
Les moyens du Meeddat s'établiront en 2009 à 20,2 milliards, soit une progression de 5 % par rapport à 2008 à périmètre constant. Ce budget, qui rassemble plusieurs missions, un compte d'affectation spéciale et plusieurs ressources extrabudgétaires, est complexe. Monsieur Lambert, je souhaite comme vous que la maquette budgétaire soit désormais stabilisée.
Messieurs Collin et Emorine, l'architecture du budget annexe a en effet évolué. Comme nous nous y sommes engagés à l'Assemblée nationale, nous remettrons au Parlement en 2010 un rapport sur les perspectives d'évolution statutaire de la DGAC.
Si l'on additionne les dotations et que l'on supprime les doubles comptes, les dotations allouées au développement durable progressent de 5 %, de 19,3 à 20,2 milliards, dans un contexte de stabilisation des dépenses.
Monsieur Desessard, le budget de la mission baisse optiquement en 2011, car la subvention à l'Afitf diminue avec la création de la taxe poids lourds. A périmètre constant, la hausse des moyens réels se poursuit.
Ce budget confirme la priorité accordée à l'écologie. Les dotations des programmes « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité » et « Prévention des risques » augmentent de près de 11 %, après une progression de 25 % en 2008 : c'est une hausse des moyens de l'écologie de 38 % en deux ans !
La biodiversité bénéficiera de crédits de paiement en augmentation de 17 %. Nos priorités sont la continuité écologique, la protection des patrimoines naturels remarquables, celle des espèces menacées, Natura 2000 ainsi que la création d'un observatoire de la biodiversité. J'indique à M. Raoult que l'article 20 du projet de loi Grenelle de l'environnement prévoit l'acquisition de 20 000 hectares de zones humides par les collectivités avec le concours de l'État. Nous retenons son idée d'un critère « zones humides » dans le calcul de la DGF et nous en discuterons avec Bercy.
Oui, madame Blandin, l'outre-mer est une réserve de biodiversité. La redevance minière va augmenter en Guyane -nous parlerons lors de l'examen du collectif-, où nous créons un observatoire de la biodiversité. Les moyens dédiés à la défense des prédateurs vont aussi aux mesures d'accompagnement en vue de l'indemnisation. La protection de la biodiversité doit enfin se développer dans le respect de Port 2000, monsieur Revet.
M. Ambroise Dupont a évoqué les parcs naturels, comme M. Jacques Blanc. En Camargue, le syndicat mixte fonctionne et l'échéance de 2011 devrait être respectée. Le Conseil national du paysage engage une réflexion sur la publicité aux entrées des agglomérations.
Nous nous engageons pour la qualité des milieux aquatiques. La Caisse des dépôts apportera 1,5 milliard aux agences de l'eau pour la réalisation des travaux obligatoires.
L'aménagement durable de l'espace reçoit 80 millions en autorisations d'engagement. Nous accompagnerons la région capitale mais aussi des projets en province. Nous continuons, monsieur Bizet, à soutenir les Scot, cet outil majeur. S'ils ont un coût, que M. Revet a évoqué, ils économisent aussi sur des dépenses ultérieures bien plus importantes. L'État soutient leur élaboration via la dotation générale de décentralisation.
Les moyens affectés à la prévention des risques industriels progressent fortement en vue d'un deuxième plan Santé-environnement ainsi que pour financer les PPRT évoqués par Mme Keller. Leur mise en oeuvre prendra du temps mais le calendrier annoncé est réaliste et les interdictions de construire sont effectives. Bien sûr, il faudra augmenter les effectifs d'inspecteurs d'ici 2012.
Le fonds Barnier, inscrit à l'article 61, est abondé. Je rends hommage à M. Borloo et à Mme Kosciusko-Morizet ainsi qu'à Mme Keller qui avait proposé une telle mesure. Un rapport annuel de gestion vous sera rendu.
Au-delà des crédits budgétaires, les moyens de l'Afitf évoluent de manière significative. Trois nouveaux fonds en bénéficieront : le fonds Démonstrateurs de nouvelles technologies, le fonds Chaleur et le fonds Déchets. Un nouveau contrat d'objectifs sera élaboré. Les moyens alloués du fait du Grenelle imposent des responsabilités : la gouvernance sera améliorée et le décret statutaire modifié.
Le budget des transports garantit le financement de l'Afitf, celui des transports alternatifs sans négliger l'entretien et la sécurité. Au total, la progression atteint 4,4 %. Certes, monsieur Desessard, les crédits budgétaires semblent diminuer de 1,3 % mais cela s'explique par la refonte des concours à RFF. Cette baisse n'est d'ailleurs qu'apparente puisqu'avec l'augmentation des péages et les efforts de gestion de la SNCF, le plan de renouvellement du réseau sera respecté.
M. Teston a évoqué l'investissement en infrastructures. L'Afitf sera dotée de 13,8 milliards de 2009 à 2012 ; son budget augmente de 16 % sur un an. L'Agence était quasiment en cessation de paiement, nous assurons désormais son financement, M. Lambert en a parlé, M. Longuet a défendu l'agence...
M. Alain Lambert, rapporteur spécial. - C'est l'avis de l'exécutif qui nous intéresse.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Nous savons bien ce que sont les intérêts de l'Afitf par rapport aux régulations. Sa dotation budgétaire 2009 atteindra 1,2 milliard et sera complétée à hauteur de 200 millions par la taxe d'aménagement du territoire ainsi que par la redevance domaniale des sociétés d'autoroute. Le quantum de l'augmentation envisagée n'est pas fixé, car nous pensons aux reports de trafic que provoquera la redevance poids lourds. Cela suppose une concertation approfondie avec le secteur autoroutier mais le financement et la soutenabilité de l'Afitf sont bien assurés.
La question de l'avenir immédiat de l'agence se poserait si son financement était uniquement budgétaire mais cette situation n'est que temporaire grâce à la taxe poids lourds dont la France se dotera comme l'ont fait les Allemands, les Tchèques et les Autrichiens ou comme y réfléchissent les Pays-Bas et le Royaume-Uni.
M. Nègre a évoqué le soutien multimodal. La réforme des ports se traduit dans le budget par une augmentation de 6 millions des crédits d'entretien. Les présidents des nouveaux grands ports maritimes sont nommés et les conseils de surveillance en cours de constitution. Un accord cadre ayant été signé le 30 octobre, un décret sera bientôt publié. Chaque grand port va débattre de son projet, la réforme se met en place : il nous faut l'expliquer dans le monde et j'irai bientôt en Asie à cette fin.
Nous croyons aux voies navigables : Voies navigables de France reçoit 4 millions supplémentaires et le transport combiné, 8 millions. Je remercie M. Jacques Blanc de la démarche Port propre qu'il a initiée et qui s'est étendue à toute la France. La RN 88 ? Les travaux en cours concernent la liaison entre l'A 75 et le vallon du Romardiès ainsi que le viaduc de Rieucros, les financements ultérieurs résidant dans les programmes de modernisation des itinéraires. Nous attendons les retours des préfets et disposerons d'informations plus précises après les fêtes.
Le tram-train intéresse Mulhouse, Strasbourg - Mme Keller l'a évoqué- Nantes-Chateaubriand, pour la liaison avec le futur aéroport de Notre-Dame-des-Landes, l'Ouest lyonnais, cher à M. Mercier, ou encore la Réunion. La desserte ferroviaire en Ile-de-France constitue une priorité : l'Assemblée nationale a déjà voté l'article 13 du Grenelle de l'environnement et les études ont été lancées.
L'entretien et la régénération des infrastructures de transport mobilisent 456 millions pour le réseau routier. MM. Blanc et Nègre ont évoqué les concours de l'État à RFF. Ils financeront l'accélération du plan de rénovation ferroviaire, soit une dépense de 1,8 milliard sur 2006-2010. Nous avons signé début novembre le contrat de performance État-RFF, dont l'enveloppe est de 13 milliards d'ici 2015. Au total, le volume des investissements sera multiplié par 2,5 par rapport à 2005. Nous présenterons en janvier devant la Haute assemblée un projet de loi dont la commission des affaires économiques commencera l'étude la semaine prochaine.
Ce projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires sera l'occasion de débattre des missions de la future autorité de régulation. Le contrat de performance signé avec RFF lui permettra de maîtriser sa dette et de parvenir à un nouvel équilibre avec les entreprises ferroviaires utilisant le réseau. Nous nous attacherons à ce que la suppression du programme « Passifs financiers ferroviaires » ne réduise pas l'information du Parlement sur la gestion de la dette de RFF sur laquelle vous devez continuer à être informés tous les ans, même si RFF n'est pas un opérateur et si ses ressources ne proviennent pas majoritairement de l'État. Enfin, j'aurai l'occasion la semaine prochaine de parler devant la commission des affaires économiques des premières réflexions du Gouvernement sur l'excellent rapport de M. Haenel.
La politique de sécurité des transports sera poursuivie et amplifiée en 2009. Un accident aérien est ainsi malheureusement survenu cet après-midi : un Airbus A320 qui effectuait un vol d'essai s'est abîmé en Méditerranée et nous sommes sans nouvelles des sept membres d'équipage.
Comme l'a dit M. Grignon, l'investissement dans la sécurité des tunnels et des passages à niveau est aussi fondamental. Nous avons connu trop d'accidents cette année, dont la catastrophe d'Allinges. Ce matin, M. Borloo a présenté une campagne contre l'utilisation des téléphones à bord des véhicules.
Nous installerons 500 nouveaux radars par an, afin d'atteindre l'objectif fixé par le Président de la République : passer sous la barre des 3 000 personnes tuées d'ici à 2012. Il faut d'autant plus poursuivre l'effort qu'en octobre, les résultats n'ont pas été bons.
En ce qui concerne la sécurité maritime, nous consacrerons 60 millions en trois ans au plan de modernisation des Cross, et le Conseil européen du 9 octobre a obtenu un accord politique à l'unanimité sur le paquet Erika III. J'espère que le Parlement européen nous suivra sur cette voie, car ce paquet était mal parti avant la présidence française.
Nous sommes très attentifs à la sécurité aérienne et nous travaillons avec les États-Unis sur une reconnaissance mutuelle des procédures. M. Miquel s'est dit satisfait de la nouvelle présentation du rapport sur les radars. Enfin, la réforme du permis de conduire progresse : une large concertation vient d'être achevée et 23 mesures ont été retenues. Une décision est donc imminente.
La loi confie l'organisation des transports à différentes autorités, ce qui peut parfois créer des problèmes de coordination pour les usagers. Les syndicats mixtes sont destinés à les résoudre et nous devrions dans le futur projet de loi en faciliter la constitution.
En ce qui concerne l'énergie, les dotations du budget 2009 sont consacrées à 95 % à la gestion économique et sociale de l'après-mine. La diminution des crédits du programme en 2009 est imputable à une réduction technique de la subvention budgétaire à l'Ademe, plus que compensée par l'affectation de nouvelles taxes à l'établissement. En revanche, au sein de ce programme, la lutte contre le changement climatique bénéficie d'une dotation en hausse de 12 %.
En matière d'énergies renouvelables, la création dès 2009 d'un fonds Chaleur renouvelable, doté de plus d'1 milliard sur les années 2009 à 2011 traduit les engagements du Grenelle. Ce fonds, géré par l'Ademe, soutiendra les investissements dans des systèmes de production de chaleur à partir de sources renouvelables dans l'habitat collectif, le tertiaire et l'industrie.
M. Courteau a évoqué la Commission de régulation de l'énergie qui a proposé au Gouvernement une évolution des tarifs d'utilisation du réseau. Nous avons deux mois pour nous prononcer : les expertises sont en cours ainsi qu'une consultation du secteur.
Concernant le nucléaire, M. Borloo est très attentif à tout ce qui touche à la sûreté et au contrôle. Les incidents recensés doivent être analysés en détail par les experts de l'Autorité de sûreté nucléaire. L'incident survenu sur l'installation de la Socatri est d'un autre ordre. Nous avons donc saisi le Haut comité pour la transparence et l'information en matière de sécurité nucléaire qui a rendu ses conclusions au début du mois. Nous avons décidé de les reprendre à notre compte et de demander aux différents acteurs de les mettre en oeuvre.
La France devra être un acteur de premier ordre en ce qui concerne les installations photovoltaïques. Le plan en faveur des énergies renouvelables qui a été présenté par M. Borloo et Mme Kosciusko-Morizet comporte des mesures très concrètes, comme la simplification des démarches administratives, des soutiens tarifaires et une réforme du code de l'urbanisme.
Nous avons un parc d'éoliennes dont la productivité est supérieure à celle du parc européen et le déploiement de nouvelles machines est en cours, tout en tenant compte des normes et contraintes environnementales.
S'agissant du « Hors Grenelle » et des crédits de pilotage du ministère, nous avons décidé de stabiliser nos dépenses en euros courants sur trois ans. La création du ministère a entraîné une réorganisation profonde de tous nos services, que nous avons accompagnée d'une revue très stricte de nos missions. Ainsi, il a été décidé de restreindre notre activité d'ingénierie concurrentielle et de développer nos nouveaux axes d'intervention autour du développement et de l'aménagement durable des territoires.
M. Lambert a évoqué la réglementation communautaire qui proscrit l'intervention publique dans le champ concurrentiel. Si certains territoires ne trouvaient pas d'offre, l'État pourrait toutefois continuer son action dans un cadre plus ciblé.
L'Atesat est maintenue, monsieur Bizet : les petites communes ne seront donc pas affectées. Nous poursuivons la fusion entre les DDE et les DDA : huit cette année, 47 en 2009 et le solde en 2010. Cette réorganisation impose une certaine souplesse dans la gestion de nos crédits de personnel, monsieur Miquel : c'est le sens de leur centralisation sur notre programme soutien. Ce réaménagement se traduit dans l'évolution des effectifs du ministère, monsieur Desessard. En 2009, 1 400 emplois disparaîtront, soit une évolution sensiblement équivalente à celle de 2008. Cet effort est comparable à celui des autres ministères. La priorité donnée à la mutation environnementale de notre société se traduit dans le redéploiement de nos équipes vers des politiques « Grenelle » et le renforcement des équipes de nos établissements publics, véritables bras armés de nos interventions.
M. Collin a évoqué le contrat d'objectifs de Météo-France, qui sera conclu au premier semestre 2009. La réorganisation territoriale de l'établissement est une conséquence des évolutions technologiques. Elle se fera bien sûr dans la concertation et en tenant compte du personnel. S'agissant de l'IGN, après la nomination d'un nouveau directeur, nous préparons un nouveau contrat.
La question du financement du Grenelle dépasse de loin les seuls crédits des missions dont nous débattons aujourd'hui. Les ressources budgétaires, fiscales et extrabudgétaires, mobilisées par le ministère durant les trois prochaines années, assureront le financement intégral de l'ensemble des chantiers du Grenelle. Pour la mise en oeuvre du Grenelle, le Gouvernement engagera près de 19 milliards entre 2009 et 2011. C'est l'une des programmations financières les plus ambitieuses qu'un gouvernement ait jamais décidée. Comme l'a souligné votre commission des finances, le financement du Grenelle ne repose que partiellement sur des crédits budgétaires, puisque les allégements fiscaux représentent 38 % du coût total. Cela ne déroge toutefois pas aux règles ou aux principes budgétaires usuels : le contrôle parlementaire est préservé, les allégements fiscaux et les affectations de taxes font l'objet d'articles en première et deuxième partie du projet de loi de finances, et le texte du Gouvernement a été amendé par votre assemblée, notamment la TGAP.
La prorogation du crédit d'impôt « Développement durable » et son amélioration, qui constituent l'essentiel des allégements fiscaux, ne pouvaient pas faire l'objet de subventions budgétaires, sauf à en transformer l'esprit et en alourdir la gestion.
S'agissant des taxes affectées à l'Ademe et à l'Afitf, nous ne modifions pas la situation actuelle : ces établissements étaient déjà financés en 2008 sur ressources affectées. Cette équation financière n'augmente pas les prélèvements obligatoires : les impositions supplémentaires seront compensées par les aides fiscales décidées par ailleurs.
Mme Keller m'a interrogé sur le bonus-malus automobile : ce dispositif a bien entendu vocation à être à terme financièrement équilibré. Son formidable succès a eu naturellement un coût pour l'État mais, dans le contexte de crise mondiale du secteur automobile, cela a permis de protéger en partie notre marché. Cette année, l'impact global devrait être d'une quinzaine de millions de perte de recettes.
Ce budget est vraiment axé sur le développement durable : nous n'en sommes plus aux imprécations marginales de pionniers visionnaires. Ce n'est pas non plus un ornement agréable et sympathique que l'on s'offre dans les périodes de croissance. C'est en fait tout le contraire. Il s'agit de l'une des modalités prioritaires du soutien immédiat à une conjoncture, hélas, vacillante. C'est l'assurance que les crises écologiques de demain, que malheureusement nous connaîtrons et dont l'incidence économique sera peut-être plus considérable que celle d'aujourd'hui, n'emporteront pas avec elles nos équilibres politiques et sociaux.
Ce budget participe à l'action du Gouvernement pour la croissance et la prospérité. Le Grenelle de l'environnement et ses dispositions financières vous invitent aujourd'hui à participer à la croissance que nous souhaitons durable, équilibrée et au service de tous les Français. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean Bizet. - Très bien !
La séance est suspendue à 19 h 45.
présidence de M. Roger Romani,vice-président
La séance reprend à 21 h 45.
Questions et réponses
M. le président. - Nous allons maintenant procéder à un échange de questions et de réponses.
Taxe sur les poids lourds
M. Michel Teston. - L'instauration d'une taxe sur les véhicules de transport de marchandises recueille un certain consensus, mais les interrogations pratiques subsistent. Comment pourrait-il en être autrement, sachant que les vicissitudes de l'expérimentation alsacienne se résument à trois ans de tâtonnements et de controverses ?
Cette expérimentation aura au moins eu le mérite d'inciter à la plus grande prudence, car l'élargissement au niveau national ne sera pas une mince affaire : 17 décrets d'application ou arrêtés seront nécessaires, certains portant sur des problèmes non résolus à ce jour.
Le texte dispose notamment que le traitement automatisé des données sera confié à un ou plusieurs prestataires.
Quelles sommes l'État devrait-il consacrer chaque année jusqu'en 2011 à la conception de ce dispositif complexe ?
Il y a eu un précédent fâcheux : les 16 millions d'euros inutilement dépensés par l'État depuis trois ans pour le chèque transport, récemment abandonné au profit d'une prime directement ajoutée au bulletin de paye, ce que nous n'avions cessé de proposer pendant ces trois ans...
Notre groupe s'interroge aussi sur un autre projet du Gouvernement : l'augmentation de la redevance domaniale des sociétés d'autoroutes. Leur privatisation a été une faute, mais l'augmentation de cette redevance serait intéressante pour renforcer l'Afitf.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - La redevance poids lourds doit être effective en 2011, pour procurer environ 1,2 milliard d'euros, le coût d'exploitation devant être compris entre 100 et 200 millions. Nous sommes attentifs à l'expérience de l'Allemagne, où une taxe similaire a été difficilement mise en place depuis 2002-2003. Pour nous, la référence est plutôt le système de télécommunications Galileo. Les Européens devront veiller à l'interopérabilité du système, afin d'éviter les erreurs commises au XIXe siècle avec les chemins de fer, quand même l'écartement des voies n'était pas identique partout.
Sur le plan financier, nous n'avons pas besoin de crédits de paiement l'année prochaine. Quand le dispositif sera opérationnel, dans le cadre d'un contrat de partenariat, il faudra contenir les charges d'exploitation autant que faire se peut, car la taxe doit financer l'Afitf.
A propos de la redevance domaniale, nous avons un objectif dont nous discutons de façon approfondie avec les sociétés autoroutières.
M. Michel Teston. - Je prends acte de votre réponse. Nous serons vigilants pour que le coût de la taxe sur les poids lourds soit réduit au minimum. Par ailleurs, nous aurons encore l'occasion d'examiner la redevance domaniale.
Commercialisation des substances chimiques
M. Marcel Deneux. - Depuis l'entrée en vigueur, le 1er juin, du Règlement européen sur l'enregistrement, l'autorisation et la restriction des produits chimiques (Reach), toute substance chimique mise sur le marché avant le 19 septembre 1981 doit faire l'objet d'un pré-enregistrement auprès de l'Agence européenne des produits chimiques. Ainsi, fabricants et importateurs doivent, avant le 1er décembre, notifier un certain nombre d'informations à l'agence. Les retardataires auront deux options : enregistrer les substances dès le 2 décembre ou suspendre leur production et leur mise sur le marché.
Or, seules 1 258 entreprises sur les 5 400 concernés s'étaient pliées à cette formalité en octobre. A moins d'une semaine de l'échéance instituée par le Règlement, que pourrait faire le Gouvernement pour aider les entreprises ayant laissé passer ce délai ? L'industrie chimique française occupant la deuxième place en Europe, il est indispensable de l'accompagner face aux obstacles juridiques, d'autant plus que le fonctionnement du site de pré-enregistrement n'a pas été irréprochable.
D'autre part, l'Agence européenne des produits chimiques a annoncé le 9 octobre avoir identifié quatorze substances chimiques très préoccupantes, une quinzième substance étant classée « préoccupante ». Que pense le Gouvernement de cette liste ?
Enfin, les ministres de la santé et de l'écologie ont décidé, au cours d'un colloque organisé mardi à Paris, de réévaluer les risques induits par plusieurs substances chimiques chez les femmes enceintes et les jeunes enfants. Mme Bachelot-Narquin entend étudier « en partenariat avec les industriels », la pose d'un logo sur les produits qui ne sont pas recommandés aux femmes enceintes et aux jeunes enfants. Elle souhaite également que l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé étudie le risque lié à l'usage de cosmétiques pendant la grossesse et chez les jeunes enfants, notamment de ceux « distribués dans les maternités ».
Ces mesures vont dans le bon sens, mais Reach ne traite aucunement des nanoparticules, largement utilisés dans les produits cosmétiques malgré les risques sanitaires mis en évidence par plusieurs études scientifiques récentes. Il me semble donc indispensable d'introduire rapidement un étiquetage adapté.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Le pré-enregistrement a une importance majeure, puisque son non-respect serait sanctionné par le retrait du marché à partir du 2 décembre. Le Gouvernement a donc informé les entreprises, les fédérations professionnelles et les chambres consulaires.
Le démarrage du processus a été lent, mais il s'est accéléré au point que le nombre d'entreprises l'ayant réalisé a triplé en quelques semaines, pour atteindre 3 300 le 24 novembre. Il est clair depuis l'origine qu'aucune dérogation nationale ne serait possible à un règlement européen, par nature d'application directe.
La liste des 15 substances que vous avez évoquée a été retenue à l'unanimité par les États membres.
Enfin, s'agissant de l'évaluation des risques et de l'information des consommateurs, le Gouvernement agit pour améliorer les connaissances et renforcer la prévention. Ainsi, l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement évalue régulièrement les risques liés à diverses substances.
Il en va de même pour les nanoparticules. Je relayerai auprès de Mme Bachelot-Narquin votre demande d'expertise sur l'utilisation de nanomatériaux. Avec M. Borloo, nous voulons saisir de cette question la commission nationale du débat public.
M. Marcel Deneux. - Merci pour cette réponse. Nous contribuerons, avec vous, à être vigilants.
Tarifs du gaz
Mme Évelyne Didier. - Depuis le 1er janvier, les tarifs de GDF ont augmenté de 4 % en janvier, de 5,5 % en avril et de 5 % en août, portant la hausse du gaz à plus de 45 % depuis 2004.
Ces réévaluations successives sont principalement motivées par la rémunération des actionnaires, puisque l'accroissement des marges bénéficiaires a ponctionné 1,3 milliard d'euros sur les consommateurs.
En 2006, M. Breton, alors ministre de l'économie et des finances, avait gelé ces tarifs pour des raisons électorales, ce qui a défavorisé ensuite les consommateurs, puisqu'ils n'ont pas bénéficié de la baisse des prix que la réduction des coûts d'approvisionnement aurait dû induire entre 2006 et 2008.
L'entreprise Gaz de France invoque la hausse des cours du pétrole. Mais lorsqu'on l'interroge sur la répercussion de leur reflux, elle oppose un décalage temporel entre les mouvements du marché pétrolier et les coûts d'approvisionnement. Soit, mais d'où viennent alors les augmentations de janvier et avril 2008, alors que les coûts avaient diminué depuis deux ans ? C'est simple : l'entreprise a anticipé l'augmentation à venir. Comment se fait-il qu'elle prévoie les hausses, mais pas les baisses ?
Si l'entreprise a anticipé l'augmentation à venir, on comprend mal qu'elle ne soit pas en mesure d'anticiper les baisses. Dans un contexte de libéralisation dangereuse du secteur énergétique, alors que la plus grande opacité entoure la formule tarifaire du gaz, que le contrat de service public 2005-2007 est arrivé à échéance et que le nouveau contrat n'est pas formalisé, on est en droit de craindre de nouvelles hausses du prix du gaz dans les prochains mois. Pourquoi l'entreprise n'a-t-elle pas attendu six mois pour répercuter la hausse du prix du pétrole sur le prix du gaz, alors qu'aujourd'hui il lui faudrait attendre six mois pour répercuter la baisse ? Cette question concerne des milliers de nos concitoyens qui connaissent des difficultés grandissantes à payer leur facture énergétique.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Je ne suis pas spécialiste de l'énergie, et je ne peux à l'instant que vous faire une réponse très générale mais je vous adresserai une réponse écrite précise et documentée.
C'est au niveau mondial que les tarifs du gaz sont opaques. Le Gouvernement a toujours voulu que les hausses soient minimales. Il y a un décalage dans le temps entre le moment où les cours mondiaux du pétrole baissent et celui où cette baisse arrive au consommateur. Pour le gaz, c'est plus complexe encore. Je vous enverrai demain tous les éléments de réponse.
Mme Évelyne Didier. - Merci, monsieur le ministre, de me les envoyer. L'article paru aujourd'hui dans Les Échos augmente mon inquiétude. Si l'entreprise annonce qu'elle risque de manquer de financement, cela fait mécaniquement chuter ses cours en bourse, ce qui a des répercussions sur les tarifs. Il faut des tarifs régulés qui évitent ces augmentations inconsidérées.
Qualité de l'air et transports en Alsace
M. Philippe Richert. - Je ne suis pas sûr que ce mode de débat soit efficace. Je voulais interroger M. Borloo ou Mme la secrétaire d'État, ils sont absents, mais il se trouve que j'ai aussi une question à poser au ministre chargé des transports...
Je regrette que le Grenelle n'ait pas, en ce qui concerne la qualité de l'air, adopté une ligne cohérente. Le bonus-malus, par exemple, institué pour lutter contre l'émission de gaz à effet de serre ne contre en rien l'émission de particules. Or, il y a chaque année 300 000 décès dus à ces particules. Il faudrait concilier la qualité de l'air et la lutte contre le réchauffement climatique. Y aura-t-il enfin, un plan en faveur de la qualité de l'air ?
Le TGV-Est me tient à coeur : j'aimerais être certain que les travaux commenceront en 2010 et que M. Libermann nous proposera enfin un tour de table. Les collectivités sont prêtes...
Le Grand contournement ouest de Strasbourg (GCO), par où passent 100 000 véhicules par jour. Le Président de la République avait pris un engagement lors du conseil des ministres tenu à Strasbourg : cela devait commencer en 2009. J'en voudrais confirmation.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Nous préparons la deuxième phase du TGV-Est, elle est inscrite dans le Grenelle, votée par l'Assemblée nationale, elle le sera par le Sénat. Nous apprécions les capacités contributives de votre région et nous avançons.
Le GCO : c'est un projet que nous réexaminons avec le Grenelle et dans le cadre du schéma des infrastructures.
Vous êtes un des meilleurs connaisseurs des questions de qualité de l'air et c'est pourquoi nous vous avions demandé de piloter le comité opérationnel « Air et atmosphère » du Grenelle de l'environnement. M. Borloo met en oeuvre la politique que vous souhaitez et le projet de loi de Grenelle l prévoit un plan particules. Le projet de loi de finances élargit la TGAP aux particules. Enfin, le Gouvernement est en train de créer des indices de qualité de l'air intérieur.
Vous pouvez donc être un sénateur heureux de constater que les orientations que le Gouvernement a prises correspondent à vos préconisations.
M. Philippe Richert. - Je vous remercie. Mais soyons sérieux. Il faut enfin concrétiser les projets GCO et TGV-Est. Les collectivités alsaciennes demandent qu'un tour de table permette enfin d'avancer. Des engagements ont été pris et 2009 doit être l'année de lancement de ces projets.
La qualité de l'air est un problème sanitaire de premier plan. Pensez à la multiplication des asthmes, des allergies, des réactions aux germes contenus dans l'air. Cessons de nous focaliser sur le seul changement climatique ! Merci de relayer ces questions dans votre ministère.
Application de la loi sur l'eau
M. Paul Raoult. - En tant que parlementaire, mais aussi en ma qualité de vice-président de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, je souhaite appeler votre attention sur l'inachèvement de l'application de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques de décembre 2006. Près de deux ans après son adoption, plusieurs décrets ne sont pas publiés, en particulier celui concernant les contrats de délégation des services publics d'eau et d'assainissement. L'article 54 prévoit notamment que le délégataire remet à la collectivité délégante, au moins dix-huit mois avant la fin du contrat de délégation, les fichiers d'abonnés qui sont nécessaires à la facturation des redevances dues par ces abonnés ainsi que les plans des réseaux. La transmission de ces documents est indispensable à une véritable concurrence à la fin des contrats de délégation. Si l'on permet au délégataire sortant de faire obstacle à cette transmission, il dispose d'un avantage par rapport aux autres candidats qui doivent reconstituer, à leurs frais, les informations que le délégataire sortant possède déjà. Le même problème se pose aussi dans le cas des collectivités qui envisagent de créer une régie à l'issue d'un contrat de délégation. Le délégataire sortant essaye souvent de rendre plus difficile la création de la régie en transmettant les documents du service de façon incomplète, ou sous une forme difficilement utilisable par la collectivité, en raison d'un format informatique indéchiffrable, par exemple. Il serait donc nécessaire que la disposition législative évoquée ci-dessus, qui figure désormais à l'article L. 2224-11-4 du code général des collectivités territoriales, soit applicable dès que possible. Dans quel délai le décret correspondant sera-t-il publié ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - La question des supports techniques à transmettre en cas de changement de délégataire a été prise en compte dans la loi sur l'eau et un décret devait définir le contenu de ces supports techniques. Un décret a bien été préparé mais il reposait sur une base législative insuffisante car, ces fichiers contenant des données à caractère personnel, cela renvoyait à la loi Informatique et libertés de 1978. La loi sur l'eau aurait dû le préciser et non employer les termes réducteurs de « support technique ». M. Borloo a donc décidé de réintégrer les précisions manquantes dans le projet de loi de transition environnementale afin d'organiser la sécurité des fichiers. Tout cela sera fait dans un décret en Conseil d'État qui définira les obligations des collectivités locales pour la remise et la conservation des fichiers.
M. Paul Raoult. - Beaucoup de contrats vont arriver à leur terme. Il y aura de nombreux appels d'offre et des mises en concurrence pour lesquelles il faut répondre aux demandes des communes.
OGM
M. Daniel Soulage. - Lors du prochain conseil « Environnement » de l'Union européenne, les 4 et 5 décembre prochain, doivent être votées les conclusions du Conseil sur les OGM. Le projet préparé par la présidence française insiste notamment sur l'amélioration de l'évaluation scientifique, l'instauration d'une surveillance accrue des champs de plantes transgéniques et la fixation de seuils d'étiquetage des semences. Ces sujets sont importants, mais l'essentiel est de répondre aux inquiétudes légitimes de nos concitoyens sans empêcher définitivement les cultures OGM sur le territoire national. Or le premier projet de conclusions, tel qu'on peut le lire dans la presse spécialisée, insiste beaucoup sur les incertitudes liées à la dissémination.
Lors de la discussion de la loi relative aux OGM, nous avons rappelé qu'il est indispensable de développer les cultures OGM, toutefois en les encadrant strictement afin de garantir la coexistence des divers modes culturaux -j'avais notamment fait adopter un amendement pour fixer des zones d'isolement entre les cultures. Le Parlement a effectué un travail considérable, mais la loi OGM reste pour l'instant lettre morte. Pendant ce temps, nos chercheurs et nos agriculteurs prennent du retard par rapport à leurs concurrents. Pouvez-vous nous indiquer dans quels délais les décrets d'application seront pris ?
Les instances européennes souhaitent à l'évidence voir le dossier OGM avancer plus rapidement. L'Autorité européenne pour la sécurité des aliments a mis en doute les arguments scientifiques présentés par la France pour justifier l'interdiction du maïs MON 810. M. le ministre d'État a dit maintenir sa position. Est-elle tenable en droit ? Le président de la Commission européenne a en outre rappelé le 10 octobre dernier que le décalage entre les délais d'autorisation de mise sur le marché dans l'Union européenne et ceux d'autres pays menaçait l'agriculture communautaire. Il a appelé les organisations agricoles à s'impliquer davantage dans le débat et à communiquer auprès du public sur le caractère incontournable des OGM.
Lors de l'examen de la loi OGM, j'avais plaidé pour une vaste campagne de communication destinée à informer correctement les consommateurs. Il faut que tous les acteurs s'impliquent et s'ouvrent au grand public pour expliquer à la fois l'intérêt des OGM et les mesures d'encadrement qui sont prises. Monsieur le ministre, une telle campagne est-elle envisagée ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Dès le début de sa présidence, la France a demandé la création au niveau européen d'un groupe de travail sur les OGM. Elle espère faire adopter des conclusions lors du Conseil le 4 décembre prochain -je rappelle que sur ce sujet sensible l'unanimité est juridiquement nécessaire.
Le Haut conseil des biotechnologies, qui comporte deux comités, va se mettre en place de telle sorte qu'il puisse se réunir début 2009.
L'avis de l'Agence européenne sur la suspension de la culture du maïs MON 810, rendu le 31 octobre, remet en cause les fondements scientifiques de la décision française. Cet avis n'est qu'une étape dans le processus de traitement des clauses de sauvegarde au niveau européen, la Commission devant soumettre une proposition de décision au comité réglementaire puis au conseil des ministres. La France entend maintenir la suspension au moins tant que la décision finale n'aura pas été prise.
La question de la définition des filières sans OGM fait l'objet de réflexions interministérielles et dépend de textes règlementaires qui ne sont pas encore finalisés. Le Conseil national de la consommation mène par ailleurs des réflexions sur ce thème, dont les conclusions, qui devraient être connues avant la fin de l'année, pourront éclairer le Haut comité.
Le décret sur la responsabilité et les garanties financières supportées par les agriculteurs cultivant des plantes OGM est enfin en cours d'examen au ministère des finances.
M. Daniel Soulage. - Je vous remercie de ces précisions, dont je retiens que les choses n'avancent pas vite. Nous sommes bientôt en décembre, c'est le moment où les agriculteurs doivent choisir les semences qu'ils vont acheter et préparer les champs. Je ne sais quoi leur dire, sinon que rien ne sera changé pour 2009 ...Si Mme Blandin peut applaudir, moi pas !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Il est vrai que des incertitudes subsistent sur les délais...
Afsset
Mme Odette Herviaux. - Je souhaite vous interroger sur l'avenir de l'Agence française de sécurité de l'environnement et du travail (Afsset) qui est au coeur d'une réforme dont on a parfois du mal à comprendre les tenants et les aboutissants. En 2007, cette agence a émis douze avis, par exemple sur les fibres minérales artificielles ou sur le virus H5N1. Du fait de l'émergence de nouveaux risques, elle est de plus en plus sollicitée et doit de plus faire face à de nouvelles tâches règlementaires. C'est dire que sa charge de travail augmente. Au titre du programme « Prévention des risques », elle devrait mettre en oeuvre les actions de prévention des risques technologiques et des pollutions, d'évaluation des risques sanitaires liés aux nuisances sonores, de gestion des déchets ou d'évaluation des substances et produits chimiques, notamment biocides. On lit aussi dans le bleu budgétaire qu'elle apporte son concours au ministère de l'écologie chargé de la mise en oeuvre de la directive relative aux produits biocides et que, pour la mise en oeuvre du règlement Reach, l'agence a une mission de tête de réseau et assiste les ministères responsables dans la définition des priorités en matière d'autorisation ou de restriction. A son programme figure également la création d'un observatoire des résidus de pesticides.
C'est dire que vous comptez beaucoup sur l'agence pour la réalisation des objectifs du Grenelle -le sort de presque tout le titre III de celui-ci repose sur elle. Si cela nous rassure sur son avenir, la modestie de ses moyens, qui stagnent, nous inquiète. Est-il raisonnable de lui confier tant de missions sans lui donner les moyens de les mener à bien ? D'autre part le million d'euros auquel il est fait référence dans le bleu budgétaire vient-il en plus des 5 millions de dotation ou y est-il inclus ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - L'Afsset est placée sous plusieurs tutelles, ce qui lui donne davantage de liberté. Son contrat d'objectifs a été signé en 2007 et elle bénéficie de moyens non négligeables à hauteur de 23 millions d'euros. Elle a en effet beaucoup à faire dans le cadre du Grenelle de l'environnement.
Même si des regroupements étaient envisagés dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, l'agence devrait conserver son rôle de tête de réseau ; nous avons besoin de la grande expertise de ses personnels.
Mme Odette Herviaux. - On ne parle plus d'une fusion entre l'Afsset et l'Agence française de sécurité des aliments ; où en est-on exactement ? A défaut d'être totalement rassurés, nous nous réjouissons qu'elle conserve son autonomie et sa fonction de tête de réseau.
Inspection des installations classées
Mme Marie-Christine Blandin. - Ma question porte sur l'inspection des installations classées ; je suis d'autant plus motivée pour la poser que les histoires sordides se répètent dans ma région.
A l'automne 1991, la Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (Drire) n'a rien vu du détournement de dizaines de tonnes de sels de métaux lourds hautement toxiques, issus des filtres de cheminées d'une aciérie du littoral, et de leur utilisation frauduleuse pour remblayer 45 kilomètres de chemins de remembrement. Et voici que nous apprenons par la presse, il y a un mois, que des déchets naphtalinés hautement cancérigènes, provenant d'une autre aciérie, n'ont pas été retraités comme ils devaient l'être et ont été réétiquetés et vendus comme carburant pour les tankers après avoir transité par le port de Dunkerque -les délinquants touchant au passage le retour de la TIPP !
Cela date de 2005 et la Drire n'avait rien vu !
Année après année, on nous promet des inspecteurs ; la terminologie des programmes change ; des accidents, telle l'explosion de l'usine AZF, engendrent de nouvelles annonces ; des programmes stratégiques, comme celui du 26 juin, cadrent le rythme des visites dans les entreprises. Mais, sur les 400 postes d'inspecteurs qui devaient être créés entre 2004 et 2007, seuls 200 l'ont été. L'on nous promet aujourd'hui un rattrapage de 200 postes mais d'ici 2012 et, de surcroît, par redéploiement ! Or les errements passés ont démontré qu'assumer ces missions complexes ne s'improvise pas...
Monsieur le ministre, comment garantir la sécurité sanitaire et la transparence quand votre corps des inspecteurs, parce qu'il ne s'accroît pas au rythme des dangers technologiques et du trafic de déchets, ne peut détecter les manquements aux obligations légales ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Madame Blandin, ces faits scandaleux montrent effectivement la nécessité de s'appuyer sur un véritable corps d'inspecteurs. Pour le ministère, c'est une priorité de la politique de prévention des risques. Dans un contexte budgétaire contraint, il est prévu de créer 200 postes d'ici 2012. Pour être efficaces, ces inspecteurs doivent recevoir une bonne formation. En 2008, une centaine d'agents en ont suivi une pour obtenir l'habilitation. C'est ainsi que nous pourrons déjouer les pièges des aigrefins dont les dégâts, comme vous l'avez rappelé, sont invraisemblables. Bref, le Gouvernement agit.
Mme Marie-Christine Blandin. - Monsieur le ministre, je vous remercie de cet éclairage, notamment sur la formation. Car, au-delà des moyens, il y a effectivement un besoin de compétences. La Drire de ma région, suite à l'affaire des produits naphtalinés écoulés en carburant, m'a confié qu'elle n'avait pas compétence pour vérifier les bordereaux et factures de traitement de déchets. Il y a là une troublante similitude avec les faits observés par Roberto Saviano dans son ouvrage Gomorra : le trafic des déchets à Naples, analyse-t-il, est rendu possible par l'absence de contrôles des représentants de la puissance publique. Cela devrait inciter à nous mobiliser sans plus tarder ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Examen des crédits
Article 35
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Nous annulons les crédits du programme « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire » correspondant au montant des dépenses des personnels transférés aux départements et régions pour 82 517 879 euros. Par ailleurs, le programme « Infrastructures et services de transports » est minoré de 15 300 340 euros au titre de l'ajustement des transferts de compétence relatifs aux routes nationales d'intérêt local. Bref, il s'agit essentiellement d'un amendement de compensation pour couvrir les dépenses de personnel.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Cet ajustement intervient tardivement, mais pour être aussi précis que possible. Donc avis favorable.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Merci !
L'amendement n°II-121 est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-27, présenté par M. Lambert, au nom de la commission des finances.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Conformément à l'esprit de la Lolf, nous répartissons les emplois et les dépenses de personnels, actuellement regroupés au sein du programme de soutien, entre chacun des programmes de la mission concerné. Monsieur le ministre, nous nous interrogeons : pourquoi conserver cette gestion globale des personnels ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Avec cet amendement d'appel, la commission sollicite quelques éclaircissements que je lui apporte volontiers. Nous maintenons cette architecture, non pour aller à l'encontre de la Lolf que j'ai cherché à mettre en place après M. Lambert, mais parce que nous avons besoin de cette souplesse pour réorganiser nos troupes sur le terrain au sein des services déconcentrés de l'État que sont, notamment, les Drire, les directions régionales de l'agriculture, les directions régionales de l'environnement afin d'atteindre l'objectif que poursuit la commission des finances. Au bénéfice de ces observations, je vous invite à retirer l'amendement.
L'amendement n°II-27 est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-81 rectifié, présenté par Mme Bricq et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
M. Jean-Pierre Sueur. - Cet amendement vise à prélever sur l'action 3 du programme « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire » 38,5 millions pour abonder l'action 10 du programme « Prévention des risques ». Cet amendement, que nous avons travaillé avec Mmes Bricq et Campion, vise à la juste indemnisation des victimes de la sécheresse de 2003, sur laquelle nous sommes intervenus à de très nombreuses reprises.
Nous avons plus particulièrement étudié la situation dans le Loiret, la Seine-et-Marne et l'Essonne, mais elle a été exposée par les associations dans tous les départements. Cette sécheresse a eu des effets considérables sur les habitations, certaines en sont devenues inhabitables, elle a durement éprouvé nos concitoyens. Les préjudices subis sont estimés à 1,5 milliard, l'on a développé une enveloppe de 228 millions : c'est dire si nous sommes loin du compte ! En outre, l'indemnisation a donné lieu à de nombreuses contestations. Dans de nombreux cas, il a été difficile de trouver des raisons météorologiques ou géologiques justifiant la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. On a constaté des inégalités de traitement entre les départements, et à l'intérieur des départements entre des communes qui connaissaient pourtant la même situation, entre communes limitrophes ou non d'une commune reconnue en état de catastrophe naturelle. Ensuite, les critères de la structure, du clos et du couvert n'ont pas permis, notamment, de prendre en compte les cas où les larges fissures ont rendu impossible l'utilisation des portes et des fenêtres, et donc de l'habitation... Injustice, encore, liée au devis pris ou non en compte et au fait que certaines entreprises ont fait faillite et n'ont pu procéder aux travaux.
Lors de l'examen du budget l'an dernier, Mme Alliot-Marie avait annoncé qu'une solution avait été trouvée avec Bercy et que le problème serait réglé début 2008. Quelle n'a pas été la déception des sinistrés, et la nôtre, de constater qu'il s'agissait, en fait, d'une simple mesure technique quant aux délais de présentation des dossiers. Pas un sou de plus pour les victimes de la sécheresse ! Monsieur le ministre, les sinistrés ne comprendraient pas que, cette année encore, le Gouvernement ne fasse rien pour eux !
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Nous partageons la préoccupation des auteurs de l'amendement. Toutefois, prélever des crédits sur l'action 3 freinerait la réorganisation du ministère. A condition que le ministre s'engage à agir rapidement sur ce dossier qui nous tient tous à coeur, seriez-vous prêt à retirer l'amendement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Je partage les préoccupations de M. Sueur, mais dans le cadre de ce programme il est difficile d'augmenter les crédits d'indemnisation. Le gage que vous proposez est problématique, puisqu'il remet en cause des politiques d'action sociale, de formation et d'accompagnement. Sur un plan technique, le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement.
Cependant, vous avez raison sur le fond : les victimes de la sécheresse de 2003 doivent être indemnisées. Je vous rappelle que le bénéfice du statut de victime de catastrophe naturelle a été accordé à 4 300 communes ; selon les critères habituels, cela n'aurait dû être le cas que de 200 communes. Une procédure complémentaire a été mise en oeuvre pour d'autres communes ; elle a conduit à répartir une enveloppe de 220 millions d'euros.
Il n'était prévu aucune dotation supplémentaire dans le PLF pour 2009, mais je comprends votre demande, et je m'engage à la relayer auprès de Mme la ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Sueur. - J'ai été sensible aux propos de Mme le rapporteur et de M. le ministre. Je veux bien reconnaître que la solution technique que nous proposons n'est pas la meilleure, mais M. le ministre s'engage-t-il à apporter une réponse à ce problème dans le cadre de la loi de finances rectificative ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - M. Sueur connaît assez bien la vie parlementaire et les finances publiques pour savoir qu'un secrétaire d'État aux transports ne peut s'engager sur des mesures financières au nom du Premier ministre et du ministre des finances.
M. Jean-Pierre Sueur. - Mais vous engagez-vous à relayer notre demande avec insistance et, si j'ose dire, avec sympathie ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Je serai un honnête intermédiaire.
M. Gérard Longuet. - Honnête et talentueux !
M. Philippe Richert. - Très bien, monsieur le ministre !
M. Jean-Pierre Sueur. - Connaissant la force de conviction de M. le ministre, et fort du soutien de Mme Keller, je retire l'amendement et vous donne rendez-vous lors du débat sur la loi de finances rectificative.
L'amendement n°II-81 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-82, présenté par M. Bizet, au nom de la commission des affaires économiques.
M. Jean Bizet, rapporteur pour avis. - Cet amendement a pour objet d'abonder de 3 millions d'euros l'action 1 « Urbanisme, aménagement et sites-planification » du programme 113, afin de les affecter au soutien à l'élaboration des schémas de cohérence territoriale (Scot). Pour compenser cette majoration, il transfère 3 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement inscrits à l'action 1 « Production de l'information géographique » du programme 294.
Il s'agit de rétablir un dispositif d'aide à l'élaboration des Scot, afin d'adresser un signal positif aux collectivités territoriales, conformément aux recommandations du comité opérationnel sur l'urbanisme du « Grenelle ». Des objectifs très ambitieux ont été fixés : les schémas de cohérence territoriale (Scot), qui ont vocation à mieux articuler les politiques d'urbanisme, de transport et d'aménagement du territoire, devront être généralisés dans les « zones sensibles », notamment les territoires littoraux et de montagne.
Or l'élaboration de ces documents est longue et coûteuse, notamment en milieu rural : selon une étude réalisée en 2007, les Scot ruraux présentent les coûts par habitant les plus élevés.
Parallèlement, les soutiens de l'État diminuent. Le dispositif « 1 euro par habitant » a pris fin le 1er janvier 2008, sans qu'aucun autre ne vienne prendre le relais, alors que la carte des Scot est loin d'être achevée. Or beaucoup de Scot ruraux ou de pays, voire de Scot périurbains, n'auraient pas pu être élaborés sans cette impulsion financière de l'État, qui a permis de subventionner en moyenne 36 % du coût des études. En outre, dans le cadre de la RGPP, il a été décidé de supprimer progressivement les prestations d'ingénierie exercées par l'État au profit des collectivités territoriales dans le champ concurrentiel.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Je comprends les arguments de M. Bizet : les collectivités ont en effet besoin d'aide pour mener à bien ces opérations lourdes et coûteuses. Mais le gage qu'il propose amputerait de 3 millions d'euros le budget de l'Institut géographique national (IGN). Quel est l'avis de M. le rapporteur spécial ?
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. - Avis favorable.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - L'avis de la commission est donc favorable.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Les Scot jouent un rôle très important dans l'aménagement du territoire, surtout depuis le Grenelle. Vous avez raison de souligner que leur élaboration requiert du temps et de l'argent. L'État y aidera les collectivités, selon des modalités qui ne sont pas encore déterminées. Nous retiendrons évidemment le critère de la population, mais aussi, sans doute, des critères liés au développement durable : modération dans l'utilisation de l'espace, sobriété énergétique, etc. La loi « Grenelle II » apportera une solution à ce problème. Je sollicite, pour l'heure, le retrait de l'amendement.
Le gage proposé pose d'ailleurs problème, puisqu'il diminue les crédits de l'IGN, dont les travaux sont extrêmement utiles pour la réalisation des schémas.
M. Jean Bizet. - J'ai été sensible aux arguments de M. le ministre. Pourrait-il nous préciser quelle est l'échelle pertinente pour les Scot ? On parle de « bassins de vie »...
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Le « bassin de vie » est une notion assez empirique, qui désigne un territoire cohérent. Cela correspond à peu près, dans la carte administrative actuelle, au « pays » ; mais tout dépend de ce que vous déciderez, à la suite des propositions de la mission présidée par M. Belot, de la commission Balladur et des associations d'élus.
M. Jean Bizet. - Merci. Je retire l'amendement.
L'amendement n°II-82 est retiré.
Les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durable » sont adoptés.
Article 36
M. le président. - Amendement n°II-4, présenté par M. Collin, au nom de la commission.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. - Cet amendement visait à transférer 931 millions d'euros des dépenses de personnel de l'action n°1 « Ressources humaines et management » du programme n°613 « Soutien aux prestations de l'aviation civile » à l'ensemble des actions de programmes n°612 « Navigation aérienne », n°641 « Transports aériens, surveillance et certification » et n°611 « Formation aéronautique », au prorata des dépenses de personnel rattachées à ces actions antérieurement à la réorganisation opérée par le présent projet de loi de finances par rapport au projet de loi de finances pour l'année 2008.
Il était dans le même esprit que l'amendement n°II-27. Les explications fournies par M. le ministre nous ayant convaincus, nous retirons l'amendement. (M. le ministre en remercie l'orateur)
L'amendement n°II-4 est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-16, présenté par M. Collin, au nom de la commission.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial. - Cet amendement tend à transférer la somme de 23,148 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 21,05 millions d'euros en crédits de paiement de l'action n°6 « Maintien des compétences de la navigation aérienne » du programme n°612 « Navigation aérienne » à l'action n°3 « Formation aux métiers de la navigation aérienne » du programme n°611 « Formation aéronautique ».
La commission des finances avait plaidé l'année dernière pour le regroupement des crédits de formation du budget annexe au sein du programme « Formation aéronautique ». Ce regroupement a été entamé, mais un peu plus de 20 millions d'euros subsistent pour une action « Maintien des compétences de la navigation aérienne » au sein du programme « Navigation aérienne ». Il nous semblerait préférable d'achever le regroupement.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Nous avons en effet regroupé les crédits concernant la formation initiale des métiers de l'aéronautique au sein du programme « Formation aéronautique » : cela recouvre les crédits de l'École nationale de l'aviation civile (Enac) et du Service d'exploitation de la formation aéronautique (Sefa).
Seuls demeurent au sein du programme « Navigation aérienne » les crédits relatifs au maintien des compétences des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne et des corps techniques en poste. Ces dépenses couvrent, pour l'essentiel, le maintien du niveau d'anglais des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne, l'entraînement sur simulateur via les pilotes d'écho radar, le perfectionnement en informatique, et les frais de déplacement afférents. Ces actions sont obligatoires pour l'obtention et le renouvellement des qualifications statutaires dans les corps techniques, et sont directement diligentées par les services de la navigation aérienne. Elles sont étroitement liées au fonctionnement desdits services, et ne peuvent en être dissociées.
Nous ne sommes donc pas favorables pour l'instant au regroupement de ces crédits. Cependant le Gouvernement étudiera la question avec la direction générale de l'aviation civile, afin de vous apporter meilleure satisfaction.
M. Yvon Collin. - Ces arguments sont pertinents. Nous retirons l'amendement.
L'amendement n°II-16 est retiré.
Les crédits du budget annexe-contrôle et exploitation aériens sont adoptés.
Article 37
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Il s'agit de minorer de 18,05 millions les crédits du programme « Radars », afin de tirer les conséquences du vote du Sénat hier soir sur l'article 25
Les crédits du programme « Radars » ont permis de déployer 390 nouveaux radars en 2008, et non 560. L'augmentation des crédits est liée à une augmentation des investissements.
Une baisse des crédits du programme se traduira mécaniquement par une baisse du déploiement, qui se traduira à son tour par une baisse des recettes prévues d'environ 20 millions, qui vient donc en déduction du montant alloué à l'Afitf.
Je comprends la préoccupation des départements. Le montant des amendes forfaitaires sur le réseau départemental est estimé à 56 millions, les dépenses pour l'exploitation du parc à 3 millions : le solde pour l'État est de 23 millions, contre 30 millions pour les départements.
Cet amendement de coordination vise à rééquilibrer les choses.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Le Sénat a en effet adopté hier un amendement de M. Pinton attribuant aux départements 18 millions supplémentaires, sans dégrader le solde budgétaire puisqu'il s'agit d'un compte d'affectation spécial. Nous faisons l'hypothèse que l'industriel concerné doit pouvoir réaliser quelques gains de productivité sur la maintenance et l'investissement, sans restreindre le déploiement des radars. C'est un amendement de conséquence : avis favorable.
L'amendement n°II-123 est adopté.
Les crédits de la mission « Compte spécial-contrôle et sanctions automatisés des infractions au code de la route » sont adoptés.
Article additionnel avant l'article 60
M. le président. - Amendement n°II-19 rectifié, présenté par M. Lambert, au nom de la commission des finances.
Avant l'article 60, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- L'agence de financement des infrastructures des transports de France est dissoute le 1er janvier 2009.
A cette date, les éléments de passif et d'actif de l'agence ainsi que les droits et obligations nés de son activité sont transférés à l'État.
Ce transfert ne donne lieu à aucune indemnité ni perception de droits, impôts et taxe de quelque nature que ce soit, ni à aucun versement, au profit des agents de l'État, d'honoraires ou des salaires prévus à l'article 879 du code général des impôts.
La trésorerie détenue par l'agence à la date de sa dissolution est reversée sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
II.- En conséquence, l'article 62 de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est abrogé.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Cet amendement d'appel, quelque peu provocateur, vise à inviter le ministre à préciser sa pensée sur le rôle de l'Afitf. Supprimer l'Afitf, voilà de quoi faire frémir M. Longuet, qui en est le président !
M. Gérard Longuet. - Je suis très calme. J'en ai vu tellement... (Sourires)
M. Jean Arthuis, président de la commission. - M. Lambert tenait à vous interroger, au nom de la commission des finances, sur le financement des infrastructures qui préparent l'avenir, rompant avec une action politique suspecte d'obéir à la tyrannie du court terme. Il appartient à la commission des finances de veiller à la soutenabilité à moyen et long termes des comptes publics. La création d'agences ne saurait cautionner un aveu d'impécuniosité définitive d'un État qui aurait renoncé à conserver les ressources budgétaires nécessaires au financement de long terme de ces infrastructures.
Si une telle agence est nécessaire, on peut s'interroger sur la légitimité de l'exécutif et du Parlement à garantir la structure démocratique de notre pays. Les parlements ont été institués pour représenter le peuple et autoriser en son nom l'emploi de l'argent public : c'est notre utilité même qui est donc en cause !
La garantie de ressources pérennes et sûres est une nécessité absolue pour justifier l'existence de l'Afitf. A l'origine, celle-ci devait disposer des concessions autoroutières, ressources annuelles pérennes, gageant une vie autonome des finances publiques. Puis est venu le temps du désendettement de l'État : réjouissez-vous, citoyens ! Mais en vendant les bijoux de famille, en l'occurrence les sociétés autoroutières, on perdait la rente !
Dès lors, faut-il maintenir l'Afitf ? Si l'Agence devait disposer chaque année d'une dotation budgétaire -de 1,2 milliard, excusez du peu !- , si elle se laissait aller à l'endettement, ce serait une entorse insupportable au principe même de la Lolf : l'ancien ministre du budget que vous êtes serait révulsé !
Quelle est votre vision de l'avenir de l'Afitf ? L'État n'est-il pas en mesure de gager son financement par d'autres ressources qu'une ligne budgétaire annuelle, avec peut-être, en cas de plan de relance, l'obligation de s'endetter ? Je sais que l'on cherche à sanctuariser les crédits, mais nous sommes perplexes. Le sort de l'Afitf est entre vos mains, monsieur le ministre : le Sénat vit un moment de suspense intense. (Sourires)
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Vous soulevez un vrai débat. M. Longuet a brillamment rappelé, lors de la discussion générale, les aléas du financement de nos infrastructures au fil des ans. Nous vivons un moment bizarre, avec un financement quasi budgétaire. L'avenir, c'est la nouvelle redevance poids lourds, telle qu'elle existe en Allemagne, en République tchèque ou en Autriche, qui sera une ressource changeante, affectée aux infrastructures et au report modal.
Il y a en effet un aspect régulation budgétaire : c'est un moyen pour l'État de sanctuariser les engagements pris envers les territoires.
M. Longuet évoque une Afitf nouvelle : l'Agence pourrait être non seulement banquier mais monteur de projet, par exemple lorsqu'on discute avec les collectivités locales sur les 4 milliards à trouver pour la ligne grande vitesse Pau-Bordeaux.
M. Borloo a demandé, par lettre de mission, à M. Claude Martinand de donner une appréciation de l'Afitf et de proposer d'éventuelles modifications de son fonctionnement et de ses missions. L'adoption de cet amendement poserait beaucoup de problèmes, mais nous apportons une première réponse à l'appel de votre commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Merci de ces précisions. Il faut que les principes soient clairement énoncés, et que nous soyons tous garants de leur respect. Veut-on réformer en profondeur l'appareil d'État, engager des actions décisives pour redonner à la France sa compétitivité ?
Si nous voulons réformer en profondeur l'appareil d'État, si nous voulons redonner de la compétitivité à la France, il faut arrêter de nous raconter des histoires ; il peut être tentant de procéder à une agencisation, mais ce n'est jamais qu'une débudgétisation ! Nous sommes à la croisée des chemins. Nous attendons beaucoup de vos investigations mais là encore arrêtons de nous raconter des histoires : pour trouver des ressources on va titriser et la titrisation a mauvaise presse en ce moment. Il faut donc accepter de tenir des discours plus rigoureux car la crise est là et les arbitrages doivent être plus sévères. Avec 57 milliards de déficit, la France propose déjà un budget de relance....
M. Gérard Longuet. - ... permanente !
M. Jean Arthuis, président de la commission. - L'Atfif ne saurait être que l'occasion de mettre de côté un peu de dette. Je n'imagine pas que son conseil d'administration puisse accepter un jour de s'endetter pour couvrir autre chose qu'un besoin de trésorerie à court terme ; tout autre endettement supposerait l'autorisation du Parlement, ce qui montrerait l'inutilité de l'Agence.
L'amendement n°II-19 rectifié est retiré.
Article 60
Instauration d'une taxe due par les poids lourds à raison de l'utilisation de certaines infrastructures.
Le présent article prévoit que l'expérimentation d'une taxe spéciale sur les véhicules de transport de marchandises en Alsace doit avoir lieu avant le 31 décembre 2010 et que cette taxe sera généralisée à l'ensemble du territoire avant le 31 décembre 2011. Son produit sera affecté à l'agence de financement des infrastructures de transports de France (Afitf) et rétrocédé aux collectivités territoriales pour l'usage du réseau routier dont elles sont propriétaires.
M. François Marc. - L'article 60 concrétise le Grenelle de l'environnement : il institue une écotaxe de 15 à 20 centimes par essieu et par kilomètre. L'objectif visé est essentiel et louable, mais les conséquences de ce levier fiscal semblent mal anticipées : où sont les études d'impact ? Le monde économique s'inquiète de certains effets pervers, de distorsions de concurrence ou de pertes de compétitivité. Y a-t-il en France des disparités, des régions handicapées par leur éloignement de marchés situés de plus en plus à l'est de l'Europe ? Oui, par exemple la Corse, les zones de montagne, les Charentes peut-être, monsieur le ministre, ou la Bretagne. C'est pour cela qu'on a initié des politiques d'aménagement du territoire et qu'en 1969 le général de Gaulle avait lancé le plan routier breton avec des voies express gratuites. L'écotaxe, dans sa configuration actuelle, va-t-elle contribuer à accroître les handicaps liés à la périphéricité, à l'éloignement ? Beaucoup s'alarment de l'impossibilité de transports de substitution pour les produits périssables, pour le poisson. Dès lors que des inquiétudes majeures s'expriment sur le manque de modulation du dispositif, ne risque-t-on pas de donner aux entreprises un signal négatif ? Ne seront-elles pas tentées de s'installer près des marchés ? Avec une écotaxe peu modulable et mal articulée, nous risquons plus de départs, d'où nos amendements.
M. le président. - Amendement n°II-76 rectifié, présenté par MM. De Legge, Bizet, Kergueris, Paul, Trillard et de Rohan, Mme Papon et M. Zocchetto.
I. - Compléter le 1 du I du texte proposé par le A du I de cet article pour l'article 285 septies du code des douanes par une phrase ainsi rédigée :
Sont concernés par cette taxe les axes de transit.
II. - En conséquence, compléter par la même phrase le texte proposé par le A du II de cet article pour l'article 269 du code des douanes.
M. Dominique de Legge. - Cet amendement et les suivants sont guidés par le souci de respecter l'impératif écologique inscrit dans le Grenelle de l'environnement en le conciliant avec le principe de réalité. On peut regretter l'absence d'étude d'impact mais j'en connais les raisons. Mes amendements cherchent donc à préciser le dispositif et celui-ci rappelle l'objectif initial de taxer le transit et d'éviter les reports de trajet sans frapper les courtes distances -une préoccupation que nous retrouvons avec l'amendement de M. de Montgolfier.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - La commission est perplexe : cette précision est-elle totalement clarificatrice ? L'avis du Gouvernement lui serait précieux...
M. Daniel Raoul. - La patate chaude...
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Durant la campagne électorale, le Président de la République s'était engagé à mettre en place dans notre pays, comme cela se fait en Allemagne, en Autriche ou encore en République tchèque, et comme cela va se faire aux Pays-Bas, en Italie et en Grande-Bretagne, un dispositif incitatif au report modal et dégageant des moyens pour les infrastructures, d'où l'idée qui fait consensus et qui a été consacrée au Grenelle, d'une redevance d'usage sur les autoroutes non concédées, sur ce qui reste de routes nationales, mais aussi, en ce qui concerne les collectivités départementales, sur les axes départementaux subissant, des reports de trafic, comme on le voit en Alsace sur les anciennes routes nationales puis sur le réseau secondaire. Il faut que les départements qui entretiennent les routes reçoivent une recette.
MM. Gérard Longuet et Dominique de Legge. - Exactement !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Il y a des écueils. Premièrement, il ne faut pas remettre en cause la compétitivité de nos territoires. A l'issue d'un long débat à l'Assemblée nationale, nous avons pris des engagements et avons prévu pour les collectivités périphériques des exonérations, ainsi pour la route centrale bretonne, des réductions ainsi que la possibilité d'abonnements.
Deuxième écueil : il ne faut pas pénaliser nos entreprises de transports routiers. Le secteur est fragile : quand l'économie tousse, les transporteurs s'enrhument. Nous devons éviter les situations de concurrence déloyale par rapport aux autres pays européens.
C'est l'objet du travail que nous faisons avec les transporteurs routiers sur la législation sociale, sur le temps de travail et sur le cabotage. Nous en reparlerons en janvier lors de l'examen du texte sur l'activité ferroviaire. Nous avons longuement discuté avec toutes les organisations professionnelles routières pour éviter toute charge supplémentaire sur les entreprises : ce sont ceux qui décident du transport qui devront payer.
Dernier impératif : l'interopérabilité. Aux XIXe et XXe siècles, à cause de querelles d'ingénieurs ou pour des raisons stratégiques et militaires, nos réseaux ferroviaires n'étaient pas interopérables : écartements plus larges en Espagne, en Pologne, en Russie, systèmes d'électrification différents à l'intérieur d'un même pays... En 1965, en France, nous avions quatre systèmes d'électrification différents ! Aujourd'hui encore, un Thalys doit disposer de quatre ou cinq systèmes différents de signalisation embarquée. On ne va pas mettre à l'avant de chaque camion de plus de 3,5 tonnes toute une série d'appareils ! L'interopérabilité est donc indispensable et nous devons nous appuyer sur la vidéo et le positionnement par satellites, comme le font nos voisins allemands avec le concours d'entreprises françaises.
Nous devons aussi tenir compte de l'équilibre auquel nous sommes parvenus à l'Assemblée nationale : je ne suis donc pas favorable aux amendements sur de nouveaux axes de transit ou sur les transports frigorifiques. En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n°II-74 rectifié dans lequel M. de Legge fait intervenir le PIB dans le calcul du caractère périphérique, ce qui améliore le texte de l'Assemblée nationale. Nous serons aussi favorables à l'amendement de la commission des finances qui prévoit un suivi de cette taxe et de ses impacts en Alsace.
Cet article tient compte de la directive euro-vignette actuelle. Nous tenterons de la faire évoluer pour qu'elle soit plus souple, ce qui nous permettrait d'améliorer notre dispositif.
M. Dominique de Legge. - J'apprécie que M. le ministre veuille bien tenir compte des facteurs économiques.
Bien évidemment, je voterai l'amendement de la commission des finances : ne disposant pas d'étude d'impact, nous devons profiter de l'expérience alsacienne pour en tirer des conséquences au niveau national.
L'amendement n°II-76 rectifié est retiré ainsi que l'amendement n°II-75 rectifié.
M. le président. - Amendement n°II-78, présenté par Mme Herviaux, M. Marc, Mmes Chevé et Blondin, MM. Botrel, Fichet et Hervé, Mme Klès et M. Le Menn.
Compléter le texte proposé par le A du II de cet article pour l'article 269 du code des douanes par une phrase ainsi rédigée :
Des exonérations peuvent être accordées aux véhicules de transport de marchandises à température dirigée dont la liste est fixée par décret, après consultation des collectivités locales concernées.
Mme Odette Herviaux. - Le projet d'écotaxe issu du Grenelle vise à favoriser le report des transports de marchandises sur le réseau ferroviaire. Nous partageons tous cet objectif, mais encore faut-il en avoir les moyens.
Le transport ferroviaire est en effet souvent inopérant pour le transport à température dirigée car les mesures en matière de qualité, d'hygiène et de sécurité alimentaire ne peuvent être totalement remplies. Il s'agit donc d'enjeux sanitaires qui, s'ils ne doivent pas rentrer en contradiction avec les principes du développement durable, ne peuvent pas être sacrifiés.
Nous ne remettons pas en cause le bien-fondé de cette taxe mais nous souhaitons qu'elle soit équitable. De trop nombreuses entreprises de transports verraient leur développement compromis, ce qui fragiliserait encore davantage des territoires et des populations éprouvés par la crise. Le transport sous température dirigée s'est fortement accru au cours des trente dernières années pour diverses raisons : les consommateurs demandent beaucoup de produits frais tandis que la réglementation du transport de denrées périssables est de plus en plus rigoureuse.
La fragilisation de ces entreprises menacerait de nombreuses régions. En Bretagne, les denrées alimentaires représentent près de 30 % du trafic contre 15 % au niveau national. L'agriculture, la pêche et les industries agroalimentaires représentent 14 % de l'emploi total contre 7 % en France. Mais cette filière se distingue aussi par la faiblesse de sa valeur ajoutée, ce qui rend le coût du transport, et donc de la taxe, beaucoup plus élevé.
Certes, cette taxe ne sera mise en oeuvre qu'en 2011, mais que se passera-t-il alors ? Ne prenons pas le risque d'assister, dans deux ans, à des fermetures d'entreprises en chaîne et à la disparition de centaines d'emplois. Quand bien même le réseau ferroviaire se développerait grâce au produit de cette taxe, il ne remplacera pas la route pour le transport des marchandises sous température dirigée.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - La commission présentera tout à l'heure un amendement tendant à tirer les enseignements de l'expérimentation alsacienne. Car l'échéance est fixée au 31 décembre 2010, ce qui nous laisse du temps. Les camions réfrigérés sont assez nombreux sur les routes et le réchauffement de la planète crée une contrainte supplémentaire. (Sourires) La commission a donc besoin de l'avis du Gouvernement pour se forger son opinion.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - L'application de la directive euro-vignette ne permet pas d'accepter cet amendement. En outre, un énorme trafic en provenance d'Espagne et du Portugal encombre l'A 10 et surtout la RN 10. Or, un camion sur deux est à température dirigée. Avec cet amendement, une grande partie de notre dispositif serait inopérant. L'avis est donc défavorable.
L'amendement n°II-78 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-83, présenté par M. de Montgolfier.
I. - Rédiger comme suit le 2° du I du texte proposé par le A du II de cet article pour l'article 270 du code des douanes :
« 2° Les routes à grande circulation appartenant à des collectivités territoriales, telles que définies à l'article L. 110-3 du code de la route.
II. - Supprimer le III du même texte.
M. Albéric de Montgolfier. - Il convient de revenir sur le financement des routes départementales à fort trafic : dans plus de la moitié des départements, il n'y a plus de routes nationales, car elles ont été transférées aux départements sans compensation financière. De plus, les régions n'interviennent plus alors que les routes départementales doivent faire l'objet de travaux importants.
La rédaction de cet article est pour le moins imprécise : les routes nationales et certaines routes départementales seraient concernées, mais la taxe ne toucherait que les routes « susceptibles de supporter un report significatif de trafic », sans préciser comment ce report de trafic serait mesuré ni ce qu'il convient d'entendre par « susceptible ».
Il convient donc de substituer à cette définition une notion beaucoup plus précise, à savoir les routes à grande circulation qui permettent, comme l'indique le code de la route, « d'assurer la continuité des itinéraires principaux et, notamment, le délestage du trafic, la circulation des transports exceptionnels, et la desserte économique du territoire ».
La liste des routes à grande circulation est fixée par décret, après avis des collectivités qui en sont propriétaires. Cela permettrait de définir de manière plus précise les voies supportant le plus fort trafic, qui doivent être visées par cette nouvelle taxe.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - La commission souhaite entendre le Gouvernement, car la mise en oeuvre de cette nouvelle taxation appelle des définitions précises pour lever toute ambigüité.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Du fait de la décentralisation, certains départements n'ont plus de voirie nationale : les transports ne se font donc que sur les routes départementales. Cet amendement a cependant un inconvénient : il élargirait considérablement l'assiette.
C'est pourquoi le Gouvernement prend l'engagement d'établir la carte des routes concernées, département par département, après accord entre le représentant de l'État et le président du conseil général, car le département est effectivement le mieux à même de juger. En outre, les situations peuvent évoluer : le report de trafic peut ne pas être immédiat. Ce travail devra donc être revu régulièrement pour s'adapter aux évolutions du trafic.
Il faut donc actualiser la carte en permanence. Au nom du Gouvernement, je m'engage à ce que ce soit fait en liaison avec le responsable de chaque exécutif départemental.
M. Albéric de Montgolfier. - En attendant que cet engagement soit formalisé, je retire l'amendement.
L'amendement n°II-83 est retiré.
M. Gérard Longuet. - Je souhaitais épauler M. de Montgolfier, mais la réponse de M. le ministre me satisfait. Pourrait-on moduler la redevance selon le jour et l'heure de passage ?
L'amendement n°II-80 n'est pas soutenu.
M. le président. - Amendement n°II-70, présenté par M. Marc, Mme Blondin et MM. Botrel et Fichet.
I. - Remplacer le premier alinéa du 1 bis du texte proposé par le A du II de cet article pour l'article 275 du code des douanes par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le taux kilométrique est compris entre 0,025 € et 0,20 € par kilomètre.
« Le taux kilométrique sera le taux minimal pour les deux déciles des départements métropolitains les plus défavorisés pour chacun des deux critères suivants :
« a) Leur périphéricité au sein de l'espace européen, appréciée au regard de leur éloignement des grandes unités urbaines européennes de plus d'un million d'habitants ;
« b) La faiblesse de l'offre alternative à la route.
II. - En conséquence, supprimer le 2 du même texte.
M. François Marc. - Nous souhaitons que la modulation prenne en compte la périphéricité du département d'origine, de même que l'offre alternative au transport routier.
La Bretagne n'est pas considérée comme zone de transit pour le transport routier, ce qui l'exclut du schéma européen. Le cabotage maritime ne fait en réalité l'objet d'aucune politique de soutien, puisque 80 millions d'euros seulement lui sont consacrés. La Bretagne sera encore longtemps incapable de transférer le fret routier vers la mer ou le rail. Le projet de loi comporte trois autoroutes ferroviaires, aucune en Bretagne. En dehors des liaisons par ferry avec la Grande-Bretagne et l'Espagne, les biens produits en Bretagne sont plus coûteux pour les consommateurs que les biens identiques fabriqués dans une région plus centrale. L'ajout d'une écotaxe lui est donc très préjudiciable.
Nous préconisons par cet amendement une modulation accrue, prenant en compte la substitution entre itinéraires observée en Alsace.
M. le président. - Amendement n°II-69, présenté par M. Marc, Mme Blondin, M. Botrel, Mme Chevé, MM. Fichet et Hervé, Mmes Herviaux et Klès et M. Le Menn.
Dans le premier alinéa du 1 bis du texte proposé par le A du II de cet article pour l'article 275 du code des douanes, remplacer le taux :
25 %
par le taux :
50 %
et avant le mot :
départements
insérer le mot :
vingt
Amendement n°II-68, présenté par M. Marc, Mme Blondin, M. Botrel, Mme Chevé, M. Fichet et Mme Herviaux.
Dans le premier alinéa du 1 bis du texte proposé par le A du II de cet article pour l'article 275 du code des douanes, remplacer le taux :
25 %
par le taux :
50 %
M. François Marc. - La philosophie est identique.
Lors du débat évoqué par M. le ministre, de nombreux députés ont reconnu la réalité des handicaps territoriaux. M. Méhaignerie, que vous connaissez, estime que le coût du transport assumé par les entreprises bretonnes serait compris entre le double et le triple de la moyenne des autres régions. Une telle différence justifie que la modulation atténue une distorsion de concurrence aussi énorme.
Je ne sais comment sera conduite l'étude d'impact destiné à éviter les effets pervers...
M. le président. - Amendement n°II-74 rectifié, présenté par MM. de Legge, Kergueris, Paul, Trillard et de Rohan, Mme Papon et M. Zocchetto.
Compléter le premier alinéa du 1 bis du texte proposé par le A du II de cet article pour l'article 275 du code des douanes par les mots :
en tenant compte de leur importance démographique et économique
M. Dominique de Legge. - Cette proposition fait écho au débat que nous venons d'avoir.
M. le président. - Amendement n°II-79, présenté par Mme Herviaux, M. Marc, Mmes Chevé et Blondin, MM. Botrel, Fichet et Hervé, Mme Klès et M. Le Menn.
Dans le 2 du texte proposé par le A du II de cet article pour l'article 275 du code des douanes, remplacer le montant :
0,025 €
par le montant :
0,015 €
Mme Odette Herviaux. - Nous voulons tous concilier exigence environnementale, justice fiscale et efficacité économique. Les trois pôles de ce triangle doivent être équilibrés pour aboutir au changement de mentalité et de pratiques que nous souhaitons.
L'écotaxe complète utilement la fiscalité écologique, mais elle ne doit pas freiner le développement économique de notre pays et des régions soumises à une très forte concurrence internationale. Comme dit le proverbe breton, « il ne faut pas envoyer de mauvais signaux quand la tempête souffle, si l'on ne veut pas que les bateaux s'échouent ».
La prépondérance du transport routier est incontestable dans certaines régions comme la Bretagne, où il constitue pratiquement le seul mode de liaison intra-régionale. Sans être spécifique à la Bretagne, cette domination y est double de la moyenne nationale.
Le projet de loi de finances dispose que la future taxe sera comprise entre 0,025 et 0,20 euro par kilomètre parcouru sur le réseau national non concédé. Ne voulant pas affaiblir le financement de politiques ambitieuses de développement durable, nous ne souhaitons pas abaisser le plafond, mais nous voulons adresser un message fort aux acteurs économiques et aux salariés en alignant le plancher sur celui qui sera proposé en Alsace, à savoir 0,015 euro par kilomètre.
Cette diminution, couplée avec la modulation autorisée par le projet de loi, aidera les petites entreprises à contribuer à l'effort environnemental collectif, sans subir d'atteinte à leur capacité de production.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Ces amendements très intéressants conduisent à une réflexion de fond sur le dispositif.
Nous mesurons combien il faudra de simulations pendant les semaines à venir ! La spécificité bretonne appelle une réponse appropriée, mais il n'est pas simple de fixer des critères de périphéricité ou permettant d'apprécier l'offre alternative de transport. Nous aurons besoin de toutes les compétences ministérielles.
M. François Marc. - À l'Élysée, on sait tout faire !
M. Jean Arthuis, président de la commission. - La commission est donc réservée envers les amendements n°sII-70, II-69 et II-68.
L'amendement n°II-74 suscite une interrogation : comment prendre en compte la dimension « économique et démographique » ? Nous risquons des débats rappelant ceux suscités par la DGF, chacun venant défendre ses voies vicinales ou telle spécificité départementale. Il faudrait peut-être organiser un séminaire sur ce sujet au cours des semaines à venir... Autant dire que l'avis du Gouvernement est extrêmement précieux aujourd'hui.
L'amendement n°II-79 appelle des observations analogues. Sans aucun orgueil d'auteur, j'invite nos collègues à se rallier au dispositif proposé par la commission des finances, parce que nous devons être sûrs de proposer quelque chose de praticable.
Toute différence de tarification entre les axes principaux et les voies alternatives provoquera un report d'une voie sur l'autre. L'idéal aurait été une taxe additionnelle sur la consommation de produits pétroliers, mais trop de camions espagnols traversent la France sans faire le plein. Ces poids lourds, transportant autant de gazole que de fruits ou de légumes, n'apportent rien au financement de nos infrastructures.
Dès lors qu'une voie sera exemptée, quelqu'un l'empruntera. En définitive, ne faudra-t-il pas taxer l'ensemble des axes, en appliquant des tarifs fixés par les collectivités territoriales ?
Il est difficile, ce soir, de conclure de façon décisive mais il est urgent de réfléchir collectivement, en possession des études d'impact nécessaires.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - En effet, des études d'impact sont nécessaires. En Allemagne, la mise en oeuvre de cette taxe n'a pas été simple... L'amendement de M. Lambert semble une bonne piste de réflexion.
Je suis défavorable aux amendements de M. Marc et de Mme Herviaux car, à force de trop moduler, on finit par ne plus avoir d'effet du tout. Je suis plus intéressé par celui de M. de Legge, qui est plus hexagonal : avis favorable.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - L'avis du Gouvernement nous est précieux. Je ne mésestime pas l'amendement de M. de Legge mais je demande qu'on m'explique comment on transcrira clairement dans le texte la prise en compte de l'« importance démographique et économique » des régions traversées... La richesse fiscale d'un département déterminera-t-elle le niveau de la taxe qu'on y paiera ? Sera-t-elle plus faible s'il est très peuplé ? Ou s'il est peu peuplé ? Ce ne sera pas simple.
M. Dominique de Legge. - Si on a sur ce dossier une approche exclusivement géographique, les départements à faible potentiel économique risquent de payer une taxe élevée. Nous voulons seulement une juste corrélation entre l'apport d'un territoire au financement de cette taxe et sa situation économique.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - La commission, après l'éclairage fourni par le Gouvernement, est favorable à l'amendement n°74 rectifié et elle invite les auteurs des autres amendements à les retirer, parce que ces amendements ne sont pas mauvais et qu'il serait fâcheux de les sanctionner par un vote négatif.
M. François Marc. - Je souhaitais que ce soit dit clairement. La Bretagne qui fournit 4 % du PIB paierait 10 % de cette taxe en l'état actuel du dispositif. Avec l'amendement de M. de Legge, n'en paierait-elle plus que 4 % ? Si cette interprétation est la bonne, je suis prêt à retirer mes amendements car la distorsion de concurrence aurait disparu. Mais j'en voudrais confirmation.
M. Paul Raoult. - Le problème est celui de l'utilité d'une fiscalité écologique. Le renchérissement du prix du pétrole a été beaucoup plus efficace que toute fiscalité dissuasive sur l'essence. On se fait beaucoup d'illusions sur la capacité d'une telle fiscalité à influer sur les comportements et je doute qu'on limite les émissions de CO2 par une quelconque taxe. Mieux vaut agir par la loi et le règlement.
En plus, si chaque région, chaque département et -pourquoi pas ?- chaque commune revendique un niveau de taxe spécifique, on va en revenir à l'Ancien Régime avec des octrois sur chaque route. Comme le disait Mirabeau, la France n'est pas un agrégat inconstitué de peuples désunis. Puisqu'on défend la Bretagne, pourquoi ne défendrais-je pas ici le Nord-Pas-de-Calais ? Bien sûr, la Bretagne est périphérique, mais son taux de chômage est deux à trois fois moins élevé que celui de ma région, qui a perdu ses industries textile, minière, sidérurgique et qui perd en ce moment des milliers d'emplois dans l'automobile : 5 000 emplois en deux mois ! Son PIB par habitant est élevé, mais la pauvreté sanitaire et sociale y est la plus forte du pays ! L'écotaxe le prendra-t-elle en compte ?
La fiscalité écologique conduit à des dérives qui ne sont que des subterfuges pour y échapper. Les exemptions ne produisent qu'inégalités et distorsions de concurrence. Tout cela est ubuesque !
M. Gérard Longuet. - J'ai apprécié l'intervention de M. Raoult. On ne peut envisager un principe général en le soumettant à l'aune de particularismes régionaux, et il serait prématuré de construire un projet de loi sur une base régionale. L'amendement de Legge, plus républicain, si je puis dire, propose de prendre en compte les données économiques et démographiques. Ce devrait être le travail d'une sorte de Conseil d'orientation de la redevance. Il s'agit de répercuter sur l'utilisateur le coût du transport : il est différent selon les régions. La Bretagne exporte des produits alimentaires vers le centre de l'Europe et nous envoie des camions frigorifiques entiers de viande.
Si nous entrons dans ces détails, nous n'arriverons à rien. Il est en revanche pertinent de prévoir que la redevance sera suivie par un organisme associant l'État et les élus, régionaux au titre du développement, départementaux au titre des routes.
On pourrait fort bien soutenir, monsieur Marc, qu'au regard de la densité des exploitations bretonnes, le coût du transport de l'alimentation du bétail est moindre en Bretagne que dans les régions où les exploitations sont plus dispersées ...
M. Albéric de Montgolfier. - Je souscris aux propos de M. Longuet.
M. Marcel Deneux. - MM. Raoult et Longuet ont raison, on assiste à des dérives qui n'ont plus rien à voir avec le fond du débat. On pourrait dire aussi que, s'agissant de la formation des prix, la Bretagne dispose plutôt d'un avantage compétitif ... Je ne voterai pas ces amendements ridicules.
M. François Marc. - J'entends bien ces réquisitoires. Mais je ne peux retirer mes amendements en l'absence de réponse du ministre. Tiendra-t-on compte, oui ou non, de la richesse des territoires ? Si ce n'est pas le cas, l'amendement n°II-74, c'est du vent !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - La Bretagne représente 4 % du PIB du pays ; avec l'amendement, elle ne paiera que 3 % des péages : l'amendement a bien un effet correcteur.
M. Paul Raoult. - Et les critères sociaux ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Évidemment. L'article 60 donne à l'État la possibilité de lancer l'appel d'offres, étant entendu que le dispositif ne sera mis en place que dans deux ans ; nous avons encore le temps de discuter. L'amendement de M. de Legge entraîne une certaine péréquation.
L'amendement n°II-70 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°sII-69 et II-68.
L'amendement n°II-74 rectifié est adopté.
L'amendement n°II-79 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-64 rectifié, présenté par M. Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Compléter le texte proposé par le A du II de cet article pour le 3 de l'article 275 du code des douanes par les mots :
après avis des collectivités concernées
M. Michel Teston. - Il paraît normal que les collectivités concernées soient consultées lors de l'élaboration des actes règlementaires. La situation des territoires périphériques ou enclavés peut évoluer en fonction de l'avancement de telle ou telle infrastructure ; il ne faudrait pas que le Gouvernement fût tenté de faire varier le taux d'une année sur l'autre sans concertation.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Je crains qu'une telle concertation ne soit pas simple à mener - imagine-t-on des débats comme ceux que nous avons ce soir dans chacun des conseils municipaux concernés ? Les collectivités sont déjà consultées sur les itinéraires taxables.
Nous n'allons pas arrêter un texte définitif, ne serait-ce que parce que nous n'avons aucune étude d'impact. Je souhaite le retrait.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Je partage cet avis de bon sens. Si on rentre dans des règles spécifiques de trafic, ce sera vraiment le retour aux octrois. Je crois cette disposition impossible à mettre en oeuvre, anticonstitutionnelle et contraire aux règles européennes. Défavorable.
M. Michel Teston. - On ne consultera pas toutes les collectivités, celle qui sont concernées seront bien identifiées.
L'amendement n°II-64 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-65 rectifié, présenté par M. Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après le B du III de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - Le cahier des charges de l'appel d'offre prévu au A prévoit que le coût de la collecte de la taxe, tel qu'il procède des missions prévues au même A, ne peut excéder une part déterminée du produit total recouvré.
M. Michel Teston. - Le recouvrement de la taxe sera confié au privé : une première ! Mais le texte ne dit rien des frais de dossier. En Allemagne, le coût de la collecte de la taxe représente le quart de son produit, ce qui me paraît énorme. Il faut prévoir un plafonnement dès le cahier des charges, qui pourra faire l'objet d'un débat contradictoire ; les pouvoirs publics pourront alors se faire une idée de ce qui est possible et de ce qui ne l'est pas. Nous avons trois ans devant nous : nous y reviendrons si nécessaire lors d'une prochaine loi de finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - La préoccupation exprimée par M. Teston est celle, permanente, de la commission des finances. Je ne suis pas sûr cependant qu'on puisse lancer un appel d'offres dans ces conditions. Le recouvrement sera concédé, il faut espérer qu'il dégage des marges suffisantes pour intéresser des opérateurs. Il m'étonnerait que cet amendement survive aux propos du ministre ...
M. Paul Raoult. - C'est le retour des fermiers généraux !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - L'objectif, comme pour toute commande publique, est d'obtenir les offres les plus fiables et les plus avantageuses possibles. Si le plafond est trop bas, il sera dissuasif ; s'il est trop haut, on sait bien comment les choses se passent : les offres s'aligneront sur lui.
Cet amendement compliquerait la situation. Monsieur Teston, j'ai entendu votre appel au moindre coût, nous y avons tous intérêt. Retrait ?
M. Michel Teston. - On ne peut se montrer toujours insensible aux appels du ministre... (Sourires) Mais le Gouvernement devra, un jour ou l'autre, s'engager vers une juste appréciation du coût d'exploitation pour éviter que nous n'atteignons le niveau allemand !
L'amendement n°II-65 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-6, présenté par M. Lambert, au nom de la commission des finances.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente un rapport factuel et succinct aux commissions chargées des finances de chacune des deux assemblées parlementaires présentant l'état d'avancement, et le cas échéant, les résultats de l'expérimentation de la taxe due par les poids lourd à raison de l'utilisation de certaines infrastructures, et les études d'impact relatives à la généralisation de cette taxe à l'ensemble du territoire.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Nous avons présenté à plusieurs reprises cet amendement de façon succincte au cours de la discussion. C'est peu dire que le Gouvernement fait montre d'une certaine hésitation sur la mise en oeuvre de cette taxe poids lourds... Créée par la loi du 5 janvier 2006, son application est repoussée à 2010 pour l'Alsace et l'on annonce sa généralisation pour 2011. Quand il s'agit de questions qui engagent la fiscalité, le Parlement ne peut accorder de blanc-seing. C'est la raison pour laquelle nous demandons un rapport sur cette expérimentation, qui pourrait notamment comprendre une estimation du coût de la collecte. Car l'on peut craindre, en la matière, des disparités entre régions. Le coût serait plus élevé pour celles spécialisées dans la production de biens alimentaires dont la commercialisation nécessite un transport en camion frigorifique. Et un retour à vide, cela coûte cher... Le problème se posera notamment pour la Bretagne, comme l'a montré M. Marc.
La commission est prête à accepter des sous-amendements pour peu que le principe d'un rapport remis dans de brefs délais soit maintenu.
M. le président. - Sous-amendement n°II-77 à l'amendement n°II-6 de M. Lambert, au nom de la commission des finances, présenté par MM. de Legge, Bizet, Kergueris, Paul, Trillard et de Rohan et Mme Papon.
I. - Dans le second alinéa de l'amendement n°II-6, supprimer les mots :
factuel et succinct
II. - Dans le même alinéa, après le mot :
impact
insérer les mots :
par région
III. - Compléter le même alinéa par les mots :
et au coût de sa collecte
M. Dominique de Legge. - Je suis un peu confus de présenter ce sous-amendement après M. Arthuis qui vient d'en accepter le principe... J'ajoute que, après ces débats, le rapport qui nous sera remis ne saurait être « succinct ». (M. le secrétaire d'État acquiesce) Je propose donc de supprimer l'adjectif.
M. le président. - Sous-amendement n°II-112 à l'amendement n°II-6 de M. Lambert , au nom de la commission des finances, présenté par M. Grignon.
Dans le second alinéa de l'amendement n°II-6, après les mots :
commissions chargées des finances
insérer les mots :
et à celles chargées des transports
M. Francis Grignon. - Le rapport doit également être remis aux commissions parlementaires permanentes chargées des transports.
M. le président. - Sous-amendement n°II-137 à l'amendement n°II-6 de M. Lambert, au nom de la commission des finances, présenté par Mme Herviaux et M. Marc.
I. - Dans le second alinéa de l'amendement n°II-6, supprimer les mots :
factuel et succinct
II. - Dans le même alinéa, après les mots :
commissions chargées des finances
insérer les mots :
et à celles chargées des transports
III. - Dans le même alinéa, après le mot :
impact
insérer les mots :
par région
IV. - Compléter le même alinéa par les mots :
et au coût de sa collecte
Mme Odette Herviaux. - Il a été défendu.
M. le président. - Sous-amendement n°II-144 à l'amendement n°II-6 de M. Lambert , au nom de la commission des finances, présenté par le Gouvernement.
Dans le second alinéa de l'amendement n°II-6, remplacer les mots :
six mois
par les mots :
vingt-quatre mois
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - La taxe sera applicable au plus tard le 31 décembre 2010 en Alsace et le 31 décembre 2011 dans tout le pays. Nous avons besoin de davantage de temps pour fournir un bilan complet de l'expérimentation...
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Avis très favorable aux sous-amendements n°II-77, II-112 et II-137 qui complètent incontestablement l'amendement de la commission.
S'agissant du sous-amendement n°II-144, le Gouvernement ne pourrait-il pas nous communiquer les informations qu'il aura recueillies dans douze mois ? Cela nous permettrait de disposer, à tout le moins, d'une étude d'impact lors de la discussion de loi de finances pour 2010 et, peut-être, d'inscrire le produit de cette taxe dans les recettes de la première partie du budget. Le Gouvernement accepterait-il de rectifier son sous-amendement en ce sens ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Bien sûr...
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Merci !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Avis favorable à l'amendement de la commission et aux trois autres sous-amendements.
Le sous-amendement n°II-144 rectifié est adopté, de même que les sous-amendements nos II-77, II-112 et II-137.
L'amendement n°II-6, sous-amendé, est adopté.
L'article 60, modifié, est adopté.
L'amendement n°II-67 n'est pas défendu.
L'article 61 est adopté.
L'article 84 est adopté.
Prochaine séance aujourd'hui, vendredi 28 novembre 2008, à 9 h 45.
La séance est levée à minuit quarante.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du vendredi 28 novembre 2008
Séance publique
A 9 HEURES 45, A 15 HEURES ET LE SOIR,
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l'Assemblée nationale (n°98, 2008-2009).
Rapport (n° 99, 2008-2009) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.
Examen des missions :
Recherche et enseignement supérieur (+ articles 66, 66 bis et 66 ter)
MM. Philippe Adnot et Christian Gaudin, rapporteurs spéciaux (rapport n° 99, annexe n° 22) ;
MM. Jean-Pierre Plancade et Jean-Léonce Dupont, rapporteurs pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 100, tome VII) ;
MM. Michel Houel et Daniel Raoul, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 101, tome VI).
Conseil et contrôle de l'État
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 6).
MM. Yves Détraigne et Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Justice et accès au droit - avis n° 104, tome IV).
Direction de l'action du Gouvernement
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 9) ;
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (Action mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) - avis n° 103, tome V) ;
M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis de commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Protection des droits et des libertés - avis n° 104, tome VIII).
Pouvoirs publics
M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 20).
Budget annexe : Publications officielles et information administrative
M. Bernard Vera, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 33).
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (+ article 59 septies)
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 5) ;
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome I).
Santé (+ article 73)
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 26) ;
M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome IV).
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Compte spécial : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Compte spécial : avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics
M. Bernard Angels, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 14) ;
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Fonction publique - avis n° 104, tome II) ;
Mme Éliane Assassi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Modernisation de l'État - avis n° 104, tome VI).
Provisions
M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial (rapport n° 99, annexe n° 21).
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DÉPÔTS
La Présidence a reçu :
- de M. Jean-Jacques Hyest, Mme Michèle André, MM. Christian Cointat et Yves Détraigne un rapport d'information fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale à la suite d'une mission d'information effectuée à Mayotte du 1er au 6 septembre 2008.
- M. Claude Biwer, Mme Muguette Dini, M. Michel Mercier et les membres du groupe Union centriste une proposition de loi tendant à prévenir le surendettement.