Mardi 8 avril 2025

- Présidence de M. Olivier Henno, président -

La réunion est ouverte à 15 h 30.

Audition de M. Antoine Pellion, Secrétaire général à la planification écologique (SGPE) (sera publié ultérieurement)

Ce point de l'ordre du jour sera publié ultérieurement.

Cette réunion a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.

Audition de professeurs de droit - MM. Aurélien Baudu, Professeur à l'Université de Lille, Xavier Cabannes, Professeur à l'Université Paris Cité et Mme Géraldine Chavrier, Professeure à l'Université Paris I - Panthéon Sorbonne

M. Olivier Henno, président. - Nous poursuivons nos travaux avec l'audition de trois universitaires spécialistes des questions d'autonomie financière des collectivités locales.

Mme Chavrier, M. Baudu, M. Cabannes, vous êtes des spécialistes reconnus des finances publiques et des questions relatives à l'autonomie fiscale des collectivités territoriales. Votre expertise nous permettra d'aborder les questions constitutionnelles relatives au principe de libre administration des collectivités territoriales, qui sont au coeur de nos travaux.

Le Sénat a décidé de la Constitution d'une commission d'enquête dont l'objet est de travailler sur la libre administration des collectivités territoriales et le financement de services publics de proximité et de la transition écologique.

Avant de vous donner la parole, je dois vous rappeler qu'un faux témoignage devant notre commission d'enquête est passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal. Je vous invite à prêter serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, en levant la main droite et en disant : « Je le jure ». Je vous remercie par ailleurs de nous faire part de vos éventuels liens d'intérêts.

M. Baudu, M. Cabannes et Mme Chavrier prêtent serment.

M. Thomas Dossus, rapporteur. - Les collectivités revêtent une importance majeure pour le Sénat. Le vote du budget 2025 a donné lieu à des débats particulièrement complexes du point de vue des collectivités, puisque, depuis plusieurs dizaines d'années, elles se voient privées d'une part croissante de leurs ressources propres et de leurs leviers fiscaux. Or elles sont tenues d'investir dans la transition écologique tout en exerçant l'ensemble de leurs compétences sur leurs territoires. Il nous a semblé pertinent de vous entendre à propos de la libre administration des collectivités, telle que la prévoit la Constitution, et son articulation avec leur autonomie financière.

Nous vous invitons à partager votre analyse juridique de ces notions et de leur mise en oeuvre concrète.

Mme Géraldine Chavrier, Professeure à l'Université Paris I - Panthéon Sorbonne. - Je tiens d'abord à déclarer des intérêts : en 2021, j'ai été rémunérée par une association d'élus locaux pour étudier les principes d'autonomie financière et de libre administration, afin de comprendre l'absence de censure constitutionnelle en la matière. Je collabore en outre régulièrement avec diverses associations d'élus et de collectivités territoriales. Je vous garantis cependant l'objectivité de mon propos.

J'ai toujours admis que le droit puisse céder devant les nécessités et que le Conseil constitutionnel joue un rôle d'arbitre au besoin. Les analyses de débats et d'archives que je m'apprête à vous présenter révèlent cependant un scandale et même une forfaiture, tout en expliquant les difficultés financières des collectivités territoriales.

En 2003, le principe d'autonomie financière des collectivités a été inscrit à l'article 72-3 de la Constitution. Il dispose que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources » puis renvoie à une loi organique.

Dans le rapport du Sénat relatif au projet de loi constitutionnelle du 23 octobre 2002, René Garrec explique : « Votre commission des lois considère que l'autonomie locale ne peut se limiter à la liberté de la dépense. Elle exige aussi que les collectivités territoriales aient la faculté de moduler l'évolution de leurs ressources par le vote des impôts locaux dans les conditions prévues par la loi ».

De fait, le 29 octobre 2002, au Sénat, le Garde des Sceaux retient ce principe. Il constate d'abord que le Conseil constitutionnel, en se fondant sur la libre administration, n'a jamais pu s'opposer à la recentralisation financière. Il énumère toutes les suppressions de fiscalité locale, puis déclare : « Le remplacement de ces recettes fiscales par des dotations de l'État a renforcé la dépendance des collectivités à l'égard de ce dernier. La part de la fiscalité locale dans les ressources globales hors emprunt a été réduite. Nous ne pouvons plus nous résoudre à voir les finances locales dépendre toujours davantage de l'État au fil des législations. Il faut donc que la norme suprême consacre en termes précis et opérationnels l'autonomie financière des collectivités ». Le ministre ajoute : « En reconnaissant leurs capacités fiscales, ce projet leur permettra, dans les limites prévues par la loi, de fixer aussi bien le taux que l'assiette des impôts locaux ». Selon le ministre, l'autonomie réside donc dans la maîtrise des taux. Il le rappelle le jour de l'adoption définitive du projet de loi, allant alors jusqu'à parler d'autonomie fiscale.

À l'Assemblée nationale, le président de la commission des lois insiste aussi sur la fiscalité propre : « Nous aurons une base juridique pour mettre un terme à une dérive commencée, voici de nombreuses années, qui s'est accélérée depuis cinq ans, faisant passer la part des ressources propres des collectivités de 52 % à 45 % de leurs ressources totales ». En somme, il considère un taux de fiscalité locale propre de 45 % comme trop bas. Là encore, le garde des Sceaux le rejoint.

La maîtrise locale des taux a donc toujours été au coeur du problème. Patrick Devedjian, en tant que ministre délégué aux libertés locales, a expliqué au Sénat : « Dans le même temps, le gouvernement engagera avec le Comité des finances locales une étude sur la mise en oeuvre de la réforme fiscale. Nous avons exclu un financement par la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), car il est incompatible avec la directive européenne. Le taux ne saurait varier suivant les régions ». La maîtrise locale des taux était alors associée à une promesse de réforme fiscale.

Le garde des Sceaux a expliqué à l'Assemblée nationale que le Sénat avait accepté de renoncer à la notion de part prépondérante des ressources propres sous l'effet de cette promesse. Sans la réforme fiscale, les lois de finances auraient été immédiatement contraires à la Constitution. Le Sénat s'est rabattu sur la part déterminante pour « ne pas hypothéquer la mise en oeuvre de nouveaux transferts de compétences en la subordonnant à la réalisation préalable d'une réforme fiscale, certes nécessaire, mais qui prendra davantage de temps ».

Le 5 novembre 2002, le garde des Sceaux affirme que : « les textes qui vous seront présentés par le gouvernement au début de l'année 2003 contiendront des dispositions modifiant la fiscalité ». Le rapporteur au Sénat, René Garrec ajoute : « D'après les indications fournies par le gouvernement, la loi organique augmentera progressivement, à mesure de l'état d'avancement de la réforme des finances locales, le seuil en dessous duquel les ressources propres des collectivités ne pourront descendre ».

Si la fiscalité d'État transférée sans maîtrise de taux avait été conçue comme des ressources propres, il n'aurait pas été utile de renoncer à la part prépondérante ni de promettre d'augmenter le taux d'autonomie lorsque la réforme fiscale l'aurait permis. Aucune réforme fiscale complexe n'est nécessaire pour transférer un montant d'impôts d'État.

Comment expliquer, dans ces conditions, la quasi-disparition de la fiscalité locale en 2025 ? Deux scandales sont à dénoncer.

D'abord, le ministère de l'Économie a refusé de procéder à une réforme fiscale dont il ne voulait pas, jugée trop complexe, même avec un taux dégradé présenté comme tel par le ministre en 2003. Il a ainsi violé consciemment, et la Constitution, et l'accord passé avec le Parlement. La loi organique de 2004 a inclus dans les ressources propres les transferts d'impôts d'État sans pouvoir de taux, alors que ce transfert devait abonder les ressources totales, selon le rapport de la commission des lois du Sénat du 23 octobre 2002 citant une étude de la Direction générale de la comptabilité publique.

Ensuite, le juge constitutionnel aurait dû censurer la loi organique. Or, il l'a validée en la sachant non conforme à la Constitution. Il l'admet d'ailleurs, puisqu'il considère que « la définition donnée par l'article 3 de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel comprend une formule déroutante en première approche ». Il précise qu'assimiler les ressources propres à celles dont les collectivités territoriales peuvent elles-mêmes fixer le montant semble « plus conforme à l'idée naturelle de ressources propres ». Il y renonce toutefois « en raison de l'extrême difficulté politique et technique de créer de nouveaux impôts locaux ».

Alors que la révision visait à donner au Conseil constitutionnel le pouvoir de censurer le démantèlement de la fiscalité locale, celui-ci, faute de réforme fiscale, ne veut pas se trouver en situation de censurer les lois de finances. Il se fonde sur l'extrême difficulté politique et technique de créer de nouveaux impôts locaux. Il ne s'agit plus d'un contrôle de constitutionnalité, mais d'un déni de justice. Le Conseil constitutionnel aurait pu émettre une réserve d'interprétation sur le caractère temporaire de la solution avant une réforme fiscale. En fait, ses membres, et en particulier son président, se sont comportés en anciens ministres soucieux des difficultés rencontrées par leurs collègues.

Ceci explique que le Conseil constitutionnel ne censure jamais des baisses de ressources sur le fondement du principe de libre administration. Ce principe ne vise plus l'origine des ressources, mais le caractère suffisant de leur montant pour faire face à l'ensemble des compétences des collectivités. Or, pour financer la transition énergétique, celles-ci doivent principalement relever le défi d'un manque de ressources. Même les membres du Conseil constitutionnel s'en sont émus, comme en attestent les archives de 1990, relevant maintes réductions successives des ressources locales des collectivités. En juillet 1991, la grande majorité des membres du Conseil a voulu censurer une mesure défavorable aux départements. Selon le rapporteur : « le système adopté ne donne aucune garantie sérieuse de ne pas affecter gravement, dans un nombre de cas non négligeables, les ressources fiscales de certains départements ». Le gouvernement et le ministre de l'Économie évoquent eux-mêmes « une contrainte budgétaire insupportable ».

Le président du Conseil constitutionnel s'y est tout de même opposé. Maurice Faure a déploré l'impossibilité qui en résulterait, pour les départements, d'investir. Le président s'est adressé à lui en ces termes : « Monsieur Faure, j'en appelle à l'ancien ministre. Quelle est votre réponse ? (...) Fixez les règles concernant les taux en vertu de l'article 34. Telle est la prérogative du Parlement. » Le Conseil constitutionnel ne semble plus composé de juges, mais d'anciens ministres. Son président conclut : « Je n'ai pas d'état d'âme. Le domaine où nous devons faire preuve d'une vigilance extrême est celui des droits fondamentaux. Quand il s'agit des ressources des collectivités locales, les exigences ne se situent pas au même niveau. En la matière, laissons Parlement et gouvernement ajuster les choses ».

En conclusion, il n'existe pas de principe constitutionnel d'autonomie financière. Cela ne serait pas si grave si les collectivités disposaient de ressources stables et prévisibles. Le principe de libre administration, garantissant un montant suffisant de ressources pour faire face aux défis futurs, n'est pas non plus reconnu, malgré son inscription dans la Constitution. En réalité, il est laissé à l'appréciation du Parlement.

M. Aurélien Baudu, Professeur à l'Université de Lille. - Votre initiative répond aux préoccupations croissantes des élus locaux concernant la fragilité de l'autonomie financière des collectivités, dues aux réformes récentes de la fiscalité locale et que les difficultés financières actuelles exacerbent encore. En février dernier, la Cour des comptes a relevé un dépassement des dépenses locales d'environ 10 milliards d'euros par rapport aux prévisions initiales du projet de loi de finances pour 2024.

Mon collègue Xavier Cabannes et moi-même avons souligné ces difficultés financières locales dans plusieurs travaux scientifiques. Nous avons notamment organisé, à l'automne 2023, un colloque au Sénat, en partenariat avec la délégation aux collectivités territoriales, sur les règles de financement des transferts de compétences aux collectivités locales et les controverses juridiques qui en découlent. Nous avons également piloté plusieurs dossiers publiés dans diverses revues juridiques, traitant des difficultés financières des collectivités territoriales.

Dès janvier 2023, nous déplorions une forme de recentralisation financière, caractérisée par l'usage récurrent de l'outil fiscal de l'État en substitution de l'instrument fiscal local. Nous avions intitulé un article paru en 2023 dans la revue actualité juridique droit administratif (AJDA) : La TVA : un édifice qui s'émiette, un pouvoir fiscal local qui s'effrite. Le Conseil des prélèvements obligatoires a rendu un rapport en février 2023 sur la TVA, appelant à recentrer cet impôt sur son objectif de rendement pour les finances publiques. Ce rapport est longuement revenu sur l'usage qu'en fait l'État, depuis plusieurs années, pour financer les collectivités locales en substitution des impôts dont elles avaient le pouvoir d'établir le taux. La Cour des comptes appelait à limiter l'usage de la TVA dans le financement des collectivités locales - point de vue que nous défendions dans notre article.

La complexité graduelle du schéma de financement public des collectivités territoriales, par le partage et l'émiettement de l'impôt, m'a incité à écrire un ouvrage sur le droit de la fiscalité locale, dont la deuxième édition est parue en 2022. Ce travail vise à clarifier et rendre intelligible un système fiscal local devenu particulièrement complexe tant pour les élus que pour les citoyens.

La suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales en 2023, les assouplissements de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), dont la suppression a été repoussée à 2030, et la dynamique moindre des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), bien que la loi de finances 2025 ait autorisé les départements à en relever le plafond d'un demi-point, du 1er avril 2025 au 30 avril 2028, ont profondément modifié le paysage fiscal local. Ces changements, combinés à la perte de ressources fiscales due à la crise de l'immobilier, à des charges croissantes liées à l'inflation, au vieillissement de la population, à l'excès de normes et à la précarité croissante de la population, alourdissent considérablement les budgets locaux.

Il importe de noter que le Conseil constitutionnel n'a jamais consacré le principe d'autonomie fiscale pour les collectivités métropolitaines. Nous renvoyons au rapport de la Cour des comptes de 2013 sur l'autonomie fiscale en outremer. La perte du pouvoir fiscal des collectivités locales depuis la loi du 10 janvier 1980, leur accordant la liberté de voter les taux des quatre taxes locales directes en vigueur à l'époque, conduirait, selon de nombreux observateurs, à une recentralisation croissante des décisions budgétaires, plaçant les collectivités dans une dépendance accrue vis-à-vis de l'État.

Autrement dit, nous n'assistons pas à une métamorphose du système fiscal local français, mais plutôt à une forme d'immobilisme de la matrice fiscale locale originelle, qu'il serait impossible de faire évoluer, malgré son effritement inévitable.

Nous voyons, dans la mutation de la fiscalité locale française, des évidences incertaines, un cadre constitutionnel et organique renouvelé en matière fiscale, un pouvoir fiscal des collectivités territoriales ébranlé, mais surtout des incertitudes évidentes, liées à l'abandon d'une fiscalité foncière locale stable et assurée, ainsi qu'au manque de lisibilité de la réforme fiscale territoriale.

Cette situation n'est-elle pas contraire aux articles 72 et 72-2 de la Constitution, qui garantissent la libre administration et l'autonomie financière des collectivités territoriales ? La définition même des « ressources propres » reste un sujet de débat, oscillant entre une interprétation étroite fidèle à la loi de 1980 et une définition plus large - celle du législateur organique, en 2004 - incluant la fiscalité transférée et partagée.

M. Xavier Cabannes, Professeur à l'Université Paris Cité. - Lorsque j'ai commencé ma carrière d'universitaire en 1998, des discussions portaient déjà sur l'autonomie financière des collectivités locales. La réforme constitutionnelle de 2003 a suscité des incompréhensions, des malentendus et peut-être quelques tromperies. Avant de les examiner, partons d'un constat que partageront tous les élus. D'abord, l'État a transféré ou continue de transférer de nombreuses compétences vers les collectivités territoriales ; or les assumer comporte un coût. Ensuite, ces collectivités voient leurs compétences en matière fiscale de plus en plus restreintes, à mesure que s'accroît la part des impôts partagés dans leurs ressources. Enfin, le système fiscal local est marqué par une instabilité. Il ne cesse de changer depuis un quart de siècle. Il devient de plus en plus illisible.

J'ai relevé quatre incompréhensions autour de ce système.

L'autonomie financière des collectivités territoriales, une fois constitutionnalisée, a cessé de correspondre aux discours politiques. D'un point de vue pragmatique, cette autonomie était définie, jusqu'en 2003, par la nécessité pour les collectivités de disposer de ressources propres, pour lesquelles elles disposaient d'un pouvoir décisionnel. Ces ressources propres devaient suffire pour qu'elles assument leurs compétences et en usent librement, sous réserve de quelques interdictions ou obligations fixées par la loi. La révision constitutionnelle de 2003, complétée par la loi organique de juillet 2004, a juridicisé la notion d'autonomie financière, bien que l'article 72-2 de la Constitution n'emploie pas le terme d'autonomie financière. Le Conseil constitutionnel, alors même qu'il ne tire pas de ce principe les conséquences qu'il devrait, y fait régulièrement référence.

Deux alinéas de l'article 72-2 sont à l'origine d'incompréhensions. L'alinéa 3 précise que les ressources propres des collectivités territoriales doivent représenter une part déterminante de leurs ressources. Il en résulte une difficulté à définir ce qu'il faut entendre par « ressources propres », une autre difficulté à établir leur part déterminante, puis une autre encore touchant au pouvoir de décision des collectivités en matière fiscale. L'alinéa 4 affirme que tout transfert ou extension de compétences doit donner lieu à une compensation. Or le système de compensation financière en place reste imparfait.

Une deuxième source de difficultés vient du fait que l'autonomie financière ne recoupe pas l'autonomie fiscale. L'article 72-2 de la Constitution ne comporte à tout prendre qu'un alinéa intéressant de notre point de vue : l'alinéa 2 précisant que la loi peut autoriser les collectivités territoriales à fixer l'assiette et le taux des impositions de toute nature dans les limites qu'elle détermine. Cet alinéa 2 attribue une compétence fiscale aux collectivités territoriales, quoique dans le prolongement de l'article 34 de la Constitution, selon lequel le Parlement a le monopole de la question fiscale, encore qu'il soit autorisé à déléguer aux collectivités territoriales ses compétences en la matière. L'alinéa 2 s'est donc contenté d'inscrire dans la Constitution des dispositions déjà en vigueur, sans apporter de protection aux collectivités en matière fiscale. Il n'empêcherait nullement que les collectivités se retrouvent dans l'incapacité de voter le moindre taux d'imposition. Le Conseil constitutionnel le confirme par ses décisions.

La loi organique de 2004 a inclus dans les ressources propres des collectivités des impositions à propos desquelles elles n'ont pas leur mot à dire. La notion extensible de ressources propres constitue ainsi une troisième source de malentendus.

Enfin, plus de vingt années après la réforme de 2003, il apparaît que le principe d'autonomie financière n'est pas plus protecteur en matière de finances que le principe de libre administration. Tant que le Conseil constitutionnel ne pouvait s'appuyer que sur ce principe, il s'assurait que chaque suppression, par le législateur, d'un impôt local dont le taux était laissé à la libre appréciation des collectivités, était remplacée par une dotation d'un montant à peu près équivalent. Une fois établi le principe d'autonomie financière, le Conseil constitutionnel, au lieu de changer d'approche, s'est contenté d'appliquer l'article 72-2. Quand il a eu à trancher sur la compatibilité du dégrèvement puis de la suppression de la taxe d'habitation en 2018 avec le principe d'autonomie financière des collectivités, il a reporté sa décision à l'examen d'un rapport à venir sur les ratios d'autonomie financière, encadrés par la loi organique.

En conclusion, tous s'accordent à juger le système actuel insatisfaisant. La seule question qui se pose touche aux moyens d'y remédier.

M. Thomas Dossus, rapporteur. - Nous avons nous aussi dressé ce constat à l'examen des jurisprudences et des budgets successifs. Existe-t-il un seuil au-delà duquel le Conseil constitutionnel pourrait reprocher à l'État son retrait de dotations aux collectivités ?

Mme Géraldine Chavrier. - Selon la loi organique de 2004, les ressources fiscales des collectivités ne devaient pas aller à l'encontre du principe de leur libre administration. Le Conseil constitutionnel a toutefois jugé incertaine la portée normative de la libre administration. Je ne crois donc pas à l'existence d'un seuil qui déclencherait une censure du Conseil constitutionnel, à moins qu'il ne change de cap, sachant qu'une révision constitutionnelle n'est pas à l'ordre du jour.

Il est ici question de budgets, de compétences et de ressources qui s'additionnent ou se soustraient. Or le Conseil constitutionnel a-t-il déjà consenti à un effort de comptabilisation ? Quand il lui arrive de chercher des informations, il s'adresse au secrétariat général du gouvernement, ou au ministère de l'Économie. Il ne procède donc pas de manière objective. À plusieurs reprises, il a été saisi pour des baisses de ressources fiscales ou des compensations insuffisantes. De fait, la réduction des ressources fiscales est censée ne pas dépasser 2 % des recettes réelles de fonctionnement. Seulement, le Conseil constitutionnel ne tient pas compte du cumul des baisses au fil du temps. Il ne s'est pas doté de moyens pour évaluer les incidences du transfert de compétences et, partant, se prononcer sur une éventuelle dénaturation du principe de libre administration des collectivités.

La suppression de la vignette automobile a entraîné une réduction de 22 % des recettes fiscales des régions, soit 2 % des recettes réelles. Ce pourcentage a été considéré comme admissible, car il n'a pas été tenu compte des réductions antérieures. La libre administration n'est soumise qu'à un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation, à la différence de la liberté d'entreprendre, désormais soumise à un contrôle de proportionnalité. Pour que la jurisprudence du Conseil constitutionnel évolue, une réforme de la Constitution serait nécessaire. À défaut, il faudrait que le Conseil prenne conscience de ses responsabilités.

M. Aurélien Baudu. - Le Conseil constitutionnel n'a pas varié dans sa jurisprudence depuis 1991. La remarque vaut aussi pour le Conseil d'État. Dans sa jurisprudence du 4 avril 2012 impliquant la communauté de communes du pays de Cunlhat, il s'appuie sur une interprétation similaire à celle du Conseil constitutionnel. La liste des dispositions ne constituant pas une atteinte au principe de libre administration des collectivités s'avère bien plus longue que celle des dispositions constituant une telle atteinte. De plus, depuis la jurisprudence du 27 décembre 2019 sur la loi de finances pour 2020, aucune exigence constitutionnelle n'impose de compenser la suppression ou la réduction d'une recette fiscale.

M. Xavier Cabannes. - Le Conseil constitutionnel n'a jamais délimité de seuil au-delà duquel la suppression de ressources fiscales remettrait en cause le principe de libre administration des collectivités, car il prend ses décisions au fur et à mesure qu'il est saisi. Quoi qu'il en soit, son rôle n'est pas de censurer une disposition législative au prétexte qu'elle fait suite à des suppressions de recettes fiscales antérieures.

Mme Géraldine Chavrier. - Le principe de libre administration implique qu'au-delà d'un certain seuil, les ressources des collectivités ne leur suffisent plus à faire face à leurs charges. Autrement dit, le Conseil constitutionnel est tenu de juger si la dernière goutte d'eau fait ou non déborder le vase. Il dispose d'une large marge d'appréciation.

Aucun reproche ne méritait de lui être adressé jusqu'en 2003, car il ne disposait pas d'outils adaptés. Il n'en va plus ainsi depuis la révision de 2003. Tous - du pouvoir exécutif jusqu'à la direction générale de la comptabilité publique - s'accordent sur le fait que l'autonomie financière des collectivités passe par des ressources propres impliquant la maîtrise de taux d'imposition.

M. Xavier Cabannes. - Le Conseil constitutionnel apprécie l'autonomie financière des collectivités à un instant donné. Il évalue les conséquences de la dernière réforme fiscale en date sur la libre administration des collectivités territoriales sans se préoccuper de ce qu'il s'est passé auparavant.

Mme Marie-Claude Varaillas. - La libre administration des départements est aujourd'hui un vain mot, un concept vidé de sa substance.

Mme Géraldine Chavrier. - Certains courent à la faillite. Pour autant, formellement, ils disposent de 76 % d'autonomie financière.

Mme Marie-Claude Varaillas. - Les départements ne disposent plus que de recettes aléatoires et des dotations que l'État daigne leur attribuer.

M. Thomas Dossus, rapporteur. - Le fait qu'une collectivité dispose ou non de ressources propres est étranger à la question de son autonomie financière. Pour juger de celle-ci, seule est prise en compte la proportionnalité de ses ressources avec les compétences qu'elle doit assumer.

M. Aurélien Baudu. - Il appartient au législateur organique d'établir les conditions selon lesquelles les ressources propres des collectivités représentent une part déterminante de leurs ressources. Le regard critique porté par la doctrine sur la loi organique du 29 juillet 2004 fait consensus. La définition des ressources propres apparaît beaucoup trop large. Ces ressources n'incluent pas uniquement le produit des impositions de toute nature, mais aussi la fiscalité transférée, comme la TVA au taux déterminé par l'État ou la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), dont les collectivités ne sont autorisées à moduler le taux que très marginalement. Ceci explique que les ratios d'autonomie financière des collectivités ne cessent de progresser. Celui des régions est même passé de 40 % à 70 % en l'espace de vingt ans, alors que leur pouvoir fiscal s'est considérablement réduit. La perte du pouvoir de fixation du taux des impositions de toute nature ne constitue donc pas un grief opérant selon le Conseil constitutionnel.

M. Xavier Cabannes. - À mon sens, le problème est insoluble. Si demain, le législateur organique décidait de modifier la définition des ressources propres, pour en exclure les impositions partagées, qu'adviendrait-il ? Une révision du système fiscal s'imposerait. La restitution à l'État des impositions partagées obligerait à rééquilibrer la balance par la création d'une multitude d'impôts générant 70 milliards d'euros de recettes locales. Pareille mesure serait politiquement inenvisageable. La seule solution consisterait à ne plus se concentrer sur la part des ressources propres des collectivités dans leurs recettes, mais à s'assurer, d'abord, que ces recettes, peu importe leur provenance, leur permettent de faire face à leurs dépenses et, ensuite, qu'elles leur laissent une marge de manoeuvre pour exercer leur pouvoir de libre administration. Je vous renvoie à la thèse de doctorat de Matthieu Rouveyre, intitulée Contribution à une redéfinition de l'autonomie financière des collectivités territoriales.

Mme Géraldine Chavrier. - Je ne crois plus du tout au principe d'autonomie financière. Il est trop tard pour mettre en place des impôts locaux. Il ne reste plus qu'à mener un travail sur la qualité de la compensation. Les collectivités auraient intérêt à disposer de ressources stables et prévisibles. Il serait opportun que les transferts donnent lieu à des compensations glissantes, avec une évaluation, tous les sept ans, du manque à gagner dans le cadre d'une clause de revoyure.

Mme Isabelle Briquet. - Ne vaudrait-il pas mieux tenir compte des charges des collectivités que de leurs dépenses proprement dites ?

La situation des départements apparaît critique. Une catastrophe se profile dès 2025. Faut-il attendre que les collectivités se retrouvent sous tutelle pour que le Conseil constitutionnel réagisse ?

M. Xavier Cabannes. - Vous avez raison : il pourrait être opportun de s'attacher à l'autonomie des collectivités en matière de dépenses ou au niveau de leurs charges.

M. Aurélien Baudu. - La question du seuil d'autonomie financière au-delà duquel le Conseil constitutionnel devrait censurer une loi en se fondant sur le principe de libre administration se posait déjà à la veille de la révision constitutionnelle de 2003.

Mme Géraldine Chavrier. - Je ne m'attends pas à ce que le Conseil constitutionnel soit un jour en mesure de censurer une loi sur le fondement du principe d'autonomie financière des collectivités territoriales. En revanche, il pourrait être saisi pour violation du principe de libre administration, dans l'éventualité où une loi restreindrait à l'excès les ressources des collectivités.

Si le Conseil constitutionnel n'avait pas estimé, à tort, que les lois successives ne restreignaient pas les ressources des collectivités au point d'entraver leur libre administration, nous n'en serions pas arrivés à la situation actuelle, où les départements se retrouvent bel et bien entravés. Il subsiste un espoir : celui que le Conseil constitutionnel combine ses différentes jurisprudences. Selon certaines, la libre administration des départements implique qu'ils exercent des compétences effectives. Or, pour beaucoup, celles-ci se limitent désormais aux dépenses sociales, par manque de ressources.

M. Jean-Raymond Hugonet. - Les articles de la Constitution que vous citez comportent tous la formule : « dans les conditions prévues par la loi ». Je comprends dès lors votre défaitisme. J'ai le sentiment que toutes les forces politiques partagent une même volonté d'en finir avec les communes et les départements, privés de la moindre dynamique fiscale. Les communes, pour leur part, ne peuvent plus s'appuyer que sur la taxe foncière. Quant aux intercommunalités, elles ne sont pas considérées comme des collectivités de plein exercice - d'où leur lutte pour le devenir. Le Conseil constitutionnel prend des décisions essentiellement politiques, bafouant l'esprit du constituant.

M. Christian Redon-Sarrazy. - Les dispositifs que vous évoquez, tels que l'instauration d'une clause de revoyure à sept ans, pourraient-ils absorber des chocs à venir comparables à la crise sanitaire, sachant que l'éventualité de tels chocs n'est malheureusement jamais prise en compte ?

Mme Géraldine Chavrier. - Le Conseil constitutionnel adopte une position politique, non pas au sens de la politique partisane, mais dans la mesure où, lorsque la majorité de ses membres se sont montrés favorables à une censure, son président en a interpellé l'un d'eux en sa qualité d'ancien ministre d'État. Ce Conseil doit se rendre compte que la situation a changé par rapport à 1982, depuis la révision constitutionnelle de mars 2003.

L'article 34 de la Constitution dispose que les lois organiques peuvent compléter la liste des compétences des collectivités territoriales. Il convient d'adopter une loi organique qui complète le principe de libre administration des collectivités. Une telle loi préciserait bon nombre de points relevant d'un accord de la représentation nationale sur ce que doit être la décentralisation. Les seules mesures de sauvegarde de l'autonomie financière des collectivités consistent en des fonds d'urgence, lorsque ces collectivités ne parviennent pas à l'équilibre budgétaire.

Mme Marie-Claude Varaillas. - L'État ne rembourse aux départements que 40 % des allocations individuelles de solidarité (AIS). Est-il normal qu'une collectivité porte à elle seule des charges relevant de la solidarité nationale ? À titre d'illustration, en Dordogne, le nombre d'enfants dont s'occupe l'aide sociale à l'enfance (ASE) et passé de 700 à 1 700 en dix ans, sachant que chacun coûte 60 000 euros par an.

M. Aurélien Baudu. - Nous en revenons au problème évoqué lors du colloque sur les transferts de compétences : celui de la compensation à date. Il est souvent reproché à l'État de ne transférer aux collectivités que des compétences auxquelles il consacrait des sommes notoirement insuffisantes. Aussi les collectivités font-elles face à des difficultés lorsqu'elles veulent recruter des agents pour exercer pleinement ces compétences.

Je suis plus réservé en ce qui concerne les compensations glissantes. Je ne pense pas que nous y parviendrons à droit constant. L'article 34 de la Constitution a été remanié : y est désormais inscrit un objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques. La jurisprudence du Conseil constitutionnel a évolué sur ce point, depuis 2018. Celui-ci examinera désormais les évolutions normatives au regard de cet objectif.

M. Xavier Cabannes. -Le constat d'un problème vis-à-vis de l'autonomie financière des collectivités dépasse les clivages politiques. Il revient au Parlement de s'en saisir. Il suffirait d'une réforme en profondeur de la loi organique de juillet 2004. Il me semble paradoxal que le Parlement se demande comment le Conseil constitutionnel pourra venir au secours des collectivités.

Mme Géraldine Chavrier. - La loi organique de 2004, en son état actuel, ne nous est d'aucune aide. Le taux d'autonomie financière des collectivités locales se monte déjà à 76 %. Il faudrait changer la notion de ressources propres, mais cela n'arrivera pas. Il ne reste plus qu'à contraindre l'État dans ses transferts et compensations. La charte européenne de l'autonomie locale présente la diversité des financements des collectivités comme une garantie de leur indépendance. Une solution consisterait, comme je le mentionnais, à adopter une loi organique relative à la libre administration des collectivités.

Cette réunion a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 18 h 30.

Mercredi 9 avril 2025

- Présidence de M. Olivier Henno, président -

La réunion est ouverte à 16 h 30.

Audition de M. Boris Ravignon, président d'Ardenne Métropole, maire de Charleville-Mézières et vice-président chargé des finances d'Intercommunalités de France

M. Olivier Henno, président. - Nous poursuivons nos travaux avec l'audition de Boris Ravignon, président d'Ardenne Métropole, maire de Charleville-Mézières et vice-président chargé des finances d'Intercommunalités de France.

Le Sénat a décidé de la constitution d'une commission d'enquête dont l'objet est de travailler sur la libre administration des collectivités territoriales ainsi que sur le financement de services publics de proximité et de la transition écologique. Ce type de formation entraîne un certain formalisme juridique.

Avant de vous donner la parole, je dois vous rappeler qu'un faux témoignage devant notre commission d'enquête est passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal. Je précise également qu'il vous appartient, le cas échéant, d'indiquer vos éventuels liens d'intérêts ou conflits d'intérêts en relation avec l'objet de la commission d'enquête.

Je vous invite à prêter serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, en levant la main droite et en disant : « Je le jure ».

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Boris Ravignon prête serment.

M. Thomas Dossus, rapporteur. - Cette commission d'enquête aborde une thématique qui se trouve au coeur des travaux du Sénat ; elle est inspirée par les nombreux débats budgétaires qui ont eu lieu tant cette année que l'année dernière à propos de l'amputation des ressources fiscales propres des collectivités territoriales. Cette situation engendre de l'inquiétude quant au respect du principe de libre administration des collectivités et se heurte à leur besoin d'investissement massif dans la transition écologique. Vous avez remis un rapport sur le millefeuille territorial qui devrait nous apporter un éclairage particulier sur notre sujet.

M. Boris Ravignon, vice-président chargé des finances d'Intercommunalités de France. - Je vous remercie de permettre à Intercommunalités de France de faire valoir son point de vue sur ce sujet.

L'histoire récente de la fiscalité locale est assez mouvementée, même si les collectivités n'ont pas voulu ces mouvements, mais les ont largement subis. On peut citer trois évolutions très significatives : la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales, l'abaissement d'un quart du taux de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et la réforme des bases « usines » des impôts fonciers des entreprises. À ce propos, on peut partager le souhait de moins taxer l'industrie, qui est exposée à la concurrence internationale, mais cela crée un manque à gagner pour les collectivités.

Même si ces réformes ont été compensées, il en résulte un bouleversement considérable d'un montant de 38,5 milliards d'euros en 2023, selon le calcul de la Cour des comptes. C'est tout sauf un petit sujet !

Cela emporte des conséquences qui nous préoccupent, à Intercommunalités de France. La suppression de la taxe d'habitation pose la question du lien entre la citoyenneté et le fait d'être contribuable. Ne sont plus contribuables que les propriétaires, et non une majorité des résidents, comme auparavant. Nous sommes passés de 85 % d'assujettis - en tenant compte des exonérations - à 60 %, soit un quart de contribuables en moins. Ceux-ci peuvent se demander s'il y a des limites à ce qu'ils peuvent demander à la collectivité, puisqu'ils n'y contribuent pas. Même si l'on ne rencontre pas ce phénomène sur le terrain, cet étirement du lien « je réside, je paye des impôts locaux » est regrettable.

Nous avons également regretté les modalités de compensation : la descente vers les communes de la taxe foncière des départements se fait au prix d'un coefficient correcteur extrêmement complexe qui aboutit dans la plupart des cas à prélever des sommes sur les zones rurales pour les renvoyer vers les zones urbaines, ce qui est discutable. Il n'y a pas eu de perte financière, mais ces modalités ont des conséquences négatives.

Sur la fiscalité économique, je serai plus prudent, parce qu'au sein d'Intercommunalités de France, nous avons des positions différentes selon que l'on vienne d'un territoire dynamique ou non. Au regard de la situation de ma collectivité, je ne regretterai pas la CVAE, dont le rendement, dans mon territoire en difficulté, était inférieur en 2022 à ce qu'il était en 2014. De surcroît, c'était un impôt dont le produit était très difficile à anticiper, avec des mouvements assez erratiques : on peut avoir une très bonne année économique nationalement, et même localement, et une CVAE qui baisse. Son remplacement par une fraction de TVA, dont la dynamique paraissait plus régulière dans le temps si on met de côté l'année 2025, pouvait être vu positivement. Cela a néanmoins suscité un avis majoritairement défavorable au sein d'Intercommunalités de France, sauf pour les territoires les plus en difficulté.

La réforme affectant les bases de la taxe foncière des entreprises a entraîné une compensation figée qui, sans revalorisation, crée un manque à gagner au niveau des intercommunalités, même s'il n'y a pas eu de réduction de recettes.

L'autonomie fiscale n'en est pas moins touchée. Les réformes de ces dernières années n'ont pas impacté le seul bloc communal, mais également les autres niveaux.

Le sens de l'autonomie fiscale réside dans la possibilité de disposer d'un pouvoir de taux. Les dépenses pour favoriser l'implantation d'entreprises ou la construction de logements généraient une forme de retour par la fiscalité. Avec une fraction de TVA, la situation est très différente, car le montant est calculé à un instant t qui dépend de paramètres totalement extérieurs. Nous n'avons la main ni sur la base ni sur le taux.

L'autonomie fiscale s'est donc réduite pour les intercommunalités. Elle demeure importante pour les communes. Elle a quasiment disparu pour les départements et les régions. Je fais le lien avec le rapport sur le coût du millefeuille administratif que j'ai remis au Gouvernement : cela pose une vraie difficulté aux départements. Longtemps, ils parvenaient, grâce à cette autonomie, à prendre en charge le différentiel entre l'augmentation des charges sociales et l'absence de dynamisme de leurs recettes. Cette disparition les place dans une situation difficile.

M. Thomas Dossus, rapporteur. - Quel peut être le rôle des intercommunalités à un moment où le bloc communal, tributaire de décisions budgétaires qui le contraignent, doit investir dans la transition écologique ? Lors d'une précédente audition, nous nous demandions qui pourrait piloter les différentes stratégies de transition qui sont souvent verticales et descendantes. Certains investissements nécessitent une forme de mutualisation. L'échelon intercommunal est-il le plus pertinent ?

M. Boris Ravignon. - Nous le pensons, parce qu'un certain nombre de responsabilités et de compétences sont effectivement placées à ce niveau-là : la gestion des déchets dépend des intercommunalités, sinon de syndicats qui les regroupent ; les communautés d'agglomérations, mais aussi les communautés de communes qui ont choisi cette compétence sont autorités organisatrices de la mobilité (AOM) en ce qui concerne la mobilité urbaine ou périurbaine ; les compétences « eau » et « assainissement » ont été transférées aux intercommunalités, même si, dernièrement, la dernière étape de ce transfert a été suspendue s'agissant des communautés de communes - nous espérons qu'il ne s'agit que d'une suspension.

C'est aussi le cas de l'habitat : à travers des outils un peu plus anciens comme les opérations programmées d'amélioration de l'habitat (Opah), ou, de plus en plus, du cadre proposé par l'État, le service public de la rénovation de l'habitat, le SPRH, les intercommunalités constituent l'échelon de premier recours des citoyens qui se tournent vers les pouvoirs publics, pour être renseignés sur les moyens d'opérer des rénovations. Nous les orientons vers MaPrimeRénov' et vers les outils locaux ou régionaux lorsqu'ils existent.

Les deux transitions énergétique et écologique sont largement portées au quotidien par les intercommunalités de France.

La question des investissements est sensible. La mutualisation de l'ingénierie nous permet d'accompagner les communes pour l'isolation de leurs bâtiments et des logements dont elles peuvent disposer. Une ingénierie est toujours proposée par les départements, qui ont remplacé celle de l'État, mais dans les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) plus intégrés, une ingénierie intercommunale s'est mise en place. C'est un des axes importants pour apaiser les tensions : les intercommunalités démontrent leur utilité en recrutant des techniciens et des ingénieurs dont une commune ne pouvait pas recruter une fraction.

Sur la question du financement...

M. Thomas Dossus, rapporteur. - ...et de la prévisibilité.

M. Boris Ravignon. - L'évaluation des investissements à réaliser diffère selon qu'on se réfère à l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE) ou au rapport de l'inspection générale des finances (IGF) : ils se chiffreraient entre 12 milliards et 20 milliards d'euros par an. C'est considérable et cela vient s'ajouter au reste. Je pense - sans discuter bien sûr de sa pertinence - à la problématique de l'accessibilité, depuis la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005 et ses prolongements. Il y a des agendas d'accessibilité programmée (Adap) partout, qui sont autant d'épées de Damoclès, car ils ne sont que partiellement mis en oeuvre : cela crée une dette morale à l'égard d'engagements nationaux sur le handicap.

S'y ajoutent les investissements verts. Comment y faire face ? Cela nous conduit à souhaiter la plus grande visibilité possible sur nos ressources : c'est fondamental pour investir.

Même si l'on peut partager la préoccupation face à l'urgence financière, supprimer pour une année la dynamique de TVA sur laquelle on pouvait légitimement compter - même si elle est rétablie ensuite - procède d'une méthode par à-coups qui n'est pas souhaitable.

J'expose aussi dans mon rapport que notre fonctionnement collectif, en l'absence de clarté sur les responsabilités des uns et des autres, suscite des coûts de coordination élevés.

M. Thomas Dossus, rapporteur. - Les avez-vous chiffrés ?

M. Boris Ravignon. - Pour les collectivités, nous les avons chiffrés à au moins 6 milliards d'euros. Mais nous n'avons pas pu aller regarder les interactions au sein du bloc communal ni avec tous les opérateurs de l'État. Nous nous sommes concentrés sur les services de l'État.

Or les interactions avec les opérateurs peuvent être nombreuses : j'évoquais tout à l'heure la politique de rénovation de l'habitat, qui provoque des interactions avec l'Agence nationale de l'habitat (Anah), l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), ou l'Agence de la transition écologique (Ademe). Dans d'autres cas, c'est avec l'Office français de la biodiversité (OFB) ou avec les agences de l'eau.

Il est impossible de supprimer toutes les interactions. Des coûts de coordination subsisteront, mais une clarification du rôle des acteurs devrait nous permettre de dégager des gains d'efficience

Toutes les économies en fonctionnement sont bonnes à prendre. Il y a peut-être des modalités d'organisation, des corpus de normes, sur lesquels il faut se réinterroger.

On peut s'interroger sur le traitement comptable et sur le portage des investissements de transition énergétique. Ils permettent en effet un amortissement et un taux de rendement interne plutôt bons. C'est donc une dette différente des autres, puisqu'elle permet de générer des économies, même en ayant des prévisions conservatrices sur le coût de l'énergie.

M. Thomas Dossus, rapporteur. - Cela n'est pas assez pris en compte dans la comptabilité ?

M. Boris Ravignon. - Ce n'est pas du tout pris en compte : tous les investissements sont mélangés. Quand on construit des pistes cyclables, c'est utile pour la décarbonation des mobilités, mais le rendement est faible, voire négatif pour les finances locales : moins de voitures en ville, cela représente moins de recettes de fonctionnement. En revanche, lorsque vous rénovez l'éclairage public ou isolez votre parc immobilier, il y a un rendement. Je trouve injuste que cette dette soit traitée comme une autre.

On observe aussi un phénomène qui, à mon avis, est appelé à s'amplifier : la création de structures pour déconsolider une partie de la dette liée à la transition. Si vous créez une société publique locale (SPL) ou une société d'économie mixte (SEM) pour gérer des investissements, la dette afférente ne sera pas consolidée dans le budget de la collectivité. Même si cela me paraît pertinent dans un certain nombre de cas, il faudrait éviter que cela constitue une dette verte cachée qui se développe de manière anarchique.

Mme Corinne Féret. - Les transferts de compétences au fil des ans, avec parfois des allers-retours, ont eu des conséquences non seulement organisationnelles, mais aussi budgétaires. Selon vous, ont-ils accru la perte d'autonomie fiscale ou est-on resté à une situation identique ? La compensation de l'État est insuffisante, avec un manque à gagner qui s'accroît année après année. Ces transferts ont-ils néanmoins donné un peu d'air, si j'ose dire, aux intercommunalités ?

M. Olivier Henno, président. - Lorsque la loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dite loi Chevènement, et la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, dite loi Voynet, ont été votées en 1999, il était question de créer des emplois dans les intercommunalités en les supprimant dans les communes ; mais je n'ai pas vu beaucoup de ces suppressions, même en étant maire d'une commune de 20 000 habitants pendant vingt ans.

L'autonomie fiscale me semble difficile à garantir aux quatre niveaux de collectivités. Quel niveau privilégiez-vous ? Je n'imagine pas qu'il puisse y avoir quatre impôts différents... Comment envisagez-vous les choses, dans l'idéal ?

M. Boris Ravignon. - La prise de compétence par une intercommunalité est financée sur le papier : les communes qui transfèrent une compétence doivent aussi transférer les ressources qu'elles y consacraient.

Cela peut parfois être plus compliqué. Prenons l'exemple presque anecdotique d'une fourrière intercommunale. L'État ne force pas les communes à respecter la réglementation : avant le transfert de cette compétence, elles n'y consacraient pas un euro. Un transfert a donc plutôt tendance à peser sur le budget de l'intercommunalité qu'à le favoriser. Dans les commissions locales d'évaluation des charges transférées (CLECT), les maires sont vigilants à ce qu'on ne transfère pas plus qu'il ne le faut.

Le transfert d'un stade comme le très beau stade de Sedan, par exemple - 23 500 places pour un club qui joue aujourd'hui en Régional 2 -, représente un coût certain. C'est incontestablement un équipement d'intérêt communautaire, mais lors du transfert, nous avons demandé à la commune de Sedan de nous verser au moins ce qu'elle y consacrait, et même un peu plus, pour tenir compte du fait qu'il y avait des travaux à effectuer.

Il y a des compétences imposées par la loi, comme la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi). L'État a trouvé une solution : les collectivités peuvent lever une taxe, ce que beaucoup d'entre elles ont fini par faire. À Ardenne Métropole, nous avons mis cinq ou six ans à nous y résoudre. Je ne crois donc pas que les transferts aient enrichi les intercommunalités. On se passerait volontiers du cadeau consistant à dire : « Vous pouvez lever une taxe de plus. »

La Cour des comptes a critiqué les intercommunalités à propos de la compétence développement économique, mais il y avait un défaut à la base. Prenez une communauté de communes regroupant quarante communes rurales : aucune d'entre elles n'y consacrait aucun moyen. Transférer à l'intercommunalité le développement économique implique la création d'au moins un ou deux postes. On passe donc de quarante communes à zéro poste à une communauté de communes à un ou deux postes. Multipliez cela par toute la série de compétences pour lesquelles les intercommunalités ont essayé de faire leur travail !

C'était cela l'idée de départ : ces compétences parfois un peu fictives que nous ne pouvons pas exercer parce que nous sommes trop petits ou trop pauvres, mettons-les en commun pour les exercer. Il n'y a donc pas d'optimisation.

En revanche, les intercommunalités permettent la mutualisation d'un certain nombre de fonctions supports. À Ardenne Métropole, les services des ressources humaines, des finances, des systèmes d'information, de la commande publique, des bâtiments et - dernier en date - de l'énergie ont été mutualisés.

Ces mutualisations nous ont permis de réaliser quelques gains et de recruter plus facilement des compétences rares. Par exemple, il est plus facile de recruter un ingénieur réseau dans un service qui travaille pour une intercommunalité que dans une petite structure au sein d'une seule commune.

On nous accuse souvent de créer trop facilement des emplois au niveau des collectivités. Mais il y a peut-être des politiques qui ne sont pas exercées de manière satisfaisante. Par exemple, nous avons fortement développé l'emploi local dans le domaine de la sécurité, avec la croissance des polices municipales. Mais il faudrait se poser la question de savoir pourquoi le bloc communal a eu besoin de créer autant de postes de policiers municipaux ou de policiers intercommunaux pour répondre à une situation qui, à mon avis, était difficile sur le plan démocratique à l'échelon local.

Pour revenir sur l'autonomie fiscale, il faut rappeler qu'il y avait initialement quatre vieilles taxes et que le découpage en lanières n'était pas optimal. Rappelez-vous, les taxes d'habitation étaient perçues à trois niveaux, chacun votant un bout du taux. Le système était difficile à comprendre pour les contribuables. Nous sommes sortis de cette situation et je ne sais pas s'il faut la regretter. Il me semble qu'il faudrait recréer une autonomie fiscale en redonnant un pouvoir de taux aux départements et aux régions. C'est une idée qui figurait dans le rapport remis au Président de la République par Éric Woerth en juin 2024 et que je trouve intéressante.

En effet, il semble difficile de recréer des impôts dans notre pays tant le taux de prélèvement est élevé. En revanche, on pourrait redonner un pouvoir de taux aux collectivités en découpant une partie de nos impôts nationaux. C'est d'ailleurs ce que l'on a commencé à faire en 2025 pour les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) en ce qui concerne les départements et pour le versement mobilité en ce qui concerne les régions.

Si l'on réfléchit de manière structurelle, il n'y a rien d'incohérent à ce que les départements puissent faire bouger le curseur sur un point de contribution sociale généralisée (CSG) qui serait à leur main, en l'assumant vis-à-vis des contribuables. Cela correspondrait à la finalité sociale de la CSG et à la logique du financement des dépenses sociales.

On pourrait également imaginer qu'une partie de l'impôt sur les sociétés (IS)soit décidé au niveau régional. En effet, cela correspondrait aux compétences économiques des régions, qui pourraient ainsi avoir des ressources dont elles assumeraient la responsabilité vis-à-vis des entreprises contribuables et grâce auxquelles elles pourraient financer des politiques volontaires et partagées dans les secteurs du sport, de la culture et de la jeunesse. Même si la loi NOTRe de 2015 a retiré la clause de compétence générale aux départements et aux régions, elle ne leur a pas retiré la possibilité d'avoir des politiques partagées.

M. Christian Redon-Sarrazy. - En ce qui concerne l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) dont les modalités sont en débat, quelle position défendez-vous ?

Une des compétences majeures des intercommunalités est le développement économique. Dans cette période où l'État sera sans doute conduit à territorialiser sa politique industrielle, croyez-vous que les intercommunalités auront les moyens de répondre à cet enjeu ? Et que devraient-elles faire pour assumer leur rôle de fer de lance en la matière ?

M. Boris Ravignon. - L'Ifer a été créée lors de la réforme de la taxe professionnelle, comme un élément de compensation de la suppression de cette taxe. C'est un élément de la contribution économique territoriale (CET). Comme nous avons pu le constater ces dernières années, il n'y a pas grand-chose d'intangible en matière de fiscalité : tout peut être revu et modifié. L'idée d'avoir une taxation sur des équipements de cette nature a remis en question certaines impositions antérieures comme la taxe sur les pylônes, mais n'a pas eu d'effet perturbateur car les activités soumises à une concurrence internationale sont restées peu concernées. Il s'agissait donc d'une base utile pour procurer des ressources aux communes et intercommunalités, compensant ainsi la suppression de la taxe professionnelle.

Le plus souvent, l'Ifer est évoquée à l'échelon local dans le cadre des projets éoliens, car la question du partage est un enjeu important dans la mesure où cela peut générer une ressource considérable dans certains territoires. La perspective de cette compensation a permis d'apaiser les débats sur l'implantation d'éoliennes, qui auraient été encore plus houleux sans cela.

M. Christian Redon-Sarrazy. - Les opérateurs télécoms semblent vouloir rediscuter la distribution, voir les bases de l'Ifer. Vous n'avez pas d'inquiétude à ce sujet ?

M. Boris Ravignon. - Il n'est pas surprenant que ceux qui sont assujettis à cette taxe cherchent à l'éluder le plus possible... Nous avons un édifice qui menace ruine, de sorte qu'il semble difficile d'en saper un peu plus les fondements. L'Ifer pèse sur l'ensemble des opérateurs télécoms en France et cela n'empêche pas, manifestement, la concurrence entre eux. Je ne sais pas s'il faut s'en plaindre.

Avons-nous les moyens de réussir notre réindustrialisation ? Pour répondre à cette vaste question, nous devons réfléchir aux éléments dont nous avons besoin.

Nous avons besoin d'espace, autrement dit la sobriété foncière est un enjeu.

Nous avons besoin de compétences, notamment de techniciens et d'ingénieurs, car les entreprises peinent parfois à trouver ceux dont elles ont besoin. Si les usines devaient prendre de l'ampleur, il faudrait dès aujourd'hui savoir si nous pourrions répondre aux besoins de main-d'oeuvre qualifiée.

Nous devons également nous demander si nous investissons suffisamment dans la recherche et développement (R&D), notamment dans le secteur privé. En effet, notre R&D reste à un niveau plutôt faible et dépend surtout du secteur public, malgré la mise en place de dispositifs comme le crédit d'impôt recherche (CIR). Nous soutenons l'investissement privé, mais il faudrait sans doute aussi mieux accompagner l'innovation.

Tous ces sujets sont traités dans le cadre de politiques nationales, qui peuvent éventuellement être soutenues et travaillées à l'échelon local avec plus ou moins d'intensité, mais le couple formé par l'EPCI et la région ne pourra pas agir seul ; il faut que l'État s'investisse.

En ce qui concerne l'objectif de zéro artificialisation nette (ZAN), nous travaillons à l'échelle des EPCI sur la disponibilité foncière et la reconversion de friches. Dans le Grand Est, nous avons un potentiel de friches à reconvertir qui est assez considérable. Si nous nous en donnons les moyens, les questions de sobriété foncière ne seront pas premières.

Quant à la formation, le sujet implique non seulement les EPCI et les régions, mais aussi l'État.

M. Olivier Henno, président. - Nous vous remercions de ces échanges éclairants.

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 17 h 25.

Audition de M. François de Mazières, Maire de Versailles, Président de la communauté d'agglomération Versailles Grand Parc et membre de France Urbaine (sera publié ultérieurement)

Ce point de l'ordre du jour sera publié ultérieurement.

Cette réunion a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 18 h 30.