COMMISSION MIXTE PARITAIRE

Lundi 10 février 2025

- Présidence de Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente -

La réunion est ouverte à 10 heures.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'urgence pour Mayotte

Mesdames, Messieurs,

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'urgence pour Mayotte s'est réunie à l'Assemblée nationale le lundi 10 février 2025.

Elle a procédé à la désignation de son bureau qui a été ainsi constitué :

- Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente,

- Mme Dominique Estrosi Sassone, sénateur, vice-présidente.

Elle a également désigné :

- Mme Estelle Youssouffa, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale,

- Mme Micheline Jacques, sénateur, rapporteur pour le Sénat.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Nous sommes réunis aujourd'hui, à la demande du Gouvernement et conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, pour examiner, dans le cadre d'une commission mixte paritaire (CMP), les dispositions restant en discussion du projet de loi d'urgence pour Mayotte.

Je me réjouis de cette opportunité, qui me permet d'accueillir nos collègues sénateurs, conduits par la présidente Dominique Estrosi Sassone, pour la première CMP organisée à l'Assemblée nationale depuis mon élection à la présidence de la commission des affaires économiques.

Le projet de loi qui nous est soumis a été adopté, en première lecture, par l'Assemblée nationale le 22 janvier dernier, puis par le Sénat le 4 février. Même si nous sommes tous familiers de la procédure, je rappelle rapidement les règles organisant une commission mixte paritaire. Une CMP ne constitue pas une deuxième lecture mais une parenthèse dans la navette parlementaire. Notre base de discussion est à la fois le texte adopté par l'Assemblée nationale et celui voté par le Sénat. Un tableau comparatif du texte de chacune des assemblées vous a d'ailleurs été remis. Une CMP ne peut examiner que les dispositions restant en discussion après la lecture du texte dans chaque assemblée.

Le projet de loi comprenait vingt-deux articles lors de son dépôt initial. L'Assemblée nationale a ajouté vingt-cinq articles et en a supprimé deux. Le Sénat a réduit le nombre d'articles du projet de loi, puisqu'il n'a ajouté que quatre articles, a rétabli un article supprimé par l'Assemblée nationale et en a supprimé dix-huit. Par ailleurs, trois articles ont été votés conformes au Sénat et la suppression d'un article a été acceptée par les deux assemblées : la CMP n'est pas saisie de ces quatre articles, sur lesquels les deux assemblées sont déjà parvenues à une même position. La commission mixte paritaire portera donc sur les quarante-sept articles restant en discussion.

Il ne saurait y avoir d'accord partiel : la CMP a pour objet de parvenir à une même rédaction pour tous les articles restant en discussion. L'existence d'un désaccord persistant, même sur un seul article, conduirait à constater l'échec de la CMP. L'élaboration d'un texte par la CMP n'a de sens que si celui-ci est susceptible d'être adopté par les deux assemblées. Si des scrutins venaient à être organisés pendant notre réunion en cas de divergences non surmontées, les suppléants ne peuvent pas voter et, en cas d'égalité des voix, la proposition faite à la CMP est rejetée.

Sur le fond, le projet de loi qui nous est soumis vise à permettre une reconstruction accélérée de Mayotte, qui a été dévastée, le 14 décembre dernier, par le cyclone Chido. Ce cyclone a probablement fait plus d'une quarantaine de victimes et a presque tout détruit sur son passage. Nous pensons bien entendu à la population de Mayotte, si durement touchée.

En première lecture, l'Assemblée nationale, qui avait été saisie dans des délais très courts compte tenu de l'urgence, a souhaité renforcer l'association des acteurs locaux, notamment les communes, à cette reconstruction. Elle a voulu favoriser la participation des entreprises locales à cet effort et préserver le respect de certaines règles sécuritaires, environnementales et d'accessibilité des bâtiments au public, afin d'inscrire cette reconstruction dans la durée. Elle a aussi décidé que la réduction des délais d'instruction des autorisations d'urbanisme devait s'accompagner de garanties accrues en termes de publicité. L'Assemblée nationale a adopté des dispositifs visant à renforcer les mesures de soutien aux dons en faveur des associations à Mayotte. Elle a enfin voté des dispositions favorables à la population en matière d'impôts et de prélèvements sociaux.

De son côté, le Sénat a, entre autres, rétabli certains dispositifs du texte initial du Gouvernement, supprimé les demandes de rapport au Parlement votées par l'Assemblée nationale, préservé la protection des monuments historiques dans le cadre des procédures accélérées de démolition ou de construction temporaire, et instauré un crédit d'impôt afin de favoriser le financement de la reconstruction.

Mme Dominique Estrosi Sassone, sénateur, vice-présidente. - Après le cataclysme qui a frappé Mayotte, il était extrêmement important de faire aboutir le plus rapidement possible ce projet de loi d'urgence, qui vise à soutenir nos compatriotes mahorais et à accélérer la reconstruction. Je veux redire ici à nos collègues parlementaires de Mayotte toute notre solidarité dans cette épreuve. Je crois, très modestement, pouvoir comprendre en partie le drame subi et votre exigence vis-à-vis des pouvoirs publics. J'ai connu en effet un événement climatique extrêmement violent - quoique de moindre ampleur qu'à Mayotte - avec la tempête Alex, qui a causé vingt et un morts et près de 2 milliards d'euros de dégâts dans mon département des Alpes-Maritimes en octobre 2020.

La commission des affaires économiques du Sénat et celle de l'Assemblée nationale se rendront à Mayotte, respectivement à la fin du mois de mars et dans quelques jours, afin de préparer l'examen du projet de loi de programmation.

Même si quelques points de discussion subsistent, je ne doute pas que nous parvenions à un accord pour que le texte puisse entrer en vigueur dans les tout prochains jours. Je remercie très sincèrement le travail des quatre rapporteurs - notamment Mme la députée Estelle Youssouffa, qui a porté sur ses seules épaules le texte à l'Assemblée nationale. Au Sénat, la commission des affaires économiques a été saisie au fond et a désigné Mme Micheline Jacques comme rapporteur ; en outre, la commission des affaires sociales et celle des lois ont été saisies pour avis et ont désigné Mmes Christine Bonfanti-Dossat et Isabelle Florennes rapporteures pour avis. Elles ont dû examiner ce texte très technique dans des délais extrêmement contraints et elles n'ont pas ménagé leurs efforts pour parvenir à un texte opérationnel qui réponde aux besoins et aux attentes des Mahorais.

Comme de coutume, le Sénat s'est montré très à l'écoute du territoire. Je tiens à saluer le travail effectué par Micheline Jacques, par ailleurs présidente de la délégation sénatoriale aux outre-mer, qui a tenu à se rendre sur place, à la fin du mois de janvier, pour rencontrer les acteurs locaux et trouver des solutions adaptées aux problématiques mahoraises.

Ce projet de loi ne résoudra pas tout - ce n'est d'ailleurs pas son objet. Nous devons examiner un texte d'urgence, dont la technicité apparaît parfois en décalage avec les questions non résolues depuis de trop nombreuses années et le projet de refondation que nous souhaitons tous pour donner un autre avenir à l'archipel. À cette fin, le Gouvernement a annoncé le dépôt, dans les prochaines semaines, d'un projet de loi de programmation pour Mayotte. Il comprendra des mesures de plus long terme, dans tous les domaines. Je m'en félicite, car il est temps de prendre à bras-le-corps les difficultés qui entravent Mayotte depuis trop longtemps ; il est prévu que ce futur texte traite des questions régaliennes, notamment celle de l'immigration clandestine, et se penche sur le développement économique afin de lutter contre les inégalités sociales et l'habitat illégal.

Avant ce second temps parlementaire, nous devons nous rassembler pour que ce projet de loi d'urgence pour Mayotte apporte des premières réponses nécessaires et utiles.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Je vous remercie tout d'abord de m'avoir confié la charge de rapporteure de cette CMP qui, vous le comprendrez aisément, revêt pour moi une importance toute particulière. Je vous remercie également pour vos mots de compassion et solidarité, qui vont droit au coeur des parlementaires mahorais !

Le cyclone Chido puis la tempête Dikeledi ont laissé derrière eux des paysages de désolation. Ils ont plongé dans le dénuement et l'affliction des populations, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elles n'avaient pas besoin d'une telle épreuve. Il n'est pas un Mahorais qui n'ait à déplorer la perte de son toit, de son outil de travail ou de son emploi. Vivre à Mayotte, c'est être actuellement confronté à des coupures d'eau et d'électricité, à la vie chère causée par une inflation galopante, aux ruptures d'approvisionnement dans les magasins et - cela est pire que tout ! - à l'insécurité. En effet, les violences, les pillages et les caillassages ont repris ! Tous les habitants de Mayotte souffrent : riches, pauvres, Mahorais, Indiens, Hexagonaux et étrangers.

Face aux conséquences de la calamité naturelle la plus destructrice de l'histoire de France, il importe que la collectivité nationale relève, sans délai, le défi de la reconstruction par la mobilisation de ressources exceptionnelles. Mayotte est peut-être le cent-unième département français, mais il ne doit pas être considéré comme le dernier ! Nous faisons partie de la France depuis 1841. Voici près de cinquante ans, nous avons marqué notre ferme attachement à la République en refusant de lier notre destin à celui des Comores. Depuis, ce choix souverain, libre et éclairé, est battu en brèche par la politique d'une puissance étrangère qui instrumentalise la détresse de populations.

C'est aussi pour cela que, dans l'épreuve, il importe que les pouvoirs publics donnent à Mayotte les moyens de se relever et, à égalité de devoirs et de droits, de prendre toute sa place au sein de la communauté nationale.

Je l'ai dit à la tribune de l'Assemblée et je le répète ici : le projet de loi dont est saisi le Parlement ne règle en rien les problèmes structurels dans lesquels Mayotte se débat depuis tant d'années. Je pense naturellement ici à la lutte contre l'immigration clandestine, à l'indigence des infrastructures ou au désordre foncier persistant. Le projet de loi se présente comme un texte technique qui relève, au mieux, d'une gestion de crise. Aussi, je forme le voeu que le futur texte annoncé par le Gouvernement puisse véritablement engager les réformes structurelles indispensables, la première étant l'égalité sociale pour Mayotte.

En attendant, nécessité fait loi ! Au-delà des divergences d'opinions qui peuvent légitimement nous séparer quant aux voies et moyens, je crois qu'il existe, sur l'ensemble des bancs de nos assemblées, un consensus autour d'un constat : la détresse des Mahorais appelle des mesures pragmatiques et immédiatement applicables sur le terrain, ce qui suppose que le droit et les instruments de la puissance publique s'adaptent à des circonstances exceptionnelles.

C'est dans cet esprit constructif que j'ai cherché, avec chacune des rapporteurs du Sénat, les voies d'un accord en vue de l'adoption d'un texte identique. Je les remercie pour nos échanges, qui ont abouti à des compromis respectueux de nos positions et de nos sensibilités respectives, sans nuire à l'efficacité et à l'équilibre des dispositifs.

Dans les domaines du droit de l'urbanisme et de la reconstruction, nous avons inséré de nombreuses dérogations et adaptations. De profondes interrogations ont surgi au cours des débats : simplifier le droit de la construction ne conduira-t-il pas à revenir sur des exigences justifiées, par exemple en matière d'accessibilité pour les personnes handicapées ? Faut-il continuer à développer les constructions modulaires, que la loi exemptera des formalités d'urbanisme ? Nous avons cherché un équilibre entre, d'un côté, la nécessité de reconstruire vite, celle d'apporter des réponses d'urgence aux enjeux du territoire et, de l'autre, l'obligation de qualité que nous devons à nos compatriotes. Certaines avancées ont même été obtenues sur la gestion parcellaire de l'eau et l'équipement des écoles, dont la reconstruction sera à la charge de l'État. Nous attendons tous beaucoup du nouvel établissement public, qui aura la charge d'assurer la reconstruction et dont l'action sera scrutée par tous les Mahorais. L'État semble enfin prendre la mesure de la nécessité de lutter contre l'habitat informel ou les bidonvilles. Vous pouvez compter sur la vigilance des Mahorais pour que cette promesse ne reste pas lettre morte ! Par ailleurs, nous avons encadré les dérogations prévues pour faciliter et accélérer la reconstruction et la réfection des installations électriques et radioélectriques.

Dans le champ des procédures dérogatoires au droit de la commande publique, nous avons conforté les dispositions permettant aux opérateurs économiques locaux de prendre leur part à la reconstruction de l'île. Avec votre accord et sous réserve de l'adoption des conclusions de la CMP, la loi autorisera les acheteurs à réserver une part préférentielle des marchés publics aux très petites entreprises (TPE), aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux artisans mahorais. En réponse à des préoccupations que je sais partagées par plusieurs groupes, le texte encadrera les conditions du recours à la sous-traitance. Il donnera à l'État et aux collectivités territoriales les moyens de contrôler le coût de revient des prestations proposées par les entreprises.

Pour ce qui concerne le soutien apporté aux associations et aux organismes d'intérêt général opérant à Mayotte, le texte maintient les avancées obtenues au cours de nos délibérations respectives. Les ajustements qu'il comporte visent uniquement à ne pas alourdir inutilement les mécanismes par lesquels les collectivités territoriales et les particuliers peuvent manifester leur solidarité auprès des victimes de Chido.

Les négociations n'ont pas remis en cause l'excellent travail rédactionnel effectué par le Sénat sur plusieurs articles touchant aux mesures de soutien à la population et elles ne sont pas plus revenues sur la suppression des trop nombreuses demandes de rapport. Nous avons abouti à des compromis équilibrés sur plusieurs points, notamment sur la durée des mesures provisoires. Ainsi, la suspension de paiement des cotisations sociales, prévue à l'article 18, est prolongée jusqu'au 31 décembre 2025, sans qu'il soit besoin de décret comme le souhaitait l'Assemblée, mais uniquement pour les entreprises justifiant d'une baisse durable de leur chiffre d'affaires. Le texte commun de l'article 17 inscrit désormais dans la loi la suspension des procédures de recouvrement fiscal - ce qui justifie la suspension rétroactive des délais de prescription, qui était l'objet du projet de loi initial.

En somme, le texte que nous soumettons à la commission mixte paritaire offre les bases d'un accord pragmatique sur des mesures ciblées qui n'insultent pas l'avenir.

En prenant la parole, j'ai exprimé toutes les réserves que pouvait m'inspirer le projet de loi. Mais je fais le choix de la raison ! Les Mahorais ne comprendraient pas que nous différions l'adoption d'un texte qui peut leur permettre de retrouver la possibilité de se loger, de se nourrir, de travailler et de vivre normalement. C'est la raison pour laquelle j'invite la CMP à adopter le projet de loi moyennant les modifications que nous lui soumettons.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Je voudrais remercier Isabelle Florennes et Christine Bonfanti-Dossat pour le travail accompli ensemble, ainsi qu'Estelle Youssouffa qui a assumé seule la charge de ce texte complexe dans un climat de tension extrême.

Même si j'ai vécu l'expérience du cyclone Irma, personne ne peut prétendre connaître mieux Mayotte que les Mahorais. C'est pourquoi j'ai tenu à associer à mon travail nos deux collègues sénateurs, Salama Ramia et Saïd Omar Oili, et à me rendre sur place avant l'examen du texte au Sénat.

Mon fil rouge tout au long de l'examen du texte a été l'efficacité commandée par l'urgence, et le souci de ne pas hypothéquer la reconstruction à long terme. Voilà pourquoi nous avons donné, à l'article 4, le maximum de champ au Gouvernement pour adapter les normes de construction et accélérer la reconstruction d'urgence, en faisant le pari de la confiance, mais que dans le même temps, nous avons réduit la durée d'application des adaptations et modifications des règles techniques à deux ans.

Je partage avec nos collègues mahorais la volonté de travailler désormais à la reconstruction de long terme, sur le fondement d'une adaptation pragmatique des règles d'urbanisme et de construction aux contraintes et aux caractéristiques du territoire. Je mène, en ma qualité de présidente de la délégation sénatoriale aux outre-mer, ce combat depuis longtemps. Je plaide notamment en faveur de la création d'un marquage pour les régions ultrapériphériques (RUP). Dans ce domaine, nous venons d'obtenir une avancée à l'échelle de l'Union européenne. Nous aurons à travailler ensemble sur ces sujets dans un avenir proche, pour un résultat que j'espère une nouvelle fois fructueux.

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

Article 1er

Proposition commune de rédaction des rapporteurs ; proposition de rédaction de M. Saïd Omar Oili.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous avons abouti à une rédaction consensuelle de l'article 1er, relatif à la création d'un établissement public dédié à la reconstruction de Mayotte. La nouvelle rédaction proposée vise à rétablir le délai de trois mois pour l'ordonnance, à simplifier les modalités de représentation des collectivités territoriales et de consultation de différentes structures, et à annexer au rapport que l'établissement public devra rendre chaque année celui du Gouvernement, prévu à l'article 1er bis, afin d'en assurer la meilleure diffusion possible auprès de la population mahoraise.

M. Saïd Omar Oili, sénateur. - Nous souhaitons assurer une gouvernance partagée de l'établissement public entre l'État et les collectivités territoriales, dont le président de l'Association des maires de Mayotte ou son représentant. Le conseil d'administration élit son président parmi les membres représentant les collectivités ; celui-ci possède une voix prépondérante en cas de partage des voix au sein du conseil d'administration.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - L'avis est défavorable. Il n'est pas pensable que l'État n'ait pas une voix prépondérante alors qu'il sera le principal financeur de l'établissement public. Nous avons déjà beaucoup renforcé la place des collectivités territoriales dans la gouvernance de l'établissement public.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. J'ai le même avis que ma collègue rapporteure pour le Sénat, car nous sommes parvenues à un accord équilibré.

Mme Maud Petit, députée. La rédaction de l'alinéa 5 adoptée par l'Assemblée nationale disposait que l'établissement pouvait consulter les représentants des instances agricoles. Pourquoi cette mention a-t-elle disparu ? Ne pourrait-on pas la réintroduire ? Plusieurs acteurs de l'agriculture mahoraise avaient demandé l'introduction d'une disposition précisant la possibilité de consulter le secteur.

Mme Anchya Bamana, députée. Je soutiens la proposition de rédaction de nos collègues sénateurs, car il faut laisser une grande place aux acteurs locaux, notamment aux maires. J'ai été maire et je sais que les élus de Mayotte sont rarement écoutés.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Madame Petit, votre préoccupation est satisfaite : les acteurs agricoles seront consultés puisqu'ils entrent dans la catégorie des acteurs économiques, lesquels figurent dans le texte. Nous avons simplifié la rédaction, mais nous savons que les questions agricoles sont fondamentales pour la reconstruction. Il conviendra de veiller au respect des missions de l'établissement public, dont celles afférentes à son rôle de société d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer).

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Si nous dressons une liste, nous nous exposons au risque d'oublier un élément ; nous avons retenu un terme large afin d'englober tous les acteurs de la vie économique.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Madame Petit, votre préoccupation me semble en effet satisfaite, puisque la rédaction fait référence au Conseil économique, social et environnemental de Mayotte (Cesem), dont les acteurs agricoles sont parties prenantes.

La proposition de rédaction de M. Saïd Omar Oili est rejetée.

La proposition de rédaction des rapporteurs est adoptée.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 1er bis

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 1er bis dispose que le Gouvernement remet chaque année un rapport au Parlement sur la reconstruction. De nombreuses demandes de rapport ont été acceptées par l'Assemblée nationale, mais le Sénat a opportunément suggéré la remise d'un rapport unique.

Le rapport annuel portera sur des points majeurs, que sont le financement de la reconstruction à Mayotte, notamment par l'État et l'Union européenne, la planification des opérations, l'avancement de l'élaboration et de l'actualisation des plans de prévention des risques naturels, la mise à jour des données cadastrales alors que le problème du foncier reste entier à Mayotte, et l'analyse des besoins d'infrastructures.

Nous savons tous que les rapports du Gouvernement ne sont pas toujours transmis en temps et en heure. Je me réjouis que nous assurions à tous les Mahorais l'accès à ce rapport en le plaçant en annexe du rapport d'activité annuel du nouvel établissement public ! Je peux vous assurer que nos compatriotes à Mayotte seront extrêmement attentifs à l'avancement de la reconstruction et auront à coeur de consulter les données annuellement mises à jour.

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 1er bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2

Proposition commune de rédaction des rapporteures

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - L'article 2 vise à autoriser l'État ou l'un de ses établissements publics à reconstruire les écoles publiques de Mayotte en lieu et place des communes. La rédaction proposée maintient les dispositions introduites par le Sénat, dont l'objet est de mieux garantir le respect des libertés locales : l'État ou l'établissement public ne pourra ainsi procéder à la reconstruction des écoles qu'à la demande des communes mahoraises.

Dans la même optique, j'ai compris l'objectif d'Estelle Youssouffa, à savoir renforcer la garantie de la libre administration des collectivités locales : nous avons par conséquent introduit dans le texte une disposition obligeant l'État à obtenir un avis conforme des communes pour construire des nouvelles écoles ou ouvrir de nouvelles classes.

Enfin, pour garantir des conditions d'enseignement décentes pour l'ensemble des élèves des écoles de Mayotte,le texte prévoit l'obligation pour l'État ou l'établissement public d'assurer dans chaque école mahoraise, reconstruite ou créée, l'accès à des points d'eau potable ainsi que la présence d'espaces de restauration scolaire. De même, les nouvelles écoles devront être conçues de façon à pouvoir intégrer ultérieurement un système de production d'énergies renouvelables. Je remercie enfin Estelle Youssouffa de m'avoir suivie et d'avoir accepté de ne pas réintroduire l'obligation de reconstruire des plateaux sportifs dans chaque école, compte tenu de la nécessité de reconstruire au plus vite les écoles.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Je me félicite que nous ayons trouvé un accord.

M. Aurélien Taché, député. J'exprime des réserves sur la nouvelle rédaction de l'article 2. En soumettant la construction de nouvelles écoles au recueil d'un avis conforme des communes, cet article procède à une décentralisation assez inédite de cette compétence. Nous comprenons la philosophie du texte consistant à associer le plus possible les élus locaux et nous soutenons la plupart des aménagements auquel il procède, mais le groupe « La France insoumise » émet de grandes réserves sur ce pouvoir d'autorisation préalable donné aux communes.

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 3

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous vous proposons de conserver cette mesure rétablie dans le texte par le Sénat. Cette disposition se révélera utile pour amplifier temporairement l'offre de construction à Mayotte après les destructions causées par le cyclone. Pour tenir compte des préoccupations exprimées à l'Assemblée nationale et partagées par nos collègues mahorais, nous avons supprimé la possibilité de reloger temporairement des victimes du cyclone dans des constructions démontables et à la place, nous avons ouvert notamment la possibilité d'y loger pour une durée limitée des personnels qui viendraient à Mayotte pour aider à la gestion de crise ou à la reconstruction.

Pour rassurer les Mahorais sur le caractère temporaire de ces bâtiments modulaires, nous souhaitons réduire la durée totale du dispositif à deux ans. Ainsi, toutes ces structures devront avoir été démontées au plus tard deux ans après la promulgation de la loi. Nous restreignons également leur implantation aux seules zones constructibles délimitées par les plans locaux d'urbanisme (PLU).

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 4

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous vous proposons une rédaction d'équilibre tenant compte des apports des deux chambres. Nous sommes convenus d'autoriser le Gouvernement à modifier ou à adapter certaines règles, notamment en ce qui concerne les places de stationnement et les règles d'accessibilité. Seront toutefois exclues du champ de l'habilitation les dérogations aux règles de sécurité des constructions, aux obligations de recours aux énergies renouvelables pour les locaux à usage d'habitation, ainsi qu'aux règles relatives à la qualité de l'air, aux ouvertures et aux dimensions des bâtiments. Afin de tenir compte des préoccupations exprimées à l'Assemblée nationale, il est précisé que les règles prises par ordonnance favorisent la récupération et le stockage des eaux de pluie. La lutte contre l'habitat illégal demeure dans le champ de l'habilitation, de même que l'apport du Sénat concernant la limitation à deux ans de l'application des mesures prises par ordonnance.

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 4 bis

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. La lutte contre les bidonvilles est indispensable, non seulement pour les propriétaires, publics ou privés, des terrains sur lesquels des personnes s'installent sans droit ni titre, mais aussi pour les personnes qui y vivent dans des conditions indignes de notre République, tant sur le plan de la sécurité que de la salubrité et du respect de l'environnement.

L'article 4 offre la possibilité de prendre, par voie d'ordonnance, un certain nombre de mesures qui permettront de lutter plus efficacement contre les bidonvilles, comme l'extension du délai de flagrance. Mais lutter contre les bidonvilles, c'est d'abord éviter leur reconstruction, qui, malheureusement, a repris dès le lendemain du cyclone Chido. Nous nous sommes rendu compte à quel point il était dangereux de vivre dans ces zones, les tôles volantes ayant constitué de véritables armes mortelles durant la tempête.

L'article 4 bis, qui a été introduit en commission à l'Assemblée nationale à mon initiative, vise à réguler la vente de tôles. En vertu de cette disposition, on devra s'assurer que les tôles ne sont utilisées que pour les logements en dur et que leur commerce n'alimente pas la spéculation. Un arrêté préfectoral a été pris en ce sens. L'acheteur devra présenter un justificatif de domicile et un titre d'identité valide. Il devra s'engager à utiliser les tôles pour la reconstruction de son logement. La revente à un tiers, quel qu'il soit, sera interdite. Chaque établissement de vente devra tenir à jour un registre mentionnant ces informations ; en cas de méconnaissance de la règle, le préfet aura le pouvoir de fermer le commerce.

M. Aurélien Taché, député. Nous serons défavorables à cet article. Pour mettre fin aux bidonvilles, mieux vaudrait reloger les gens qui y vivent de manière plus large sur le territoire national, en vertu d'un principe de solidarité. La procédure proposée déroge en outre excessivement au droit commun.

M. Saïd Omar Oili, sénateur. - Qui vérifiera le respect des règles ? Il faut dresser un bilan, à la fin de chaque année, sur la vente des tôles. Je voterai cette mesure mais je crains qu'elle ne soit purement symbolique. Il faut avant tout veiller à ce que le préfet exécute les décisions de justice qui ont ordonné l'expulsion des occupants illégaux.

Mme Anchya Bamana, députée. Je voterai également en faveur de l'article, mais il sera essentiel, dans le cadre de la future loi de programmation, d'affecter les moyens nécessaires à la mise à jour du cadastre.

M. Hervé de Lépinau, député. Il serait souhaitable de publier, par voie réglementaire, les décisions de justice rendues afin de les rendre opposables aux maires et aux vendeurs de matériaux.

Mme Dominique Estrosi Sassone, sénateur, vice-présidente. - Monsieur Omar Oili, on peut dénoncer cette situation, mais c'est au préfet qu'il incombe d'exécuter les décisions de justice.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Madame Bamana, le rapport annuel qui sera présenté par l'établissement public contiendra une mise à jour des données cadastrales. Nous avons la conviction que la publication de ces informations forcera les autorités locales et celles de l'État à engager les efforts nécessaires. Nous souhaitons que la question foncière soit traitée lors de la reconstruction.

Mme Salama Ramia, sénatrice. - Il me paraît pertinent d'informer les communes des décisions de justice rendues afin que le cas échéant, elles n'accordent pas d'autorisation à un occupant illégal.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Je vous propose que l'on tienne compte de cette préoccupation dans le projet de loi de programmation à venir.

L'article 4 bis est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 5

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 5 définit le champ d'application des dérogations au droit de l'urbanisme prévues aux articles 6 à 9, qui s'appliquent aux reconstructions entraînant ou non des modifications. Le périmètre des dérogations est large, qui englobe constructions, installations et aménagements. À mon initiative, l'Assemblée l'a élargi aux reconstructions liées aux destructions causées non seulement par Chido mais aussi par Dikeledi, ainsi que par l'ensemble des phénomènes climatiques qui pourraient intervenir jusqu'à la fin de la saison des pluies, en mai.

En outre, les dérogations s'appliqueront également aux constructions, installations et aménagements nouveaux nécessaires au fonctionnement des réseaux de télécommunications. La couverture mobile de l'île doit maintenant s'accélérer.

Pour des raisons rédactionnelles, nous avons supprimé la référence aux installations électriques et agricoles, qui sont déjà couvertes par la rédaction initiale du texte. La loi s'applique bien à ces installations.

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 6

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous avons rétabli la mention de la performance énergétique et de l'accessibilité parmi les objectifs d'intérêt général pouvant justifier un dépassement de gabarit de plus de 5 %. Nous avons aussi précisé que, pour les logements, l'augmentation de gabarit, dans la limite de 20 %, ne peut se traduire par l'ajout de plus d'un étage au-dessus du rez-de-chaussée, ni conduire à ce que la surface de plancher du bâtiment excède 150 mètres carrés, car il s'agit de permettre la création d'une pièce ou d'un studio pour loger des parents ou des enfants, et non de créer des appartements supplémentaires dans des bâtiments d'habitation collective.

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 6 bis A

L'article 6 bis A est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 6 bis B

Proposition commune de rédaction des rapporteurs.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 6 bis B accorde au préfet de Mayotte, à titre dérogatoire et jusqu'au 31 décembre 2026, la compétence d'autoriser l'implantation d'installations radioélectriques en dérogation au principe d'urbanisation continue consacré par l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. Nous proposons de subordonner l'autorisation préfectorale à un avis préalable des communes, ainsi qu'à l'obligation de veiller à la préservation des sites et paysages remarquables.

La proposition commune de rédaction des rapporteurs est adoptée.

L'article 6 bis B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 6 bis

L'article 6 bis est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 6 ter

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 6 ter vise à faciliter et à accélérer les opérations de reconstruction ou de réfection - à l'identique ou avec des adaptations ou des modifications justifiées par un objectif d'intérêt général - des ouvrages des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité dégradés ou détruits. À cet effet, il autorise, pendant deux ans à compter de la promulgation de la loi, la réduction des délais à respecter entre la transmission des demandes de travaux et leur réalisation, tels qu'ils sont prévus par les articles L. 115-1 du code de la voirie routière et L. 323-11 du code de l'énergie. Nous proposons de modifier l'article 6 ter, dans le texte issu des travaux du Sénat, afin de porter de dix à quinze jours le délai au cours duquel les maires peuvent se prononcer sur les travaux de reconstruction des réseaux électriques.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Le texte comporte une petite erreur : à l'alinéa 2, il faut lire « Par dérogation au quatrième alinéa » - et non au troisième alinéa - « de l'article L. 115-1 du code de la voirie routière [...]. »

La proposition commune de rédaction des rapporteurs, telle que rectifiée, est adoptée.

L'article 6 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 6 quater (supprimé)

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous nous sommes accordées sur la suppression de l'article 6 quater, qui précise que les réseaux électriques bénéficient des mesures d'accélération en matière d'urbanisme prévues aux articles 5 à 9. Cette disposition est en effet satisfaite par la rédaction de l'article 5.

La suppression de l'article 6 quater est maintenue.

Article 7

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous maintenons la rédaction issue des travaux du Sénat, en y apportant quelques aménagements rédactionnels.

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 7 bis

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Il s'agit de prévoir que les reconstructions nécessaires à l'exploitation agricole sont soumises à l'avis simple de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) alors que, dans les territoires ultramarins, ces projets sont normalement subordonnés à l'avis conforme de la commission.

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 7 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 8

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Dans le projet de loi initial, l'article 8 offrait la possibilité à l'autorité compétente en matière d'urbanisme de remplacer l'enquête publique par la participation du public par voie électronique. Cette dérogation, peu protectrice des intérêts du public, était paradoxale car l'enquête publique n'a lieu, à Mayotte, qu'à la demande expresse du préfet. En outre, des problèmes de connexion à internet persistent sur l'île.

L'Assemblée nationale a proposé que l'on ne puisse déroger à l'enquête publique, mais que le préfet puisse substituer à la mise à disposition du public du dossier, spécifique à Mayotte, une participation du public par voie électronique. L'objectif était de toucher une plus grande partie de la population - ce qui suppose, évidemment, qu'elle dispose d'une couverture internet correcte. Le Sénat, pour sa part, a souhaité conférer le pouvoir de décision à l'autorité compétente pour la consultation du public.

Nous vous proposons de conserver l'obligation du dossier en version papier en mairie et en préfecture, en cas de participation du public par la voie électronique, jusqu'au 1er juillet 2025, date à laquelle nous espérons que les connexions internet seront rétablies. Cette disposition avait été prévue initialement par l'Assemblée nationale.

M. Aurélien Taché, député. La participation du public par voie électronique ne nous paraît pas une bonne chose, car la connexion à internet n'a pas été rétablie en de nombreux endroits.

M. Hervé de Lépinau, député. Pourquoi ne pas permettre la double information jusqu'à la fin de la procédure, au lieu de borner cette possibilité au 1er juillet 2025 ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Si la procédure est lancée et se déroule efficacement, on ne mettra pas systématiquement fin à cette possibilité.

M. Hervé de Lépinau, député. Par expérience des tribunaux administratifs, il me semble que cela peut constituer une difficulté. Je crois préférable de supprimer la référence au 1er juillet 2025 pour que la double information perdure le temps de la procédure.

Mme Anchya Bamana, députée. Il ne me paraît pas certain, en effet, qu'au 1er juillet, tout soit rentré dans l'ordre. Il est donc préférable de retirer cette date butoir.

Mme Viviane Artigalas, sénatrice. - À l'état des réseaux s'ajoute la difficulté qu'éprouvent certaines personnes à utiliser le vote électronique.

Mme Salama Ramia, sénatrice. - La limite du 1er juillet 2025 me paraît trop proche. À l'heure actuelle, on dit que tout est revenu mais en réalité, beaucoup de communes n'ont toujours pas accès aux réseaux.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Mesdames les rapporteurs, avez-vous une objection à ce que l'on supprime, au début de l'alinéa 2, les mots : « Jusqu'au 1er juillet 2025 » ?

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Non.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Je n'en ai pas davantage.

La proposition de rédaction, telle qu'elle vient d'être rectifiée, est adoptée.

L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 9

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous proposons de maintenir la rédaction du Sénat qui prend en compte les préoccupations exprimées lors des débats à l'Assemblée nationale sur les risques d'atteinte aux sols et aux bâtiments.

L'article 9 est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 11

Proposition commune de rédaction des rapporteures

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - L'article 11 introduit des dérogations aux principes de publicité et de mise en concurrence préalables en matière de commande publique. Nous vous proposons de reprendre la rédaction du Sénat, et de prévoir en plus une publication numérique, lors du lancement et de la passation des marchés publics n'ayant pas fait l'objet d'une publicité préalable.

La proposition commune de rédaction des rapporteurs est adoptée.

L'article 11 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 12

Proposition commune de rédaction des rapporteures

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - Nous nous sommes accordées sur le rétablissement de l'article 12, dont je me félicite. Il s'agit de prévoir la possibilité de déroger au principe d'allotissement des marchés publics. Cette mesure accélérera la passation des marchés publics et, partant, la reconstruction de l'archipel puisqu'elle évitera la multiplication des appels d'offres.

La proposition commune de rédaction des rapporteurs est adoptée.

L'article 12 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 13

Proposition commune de rédaction des rapporteures

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 13 vise à faciliter le recours à des marchés globaux pour la réalisation des travaux nécessaires à la reconstruction ou à la remise en état des équipements et des bâtiments publics de Mayotte. À cet effet, il lève les restrictions établies par l'article L. 2171-2 du code de la commande publique pour l'attribution d'un marché de conception-réalisation dans le cadre d'un régime temporaire. Cette dérogation est valable deux ans à compter de la promulgation de la loi.

En conséquence des modifications apportées par le Sénat, l'article 13 ne comporte plus les dispositions qui visaient à favoriser les opérateurs économiques locaux dans l'attribution et l'exécution des marchés publics conclus dans le cadre dérogatoire aménagé par les articles 11 à 13 du projet de loi. Ces dispositions ont été regroupées au sein de l'article 13 bis AA. Nous proposons l'adoption conforme de l'article 13 dans la rédaction adoptée par le Sénat en séance publique.

M. Hervé de Lépinau, député. Il me paraît indispensable d'inscrire dans le texte - probablement à l'article 13 bis AA - que la sous-traitance doit se limiter à deux rangs. La reconstruction de Mayotte reposera principalement sur de l'aide publique. Les TPE et PME craignent que la sous-traitance en cascade n'obère leur capacité de rebond.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Ces dispositions ont été intégrées à l'alinéa 2 de l'article 13 bis AA.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 13 bis AA a été créé par le Sénat pour regrouper l'ensemble des dispositions ayant pour objet d'accorder aux opérateurs économiques locaux une part minimale dans la passation et l'exécution des marchés publics régis par les articles 11 à 13 du projet de loi.

À cet effet, nous vous proposons de rétablir la rédaction de l'article 13 bis AA issue des travaux de la commission des affaires économiques du Sénat, à l'exclusion de l'exigence d'une valeur estimée minimale. Le dispositif qui vous est soumis vise à permettre aux acheteurs de réserver 30 % du montant des marchés publics régis par les articles 11 à 13 du projet de loi, dans le respect des seuils européens, en offrant la possibilité aux PME et aux artisans d'effectuer des offres groupées. Cette rédaction maintient les dispositions formalisant le contenu et les conditions de l'établissement d'un plan de sous-traitance, afin de prévenir un recours abusif à ce procédé, et rétablit l'exigence d'une part minimale dans l'exécution des marchés confiée aux entreprises et artisans de Mayotte.

M. Hervé de Lépinau, député. Je ne vois pas la limitation à deux rangs de sous-traitance dans la nouvelle rédaction de l'article 13 bis AA.

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - Limiter le recours à la sous-traitance aurait pour effet de pénaliser un certain nombre de petites entreprises mahoraises, voire de les priver de tout accès à la commande publique, à rebours de l'objectif poursuivi par l'article 13 bis AA. Celui-ci ne comporte donc plus la limitation du recours à la sous-traitance qu'avait fixée l'Assemblée nationale à l'article 13 bis et consacre un nouvel équilibre.

M. Philippe Naillet, député. La part de 30 % du marché qui peut être réservée à des opérateurs locaux inclut-elle la sous-traitance ?

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - Les titulaires des marchés publics auront l'obligation de sous-traiter 30 % du marché à des TPE et PME locales.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Je vous propose de poursuivre ce débat lorsque nous examinerons la suppression de l'article 13 bis, qui limite la sous-traitance au second rang et a occasionné de longs débats sur la sous-traitance à l'Assemblée nationale comme au Sénat.

L'article 13 est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 13 bis AA

Proposition commune de rédaction des rapporteures

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Nous proposons de rétablir l'article 13 ter afin de reconnaître aux acteurs publics la possibilité d'exercer un contrôle du coût de revient des marchés conclus en vue de la reconstruction de Mayotte. Le dispositif prévu dans le code de la commande publique est insuffisant pour répondre à la préoccupation exprimée par les élus au sujet du risque de voir certains opérateurs économiques dégager des marges indues au détriment de la préservation des deniers publics. En effet, les contrôles pouvant être réalisés sur le fondement de ces dispositions ne peuvent porter que sur des marchés publics de l'État et de ses établissements publics ; de surcroît, les marchés pour lesquels peut être exercée cette faculté possèdent des caractéristiques restrictives.

Les articles 11 à 13 autorisant l'ensemble des personnes publiques à recourir à des procédures dérogatoires dans la passation et l'exécution de la commande publique, il nous a paru important d'adapter le mécanisme de contrôle du droit commun en rétablissant l'article 13 ter, qui accorde aux acheteurs publics le droit d'obtenir auprès des candidats au marché toute information et tout document nécessaire à l'évaluation du prix des prestations offertes. Par rapport à la rédaction de l'Assemblée nationale, l'article rétabli accorde ainsi une faculté qui transpose les exigences des articles L. 2196-5 et L. 2196-6 du code de la commande publique, lequel formalise une obligation de transparence fondée non pas sur la notion imprécise de marge, mais sur celle, plus opérationnelle, de coût de revient.

En résumé, ces articles ont pour effet d'établir la capacité des acheteurs à réserver 30 % des marchés publics dans le respect des seuils européens et dans la possibilité d'offres groupées entre PME et/ou artisans, de maintenir les conditions formalisant le contenu et les conditions de l'établissement d'un plan de sous-traitance pour prévenir un recours abusif à ce procédé et de rétablir l'exigence d'une part minimale dans l'exécution des marchés confiés aux entreprises et aux artisans de Mayotte.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Avant d'examiner l'article 13 ter, qui encadre les marges des entreprises, il faut trancher la question de la sous-traitance, qui fait l'objet des articles 13 bis AA, 13 bis A et 13 bis.

M. Hervé de Lépinau, député. Ne faudrait-il pas limiter la sous-traitance à deux rangs ?

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - Les TPE et PME locales sont souvent sous-traitantes de troisième ou de quatrième rang. Si la sous-traitance était limitée à deux rangs, peu de petites entreprises mahoraises accéderaient à la commande publique. C'est pourquoi la proposition de rédaction supprime les limites à la sous-traitance.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. La préoccupation de M. de Lépinau est légitime, mais sa demande est satisfaite car les entreprises auront l'obligation de présenter un plan de sous-traitance. L'acheteur public pourra refuser l'offre ou exiger sa révision si elle ne souhaite pas autoriser la sous-traitance en cascade.

Mme Salama Ramia, sénatrice. - Certaines entreprises mahoraises sont capables de travailler en sous-traitance de second rang, et certains petits artisans ont procédé à des investissements et souhaitent prendre leur part dans la reconstruction. Les TPE et PME s'y sont donc préparées. Pour permettre à ces petites structures de s'agrandir, il faut limiter la sous-traitance à deux rangs.

Mme Anchya Bamana, députée. Si j'ai bien compris, Madame la rapporteure, l'obligation sera mentionnée dans le marché initial ?

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Il nous a semblé nécessaire de ne pas aller trop loin dans l'interdiction de la sous-traitance afin d'accorder à la puissance publique une marge de manoeuvre dans la passation du marché - ne serait-ce que pour respecter le pourcentage minimum de 30 % de marchés confiés à des entreprises mahoraises - tout lui donnant un pouvoir de contrainte si elle souhaite éviter la sous-traitance en cascade. Le marché va beaucoup bouger et certaines entreprises se positionnent de manière ambitieuse sur la reconstruction. Il faut leur laisser suffisamment d'agilité pour répondre aux enjeux.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Mesdames les rapporteurs proposent que la puissance publique donne son accord au cas par cas à la sous-traitance en cascade, tandis que la première rédaction de l'Assemblée nationale interdisait toute sous-traitance sur plus de deux rangs.

M. Hervé de Lépinau, député. Il faut être pragmatique ! Selon la nature des travaux (pont, station d'épuration ou habitations), on ne recherche pas la même technicité. C'est aux acteurs publics locaux de porter un regard précis sur la constitution du plan de sous-traitance et de voir en fonction du marché s'il est possible de la limiter à deux rangs.

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - C'est bien ce que nous souhaitons : accorder de la souplesse à l'organisation locale en lui donnant la possibilité de ne pas limiter la sous-traitance - bien que celle-ci ne soit pas nécessairement souhaitable.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Madame Florennes, pouvez-vous nous confirmer que l'adoption de la nouvelle rédaction de l'article 13 bis AA implique de maintenir la suppression de l'article 13 bis ?

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - La proposition de rédaction de l'article 13 bis AA est un compromis qui reprend plusieurs dispositions adoptées par l'Assemblée nationale qui nous semblaient utiles. Elle implique effectivement le maintien de la suppression des articles 13 bis A et 13 bis.

M. Hervé de Lépinau, député. Une rédaction plus sûre aurait fixé le principe d'une interdiction de la sous-traitance au-delà du deuxième rang, tout en permettant une dérogation en fonction des contraintes techniques du dossier. Cela aurait rassuré les entreprises mahoraises.

M. Philippe Naillet, député. Tout dépend de la nature du marché. Multiplier la sous-traitance présente deux risques : le premier est d'allonger la durée des travaux, alors que nous privilégions l'efficacité dans la reconstruction ; le second est celui des défaillances d'entreprise.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Aucune proposition de rédaction alternative ne nous a été soumise. Je vous propose de voter sur la proposition des rapporteurs.

La proposition commune de rédaction des rapporteurs est adoptée.

L'article 13 bis AA est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 13 bis A (supprimé)

La suppression de l'article 13 bis A est maintenue.

Article 13 bis supprimé)

La suppression de l'article 13 bis est maintenue.

Article 13 ter (supprimé)

La proposition commune de rédaction des rapporteurs, tendant à rétablir l'article 13 ter, est adoptée.

L'article 13 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 14

La proposition de rédaction commune des rapporteurs est adoptée.

L'article 14 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 14 bis (supprimé)

La suppression de l'article 14 bis est maintenue.

Article 15

Proposition commune de rédaction des rapporteures

Mme Isabelle Florennes, sénatrice. - L'article 15 est relatif aux subventions des collectivités territoriales aux associations oeuvrant en faveur de la population mahoraise. Il avait été largement enrichi à l'Assemblée nationale. Nous avons conservé ces apports lors de l'examen au Sénat, ce qui nous a permis de trouver rapidement un compromis. La seule modification par rapport à la version adoptée par le Sénat consiste en la suppression de l'obligation, pour les associations bénéficiaires de subventions publiques, d'établir un rapport d'activité. Estelle Youssouffa avait compris notre objectif, à savoir garantir la bonne utilisation des deniers publics et assurance la transparence des actions menées, mais il est apparu que ces dispositions étaient déjà satisfaites. Nous nous sommes donc entendues sur la suppression de cette obligation.

La proposition commune de rédaction des rapporteures est adoptée.

L'article 15 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 16

Proposition commune de rédaction des rapporteurs sur l'alinéa 1 ; proposition commune de rédaction des rapporteurs après l'alinéa 1 ; proposition de rédaction de Mme Estelle Youssouffa à l'alinéa 2.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 16 vise à encourager les dons des particuliers aux associations et fondations reconnues d'utilité publique qui, dans le cadre de leur action à Mayotte à la suite du cyclone Chido, fournissent gratuitement des repas ou des soins aux personnes en difficulté et contribuent à favoriser leur logement. À cet effet, il porte de 66 % à 75 % le taux de la réduction d'impôt.

En conséquence des modifications apportées par l'Assemblée nationale, le mécanisme de défiscalisation s'applique aux dons et versements reçus par les organismes d'intérêt général entre le 14 décembre 2024 et le 17 mai 2025afin de prendre en compte les interventions menées afin de remédier aux conséquences des événements météorologiques qui surviendraient jusqu'à cette dernière date à Mayotte.

Avec l'accord du rapporteur du Sénat, il est proposé d'exclure du champ de la défiscalisation les dons et versements réalisés auprès des associations de financement des campagnes électorales et des mandataires financiers.

Je propose par ailleurs - désormais avec l'accord de Mme Jacques - le relèvement à 2 000 euros du plafond des sommes prises en compte pour la réduction d'impôt.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Si le Sénat a décidé d'abaisser le plafond à 1 000 euros, ce n'était pas pour décourager la générosité publique ni pour priver Mayotte d'aide ! C'est même exactement le contraire. Le Gouvernement a annoncé la majoration de la réduction d'impôt de droit commun dès le 17 décembre, soit trois jours après le cyclone, afin d'encourager au don. Même s'il est toujours difficile d'évaluer l'impact de mesures incitatives comme celle-ci, la Fondation de France avait récolté 40 millions d'euros à la fin du mois de janvier, ce qui est considérable.

Le relèvement du plafond à 3 000 euros a posteriori pose selon nous trois problèmes : premièrement, il s'applique à des dons déjà effectués - ce qui entraîne un effet incitatif très limité, puisque le gros des dons a toujours lieu dans les premiers jours, voire les premières semaines après la catastrophe, rarement trois mois plus tard ; deuxièmement, il représente un manque à gagner pour l'État, donc potentiellement pour Mayotte ; enfin, il pose un problème de justice sociale, car faire un don de plus de 1 000 euros n'est pas donné à tout le monde, et en pratique, le montant moyen des dons a été de 100 euros. En outre, ce dispositif ad hoc pour Mayotte peut se cumuler avec le dispositif « Coluche » de droit commun, que rien n'interdit de mobiliser pour Mayotte.

Cependant, nous avons entendu qu'il s'agissait d'une demande forte du côté de l'Assemblée nationale qui souhaite créer un signal en faveur de la poursuite des dons pour Mayotte. Bien que j'aie moi-même déposé une proposition de rédaction reprenant le plafond du Sénat, je suis favorable à celle de Mme Youssouffa. C'est la raison pour laquelle j'ai retiré la proposition de rédaction que j'avais initialement déposée et que je co-signe celle de ma collègue.

M. Hervé de Lépinau, député. Mme Bamana et moi-même souhaitons que soit rétabli l'alinéa 2 de l'article 16 dans la version adoptée par l'Assemblée nationale : « Les associations mentionnées au premier alinéa du présent I ne peuvent en aucun cas affecter ces dons à des actions visant à la régularisation de ressortissants étrangers en situation irrégulière. » Cet alinéa fait écho à un problème soulevé par les élus mahorais. Il ne faudrait pas que le plan de reconstruction crée un nouvel appel d'air à l'immigration irrégulière venue principalement des Comores.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous avons supprimé cet alinéa car la réduction d'impôt est liée au financement d'actions précises, et non aux associations elles-mêmes. L'amendement est donc satisfait. De plus, le Gouvernement s'est engagé devant le Sénat à être d'autant plus attentif à l'emploi de ces fonds qu'il s'apprête à lancer une politique de lutte contre l'habitat informel, lequel concerne en premier lieu les personnes en situation irrégulière. La proposition de Mme Youssouffa me semble plus proportionnée et plus diplomatique !

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Votre demande est satisfaite car le champ d'application de l'abattement fiscal est restreint à des actions précises : « fourni[r] gratuitement des repas ou des soins aux personnes en difficulté ou contribue[r] à favoriser leur logement, y compris par la reconstruction des locaux d'habitation rendus inhabitables, à l'exclusion des locaux édifiés sans droit ni titre et constituant un habitat informel [...]. » Les associations ne peuvent pas employer ces fonds pour favoriser la régularisation de ressortissants étrangers en situation irrégulière.

M. Hervé de Lépinau, député. Je rappelle que l'impôt sur le revenu fonctionne selon une logique déclarative et que c'est une fois le bénéfice de l'avantage sollicité qu'un contrôle peut être réalisé. L'intérêt de l'alinéa voté par l'Assemblée est qu'il dit clairement au juge de l'impôt que cette exclusion de l'avantage fiscal n'est pas discutable. Sans cela, il y aura une interprétation, donc une discussion.

Mme Dominique Estrosi Sassone, sénateur, vice-présidente. - La rédaction proposée par les rapporteurs ne me semble pas de nature à créer du contentieux.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Je constate que la proposition de M. de Lépinau de rétablir l'alinéa 2 n'est pas approuvée.

M. Philippe Gosselin, député. Je soutiens la proposition de relever le plafond des dons pouvant bénéficier de la défiscalisation « Coluche ». L'Assemblée avait voté pour un plafond à 3 000 euros, le Sénat veut le maintenir à 1 000 euros. Pouvons-nous nous accorder sur 2 000 euros ? J'entends qu'il puisse y avoir un effet d'aubaine sur la misère, mais, si c'est le cas, il s'agira de cas extrêmes qui ne modifieront pas significativement les choses ! Le relèvement du plafond enverrait un bon signal.

Les propositions communes de rédaction des rapporteurs sont successivement adoptées, la proposition de rédaction de Mme Micheline Jacques à l'alinéa 2 ayant été retirée.

L'article 16 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 17

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 17 s'intitule dans l'étude d'impact « suspension du recouvrement fiscal forcé » et il est présenté comme une mesure de suspension des procédures de recouvrement fiscal.

Or, après une analyse juridique approfondie, j'ai conclu que la mesure ne suspendait pas les procédures de recouvrement fiscal forcé, mais les délais de prescription relatifs à ces procédures ; cela pourrait ainsi avoir pour effet de repousser la date de cette prescription. Dans sa rédaction initiale, j'estime donc qu'il ne s'agissait pas d'une mesure de protection des Mahorais - contrairement à ce que suggère l'intitulé du chapitre où il se trouve - mais d'une mesure de protection de l'administration fiscale.

L'Assemblée nationale a donc choisi l'extrême inverse : elle a réécrit l'article 17 pour qu'il s'agisse uniquement d'une mesure de suspension des procédures de recouvrement fiscal forcé, en faveur des contribuables mahorais. Mais ce faisant, la rédaction issue de l'Assemblée a négligé la nécessité de suspendre aussi, en parallèle, les délais de prescription. Le Sénat, lui, est revenu à la rédaction du Gouvernement.

Le texte proposé à la CMP, résultant d'un accord, est une synthèse : il prévoit de suspendre à la fois les procédures de recouvrement fiscal forcé et, corrélativement, les délais afférents à ces procédures.

Cette rédaction est donc parfaitement équilibrée et répond à l'objectif de sécuriser à la fois les contribuables mahorais et les comptables publics. Elle intègre également la suspension des délais de réclamation et de recours, ce qui rend l'article 17 bis A inutile, et nous proposerons donc de le supprimer.

Mme Salama Ramia, sénatrice. - Si j'ai bien compris, la suspension est valable jusqu'au 31 décembre 2025 ?

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. La suspension est rétroactive à partir du 14 décembre 2024 et court jusqu'au 31 mars 2025 ; elle est prolongeable par décret jusqu'au 31 décembre 2025.

Mme Salama Ramia, sénatrice. - J'aurais préféré que l'on fixe d'office le terme de la période au 31 décembre 2025. Nous sommes en février et l'activité n'a pas encore repris à Mayotte.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Je suis d'accord avec Mme Ramia.

M. Hervé de Lépinau, député. L'administration fiscale de Mayotte fonctionne-t-elle de nouveau dans des conditions lui permettant d'instruire les demandes de report ?

Mme Maud Petit, députée. Compte tenu des difficultés de fonctionnement des services publics, je soutiens la proposition de simplification qui consiste à prolonger d'office la période de suspension jusqu'au 31 décembre 2025.

Mme Salama Ramia, sénatrice. - Rien n'est revenu à la normale. C'était déjà difficile avant ; ça l'est encore plus. La mesure proposée constitue un bon message pour les entreprises.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Il me semble également raisonnable d'envisager dès à présent une prolongation au 31 décembre 2025.

Mme Dominique Estrosi Sassone, sénateur, vice-présidente. - Ne risquerait-on pas de la sorte de se priver de la faculté de moduler la suspension des procédures de recouvrement en fonction de la situation économique des entreprises ?

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Le fonctionnement des services de l'État a été profondément affecté à Mayotte et il est peu probable que tout sera revenu à la normale le 31 mars. Il n'est pas utile de renvoyer à un décret le soin de prolonger la période de suspension, alors que nous pouvons régler la question dès à présent. Ce dispositif protecteur sera le bienvenu.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Prévoir une prolongation générale de la période de suspension pourrait occasionner des effets d'aubaine. Il conviendrait surtout d'inciter les assureurs à indemniser au plus vite les entreprises.

Mme Maud Petit, députée. En l'état actuel des choses, il n'est pas possible de contraindre les assureurs à accélérer leurs paiements. Il faut donc répondre aux difficultés des entreprises dans l'attente des indemnisations.

M. Hervé de Lépinau, député. La suspension de prélèvements d'impôts ou de cotisations n'est pas automatique. Encore une fois, comment faire si l'administration n'est pas en état de procéder à l'examen de la situation du redevable ?

On pourrait dire aux entreprises mahoraises de suspendre de leur propre initiative les versements, mais au risque de les exposer à des redressements. Cela étant, il est parfaitement envisageable que l'administration fiscale enjoigne à ses agents de faire preuve d'une souplesse particulière en cas de non-respect des obligations déclaratives ou de paiement.

L'île a été dévastée : ayons l'esprit pratique. Nous sommes à la mi-février et ce qui devrait être le « plan Marshall pour Mayotte » ne s'est pas mis en branle.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. La rédaction proposée à la CMP permet au Gouvernement de prolonger par décret la période de suspension si la situation économique et financière des redevables le nécessite.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Je propose que la fin de la période de suspension passe du 31 mars au 30 juin 2025, comme cela est aussi prévu à l'article 21, ce qui permettra de mieux apprécier la situation.

On conserverait la faculté de prolonger ensuite cette période par décret jusqu'au 31 décembre.

Mme Salama Ramia, sénatrice. - La question se pose dans les mêmes termes pour l'article 18, qui concerne les charges sociales. Un amendement prévoyant de les suspendre jusqu'au 31 décembre 2025 avait été adopté par l'Assemblée, mais le Sénat est revenu à la date du 31 mars.

Les entreprises ont besoin de souffler. Le chômage partiel n'est pas suffisant. Il faut les aider à redémarrer et à reconstituer leur trésorerie.

Je suis d'accord avec la date du 30 juin qui vient d'être proposée, à condition qu'on harmonise les délais figurant dans les articles 17 et 18.

La réunion est suspendue de douze heures dix à douze heures vingt.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Pour récapituler, en ce qui concerne l'article 18, le dispositif prévoit deux temps : une période de suspension de paiement des cotisations sociales est fixée par la loi - nous proposons désormais qu'elle aille jusqu'au 30 juin 2025, car la date du 31 mars n'est pas réaliste - et cette suspension peut être prolongée par décret jusqu'au 31 décembre 2025.

Par cohérence, les mêmes dates seraient retenues pour les recouvrement forcés (article 17) et pour les cotisations sociales (article 18).

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Je suis d'accord.

Mme Maud Petit, députée. Prévoir dans les deux articles une période de suspension sans condition jusqu'au 30 juin et sous condition jusqu'au 31 décembre me semble cohérent et simplifie les choses.

Mme Viviane Artigalas, sénatrice. - Je suis d'accord avec les modifications proposées, sous réserve qu'on s'assure que l'administration a bien les moyens d'apprécier la situation des entreprises pour déterminer lesquelles d'entre elles pourront continuer à bénéficier de la suspension après le 30 juin.

M. Philippe Gosselin, député. La date du 30 juin peut être un compromis correct, mais elle soulève la question des moyens. Les services de l'État rencontrent d'immenses difficultés matérielles depuis le cyclone ; aussi peut-on encore douter que la période d'observation jusqu'au 30 juin soit suffisante.

Mme Salama Ramia, sénatrice. - Dans les secteurs du tourisme et de la restauration, par exemple, l'outil de travail a souvent été détruit et il va de soi qu'il ne sera pas reconstruit en moins de six mois.

M. Daniel Fargeot, sénateur. - Les obligations déclaratives ne sont pas supprimées. L'administration pourra demander plus tard des précisions afin d'exercer sa mission de contrôle.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Nous passons au vote sur la proposition de commune de rédaction des rapporteurs, étant entendu que la date du 31 mars 2025 est remplacée par celle du 30 juin 2025.

La proposition commune de rédaction, telle qu'elle vient d'être rectifiée, est adoptée.

L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 17 bis AA

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous sommes convenues de conserver cet article, qui résulte d'un amendement du Gouvernement adopté au Sénat. Il prévoit un dispositif de prêt à taux zéro destiné à favoriser la reconstruction ou la réhabilitation d'un logement à Mayotte, avec un montant de 50 000 euros pour une durée de vingt ans.

Cette mesure est bienvenue. Je souhaite que ce prêt soit accordé le plus largement possible et je salue le rôle joué par Action logement pour en faire bénéficier les publics les plus fragiles.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Je me félicite de cette mesure concrète, qui répond aux préoccupations quotidiennes des Mahorais et qui les aidera à reconstruire un toit au-dessus de leurs têtes.

L'article 17 bis AA est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 17 bis A

Proposition commune de rédaction des rapporteurs, tendant à supprimer l'article

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous proposons de supprimer cet article, car la mesure qu'il proposait a été reprise au sein de l'article 17.

La proposition commune des rapporteurs est adoptée.

En conséquence, l'article 17 bis A est supprimé.

Article 17 bis (supprimé)

Proposition de rédaction de la rapporteure pour l'Assemblée nationale

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale.

Cet amendement rétablit l'article 17 bis dans une rédaction plus satisfaisante et plus raisonnable. La rédaction que je propose ne prévoit pas « un report du paiement des impôts » pendant un an, mais une simple suspension de l'application des pénalités de retard jusqu'au 31 mars 2025. De même, le plan de remboursement sans intérêts, initialement prévu à l'alinéa 2 de l'article, est abandonné.

La disposition que je propose est cohérente avec les dispositions analogues prévues en matière de recouvrement fiscal forcé (article 17) et de paiement des cotisations sociales (article 18). Si les comptables publics sont dans l'incapacité matérielle d'effectuer des actes de recouvrement forcé à temps, ce qui justifie la prolongation rétroactive des délais de prescription, alors il faut logiquement considérer que les contribuables font face aux mêmes difficultés pour payer leurs impôts dans les délais. Quand les guichets des impôts sont fermés, on ne peut pas demander l'impossible aux simples contribuables. De même, il semblerait incohérent de suspendre les procédures de recouvrement prévues mais de ne pas suspendre les pénalités de retard !

En ce qui concerne les cotisations sociales, l'alinéa 2 de l'article 18 prévoit expressément que « les pénalités et les majorations de retard ne sont pas applicables ». C'est une question de cohérence : si l'on suspend les pénalités de retard pour les cotisations sociales, il n'y a pas de raison de ne pas les suspendre aussi pour les impôts. Les difficultés matérielles sont comparables dans les deux cas.

La position du Gouvernement est que l'administration fiscale a déjà la possibilité d'effectuer des remises gracieuses de pénalités de retard, et qu'il n'y a pas besoin, par conséquent, de les prévoir dans la loi. Selon moi, au contraire, il est nécessaire que ces remises de pénalités de retard soient inscrites dans la loi pour éviter une application discrétionnaire de ces remises gracieuses et une rupture d'égalité entre les différents contribuables.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous sommes en désaccord sur ce point.

Je comprends le contexte particulier que connaît Mayotte, mais cette rédaction risque de créer un précédent fâcheux : tous les contribuables pourront croire qu'ils n'ont pas à payer leurs impôts à temps en cas de catastrophe naturelle.

En outre, l'administration fiscale a déjà adopté une attitude de clémence depuis le 14 décembre. Elle a toute latitude pour accorder des remises gracieuses d'intérêts ou de pénalités de retard, voire de prévoir des échéanciers de paiement pour ceux qui sont le plus en difficulté. Loin de toute rupture d'égalité, opérer au cas par cas permet précisément de prendre en compte la situation particulière de chacun. Compte tenu de l'état de dégradation des finances publiques, je suis davantage favorable à des mesures ciblées qu'à une mesure générale.

De surcroît, cette proposition de rédaction ne favorise pas l'activité économique. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé quelques mesures à cet effet, notamment à l'article 17 ter s'agissant de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). La création d'une zone franche annoncée par le ministre d'État contribuera également à la reprise de l'activité. Le ministre Manuel Valls est conscient que les aides ponctuelles accordées en décembre aux entreprises sont insuffisantes et il n'est pas opposé à leur prolongation pendant quelques mois.

M. Hervé de Lépinau, député. Je suis pour ma part favorable au rétablissement de cet article.

Tout d'abord, nous discutons d'une loi spéciale, qui ne permet pas de créer une jurisprudence susceptible de créer un quelconque précédent.

Ensuite, l'analyse des situations au cas par cas bute encore une fois sur la disponibilité des moyens humains et techniques. Tout a été détruit à Mayotte et ce territoire de facto isolé ne peut pas bénéficier de la même solidarité que celle à l'oeuvre dans l'Hexagone lors de catastrophes naturelles - raison de plus pour éviter aux services fiscaux de consacrer leur énergie au traitement de demandes de délais de paiement.

Mme Annie Le Houerou, sénatrice. Pourquoi ne pas retenir là encore la date du 30 juin 2025 ?

Mme Salama Ramia, sénatrice. - Ce serait effectivement plus cohérent.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Il ne s'agit en l'espèce pas d'une suspension mais d'une exonération, ce qui entraîne une perte sèche pour la collectivité territoriale de Mayotte. La rédaction de l'article 17 bis adoptée à l'Assemblée nationale pouvait entraîner une perte de recettes jusqu'à 70 millions d'euros, soit bien plus que les 40 millions collectés par la Fondation de France.

Il suffit d'une seule fois pour créer un précédent. Je rappelle que cette loi d'urgence reprend des dispositions qui figurent dans la loi adoptée après les émeutes de 2023 ou dans celle relative aux Jeux olympiques et paralympiques. Tous les territoires ultramarins seraient susceptibles d'émettre de semblables demandes puisqu'ils sont tous exposés à des risques naturels majeurs et les contribuables hexagonaux pourraient estimer qu'il y a des limites à l'effort fiscal.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Il ne s'agit pas d'une exonération d'impôt, mais uniquement de pénalités de retard. Il est mal venu de laisser entendre que Mayotte, département pour lequel l'État dépense peu, vivrait de la charité.

Cela me rappelle le débat sur l'article 17 : le ministre des outre-mer a juré ses grands dieux devant l'Assemblée qu'il n'y aurait pas de recouvrement forcé en invoquant la « clémence » de l'administration fiscale. Or, nous avons eu confirmation par Bercy que les services fiscaux procéderaient à ces recouvrements forcés et que c'est la raison pour laquelle ils ne voulaient pas que leur suspension soit inscrite dans la loi. Inscrivons clairement dans la loi la suspension de l'application des pénalités pour éviter tout traitement « à la tête du client » et une rupture d'égalité entre les citoyens qui se verront accorder des remises de pénalité et ceux qui n'auront droit à rien.

M. Daniel Fargeot, sénateur. - L'impôt sur le revenu est désormais prélevé à la source. Son paiement ne peut donc être suspendu, contrairement aux cotisations sociales dues par les entreprises.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Il s'agit de suspendre non pas le paiement de l'impôt, mais les pénalités de retard. Comme vous le dites, l'impôt sur le revenu est prélevé à la source, la question ne se pose donc pas. La disposition concerne surtout les autres impôts et notamment ceux qui sont dus par les entreprises.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. Nous passons au vote sur la proposition de rédaction de Mme Youssouffa, en tenant compte de la rectification suivante : la date du 31 mars 2025 est remplacée par le 30 juin 2025.

La proposition de rédaction, ainsi rectifiée, est adoptée et l'article 17 bis est ainsi rédigé.

Article 17 ter

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Il s'agit de conserver l'article, introduit par le Sénat, qui crée une exonération de TGAP pour les déchets.

L'article 17 ter est adopté dans la rédaction du Sénat.

Article 18

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 18 suspend le paiement des cotisations sociales et prévoit un plan d'apurement avec possibilité de remise totale ou partielle. Par souci de cohérence, nous proposons une prolongation de ce dispositif jusqu'au 30 juin 2025 - et non plus jusqu'au 31 mars 2025 - et, le cas échéant, jusqu'au 31 décembre 2025. Dans le texte proposé à la CMP, cette prolongation jusqu'au 31 décembre ne nécessite plus de décret : toutes les entreprises pourront y avoir droit dès lors qu'elles justifient d'une baisse durable de leur chiffre d'affaires.

La proposition commune de rédaction, telle qu'elle vient d'être rectifiée, est adoptée.

L'article 18 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 18 bis (supprimé)

Mme Christine Bonfanti-Dossat, sénateur. - L'article 18 bis, introduit par l'Assemblée, prévoyait d'exonérer de cotisations les travailleurs indépendants et employeurs mahorais pour le seul mois de décembre 2024. Le Sénat, considérant les dispositions de l'article 18 telles que modifiées par l'Assemblée plus protectrices, a procédé à sa suppression, que nous souhaitons maintenir.

La suppression de l'article 18 bis est maintenue.

Article 20

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Christine Bonfanti-Dossat, sénateur. - L'article 20 vise à prolonger jusqu'au 31 mars 2025 les revenus de remplacement des demandeurs d'emploi dont les droits arrivent à échéance. Il prévoit, selon l'évolution de la situation économique et sociale, la possibilité d'une prolongation supplémentaire jusqu'au 31 décembre 2025. Le Sénat, dont nous voulons maintenir la rédaction, a souhaité faire précéder cette décision prise par décret d'un avis de l'Unedic, estimant que les règles d'assurance chômage relevaient des compétences des partenaires sociaux.

L'article 20 est adopté dans la rédaction issue duSénat.

Article 21

Proposition commune de rédaction des rapporteurs

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. L'article 21 a pour but d'accorder ou de renouveler avec une certaine souplesse les droits à prestations sociales quand il est matériellement difficile de fournir les pièces justificatives ou de respecter les procédures habituellement requises.

Nous souhaitons retenir les améliorations rédactionnelles apportées par le Sénat tout en maintenant la date du 30 juin 2025 proposée par l'Assemblée pour l'extinction du dispositif. La date de prolongation maximale, qui peut être décidée par décret, est inchangée.

La proposition de rédaction est adoptée.

L'article 21 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 24 (supprimé)

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - Nous proposons la suppression de cet article et des suivants demandant des rapports sur des sujets particuliers car ils seront couverts dans le rapport annuel de l'établissement public dédié à la reconstruction de Mayotte et le rapport global du Gouvernement.

La suppression de l'article 24 est maintenue.

Article 25 (supprimé)

La suppression de l'article 25 est maintenue.

Article 27 (supprimé)

Proposition de rédaction de M. Saïd Omar Oili et de Mmes Viviane Artigalas et Annie Le Houerou

M. Saïd Omar Oili, sénateur. - Nous souhaitons rétablir cet article issu des travaux de l'Assemblée nationale qui prévoit que le Gouvernement remette un rapport sur les disparités des montants des prestations sociales versées à Mayotte, dans l'Hexagone et dans les autres départements d'outre-mer.

Mme Christine Bonfanti-Dossat, sénateur. - Nous sommes défavorables à cette proposition de rapport, qui n'entre pas dans le cadre d'un projet de loi d'urgence, d'autant que le ministre des outre-mer s'est engagé devant le Sénat à ce que la convergence sociale figure dans le prochain projet de loi pour Mayotte.

Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour l'Assemblée nationale. Compte tenu du fait que le Gouvernement a pris de multiples engagements qu'il n'a pas tenus, nous restons très sceptiques à propos de ces nouvelles promesses, surtout s'agissant de l'égalité sociale. Cependant, il est vrai que ce projet de loi d'urgence n'est pas le meilleur cadre pour un tel rapport. Avis de sagesse.

M. Hervé de Lépinau, député. Cette demande est légitime : c'est l'une des incongruités de la République française que de laisser perdurer de telles disparités sur le territoire national. N'oubliez pas toutefois qu'il faudra régler la question de l'immigration avant de procéder à un alignement social pour éviter tout appel d'air.

Mme Anchya Bamana, députée. Je suis favorable à cette proposition, conforme au principe d'indivisibilité de notre République.

M. Philippe Naillet, député. J'y suis également favorable. On ne sera jamais assez exigeant s'agissant de l'égalité sociale pour nos frères et nos soeurs de Mayotte. Les conséquences du cyclone auraient été moindres pour eux si la convergence sociale était plus avancée. Persévérons dans ce combat, alors que le Gouvernement a fait tant de promesses non tenues.

Mme Maud Petit, députée. Rapporteure de la mission d'information sur les discriminations dans les outre-mer, j'avais constaté combien il y avait d'anomalies à Mayotte, notamment dans l'application du code de la sécurité sociale. Je suis donc favorable à cette demande : les paroles s'envolent, les écrits restent.

La proposition de rédaction est adoptée et l'article est ainsi rédigé.

Article 28 (supprimé)

La suppression de l'article 28 est maintenue.

Article 29 (supprimé)

La suppression de l'article 29 est maintenue.

Article 30 (supprimé)

La suppression de l'article 30 est maintenue.

Article 31 (supprimé)

La suppression de l'article 31 est maintenue.

Article 32 (supprimé)

La suppression de l'article 32 est maintenue.

Article 33 (supprimé)

Mme Christine Bonfanti-Dossat, sénateur. - Nous souhaitons voir maintenue la suppression de cet article qui demande un rapport sur l'opportunité de mettre en oeuvre la réforme du revenu de solidarité active (RSA). La loi d'urgence n'est pas un cadre pertinent. Par ailleurs, aux termes de l'article 21, le versement du RSA sera automatiquement renouvelé jusqu'au 30 juin 2025 et l'application de la réforme se trouve donc de fait suspendue.

La suppression de l'article 33 est maintenue.

Après l'article 33

Proposition de rédaction de M. Saïd Omar Oili

M. Saïd Omar Oili, sénateur. - Nous proposons de rétablir l'exigence, qui figurait dans le texte de l'Assemblée nationale, que le Gouvernement établisse un bilan de la catastrophe pour recenser les personnes décédées, blessées ou disparues. Ce travail est un préalable indispensable à la reconstruction de Mayotte.

Mme Anchya Bamana, députée. J'avais en effet déposé l'amendement dont était issu l'article 26 du projet de loi, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale, mais le Sénat l'a supprimé.

Mme Viviane Artigalas, sénatrice. - Il serait intéressant de savoir où et comment les gens sont décédés, et d'avoir des informations précises sur l'origine des blessures. Cela permettrait d'intégrer des mesures de prévention lors de la reconstruction.

Mme Micheline Jacques, rapporteur pour le Sénat. - En séance, j'avais donné un avis défavorable à cette demande de rapport.

Personne n'est dupe : en grande majorité, les décès ont eu lieu dans les zones d'habitat informel, où les tôles ondulées ont été très meurtrières.

La mission inter-inspections devrait remettre prochainement son rapport. Celui que proposent nos collègues aurait davantage sa place dans une loi de programmation pluriannuelle. En outre, les moyens dont disposent les services sont insuffisants, chacun en convient : plutôt que de leur demander de rédiger des rapports certes utiles mais chronophages, laissons-les se consacrer en priorité à la reconstruction.

Mme Anchya Bamana, députée. Ce texte n'aborde pas la question de l'immigration. Si les services publics sont constamment sous-dimensionnés, c'est parce que le flot des entrées est ininterrompu. C'est la grande question qu'il faudra résoudre lors de la prochaine loi de programmation.

La proposition de rédaction est adoptée et l'article 34 est ainsi rédigé.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi d'urgence pour Mayotte.

La réunion s'achève à treize heures dix.

La réunion est ouverte à 14 h 40.

Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant diverses mesures visant à adapter le fonctionnement des instances de gouvernance des chambres d'agriculture et de la mutualité sociale agricole

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, et à la demande du premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant diverses mesures visant à adapter le fonctionnement des instances de gouvernance des chambres d'agriculture et de la Mutualité sociale agricole s'est réunie à l'Assemblée nationale le lundi 10 février 2025.

Elle a procédé à la désignation de son bureau, qui a été ainsi constitué :

- Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente ;

- Mme Dominique Estrosi Sassone, sénateur, vice-présidente et rapporteur pour le Sénat ;

- Mme Nicole Le Peih, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale.

Mme Aurélie Trouvé, députée, présidente. - La proposition de loi qui nous est soumise a été adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 22 janvier dernier, puis par le Sénat le 6 février.

La proposition de loi comprenait trois articles lors de son dépôt initial devant l'Assemblée nationale par son auteure, Mme Nicole Le Peih. L'Assemblée nationale en a ajouté cinq. Le Sénat a ensuite adopté conformes six de ces huit articles. Seuls nous sont donc soumis l'article 1er ter, introduit par l'Assemblée nationale puis supprimé par le Sénat, qui demandait la remise d'un rapport sur le mode de scrutin pour l'élection des représentants des chambres d'agriculture, et l'article 2, relatif à la gouvernance des instances de la Mutualité sociale agricole (MSA), qui a été modifié par le Sénat.

Je rappelle qu'une CMP ne constitue pas une deuxième lecture, mais une parenthèse dans la navette parlementaire ; notre discussion se fonde sur les deux textes adoptés par nos assemblées, considérés de façon égale. Il ne saurait y avoir d'accord partiel : tout désaccord persistant conduit à l'échec de la CMP. D'autre part, l'élaboration d'un texte par la CMP n'a de sens que si ce texte est susceptible d'être ensuite adopté par les deux assemblées.

Cette proposition de loi adapte les règles de fonctionnement des bureaux des chambres d'agriculture, sachant que l'élection vient de s'achever, ainsi que les règles applicables aux instances de gouvernance de la MSA, dont le renouvellement est prévu au mois d'avril prochain.

Mme Dominique Estrosi Sassone, vice-présidente, rapporteur pour le Sénat. - Je supplée notre collègue Vincent Louault, rapporteur de cette proposition de loi au Sénat, qui ne peut être présent.

Ce texte aménage certaines règles de fonctionnement de nos instances agricoles pour éviter des blocages majeurs. Sa brièveté répond à l'urgence de la situation : les élections viennent de s'achever et les nouveaux bureaux des chambres d'agriculture doivent être installés au plus tard le 5 mars.

Or, pour la composition des instances dirigeantes de ces petits parlements de l'agriculture, un problème se posait - au sujet duquel Sébastien Windsor nous avait d'ailleurs alertés de longue date : la séparation de la vente et du conseil en matière de produits phytosanitaires interdisait aux associés coopérateurs comme aux membres des conseils d'administration des coopératives vendant ces produits de devenir membres des instances dirigeantes des chambres, qu'il s'agisse des bureaux des chambres départementales ou du conseil d'administration des Chambres d'agriculture France. C'était se priver d'un vivier considérable.

L'article 1er de la proposition de loi lève donc cette incompatibilité, moyennant une règle de déport pour les travaux relatifs au conseil concernant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques.

Les autres articles, plus techniques encore, concernent la MSA. L'article 2 supprime la nécessité d'être à jour de ses cotisations pour participer aux élections aux instances de la MSA. Il clarifie également la délimitation de la circonscription de la métropole de Lyon. L'article 3 réaligne les dates de ces élections, désorganisées en 2020 par la crise sanitaire.

Le Sénat a supprimé l'article 1er ter, introduit par l'Assemblée nationale, qui demandait un rapport sur l'opportunité d'élire les représentants aux chambres d'agriculture à la proportionnelle intégrale. Nous avons considéré qu'il n'était pas opportun d'ouvrir une réflexion sur une refonte du mode de scrutin juste après les élections. Les résultats proclamés la semaine dernière montrent une stabilité de la participation, mais aussi la perte par le duo Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) et Jeunes Agriculteurs de quinze chambres, dont onze au profit de la Coordination rurale en plus des trois qui lui étaient déjà acquises ; une est allée à la Confédération paysanne et trois à des listes autonomes. C'est la preuve que la démocratie agricole est bien vivante. Le mode de scrutin peut se révéler avantageux pour toutes les forces politiques : les minoritaires d'aujourd'hui sont les majoritaires de demain.

Le Sénat a aussi adopté en séance un amendement, défendu par Christian Redon-Sarrazy, tendant à rétablir la condition supprimée à l'Assemblée nationale selon laquelle il faut être à jour de cotisations pour être éligible comme délégué ou administrateur d'une caisse de mutualité sociale agricole. Ce rétablissement nous a semblé à tous logique. L'article 2 donne aux agriculteurs qui rencontrent des difficultés financières la possibilité de s'exprimer, ce qui est bienvenu. Mais, pour représenter une organisation et participer à sa gestion, il paraît nécessaire d'être en règle vis-à-vis de cette même instance.

Je suis heureuse de constater que nos rapporteurs, Vincent Louault, que je remplace, et Nicole Le Peih, se sont mis d'accord pour adopter le texte voté par le Sénat.

Les articles introduits par l'Assemblée nationale accroissent l'intérêt de cette proposition de loi, notamment l'article 1er bis B, qui reporte les élections de la chambre d'agriculture de Mayotte.

Ce texte ne constitue qu'une première étape - le Sénat a proposé des réformes beaucoup plus substantielles qui seront, je l'espère, soumises prochainement à l'Assemblée nationale -, mais il est indispensable de l'adopter.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Nous avons su examiner dans des délais très brefs ce texte utile et attendu des professionnels du monde agricole.

L'accord est déjà acquis sur les principales dispositions du texte : les bureaux des chambres d'agriculture pourront continuer d'être ouverts aux présidents et administrateurs de coopératives agricoles qui ont fait le choix de poursuivre leurs activités de vente de produits phytopharmaceutiques. Il était nécessaire de ne pas priver les chambres de l'expertise et de l'engagement de ces dirigeants. C'est une urgence, puisque les bureaux des chambres doivent être constitués très rapidement. Ce cumul ne doit pas remettre en cause le principe de séparation de la vente et du conseil : la règle de déport est maintenue et sera précisée.

L'Assemblée a aussi choisi d'améliorer la transparence et la publicité des travaux des chambres. Le Sénat a confirmé cette avancée, ce dont je me réjouis.

Concernant la MSA, la proposition de loi comportait des mesures d'urgence visant à assurer la sécurité juridique des prochaines élections. Elle permet par ailleurs aux adhérents qui ne seraient pas à jour de leurs cotisations sociales de participer aux élections de leurs délégués. C'est une mesure juste et qui va dans le sens de la simplification administrative.

Les débats parlementaires ont permis une autre avancée : l'instauration de listes paritaires dans le collège des salariés de la MSA.

Deux points restent en discussion. À cet égard, le texte adopté par le Sénat me paraît le plus adapté à la situation du monde agricole.

Je ne suis pas favorable à l'idée de demander au Gouvernement un rapport sur l'opportunité d'adopter un mode de scrutin proportionnel intégral. D'abord, il serait illusoire de croire qu'un tel rapport règlerait le débat sur la démocratie agricole - sujet d'importance sur lequel nous devrons prendre le temps de dialoguer. Ensuite, le moment est mal choisi : se demander s'il faut changer le mode de scrutin au moment où les élections se terminent enverrait un mauvais signal. Cela donnerait l'impression que nous remettons en cause la légitimité des résultats, ce qui pourrait se révéler dangereux. Le monde agricole a besoin de stabilité.

Le Sénat a aussi souhaité rétablir la condition selon laquelle il faut être à jour de ses cotisations pour être candidat aux élections de la MSA. Je suis favorable à cette disposition. C'est n'est pas seulement une question morale, même s'il me paraît préférable d'être exemplaire pour devenir délégué de la MSA. Il s'agit aussi d'une question pratique et de connaissance des sujets. Les agriculteurs en difficulté peuvent demander un échéancier de paiement de leur dette ; lorsqu'ils l'obtiennent, ils sont considérés comme à jour de leurs cotisations et peuvent se porter candidats. Les rares personnes qui ne pourraient pas candidater sont celles, très peu nombreuses, qui ne connaissent pas ces démarches ou qui n'ont pas souhaité les mener.

La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.

Article 1er ter

Mme Murielle Lepvraud, députée. - Je trouve dommage de supprimer ce rapport, qui pourrait constituer un point d'appui utile sans introduire de désordre, madame Le Peih. Dans le Cher, aux dernières élections, dans le collège des chefs d'exploitation, la Coordination rurale a obtenu 45,6 % des voix, mais treize sièges sur dix-huit. Nous voulons au contraire favoriser le pluralisme et rétablir les équilibres dans chaque instance en assurant une meilleure représentation de toutes les listes, comme la Cour des comptes l'a demandé dans un rapport de 2021.

M. Benoît Biteau, député. - Ce rapport pourrait nous éclairer utilement. Si cette proposition de loi revient sur la séparation du conseil et de la vente, c'est au motif d'une crise des vocations : il est de plus en plus difficile de trouver des gens pour représenter les agriculteurs dans ces instances. Or, préférant m'attaquer aux causes qu'aux conséquences, je me demande si le mode de scrutin actuel, qui concentre le pouvoir entre les mains de ceux qui ont déjà l'habitude de représenter la profession agricole dans d'autres cénacles, n'est pas l'une des causes de ces difficultés de recrutement. Un scrutin proportionnel intégral diversifierait beaucoup la représentation du monde agricole et nous permettrait de sortir de cette crise des vocations ; il nous aurait peut-être évité de revenir sur cette séparation de la vente et du conseil.

L'article 1er ter est supprimé.

Article 2

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Supprimer la condition selon laquelle il faut être à jour de ses cotisations causerait des effets indésirables ; en croyant aider les agriculteurs, on créerait de l'incohérence. Le candidat qui n'est pas à jour de ses cotisations mais qui serait élu délégué ne pourrait pas, par la suite, être élu membre du conseil d'administration de sa caisse. Nous serions face à deux catégories inégales de délégués.

Il paraît donc préférable à vos rapporteurs d'adopter la version votée par le Sénat, moyennant une modification rédactionnelle.

M. Benoît Biteau, député. - Je plaide pour que ceux qui rencontrent des difficultés pour payer leurs cotisations à la MSA puissent malgré tout siéger dans les instances. Leur témoignage doit être entendu. Je vous rejoins pour dire que ceux qui accèdent à des responsabilités au sein de la MSA doivent être engagés dans une procédure de régularisation, avec un échéancier, afin qu'ils exposent non seulement leurs difficultés mais leur parcours pour en sortir et les solutions proposées, par exemple, par le tribunal de commerce.

Mme Dominique Estrosi Sassone, vice-présidente, rapporteur pour le Sénat. - Ils peuvent s'exprimer et ils peuvent demander un échéancier en cas de difficultés financières. Mais, pour participer à la gestion des caisses, il faut être à jour de cotisations.

Mme Nicole Le Peih, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - S'ils ont un échéancier, ils sont considérés comme à jour et peuvent être candidats.

L'accompagnement est en effet essentiel ; c'est le rôle des chambres d'agriculture.

M. Christian Redon-Sarrazy. - Des élus qui ne seraient pas à jour de leurs cotisations pourraient être en difficulté dans certaines délibérations, se trouver en décalage. Leurs pairs élus sont là pour être leur porte-parole et faire connaître les difficultés. Le texte adopté par le Sénat me paraît le plus raisonnable.

M. Benoît Biteau, député. Je trouverais judicieux que ces agriculteurs en difficulté puissent s'exprimer eux-mêmes : ils ne se sentent pas toujours bien représentés. Ils ne connaissent pas non plus toujours le parcours qu'ils doivent suivre pour sortir de l'ornière. La solution la plus équilibrée serait que la gouvernance leur soit ouverte à la condition qu'ils soient engagés dans une sortie de crise, avec un échéancier validé par le tribunal de commerce.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant diverses mesures visant à adapter le fonctionnement des instances de gouvernance des chambres d'agriculture et de la Mutualité sociale agricole.

La réunion est close à 15 h 15.