Mardi 29 octobre 2024
- Présidence de M. Laurent Lafon, président -
La réunion est ouverte à 14 heures.
Mission d'information sur l'intervention des fonds d'investissement dans le football professionnel français - Examen du rapport d'information
M. Laurent Lafon, président. - La mission d'information sur la financiarisation du football arrive au terme de ses travaux. Je vous rappelle que, pour cette mission, la commission a été dotée de pouvoirs d'enquête pour une durée de six mois, à compter du 27 mars dernier.
Je remercie le rapporteur, Michel Savin, pour son travail, ainsi que les collègues qui ont suivi, pour certains avec assiduité, les nombreuses auditions que nous avons réalisées.
Une soixantaine d'acteurs ont été entendus : des experts, des représentants des « familles » du football, y compris les supporters, des représentants de la Fédération, de la Ligue de football professionnel (LFP) et de sa société commerciale LFP Media, des responsables politiques, des représentants de fonds d'investissement et, bien sûr, des présidents de clubs : 12 présidents de Ligue 1 et de Ligue 2, dont certains se sont manifestés spontanément auprès de nous pour être auditionnés. Tous ou presque se sont prêtés de bonne grâce à l'exercice.
Par ailleurs, le rapporteur a pleinement utilisé les pouvoirs d'enquête conférés à la commission, puisqu'il a obtenu de la LFP environ 80 documents internes.
Nous nous sommes également rendus au siège de la Ligue et de sa société commerciale, le 12 septembre dernier, dans le cadre d'un contrôle sur pièces et sur place consacré à l'évolution des moyens de ces instances et aux conséquences de l'attribution des droits audiovisuels du championnat, au cours de l'été.
Nous avions d'ailleurs reporté ce contrôle, prévu quelques jours plus tôt, afin de ne pas interférer avec le processus électoral qui a abouti, comme vous le savez, à la réélection de Vincent Labrune à la tête de la LFP le 10 septembre dernier.
La Ligue a parfaitement joué le jeu, sur ce plan, puisqu'elle nous a transmis tous les documents que nous avons demandés et s'est efforcée de répondre à toutes nos interrogations.
Le fonds d'investissement CVC, les conseils de la Ligue et bien sûr, le ministère des sports, ont également coopéré utilement avec la mission.
L'ensemble de ces travaux aboutit à un certain nombre de constats et de recommandations, que le rapporteur va vous présenter.
Des erreurs ont sans doute été commises au cours des dernières années dans la gestion du football professionnel français. Ces erreurs placent les clubs dans une situation très délicate. Les sommes réparties entre eux cette année, au titre des droits audiovisuels, diminueront de 60 % - c'est une moyenne, donc certains verront des baisses plus importantes. Parallèlement, l'accord avec CVC prend pleinement effet, conduisant à un prélèvement de 120 millions d'euros sur la saison 2024-2025.
Il ne s'agit toutefois pas, aujourd'hui, de « refaire le match » des dernières années, ce qui serait un exercice facile. Il s'agit de se demander si une certaine forme de persévérance dans l'erreur ne révèle pas, en fait, des dysfonctionnements plus profonds dans la gouvernance du football professionnel français. Tel a été, je crois, l'esprit du rapporteur !
Le Sénat est ici parfaitement dans son rôle, étant donné la subdélégation de service public dont bénéficie la Ligue et parce que nous contrôlons l'application de la loi. Il l'est également, eu égard au rôle joué par les clubs dans les territoires. Lorsqu'un club est en difficulté, les pouvoirs publics sont immédiatement sollicités. Le sujet doit donc être traité en amont.
Plusieurs propositions du rapporteur pourraient servir de base à une proposition de loi, afin de prolonger ce travail de contrôle en ouvrant la voie à des évolutions législatives - je souhaite qu'une telle proposition de loi soit transpartisane.
Je laisse maintenant la parole à Michel Savin pour vous présenter le rapport, non sans vous avoir préalablement demandé de respecter la confidentialité de ces propositions durant les 24 heures suivant l'adoption du rapport.
M. Michel Savin, rapporteur. - Merci à chacun d'entre vous pour votre participation à nos travaux et à vous, Monsieur le Président, pour votre implication. C'était important pour ce travail, on l'a vu lors des auditions : une véritable équipe était à la commande de cette mission.
Cet été, dans la négociation des droits audiovisuels, les présidents de club ont traversé une période des plus difficiles, ils sont passés de la peur de l'écran noir et d'une catastrophe économique, à la désillusion face aux résultats de l'appel d'offres validé fin juillet, où ils ont dû accepter environ 600 millions d'euros au lieu de 1,1 milliard qu'ils espéraient. Comment en est-on arrivé là ? Je commencerai par quelques constats, avant d'en venir aux recommandations.
Sur Mediapro, tout d'abord. Lors des auditions, nous sommes revenus sur la genèse de l'accord de la LFP avec le fonds d'investissement CVC. En mars 2020, le Gouvernement décide de suspendre, puis d'interrompre le championnat à cause du covid. Cette décision était sans doute prématurée, alors que tous les autres grands championnats européens ont repris ensuite. La LFP refuse alors toute négociation des droits et Mediapro est placé en octobre sous le régime de la conciliation.
Pouvait-on sauver Mediapro ? Il est permis d'en douter, tant les difficultés structurelles étaient grandes. Aucun accord n'avait été trouvé avec Canal+. La chaîne ne comptait que 530 000 abonnés. Ses demandes étaient sans commune mesure avec le préjudice subi. Et les ordonnances covid lui permettaient de neutraliser toute action en justice de la LFP.
La Ligue avait précédemment sélectionné un diffuseur à la réputation discutable, sans garantie opérationnelle et adossé à un actionnaire chinois aux intentions floues. Elle a fait les frais de ce choix en 2020.
Amazon, ensuite. Alors qu'un rapprochement était possible avec Canal+ début 2021, ce n'est pas la voie qui a été suivie. Les dirigeants de clubs ont préféré parier sur le géant de l'internet - et diviser au passage les audiences du championnat par cinq. Le choix d'Amazon a acté le divorce avec Canal+. Ce choix est d'autant plus problématique qu'il a reposé sur une présentation tendancieuse des deux offres concurrentes, celle de Canal+ et beIN d'une part, et celle d'Amazon d'autre part. Les dirigeants du football français ont considéré que la part variable proposée par Canal+ représentait un risque majeur. La prudence l'a emporté sur l'ambition. Amazon, pour qui la Ligue 1 était un produit d'appel dans son offre globale, a subi des pertes importantes et s'est retiré après trois saisons.
J'en viens à la société commerciale. Après avoir échoué à atteindre le milliard d'euros avec Mediapro, la Ligue s'est tournée vers un nouvel eldorado, pour compenser le manque à gagner. En effet, les clubs n'avaient pas attendu les paiements de Mediapro pour accroître leurs dépenses. Ils se sont lancés dans une quête d'argent frais dès la fin 2020.
La possibilité d'un endettement, au moins partiel, a été rapidement écartée. Cette option ne semble pas avoir été véritablement étudiée. Ce qui pose question, c'est que les dirigeants de la LFP avaient objectivement un intérêt personnel à choisir de recourir à la cession d'une partie du capital de la société commerciale plutôt qu'à la dette, compte tenu des bonus importants qu'ils percevraient alors.
Je ne reviens pas sur le volet législatif, et sur la possibilité de créer une société commerciale, que vous connaissez. Nous ne disposions que d'informations très sommaires sur le processus en cours, lorsque nous avons examiné la loi du 2 mars 2022. Or, le processus de consultation lancé par la LFP auprès de divers fonds d'investissement était déjà très avancé. Après la promulgation du texte, une véritable course contre la montre s'est engagée. Le déclenchement de la guerre en Ukraine a paru mettre en péril l'opération projetée. Une assemblée générale décisive a eu lieu en avril 2022. Les présidents de clubs ont reçu, 48 heures avant, les statuts et le pacte d'associés de la nouvelle société. Ils n'ont pas pu appréhender tous les enjeux du contrat, d'autant que certaines pièces étaient manquantes. Plusieurs présidents ont confirmé ne pas avoir pris connaissance des documents. La perspective de la distribution de fonds aux clubs l'a emporté sur toute autre considération.
Les enjeux du partenariat avec CVC ont été sous-estimés, y compris au niveau de la fédération et du ministère des sports. La durée quasi illimitée - 99 ans - de ce partenariat pose question, car cette durée est peu conciliable avec le code du sport qui prévoit des contrats de délégation et de subdélégation avec les fédérations et les ligues de durées limitées.
Ensuite, CVC n'est pas un actionnaire comme un autre. Ses actions lui donnent des droits privilégiés sur les revenus du football français. Son dividende, d'un taux de 13 %, est assis sur un résultat retraité, qui ressemble davantage à un chiffre d'affaires qu'à un résultat, puisqu'il englobe l'ensemble des recettes audiovisuelles et commerciales du championnat. Cette assiette inclut même les revenus des paris sportifs, ce qui est peu conforme à l'esprit des dispositions que nous avions adoptées en 2022. Les actions de CVC seront pleinement valorisées lors de leur revente à un nouvel actionnaire ; lequel n'aura, lui, rien apporté directement au football français. Dans le cadre d'opérations similaires, la Liga espagnole et le Tournoi des Six nations ont opté pour une durée de 50 ans.
J'en viens à la distribution de l'apport de CVC, qui s'élève à 1,5 milliard d'euros et qui a été versé en grande partie aux clubs. La clef de répartition retenue, favorable aux grands clubs, était spécifique à cette opération. Au même moment, la Ligue a adopté une nouvelle répartition des revenus audiovisuels, elle aussi favorable aux grands clubs, dont certains bénéficient de revenus de l'UEFA. Une Ligue 1 à plusieurs vitesses est donc en train d'émerger. Les sommes ont été réparties avec un fléchage souple, contrairement à ce qui a prévalu en Espagne, dans l'opération conclue entre la Liga et CVC. En France, la majorité des fonds a été allouée aux salaires et aux transferts, ainsi qu'au désendettement, tandis que 40 % ont été consacrés aux infrastructures et au développement.
Dans cette opération, les intermédiaires ont été largement rétribués : 37,5 millions d'euros leur étaient réservés, c'est davantage que les parts allouées à la FFF (20 millions d'euros) et à la plupart des clubs de Ligue 1 (33 millions d'euros). Les deux banques d'affaires ont perçu 24 millions d'euros. Quant à Vincent Labrune, il a touché un bonus de 3 millions d'euros et a triplé son salaire, qui est passé de 420 000 euros à 1,2 million d'euros par an. Des bonus peuvent se concevoir dans l'exercice par la Ligue de son coeur de métier, la commercialisation des droits, mais ils sont beaucoup plus discutables dans le cadre d'une augmentation de capital. La question d'un conflit d'intérêts se pose puisque, si l'utilité à long terme de l'opération avec CVC reste à démontrer pour les clubs, compte tenu du dividende qu'ils devront payer à vie, son intérêt pour les dirigeants de la LFP est en revanche évident, immédiat et sans contrepartie. Au même moment, la Ligue a acquis un nouveau siège pour 131 millions d'euros, alors même que les droits audiovisuels n'avaient pas encore été négociés.
Où en est-on aujourd'hui ? Le processus d'attribution des droits audiovisuels a révélé des failles dans la gouvernance du football professionnel français. Le président de la Ligue est resté aux manettes, alors même qu'une filiale commerciale a été créée pour gérer ce genre de négociations. Le Président de beIN Media Group, maison-mère de beIN Sports France, a participé au conseil d'administration qui a attribué les droits dont beIN est partiellement titulaire. DAZN est confronté au piratage et peut sortir de son contrat avec LFP Media dans moins de deux ans, d'après une clause qui a été demandée par les clubs, ce qui est difficilement compréhensible. BeIN sports n'a toujours pas signé d'accord avec la Ligue, pour un contrat qui s'élève à 98,5 millions d'euros...
Le football professionnel a besoin d'une gestion plus équilibrée, ce qui implique de nouvelles recettes et la diminution des charges des clubs - en mettant fin à la croissance effrénée des salaires des footballeurs - ou bien des propriétaires historiques mettront la clef sous la porte, au profit de fonds d'investissement qui arrivent puis repartent en fonction d'arbitrages financiers au niveau mondial. Les clubs participent à la vitalité économique de nos territoires et à leur identité, ils doivent rester au centre d'un écosystème avant tout local. Dix clubs de Ligue 1 sont aujourd'hui intégrés dans des structures multipropriétaires, généralement en seconde ligne par rapport à des clubs majeurs en Europe. En 2023 et 2024, l'UEFA a autorisé les clubs de Toulouse puis de Nice à participer à ses compétitions malgré la présence d'autres clubs issus de la même structure. Mais qu'en sera-t-il demain ? Les groupes multipropriétaires pourraient pousser pour des ligues de plus en plus fermées. Pour préserver notre modèle sportif, il nous faut continuer à travailler avec les instances internationales à la mise en place de règles adaptées.
Je vous propose quatre axes de recommandations pour un renforcement de la régulation.
Il s'agit, premier axe, de consolider le régalien, en imposant aux ligues professionnelles de rendre davantage compte de la mise en oeuvre de leur subdélégation. Dans ce cadre, les organes de contrôle doivent être renforcés et les principes d'unité, de solidarité et de mutualisation doivent être réaffirmés. Je vous propose d'harmoniser les durées de la délégation, qui est de 4 ans et de la sub-délégation, qui est de 5 ans, mais aussi de renforcer le contrôle et le suivi des clubs et de la Ligue. Un ratio de répartition des ressources entre clubs de 1 à 3 permettrait de renforcer le principe de mutualisation. Une réflexion doit être engagée sur la taxe « Buffet », pour tenir compte de la nécessité pour les clubs de diversifier leurs ressources. Il revient au ministère des Sports et à la FFF d'assurer un contrôle renforcé. Je propose de rattacher la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) à la Fédération. Enfin, toujours sur ce premier axe, je propose de relever le plafond du prélèvement sur les paris sportifs en ligne.
Deuxième axe, je propose d'améliorer la gouvernance des fonctions commerciales, en séparant clairement les ligues de leur filiale, en donnant au représentant de la fédération une voix délibérative dans la société commerciale et en associant mieux les dirigeants de clubs à la définition des orientations stratégiques.
Troisièmement, il est nécessaire de renforcer les exigences en matière d'éthique, de bonne gestion et de démocratie, en instaurant un plafond de rémunération pour les présidents de ligues, en mettant en place des pratiques de bonne gouvernance et en rationalisant la gestion des conflits d'intérêt. Il n'est pas acceptable qu'un membre du conseil d'administration d'une ligue puisse diriger une entreprise de diffusion audiovisuelle candidate aux droits. La place des administrateurs indépendants et celle des supporters doit être renforcée.
Enfin, le dernier volet des recommandations concerne l'économie du football. Les règles des appels d'offres ne permettent pas, aujourd'hui, d'optimiser leur résultat, le consommateur doit prendre plusieurs abonnements coûteux puis en changer à chaque nouvelle attribution de droits. La lutte contre le piratage doit se poursuivre, en complétant le dispositif que nous avions adopté en 2021. Je vous propose également de faire de la santé des joueurs une priorité en freinant l'augmentation du nombre de compétitions, de limiter l'effectif des équipes professionnelles et le ratio de masse salariale, de donner un pouvoir de blocage à la DNCG sur les reprises de clubs et de mieux contrôler la multipropriété en lien avec l'UEFA et la FIFA.
J'espère que nos travaux déboucheront sur une proposition de loi transpartisane.
M. Patrick Kanner. - Félicitations et merci pour ce travail important de lanceur d'alerte. Si nous en sommes là aujourd'hui, c'est qu'il y a eu une forme de libéralité, alors que notre droit doit être précisé. Je le dis pour ceux de nos collègues qui n'ont pas assisté aux auditions : nous avons, par moment, ressenti de la colère face à une certaine forme de légèreté et d'arrogance.
Un petit regret : j'aurais bien voulu entendre le président du club qui occupe la première place de la Ligue 1, dommage qu'il ne soit pas venu...
Je le dis au nom de mon groupe, nous sommes très favorables à vos recommandations et au principe d'une proposition de loi transpartisane à laquelle nous nous associerons. Nous sommes dans notre rôle de contrôle de l'action publique. La dernière journée de Ligue 1 a réuni plus de 300 000 spectateurs dans les stades, pour des matchs qui intéressent des millions de fans : le football est l'activité ludique et sportive la plus répandue dans notre pays, et derrière d'autres sports sont aussi concernés.
Je me réjouis du climat de confiance qui a présidé à nos travaux, animés par la volonté de faire évoluer l'organisation du sport professionnel dans le sens de l'intérêt général.
M. Stéphane Piednoir. - Merci pour ce travail important. Ce sujet mérite une attention particulière parce qu'il touche un grand nombre de Français, et parce qu'il est complexe dans ses imbrications et ses conséquences. La gestion du football a connu des dérives. Les téléspectateurs ne se retrouvent pas dans les arrangements passés pour la diffusion de leur sport favori parce que, pour le suivre, il leur faut plusieurs abonnements. Ce n'est pas le contrat qui avait été passé entre le football français et Canal+ en 1984. Les amateurs sont déboussolés par les choix hasardeux qui ont été fait et qui reposent sur une illusion : qui, en réalité, peut dire que le championnat français vaut 1 milliard d'euros ? On en arrive à des montages financiers illisibles. C'est pourquoi le travail de décryptage fait par le rapporteur est important.
La réaffirmation de la subdélégation de service public est essentielle, car elle semble avoir été perdue de vue. Et vous avez bien raison d'appeler à une réforme de la gouvernance pour éviter les conflits d'intérêts. Ce que nous avons découvert au cours de cette mission d'information ne doit pas perdurer - et j'ai, moi aussi, perçu l'arrogance de certains de nos interlocuteurs.
Le groupe LR est favorable à ce rapport et au principe d'une proposition de loi.
M. Michel Laugier. - Je vous remercie à mon tour pour ce travail important. Nous partageons votre constat intransigeant et implacable. Les constats du rapporteur reflètent la réalité et ont nécessité un effort particulier pour être obtenus de nos interlocuteurs. Le football est le sport numéro 1, celui où chaque Français est aussi un sélectionneur, où chacun refait le match, c'est un sport où s'expriment les passions. Son organisation est difficile à comprendre, il n'y a qu'à voir comment le président Vincent Labrune a été élu et réélu et comment fonctionne la LFP. L'invraisemblable feuilleton des droits audiovisuels dure depuis longtemps. Les diffuseurs ne parviennent pas à tenir leurs engagements alors qu'ils y parviennent chez nos voisins - et l'on finit par marcher sur la tête avec des chiffres qui sont irréalistes mais qui sont pris pour argent comptant par les clubs pour lancer leur saison. La saison actuelle a été lancée alors que les droits audiovisuels n'avaient pas été signés, je gage que les clubs vont devoir, au prochain mercato, vendre leurs meilleurs joueurs pour éponger leur dette... Les rentrées d'argent devaient servir à l'investissement. Une grande partie a servi à rémunérer les dirigeants et à acheter des joueurs, c'est regrettable.
Le groupe UC soutient vos recommandations, nous voterons ce rapport et nous sommes favorables à l'adoption d'une proposition de loi.
M. Adel Ziane. - Merci pour ces auditions très larges qui nous ont permis d'entendre beaucoup de monde, nous pourrions continuer puisqu'il y a encore beaucoup d'actualité sur le sujet - par exemple le coup de poing de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) contre le piratage, ou bien le refus de beIN Sport de payer une partie des droits... la situation, en réalité, est catastrophique.
Merci de rappeler le principe de la subdélégation : le football n'est pas l'affaire de quelques présidents de clubs qui règleraient les choses entre eux, c'est aussi l'affaire des territoires et celle des supporters. Vous insistez pour intégrer les supporters dans le conseil d'administration avec voix consultative, c'est utile, et vous appelez à la solidarité entre le football professionnel et le football amateur, c'est aussi une bonne chose. Le sujet de la multipropriété est un sujet grave, car la multipropriété revient à nier la place du football dans la société française et ses liens avec le sport amateur.
Vous avez également raison d'appeler à une gouvernance améliorée. J'ai été étonné par le manque de professionnalisme de certains dirigeants de clubs, qui ont signé l'accord avec CVC sans le lire, pour découvrir ensuite son contenu et tenter, mais trop tard, d'y revenir...
Enfin, il ne faut pas que l'élection à la présidence de la LFP puisse continuer à se dérouler comme elle vient de le faire : il a fallu l'intervention de la ministre pour que le président sortant ait un concurrent, et c'est finalement un conseil d'administration à la main du président sortant qui l'a réélu, ce n'est pas raisonnable - avez-vous une recommandation sur ce point spécifique ?
M. Jean-Jacques Lozach. - Toutes mes félicitations au rapporteur et à notre président, vous faites oeuvre utile. Il y a des failles dans la gouvernance, nous dites-vous, et elles se poursuivent. Les montants de droits sont pris pour argent comptant alors que les contrats ne sont toujours pas signés. Ce rapport est un signal d'alerte et la situation résulte aussi des conditions dans lesquelles nous avons adopté la loi du 2 mars 2022 - je rappelle que le volet relatif à la société commerciale avait été ajouté par amendement à l'Assemblée nationale.
J'espère que ce rapport débouchera sur une proposition de loi transpartisane. Nous avons ici l'occasion de préciser la notion de subdélégation, qui n'a jamais été claire, d'en dire le contenu et d'en préciser la pratique. Il est stupéfiant que la FFF ait été absente des sujets que vous avez traités. Il faudrait probablement entendre l'association nationale des ligues sportives professionnelles, parce que d'autres sports que le football sont concernés par la subdélégation.
Sur la recommandation n° 9, relative au plafond du prélèvement sur les paris sportifs, je préfèrerais un déplafonnement, plutôt qu'un relèvement du plafond : d'après les informations budgétaires dont je dispose, un déplafonnement pourrait rapporter 130 millions d'euros, c'est utile quand on sait qu'il va manquer au moins 170 millions d'euros au budget des sports, à périmètre constant...
Enfin, vous recommandez de renforcer les contrôles et notamment celui assuré par la DNCG, ce qui est essentiel, sans oublier une meilleure représentation de la FFF au sein de la société commerciale.
Mme Mathilde Ollivier. - Je vous félicite à mon tour pour ce travail de fond. Nous avons eu des auditions très intéressantes. Vous montrez les dysfonctionnements du football professionnel, j'ai été très marquée par ce défi de l'arrivée des fonds d'investissement, qui veulent prendre le pouvoir dans certains clubs. Cela pose la question du modèle économique du football français - différent de celui de nos voisins européens, en particulier sur la place qu'y prend la formation par les clubs.
Je partage la préférence pour un déplafonnement du prélèvement sur les paris sportifs en ligne, plutôt qu'un relèvement du plafond. Nous aurons ce débat en loi de finances. Je suis favorable au fléchage de ce prélèvement vers le ministère des sports, au service de la démocratisation du sport. Je crois aussi que le ratio de 1 à 3, pour la distribution des droits audiovisuels entre les clubs, est la clé pour limiter l'écart de richesse qui se creuse entre les clubs. Je suis également très favorable à votre recommandation n° 19 pour plafonner la rémunération des présidents de ligues professionnelles, c'est important quand on voit ce qui s'est passé avec Vincent Labrune.
Enfin, la recommandation n° 31 pour faire de la santé des joueurs une priorité me paraît essentielle. Des joueurs de haut niveau se trouvent épuisés parce qu'ils accumulent les matchs. Avez-vous évoqué cette recommandation avec l'Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP) ?
La réunion est suspendue de 14 h 50 à 15 h 00.
M. David Ros. - À mon tour de féliciter le duo d'attaquants de notre commission. J'arrive d'une mission d'observation des élections législatives en Ouzbékistan, et je peux vous dire que les élections ouzbèques sont bien plus transparentes que celles de la LFP... J'ai été très surpris par l'amateurisme de certains présidents de clubs : ils manipulent des sommes importantes avec une légèreté déconcertante. Les pratiques que vous dénoncez donnent l'image d'un football français qui n'est pas à la hauteur. Cependant, les résultats actuels des clubs de Lille, de Brest et de Monaco en Coupe d'Europe montrent qu'il y a lieu de redorer cette image au regard des résultats sportifs.
Quelques remarques sur les recommandations. Pour les recommandations n° 19 à 21, je me demande si la focale est assez large, et s'il n'y a pas lieu d'élargir l'obligation de transparence et le plafonnement salarial à d'autres fonctions.
La recommandation n° 32 en faveur d'une limitation à 30 contrats de l'effectif des équipes professionnelles de football m'invite à vous interroger sur les cas de blessures, ou sur une adaptation possible au nombre de compétitions du club, ou encore l'inclusion d'un quota de jeunes disposant d'un premier contrat professionnel, voire de quotas de joueurs nationaux - il y a peut-être des précisions à apporter, qu'en pensez-vous ?
Enfin, la recommandation n° 35 relève clairement de la FFF, elle seule peut porter le sujet de la multipropriété auprès de l'UEFA et de la FIFA.
M. Gérard Lahellec. - À mon tour de vous exprimer mes sincères compliments pour cette oeuvre salutaire accomplie avec sérénité. Vous faites oeuvre de salubrité pour défendre une discipline populaire solidement ancrée dans nos territoires. Dans les Côtes-d'Armor, nous avons le club de Guingamp, actuellement en Ligue 2 avec avoir été en Ligue 1. Son stade compte 17 000 places pour une ville de 7 800 habitants, c'est dire l'engouement pour ce sport, et c'est aussi pourquoi il faut veiller à ce que cette discipline ne soit pas entachée de manque de crédibilité. Il faut également penser à nos collectivités, qui sont pour quelque chose dans le fait que le football rayonne : elles financent, achètent et entretiennent des équipements... ce qui est une raison supplémentaire pour renforcer l'éthique et la rigueur dans la gestion du football. Il faut aller bien au-delà des contrôles réalisés par la DNCG.
Je partage donc vos recommandations et vous assure de notre disponibilité pour travailler sur une proposition de loi qui soit au service de l'ensemble du football et des territoires.
M. Michel Savin, rapporteur. - Merci pour vos retours. Je partage vos constats sur ce milieu très particulier qu'est le football professionnel. Au fil des auditions, la mission a mis en lumière des dysfonctionnements. Elle a renforcé ainsi sa crédibilité. Les retours de la majorité des acteurs du football sont très positifs, en particulier auprès de tous les amateurs qui ne comprennent pas que les places au stade soient si chères, et les instances si dispendieuses.
Il faut consolider le principe de la subdélégation, replacer la FFF et le ministère dans leur rôle d'autorités de contrôle. Chacun doit prendre ses responsabilités. Le Sénat avait proposé que la FFF ait une voix délibérative au sein de l'instance décisionnelle de la société commerciale. Celle-ci n'y était pas favorable - nous y revenons, c'est important.
Les auditions les plus constructives ont été celles qui se sont déroulées à huis clos. C'est le signe d'un milieu où certaines questions ne peuvent être abordées qu'en off.
La diminution de la valeur du championnat français appelle à trouver de nouveaux équilibres économiques. Les clubs professionnels ont parfois 40 contrats avec des joueurs, et quand c'est le cas, nous constatons qu'au moins 10 joueurs ne jouent jamais ; dans ces conditions, nous proposons de fixer une limite à 30 contrats, pour répartir mieux les ressources et avoir plus de moyens pour attirer certains joueurs. Il y aura un débat pour préciser les choses, mais le message aux clubs est là : cette course à l'augmentation des effectifs n'est pas souhaitable, surtout si c'est pour que des joueurs ne jouent pas...
Le football n'appartient pas à quelques-uns, et nous voulons aussi faire passer le message qu'avant de passer professionnels, les joueurs ont tous commencé dans des clubs amateurs : il faut plus de lien entre football professionnel et football amateur, en termes d'image, de solidarité et de financement.
Certains présidents de club n'avaient pas lu le pacte d'associés alors que celui-ci comprend des engagements très forts. Ils s'en sont justifiés en nous disant qu'ils avaient fait entièrement confiance à la Ligue ! Ce n'est pas raisonnable.
Nous proposons de rattacher la DNCG à la FFF pour garantir son indépendance.
Le ratio de 1 à 3 dans la distribution des droits est une clé pour conserver un championnat attractif. La répartition des droits doit être plus équilibrée pour limiter les écarts entre les clubs.
Nous avons auditionné l'Union nationale des footballeurs professionnels. La santé des joueurs doit être une priorité. Nombre de rencontres se déroulent principalement pour des motifs économiques, nous appelons à une vigilance particulière.
S'agissant de la gouvernance des ligues, nous demandons la présence de cinq administrateurs indépendants au lieu de trois afin que des projets alternatifs puissent être débattus.
Les collectivités territoriales ont un rôle à jouer. Elles sont souvent propriétaires des stades. Si une équipe disparait, c'est à elles qu'il revient de porter l'équipement.
Si je propose de relever le plafond du prélèvement sur les paris sportifs plutôt que de le déplafonner, c'est par réalisme, compte tenu de notre situation budgétaire. Cette année, le prélèvement a rapporté 35 millions d'euros à l'Agence nationale du sport, nous sommes donc loin de l'enjeu.
M. Jean-Jacques Lozach. - Attention, cependant : la recette sur les paris sportifs en ligne n'a jamais été aussi dynamique. Les Jeux olympiques et paralympiques et l'Euro de football auraient représenté environ 1 milliard d'euros de mises, c'est phénoménal - et n'oublions pas que l'on passe de trois à deux taxes affectées à partir de l'an prochain.
M. Laurent Lafon, président. - Merci à tous, je me réjouis de cette convergence autour des recommandations de notre rapporteur et d'une volonté commune d'adopter une proposition de loi.
Le feuilleton des droit audiovisuels n'est pas terminé et le football français continue de faire face à de nombreux défis. Le système s'est autonomisé depuis quelques années, au point que certains ont perdu l'esprit de la subdélégation et l'objectif final, qui est de servir les territoires, les supporters et les passionnés. Le poids des enjeux économique est devenu tel, que sans régulation, les difficultés risquent de s'aggraver. Notre travail collectif contribue à davantage de transparence.
Mme Monique de Marco. - Vous affirmez la nécessité d'une régulation, en effet souhaitable, mais prévoyez-vous de communiquer plus précisément sur le contenu de la proposition de loi que vous évoquez ?
M. Laurent Lafon, président. - L'idée est bien qu'une proposition de loi reprenne celles de nos recommandations qui relèvent de la loi.
M. Michel Savin, rapporteur. - Ces recommandations visent des acteurs multiples. Certaines relèvent de la LFP, d'autres relèvent de l'échelon international, par exemple notre appel à encadrer la multipropriété. Mais celles qui relèvent du domaine de la loi feront l'objet d'une proposition de loi, c'est bien notre intention et ce sur quoi nous allons communiquer.
Les recommandations sont adoptées à l'unanimité.
La mission d'information adopte, à l'unanimité, le rapport d'information et en autorise la publication.
La réunion est close à 15 h 30.
Mercredi 30 octobre 2024
- Présidence de M. Laurent Lafon, président -
La réunion est ouverte à 9 h 30.
Audition de M. Jean-Philippe Thiellay, président du Centre national de la musique
M. Laurent Lafon, président. - Nous recevons ce matin M. Jean-Philippe Thiellay, président du Centre national de la musique (CNM).
Je rappelle que les deux chambres du Parlement sont à l'origine de la création du CNM, avec une proposition de loi adoptée à l'unanimité en 2019. À ce titre, nous suivons avec une grande attention son développement et ses perspectives d'évolution. Nous avons ainsi eu l'occasion de rendre hommage à votre action durant la pandémie.
Cependant, une fois cette période passée, il vous a bien fallu, monsieur le président, revenir au quotidien et commencer à bâtir une structure durable en mesure de répondre aux objectifs fixés par la loi au service d'un secteur musical auquel nous sommes très attachés.
Votre dernière audition devant notre commission remonte au 19 octobre 2022 dans le cadre d'une table ronde que nous avions souhaité consacrer au sujet alors - et peut-être encore... - inquiétant du financement du Centre. Je garde en mémoire l'intérêt, mais aussi l'âpreté de nos échanges autour de la fameuse taxe « streaming » qui apparaissait, à la suite du rapport de notre ancien collègue Julien Bargeton, comme la seule solution en mesure d'assurer la pérennité du Centre.
Sur une initiative commune des commissions des finances et de la culture, le Sénat a introduit un article dans la loi de finances de 2024 pour créer cette fameuse taxe. Nous ne souhaitions pas que le CNM se transforme en coquille vide, mais au contraire qu'il dispose des moyens de ses ambitions, qui sont aussi les nôtres et celles de tout le secteur.
Monsieur le président, je vais vous laisser la parole pour nous permettre d'y voir plus clair, tout d'abord, sur l'industrie musicale en France en 2024 et vos prévisions pour 2025, ensuite sur vos perspectives financières. Dans quelles conditions se met en place la taxe streaming ? Que pensez-vous des moyens qui vous sont alloués, avec une diminution de 1,3 million d'euros de la dotation de l'État en 2025 ? En un mot, estimez-vous disposer des moyens suffisants pour remplir vos missions ?
Enfin, nous aimerions vous entendre sur le contrat d'objectifs et de performance (COP) que le CNM a signé avec le ministère le 21 juin dernier pour la période 2024-2028. Ce contrat va-t-il vous permettre de construire un CNM que l'on espère débarrassé des incertitudes financières et en mesure de financer ses priorités ?
De manière incidente, nous souhaiterions savoir si vous avez pu apaiser les relations avec une partie de l'industrie musicale qui avait exprimé certaines réserves.
M. Jean-Philippe Thiellay, président du Centre national de la musique. - Je suis très heureux d'être parmi vous ce matin. Le lien entre le CNM, établissement public du ministère de la culture, et la représentation nationale est très fort ; nous fêtons d'ailleurs aujourd'hui même le cinquième anniversaire de la promulgation de la loi qui a créé le Centre.
La filière musicale commence cette année à oublier la crise du covid. Les métiers sont très nombreux dans cette filière et je n'en citerai que quelques-uns.
Dans le live, le niveau d'activité aura été très élevé cette année. Nous allons dépasser, en ce qui concerne les musiques actuelles et l'humour, 1,5 milliard d'euros de recettes de billetterie, un record historique, bien au-delà de 2019. C'est aussi bien au-delà de ce que nous anticipions : en effet, on pouvait redouter un effet Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) sur la billetterie comme sur la disponibilité du matériel ou la mobilisation des intermittents, mais cet effet aura finalement été très limité.
Cette année record s'explique par un double mouvement sur l'offre et sur le prix. En termes d'offres, les grandes tournées internationales ont repris - je pense par exemple à Taylor Swift ou à Mylène Farmer. Parallèlement, le prix des billets a continué à augmenter. Davantage de concerts dans des jauges plus importantes et à des prix plus élevés donne une économie qui atteint des niveaux records en chiffre d'affaires.
Cela étant, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. Derrière ces grandes jauges, derrière les festivals qui mobilisent le plus, le paysage est très contrasté et il est particulièrement difficile économiquement pour de très nombreux acteurs du live, quelle que soit la nature juridique des entreprises. Dans les festivals en particulier, l'étude que nous avons rendue publique il y a dix jours sur l'été 2024, en partenariat avec le ministère de la culture, montre que, même ceux qui vendent plus de 90 % de leur capacité, un sur deux sera en déficit à la fin de l'année et seulement un sur quatre réalise des bénéfices, souvent très modestes.
Cette forte tension s'explique par l'inflation et par la hausse des cachets, notamment tirée par la reprise des circuits internationaux. De ce fait, les nuages, certes très localisés, menacent certains types d'entreprises qui travaillent dans le live musiques actuelles, ce qui pourrait aboutir à des annulations d'événements ou à des défaillances.
Cela pose la question d'une éventuelle concentration du secteur, à la fois de l'offre et des structures. Or nous devons être vigilants sur un tel phénomène qui est déjà une réalité dans le monde anglo-saxon, depuis le contrat d'artiste jusqu'à la billetterie en passant par les lieux et les festivals. Je vous rappelle que, selon la loi de 2019, la première mission du CNM est de « garantir la diversité » du secteur.
Dans la musique classique, nous ne disposons pas des mêmes outils d'observation - dans le live, nous avons la taxe sur la billetterie qui est un instrument de mesure incontestable -, mais les recettes stagnent, voire baissent, en particulier du fait de la réduction des subventions publiques. Cela se traduit par des mesures d'économies : moins de levées de rideaux, de productions, donc moins de cachets pour les artistes et de contrats pour les intermittents. Cela fait également peser une menace sur la richesse musicale de notre pays.
Dans la musique enregistrée, dont les liens sont de plus en plus forts avec le live, on enregistre une nouvelle année de croissance, que ce soit en France ou dans le monde, et ce grâce au streaming. Et cette croissance devrait se poursuivre : l'institut Media Research estime que le chiffre d'affaires mondial devrait passer de 30 milliards de dollars en 2023 à 50 milliards en 2030.
La production française et francophone se porte bien, avec un bon niveau de diversité, surtout dans les musiques actuelles, l'électro, la chanson et le rap. Les résultats internationaux sont tout à fait remarquables : en 2023, le nombre d'albums ou de titres ayant atteint les seuils diamant, or ou platine a crû de 30 % par rapport à 2022. Ce sont les meilleurs résultats de l'histoire de la musique produite en France.
Pour autant, comme le marché mondial est en très forte croissance, notre part de marché - je suis désolé de parler ainsi, parce que la musique n'est pas un bien comme un autre - recule : nous étions à la cinquième place, mais la Chine nous devance, tout simplement parce que les populations écoutant une langue chinoise sont très nombreuses dans le monde. Ce sera sûrement le cas de l'Inde demain pour la même raison.
Je note d'ailleurs qu'il y a eu un effet JOP très intéressant : le formidable travail des équipes du comité d'organisation sur la cérémonie d'ouverture, avec une très grande diversité des musiques jouées, allant d'Aya Nakamura à Ravel, s'est nettement traduit dans les écoutes mondiales.
Les plateformes de streaming sont toujours en phase de transition, mais nous observons avec beaucoup d'intérêt que les leaders en France - Spotify et Deezer - ont atteint ou sont sur le point d'atteindre la rentabilité. C'est très positif, parce que ces plateformes représentent, pour les mélomanes et les artistes, la meilleure nouvelle que l'industrie musicale ait connue depuis vingt ans et la terrible crise du piratage.
Nous avons encore un point de vigilance sur le taux de pénétration du marché. La France continue d'avoir du retard en termes de nombre d'abonnements payants. Le consentement à payer progresse, mais les Français font certainement des arbitrages économiques. Nous voulons encourager ces abonnements, parce qu'ils créent de la valeur, ce qui permet ensuite de rémunérer les ayants droit.
Ainsi, la production musicale locale en live ou enregistrée est plutôt forte, mais l'environnement est extrêmement concurrentiel et instable d'un point de vue économique. Ce sont ces « failles de marché », pour reprendre l'expression de votre ancien collègue Julien Bargeton, qui justifient l'existence d'un établissement comme le nôtre avec des missions et des financements publics.
J'en viens justement au CNM. Il est sûrement encore un peu tôt pour dresser un bilan complet, mais il me semble - et je crois que c'est aussi l'avis des professionnels - qu'il a tenu les promesses faites au moment de l'examen de la proposition de loi qui a abouti à sa création.
En effet, la filière est réunie et la gouvernance fonctionne. Il est vrai que les années 2022 et 2023 ont été marquées par des confrontations d'opinions et des tensions, en particulier dans la perspective de la création de la taxe streaming. C'est le Gouvernement, du fait de l'utilisation du 49.3 à l'Assemblée nationale, qui a pris la responsabilité, avec l'accord du Président de la République, de créer cette taxe. De mon côté, j'ai veillé à réunir l'ensemble des acteurs - les plateformes, les labels, les ayants droit, les organismes de gestion collective (OGC), etc. - dès le début de cette année. Le CNM est un peu leur maison commune, ce qui se reflète dans nos instances : un conseil professionnel de quarante membres, dans lequel à peu près tous les secteurs sont représentés, à l'exception de la facture instrumentale et un conseil d'administration large - quarante membres - qui fait toute l'originalité de notre établissement.
Comme toute structure, le CNM a connu des difficultés à la sortie de la crise covid. Aujourd'hui, l'établissement fonctionne bien et le Contrat d'objectif et de performance (COP) signé avec la ministre de la culture le 21 juin dernier est le résultat d'un travail sérieux qui nous permet de nous projeter à trois ans.
Par ailleurs, nos actions sur l'export et l'aide au développement international de la musique n'ont cessé de croître : elles ont été multipliées par 3,5 par rapport à 2019. Je rappelle que la promotion de la diversité est l'une des missions essentielles du Centre ; cela passe évidemment par la promotion internationale. Il y a de belles opérations à réaliser à l'international et de la valeur à créer.
Cette promotion passe aussi par les territoires, et nous avons passé des contrats de filière avec les régions, des départements et des métropoles. Nous menons aussi de telles actions outre-mer, un formidable terrain de diversité et de richesse pour la musique.
Enfin, le CNM fournit de nombreuses prestations de services non financiers. Nous ne cessons d'augmenter notre offre de formation professionnelle. Nous allons, par exemple, ouvrir dans quelques semaines une plateforme de formation en ligne qui permettra à nos concitoyens ou aux francophones, en particulier outre-mer et à l'étranger, de se former sans venir à Paris.
Le volet études et publications de nos missions est également très important. Je vous parlais tout à l'heure d'une étude sur les festivals et nous avons publié, dans le cadre de CNMlab, laboratoire d'idées en lien avec le monde académique, un ouvrage sur l'artiste et l'entrepreneuriat. Nous travaillons aussi, par exemple, sur la décarbonation de la filière. Nous remplissons également des missions d'information et de conseil. Dans ce cadre, nous avons organisé des journées « portes ouvertes » un peu partout en France.
En ce qui concerne maintenant la taxe streaming, instaurée depuis le 1er janvier dernier, elle est perçue par la direction générale des finances publiques (DGFiP), à la différence de la taxe sur la billetterie que nous collectons nous-mêmes. À ce jour, nous avons encaissé à ce titre 7,13 millions d'euros et nous devrions atteindre environ 9,3 millions en fin d'année. Cela représente une enveloppe sensiblement inférieure à celle que nous avions budgétée - 15 millions -, ce qui s'explique par un démarrage relativement lent : il a notamment fallu attendre que les entreprises atteignent le plancher d'imposition fixé à 20 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Surtout, la circulaire fiscale correspondante n'a toujours pas été publiée au bulletin officiel et des entreprises attendent, de bonne foi ou non, je ne le sais pas, sa publication avant de procéder aux versements. Le nombre de contribuables n'est pas très élevé et le CNM comme le secteur ont tout intérêt à ce que nous atteignions rapidement un rythme de croisière. D'où l'importance de publier cette circulaire !
Nous avons pris acte de cette situation en modifiant notre budget. Toujours est-il que nous avons déjà pu, grâce à cette taxe, financer des mesures qui n'auraient pas pu l'être autrement. Le produit de cette taxe est entièrement réinjecté dans des aides concrètes, et n'est pas utilisé pour le fonctionnement de l'établissement. Parmi les nombreux projets que nous avons ainsi aidés, je peux citer Anne Paceo dans le jazz ou des clips de Sofiane Pamart, de Julien Doré, de Dany Brilland, de Barbara Pravi ou de Flavien Berger. Vous le voyez, nous aidons des artistes qui sont plébiscités : c'est pour eux que l'effet de levier justifie une intervention publique.
Les aides à l'export se sont élevées à 4,5 millions d'euros, notamment pour des tournées et la promotion d'artistes. Je pense par exemple à Zaho de Sagazan, qui rencontre un grand succès sur le marché international, à Pomme ou à Indila, mais aussi aux tournées du Cercle de l'Harmonie et des Arts florissants pour la musique classique.
Enfin, j'en viens à l'année 2025.
Nous sommes en train de refondre notre dispositif d'aides qui ressemble encore trop à ce qui préexistait à la création du CNM. Nous voulons davantage de simplicité et nous voulons nous adapter aux besoins des entreprises, tout en tenant compte d'une réalité budgétaire inédite. Je ne peux vous donner plus de détails parce que cette refonte sera examinée par notre conseil d'administration en fin d'année, mais nous ne voulons plus d'aides automatiques. Nous envisageons ainsi, du fait de la mise en place de la taxe streaming et des besoins de solidarité, de faire évoluer le droit de tirage sur la taxe billetterie dont 65 % sont aujourd'hui redistribués à ceux qui la payent.
D'un point de vue budgétaire, le projet de loi de finances prévoit une baisse de 1,3 million d'euros de notre subvention pour charge de service public, ce qui représente 5 % de la subvention versée en 2024. Le CNM prendra donc sa part aux efforts d'économies dont le pays a besoin ; nous absorberons cette baisse dans les dépenses de fonctionnement et nous décalerons des investissements. Je ne suis donc pas là pour me plaindre des arbitrages.
Le projet de schéma d'intervention, qui sera également adopté par le conseil d'administration en fin d'année, prévoit une baisse de 25 millions d'euros par rapport à 2024, ce qui sera insuffisant si le droit de tirage reste inchangé.
Cela me fournit une transition pour évoquer devant vous un sujet majeur de préoccupation : le plafonnement des ressources issues des taxes billetterie et streaming. Aujourd'hui, la taxe billetterie est plafonnée à 50 millions d'euros pour le CNM, c'est-à-dire que chaque euro perçu au-delà est en fait versé au budget général de l'État. Nous atteindrons ce plafond en fin d'année et il sera certainement dépassé de plusieurs millions l'année prochaine.
Cela nous pose une difficulté administrative, économique, symbolique et politique. Ainsi, on ne sait pas gérer le droit de tirage, si le plafond est dépassé : un refus de notre part pourrait présenter le risque d'être qualifié de rupture d'égalité par le juge.
De plus, la taxe billetterie a été conçue pour accompagner la croissance de la filière ; le plafond a d'ailleurs été revu à quatre reprises. Le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale a parlé de « rythme de croisière » pour les recettes de ces deux taxes, mais la filière ne connaît pas de rythme de croisière, elle croît ! Si on maintient le plafonnement au même niveau, cela signifie qu'on surtaxe un secteur dynamique qui crée de l'emploi et qui irrigue les territoires. Ce n'est pas justifié d'un point de vue politique d'autant que, lorsqu'elle a été créée, cette taxe constituait en quelque sorte un contrat avec les entreprises et les organisations professionnelles. Si les professionnels jugent que le contrat est rompu dans le cas où le Gouvernement et le Parlement estiment que chaque euro perçu au-delà du plafond vient réduire les déficits publics, les conséquences seront, selon moi, catastrophiques pour le fonctionnement de l'écosystème de la musique. C'est pourquoi j'espère qu'un amendement sur ce sujet sera adopté durant les débats budgétaires.
Il en va de même pour la taxe streaming : elle croît rapidement, nous devons prendre les devants en termes de plafonnement.
Par ailleurs, nous avons plusieurs sujets de clarification ou de précision ; je n'en citerai que deux pour ne pas être trop long.
Nous souhaitons qu'un amendement puisse nous permettre d'améliorer notre accès aux données fiscales pour la taxe streaming. Nous ne voulons pas aller à l'encontre du principe du secret fiscal, mais comme nous collectons déjà la taxe billetterie, nous ne sommes pas n'importe quel intervenant. Aujourd'hui, nous sommes un peu aveugles lorsque nous dialoguons avec les plateformes, ce qui est dommage.
La DGFiP prélève des frais de gestion de 4 % sur la taxe streaming, soit un taux plus élevé que celui qui est appliqué au Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC). Nous ne comprenons pas bien cette différence.
Pour conclure, le CNM continuera en 2025 à travailler pour faire en sorte que la filière musicale française remporte de nombreux succès et soit diverse. Nous préparons notamment une « Music Week », comme l'a annoncé le Président de la République.
Mme Karine Daniel. - Je voudrais d'abord vous interroger sur la mission d'observation de la filière musicale qui incombe au CNM. Il nous remonte souvent de la part des professionnels une polarisation croissante entre, d'un côté, de très grands événements - vous avez parlé de Taylor Swift ou de Mylène Farmer - et, de l'autre, les plus petites structures. Cela pose d'ailleurs aussi, outre des problèmes de diversité, la question de la couverture territoriale des spectacles.
Vous avez cité Zaho de Sagazan, c'est un bon exemple : elle a émergé à Saint-Nazaire et Nantes, elle réalise une carrière incroyable, elle permet le rayonnement de la scène musicale française, mais les structures où elle a démarré sont, pour leur part, en grande difficulté. Nous devons mieux accompagner les structures qui s'occupent de manière précoce d'artistes, qui les lancent.
Nous disposons de leviers ; vous avez ainsi évoqué le déplafonnement des taxes sur les spectacles et le streaming et le rétablissement de l'équité.
Le déplafonnement sera plus facile à porter politiquement si les objectifs du CNM en termes de développement territorial et d'accompagnement sont affirmés et renforcés. Sur ce volet, souhaitez-vous flécher plus particulièrement les dispositifs visant les artistes ou ceux qui sont destinés à soutenir des structures ?
Ce soutien passe-t-il par des appels à projets ? Ce dispositif ne suscite pas toujours l'enthousiasme des structures, lesquelles sont d'ores et déjà en situation de surcompétition...
Pour ce qui concerne les festivals, on observe une très grande polarité entre les évènements très importants et les petits. Un quart des festivals affiche un résultat bénéficiaire, ce qui est peu. Je signale, par exemple, que le festival Les Escales, à Saint-Nazaire, où s'est produite Zaho de Sagazan à ses débuts, est déficitaire depuis plusieurs années.
Organiser un festival, c'est prendre un risque, qu'il soit lié à la météorologie ou à la concurrence d'autres spectacles. Comment couvrir ces risques ? Faut-il inventer des dispositifs spécifiques ? J'observe que plusieurs salles annulent leur festival annuel ; ce n'est pas une bonne nouvelle, car les charges fixes sont ainsi reportées sur la programmation de la saison tout entière.
Quid de la question de l'éducation artistique et culturelle (EAC), que vous avez peu évoquée ?
La réforme du pass Culture annoncée par la ministre pourrait-elle donner lieu à une demande spécifique de la filière musicale ?
M. Jean-Philippe Thiellay. - Qui doit-on aider, pour quels types de projets et selon quelle philosophie ? Il est difficile de répondre à ces questions dans un contexte de refonte de nos dispositifs et de baisse des crédits par rapport au budget pour 2024. Pour autant, nous disposerons tout de même de 45 millions d'euros de plus qu'en 2019 ; nous pourrons donc continuer à agir.
Le CNM soutient le secteur phonographique et le spectacle vivant, avec une attention spécifique portée aux salles de spectacle ou aux festivals de taille intermédiaire, qui prennent des risques plus limités que les « grosses machines » et sont présents partout sur le territoire. Cela implique davantage de solidarité et de redistribution au sein de la filière, ainsi qu'un fonctionnement par appels à projets afin de veiller au respect des critères que nous fixons - par exemple, le respect de conditions de diffusion : il convient de justifier d'une pluralité de dates en plusieurs points du territoire, et non pas d'un seul concert.
La notion de prise de risque que vous avez évoquée est au coeur de la philosophie du CNM, dont l'une des missions est d'encourager celle-ci tout en l'atténuant. Dans le champ privé, par exemple, nous refusons d'aider une structure qui prendrait un risque excessif ou qui manquerait de professionnalisme.
La proximité au sein des territoires est, selon nous, essentielle, car elle est liée à la vie de nos concitoyens et permet de diminuer le bilan carbone du public, lequel parcourt parfois des kilomètres en voiture pour aller écouter un artiste.
Notre politique d'aide est fondée sur les notions d'émergence et de structuration - cette dernière recouvre la formation et l'accompagnement autre que financier -, ainsi que sur le développement international. Il faut prendre en compte un phénomène nouveau : la désintermédiation croissante dans la filière musicale ; nombreux sont les artistes qui se considèrent comme des entrepreneurs, voire des autoentrepreneurs, pour le meilleur - ils sont plus libres par rapport aux labels et aux producteurs - et pour le pire, lorsqu'ils sont en situation de fragilité.
Vous avez dit, madame Daniel, que le déplafonnement, ou tout au moins le rehaussement du plafonnement des taxes serait plus facile à défendre si l'on avait une idée claire du fléchage. J'y insiste, le produit de la taxe de billetterie et de la taxe streaming est intégralement réinjecté dans la filière musicale. Le fléchage est clair, et défini en examinant comment évolueraient certains secteurs s'ils ne disposaient pas de cette ressource. Il doit être conforme aux intérêts de la filière, ce qui implique une concertation permanente avec les professionnels concernés pour fixer les orientations budgétaires.
Je n'ai pas évoqué l'EAC, car, au CNM, nous ne savons pas très bien comment appréhender ce sujet, qui n'est d'ailleurs pas au coeur de nos missions. Pour notre part, nous aidons surtout les entreprises, et un peu les auteurs-compositeurs. Pour autant, nous veillons toujours à ce que les entreprises qui sollicitent notre soutien mènent une action de démocratisation et de médiation.
Sur le pass Culture, grâce auquel des milliers de billets de concert ont pu être achetés, notamment dans les festivals, j'ai noté avec intérêt les propositions de la ministre : faire en sorte que cet outil incite encore davantage à se rendre dans les lieux du spectacle vivant, c'est une excellente idée.
Mme Else Joseph. - Avec mes collègues Sylvie Robert et Monique de Marco, corapporteures avec moi du bilan de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP), nous avons relevé que ladite loi avait institué un observatoire de l'économie de la musique destiné à mieux connaître les ressorts économiques du secteur et à établir une plus grande transparence entre tous les acteurs. Par ailleurs, le CNM s'est doté d'une direction des études et de la prospective qui produit chaque année des études thématiques et permet de répondre à des demandes spécifiques du ministère. Cette activité repose sur une démarche de concertation avec les représentants de la filière, mais son bilan est décevant selon certains observateurs. Que pouvez-vous nous en dire ?
La taxe streaming n'est pas à la hauteur des montants attendus. De ce fait, quelles sont les répercussions sur les utilisateurs des plateformes et sur l'organisation du CNM ?
Le bilan des festivals est assez satisfaisant, mais leur modèle économique et leur concentration suscitent des inquiétudes. Combien de temps ce modèle peut-il tenir face aux pressions des majors de la musique ?
Quelles actions menez-vous en direction des musiques religieuses et des polyphonies, qui font partie de notre patrimoine immatériel ? Comment attirer de nouveaux publics, y compris profanes ? Comment réagir face au dénigrement malveillant qui vise les musiques classiques ?
Mme Monique de Marco. - Quel manque à gagner le plafonnement des taxes a-t-il entraîné ? J'annonce à mes collègues que nous présenterons un amendement sur ce sujet à l'occasion de l'examen du PLF.
M. Pierre-Antoine Levi. - Le COP que vous avez récemment signé avec la ministre de la culture prévoit-il des dispositions spécifiques permettant d'éviter une cascade de défaillances dans le secteur festivalier ?
Les tarifs d'assurance des évènements en plein air ont augmenté de 56 % entre 2019 et 2023. Pourriez-vous intervenir auprès des assureurs pour garantir aux festivals une couverture assurantielle à des prix raisonnables ? Comment envisagez-vous la répartition de l'effort entre l'État, les collectivités territoriales et les acteurs privés pour consolider durablement le modèle économique des festivals ?
L'intelligence artificielle (IA), que vous avez définie comme l'un des défis majeurs du secteur musical, représente à la fois des opportunités considérables et des risques potentiels pour nos artistes et nos industries culturelles. Pouvez-vous nous présenter le dispositif d'observation et de veille mis en place par le CNM pour anticiper ces évolutions ? Comment accompagner les artistes face à l'émergence des nouveaux outils d'IA générative ? Comment le CNM contribue-t-il à la protection du droit d'auteur dans ce nouveau contexte technologique ? Quelle collaboration européenne et internationale développez-vous sur ces questions ?
Mme Marie-Pierre Monier. - Vous avez publié le 17 octobre dernier le baromètre de l'emploi 2023 dans le secteur de la musique et du spectacle vivant, qui a mis en lumière des inégalités de rémunération. Quelle action mettez-vous en oeuvre pour assurer un égal accès des femmes et des hommes aux professions musicales ? Quelles pistes nouvelles proposez-vous dans ce domaine ?
Les ressources de nos collectivités sont mises à mal dans le projet de loi de finances pour 2025. Quel en sera l'impact sur la contribution du CNM au spectacle vivant dans les territoires ?
Par quelles actions favorisez-vous l'émergence de nouveaux artistes ?
M. Pierre Ouzoulias. - Je vous remercie pour la franchise de vos propos et pour les appels à l'aide que vous avez bien voulu adresser à notre commission de la culture.
Le ministère de la culture fonde de plus en plus ses politiques nationales sur des opérateurs dont la survie économique dépend de taxes affectées, ce qui nous inquiète. La décision incohérente de la DGFiP relative à la taxe sur la diffusion en continu - permettez-moi de parler français ! -, dite taxe streaming, pourrait ainsi donner lieu à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Pourquoi, dans ces conditions, la DGFiP ne ponctionnerait-elle pas des frais de gestion sur la future billetterie de Notre-Dame de Paris ?... Ce sera sans fin !
Comment s'articule la politique portée par le CNM, que je trouve intéressante, avec la politique ministérielle sur la musique ? Quelle forme prend votre collaboration avec le ministère de la culture ?
M. Laurent Lafon, président. - Le terme « frais de gestion » recouvre en réalité la création d'une taxe sur une taxe...
M. Bernard Fialaire. - Vous nous invitez à déposer un amendement visant à déplafonner la taxe de billetterie. Quand on connait la situation financière de notre pays et au moment où on va taxer les superprofits de certaines entreprises, la profession musicale est-elle prête à assumer une telle mesure ?
M. Jacques Grosperrin. - Spotify et Deezer sont désormais presque rentables, et leurs utilisateurs paient leur abonnement plus cher en France que dans les autres pays européens. De ce fait, les aides à destination des festivals sont-elles appelées à diminuer ?
Du fait des coupes budgétaires prévues, les départements risquent de remettre en cause les festivals présents sur leur territoire. Pouvez-vous dresser un état des lieux de ces évènements ? Comment voyez-vous leur avenir ?
M. Jean-Philippe Thiellay. - Madame Joseph, la direction des études et de la prospective du CNM a repris la mission que le Centre national de la chanson, des variétés et du Jazz (CNV) assumait avec les « moyens du bord », si je puis dire ; elle fournit en effet les études économiques, les baromètres réguliers et les études ad hoc que le ministère de la culture peut lui demander.
Il fallait progresser au niveau du travail mené en concertation avec les professionnels afin de mieux comprendre leurs besoins, et c'est ce que nous avons fait. Il est en effet important de savoir où le CNM peut apporter de la valeur ajoutée, notamment d'un point de vue prospectif.
Monsieur Fialaire, la réduction de la subvention pour charge de service public va peser sur le CNM, notamment sur certains de ses programmes d'aide.
Pour ce qui concerne le plafonnement de la taxe sur les spectacles, il faut savoir que les services de Bercy ne comptaient pas sur les ressources du CNM. Rehausser ce plafond ne portera donc en rien atteinte à l'équilibre budgétaire. Avec le déplafonnement, nous parlons de 1 ou 1,5 million d'euros en 2024 et de 2 ou 3 millions en 2025 : si les conséquences pour le budget de l'État sont modestes, en revanche, elles seront massives pour la filière musicale où l'on fait beaucoup avec peu. Je rappelle que les aides du CNM sont plafonnées : les plus importantes, dédiées à la restructuration des entreprises en difficulté, n'excèdent pas 200 000 euros, quand le montant moyen d'aide se situe entre 15 000 et 20 000 euros.
Avec 2 millions ou 3 millions, Madame de Marco, ce sont donc des milliers d'entreprises qui seront soutenues, notamment dans les territoires.
La taxe streaming acquittée par les acteurs économiques de la filière représente 1,2 % d'une partie de leur chiffre d'affaires. On ne sait pas grand-chose des répercussions de ce dispositif sur les relations contractuelles entre les plateformes et les labels, qu'il s'agisse de majors ou d'indépendants, ou avec les organismes de gestion collective. À cet égard, j'ai entendu à peu près tout et son contraire, mais il est certain que tous ces acteurs ne paient pas 1,2 % !
J'observe, pour répondre à M. Grosperrin, que certains opérateurs ont augmenté leurs prix de 10 %, y compris dans des pays où la taxe streaming n'existe pas. Il y a donc eu beaucoup de gesticulations... Dans une économie libérale, les acteurs s'adaptent et répercutent ; quoi qu'il en soit, les plateformes ne seront pas menacées. Quant à savoir qui paie quoi, c'est un véritable sujet ; à cet égard, le secret des affaires peut légitimement être opposé.
Plusieurs d'entre vous m'ont interrogé sur la situation des festivals, qui suscite une forte préoccupation. Je souhaite que soit maintenu à l'occasion des arbitrages budgétaires un niveau d'intervention suffisant pour les programmes d'aide à la restructuration économique et aux entreprises en difficulté, soit environ 4 millions d'euros - le niveau de 2024.
Il convient de réfléchir à une évolution des modèles économiques, notamment des politiques relatives aux cachets et aux tournées. Ainsi, nous travaillons avec l'association Écocène et le syndicat des musiques actuelles (SMA) en toute confiance. Par ailleurs, les pouvoirs publics ne sont pas complètement au point, du fait de l'empilement de politiques durant de longues décennies. Il y a des recoupements : par exemple, les directions régionales des affaires culturelles (Drac) soutiennent les festivals de musique classique, mais aussi un peu ceux de musiques actuelles...
Je partage la préoccupation de M. Levi sur l'assurabilité. Je rappelle que nous sommes attachés à la copie privée, qui permet de financer l'action culturelle des OGC, et très indirectement celle du CNM. Il ne faut pas désarmer nos modestes programmes d'aide aux entreprises. Quant aux pouvoirs publics, ils doivent faire un effort de rationalisation et d'efficience de leur action.
Durant la crise du covid, j'avais tenté de mobiliser la Fédération Française de l'Assurance sur le sujet de l'assurabilité, sans succès. Je vais renouveler cette démarche.
Madame Monier, favoriser l'émergence de nouveaux artistes est au coeur de nos missions. Ainsi, nous n'aidons un festival que si une part de sa programmation est réservée à des artistes émergents.
Le CNM mène une action déterminée pour lutter contre les violences et le harcèlement à caractère sexuel et sexiste. Nous avons aussi mis en place à titre expérimental des mécanismes de bonus dans le secteur phonographique, afin de majorer les aides lorsque la direction artistique est assurée par une femme.
Monsieur Levi, la veille technologique portant sur l'innovation fait partie de nos missions. Le sujet de l'IA est complexe et mouvant, mais nous avons posé le principe suivant : le CNM n'accordera pas un euro d'aide à une oeuvre créée sans intervention humaine. La filière musicale doit se saisir de l'IA, qui est partout - elle peut concerner la billetterie comme la composition d'oeuvres - ; nous souhaitons donc encourager les start-up qui veulent investir dans ce domaine.
Nous sommes très attachés au droit d'auteur et travaillons de pair avec la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) sur ce point.
Le CNM a créé en 2024 sa direction des affaires européennes et du développement international afin d'échanger avec la Commission européenne et nos partenaires au sein de l'Union, mais cette direction ne pèse pas très lourd... C'est un travail compliqué, que nous menons en étroite intelligence avec le ministère de la culture.
Monsieur Ouzoulias, le CNM étant un opérateur, il ne saurait définir la politique du ministère de la culture. Lors de son déplacement au Printemps de Bourges, la ministre a signalé qu'elle avait demandé dès sa nomination quelles étaient les orientations du ministère en matière de politique musicale, et qu'elle avait été très surprise par le silence gêné qui s'était ensuivi.
La politique musicale est difficile à définir. L'État ne peut pas tout, loin de là, et les collectivités territoriales ont un rôle majeur à jouer à cet égard.
Quelle politique en matière de diffusion ? Mieux produire et mieux diffuser, c'est un début. S'il existe une politique pour la musique classique depuis Marcel Landowski, les choses sont moins claires pour les musiques actuelles ; et la nature ayant horreur du vide, cela revient au CNM.
Nous travaillons très bien avec Mme Dati et son cabinet sur la taxe streaming et l'aide à la production phonographique, notamment. Avec la direction générale de la création artistique (DGCA), il subsiste des calages anciens, indépendants des personnes en place. Ainsi, pour les festivals, nous pouvons faire mieux.
M. Laurent Lafon, président. - Nous vous remercions pour ces réponses précises, et nous avons bien noté les messages que vous nous avez communiqués. Il est très important pour nous de continuer à suivre l'activité, croissante, du CNM et de veiller à ce que les moyens nécessaires soient déployés pour permettre à la filière de se développer, dans un contexte très concurrentiel.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 11 heures.
- Présidence de M. Laurent Lafon, président -
La réunion est ouverte à 17 heures.
Projet de loi de finances pour 2025 - Audition de M. Gil Avérous, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative
M. Laurent Lafon, président. - Monsieur le ministre, nous sommes heureux de vous accueillir pour votre première audition devant notre commission dans vos nouvelles fonctions de ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
Au nom des membres de la commission, je vous souhaite la bienvenue au Sénat ainsi qu'un plein succès dans vos missions. Nous serons soucieux de travailler conjointement avec vous et vos services, et sommes engagés de longue date sur les questions relevant désormais de vos compétences.
La commission ne s'est pas économisée ces derniers temps sur l'ensemble de ces sujets. Je pense notamment au rapport sur l'intervention des fonds d'investissement dans le football français, adopté hier à l'unanimité par la commission, mais aussi aux travaux entrepris par Claude Kern et Jean-Jacques Lozach sur le suivi de l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris. En matière de jeunesse et de vie associative, je rappellerai les propositions de loi sur le service civique déposée par Patrick Kanner et celle visant à soutenir l'engagement bénévole et à simplifier la vie associative adoptée par le Sénat en avril dernier. Vous aurez peut-être l'occasion de nous préciser comment vous entendez faire vivre ces différentes initiatives parlementaires dans les semaines à venir.
L'année 2024 a été une grande année pour l'exposition du sport en France avec la réussite, dont nous nous félicitons tous, des jeux Olympiques sur le plan tant de la performance sportive que de l'organisation et de l'adhésion de nombreux Français. Se pose désormais la question de leur héritage dans un contexte budgétaire contraint, pour le ministère des sports comme pour les collectivités.
Avant que vous nous présentiez vos priorités et leurs traductions budgétaires en 2025, une première question : dans son discours de politique générale fin janvier, Gabriel Attal, alors Premier ministre, avait annoncé la création d'un service civique écologique, ouvert à 50 000 jeunes. Cet objectif est-il maintenu ? S'agit-il de missions supplémentaires ou de nouvelles missions se substituant à celles déjà existantes ?
M. Gil Avérous, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. - C'est un honneur pour moi que d'être devant vous pour la première fois, dans mes nouvelles fonctions, pour vous présenter la feuille de route de mon ministère et répondre à vos questions.
Mon ministère - de plein exercice - regroupe les sports, la jeunesse et la vie associative, à la demande du Premier ministre, qui souhaitait considérer ces trois composantes avec une attention toute particulière au regard de leur impact sur la société, au lendemain de jeux Olympiques et Paralympiques dont on peut saluer la bonne organisation, l'effet de concorde qu'ils ont suscité et l'image extraordinaire de la France qu'ils ont donnée à l'étranger. J'étais, il y a quelques jours, à la conférence du conseil de l'Europe des ministres responsables du sport à Porto et l'ensemble de ceux qui se sont succédé à la tribune se sont félicités de l'image que la France avait donnée de l'Europe à l'occasion des jeux. C'est une fierté.
La diminution des crédits du ministère est très largement faciale. En réalité, j'ai les moyens de préserver nos politiques et de maintenir nos ambitions.
Comme je vous l'indiquais dans mon courrier du 15 octobre dernier, les moyens de la jeunesse et de la vie associative progressent de 36 millions d'euros par rapport à 2024. On peut donc maintenir la cible de 150 000 volontaires du service civique par an. Nous abondons les crédits de l'Agence du service civique, qui manquait de trésorerie.
Les crédits du sport baissent de 268 millions d'euros. Trois éléments l'expliquent : tout d'abord l'extinction des dépenses liées à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques pour 151 millions d'euros, répartis en 86 millions d'euros sur le programme 350 dédié aux infrastructures des jeux et 65 millions d'euros sur le programme 219, qui finançaient les primes aux médaillés, des animations ponctuelles et la billetterie populaire. Cette baisse des crédits ne fragilise en rien la défense de l'héritage des jeux.
Autre cause de cette baisse, l'ajustement des prévisions de décaissement pour le plan « Génération 2024 » qui finance les équipements sportifs. En effet, seuls 4 millions des 100 millions d'euros ont été dépensés à ce jour, ce qui laisse 96 millions d'euros de report sur 2025. Le ministère du budget nous alloue donc 100 millions d'euros d'autorisations d'engagement, mais les crédits de paiement ne sont pas abondés en raison du report des crédits de 2024. Cela ne mettra pas l'Agence nationale du sport (ANS) en difficulté, car elle a une trésorerie importante. Elle pourra répondre aux demandes des collectivités.
Un troisième poste de réduction de dépenses est le Pass'Sport, avec 10 millions d'euros de crédits non consommés en 2024. Nous réaffectons, en 2025, les crédits à la hauteur de la consommation de 2024. C'est un pari, car on peut légitimement craindre, ou espérer, qu'il y ait plus de demandes de Pass'Sport du fait d'une hausse des inscriptions dans les clubs sportifs ce qui imposerait de recentrer le nombre de bénéficiaires en cours d'année.
Enfin, une baisse de 4 millions d'euros est liée aux deux heures de sport au collège, dont le coût réel est plus faible que ce qui avait été prévu. La consommation, en 2024, a donc été moindre que ce qui avait été voté en loi de finances.
Mon budget s'articule autour de trois grandes priorités : faire vivre l'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques ; soutenir l'engagement et l'autonomie des jeunes citoyens ; maintenir le soutien à la vie associative et au bénévolat.
Les JOP ont été un formidable succès populaire et sportif, qu'il nous appartient désormais de faire vivre pour que la France soit une nation sportive. Nous devons aussi nous tourner dès maintenant vers les jeux de 2030. Hors mesures exceptionnelles liées aux Jeux Olympiques, le soutien à la performance sera stabilisé à hauteur de 108 millions d'euros, comme en 2024, afin d'ancrer durablement la France dans le top 5 des nations olympiques et le top 8 des nations paralympiques. J'ai demandé à l'Agence nationale du sport de chercher des marges dans son budget afin d'accroître les moyens dédiés à la performance et éviter toute perte de dynamique dans la préparation des futures compétitions mondiales.
Nous avons des établissements publics d'excellence : les centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (Creps), l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep) et les écoles nationales. Leur budget progresse, de 142 millions à 146 millions d'euros, hors mesures exceptionnelles liées aux JOP.
Faire de la France une nation sportive, c'est aussi encourager la pratique du sport pour le plus grand nombre. Nous continuerons à encourager l'opération « Bouge 30 minutes chaque jour » et à poursuivre un effort particulier auprès des publics les plus éloignés du sport : ce sont notamment les jeunes. Nous les atteignons avec le Pass'Sport, dont 3,5 millions de personnes ont bénéficié depuis sa création, et qui est préservé à hauteur de 75 millions d'euros. Nous encourageons le sport féminin, en nous appuyant sur les jeux Olympiques, premiers jeux paritaires de l'histoire. Quant aux personnes en situation de handicap, nous poursuivons en 2025 le programme de 30 minutes d'activités sportives quotidiennes dans les établissements sociaux et médicosociaux. On pourrait aussi parler de l'accompagnement des clubs vers l'intégration des sportifs porteurs de handicap.
La stratégie nationale du sport santé sera poursuivie, avec un budget stabilisé à 7,5 millions d'euros. Un nouveau plan sport santé couvrira la période 2025-2030. Nous devons poursuivre les efforts en matière d'équipements sportifs pour les collectivités territoriales : c'est le sens du plan « Génération 2024 » qui fait suite au plan « 5 000 terrains de sport ». Les niveaux d'engagement sont préservés, à 100 millions d'euros d'autorisations d'engagement en 2025, comme en 2024.
Nous travaillerons avec les élus, dont l'Association nationale des élus en charge du sport (Andes), pour réformer le modèle des subventions en faveur des équipements sportifs, le but étant de simplifier les procédures pour les porteurs de projets, créer une plus grande cohérence avec les projets territoriaux et fédéraux, améliorer l'articulation avec les autres crédits d'État que sont le fonds vert, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). Il faudra sans doute décharger l'Agence nationale du sport de l'instruction des subventions et confier cette tâche ainsi que les enveloppes budgétaires à l'échelon départemental, afin que les préfets et sous-préfets y décident de la meilleure répartition, et ce pour éviter les déceptions actuelles des collectivités territoriales. Je souhaite mettre fin à la multiplication des dossiers administratifs et améliorer l'identification de l'aide de l'État sur ces projets.
Pour répondre à la demande urgente des clubs de disposer de créneaux de pratique, je souhaite que l'on travaille avec les départements ainsi qu'avec les lycées, dont les gymnases sont inoccupés après le temps scolaire. Cela nécessite de travailler des dispositifs de contrôle d'accès voire de sécurisation du périmètre lorsque l'établissement scolaire dispose d'un internat. Actuellement, un quart des gymnases sont mutualisés : allons plus loin ! Il s'agit d'équipements publics, même s'ils ne relèvent pas de la collectivité la plus locale.
La qualité de notre politique sportive passe aussi par le maintien de ses moyens humains. Les effectifs du ministère sont préservés avec 1 442 conseillers techniques sportifs (CTS). En 2025, nous renforcerons les liens entre le monde sportif et le service civique, en affectant prioritairement des volontaires aux clubs qui en ont besoin.
Nous soutiendrons l'autonomie des jeunes citoyens par une feuille de route interministérielle. J'ai demandé au Premier ministre que mon ministère en soit le chef de file, en lien avec le ministère de l'éducation nationale, celui du travail ou encore celui en charge du logement au titre de la politique de la ville, pour élaborer un plan « Jeunesses ». Il n'y a pas, dans notre pays, une seule jeunesse, mais plusieurs, qui ont des besoins spécifiques.
L'Agence du service civique bénéficiera de 600 millions d'euros en 2025, soit une hausse de 81 millions d'euros, pour être à la hauteur de l'objectif de 150 000 volontaires. Le service civique écologique sera poursuivi en 2025. Je vous donnerai plus de précisions dans un instant.
Le mentorat, déployé depuis 2021, verra la majoration de 5 millions d'euros de sa dotation pérennisée en 2025.
Enfin, les moyens des « colos apprenantes » seront reconduits en 2025 à hauteur de 40 millions d'euros, comme en 2024.
Les finalités du service national universel (SNU) sont indiscutablement louables : engagement, cohésion autour des valeurs de la République, mixité sociale. Toutefois, comme la Cour des comptes le relève, il convient de s'interroger sur son format, ses contours et son coût. Les crédits pour 2025 ne permettront pas d'aller au-delà de ce qui a été réalisé en 2024.
J'en viens au soutien à la vie associative et au bénévolat. Les moyens dédiés aux associations sont préservés. La dotation du fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) est stabilisée à 37 millions d'euros. Les moyens du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) sont reconduits à hauteur de 33 millions d'euros, complétés de 35 millions d'euros liés à une quote-part des comptes bancaires inactifs récupérés par l'État.
Pour simplifier la vie des associations, nous continuerons à nous appuyer sur le réseau Guid'Asso pour offrir un service de proximité, d'accueil et de conseil aux associations. Ses moyens seront portés à 7,4 millions d'euros, soit 800 000 euros de plus, pour le déployer sur l'ensemble des régions, notamment ultramarines.
Nous nous appuierons aussi sur les outils numériques que sont « Le Compte Asso » et la plateforme jeveuxaider.gouv.fr, mettant en relation bénévoles de plus de 16 ans et structures qui en ont besoin. Je souhaite m'appuyer sur le formidable élan suscité par les jeux en matière de volontariat et accompagner cette dynamique.
Je ne serai pas plus long, laissant la place aux questions auxquelles je répondrai de manière détaillée.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis sur les crédits du sport. - Félicitations pour votre nomination, monsieur le ministre. Je salue le fait que vous soyez un ministre de plein exercice, mais aussi la simplification qui résultera du fait que votre portefeuille correspond très exactement au périmètre de la mission budgétaire correspondante.
À la lecture du PLF pour 2025, nous avons l'impression que le triptyque composé des jeux Olympiques et Paralympiques, de la grande loi annoncée depuis près de deux ans sur l'héritage olympique et de la trajectoire budgétaire correspondante, a du plomb dans l'aile. Tout le monde le reconnaît, nous avons connu des JOP exceptionnels. Le meilleur moyen de prolonger leur effet était de disposer d'un budget du sport à la hauteur. Or les crédits du programme 219 reculent de 170 millions d'euros, hors sommes allouées à la préparation des JOP.
Ma première série de questions portera sur la grande loi sur l'héritage des jeux, censée servir de passerelle entre la mise en place de l'ANS en 2019, la loi de démocratisation du sport de 2022 et la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030. Est-elle toujours à l'ordre du jour ? Si oui, quelles en seront les priorités ? Quelle méthodologie sera appliquée à sa préparation ?
Par ailleurs, vous ouvrez la porte à un déplafonnement partiel ou total du prélèvement en faveur du sport sur les paris sportifs en ligne. Nous le souhaitons, car cette recette n'a jamais été aussi dynamique. Cette année, l'Euro de football et les jeux ont engendré plus de 1 milliard d'euros de mises. Un déplafonnement total permettrait d'engranger 113 millions d'euros de recettes supplémentaires. Êtes-vous défavorable à ce déplafonnement ?
Dans une interview, le 6 octobre, le Premier ministre a déclaré vouloir : « rapprocher les agences du sport et le ministère des sports ». Une tutelle du ministère sur l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) constituerait un recul inacceptable. Nous nous sommes en effet battus pour que l'AFLD bénéficie d'une autonomie. Que signifie la phrase du Premier ministre ?
Une de vos priorités est la haute performance. Aurez-vous les moyens de maintenir l'aide individualisée aux sportifs inscrits sur la liste des sportifs français de haut niveau ? Leur garantissez-vous 40 000 euros par an ?
Ce qui vous sauve, monsieur le ministre, c'est que le sport est transversal et financé par d'autres ministères que le vôtre - éducation nationale, santé, affaires étrangères, travail... Disposez-vous d'une estimation fine de la baisse des crédits alloués au sport en 2025, tous ministères confondus ? En 2024, la totalité des interventions ministérielles était évaluée à 6,5 milliards d'euros - dont seulement 2 milliards d'euros en provenance du ministère des sports.
M. Yan Chantrel, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à la jeunesse et la vie associative. - Je m'associe aux félicitations exprimées pour votre nomination, monsieur le ministre.
La hausse de 36 millions d'euros dont bénéficie le programme 163 « Jeunesse et vie associative » paraît en trompe-l'oeil : comme vous l'avez indiqué, elle est principalement due à l'augmentation de 81 millions d'euros pour le service civique et à la revalorisation de la trésorerie de l'Agence pour le service civique. Celle-ci avait bénéficié de 250 millions d'euros dans le cadre du plan de relance en 2020 et sa trésorerie a depuis fondu comme neige au soleil. Cette revalorisation est appréciée - elle était plus que nécessaire -, mais d'autres postes diminuent en parallèle.
Parmi ceux-ci, si je me réjouis de la baisse des crédits alloués au service national universel au sein du projet de loi de finances pour 2025, je m'interroge tout de même sur le maintien de ce dispositif très coûteux, dans un contexte marqué par de très fortes restrictions budgétaires. Pourriez-vous nous indiquer les perspectives de déploiement du dispositif dans les années à venir ? Votre prédécesseur souhaitait généraliser le SNU. Irez-vous dans le même sens ?
Le contexte inflationniste inquiète toujours fortement les acteurs du monde associatif. De nombreuses structures, notamment d'éducation populaire, alertent sur la pérennité à très court terme de leurs activités et de leurs emplois. Le milieu associatif souffre encore également de la complexité des démarches administratives. Dans ce contexte, nous avons adopté une loi en avril dernier pour soutenir l'engagement bénévole et simplifier la vie associative. Au cours des débats, avait été évoquée la possibilité pour les associations d'être éligibles au régime du groupe TVA. Avant toute modification législative, le Gouvernement doit au préalable consulter le comité TVA européen, ce que votre prédécesseur s'était engagée à faire. Où en est cette consultation ? J'en profite pour vous signaler que plus de six mois après la promulgation de cette loi, aucun décret d'application n'a pour le moment été publié. Quand cette loi sera-t-elle pleinement applicable ?
Enfin, la mobilité internationale des jeunes est un facteur majeur d'intégration sociale et professionnelle qui doit être encouragé. Dans son discours sur l'Europe de septembre 2017, le Président de la République se donnait pour objectif que 50 % d'une classe d'âge ait passé au moins six mois dans un autre pays européen en 2024. Cet objectif sera-t-il atteint à la fin de l'année ?
Le budget de votre ministère n'est pas le seul à porter les actions concernant la vie associative ; il y a aussi celui des collectivités territoriales, lesquelles jouent un rôle majeur de cohésion sociale, qu'il ne faut pas ignorer.
M. Michel Savin, président du groupe d'études Pratiques sportives et grands événements sportifs. - La loi relative à l'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques aurait, à nos yeux, dû être débattue en amont pour être effective dès le lendemain de leur clôture pour faire de la France une grande nation sportive. Nous sommes loin de cet objectif.
Vous avez précisé que seuls 4 millions des 100 millions d'euros prévus pour les équipements structurants avaient été consommés. C'est difficilement audible pour un parlementaire. L'Agence nationale du sport a répondu favorablement à l'ensemble des collectivités, en fonction du budget qui lui était alloué. Le gouvernement précédent a gelé les crédits, ce qui a empêché leur déblocage par l'agence. Les collectivités qui ont reçu une notification d'éligibilité sont maintenant dans l'attente de ces crédits. L'ANS a peut-être les fonds propres suffisants, mais elle risque d'être en grande difficulté en cas d'année blanche du financement des équipements structurants. Sur le terrain, nombre de communes nous sollicitent, car elles attendent une réponse. Nous ferons tout pour abonder la ligne budgétaire correspondante.
J'ai à ce propos une proposition à vous faire. À une époque, le Parlement avait voté le relèvement du taux des prélèvements sur les paris sportifs afin de financer les stades, en préparation de l'Euro de football. Cette taxe supplémentaire de 25 à 30 millions d'euros par an était fléchée en ce sens. Seriez-vous prêt à relever le taux pour affecter le produit aux équipements structurants ?
Cela permettrait de cibler un équipement dont, chaque année, on débat au Parlement : les piscines. Cette année encore, on a dénombré dans notre pays plus de 1 400 noyades, dont 361 mortelles. La politique d'apprentissage de la natation exige des équipements de qualité. D'où la question que je viens de vous poser.
Par ailleurs, si l'ANS a répondu présent sur la haute performance, les procédures de subventions en faveur des collectivités territoriales sont particulièrement complexes. Confier leur arbitrage aux préfets apporterait bien plus de transparence.
Enfin, je partage les propos tenus sur le SNU. Il faut revoir à la baisse le montant correspondant. Peut-être doit-on garder les crédits nécessaires pour les engagements déjà pris en 2025 ; pour le reste, il y a là des gisements d'économies que l'on pourrait flécher vers les équipements structurants.
M. Gil Avérous, ministre. - Monsieur le président, vous m'avez interrogé sur la façon dont je souhaite faire vivre les différentes initiatives parlementaires. Très concrètement, en sortant de cette audition, je rencontre le sénateur Dominique Théophile sur le sport outremer. Je veux prendre les préconisations des rapports les plus récents et faire le point avec leurs auteurs, afin de voir quelles sont les marges de progression. On gagnerait à mener ce travail en commun.
En 2024, 6 000 volontaires, sur les 150 000 en service civique, ont réalisé un service civique écologique. Ce ne sont donc pas des missions supplémentaires. Nous visons un objectif de 10 000 volontaires en 2025, avec une montée en charge progressive.
Le projet de loi relatif à l'héritage des JOP n'a pas été examiné en amont de leur tenue. Prenons-en acte. Si l'on prévoit une telle loi, il faut reconsulter tout le monde. De nombreuses commissions sur l'héritage des jeux se sont tenues. Mais, outre la période dans laquelle nous sommes d'examen du projet de loi de finances, les instances sportives sont en cours de renouvellement jusqu'au 31 décembre. J'ai proposé de demander à tous ceux qui ont déjà travaillé sur le sujet de nous envoyer leurs propositions d'ici Noël. Puis nous réunirons tous les contributeurs d'ici à la mi-janvier, dont les nouvelles instances sportives. Ensuite, nous ouvrirons le débat. Nous avons déjà noté la nécessité de certaines évolutions législatives et réglementaires : par exemple des fédérations souhaitent des modifications dans la relation avec les ligues ou des moyens juridiques pour les consolider.
La notion d'héritage implique une transmission aux générations futures. Il faut donc peut-être un plan jeunesse au coeur duquel nous placerions le sport comme élément fédérateur. Cela répondrait aux attentes de notre population et donnerait une vision de ce que nous souhaitons pour la prochaine olympiade.
Un projet de loi n'est pas forcément enthousiasmant pour la population, contrairement à un plan jeunesse. Nous devons inclure la jeunesse dans la Nation. Or nous n'avons aucun programme ciblant les collégiens, qui pourraient apprendre les valeurs du vivre ensemble, du mérite, de l'effort et du respect des horaires via le sport. La question est : comment accompagner notre jeunesse pour l'insérer dans la Nation et éviter que se reproduisent les émeutes urbaines de 2023 ? En fonction de ce que l'on aura décidé en commun, on pourrait achever les travaux à l'été 2025.
Nous serons aussi amenés à travailler sur une loi olympique pour les jeux de 2030 pour évoquer les sujets environnementaux et urbanistiques, comme cela a été fait en amont des Jeux de Paris 2024.
Quand l'Agence nationale du sport a été créée, il était prévu que son fonctionnement soit évalué dans l'année suivant les JOP. Les résultats des travaux de la mission de l'inspection générale en cours seront rendus au premier semestre 2025. Mon a priori est que l'on peut simplifier les procédures de subventions aux clubs et aux collectivités territoriales. La commission régionale des financeurs est-elle vraiment utile ? Peut-être faut-il réintégrer au sein du ministère des sports toute la partie relative au financement. On aurait sans doute intérêt à centrer l'ANS sur le sport, c'est-à-dire la performance, l'accompagnement des clubs et le développement du sport sur le territoire, et à lui retirer toute la partie administrative, qui est chronophage et n'apporte pas de plus-value - au contraire, elle est vue comme dysfonctionnant. Toutefois, on ne peut pas dire que l'ANS ne fonctionne pas quand on voit les résultats sportifs.
Il n'est pas prévu de réintégrer l'AFLD dans le giron du ministère. On revient à son dimensionnement pré-JOP. Deux postes sont supprimés, ce qui est l'épaisseur du trait.
Saluons le travail sur la haute performance de Claude Onesta et, désormais, de Yann Cucherat qui lui succède. Une marche arrière sur les 40 000 euros serait incompréhensible.
Je n'ai pas d'estimation des moyens du sport, tous ministères confondus.
La volonté du Président de la République de maintenir le SNU est louable. Les retours des participants sont bons. En 2024, on a dénombré 80 000 séjours. Il y en aurait 66 000 en 2025, sauf coup de rabot supplémentaire demandé au ministère. Or, mon ministère pourrait être concerné par celui-ci à hauteur de 55 millions d'euros. Nous ferions alors porter l'effort à hauteur de 49 millions d'euros sur le SNU ce qui nous conduirait à réduire ce nombre à 40 000. Les inscriptions pour 2025 sont de 35 700, dont 22 400 jeunes issus des classes et lycées engagés et 13 300 inscrits par eux-mêmes. Vous connaissez les critiques de la Cour des comptes sur le manque de mixité sociale du SNU. La solution pour développer celle-ci est de généraliser le dispositif, ce que nous ne pouvons pas faire faute de moyens financiers.
Nous faisons face à une démotivation en matière de bénévolat. Ponctuellement, nous n'avons pas manqué de bénévoles pour les jeux ; la difficulté concerne plus la fidélisation et l'engagement à moyen ou long terme. En outre, des bénévoles ont pu être découragés par la multiplication des contraintes pour les structures. Par exemple, ils doivent demander des subventions en ligne sur plusieurs plateformes, puisque chaque financeur a la sienne. Je souhaite travailler avec les associations d'élus pour tout centraliser sur « Le Compte Asso », qui donne satisfaction. Nous devons aussi nous interroger sur les incitations à s'engager pour la première fois. Le Pass'Sport soutient efficacement les acquisitions de licence : il pourrait être étendu à ceux qui s'engagent pour la première fois dans le bénévolat et qui doivent parfois prendre leur licence non pour pratiquer, mais juste pour aider le club.
Le sujet de la TVA relève de Bercy, avec des implications européennes. On peut donc dire que ce n'est pas un sujet simple, mais nous avons saisi le ministère et j'étudierai cette question de près, notamment sur l'aspect de l'impact financier.
Effectivement les collectivités territoriales soutiennent beaucoup le sport, particulièrement en dépenses de fonctionnement. J'ai exprimé à l'Assemblée nationale mon inquiétude à l'égard de l'évolution de leurs finances. Il ne faudrait pas que les arbitrages budgétaires liés au fonds de précaution prélevé sur les recettes de 450 collectivités se fassent au détriment du sport, sachant qu'il s'agit plutôt de villes moyennes aux besoins sportifs importants. Le ministère disposant néanmoins de 100 millions d'euros en autorisations d'engagement, il pourra toujours accompagner celles qui en feront la demande.
Il existe 6 348 bassins de pratique aquatique sur l'ensemble du territoire national. Ils ont une ancienneté moyenne de 35 ans, et n'ont pas été rénovés significativement, en moyenne, depuis plus de 15 ans. Sur les 200 derniers projets de piscine soutenus, on recense 78 constructions et 132 rénovations. Depuis 2019, la subvention moyenne était de 620 000 euros par construction de piscine, pour un coût de construction moyen de 10 millions d'euros. Or, en 2023, alors que l'aide moyenne a diminué, passant à 456 000 euros, le coût moyen des projets est passé à 14,5 millions d'euros, soit plus de 40 % d'augmentation. Pour une opération de rénovation, la subvention moyenne s'élève à 400 000 euros, pour un coût moyen de travaux de rénovation de 4 millions d'euros.
Comment arriver à diminuer le coût de construction des équipements sportifs ? Dans les années 1970, lors du lancement de l'opération « Mille piscines » qui a conduit au déploiement des premières piscines Tournesol, une consultation nationale a été organisée auprès des constructeurs potentiels, à l'issue de laquelle plusieurs modèles ont été retenus, les collectivités pouvant faire leur choix parmi eux en fonction de leur coût. Ce système est peut-être à étudier, de nombreuses collectivités n'ayant plus les moyens de rénover leurs piscines. De manière générale, le coût de construction des équipements sportifs ne cesse d'augmenter.
Nous pourrons redistribuer des subventions, par ailleurs, pour les équipements structurants. Si on réintègre le portage des opérations de l'ANS au sein du ministère, nous aurons la gestion directe, et non plus déléguée, de ces crédits. Le problème de la trésorerie de l'ANS ne se posera donc plus.
Je suis favorable à une hausse de la fiscalité sur les paris sportifs. La question se pose toutefois de savoir si la recette supplémentaire qui en découlera devra être fléchée vers le plan « piscines ». Il me semble préférable d'éviter de se contraindre, et de déléguer plutôt aux préfets et aux sous-préfets la charge de choisir les priorités de financement de leurs territoires. Sortons des plans uniformes nationaux, pour les remplacer par des boîtes à outils mises à la disposition des territoires. J'ai d'ailleurs dit aux délégations régionales académiques à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (Drajes) qu'elles seraient évaluées, non pas sur le déploiement de dispositifs nationaux, mais plutôt sur les réponses qu'elles apportent aux acteurs locaux.
Mme Annick Billon. - Auditrice à l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN), j'ai été amenée à réfléchir au sujet suivant : quelle stratégie pourrait conduire au rétablissement du service militaire et sous quelle forme ? Le comité 6 avait alors imaginé un contrat défense appuyé sur la généralisation du SNU.
Un rapport de la Cour des comptes ayant dressé un bilan sévère de ce programme, pointant ses objectifs incertains, son coût largement sous-estimé et un nombre d'inscriptions largement inférieur aux prévisions, en avez-vous imaginé une suppression sèche ?
Par ailleurs, les crédits dédiés à l'ANS sont en baisse dans le PLF 2025. Ils passent de 270 millions d'euros à 159 millions d'euros. Le fonctionnement de l'ANS est estimé à 12 millions d'euros. Avez-vous imaginé supprimer l'ANS ? Comme vous l'avez rappelé, un certain nombre de ses tâches incombait auparavant au ministère des sports.
Mme Karine Daniel. - La diminution du budget des collectivités locales, estimée entre 8 milliards d'euros et 10 milliards d'euros, entraînera probablement des licenciements dans nombre d'associations, dont le fonctionnement est largement financé par des subventions de ces collectivités. Or ces licenciements seront compensés par une hausse du temps de bénévolat. De plus, les fortes contraintes budgétaires ont tendance à augmenter le recours aux appels à projets pour l'allocation des subventions. Or répondre à ces appels prend du temps, alors même que le nombre de projets sélectionnés est restreint. En outre, les réponses positives accordées valent pour une période déterminée et ne peuvent donc alimenter le fonctionnement des associations. Celles-ci ont pourtant besoin de subventions de fonctionnement lisibles, stables et pérennes. Je pense particulièrement aux associations qui agissent dans le domaine de la solidarité.
Des plans sociaux sont donc à attendre dans le champ associatif, dommageables pour l'emploi comme pour la cohésion sociale.
Mme Mathilde Ollivier. - Votre venue ce jour, monsieur le ministre, est l'occasion pour moi d'obtenir des réponses à un courrier que je vous ai adressé le 4 octobre dernier, pour l'instant resté sans réponse. Il portait notamment sur l'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques. Je regrette que nous n'ayons pas eu ce débat il y a six mois. Vous parlez d'un travail de concertation qui aboutirait, un an après les jeux, à un potentiel travail parlementaire. Il est regrettable de ne pas mener ce travail dès maintenant, a fortiori lorsqu'on parle de nation sportive, pour répondre à la hausse du nombre d'inscriptions dans les clubs, estimée entre 5 % et 10 %, et même à 20 % pour des sports comme le tennis, le badminton, l'escrime ou le handisport. Il faut en effet des ressources matérielles, comme des équipements ou des terrains. Encourager la concertation sur la mutualisation d'équipements sportifs entre associations serait également bienvenu. Cela aurait déjà dû être fait, car la motivation sera retombée dans un an. Nous avons besoin des équipements maintenant, pour encourager la pratique sportive chez les jeunes et les moins jeunes et accroître la durée de l'engagement dans les clubs.
Par ailleurs, la gauche et les écologistes, en demandant la suppression du SNU, avaient comme souvent raison avant les autres. Il nous paraissait en effet difficile que cette initiative touche réellement toutes les catégories socioprofessionnelles. Le rapport de la Cour des comptes s'est avéré assez sévère sur ce point. Le coût par participant est en outre très élevé par rapport à d'autres séjours collectifs. Je me joins donc à mes collègues pour vous demander s'il ne serait pas temps de faire entendre raison au Président de la République, pour qu'il accepte d'arrêter ce programme et de rediriger cette ressource vers des dispositifs réellement favorables à l'engagement des jeunes, comme le service civique ou les colonies de vacances.
Enfin, combien de services civiques étaient axés sur des actions écologiques avant la création de la labellisation « service civique écologique » ?
M. Pierre Ouzoulias. - L'organisation des jeux Olympiques suscite notre fierté, tout comme les résultats de nos sportifs. La France a donné une magnifique image d'elle-même, ce dont nous pouvons nous féliciter. Les jeux ont constitué un moment exceptionnel, au cours duquel nous avons déclaré à la face du monde quel était notre projet politique et sportif, et ce que nous étions.
Les collectivités ont joué une part essentielle dans cette réussite. Vous le savez, monsieur le ministre, en tant que maire de Châteauroux, car cette ville a accueilli le centre national du tir sportif. L'agglomération de Châteauroux a participé à hauteur de 4,5 millions d'euros à l'organisation de ce succès. En région parisienne, les départements ont pris à leur charge le surcoût lié aux équipements. C'est le cas notamment du département des Hauts-de-Seine. Le procès qui est fait en ce moment aux collectivités territoriales me paraît donc fortement injuste, car la réussite des jeux tient particulièrement à leur investissement.
Cette réussite tient également à l'absence d'éléphant blanc. L'héritage des jeux est exceptionnel, et l'on n'a pas hésité à construire des équipements provisoires pour éviter de laisser à la charge des collectivités des équipements surdimensionnés par rapport à leurs pratiques habituelles.
En revanche, le SNU est un éléphant blanc pour le Président de la République, tout comme le pass Culture. Il faut enterrer ce dispositif, qui est une mauvaise expérience.
Enfin, les fédérations souhaitent obtenir un éclaircissement de la part du Gouvernement sur leur mission de service public. Il faudra repasser par la voie législative pour apporter cette précision, notamment pour la dimension éducative de leur action. Cette clarification remédierait aux difficultés qu'elles rencontrent pour interpréter leur responsabilité en matière de respect de la laïcité.
M. Bernard Fialaire. - Je partage ce qui a été dit sur le coût et les objectifs non atteints du SNU. Néanmoins, les séjours de SNU qui ont été organisés dans mon territoire, le Rhône, ont tous été remarquables. Il est en revanche regrettable que ce dispositif ne soit pas davantage fléché vers les élèves peinant à trouver des stages, car ils comptent parmi ceux qui en auraient le plus besoin.
Par ailleurs, il faudrait valoriser et promouvoir davantage le sport universitaire. Alors que des athlètes et sportifs milliardaires, marques des dérives financières du sport, sont régulièrement mis en avant, montrer des universitaires qui font du sport constituerait un bel exemple pour la jeunesse. Quel regard portez-vous sur les masses financières considérables dirigées ainsi vers le sport au détriment du bénévolat ?
L'activité physique quotidienne (APQ) est à distinguer de l'activité sportive quotidienne. On ne mobilise pas les mêmes compétences dans l'un et l'autre cas.
Je voudrais enfin revenir sur les piscines. Le coût de rénovation de la piscine de la collectivité que je gérais auparavant a été estimé à plus de 50 millions d'euros. La collectivité s'est alors lancée dans un projet de piscine à énergie positive, impliquant un investissement sur trente à quarante ans. Il ne faut pas décourager ce genre d'initiative. Les études sont presque terminées. Nous sommes capables de concevoir des équipements remarquables, moyennant des emprunts largement compensés par les économies futures.
Mme Colombe Brossel. - Monsieur le ministre, vous avez dit qu'il fallait rediscuter du contour, du format et du coût du SNU. La position des sénateurs socialistes à son sujet est connue. Peut-être est-il temps de sortir de l'ambiguïté et de prendre acte du fait que ce dispositif, bien que découlant de la volonté du Président de la République, ne fonctionne pas et n'a pas trouvé sa place. Il existait des dispositifs efficaces, notamment le service civique. Le SNU est arrivé comme un ovni. Je comprends que votre position soit délicate, mais il faudra faire un choix. On ne peut pas entendre, d'un côté, des discours de responsabilisation sur les finances publiques et, de l'autre, des circonlocutions comme celle que je viens de citer. Admettons plutôt qu'il s'agit d'un échec, et misons sur l'accompagnement du service civique et le soutien à l'éducation populaire pour renforcer l'engagement citoyen des jeunes.
Par ailleurs, nous constatons tous que le monde associatif se porte mal. Toutefois, je ne suis pas sûre que la démotivation des bénévoles soit aussi globale que vous semblez le présenter. En réalité, les bénévoles ne sont plus les mêmes qu'avant, et on observe un véritable épuisement de l'engagement bénévole pour la présidence d'association ou l'exercice de la fonction de trésorier.
Le contrat d'engagement républicain n'a été voulu ni soutenu par aucun des acteurs du monde associatif, qui l'ont perçu comme un signe de défiance. Il a fait peser la suspicion sur eux et mis en défaut la liberté d'expression et la liberté associative. Cela a créé de la tension. Permettez-moi de citer à ce sujet les travaux de nos collègues de la commission des lois. Des solutions pragmatiques pourraient être envisagées pour y remédier, par exemple l'utilisation de la charte des engagements réciproques.
Le réseau Guid'Asso, dont vous vantiez la réussite, est exactement l'inverse du contrat d'engagement républicain, car il a été travaillé avec les acteurs du monde associatif. Il est préférable d'agir ainsi plutôt que d'imposer un principe de défiance.
Mme Pauline Martin. - Une partie indécente des cotisations des licenciés est redirigée vers les fédérations pour abonder l'aspect administratif du sport. Serait-il possible de réguler le système au profit des clubs sportifs ?
M. Stéphane Piednoir. - Merci, monsieur le ministre, de votre réponse à ma question d'actualité de ce jour, que j'interprète comme une ouverture pour un examen favorable de la proposition de loi visant à assurer le respect du principe de laïcité dans le sport de Michel Savin.
Nous étions nombreux, dès l'émergence du SNU, à émettre plus que des réserves à son sujet. La gauche et les écologistes n'étaient pas seuls sur cette ligne, tant s'en faut !
Les communes rurales sollicitent les dotations de l'État, DETR et DSIL, pour pouvoir installer de petits équipements sportifs, des city stades. Si l'on veut une vraie nation sportive, il est important de dire à tous que l'activité physique quotidienne ne suffit pas. Il faut avoir près de chez soi un terrain de sport, pour diffuser les valeurs du sport et éveiller la curiosité des plus petits. Cela limiterait en outre l'exposition aux écrans. Le ministère des sports a-t-il prévu de flécher les dotations pour aider les collectivités, notamment les petites communes, à s'équiper ?
Enfin, en matière de sport universitaire, le décalage entre la France et les États-Unis est criant. Un champion universitaire américain est déjà un quasi-champion olympique ! Nous en sommes loin. Avez-vous prévu une action dans ce domaine ?
M. David Ros. - On observe un écart entre les conclusions de la mission d'information sénatoriale sur les 30 minutes d'activité physique quotidienne à l'école et celles qui découlent des auditions menées à l'Assemblée nationale concernant le déploiement réel de l'APQ. Les premières font état d'une mise en oeuvre dans la moitié des écoles, quand les secondes parlent d'un déploiement du dispositif à 100 %. Il faudrait préciser le cadre de cette initiative et mettre davantage en perspective la pratique du sport et de l'activité physique, de l'école à l'université.
La baisse du budget de l'ANS concernera 360 000 associations et vient s'ajouter aux difficultés financières des collectivités locales.
Dans mon département, l'Essonne, deux piscines ont fermé ces dernières années. Celle d'Orsay, qui a mon âge, vieillit comme moi. Le budget de rénovation était estimé à 15 millions d'euros. Or la commune n'avait pas les moyens de l'inscrire sur le budget communal. Un travail pourrait être mené avec Bercy sur le calcul de la dotation globale de fonctionnement (DGF) ou sur les ratios d'emprunts des budgets communaux pour remédier à ce type de situation. Il y va des bassins de vie où l'on apprend à nager aux enfants. À ma connaissance, Léon Marchand ne s'entraîne pas dans des piscines françaises.
Le budget lié aux infrastructures des jeux Olympiques et Paralympiques aurait pu à cet égard être préservé. Je pense également aux pavillons sport que j'ai visités dans le cadre du rapport d'information « Science et sport » que m'a confié l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) : ils sont apparus comme un vecteur puissant de sensibilisation au sport. Il est regrettable que ce type d'infrastructure ne soit pas pérennisé.
Le fait que la loi d'héritage n'ait pas encore été rédigée nous donne la possibilité de le faire. Ce pourrait être une véritable chance, à condition qu'elle s'appuie sur les constats des collectivités locales, ainsi que sur les acteurs des mondes économique et sportif, pour élaborer une véritable planification.
Par ailleurs, les crédits de la recherche autour du sport sont en forte baisse dans le budget 2025. Or ils sont importants, non seulement en vue des prochaines Olympiades, mais également pour toutes les retombées qu'ils peuvent avoir sur la pratique quotidienne du sport et la santé. Plus qu'une loi d'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques, c'est une véritable loi d'avenir sur le sport qu'il nous faut.
M. Laurent Lafon, président. - Vous aurez compris que le SNU fait débat, et que des amendements seront sans doute déposés à ce sujet.
M. Gil Avérous, ministre. - Nous n'envisageons pas la suppression sèche de ce dispositif, car 94 % des participants trouvent qu'il s'agit d'une bonne formule et 90 % le conseilleraient à d'autres personnes. Il n'est donc pas inutile, mais il a un coût.
De même, nous n'envisageons pas de supprimer l'ANS, qui a prouvé son utilité pour le développement du sport. De plus, son intégration au sein du ministère des sports n'entraînerait pas une économie de 12 millions d'euros de frais de fonctionnement, car les personnels resteraient en place. L'ANS a également l'avantage d'associer le monde privé et le monde de l'entreprise, impulsant ainsi une dynamique nationale pour le rapprochement du monde économique avec le monde du sport, dont j'ai voulu faire une priorité de mon ministère. C'est une réalité dans nos villages et villes avec la pratique du sponsoring des clubs sportifs locaux par les entreprises du territoire. Mon cabinet a d'ailleurs récemment intégré une personne venue du Mouvement des entreprises de France (Medef), qui sera exclusivement chargée des relations avec le monde économique et les entreprises.
Concernant les risques de licenciement dans les associations, le FDVA ne diminue pas. Il n'est pas question que l'État réduise son soutien au monde associatif. J'ai dit en revanche mon inquiétude concernant une possible diminution du soutien des collectivités locales aux associations en matière d'investissement. Il en va autrement pour le fonctionnement. Les maires sont conscients de l'importance de la vie associative. J'imagine mal les collectivités territoriales couper les ressources des associations à dix-huit mois des élections municipales !
Madame Ollivier, mon cabinet venant seulement de s'installer, nous n'avons pas encore eu le temps de consulter votre courrier. Mais je vous apporterai une réponse circonstanciée prochainement, conformément à la consigne qui nous a été donnée par le Premier ministre de répondre à tous les courriers qui nous sont envoyés.
Je ne crois pas, comme vous, qu'il soit trop tard pour une loi liée aux jeux Olympiques et Paralympiques. Il faut laisser la nouvelle gouvernance du sport s'installer.
La mutualisation des équipements sportifs sera par ailleurs une réponse immédiate à la hausse du nombre de licenciés. J'évoquais tout à l'heure le fait que 25 % des équipements départementaux sont mutualisés ; il y a quelques années ce pourcentage était proche de zéro. On ne peut donc pas dire que rien n'a été fait.
Nous ne connaissons pas le nombre de services civiques consacrés à des enjeux écologiques avant la création du label spécifique des services civiques écologiques.
J'ajouterai à la fierté évoquée par le sénateur Ouzoulias la fierté relative à l'organisation des jeux Paralympiques. Comme l'a souligné Tony Estanguet, c'est le samedi 7 septembre que l'on a recensé le plus grand nombre de billets vendus au Stade de France, ce qui est un bel indicateur de réussite. La part des collectivités territoriales est effectivement essentielle pour la réussite des politiques sportives nationales, au plus près du terrain, car elles financent la quasi-intégralité des équipements.
La révision prochaine des contrats de délégation passés avec les fédérations sportives sera l'occasion de reparler de leur mission de service public. Ce travail courra sur l'ensemble du premier semestre 2025, et inclura les sujets régaliens que sont la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, ainsi que le respect de la laïcité. Il faudra faire aboutir sur ce dernier point la proposition de loi de Michel Savin, ne serait-ce que pour fixer un cadre uniforme pour toutes les fédérations.
Le sport universitaire est effectivement trop souvent oublié. Nos universités n'ont certes pas les mêmes moyens que les universités américaines. L'Union nationale du sport scolaire (UNSS) a cependant prouvé son utilité. Les professeurs sont très engagés, y compris bénévolement. Il faut leur donner davantage de visibilité et renforcer l'UNSS pour donner plus d'impulsion en général au sport universitaire.
Près de 94 % des enseignants pratiquant les 30 minutes d'APQ constatent une amélioration du bien-être des élèves, 91 % estiment que ce dispositif réduit la sédentarité et 82 % encouragent une pratique d'activité physique et sportive en dehors de l'école. Ils observent également des conséquences positives sur le climat de la classe et le bien-être des professeurs en classe. Nous avons donc l'ardente obligation de poursuivre ce dispositif.
La pertinence des deux heures de sport supplémentaires au collège, dispositif coûteux qui n'est pas diffusé uniformément partout, est en revanche davantage sujette à caution.
Madame Brossel, le SNU fonctionne bien, puisque ceux qui y participent en sont satisfaits ! Il faudra par ailleurs repartir du bilan qui avait été établi concernant le contrat d'engagement républicain. On ne peut passer à côté de l'obligation de rappeler nos valeurs. Je dois recevoir prochainement le milieu associatif, pour qui la remise en cause de ce contrat est un point essentiel. Si cette remise en cause advenait, un autre dispositif, coconstruit, prendrait sa suite. Le ministère dispose de 56 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires pour effectuer les contrôles, indispensables, relatifs à la radicalisation, au respect de la laïcité ou encore aux violences sexistes et sexuelles. Certaines associations dans lesquels de tels faits se sont déroulées n'avaient pas été contrôlées depuis 10 ans. Peut-être qu'un jour il faudra envisager certification par un organisme extérieur si nous n'arrivons pas à le faire.
Madame Martin, j'évoquerai le sujet complexe de la part fédérale perçue sur les licences avec les fédérations. Il est difficile néanmoins de faire de l'ingérence sur ces enjeux financiers. Par ailleurs, elles ont besoin de soutien pour fonctionner.
Monsieur Piednoir, la proposition de loi de Michel Savin est en accord avec la volonté du Gouvernement.
Par ailleurs, près de 68 % des 5 000 terrains de sport récemment financés ont été déployés en milieu rural. Toutefois, il faut également traiter le problème des déplacements. La mobilité en milieu rural est un enjeu essentiel pour les clubs.
Enfin, monsieur Ros, les 30 minutes d'APQ sont pertinentes, comme je l'ai souligné. En revanche, la question de la quantité de piscines en Île-de-France se pose, des difficultés pouvant se présenter notamment par rapport à leur classification environnementale. Dans de précédentes fonctions, alors membre du conseil d'administration du groupe La Poste, société à mission de service public, je me souviens d'une intervention visant à dire que la Banque postale ne devait plus financer de piscines sous prétexte qu'il s'agissait d'investissements non vertueux. Or c'est dans les piscines qu'on apprend à nager ! Pénaliser les piscines comme un investissement non vert n'aurait pas de sens. Il faut s'assurer néanmoins que ces équipements entrent dans les charges de centralité et que les frais de fonctionnement associés sont pris en compte par les DGF.
Enfin, les mondes économique et sportif ainsi que le monde de la recherche ne devront effectivement pas être oubliés dans la préparation de la loi d'héritage.
M. Laurent Lafon, président. - Merci, monsieur le ministre. Vous voyez que nos questions sont nombreuses. Nous aurons l'occasion d'échanger de nouveau durant l'examen du PLF.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 18 h 40.