Jeudi 8 avril 2021
- Présidence de Mme Annick Petrus, vice-présidente -
Étude sur le logement dans les outre-mer - Table ronde sur l'habitat indigne
Mme Annick Petrus, présidente. - Madame la présidente Sophie Primas, Monsieur le président Stéphane Artano, qui est avec nous en visioconférence depuis Saint-Pierre-et-Miquelon, et que j'ai l'honneur de remplacer pour cette séance, mes chers collègues, Mesdames, Messieurs.
Dans le cadre de notre étude sur le logement outre-mer, la Délégation sénatoriale aux outre-mer organise ce matin une table ronde sur l'habitat indigne. La gravité et l'acuité de cette problématique dans les territoires ultramarins justifient en effet que nous y consacrions une réunion à part entière.
Je vous rappelle que, pour mener à bien cette étude, notre délégation a désigné trois rapporteurs : Guillaume Gontard, Micheline Jacques et Victorin Lurel. Nous comptons sur nos invités pour faire remonter les difficultés auxquelles ils se trouvent confrontés ainsi que les actions déployées sur le terrain qui peuvent permettre de lutter plus efficacement contre ce fléau.
Nous vous remercions donc très vivement, Mesdames et Messieurs, d'avoir accepté de participer à cette table ronde.
Nous saluons, en premier lieu, Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques du Sénat mais aussi membre de notre délégation, qui, à ma suite, va introduire ce tour de table en soulignant les travaux de sa commission pour améliorer la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux.
Nous accueillons également M. Pascal Fouque, directeur de l'Agence départementale pour l'information sur le logement (ADIL) de La Réunion ; M. Matthieu Hoarau, directeur de l'agence Île de La Réunion / océan Indien de la Fondation Abbé Pierre ; M. Jean-Max Léonard, président-directeur général d'Innovation logement outre-mer (ILOM) ; Mme Caroline Lleu-Etheve, chargée de développement outre-mer, de l'Association nationale des compagnons bâtisseurs (ANCB) ; et MM. Michel Pelenc, directeur général, et Kamel Senni, responsable du pôle « Logement d'abord », de la fédération Solidaires pour l'habitat (SOLIHA).
Je précise, pour le bon déroulement de nos travaux, que chacun disposera d'une dizaine de minutes pour faire sa présentation en s'appuyant sur la trame qui lui a été transmise. Je vous demande aussi de garder votre vidéo allumée car cette séance fait l'objet d'une captation vidéo pour être retransmise en direct sur le site du Sénat et consultable en vidéo à la demande.
Nos trois rapporteurs vous interrogeront ensuite pour des éclairages complémentaires. Avant de prendre la parole, je vous demande à tous de vous inscrire sur le fil de discussion ou de me faire signe.
La parole est à Mme la présidente Sophie Primas, puis ce sera le tour des autres participants dans l'ordre de présentation.
Mme Sophie Primas. - À la suite des événements d'Aubagne, la commission des affaires économiques a décidé, à l'initiative de notre collègue Bruno Gilles, de se pencher sur ce sujet très sensible du logement insalubre. Le rapport de notre commission a été confié à notre collègue Dominique Estrosi Sassone. Plusieurs visites de terrain ont été effectuées dans ce cadre. Nous avons souhaité étendre la réflexion aux zones rurales et aux outre-mer, qui n'ont pas été le centre originel du sujet mais un élément constitutif des travaux menés.
Ces travaux n'étaient guère éloignés de l'adoption de la loi ELAN et nos préconisations ont concerné les outre-mer comme le territoire métropolitain, à l'exception de l'Aide personnalisée au logement (APL) Accession. Le logement insalubre est souvent invisible et des investigations sont souvent nécessaires pour en prendre la mesure. S'il existe de nombreux logements insalubres dans l'espace rural, nous avons été impressionnés par leur ampleur dans les outre-mer. Nous avons fait ce constat en Martinique et en Guadeloupe mais il aurait sans doute été le même ailleurs. Un immense travail est devant nous, avec des problématiques spécifiques.
Notre commission a fait adopter une proposition de loi mettant en avant cinq priorités pour lutter contre le logement insalubre.
Il faut d'abord renforcer la détection et la prévention. Cela passe notamment par la libéralisation du diagnostic technique global que nous souhaitons rendre obligatoire dans les copropriétés de plus de 15 ans et par la possibilité pour les syndics professionnels de pouvoir faire un signalement sans être accusés de rompre le secret professionnel. Cette mesure permet d'élargir le cercle de ceux qui sont en capacité de faire des signalements. Lors d'une visite à Aubervilliers, nous avons vu des façades remises en état qui masquaient en réalité une situation effarante à l'intérieur de l'immeuble.
Ensuite, il faut simplifier et accélérer l'ensemble des procédures et créer une police unique de l'habitat indigne. Nous n'avions pas moins de treize polices différentes intervenant dans le processus relatif à l'habitat indigne à différents niveaux. Cette police serait confiée aux présidents d'Établissement public de coopération intercommunale (EPCI), sauf si un maire veut garder sa police. Nous n'avons pas pu aller jusqu'au bout. Une nouvelle ordonnance est en application après la loi ELAN, consacrant deux polices : celle de la sécurité sous compétences du maire et celle de santé relevant du préfet, réunies dans un même code.
Il faut également accorder de nouveaux pouvoirs aux maires. Nous proposons que les maires puissent bénéficier des biens expropriés en vue de réaliser des travaux de réhabilitation, et mettre en place un droit de préemption spécifique dans les zones d'habitat indigne.
La proposition de loi suggère de renforcer les sanctions contre les marchands de sommeil car ceux-ci ne sont pas suffisamment poursuivis. Nous avions demandé que les communes bénéficient des amendes et que les associations puissent plus facilement aller en justice, sans nécessiter le concours des victimes qui en général ne déposent pas plainte, car il en va de leur habitat.
Enfin, il faut mobiliser davantage de moyens. La suppression de l'APL Accession en 2018 a entraîné de nombreux problèmes et ralenti voire arrêté les programmes de réhabilitation et de lutte contre l'habitat indigne. Tous les services de l'État sur place nous en ont fait part. Heureusement, dans le projet loi de finances (PLF) pour 2020, suite à notre rapport, à la pression de l'ensemble des élus d'outre-mer et aux services de l'État sur place, l'APL Accession a été rétablie. Ce n'est pas encore le Revenu universel d'activité (RUA), mais en attendant ce rétablissement est essentiel.
Avec Dominique Estrosi Sassone et grâce au concours de Catherine Conconne, nous avons visité en Martinique des programmes exemplaires de réhabilitation. Une difficulté tient à ce que certains habitants vivent dans ces quartiers depuis si longtemps qu'ils y sont attachés et que les déplacer, même pour intégrer un habitat digne, est très compliqué. Développer des programmes qui ne ressemblent pas à leur habitat actuel, par exemple en remplaçant des maisons par des immeubles, n'est pas possible. Une autre difficulté concerne les copropriétés et des indivisions. La loi Letchimy a commencé à régler certains aspects problématiques mais il faudra aller plus loin.
Les points saillants à garder à l'esprit sont donc l'acceptation par les populations, le relogement et la qualité du logement proposé, l'exigence de rester dans l'esprit du quartier existant et à proximité et enfin, les moyens alloués par l'État. Le chantier est colossal et demande une politique extrêmement ambitieuse mais j'espère que le Plan de relance qui a été lancé par le Gouvernement en sera l'occasion.
M. Pascal Fouque, directeur de l'Agence départementale pour l'information sur le logement (ADIL) de La Réunion. - Il existe quatre ADIL en outre-mer, Mayotte n'en dispose pas. À La Réunion, 2 000 consultations ont été enregistrées l'an dernier sur la thématique de l'habitat indigne. Ce nombre augmente depuis quelques années en raison d'une communication accrue mais aussi parce que l'habitat indigne progresse. Il s'agit du premier sujet de préoccupation. 20 % des questions posées par des locataires ou propriétaires dans les rapports locatifs concernent l'habitat indigne. À La Réunion, on estime que 5 % des logements en relèvent.
Dans les outre-mer, les problématiques d'habitat indigne varient d'un territoire à l'autre, ce qui nécessite des traitements distincts : en Guyane et à Mayotte, les poches d'habitat indigne sont très importantes, tandis que cet habitat est plus diffus à La Réunion.
La résorption de l'habitat insalubre (RHI) n'est plus considérée comme un outil adapté par les services de l'État. Il doit être revu pour répondre aux nouveaux enjeux. Je mettrai l'accent sur les Pôles départementaux de lutte contre l'habitat indigne (PDLHI) et les Plans intercommunaux de lutte contre l'habitat indigne (PILHI) car c'est à travers eux que nous pouvons mettre en place des diagnostics partagés et aller dans le même sens.
Depuis quatre ans, une commission de coordination de la lutte contre l'habitat indigne a été mise en place, regroupant les services de l'État et les intercommunalités disposant d'un PILHI. Aujourd'hui, le suivi des arrêtés pris par le préfet est satisfaisant car nous sommes tous autour de la table une fois par mois. Nous faisions auparavant face à une difficulté à travailler ensemble car les participants proviennent d'organismes différents et ne se côtoyaient pas.
Concernant les dispositifs nationaux, ces textes s'appliquent en outre-mer mais de façon parfois plus complexe en raison des réalités de terrain, comme l'indivision ou d'autres statuts complexes tels que l'occupation sans droit ni titre. Il est aussi difficile d'identifier les personnes, ce qui complique les interventions d'amélioration de l'habitat. Les PDLHI ne fonctionnent pas de la même manière sur tous les territoires, ce qui semble contre-productif. Par exemple, le PDLHI de Guyane est constitué mais ne se réunit pas.
Des obstacles locaux apparaissent parfois. Par exemple, dans le cadre du dispositif de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) pour l'intermédiation locative, nous avons eu un problème avec l'Agence immobilière à vocation sociale (AIVS). Il existe une prime applicable à partir de juillet 2020 pour les bailleurs qui acceptaient une intermédiation locative mais, au mois de novembre, un arrêté a créé une condition d'éco-conditionnalité rétroactive. En conséquence, des ménages ayant accepté de louer à des personnes en difficulté locative pour des loyers plus raisonnables ont perdu le bénéfice de la prime.
Concernant les dispositifs locaux, il y avait une obligation au 31 décembre 2020 d'avoir des PILHI adoptés sur l'ensemble des territoires. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, seuls deux PILHI étant adoptés à La Réunion. Les autres territoires sont au stade de l'étude et du repérage. Le retard est donc très important.
L'État doit pouvoir s'appuyer sur les acteurs de terrain. Le concours de ces acteurs doit notamment permettre de s'assurer que les habitats déclarés indignes ne soient pas réoccupés. C'est trop fréquemment le cas et l'administration passe un temps important à opérer ces contrôles. Les PILHI ont ce rôle à jouer.
Le permis de louer a été expérimenté à La Réunion, sur une partie du territoire de la commune de Saint-André. Si la mise en place d'un tel permis est une bonne chose, je ne pense pas, à titre personnel, qu'elle puisse se faire de façon aussi restreinte. Soit ce permis s'appliquera sur l'ensemble d'un territoire ou d'un département, soit il ne pourra pas fonctionner.
Je trouvais pertinentes les propositions du député Guillaume Vuilletet dans son rapport « Promouvoir l'habitabilité durable pour tous », remis au Gouvernement en 2019. L'habitabilité, telle que défendue dans ce rapport, responsabilise les bailleurs et serait moins coûteuse qu'un permis de louer pris en charge par les collectivités, lequel implique des moyens humains pour contrôler l'ensemble des logements.
Les dispositifs RHI ne fonctionnent plus à La Réunion. L'arrêt de l'allocation logement (AL) accession a été fatal et a mis en difficulté les équipes sur le terrain, qui faisaient déjà face à un défaut d'adhésion des populations. En conséquence, cette année et demie perdue correspond à autant de retard pour la production de logements sociaux dans ces zones. Aujourd'hui, la Direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL) préfère des opérations plus courtes dans le temps, de cinq ans maximum, sur un périmètre plus restreint et avec des zones plus diffuses.
Les Opérations Groupées d'Amélioration Légère (OGRAL) sont un outil d'avenir pour la DEAL, avec cependant des réserves d'usage, car tous les ménages ne peuvent pas rentrer dans une opération de ce type puisqu'il s'agit avant tout d'un outil de réinsertion de personnes en difficulté, en redonnant de la dignité à leur habitat.
L'intervention de l'ANAH dans les opérations de RHI est inexistante. Elle ne concerne que les propriétaires bailleurs. Mais elle ne fonctionne pas bien car il s' agit souvent de propriétaires d'habitats très dégradés, qui n'ont pas forcément la capacité à obtenir un prêt complémentaire, même après la rénovation de leur logement. Une expérimentation existe à La Réunion, avec une aide complémentaire de l'ANAH mais elle s'avère insuffisante compte tenu du profil des bailleurs. Des aides ou prêts complémentaires spécifiques seraient nécessaires. Lors de la dernière réunion du PDLHI, un accord a été trouvé pour la mise en place d'un groupe de travail sur un prêt garanti par le département. Sans cela, il paraît compliqué d'envisager une intervention plus importante de l'ANAH sur le territoire de La Réunion. Ces aides sont aussi liées à la lutte contre la vacance et à l'intermédiation locative puisqu'il est demandé aux bénéficiaires de passer par une AIVS pour la gestion du bien.
Il est en effet difficile de repérer les logements indignes dans les copropriétés dégradées. Nous avons par exemple constaté la division d'un bien en neuf logements où quatre salles de bains occupaient 3 m² au total, ce qui bien sûr ne se voyait pas de l'extérieur. Les copropriétés sont une problématique relativement récente pour nous, puisqu'elles datent des périodes de défiscalisation qui ont débuté avec la loi Pons en 1986. Nous n'avons pas de protocoles en place. Un problème important tient au fait que nous n'avons pas les mêmes produits de financement bancaires que dans l'Hexagone où un établissement bancaire peut financer l'ensemble des copropriétaires sans recherche de solvabilité dès lors qu'ils sont à jour de leurs cotisations. Ce n'est pas le cas ici. Pour avoir abordé le sujet avec des établissements bancaires, ils ne souhaitent pas vraiment le mettre en place et donc, aujourd'hui, c'est au copropriétaire de trouver son prêt, ce qui constitue un frein aux travaux. Il y a par ailleurs beaucoup d'argent qui dort dans le cadre des avances des copropriétaires et qui va à l'entretien des logements.
L'indivision a généré et génère encore des habitats indignes. Les acteurs locaux ultramarins souhaiteraient bénéficier de groupements d'intérêt public (GIP) comme c'est le cas en Corse. L'ADIL de La Réunion a fait une étude sur ces questions qui sont extrêmement complexes puisqu'on touche à des problèmes qui remontent à plusieurs générations. Il faut que les notaires et les pouvoirs publics s'accordent pour travailler dans une même direction si l'on veut développer la prescription acquisitive, ce qui serait la solution la plus simple. Une volonté affichée des pouvoirs publics est nécessaire pour que tout le monde puisse se mettre autour de la même table et travailler au plus près du terrain. Je ne vois pas comment cela serait possible hormis dans le cadre d'un GIP, d'autant que les prescriptions acquisitives sont mal vues en raison d'abus passés et que les notaires ne veulent plus en faire.
Un PILHI est en train de mettre en place un fonds mutualisé d'amélioration de l'habitat. Les statuts particuliers d'occupation (indivisaire, occupant en droit multiple, constructeur) passent aujourd'hui entre les mailles et il a déjà été noté la préférence des intéressés à rester sur place dans un logement délabré plutôt que de déménager dans un logement social. Outre la difficulté d'accompagnement et de conviction pour amener ces personnes à accepter un logement social lorsqu'il n'y a pas d'autre solution pour leur logement qu'il faut démolir ou lorsque que nous sommes dans une zone à risque, il en va aussi de la préservation d'un mode de vie créole, avec un jardin d'alimentation et quelques animaux. Un tel fonds vise à aider les gens à se maintenir tout en les préservant de l'indignité. Son objectif est tourné vers la réhabilitation. Les possibilités de régulariser le statut à travers un GIP sont donc bienvenues, mais la priorité doit être l'amélioration.
M. Matthieu Hoarau, directeur de l'agence Île de La Réunion / océan Indien de la Fondation Abbé Pierre. - La Fondation Abbé Pierre intervient en outre-mer à travers la seule agence régionale de La Réunion, implantée depuis 1992, et qui rayonne sur l'océan Indien, notamment à Mayotte où nous subventionnerons, cette année, l'opérateur SOLIHA sur un projet de RHI. Plus largement, nous sommes en lien avec des acteurs institutionnels et associatifs sur des questions d'habitat et de logement. Nous avons aussi un programme national d'amélioration de l'habitat, qui se déploie sur des territoires avec ou sans agence. À La Réunion, nous sommes très investis dans le financement de l'auto-réhabilitation accompagnée voire l'auto-construction avec des opérateurs comme les Compagnons bâtisseurs mais aussi sur le modèle du Comité communal d'action sociale (CCAS) de Saint-Pierre qui dispose d'une équipe en régie qui peut intervenir directement auprès des habitants. Nous sommes aussi actifs dans le développement de l'accompagnement aux droits et à l'habitat. L'enjeu est la mise en place de permanences spécialisées autour de l'habitat indigne pour permettre un accompagnement dans les procédures complexes qui conduisent au découragement des ménages.
À Mayotte, les besoins dépassent de loin les faibles moyens financiers et humains existants. La grande majorité de la population vit sous le seuil de pauvreté et on dénombre près de 25 000 habitats considérés comme précaires, sous une forme proche du bidonville. Ces données ne sont pas systématiquement intégrées aux communications nationales sur le plan de résorption des bidonvilles sur le territoire hexagonal. Certains droits ne sont pas appliqués, comme le droit au logement opposable, et certains droits sociaux sont minorés ou ne sont pas effectifs (comme le RSA ou l'AL). Ce jeune département fait donc face à une iniquité d'application du droit.
Face à ces besoins colossaux se pose la question de l'étayage des acteurs, à savoir le développement d'un écosystème avec des opérateurs qui puissent accompagner les personnes, identifier les situations, contribuer à l'amélioration, à la construction ou à la reconstruction d'habitats ou de quartiers. Cette stratégie de renforcement des capacités doit être croisée avec une stratégie de résorption massive de l'habitat précaire, d'un point de vue global, et au-delà des clivages et tensions sociales existantes. Un plan d'action à un horizon de 5 à 10 ans est nécessaire.
Concernant les mauvaises conditions d'habitat à La Réunion, la tendance est à la baisse des bâtis précaires ou des logements sans eau chaude, mais près de 22 000 logements restent considérés comme précaires au sens de l'INSEE. Ainsi, l'AGORAH, l'agence d'urbanisme qui gère l'Observatoire réunionnais de l'habitat indigne, recense près de 18 000 bâtis précaires.
Sur ce territoire de 850 000 habitants, 16 % de la population sont en situation de surpeuplement et 117 000 ménages sont en situation de précarité énergétique, avec des variations de température et d'humidité et des problèmes d'aération. Cet enjeu a été sous-estimé de nombreux équipements sont inadaptés et des bâtis restent très énergivores. Pour le mettre en perspective, il faut rappeler que 4 Réunionnais sur 10 gagnent moins de 1 000 euros par mois.
Le non-recours aux droits liés à l'habitat est important, qu'il s'agisse du droit au logement opposable (DALO), des signalements traités par l'ARS ou de ceux de la CAF. Ces chiffres sont faibles comparés aux besoins évoqués. Sur 1 000 recours au DALO déposés en 2019, la moitié concerne des logements non décents ou impropres à l'habitation. La question de l'articulation entre le DALO et les dispositifs de lutte contre l'habitat indigne se pose. Concernant la Caisse d'allocations familiales (CAF), 50 % des signalements de logements non décents parmi les allocataires concernent le parc social. D'une part, des logements sociaux nécessitent une réhabilitation et d'autre part, des ménages du parc privé n'ont pas recours au dispositif de signalement par peur des représailles de la part des propriétaires. Il faut donc aller vers ces ménages pour qu'ils puissent faire valoir leurs droits, quel que soit le statut d'occupation.
Pour ce qui est des principaux outils existants, la RHI est à repenser. Au-delà de la question du périmètre, le permis de louer a été peu probant en raison d'un manque de moyens humains déployés, de la capacité à faire connaître cet outil aux propriétaires sur le terrain et à appliquer les sanctions le cas échéant. Il faut peut-être en redéfinir le périmètre mais surtout, se donner les moyens de rendre cet outil efficace.
Le conventionnement de l'ANAH est fait de telle manière que 35 % du coût des travaux sont couverts par l'État. Une expérimentation avec une intercommunalité est en cours pour que celle-ci vienne abonder en complément et arriver à 50 %. L'enjeu est de parvenir à 70 voire 80 % de couverture des travaux pour les propriétaires ayant peu de ressources, ce qui pose la question des capacités financières des villes ou des départements pour parvenir à un outil efficace qui puisse être déployé au bon niveau.
Certains outils n'existent pas outre-mer, comme le programme « Habiter mieux », qui vise la rénovation énergétique, alors qu'il devrait bénéficier à chacun selon les spécificités des territoires ultramarins.
Pour faire vivre ces outils, un engagement financier important de l'État est nécessaire. Or cet engagement a évolué en dents de scie. Il faut une enveloppe adaptée aux besoins, ayant pour corollaire des opérateurs en capacité de monter les dossiers et les faire avancer dans des délais raisonnables. Le modèle existant de la RHI visant à résorber les poches « de type bidonville » doit être dépassé pour conduire à la résorption de l'habitat indigne sur des zones plus petites qu'avant - de 4 ou 5 habitations -, afin de contourner les problématiques actuelles des RHI en souffrance depuis 10 ou 15 ans, qui ne se sont pas réalisées parce que le foncier n'a pas été acquis, à cause de problèmes administratifs, ou encore en raison d'une opération multisites bloquée parce que l'un d'entre eux était dans une situation difficile. Les critères liés à l'amélioration de l'habitat sont à revoir. Les critères de niveau de ressources, fixées par l'État, le département ou la région, sont trop limitatifs et empêchent des ménages hors dispositif mais en situation de logement indigne d'en sortir. Les ménages en indivision foncière sont aussi sans solution, de même que ceux qui sont sur des terrains agricoles ou à risque. Ces personnes ont passé des décennies ou leur vie entière à un endroit et ne peuvent se projeter ailleurs. Il faut des réponses innovantes et adaptées à ces réalités.
La réponse aux besoins est insuffisante malgré des dynamiques positives. Le besoin s'élève à 9 000 réhabilitations dans le parc social quand en moyenne sur la décennie, ce sont 700 logements en moyenne qui sont réhabilités chaque année. Aux 18 000 habitats indignes répondent 2 450 améliorations ou sorties d'indignité annuelles. Il faudrait entre 7 et 13 ans (pour les parcs privé et social respectivement) pour répondre aux besoins présents, sans parler des besoins futurs.
Les moyens dédiés à l'information et l'accompagnement des ménages, des propriétaires et des opérateurs pour améliorer l'habitat sont aussi en question. Aujourd'hui, il manque d'acteurs de terrain qui puissent aller voir les ménages hors dispositif pour faire un diagnostic technique et financier sur la nature des travaux à faire. C'est pourtant le préalable nécessaire pour avancer sur la nature des accompagnements à proposer. L'enjeu de l'ingénierie est donc essentiel au-delà des questions de matériaux et de coût des travaux.
Nos recommandations à cinq ou dix ans s'articulent autour de quatre axes : la fixation des objectifs de résultats pour l'État et les collectivités locales, la mise des personnes au centre de la lutte contre l'habitat indigne, le développement de réponses innovantes et adaptées aux besoins des ménages non pris en charge par les outils et dispositifs existants et la réalisation d'un suivi régulier de la stratégie LHI en prévoyant un plan de communication.
Nous avons inclus des exemples de déclinaisons plus spécifiques de ces préconisations, comme le pilotage et la mise en oeuvre d'un PDLHI ambitieux, la lutte contre les logements vacants - aujourd'hui, la taxe sur les logements vacants n'est pas praticable dans les outre-mer ; le cadre réglementaire ne permet donc pas d'utiliser des leviers applicables dans l'Hexagone -, la question du conventionnement ANAH sur le cofinancement, le renforcement des financements dédiés à l'accompagnement social des ménages et à la coordination des acteurs, certaines dispositions de la loi Letchimy qui n'ont pas encore été précisées - je pense aux délais d'application de certaines mesures - et enfin, la mise en place d'un diagnostic de performance énergétique qui n'existe pas à La Réunion alors que des outils similaires ont été mis en place en Guadeloupe et en Martinique.
Un travail parlementaire serait le bienvenu pour permettre la régularisation du statut d'occupation des locataires qui habitent depuis très longtemps sur des terrains en indivision. Cette régularisation leur donnerait accès aux dispositifs de droit commun sur l'amélioration de l'habitat. On ne sait pas aujourd'hui combien de personnes sont concernées par cette situation. L'abbé Pierre disait que « la misère ne se gère pas mais se combat » et il y a un véritable combat à mener contre l'habitat indigne, avec des moyens importants.
M. Jean-Max Léonard, président directeur général d'Innovation logement outre-mer (ILOM). - Innovation Logement Outre-mer est un groupement d'acteurs économiques de l'amélioration de l'habitat en Martinique. Ce territoire compte 32 000 logements insalubres. Trois EPCI construisent leur PILHI en ce moment. Nous disposerons d'un recensement précis avec une cartographie complète du territoire à la fin de l'année, permettant d'identifier les poches d'insalubrité prioritaires à traiter.
L'essentiel de mon propos sera consacré au Plan Logement outre-mer (PLOM) 2019-2022 dont l'un des objectifs est de réhabiliter le parc de logements existant. Le dernier comité de pilotage a eu lieu le 18 mars 2021 pour faire un point sur l'avancement après 15 mois de mise en oeuvre. Le taux d'avancement affiché pour la Martinique est de 40 %. Or l'animation du plan, à travers des ateliers thématiques ou des groupes de travail, n'a pas encore vu le jour en Martinique car le prestataire qui assurera la maîtrise d'oeuvre pour la DEAL et l'animation de la déclinaison locale du PLOM n'a pas encore été choisi. Nous sommes donc inquiets et ne voudrions pas que le PLOM soit encore une fois un assemblage de mesures et dispositifs recyclés, par rapport à ce qui existait auparavant. Le temps nécessaire à la création et à l'adaptation de dispositifs va encore une fois être sacrifié. Nous sommes aussi inquiets car les objectifs n'ont pas été révisés au regard de la crise majeure que nous traversons. Les sujets abordés dans le questionnaire sont importants mais l'outil de politique publique censé porter ces sujets et leur donner des réponses nous semble à l'arrêt, et paradoxalement on nous dit qu'il avance. Or, en réalité, toutes les actions sont à venir puisque l'animation n'a pas commencé.
Pour revenir sur les RHI, je suis en phase avec ce qui a été dit. En outre, un déficit d'ingénierie est l'un des facteurs qui obère les résultats des opérations. C'est la raison pour laquelle nous pensons qu'il faudrait confier le pilotage des RHI à des acteurs privés externes, afin d'augmenter les compétences des maîtres d'oeuvre et de réduire les délais.
Nous pensons que le dispositif de l'ANAH est peu attractif sur le territoire. Il faut augmenter le taux de subvention et réduire la durée de conventionnement pour y remédier. Les communes n'ont pas les moyens de financer les opérations de démolition dont l'accélération est souhaitée et il serait utile de créer un dispositif d'accompagnement pour mieux les traiter.
En vue d'associer les populations locales aux opérations de réhabilitation, nous pensons qu'il faut rendre opérationnel le dispositif « acquisition et amélioration. » Nos populations sont majoritairement propriétaires, et même en cas d'insalubrité, elles ne veulent pas aller dans du logement locatif. Ce dispositif qui n'est pas actif sur nos territoires devrait permettre de les associer aux opérations de réhabilitation, avec des opérateurs agréés qui auraient un profil un peu différent de ce qui existe déjà, et qui seraient à même de mener la promotion du dispositif, la détection et l'accompagnement. Ce changement permettrait de traiter l'insalubrité et la vacance.
L'auto-construction fait face à une raréfaction des acteurs de l'assurance sur nos territoires. Nous n'arrivons pas à obtenir de garanties décennales sur de telles opérations. Il nous semble opportun d'intégrer davantage de chantiers d'insertion plutôt que de mobiliser les bénéficiaires.
Mme Caroline Lleu-Etheve, chargée du développement outre-mer de l'association nationale des compagnons bâtisseurs (ANCB). - Notre organisation promeut à la fois l'auto-réhabilitation accompagnée et l'auto-construction accompagnée. Je partage l'essentiel de ce qui a été dit. Un premier point important est de ne jamais déconnecter l'habitant du dispositif d'amélioration du logement adopté. L'habitant doit être au coeur de son projet de réhabilitation ou de construction et entièrement partie prenante. Il ne faut pas s'atteler seulement à la problématique du logement et des travaux mais bien à l'accompagnement technique et social de l'habitant. En raison du caractère partiellement autonome de ces dispositifs, l'habitant réalise la majeure partie des travaux et fournit son temps et sa force de travail.
À la question de la pertinence du développement de projets d'auto-réhabilitation et d'auto-construction, nous répondons donc évidemment positivement. Le dispositif OGRAL en oeuvre à La Réunion depuis 2015, en Guyane depuis 2018 et qui le sera bientôt aux Antilles permet d'intervenir auprès des personnes sans droit ni titre, économiquement et socialement précaires. Ce dispositif semble bien adapté aux problématiques sociales et de logement que rencontrent ces habitants mais les financements nous semblent insuffisants.
L'OGRAL a d'abord été envisagé comme préalable à une opération plus importante de type RHI ou RHS. Or, ce n'est le mode de fonctionnement actuel : les travaux s'arrêtent en général totalement quand l'OGRAL se termine. Il faut un chantier de réhabilitation global et durable durant cette phase d'OGRAL en traitant le logement dans son entièreté et en incluant la rénovation énergétique dans le package de travaux. L'OGRAL ne permet pas actuellement de financer tous ces travaux. Il couvre deux fois 5 000 euros maximum octroyés à la maîtrise d'ouvrage, 1 000 euros d'accompagnement du ménage pour l'opérateur et éventuellement 10 000 euros pour des travaux réalisés par des entreprises en sus. Si les montages des projets OGRAL mis en oeuvre aujourd'hui ont pu voir le jour, c'est grâce à un apport de presque 50 % du montant estimé du projet par des fonds privés ou publics (comme la fondation Abbé Pierre ou la CAF). Le dispositif a été conçu sur un format minimal insuffisant pour traiter ces problématiques.
Il nous semble nécessaire de valoriser l'apport manuel de l'habitant dans l'auto-réhabilitation ou l'auto-construction. Nous le faisons à titre informatif, pour démontrer au partenaire financier que trois semaines à temps plein sur un chantier au SMIC horaire représentent un montant considérable. Cet apport doit être valorisé dans les plans de financement, au même titre qu'un artisan dont le devis serait pris en compte dans le dispositif. L'assiette de subvention doit pouvoir être calculée pour refléter au réel le projet, en incluant cet apport en termes de travail de l'habitant.
Le sujet de la libéralisation et de la régularisation du foncier nous semble très important. Les procédures administratives et de notariat peuvent prendre une dizaine d'années pour régulariser d'énormes parcelles en indivision ou occupées, de manière pacifique, par des occupants sans titres qui n'ont pas accès au dispositif de droit commun. Un certain nombre d'outils permettent d'y travailler mais il faut que le foncier soit libéré et régularisé pour permettre des réalisations autonomes accompagnées de travaux.
La question assurantielle a été soulevée. Lorsqu'on intervient en réhabilitation chez des personnes sans droit ni titre, elles n'ont pas d'assurance habitation ni d'assurance pour les travaux. Il en va de même si le foncier n'est pas maîtrisé dans un processus d'autoconstruction encadrée. Les assureurs doivent reconnaître que les constructeurs, aussi novices soient-ils, sont accompagnés par des professionnels du bâtiment. Les travaux doivent donc pouvoir être assurés. Nous avons réalisé environ 140 toitures et charpentes à Saint-Martin suite au cyclone Irma, selon les normes antisismiques et anticycloniques en vigueur. Il n'y a pas eu plus de problèmes que s'ils avaient été réalisés directement par un artisan.
M. Michel Pelenc, directeur général de la fédération Solidaires pour l'habitat (SOLiHA). - Nous sommes présents sur l'ensemble des outre-mer, avec environ 200 salariés et sur deux métiers principaux : l'accompagnement des particuliers dans l'amélioration de l'habitat et l'accompagnement des collectivités locales dans la revitalisation des centres-bourgs et des quartiers.
J'entends parler de l'habitat indigne depuis longtemps et c'est un sujet toujours aussi prégnant. Il faut se poser la question de l'efficacité des politiques publiques pour traiter de façon massive la question dans l'ensemble des outre-mer.
Nous avons deux intervenants sur ces territoires, le ministère des outre-mer avec la ligne budgétaire unique (LBU) et l'ANAH avec les propriétaires bailleurs, et une boîte à outils pour la revitalisation des centres-villes : les Opérations programmées d'amélioration de l'habitat (OPAH), les Opérations de restauration immobilière (ORI), etc.. Il existe une série de sigles et d'outils peu ou mal connus qui mériteraient de l'être davantage. La revitalisation avance néanmoins puisque 13 ou 14 programmes « Action Coeur de Ville » (ACD) ont été lancés ainsi qu'une trentaine de programmes « Petite ville de demain » et une douzaine d'OPAH qui sont en cours. La priorité a été donnée au logement social public qui a consommé du foncier et répondu à des besoins de la population mais pas assez aux besoins d'habitat privé.
Nous constatons des problèmes de mise en oeuvre des outils existants. Par exemple, la Prime d'intermédiation locative (PIL) de l'ANAH n'est pas connue dans certains territoires ultramarins. Il en va de même pour le conventionnement sans travaux. Or il permet de créer du logement locatif social privé dans les territoires.
D'autres outils ne sont pas forcément adaptés, par exemple le dispositif d'investissement locatif de la « loi Cosse ». Il doit permettre 85 % de déduction des revenus locatifs dans le cadre d'une location par l'intermédiaire d'une agence immobilière sociale (AIS). Comme la plupart de nos propriétaires bailleurs ne sont pas imposables sur le revenu, le dispositif ne fonctionne pas.
Une circulaire concernant les bidonvilles en métropole datée de 2018 était intéressante et prévoyait des moyens, mais elle n'est pas applicable en outre-mer où elle serait d'autant plus pertinente. Il faut non seulement des moyens mais aussi des outils, à regrouper pour créer une dynamique. Face à des logements vacants ou indignes, aux aides à la pierre, un accompagnement au propriétaire bailleur ou occupant sont nécessaires. Pour le locatif, il faut permettre la sécurisation locative avec la garantie Visale, favoriser la prospection, la gestion locative adaptée et l'accompagnement des ménages. C'est par cette mobilisation de l'ensemble des outils que l'on peut proposer aux propriétaires de sortir de l'habitat indigne et de parvenir par exemple au logement locatif très social. Il faut bien sûr innover s'agissant des bidonvilles. C'est ce qui se fait à Mayotte de façon parcellaire. Aujourd'hui, le ministère développe le Logement Locatif Très Social Adapté (LLTSA) qui n'est autre que le prêt locatif aidé d'intégration (PLAI) adapté dont nous disposons en métropole. Il faut donc affiner les outils pour correspondre aux besoins des territoires.
En termes plus politiques, le ministère des outre-mer n'est pas représenté au conseil d'administration de l'ANAH, ni au Conseil national de l'habitat et n'est plus représenté à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). C'est problématique, puisqu'il faut porter la voix spécifique des outre-mer. Nous avons aussi un problème de coordination. La Délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (Dihal) n'est malheureusement pas présente. L'équipe du ministère des outre-mer est forcément restreinte et a de temps en temps besoin d'experts, par exemple de la Dihal, sur les bidonvilles. L'articulation entre ces outils est lacunaire.
Enfin, les finances publiques des collectivités des outre-mer sont exsangues. L'État doit investir davantage dans les outre-mer, y compris par les finances publiques des collectivités locales. Je rejoins ce qui a été dit sur le financement des propriétaires bailleurs.
M. Kamel Senni, responsable du pôle « Logement d'abord », de la fédération Solidaires pour l'habitat (SOLiHA). - Environ 15 000 personnes sont concernées par les bidonvilles en métropole. La Dihal s'en occupe bien en accompagnant la politique mise en oeuvre avec un budget de 8 millions d'euros. À Mayotte, au nord de Mamoudzou, se trouve un bidonville de 15 000 personnes. En prenant en compte la Polynésie, l'estimation globale serait de l'ordre de 250 000 personnes. Ce problème excède la question de l'habitat indigne ou insalubre. Il ne s'agit plus d'opérations sur des poches ou sur des endroits circonscrits mais bien sur des villes entières regroupant des milliers de personnes dans des habitations en tôle. À ce stade, quand un problème n'a pas de solution, ce n'est plus un problème mais une contrainte. La problématique est tellement massive sur certains territoires qu'elle nécessite une approche globale d'ampleur. L'accélération de destructions porte sur des terrains appartenant à l'État parce qu'elles ne demandent pas de procédures lourdes, ou bien concernent de façon immédiate la sécurité des personnes. Ce type de démolition n'a pas d'intérêt à moyen terme, puisque les personnes vont ailleurs et densifient des bidonvilles existants, ni à long terme en l'absence de solution globale.
Nous réfléchissons actuellement à un dispositif de recherche-action pour réunir l'ensemble des avis pertinents à ce sujet, y compris ceux des acteurs locaux et des scientifiques, et pour mener des études préalables sur un certain nombre de sites en vue de produire une méthodologie de travail. Il est probable que nous ayons à nous inspirer des méthodologies d'intervention sociale dans les bidonvilles des favelas brésiliennes.
Il va falloir convaincre les décideurs et l'opinion publique de l'intérêt d'un tel travail, y compris en termes de retombées économiques, de l'implication des habitants et de leur transformation en citoyens de droit commun. L'inégalité d'accès aux droits et de la protection sociale à Mayotte a été évoquée.
Des initiatives intéressantes ont été mises en place, par exemple à Majicavo avec le soutien de la Fondation Abbé Pierre. Cette expérimentation est à échelle humaine puisqu'elle concerne 46 logements et 120 personnes, mais montre qu'avec des méthodes, des équipes formées et un soutien financier, on obtient des résultats. Pour un changement d'échelle, un soutien bien plus important sera nécessaire.
En Guyane, les ordres de grandeur sont semblables. Les bidonvilles s'étendent sur des hectares. En raison de la grande part de forêts vierges sur le territoire, les opérations de destruction ont repoussé des groupes d'habitants plus loin au sein de la forêt.
Une difficulté tient au traitement des personnes aux droits de séjour incertain, irrégulier ou sans droit ni titre. Elle ne relève pas des acteurs locaux mais de la politique nationale. Sans un positionnement politique affirmé sur ces sujets, le traitement massif de ces situations semble impossible, quels que soient les moyens mis en oeuvre. Détruire un bidonville avec un bulldozer ne règle pas les difficultés des habitants.
M. Victorin Lurel, rapporteur. - J'ai beaucoup appris de vos interventions. Il serait utile de produire un recensement de tous les outils, dispositifs et mesures qui ne sont pas appliqués dans les outre-mer. Ma première question va à Mme Sophie Primas. Quel a été l'avenir de la PPL de M. Bruno Gilles visant à améliorer la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux ? Quelle est l'actualité de ce texte dans les outre-mer ? Notamment, quelles ont été les suites de la réflexion sur les polices spéciale et générale ?
Sur le permis de louer et l'expérimentation à Saint-André, puisque la taxe sur les logements vacants n'existe pas, ce peut être une incitation à dégager des logements. En Guyane où le foncier est rare, il faut utiliser tous les moyens incitatifs quelle que soit leur nature pour inciter à louer, à construire, à améliorer, entretenir et réparer.
Quelles sont les distinctions entre habitat indigne, insalubre, défavorisé, bidonville ? Y a-t-il une typologie juridique ?
J'ai connu des RHI qui ont duré 20 ans, par exemple au Gosier en Guadeloupe. Il y avait peu d'aménageurs. J'ai l'impression que la SEMAG fait encore des RHI en Guadeloupe, par des financements de l'État et des collectivités, mais que dans l'ensemble c'est toujours laborieux. Les contrôles opérés par les organismes de tutelle en aval rapportent des résultats désastreux.
Pour ce qui est des pouvoirs du maire, face aux dents creuses, aux habitats menaçants etc., qu'est-ce qui est aujourd'hui efficace ?
Certains points sont à approfondir sur la loi Letchimy. Nous voulions l'améliorer en matière fiscale, en passant de l'unanimité à la majorité pour la décision de la répartition de la succession. Cependant, comme des taxes sont à payer en cas de libéralité, cela ne facilite toujours pas la répartition de la dévolution successorale.
Concernant l'habitat indigne, ce que le Gouvernement précédent avait octroyé pour permettre le départ des occupants sans titre était insuffisant. Nous étions montés à 10 000, voire 40 000 euros selon les cas, et cela n'est toujours pas suffisant. Quel est le bilan de ce dispositif à ce jour ? Faut-il le repenser ?
En Guadeloupe, j'aimerais m'arrêter sur la situation de 1 821 logements indignes à Pointe-à-Pitre, sur propriété de la ville, dont une partie est à démolir. Une certaine forme de mixité est à installer par l'intégration de logements intermédiaires voire de logements à loyers libres étant rappelé qu'il y a 75 % de logements sociaux à Pointe-à-Pitre.
Je finis avec les quartiers politiques de la ville (QPV), au nombre de 6 en Guadeloupe. De quels moyens disposez-vous, en votre qualité d'opérateurs, hors QPV ? Nous avions eu une discussion animée avec Mme Myriam El Khomri sous la présidence de M. François Hollande sur l'extension des périmètres. Sur ma commune qui n'est pas en QPV se trouvent des résidences dégradées, regroupées, qui relèvent de l'indignité mais ne peuvent bénéficier de dispositifs, tels que la défiscalisation, le crédit d'impôt ou de l'ANRU. Il faut s'interroger sur l'articulation de ces politiques (ANRU, comité de la ville, coeur de ville, etc.), au-delà de ces quartiers qui couvrent parfois une partie significative de la population. Il y a un problème de compréhension d'ensemble, d'efficacité et de satisfaction des demandeurs dont les files d'attente s'allongent.
Mme Micheline Jacques, rapporteure. - Les résultats de l'ANAH seraient-ils liés à une méconnaissance de ses possibilités d'applications ultramarines? Pensez-vous qu'il faille revoir la représentativité ultramarine au sein de ces organismes et de l'ANAH en particulier ?
Lors d'une audition antérieure, il a été mis en lumière que les crédits au titre de l'éco-prêt logement social (éco PLS) étaient sous-consommés. Pensez-vous que ceux-ci devraient être mobilisables pour compléter les opérations de rénovation ?
Enfin, concernant l'ingénierie du BTP, que pensez-vous d'un accompagnement des jeunes vers une formation professionnelle diplômante pour renforcer le secteur de la construction ?
Je vous suis sur la nécessité d'intégrer les populations dans les processus de rénovation. Pourquoi ne pas intégrer les associations de quartier qui pourraient assurer un lien entre aménageurs et populations ? Il y a souvent une aspiration à ne pas changer ses habitudes, son lieu de vie, plutôt que d'être déplacé dans des blocs de béton.
M. Guillaume Gontard, rapporteur. - Je retiens qu'il est bien sûr très compliqué de traiter l'insalubrité et que les résultats ne sont pas au rendez-vous des politiques successives. Mais je comprends que, même si leur logement est insalubre, les habitants puissent être attachés à leur lieu de vie, par un lien intime, et qu'il est toujours difficile de déplacer des personnes, même pour aller dans des logements plus confortables. Cette donnée doit être prise en compte, même si elle est difficile à intégrer. Les programmes d'amélioration de l'habitat me paraissent d'autant plus intéressants, y compris l'auto-réhabilitation et l'auto-construction. Un certain nombre de freins existent, que ce soient les normes, les assurances ou les difficultés à intervenir sur de l'habitat ancien existant. Je retiens aussi le manque d'ingénierie qui doit être complétée, renforcée et peut-être clarifiée en rendant l'ensemble des acteurs d'un territoire plus visibles pour faciliter l'accompagnement des opérations. On peut ajouter la question de la précarité énergétique, qui va de pair avec la lutte contre l'habitat indigne.
M. Michel Pelenc. - L'ANAH s'est implantée dans les outre-mer dans les années 1990. La difficulté est de mettre à disposition l'ensemble des outils de l'ANAH non seulement aux propriétaires bailleurs mais aussi des acteurs concernés au niveau des centres-villes, des bourgs, des copropriétés, etc., ce qui a trop peu été fait. Il n'y a pas de porte-parolat pour l'outre-mer dans les instances du logement, que ce soit au CNH, à l'ANRU ou à l'ANAH. C'est un véritable problème car l'offre proposée doit être en relation avec les besoins des populations et leurs spécificités.
« Habiter mieux » a été cité à juste titre. Ce dispositif n'est disponible dans les outre-mer que depuis deux ans pour les propriétaires bailleurs et, à ma connaissance, en 2019, seuls 14 dossiers avaient été montés dans l'ensemble des outre-mer. Il est évident qu'il y a un problème quelque part. L'ANAH avait certes été échaudée à la suite d'un détournement de fonds très important en Martinique mais cet épisode date désormais, et il faut passer à autre chose en vue d'une présence concrète de l'ANAH dans les territoires ultramarins.
Dans le cadre du PLOM, le ministère a annoncé qu'une convention était en cours de finalisation entre le ministère des outre-mer, l'ANAH et la Direction de l'Habitat, de l'Urbanisme et des Paysages (DHUP). Je n'en connais pas le contenu mais c'est un pas dans le bon sens.
Concernant l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ), qui permet des avances, les entreprises hésitent à intervenir chez des ménages très modestes pour ne pas avoir de problème de solvabilité. En intervenant en amont, nous permettons de financer les matériaux achetés par les entreprises avant de boucler le reste à charge grâce à l'éco-PTZ. Aujourd'hui, il ne fonctionne pas dans l'Hexagone et est, je crois, quasi absent en outre-mer, alors qu'il est garanti à hauteur de 75 %. Nous l'avons proposé pour la rénovation énergétique de gros chantiers dans le cadre du rapport d'Olivier Sichel, avec un passage de 20 000 à 40 000 euros en moyenne. Nous avons demandé à porter le fonds de garantie à 90 % comme pour le PGE mais encore faut-il que les banques distribuent cet éco-PTZ. Dans l'Hexagone, le Crédit Agricole le fait parfois, mais par exemple sur 70 000 logements par an réalisés avec le SOLIHA, seulement 300 le sont avec l'éco-PTZ. C'est donc très marginal.
Action Logement avait un programme de rénovation énergétique et un programme « salle de bain » valables pour les territoires d'outre-mer, mais le programme de rénovation énergétique qui s'est arrêté dans l'Hexagone n'a toujours pas été déployé en outre-mer. Par exemple, pour un chantier de 20 000 euros, il est possible d'avoir une aide de 20 000 euros sur l'isolation, les murs, etc. Il y a toujours des retards pour les outre-mer, certains sont justifiés, d'autres ne le sont pas. On observe bien une difficulté à étendre tous ces outils dans les territoires ultramarins, qui soit ne sont pas adaptés ou soit pas appliqués. Nous en revenons au problème du porte-parolat insuffisant.
Mme Victoire Jasmin. - Je voudrais revenir sur les différents dispositifs, notamment les PLHI, que les EPCI sont en train de mettre en place. Un inventaire est en cours. Je constate une absence de cohérence et de complémentarité entre les nombreux opérateurs et dispositifs. À cela s'ajoutent les difficultés de financement évoquées. En Guadeloupe, l'ouragan Hugo a détruit un certain nombre de logements vétustes et il y a moins de logements indignes en général mais il en existe encore. Il a été question d'auto-construction et de chantiers d'insertion, ainsi que de risques assurantiels. Quel est le champ d'action des chantiers d'insertion là où ils sont pratiqués ? Les garanties décennales peuvent-elles être mobilisées dans ce cadre ? Quelles sont les limites ?
Concernant l'application des différents dispositifs en matière de rénovation, il faudrait une véritable cohérence entre les différents services. Des annonces pertinentes ont été faites dans le plan de relance. Comment les avez-vous reçues ?
Mme Viviane Malet. - Merci aux intervenants pour leurs excellentes présentations portant sur une problématique épineuse.
Nous avons six projets ANRU à La Réunion. Ne pensez-vous pas qu'il serait utile de faire rentrer l'auto-réhabilitation accompagnée (ARA) dans les programmes de renouvellement urbain, ce qui permettrait de ne pas faire deux ensembles séparés dans les quartiers, entre les logements rénovés des bailleurs et les logements non rénovés des propriétaires occupants ?
Ne serait-il pas judicieux également d'associer des régies de quartier ou des chantiers d'insertion dans ces périmètres ANRU pour que les résidents ou habitants puissent s'approprier les travaux et s'aider entre eux ? Ce pourrait être fait en s'appuyant sur les CCAS. Par exemple, le CCAS de Saint-Pierre à La Réunion a une régie pour les travaux d'amélioration.
M. Pascal Fouque. - Sur les chantiers d'insertion et l'ARA, je vais me faire le porte-parole de la DEAL. L'âge des personnes ou l'état de santé est une difficulté évidente, qui peut constituer un obstacle à la possibilité d'intégrer des personnes pour réhabiliter eux-mêmes leur logement. L'état de santé est d'ailleurs souvent en lien avec l'état du logement occupé. La nature des travaux est aussi un facteur. Dans le cas d'une OGRAL pour des travaux légers, l'intervention de rénovation est par définition limitée.
Mme Caroline Lleu-Etheve. - Pour compléter ces propos, l'ARA peut s'appliquer chez des ménages en capacité de fournir ce travail. Sur des territoires où la population est âgée, la démarche peut être compliquée à mettre en place. Cela étant, il s'agit d'une démarche collective, ce qui signifie que si l'habitant ne peut effectuer les travaux, il est possible de solliciter son entourage élargi : famille, voisins, collègues, y compris les associations de quartier.
Pour ce qui concerne les quartiers ANRU, nous avons réalisé deux études opérationnelles en Guyane, en 2017 et 2019, dans le cadre des études de préfiguration d'importants projets de réhabilitation à Cayenne et à Saint-Laurent-du-Maroni. Les phases opérationnelles et les marchés ne sont toujours pas sortis faute de financements, notamment de la part des collectivités locales.
Enfin, la caisse d'avance rendra possible le démarrage de phases de travaux au coût élevé pour les opérateurs sélectionnés qui disposent rarement d'une trésorerie suffisante. Il existe donc des projets d'ampleur pour les quartiers NPNRU, encore faut-il que ces projets voient le jour et que l'ingénierie soit en mesure de les mettre en oeuvre.
Mme Micheline Jacques, rapporteure. - Lors de mon intervention, j'ai évoqué l'éco-PLS, un prêt qui permet de financer les travaux de rénovation énergétique du logement. Cette ligne budgétaire est sous-consommée et pourrait être mobilisée.
M. Jean-Max Leonard. - Un chantier d'insertion peut trouver des garanties décennales puisque ce sont des entreprises qui interviennent, mais en raison de la raréfaction des acteurs de l'assurance, un second problème apparaît. Dans la construction, une assurance dommage ouvrage doit être souscrite pour le compte du bénéficiaire. Elle finance les éventuelles dégradations constatées avant le traitement de la garantie décennale. Elle est obligatoire mais il est très difficile de l'obtenir sur notre territoire.
M. Matthieu Hoarau. - Le recensement des outils et de leur application est un chantier utile et central.
Sous de bonnes conditions, le permis de louer est un levier qui pourrait être utile pour prévenir des situations d'habitat indigne et lutter contre les marchands de sommeil. Il faut se donner les moyens d'aller au bout de l'expérimentation.
Il faut aussi mettre en perspective le nombre de logements vacants. À La Réunion, selon l'INSEE, plus de 33 000 logements sont vacants. On voit le fort potentiel à remobiliser ces logements dans une logique d'intermédiation locative. L'enjeu est par ailleurs de rénover les logements vacants dont les propriétaires n'ont pas les moyens de réaliser les travaux. Connaître ces besoins et les causes de la vacance est important. Les leviers de la taxe « logement vacant » et de la taxe d'habitation sur le logement vacant peuvent être expérimentés avec des outils plus pédagogiques.
Pour répondre à M. Victorin Lurel, les statuts des habitats indignes, insalubres et indécents sont définis dans la loi Besson de 1990, la loi ALUR de 1994, dans le code de santé publique et le code de la construction et de l'habitation, ainsi que dans le décret du 30 janvier 2002 pris pour l'application de la loi SRU de 2000. Des définitions juridiques précises existent donc.
Sur la question des polices, notamment du maire, nous avons des éléments sur le nombre d'arrêtés prononcés par les préfets mais peu d'éléments sur l'exercice du pouvoir de police des maires à La Réunion. La question du suivi, de l'utilisation et du résultat se pose de même que la façon de la rendre plus opérationnelle et d'accompagner les collectivités.
Concernant la représentativité, l'ANAH donne délégation aux services de la DEAL. Que ce soit l'ANAH ou les autres outils liés à l'habitat, les données de l'outre-mer sont toujours séparées de celles de l'Hexagone. Cette dichotomie n'est pas viable. Il faut mieux observer les politiques publiques et regarder de quelle façon les outre-mer sont représentés dans les instances nationales pour mieux prendre en compte les besoins des territoires.
Les chantiers d'insertion, les formations diplômantes des jeunes et la mobilisation entreprise sont des leviers. Le logement peut en effet être générateur d'activités économiques dans des zones où le chômage est important, en particulier le chômage des jeunes.
L'ANRU déploie son dispositif dans un modèle de consultation des habitants plutôt que de co-construction. Ce modèle est donc à repenser pour mieux inclure les habitants dans ces dispositifs, répondre à leurs besoins et promouvoir leurs capacités d'intervention dans les réponses apportées.
La rénovation énergétique est difficile à appréhender en outre-mer faute d'outils adéquats et en raison de dispositifs inadaptés ou méconnus. Il faut encore travailler pour mieux cerner les croisements entre précarité énergétique, rénovation et amélioration de l'habitat.
L'Action Logement accession a deux aspects : d'une part obtenir les financements prochains pour relancer et réadapter le dispositif et d'autre part traiter les dossiers restés en souffrance. Nous avons besoin d'une analyse précise de la situation à ce jour.
L'OGRAL ne se limite pas à l'ARA mais peut s'appuyer sur d'autres modalités d'intervention. Certaines familles n'ont pas la capacité de mener les travaux ou de mobiliser leur entourage et sont néanmoins éligibles à l'OGRAL. Il faut aussi les aider à avancer. L'ARA fonctionne sous certaines conditions. La question des opérateurs se pose. À La Réunion, personne n'est en capacité, à part les Compagnons bâtisseurs et les régies, et en l'état ces derniers ne peuvent aller au-delà de ce qu'ils font déjà.
M. Stéphane Artano. - Je remercie les intervenants pour leur présentation et leurs réponses ainsi que les rapporteurs. Vous pourrez nous faire parvenir tous les éléments pour éclairer les travaux de notre délégation, et permettre d'établir des propositions concrètes pouvant être ensuite portées par le Sénat.
Je retiens deux choses en particulier : l'accent sur l'ingénierie locale et l'intérêt du travail en réseau y compris au sein des services de l'État, qui assure leur déconcentration. On assiste trop souvent encore à un fonctionnement en silo des services. Les préfets ont du mal à coordonner les services, y compris dans l'Hexagone. Cette coopération est pourtant indispensable. Enfin, l'adaptation des dispositifs aux territoires est toujours déterminante. Il faut répondre concrètement aux thématiques propres et aux réalités différentes.
Mme Annick Petrus, présidente. - À mon tour de vous remercier pour la tenue de cette table ronde et la pertinence des réponses apportées.