Crise du logement et développement du crédit hypothécaire (Question orale avec débat)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat de M. Thierry Repentin à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur la crise du logement et le développement du crédit hypothécaire.
M. Thierry Repentin, auteur de la question. - Le groupe socialiste consacre la séance réservée non à une proposition de loi, mais à cette question orale avec débat pour interroger le Gouvernement sur l'exclusion du logement des classes moyennes dans notre pays.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. - C'est une idée fixe !
M. Thierry Repentin, auteur de la question. - Oui, parce que les faits sont têtus ! Dix mille familles ont été expulsées en 2006 de leur logement pour cause de surendettement. Les prix de l'accession ont augmenté de 140 % en dix ans, la durée des prêts s'allonge : un tiers des jeunes ménages qui accèdent à la propriété souscrivent un crédit sur 30 ans. C'est le cas de 16 % du total des emprunteurs.
Les désordres financiers ne sont pas à l'origine du manque de logements en France, mais la crise financière aggrave la situation : la récession va avoir de lourdes conséquences sur la politique du logement, en asséchant les liquidités des banques, donc les prêts à l'accession. Les classes moyennes ne peuvent plus acheter sans s'endetter à des niveaux insupportables. Quant aux catégories populaires, il y a déjà quatre à cinq années que le marché les a exclues de l'accession à la propriété, à coup de prix prohibitifs. Le secteur du bâtiment n'est pas épargné, les mises en chantier ralentissent.
L'accélérateur de la crise tient dans ce que M. Bernard Vorms, directeur général de l'Anil, a qualifié de « paradoxe de la baisse des taux » : la baisse des taux d'intérêt a amélioré la solvabilité des accédants, accru la demande, mais, à plus long terme, provoqué la hausse des prix, tandis que le taux d'effort des ménages augmentait. Entre 2001 et 2006, le coût moyen des opérations immobilières financées par emprunt est passé de 2,6 années de revenu à près de 4 années de revenu. La durée moyenne des crédits logement augmente : 57 % des prêts sont contractés pour une durée de 20 à 30 ans, alors qu'en 2003, 60,4 % des prêts étaient contractés pour une durée inférieure à 20 ans.
Les classes moyennes sont à leur tour touchées par cette crise. Elles n'ont pas accès au logement social, elles ne peuvent acheter des logements devenus trop chers, ni bénéficier des aides personnelles au logement ou de l'aide à l'accession. Mais les ménages qui ont accédé à la propriété quand le marché était « au plus haut » se retrouvent aujourd'hui contraints de revendre à un prix sensiblement plus bas.
Le Gouvernement avait de quoi prévoir ce retournement du marché, annoncé depuis plusieurs mois. Mais il fait plus grave, en gelant le budget de la mission Ville et Logement, avec une perte de crédits de 6,9 % l'an prochain, et en ponctionnant le 1 % logement. C'est incompréhensible à l'heure où la commission Attali a estimé que d'ici 2020 les besoins en construction s'élèveront à 500 000 logements par an. Les aides à la pierre seront, quant à elles, amputées de 30 % dès l'an prochain.
Où est l'euro que l'État devait apporter pour chaque euro en faveur de l'Anru ? Où sont les investissements massifs nécessaires pour la construction de logements abordables ? Qui garantit le financement de l'Agence nationale de l'habitat (Anah), maintenant que sa ressource est extrabudgétaire ?
Vous réduisez le budget pour les aides au locatif social -350 millions en 2009, contre 362 il y a 5 ans-, vous refusez de prolonger l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties au-delà de 2009 : c'est une remise en cause du plan de cohésion sociale !
Mme Christine Boutin, ministre. - N'importe quoi !
M. Thierry Repentin, auteur de la question. - Le Président de la République ne jure que par la révision générale des politiques publiques : la comptabilité l'emporte sur le logement de nos concitoyens ! Fi de l'efficacité de l'action publique : seule compte la réduction à court terme des dépenses. Qu'importe si elles doivent augmenter plus tard ! Curieuse myopie, qui rappelle celle des marchés financiers...
Au lieu de relancer la construction, vous avez encouragé les dispositifs d'aide à l'investissement locatif de manière déraisonnable, sans contrepartie sociale à l'engagement financier de l'État. On a construit des logements inadaptés, dont certains n'ont toujours pas trouvé preneur. Quant au Pass foncier, il conduit les ménages à s'endetter sur des durées si longues que le moindre accident de la vie peut entraîner la descente aux enfers.
L'État investit 30 000 euros pour un logement privé vendu comme un produit fiscal, contre à peine 20 000 pour construire un logement abordable, adapté aux besoins des foyers populaires ! Alors qu'il se comporte comme on sait vis-à-vis des organismes HLM, il ne se prive pas d'en critiquer la gestion...
En guise de réponse, des mesures qui sont autant d'effets d'annonce. La subvention pour l'achat de trente mille logements ne doit pas être une aide directe à des promoteurs qui ne privilégient guère la modération et la recherche de réponses pertinentes. Comme toute débudgétisation, c'est une économie pour l'État, mais aussi une réduction nette des sommes consacrées au logement.
Comment comptez-vous résoudre le déficit de construction de logements à loyer abordable ? Qu'allez-vous faire pour ces classes moyennes qui ont acheté au prix fort et se retrouvent aujourd'hui étranglées ? Comptez-vous généraliser les emprunts hypothécaires, comme le préconise un récent rapport du Conseil d'analyse économique ?
Pas moins de 712 000 ménages sont surendettés, sans compter les milliers d'autres qui sacrifient tout pour faire face à leurs échéances. Or le Président de la République n'a cessé de chanter les louanges de ce type de crédit ! En 2006, il disait aux Échos : « Je veux développer le crédit hypothécaire en France. C'est ce qui a permis de soutenir la croissance aux États-Unis » ! (Sourires et applaudissements sur les bancs socialistes) Ou encore : « Une économie qui ne s'endette pas suffisamment, c'est une économie qui ne croit pas en l'avenir (...). C'est pour cette raison que je souhaite développer le crédit hypothécaire pour les ménages ». (M. Alain Fauconnier applaudit)
C'est vrai, le crédit hypothécaire a dopé la croissance américaine. Comme tous les produits dopants, il a entraîné des performances artificielles et s'est révélé dangereux pour la santé : selon Alan Greenspan, les États-Unis sont entrés dans la crise la plus grave depuis la seconde guerre mondiale. Ils ont d'ailleurs dû nationaliser les deux géants du crédit hypothécaire, Freddie Mac et Fanny Mae. Alors que la tempête financière est due aux subprimes, il est indécent de proposer aux familles de recourir à ces crédits risqués !
Au contraire, il faut encadrer les prêts et faire preuve de pédagogie. Il y a des solutions plus adaptées pour les ménages étranglés par leur prêt-relais. Pourquoi ne pas augmenter le prêt à taux zéro, aujourd'hui de 15 000 euros, d'autant que ce dispositif a un effet déclencheur pour l'accession à la propriété et touche les ménages aux revenus moyens ? Son financement par crédit d'impôt sur l'impôt sur les sociétés des banques, inventé par M. Daubresse pour débudgétiser le PTZ, n'est prévu que jusqu'en 2009. Allez-vous laisser disparaître ce dispositif ?
De même, relancer l'épargne logement serait un signal fort envers les primo-accédants, d'autant que l'effort d'épargne renforce la sécurité de l'accédant et du prêteur. La contractualisation sécurise le système financier français, et le protège des conséquences d'un trop grand recours à la titrisation.
La question n'est pas d'être pour ou contre l'accession à la propriété. Plutôt que de prôner l'accession à tout prix, mieux vaut adopter une attitude raisonnée visant à protéger les ménages et les collectivités d'un endettement démesuré. Comme l'indiquait l'Anil au sujet du récent rapport de Frédéric Lefebvre sur les emprunts immobiliers à taux variable, « ce n'est pas un excès de réglementation, ni même la fin de toute imagination commerciale que de faire en sorte que des prêts, qui engagent des emprunteurs profanes pour plus de vingt ans, ne puissent être vendus comme des téléphones portables » !
A l'heure où la majorité dénonce les aides personnelles au logement, où le crédit d'impôt Tepa va coûter 4,5 milliards -alors qu'il n'est pas pris en compte pour apprécier la solvabilité des acquéreurs-, il y a peut-être mieux à faire que d'aider sans discernement les plus aisés à acheter un logement existant ! Plus que jamais, il faut encourager la production de logements abordables.
Quels outils et quels moyens financiers comptez-vous engager au service de la politique du logement ? Quelle suite réservez-vous à la proposition dangereuse de généralisation des prêts hypothécaires ? (Applaudissements à gauche)
M. Philippe Dallier. - La question orale de M. Repentin se voudrait d'actualité ; elle est en réalité décalée et dépassée. Il y a moins de dix jours, pendant si jours et six nuits, nous avons discuté du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion : nous avons eu tout loisir de débattre de la crise actuelle et de poser un diagnostic sur l'état du logement en France.
Grace à ce texte, nous voulons construire plus de logements, favoriser l'accession sociale à la propriété, permettre l'accès au parc de logements HLM à plus de personnes et lutter contre l'habitat indigne. Je me suis exprimé sur tous ces sujets, en tant que rapporteur pour avis de la commission des finances, ainsi qu'à titre personnel. Beaucoup de nos collègues l'on également fait, mais à aucun moment le Gouvernement n'a souhaité revenir sur la question du crédit hypothécaire. Il n'est donc pas nécessaire de rouvrir le débat, une semaine après l'adoption du projet de loi par le Sénat.
M. Daniel Raoul. - C'est contradictoire !
M. Philippe Dallier. - Il revient maintenant à l'Assemblée nationale de se saisir de ce texte avant que les deux chambres ne recherchent un compromis équilibré.
Outre le fait d'être décalée et dépassée, cette question orale entretient la confusion entre crédit hypothécaire et subprimes. C'est extrêmement regrettable car sur des sujets aussi complexes et sensibles, il ne faut pas en rajouter, surtout en période de crise. Je sais bien que l'on a vu récemment certains élus socialistes, notamment le président du conseil général de Seine-Saint-Denis, se lancer dans une véritable opération d'enfumage, qui n'a probablement d'autre but que de préparer les esprits à une augmentation des impôts locaux, en comparant des emprunts à taux variables, produits somme toute assez banals, fussent-ils libellés en devises étrangères, aux produits toxiques que sont les titres composés de subprimes. Mais nous ne sommes pas obligés de suivre ici les mauvais exemples qui, par l'amalgame, conduiraient nos concitoyens à jeter le bébé du crédit hypothécaire bien utilisé, avec l'eau du bain !
Lors de l'examen de la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie, le Parlement n'a autorisé le développement du crédit hypothécaire au profit des particuliers qu'avec prudence. De plus, l'hypothèque rechargeable et le prêt viager hypothécaire sont très peu utilisés depuis la publication de l'ordonnance du 24 mars 2006 qui les a mis en place. Ainsi, seules 10 500 hypothèques conventionnelles rechargeables ont été enregistrées au 31 août 2008 et seuls 4 400 prêts viagers hypothécaires ont été autorisés de juin 2007 à juillet 2008. Il s'agit donc de dispositifs marginaux, maniés avec précaution par les banques françaises, ce dont nous nous félicitons.
Surtout, les dispositifs existants sont très différents des subprimes américaines avec lesquelles certains entretiennent la confusion. Ainsi, l'hypothèque rechargeable permet de « recharger » l'hypothèque qui a servi à obtenir un prêt, au fur et à mesure que le prêt initial est remboursé, et d'utiliser cette hypothèque pour emprunter de nouveau et mener à bien d'autres projets. Toutefois, en France, et c'est un principe de précaution fort utile, l'emprunteur ne peut réutiliser l'hypothèque que dans la limite de la valeur initiale de son bien sans tenir compte d'une éventuelle appréciation de la valeur de celui-ci. Alors certes, en cas d'acquisition du bien à un prix élevé suivi d'une dépréciation, il pourrait y avoir un décalage temporaire entre le montant de l'hypothèque et la valeur réelle du bien, mais il s'agit d'un cas extrême qui ne remet pas en cause le solide garde-fou de notre système.
Notre collègue Repentin fait le parallèle entre les subprimes américains et le crédit hypothécaire évoqué dans un récent rapport du Conseil d'analyse économique mais il oublie de nous dire que les auteurs de ce rapport rejettent un système hypothécaire pur, dont les carences sont aujourd'hui bien visibles, et proposent d'instaurer un encadrement de la distribution de crédit immobilier qui permette d'exclure les formes les plus risquées d'emprunts. De surcroît, il ne s'agit que d'un rapport qui n'engage que leurs auteurs, initié dans un autre contexte et aujourd'hui en décalage avec la réalité des marchés du crédit et du logement.
Pour que les choses soient claires : personne ne propose d'introduire aujourd'hui en France un système identique à celui des subprimes américaines. Le groupe UMP du Sénat y serait de toute façon totalement opposé.
La question posée par notre collègue Repentin nous apparaît également décalée et dépassée par rapport aux enjeux actuels.
M. Jean-Luc Fichet. - C'est lui qui est décalé.
M. Philippe Dallier. - Notre pays doit en effet faire face à une très grave crise du crédit et à ses lourdes répercussions dans le secteur du logement. Les derniers chiffres montrent une très nette dégradation de l'activité dans ce secteur essentiel pour l'économie et l'emploi. Le nombre de permis de construire s'est ainsi effondré en France de 23,3 % au troisième trimestre et le nombre de mises en chantier a reculé de 8,1 %. Sans attendre, le Président de la République a annoncé début octobre un plan ambitieux pour soutenir le secteur du bâtiment et répondre aux besoins des Français. Le groupe UMP salue cette réactivité et soutient les mesures décidées comme le lancement d'un programme exceptionnel d'acquisition de 30 000 logements, l'augmentation de 20 000 à 30 000 du nombre d'opérations finançables en Pass foncier, l'accroissement du plafond du prêt d'accession sociale (PAS) au niveau du prêt à taux zéro afin de faciliter l'octroi de prêts immobiliers par les banques, la mobilisation des terrains de l'État et de ses établissements publics, notamment ferroviaires.
Lors de la discussion du projet de loi de mobilisation pour le logement, j'ai évoqué le financement de l'Anru et de l'Anah, les débudgétisations programmées et la mise à contribution du 1 % logement. Ces questions importantes devront être abordées lors de l'examen du projet de programmation des finances publiques pour la période 2009-2011 puis lors de l'examen des crédits de la mission Ville et Logement. Ce débat n'a donc pas lieu d'être aujourd'hui, sauf à paraître encore une fois en décalage. Soyez néanmoins assurée, madame la ministre, que le Sénat, et sa commission des finances, y contribueront activement, le moment venu, en cohérence avec les mesures de soutien annoncées par le Président de la République auxquelles le groupe UMP apporte son soutien. (Applaudissements sur de nombreux bancs à droite)
M. Martial Bourquin. - Je comprends la gêne de mon collègue qui tente de sauver les apparences en parlant de débat décalé mais tel n'est pas le cas. Une erreur n'est pas dramatique si elle est corrigée à temps mais elle le devient si elle persiste. C'est pourquoi il faut examiner la question du crédit hypothécaire car sa généralisation est plus que jamais au coeur d'une actualité internationale, sociale et financière, tourmentée.
L'échec cuisant des subprimes aux États-Unis et la crise bancaire nous invitent à nous affranchir d'un corpus néo-libéral triomphant. Cette crise doit nous permettre de redéfinir nos priorités. Notre responsabilité d'élus n'est pas de promouvoir à marche forcée le slogan cher au Président de la République de la « France des propriétaires » mais d'aider les ménages modestes à acquérir une propriété dans des conditions sécurisées. Notre responsabilité n'est pas d'inciter à la consommation déraisonnée, à une hausse artificielle du pouvoir d'achat ni de nier les risques d'accidents de la vie. Votre attitude, madame la ministre, est moins claire : je crains que votre modération actuelle ne soit qu'une façade et que vous nous demandiez d'ici quelques mois d'aller encore plus loin.
En 2005, alors que Nicolas Sarkozy était ministre de l'économie et des finances, il a entrepris l'import juridique du système de l'hypothèque rechargeable. Pour éviter le débat, le Gouvernement avait procédé par ordonnance. Celle du 24 mars 2006 sur le droit des sûretés a ouvert deux nouvelles formes de crédit : l'hypothèque rechargeable permet à l'emprunteur qui a déjà constitué une hypothèque pour l'achat d'un bien immobilier d'affecter une partie de celle-ci à la garantie d'un autre crédit. Le prêt viager hypothécaire, quant à lui, permet d'obtenir un prêt garanti par un bien immobilier à usage exclusif d'habitation, sachant que le prêt n'est remboursé qu'au décès de l'emprunteur par la vente de son bien. L'adoption de cette ordonnance avait fait l'objet d'une grande campagne au sein de l'UMP où la fascination pour des méthodes de distribution de crédit immobilier inspirées des États-Unis était flagrante. Le groupe socialiste s'était élevé contre ces propositions.
Deuxième source d'inquiétude : le rapport sur l'hypothèque et le crédit hypothécaire commandé par Nicolas Sarkozy, alors ministre d'État. Ce rapport proposait, dès 2004, d'accroître la fluidité du crédit hypothécaire tout au long de la vie du prêt. L'idée était simple : une hypothèque initialement inscrite à l'appui d'un premier prêt, le plus souvent immobilier, devait pouvoir être réutilisée, sans nouvelle formalité, pour garantir de nouveaux prêts. Il s'agissait ni plus ni moins du système américain, mais la recharge servait à financer des dépenses de travaux ou d'équipement alors qu'aux États-Unis, elle permet de contracter un autre prêt à la consommation. C'est le crédit revolving sans barrières, où les prêts à la consommation et les prêts immobiliers se confondent sans limite pour la plus grande insécurité des emprunteurs. Là encore, nous avions fait part de nos vives préoccupations.
Certes, le dispositif français n'est pas strictement identique à celui proposé aux États-Unis. C'est sans doute pourquoi il ne s'est pas développé. Le système du cautionnement, combiné à une étanchéité entre les prêts à la consommation et les prêts immobiliers, nous a préservés des conséquences les plus dramatiques de ce système. Depuis, certains sont revenus à une position plus raisonnable. Dans un récent rapport, Frédéric Lefebvre, député UMP, se félicite de l'échec de ces nouveaux produits. Il y voit même l'une des raisons expliquant la meilleure résistance du marché français à la crise. Nous craignons pourtant que cette position plus mesurée ne soit que conjoncturelle, d'autant que les propositions du candidat Sarkozy pendant la campagne de 2007 et le rapport du Conseil d'analyse économique encouragent le développement du crédit hypothécaire.
En septembre 2006, le candidat Sarkozy, qui voulait voir la France devenir un pays comptant 70 % de propriétaires, s'exprimait en ces termes : « En France, nous privilégions la garantie sur les personnes, ce qui conduit les établissements bancaires à écarter du marché du crédit tous ceux dont la situation professionnelle n'est pas assez stable pour assurer des revenus durables. Cette tradition n'est pas une fatalité. Il suffit de changer les règles prudentielles imposées aux banques, de simplifier le recours à l'hypothèque et d'en réduire le coût ». Cette fascination pour le système américain paraît aujourd'hui pour le moins décalée... Car comme aux États-Unis, étaient avant tout visés les ménages modestes ; comme aux États-Unis, un lien direct était établi entre la valeur du bien estimée sur le marché et la capacité d'accès au crédit. Or, aux États-Unis, la chute des prix des actifs immobiliers a entraîné la diminution des capacités d'emprunt et d'accès au crédit, a rendu la demande de logements moins solvable et entamé la capacité de consommation des ménages, dont les plus modestes ont vu leurs logements saisis, tandis que les banques ne pouvaient plus espérer tirer de leur vente qu'une valeur très inférieure à celle initialement estimée. Par un effet de dominos, toute l'économie s'en trouve aujourd'hui affectée.
Deuxième motif d'inquiétude, le rapport du Centre d'analyses stratégiques qui vous a été remis le 30 septembre dernier. La fascination bien connue de l'un de ses auteurs pour l'Amérique n'est pas pour nous rassurer. En matière de crédits immobiliers, on peut y lire que « la France n'a pas intérêt à défendre à tout prix une exception dont les vertus sont établies, mais qu'il n'est pas illégitime de faire évoluer » ; que les premiers pas accomplis par l'ordonnance de 2006 « restent pour le moins insuffisants » ; que « le développement d'un marché financier de titrisation hypothécaire est la condition du développement du marché de l'hypothèque en France ». Pensez-vous, madame la ministre, que les propositions de ce rapport sont aujourd'hui défendables ? Notre conception du logement n'est pas strictement patrimoniale. Dès vos premières propositions, nous avions tiré la sonnette d'alarme et nous étions prononcés contre la généralisation du crédit hypothécaire rechargeable. Il est encore temps d'agir avant que le train ne déraille.
Souhaitez-vous, madame la ministre, poursuivre l'oeuvre entreprise et importer purement et simplement le système américain où les crédits à la consommation sont adossés aux prêts au logement ? Voulez-vous faire des ménages français des spéculateurs malgré eux, consommant au-delà du raisonnable, mais vivant avec l'épée de Damoclès que représente la dépréciation de leur bien immobilier ? Souhaitez-vous continuer à promouvoir un système de retraite par capitalisation, dont il faut rappeler qu'il repose de plus en plus sur les valeurs financières et immobilières au détriment de la solidarité ? Persisterez-vous à ne rechercher à la crise du logement, qui est avant tout une crise de la construction -d'une construction, il va sans dire, adaptée à la demande- et une crise du foncier constructible, que des solutions bancaires et financières ? Entendez-vous demander aux banques, à qui l'État s'apprête à donner 10 milliards, de recourir sans mesure à ces crédits ? Quels risques, madame la ministre, êtes-vous prête à faire prendre aux ménages les plus modestes ? (Applaudissements à gauche)
Mme Odette Terrade. - Après l'examen, en première lecture et en urgence, de votre projet de loi, ce débat prend une allure de redite.
Mme Christine Boutin, ministre. - A qui le dites-vous !
Mme Odette Terrade. - Mais le fait est que les déclarations triomphales d'il y a quelques mois sur le niveau exceptionnel de construction de logements, y compris de logements sociaux, semblent avoir mal supporté l'épreuve de la crise économique : chute de 25 % des mises en chantier, de 30 % des transactions immobilières, situation dramatique pour 30 000 accédants à la propriété victimes des prêts-relais, aggravation de l'endettement des ménages, liée aux prêts à taux variable : tout concourt à la crise. L'un des principaux opérateurs immobiliers, Nexity, annonce l'abandon de 110 programmes et le licenciement de 500 salariés tandis qu'Orpi annonce la fermeture de 30 agences. Alors qu'au deuxième trimestre 2008, le secteur de la construction, avec une moyenne de 18,2 heures supplémentaires, continuait de solliciter avec constance le dispositif Tepa, dans le même temps, les services du ministère du travail nous indiquent que 8 500 emplois intérimaires ont disparu dans le secteur, tandis que les créations d'emploi n'ont finalement progressé que de 4 000 postes sur la période. Ainsi, même aux beaux jours, le bâtiment ne crée pas les emplois espérés. Et les effets de la loi Tepa pèsent lourd... Le mirage du « travailler plus pour gagner plus » conduit ainsi à priver l'industrie du bâtiment de notre pays des forces dont elle aura besoin, demain, pour assurer à chacun un logement. La crise du logement est aussi crise du bâtiment, aggravée par vos choix politiques néfastes.
Selon les associations, deux millions et demi de ménages sont mal logés, sans abri, précairement hébergés ou résident dans des logements insalubres. Quelles réponses leur ont été apportées ces dernières années ? Essentiellement un développement de l'offre, indifférent au caractère de la demande. Des centaines de millions d'euros ont ainsi été distraits des caisses publiques pour inciter les particuliers à réaliser des investissements locatifs -Robien ou Borloo- tandis que des milliards ont été mobilisés au profit des établissements de crédit qui ont précipité des ménages moyens et modestes dans la spirale de l'endettement. La dépense publique pour le logement a été profondément dénaturée, quand les crédits de la mission Ville et Logement se sont peu à peu limités à la prise en charge partielle des aides personnelles au logement, tandis que la régulation budgétaire et les ajustements des collectifs de fin d'année réduisaient la part des crédits destinés à la construction neuve de logements locatifs sociaux et de réhabilitation du parc existant. L'État n'a jamais respecté sa parole sur le programme national de rénovation urbaine. Pire, il s'apprête aujourd'hui à solder son découvert en faisant main basse sur le 1 % logement ! La prime à l'amélioration des logements à usage locatif (Palulos) va passer, en 2009, par pertes et profits pour toute opération qui n'entrerait pas dans le cadre des programmes de l'Anru. La crise du logement, c'est aussi cela !
La construction de logements sociaux dans la dernière période doit autant à la montée en charge des logements PLS, peu consommateurs d'aide publique directe, qu'au fait que les communes en déficit de logements sociaux ont finalement décidé, dans leur majorité, de mettre en oeuvre la loi SRU. Remettre cette loi en cause aujourd'hui serait prendre le risque d'aggraver la crise. Est-ce là ce que veut ce gouvernement ? Pensez-y, madame la ministre, avant de tenter de faire rétablir au Palais Bourbon cet article 17 que le Sénat a rejeté ! Pensez-y aussi quand vous tenterez de faire croire que plus de mobilité des locataires -de ces locataires prétendument privilégiés que seraient un couple d'enseignants sans enfants- permettra de répondre aux besoins
Seule la construction en nombre de logements de qualité inversera la vapeur. Mais hélas, depuis 2002, vous avez voté des lois qui ont cette conséquence que 70 % de l'offre n'est adaptée qu'à 30 %. Un Robien loué, c'est tant mieux, mais un Robien inlouable, parce qu'il ne répond pas à la demande, quel gâchis ! Comment un couple dont les revenus sont inférieurs aux plafonds HLM serait-il prêt à payer 1 500 ou 1 600 euros par mois pour se loger ? Il est pourtant requis de payer des impôts dont le produit sera dispendieusement utilisé pour aider des investisseurs immobiliers qui n'en ont nul besoin. Et que dire de la loi Méhaignerie, de la loi sur l'habitat de 1994, qui ont favorisé une poussée urticante des loyers ? La vérité est que le parc social n'existe quasiment plus et que la loi de 1948 n'est plus qu'un lointain souvenir ! Ne reste qu'un parc locatif privé mal entretenu et dont les loyers ont, eux, pris l'ascenseur ! La crise du logement, ce sont aussi ces studettes à 900 euros sur Paris, ces studios des années 1920 ou 1930 à 700 euros en province ; c'est le développement des copropriétés dégradées, dont certaines ont procédé au démembrement, fort lucratif pour le vendeur, des immeubles anciens par congé-vente : merci M. Méhaignerie !
En matière d'accession à la propriété, nous sommes passés, en quelques années, d'un dispositif destiné aux ménages -prêts principaux bonifiés et réductions d'impôt- à un dispositif destiné aux prêteurs. Il est grand temps de revenir aux fondamentaux. Le prêt à taux zéro, s'il doit persister, doit être recentré sur les ménages les plus modestes et permettre de prendre en charge la majeure partie de la valeur d'achat du bien immobilier. Il est grand temps d'abandonner les prêts à taux variable et de réduire le niveau des taux d'intérêt, en exigeant des établissements de crédit qu'ils cèdent un peu sur leur marge opérationnelle.
Nous n'en prenons hélas pas le chemin ! En rackettant les collecteurs du 1 %, vous privez des milliers de familles de salariés de possibilités de prêts à faible taux, qui rendaient leur dette plus supportable. Et que ne prenez-vous dès à présent une mesure sur les prêts-relais ? Exigez des banques, en contrepartie des financements exorbitants consentis par le dernier collectif, qu'elles abandonnent leurs créances sur les intérêts courus. Enfin, recyclez le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt prévu par la loi Tepa, qui n'a fait qu'encourager la hausse des taux d'intérêt, en le transformant, au bénéfice des emprunteurs, en capacité de remboursement anticipé, sous forme d'une aide budgétaire directe.
Ce n'est pas par le développement de subprimes à la française mais bien en révisant le cadre législatif et financier qui l'a fait naître que l'on résoudra la crise du logement dans notre pays. (Applaudissements à gauche)
Mme Michèle André. - Cette question orale revêt un caractère de plus en plus crucial du fait de la crise financière qui se transforme malheureusement, jour après jour, en une crise économique qui, elle, n'ayant rien de virtuel, frappe durement la construction et donc le logement. Le ressort semble brisé et nous sommes face à un ralentissement notable des mises en chantier. L'annonce, hier, de la chute de 23 % des demandes de permis de construire et de 8 % des mises en chantier au troisième trimestre le confirme. On peut craindre, tirant une leçon de l'adage « quand le bâtiment va tout va ! », que, s'il commence à aller mal, tout risque d'aller mal.
Il n'en reste pas moins que nombreux sont les Français qui depuis plusieurs années déjà ont du mal à se loger, en tant que propriétaire ou que locataire. L'indice du coût de la construction, qui permet d'apprécier la richesse nécessaire pour pouvoir devenir propriétaire dans du neuf et sert de base à la révision des loyers, a progressé de 44 % depuis 2000, contre seulement 13 % entre 1990 et 1999. Cette progression a interdit à tous ceux qui cherchaient un logement de trouver un prix ou un loyer raisonnable. Des taux d'intérêt bas, une TVA à 5,5 % dans la rénovation, un désir d'acquérir exacerbé, tout cela a conduit la demande à surpasser largement une offre « insuffisante et mal adaptée », aux dires du Conseil d'analyse économique (CAE). Les prix et les loyers connaissant une croissance à deux chiffres, les gouvernements précédents ont jugé bon d'ajouter à ces facteurs déjà favorables des dispositifs fiscaux qui ont accéléré le mouvement et poussé la croissance annuelle bien au-delà du raisonnable. En témoigne l'explosion de « l'indice du prix des logements rapporté au revenu disponible par ménage » disponible sur le rapport du Conseil d'analyse économique. S'il variait depuis les années 60 et jusqu'en 2000 entre 0,9 et 1,1 il a vu sa courbe s'envoler pour atteindre plus d'1,7. L'immobilier d'aujourd'hui contribue au creusement des inégalités car faute de logements sociaux en nombre suffisant les prix pourraient continuer encore de grimper et les plus défavorisés auraient de moins en moins la possibilité de se loger. Paris illustre cruellement ce mécanisme qui aboutit aujourd'hui à ce que des employés de plus en plus nombreux sont contraints à des solutions de fortune pour ne pas dire de misère. Notre pays connaît déjà des prix supérieurs à beaucoup d'autres pays de l'OCDE. Les plus défavorisés ne trouvent pas de logements correspondant à leur capacité pécuniaire, et maintenant les classes moyennes non plus.
Le projet de loi qui nous a été proposé dernièrement n'est pas la bonne réponse, et surtout pas la réduction dans les trois ans à venir de la mission Ville et Logement. Si je peux partager le constat et certaines préconisations du rapport du CAE, je crois que ce serait faire un cadeau empoisonné aux ménages que de concentrer les efforts fiscaux de l'État sur le prêt à taux zéro aux dépens du plan épargne logement, de faciliter les procédures juridiques de recouvrement des actifs gagés, de permettre le développement de la titrisation hypothécaire, bref de se rapprocher fortement des travers des subprimes .Dans le contexte actuel nous devons nous concentrer sur des offres de locations raisonnables plutôt que d'offrir des crédits pour des ménages qui demain souffriront peut-être d'avoir acheté trop cher un bien qui ne trouvera d'autre acquéreur que leur propre banque, faute de paiement. L'ordonnance du 24 mars 2006 sur les droits de sûreté ouvrant l'hypothèque rechargeable et le prêt viager hypothécaire exposait déjà à un risque non négligeable. Réduire le coût d'une hypothèque et assouplir son cadre juridique comme le préconise le CAE serait persister dans les erreurs récentes du monde anglo-saxon et nous créerions là les conditions d'une nouvelle crise, cette fois chez nous. Cela ne peut aboutir qu'à des prix ou des loyers déraisonnables.
Aujourd'hui les programmes immobiliers privés basés sur les plans Robien ou Borloo sont légions et le Gouvernement s'apprête à se substituer aux promoteurs privés qui ne trouvent plus preneurs. Nous ne savons pas à quel prix ni pour mettre à la disposition de qui. Nous apprécierions d'avoir des précisions à ce sujet. (Applaudissements à gauche)
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. - Monsieur Dallier, je vous remercie de votre intervention à laquelle je n'ai rien à rajouter : les inquiétudes quant aux crédits hypothécaires relèvent d'une attirance morbide pour des hypothèses irréalistes. (Murmures improbateurs sur les bancs socialistes)
Il y a à peine une semaine, votre Haute assemblée s'est prononcée sur le projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion. Cette question orale laisse présager que ma présence est ici appréciée puisque nous avons déjà discuté du sujet pendant plus de cinquante heures...
M. Daniel Raoul. - Jour et nuit !
Mme Christine Boutin, ministre. - Ce texte est conçu pour apporter des réponses opérationnelles à la crise du logement, en mobilisant tous les acteurs, sans opposer inutilement secteurs public et privé, logement locatif et accession : tous les outils doivent être mobilisés !
Monsieur Repentin, vous insistez sur la chute de la construction. Quel toupet ! J'aurai donc l'outrecuidance de vous montrer à nouveau cette courbe des constructions avant et après 2002 ! (Mme Christine Boutin, ministre, brandit un graphique) Depuis que nous sommes aux affaires, l'effort de construction a fortement augmenté, le nombre de logements réalisés passant de 308 000 en 2002 à 435 000 l'année dernière, niveau historique jamais atteint depuis trente ans. (On mentionne la loi SRU sur les bancs socialistes)
Ce résultat a été obtenu parce que les organismes de logement social se sont remarquablement mobilisés et que, grâce aux nouvelles aides de l'État, davantage de particuliers ont investi dans un logement, soit pour l'occuper, soit pour le mettre en location. De même le Gouvernement a réagi à l'impact brutal de la crise financière sur l'immobilier. La crise financière a en effet touché en premier lieu le secteur de l'immobilier : la restriction de l'accès au crédit, tant aux particuliers qu'aux professionnels, bloque le marché et le ralentissement sérieux que nous subissons depuis le mois de juin laisse à penser que nous terminerons l'année aux alentours de 360 000 mises en chantier. Le retournement est rapide mais le niveau de construction reste élevé puisqu'il y a autant de logements mis en chantier cette année qu'en 2004, et nous sommes donc encore bien au-dessus des niveaux atteints entre 1997 et 2002. Nous ne devons pas avoir honte des résultats de 2008.
Un logement non construit, c'est deux chômeurs de plus. Nous avons donc tout intérêt à compenser et à rattraper le retard pris sous la majorité précédente et nous le faisons notamment grâce à ce projet de loi. Celui-ci vise trois objectifs majeurs : soutenir la construction pour la location et l'accession populaire à la propriété, permettre aux classes moyennes et modestes d'accéder au logement et, enfin, lutter contre le mal-logement. Les débats ayant déjà eu lieu sur tous ces sujets, je n'y reviendrai pas. Je rappelle seulement que mon premier objectif a toujours été de soutenir la construction. Plusieurs mesures prévues dans le projet de loi serviront de support au plan de relance annoncé par le Président de la République. Celui-ci a souhaité un plan d'achat de 30 000 logements en Vefa, qui permettra à des opérateurs sociaux d'acheter des programmes n'ayant pu être lancés à ce jour par les promoteurs privés, faute d'une pré-commercialisation suffisante. Comment pouvez-vous y être opposés ? Il y a des programmes bloqués parce que les banques ne voulaient pas accorder de prêts ! (Protestations sur les bancs socialistes) Oui, monsieur Raoul, j'ai entendu quelqu'un contester cette décision !
La disposition du projet de loi qui simplifie et sécurise la procédure de vente en état futur d'achèvement aux organismes HLM permettra d'accélérer et de rendre pleinement opérationnel ce plan d'achat.
Le plan de relance prévoit aussi 30 000 logements d'accession populaire à la propriété, qui seront réalisés grâce au Pass foncier, que le projet de loi étend aussi au logement collectif ; et le plan de relance accélère les cessions de terrains publics décidées en mars 2008, afin de construire plus rapidement les 70 000 logements correspondants. A cela s'ajouteront des cessions de terrains militaires et de terrains appartenant à Réseau ferré de France. Au lieu de réaliser de simples ventes, l'État aura la possibilité de conclure des baux avec intéressement ultérieur à la valeur créée. Enfin, une décote pourra être appliquée au profit des opérations en Pass foncier et des logements locatifs sociaux.
Une circulaire du Premier ministre a été adressée aux préfets le 17 octobre, qui prévoit une déclinaison régionale des rachats en Vefa. Des cellules de suivi local vont être mises en place. Au niveau national, un comité du pilotage se réunira dès la semaine prochaine pour faire le point sur les initiatives engagées.
Mes crédits budgétaires ? Je n'ai pas à en rougir. Pour avoir une image exacte du budget de mon ministère, il convient en effet d'inclure les moyens des agences telles que l'Anru et l'Anah. Soit un total de 8,9 milliards d'euros, 200 millions de plus qu'en 2008, grâce, en particulier, à une contribution de 800 millions par an pendant trois ans, négociée avec les partenaires sociaux du 1 % logement. En effet, le Pass travaux a été rendu inutile par la création de l'éco-prêt pour les travaux d'amélioration énergétique dans le cadre du Grenelle de l'environnement ; et les subventions à La Foncière seront aussi efficaces sans dépasser 50 %. Le financement du logement social n'a pas baissé de 30 % : c'est le périmètre de la ligne fongible qui a été redéfini ! Les travaux de réhabilitation ou les dépenses d'humanisation des structures d'hébergement seront, en 2009, financés soit par des ressources extrabudgétaires, soit par d'autres lignes.
En outre, les organismes de logement social bénéficieront, en 2009, de ressources extrabudgétaires croissantes. Les subventions du 1 % logement au logement locatif social vont augmenter, à ma demande, de 33 %. Et le directeur général de la Caisse des dépôts annonce une baisse probable du taux du livret A au 1er février prochain, donc une baisse des taux des prêts pour le logement social.
Les crédits de paiement affectés au logement locatif social augmentent de 5,5 %, les crédits de l'Anah, de 23 % ! En 2009, ce sont 120 000 logements locatifs sociaux qui seront construits, 20 % de plus que cette année, où nous avons déjà cherché à faire le maximum.
L'accession sociale à la propriété a fait l'objet de plusieurs mesures : extension à l'ancien du prêt à taux zéro, TVA à 5,5 % sur le Pass foncier, hausse du plafond de ressources pour les prêts d'accession sociale à la propriété, etc.
Le dispositif Robien a été recentré. Mais je précise tout de même que depuis 2003, 250 000 logements ont été construits grâce à ce dispositif, dont 5 000 seulement sont vacants. En outre, la dépense fiscale n'atteint nullement 30 000 euros par logement comme il a été affirmé ; un logement Robien qui coûte 15 000 euros, rapporte, via la TVA, 20 000 euros à l'État. Il faut regarder les choses globalement !
Le Conseil d'analyse économique m'a effectivement remis, le 30 septembre dernier, un rapport de grande qualité, Loger les classes moyennes. Nombre de sujets de la politique du logement y sont examinés.
Monsieur Repentin, vous ne pouvez pas faire un parallèle entre les subprimes et le crédit hypothécaire. Les prêts incriminés, aux États-Unis, ont été accordés sans contrôle de la capacité des ménages à rembourser. Il a été reconnu que la France est, en Europe, le pays où le crédit est le moins cher et le mieux sécurisé. La Banque de France dit aussi que l'endettement immobilier n'est pas la cause principale des situations de surendettement : seuls 8 % des dossiers traités comprennent un crédit immobilier.
Peut-être n'aurons-nous pas l'occasion d'évoquer encore une fois ce sujet la semaine prochaine...
M. Thierry Repentin, auteur de la question. - C'est regrettable !
M. Daniel Raoul. - Cela pourrait devenir une addiction !
Mme Christine Boutin, ministre. - Sur le fond, je voudrais tout de même le répéter : nul besoin de nous engager dans des montages complexes, il importe avant tout de restaurer la confiance. Le Président de la République a oeuvré en ce sens en sécurisant le système bancaire et l'on ne peut que lui être reconnaissant ; la façon dont il gère la crise économique et financière mondiale force l'admiration.
M. Gérard César. - Très bien !
Mme Christine Boutin, ministre. - Je veux citer encore le fonds de garantie pour l'accession à la propriété, le relèvement du plafond du Pass jusque fin 2009 pour sécuriser les banques prêteuses et faciliter leur refinancement. Quant aux prêt-relais, M. Pauget s'y attelle : les banques appliqueront leurs procédures avec plus de souplesse, pour répondre à mon appel à la clémence.
Les banques associées au projet de la maison à 15 euros par jour se sont engagées à maintenir jusqu'en janvier 2009 le taux de 5 % sur les prêts aux particuliers.
Face à la crise, tous les acteurs doivent se mobiliser. Le logement doit devenir « grande cause nationale », dit M. Repentin. Je dirais pour ma part : il faut une unité politique, pour parvenir au respect du droit de chacun au logement. Mon projet de loi vise à ce que chacun donne le meilleur de lui-même, dans le but d'assurer un toit à tous. Il convient d'agir sur l'ensemble de la chaîne du logement. N'opposons pas propriétaires et locataires, bailleurs sociaux et promoteurs privés, car chacun a un rôle à jouer et c'est ensemble que nous parviendrons à surmonter la crise. (Applaudissements à droite)
La séance, suspendue à 17 h 45, reprend à 17 h 50.