COMMISSION MIXTE PARITAIRE
Mercredi 1er juillet 2020
- Présidence de M. Roland Lescure, président -
La réunion est ouverte à 18 heures.
Commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux se réunit à l'Assemblée nationale le mercredi 1er juillet 2020.
Elle procède tout d'abord à la désignation de son bureau, constitué de M. Roland Lescure, député, président, de M. Philippe Bas, sénateur, vice-président, de M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, et de M. André Reichardt, sénateur, rapporteur pour le Sénat.
La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.
M. Roland Lescure, député, président. - Nous sommes réunis aujourd'hui, à la demande du Gouvernement, et conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, pour examiner, dans le cadre d'une commission mixte paritaire (CMP), les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux. Ce texte a déjà suivi un long parcours depuis son adoption en première lecture par l'Assemblée nationale le 6 décembre 2018 dans le cadre d'une journée réservée aux groupes minoritaires ou d'opposition. Le Sénat a renvoyé ce texte à sa commission des lois, qui l'a modifié le 21 février 2019. Nos deux assemblées se sont prononcées en deuxième lecture respectivement le 30 janvier 2020 à l'Assemblée nationale et le 4 juin 2020 au Sénat. Le texte de la proposition de loi comporte désormais onze articles. Les articles 1er B, 2, 2 ter, 2 quater, 4, 5 et 8 étant conformes, ils ne peuvent plus être discutés au cours de la présente réunion. Avant de céder la parole à M. Philippe Bas, président de la commission des lois du Sénat, je tiens à souligner que, sur quatre CMP que j'ai eu l'honneur de présider ou de vice-présider, trois ont abouti à un accord. Nous avons, au sein de cette commission, le goût des CMP conclusives et je souhaite sincèrement que nous trouvions un accord aujourd'hui.
M. Philippe Bas, sénateur, vice-président. - Monsieur le Président, je vous remercie de votre bon accueil et suis heureux de vous entendre dire qu'un succès en CMP est quelque chose de précieux et que vous espérez que ce sera encore le cas aujourd'hui. C'est exactement comme cela que doit fonctionner le Parlement, le plus possible.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. -Messieurs les Présidents, Monsieur le rapporteur, cher André, chers collègues sénateurs et députés, je suis très heureux que nous puissions, aujourd'hui, nous retrouver dans le cadre de cette CMP, pour tenter de faire aboutir un texte sur lequel nous travaillons, tous, depuis près de deux ans. Depuis la première lecture, ici à l'Assemblée, en décembre 2018, nous avons considérablement enrichi ce texte et je salue le travail mené avec M. André Reichardt. Ce texte a deux objectifs principaux : protéger au mieux les consommateurs, tout en préservant l'activité des professionnels. Il y a un grand nombre d'emplois en jeu, directs et indirects. Cette proposition de loi, telle que nous l'avons travaillée, permet de répondre à ces deux impératifs. Nous allons responsabiliser les opérateurs : c'est important. Nous allons également donner un cadre légal aux sanctions contre les appels surtaxés frauduleux, ce qui sécurisera nos concitoyens pour lesquels cela peut être très coûteux. Nous avons travaillé en très bonne entente, M. André Reichardt et moi et, tout comme nos présidents, j'espère que cette CMP sera conclusive. Je me félicite de ce travail collectif bicaméral et entre les différents groupes de l'Assemblée nationale.
M. André Reichardt, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Monsieur le Président de la commission mixte paritaire, Monsieur le Président de la commission des lois, Monsieur le rapporteur, cher Christophe, mes chers collègues, nous avons effectivement cherché le bon équilibre entre la protection des consommateurs et la volonté de ne pas mettre à mal un secteur qui représente près de 60 000 emplois. Nous avons beaucoup parlé de la qualité de ces emplois et je tiens à souligner que, sur le territoire français, il ne s'agit pas d'emplois précaires. Ce sont des emplois qui s'adressent à des publics peu qualifiés certes, mais qui acquièrent des compétences. Nous avons conservé certains principes, notamment le maintien de l'opposition expresse du consommateur - même si je sais que certains d'entre vous sont favorables au consentement préalable - tout en renforçant sensiblement les obligations fixées aux professionnels du démarchage téléphonique et les sanctions en cas de manquements.
Je tiens à saluer le travail que nous avons mené conjointement avec M. Christophe Naegelen, auteur de la proposition de loi et rapporteur à l'Assemblée nationale, tout au long de la discussion du texte et en vue de préparer cette CMP, que je souhaite conclusive. Nous nous sommes efforcés de vous proposer des rédactions de compromis sur les quelques points de discussion entre nos deux assemblées.
M. Christophe Naegelen vous proposera également des propositions de rédaction auxquelles je n'adhère pas ipso facto mais auxquelles je ne m'opposerai pas sur trois sujets de fond : le préfixe unique pour les appels de prospection commerciale, l'interdiction du démarchage téléphonique pour la seule rénovation énergétique et l'affichage d'un numéro français depuis l'international. Sur l'interdiction sectorielle du démarchage téléphonique, j'y suis personnellement défavorable car ces dispositions me semblent contraires aux principes constitutionnels d'égalité et de la liberté d'entreprendre, chers à la commission des lois. Les adopter n'est donc pas sans risque et le sujet viendra devant le Conseil constitutionnel. Enfin, il y a un dernier sujet de discussion entre nos deux assemblées : la présomption de responsabilité qui pèserait désormais sur le professionnel en cas de violation des règles sur le démarchage téléphonique : nous avons souhaité en affirmer le caractère réfragable, en commission et en séance au Sénat et je tiens à ce principe.
En conclusion, je forme le voeu que nous aboutissions à un accord de CMP sur ce sujet du quotidien très important pour nos concitoyens et sur lequel nous travaillons déjà depuis 2018.
M. Pierre Cordier, député. - Je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui, car j'avais eu l'occasion de déposer dès l'hiver 2018 une proposition de loi sur le démarchage téléphonique dans le cadre de la journée réservée du groupe Les Républicains. Malheureusement, la quasi-totalité des articles avaient été écartés par la majorité. Je me réjouis de retrouver ici de nombreux éléments que j'avais déjà soulevés, comme la mise en oeuvre d'un indicatif téléphonique, qui permet au consommateur de percevoir la nature commerciale de l'appel qu'il reçoit, ou encore l'encadrement horaire du démarchage, qui n'avait pas été retenu. J'avais également proposé un article instaurant le consentement préalable du consommateur, qui a été une réussite dans certains pays européens. Il faut désormais améliorer la situation, comme nous le demandent les citoyens, aussi j'espère que cette CMP pourra aboutir. Toutefois, j'entends les inquiétudes du secteur de la rénovation énergétique, en particulier des petites et moyennes entreprises en phase de croissance, qui ont besoin de constituer leur carnet d'adreses et peuvent proposer des services intéressants pour les consommateurs.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur. - Je voudrais vous rappeler que les membres du groupe socialiste et républicain se sont abstenus sur le texte du Sénat. Notre position est simple : nous souhaitons l'instauration du consentement préalable des citoyens pour recevoir des appels de démarchage commercial. Certaines personnes âgées renoncent à décrocher le téléphone en raison de ces démarchages intempestifs, ce qui est problématique. En outre, le principe du consentement préalable est présent dans près de onze pays d'Europe. Je soutiens également une deuxième proposition, qui avait été adoptée par le Sénat : l'instauration d'un préfixe unique pour les appels de démarchage, qui permet à chaque citoyen de prendre connaissance de la nature de l'appel. Il serait, à mon sens, dommageable d'écarter dans ce texte à la fois le consentement préalable et la mise en place d'un préfixe.
M. Nicolas Démoulin, député. - Demander le consentement préalable revient à interdire le démarchage téléphonique. Il ne faut pas oublier les appels vertueux, d'associations ou d'instituts de sondage. En outre, il faut observer que les trois quarts des appels concernés sont déjà hors-la-loi. La vraie réponse est donc de les sanctionner. Certains pays comme l'Allemagne sont en train de revenir sur le principe de consentement préalable qu'ils ont instauré, considérant que cette mesure pourrait, en effet, être favorable aux entreprises qui sont hors-la-loi. S'agissant de la rénovation énergétique, la mesure que nous introduisons se justifie par la nature différente du secteur visé, lié à la politique publique de transition énergétique : nous ne pouvons pas lutter contre les passoires énergétiques et proposer au grand public des solutions de démarchage frauduleux, conduisant parfois à des travaux mal réalisés. Enfin, je souhaite également que la CMP soit conclusive.
M. Julien Dive, député. - Je me réjouis que nous souhaitions tous atteindre une CMP conclusive. Je voudrais réagir sur l'interdiction de démarchage dans le secteur de la rénovation énergétique. Cette interdiction, qui est sectorielle, posera problème dans quelques années et devra sans doute être adaptée. Elle induit par ailleurs un risque d'insécurité juridique pour certains acteurs économiques en cas de recours contentieux. Enfin, un petit entrepreneur, qui appelle des particuliers pour lesquels il a perçu que des travaux pourraient être nécessaires, pourrait être concerné par de tels recours. Nous devons être vigilants.
Mme Delphine Batho, députée. - Face à l'invasion consumériste à laquelle nous sommes confrontés, il est au moins un lieu qui doit être sanctuarisé : le domicile. Le démarchage téléphonique porte atteinte au droit fondamental à la tranquillité dans son domicile privé, et de manière d'autant plus insupportable que des règles existent pour interdire le démarchage par courriel et par SMS. Or les appels sont nettement plus dérangeants. Je crains que nous nous retrouvions, après l'adoption du texte, à constater que celui-ci n'a rien réglé. Ce sera particulièrement vrai pour le cas du démarchage lorsqu'il existe des relations contractuelles préexistantes, qui correspond à une réalité beaucoup plus floue que la notion de contrat en cours que je souhaite introduire. Je m'étais abstenue lors de l'examen du texte à l'Assemblée en considérant que, tout en n'allant pas assez loin, il portait un progrès. Aujourd'hui, je crains que ce qui allait dans le bon sens soit menacé par les propositions de rédaction que nous avons à examiner.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Le consentement préalable ne résoudrait en rien la question de la fraude. Il faut, au contraire, une démarche de responsabilisation des opérateurs pour contrôler les entreprises qui démarchent de manière illégale. Je reconnais la dette que je dois aux travaux du Sénat : j'avais déposé une première proposition de loi inspirée des travaux de l'ex-sénateur Jacques Mézard, qui ont ensuite été repris par le M. le député Pierre Cordier. J'ai déposé, six mois plus tard, une seconde proposition de loi remplaçant le consentement préalable par l'opposition expresse. À M. Julien Dive, je souhaite répondre que le démarchage téléphonique n'est pas l'unique manière pour une entreprise de se faire connaître. Enfin, à Mme Delphine Batho, qui fait remarquer qu'une interdiction du démarchage existe pour les SMS et les courriels, je répondrais que ces interdictions ne nous empêchent pas de recevoir des messages frauduleux, ou « spam ».
M. Ronan Dantec, sénateur. - Quoique je partage les propos de M. Jean-Pierre Sueur et de Mme Delphine Batho, il est important que la CMP aboutisse. Il y a urgence, notamment sur le volet du démarchage au titre des travaux de rénovation énergétique des bâtiments. Le marché de l'isolation à un euro déstabilise toute la stratégie française de réhabilitation du parc de logements. Or nous n'avons pas le temps d'élaborer une autre stratégie fondée sur la labellisation des travaux. Il nous faut donc casser l'isolation à un euro, sans quoi c'est toute la filière qui sera en danger. L'entrepreneur local ne sera pas négativement affecté par cette interdiction : il continuera de faire physiquement le tour du quartier en déposant des prospectus dans les boîtes aux lettres.
M. Roland Lescure, député, président. - Ce texte soulève des sujets importants, et nous sommes tous tentés de « refaire le match » des débats passés. Maintenant que les groupes ont pu exprimer leurs motifs de satisfaction et d'insatisfaction, nous pouvons passer à l'examen des propositions de rédaction.
La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.
Article 1er
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 1.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Le but de cette proposition de rédaction est de supprimer les alinéas 2 et 3 instaurant un indicatif unique pour les appels de démarchage, pour quatre raisons : premièrement, à cause de la complexité de la mise en place d'un tel indicatif pour les PME ; deuxièmement, parce que le numéro indicatif ne règlerait pas le problème des appels frauduleux ; troisièmement, car les opérateurs factureraient ce service aux entreprises, ce qui pourrait leur être préjudiciable ; enfin, car l'existence d'un indicatif rend difficile de rappeler l'entreprise pour le compte de laquelle l'appel est effectué.
M. André Reichardt, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - L'indicatif unique est, à mon sens, une fausse bonne idée. Le consommateur qui verra s'afficher cet indicatif ne décrochera pas le téléphone. Cependant, nous souhaitons lutter contre la fraude, or les fraudeurs continueront d'utiliser un numéro classique. C'est pourquoi la commission des lois du Sénat, quoiqu'elle n'ait pas réussi à convaincre en séance publique, a choisi de rejeter cette idée.
M. Pierre Cordier, député. - L'un des piliers de ce texte était de mieux informer le consommateur de l'existence d'une démarche commerciale. L'instauration d'un préfixe spécifique est un élément important de cette information.
Mme Delphine Batho, députée. - Ce n'est pas parce que certains trichent que l'on doit rendre légaux des comportements inadmissibles. En République, ce que la loi interdit ou autorise est important. Je privilégierai, pour ma part, le consentement préalable. Toutefois, à défaut de mettre en place ce consentement préalable, l'existence d'un élément matériel dans le numéro de téléphone permettant de renseigner le consommateur sur la nature commerciale de l'appel me parait nécessaire.
La proposition de rédaction n° 1 est adoptée.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 1er bis
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 2.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il s'agit d'expliciter que l'interdiction du démarchage téléphonique dans le secteur de la rénovation énergétique ne s'applique pas aux sollicitations intervenant dans le cadre d'un contrat en cours.
M. André Reichardt, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Je suis globalement favorable à cette proposition, même si je souligne le risque d'inconstitutionnalité de la totalité du dispositif spécifique à ce secteur.
La proposition de rédaction n° 2 est adoptée.
Mme Delphine Batho, députée. - Je veux souligner que la proposition de rédaction adoptée renvoie à la notion de relations contractuelles préexistantes, ce qui ouvre très largement la possibilité de démarchage.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Ce n'est pas le cas, car la proposition de rédaction renvoie au deuxième alinéa de l'article L. 223-1 du code de la consommation tel que modifié par l'article 5 de la présente proposition de loi, adopté conforme au Sénat en seconde lecture, qui substitue à la notion de relations contractuelles préexistantes celle de relations contractuelles en cours.
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 3.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il s'agit d'une proposition de rédaction de coordination juridique.
La proposition de rédaction n° 3 est adoptée.
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 4.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il s'agit de préciser que les professionnels en charge de l'élaboration du code de bonnes pratiques ne sont pas désignés par arrêté. En revanche, le contenu du guide de bonnes pratiques peut être repris par décret.
La proposition de rédaction n° 4 est adoptée.
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 5.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Cette proposition concerne le caractère réfragable de la présomption de responsabilité du donneur d'ordres. Il s'agit de trouver un compromis entre la version de l'Assemblée nationale et celle du Sénat, en indiquant que la présomption n'est réfragable que si le professionnel démontre à la fois qu'il n'est pas à l'origine d'une violation des dispositions relatives au démarchage et qu'il n'en a pas tiré profit. Il s'agit de responsabiliser les donneurs d'ordres.
M. André Reichardt, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Je n'ai pas voulu cosigner cette proposition de rédaction, que j'estime aller trop loin : la double preuve exigée serait quasiment impossible à administrer et nous rapprocherait d'une présomption, en réalité, irréfragable. Je préfère que l'on en reste à l'écriture du Sénat.
Mme Muriel Jourda, sénatrice. - Comment, concrètement, prouver que quelqu'un n'a pas tiré profit d'une situation ?
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je précise que l'objectif de cette proposition de rédaction est, justement, de susciter une discussion entre nous, sans remettre en cause l'issue de la CMP. La version adoptée au Sénat ne me satisfait pas car elle ne permet pas de sanctionner les donneurs d'ordres. Or nous souhaitons pouvoir présumer la responsabilité de ceux qui bénéficient de la violation des dispositions relatives au démarchage téléphonique.
M. André Reichardt, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - La version initiale de l'Assemblée créait une présomption irréfragable, qui n'est pas acceptable en droit : il faut que la personne puisse justifier qu'elle n'est pour rien dans la violation de la loi. C'est pour cela que nous avions modifié le texte au Sénat. Vous souhaitez en durcir les conditions, volonté que je ne partage pas.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La version que je propose me parait équilibrée et cohérente.
La proposition de rédaction n° 5 n'est pas adoptée.
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 6.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il s'agit d'une proposition de cohérence rédactionnelle.
La proposition de rédaction n° 6 est adoptée.
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 7.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il s'agit également d'une proposition de cohérence rédactionnelle.
La proposition de rédaction n° 7 est adoptée.
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 8.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il s'agit de préciser que des sanctions s'appliqueront au non-respect des règles déontologiques, dès lors que celles-ci auront été reprises par décret.
La proposition de rédaction n° 8 est adoptée.
L'article 1er bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 6
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 9.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'article 6 est une pierre angulaire de cette proposition de loi. La proposition de rédaction rétablit la version de l'Assemblée nationale, en intégrant deux modifications : le délai laissé aux opérateurs téléphoniques pour mettre en place le dispositif d'authentification est porté de deux ans à trois ans ; le dispositif de filtrage ne s'appliquera qu'aux appels émis en dehors du territoire de l'Union européenne, affichant un identifiant d'appelant français. En ne permettant pas aux centres d'appels établis hors de l'Union européenne d'utiliser un numéro français, nous espérons que certaines entreprises françaises rapatrieront ces centres d'appels en Europe et en France.
M. André Reichardt, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Le Sénat avait supprimé ces dispositions au nom de l'application du principe constitutionnel dit de l'entonnoir, dont la commission des lois est respectueuse. Sur le fond, il faut distinguer les deux dispositifs que rétablit cette proposition de rédaction. Le premier légalise une recommandation de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) quant au filtrage, que les opérateurs appliquent déjà : la plus-value de la disposition est faible. S'agissant du mécanisme d'authentification, il ne nous a pas paru possible, après avoir écouté la fédération française des télécoms, de mettre en oeuvre ce mécanisme dans le délai initial de deux ans. M. Naegelen a porté cette durée à trois ans, ce qui devrait permettre aux opérateurs de disposer du délai suffisant. Ces réserves énoncées, à titre personnel, je ne m'y oppose pas.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur. - Ce sujet a peu de lien avec les dispositions initiales du texte. Les sénateurs socialistes ne seront pas favorables à cette proposition de rédaction.
M. Pierre Cordier, député. - Dire que cette proposition permettrait à des chefs d'entreprises de rapatrier leurs centres d'appels en Europe ou en France me laisse dubitatif. La question de l'identifiant d'appelant n'est pas le seul facteur pris en compte par ces entreprises : les coûts de la main d'oeuvre jouent également.
La proposition de rédaction n° 9 est adoptée.
L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 7
La commission mixte paritaire examine la proposition de rédaction n° 10.
M. Christophe Naegelen, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Cette proposition concerne le délai pendant lequel un fournisseur de services à valeur ajoutée frauduleux pourrait se voir interdire l'attribution de nouveaux numéros à valeur ajoutée. Nous souhaitions cinq ans, le Sénat six mois : nous vous proposons de nous accorder sur une durée d'un an.
La proposition de rédaction n° 10 est adoptée.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi.
La réunion est ouverte à 19 h 05.
Jeudi 2 juillet 2020
- Présidence de M. Alain Milon, président -
La réunion est ouverte à 9 heures.
Commission mixte paritaire sur le projet de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de Covid-19
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de covid-19 s'est réunie au Sénat le jeudi 2 juillet 2020.
Elle procède tout d'abord à la désignation de son bureau, constitué de M. Alain Milon, sénateur, président, de Mme Pascale Fontenel-Personne, députée, vice-présidente, de M. Christophe Blanchet, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, et de Mme Frédérique Puissat, sénateur, rapporteur pour le Sénat.
La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.
M. Alain Milon, sénateur, président. - Notre commission mixte paritaire est réunie pour examiner la possibilité de parvenir à un texte commun sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de covid-19, adoptée par l'Assemblée nationale le 2 juin dernier et par le Sénat, le 16 juin, après que le Gouvernement a engagé la procédure accélérée le 19 mai dernier. Deux articles restent en discussion.
Il n'est pas courant qu'une commission mixte paritaire soit réunie si vite sur une proposition de loi. Il a fallu, pour ce faire, que le Gouvernement engage la procédure accélérée, demandant à nos deux chambres de se prononcer en quelques jours. Je note d'ailleurs que les conclusions de notre commission mixte paritaire ne seraient pas examinées avant la troisième semaine de juillet.
Je vais demander à notre rapporteur, Frédérique Puissat, de présenter le texte issu des débats du Sénat, dernière assemblée saisie. Christophe Blanchet, rapporteur pour l'Assemblée nationale, formulera ensuite ses observations sur les modifications substantielles que nous avons apportées.
Mais auparavant, je passe la parole à Mme Pascale Fontenel-Personne.
Mme Pascale Fontenel-Personne, députée, vice-présidente. - Nous nous félicitons que le Gouvernement ait engagé la procédure accélérée sur cette proposition de loi, qui revêt une importance extrême. Le Sénat a joué tout son rôle, en proposant des modifications.
Mme Frédérique Puissat, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Nous sommes réunis ce matin pour chercher un accord sur la proposition de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de covid-19.
Je ne reviendrai pas sur l'urgence dans laquelle le Gouvernement nous a demandé d'examiner cette proposition de loi, qui répond à une intention généreuse mais, nous le savons, ne correspond pas exactement aux attentes et aux revendications des personnels soignants. Nous avons néanmoins été constructifs en cherchant à comprendre comment fonctionnerait concrètement le dispositif proposé par nos collègues députés, dans la mesure où toutes les modalités d'application devaient être précisées par voie réglementaire. En effet, on nous demandait d'adopter un principe, certes intéressant, mais sans avoir la moindre information sur les modalités de mise en oeuvre envisagées. C'est pourquoi nous avons préféré réécrire le texte, et nous voici ce matin invités à chercher un compromis entre nos deux versions.
La proposition de loi comptait initialement deux articles. Alors que l'Assemblée nationale avait inséré l'article 1er bis et supprimé l'article 2, qui visait à gager financièrement le dispositif, le texte ne contient plus que l'article 1er, l'article 1er bis ayant été supprimé par la commission des affaires sociales du Sénat.
Le dispositif initial prévoyait un système de don de jours de congé qui nous est apparu complexe et qui revenait, dans bien des cas, à demander aux employeurs d'être généreux à la place de leurs salariés. Dans le texte qui résulte des travaux du Sénat, il n'est donc plus question de don de jours de repos, mais de don concret d'une partie de la rémunération du salarié correspondant à une ou plusieurs journées de travail. La possibilité pour toute personne de faire un don financier à l'Agence nationale pour les chèques-vacances (ANCV) a en revanche été conservée. Il est en outre précisé qu'un accord d'entreprise pourra prévoir un abondement de l'employeur.
Je souligne que notre rédaction n'est pas incompatible avec la possibilité de donner des jours de repos. En effet, les salariés disposant de jours de repos non pris et ayant la possibilité de les monétiser seraient tout à fait en mesure de donner les sommes correspondantes à l'ANCV.
En outre, le Sénat a souhaité borner le dispositif dans le temps. La date du 31 août 2020 a été retenue de manière à ne pas trop déconnecter ce mécanisme de la situation à laquelle il vise à répondre. Il est prévu qu'un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du dispositif aux agents publics, et plus généralement les conditions d'application de l'article précité.
S'agissant de l'autre versant du dispositif, sur lequel le texte transmis par l'Assemblée nationale était peu explicite, le texte issu des travaux du Sénat charge l'ANCV de répartir les sommes réunies entre les établissements et services sanitaires, médico-sociaux et d'aide à domicile figurant sur une liste établie par arrêté ministériel, au prorata de leur masse salariale. Il précise que les personnels concernés devront avoir travaillé pendant la période de confinement de la population - soit entre le 12 mars et le 10 mai 2020 - et perçu une rémunération inférieure à trois fois le SMIC - l'Assemblée nationale faisait référence sur ce point au « revenu brut imposable ».
Le texte du Sénat prévoit enfin que les sommes versées à l'ANCV qui n'auraient pas été distribuées sous forme de chèques-vacances au 31 décembre 2020 seront reversées au Trésor public.
Nous aboutissons donc à un texte poursuivant les mêmes objectifs que celui de l'Assemblée nationale, mais comportant des différences substantielles. Notre commission mixte paritaire pourrait cependant, je le souhaite, aboutir à un texte commun. Je remercie à cet égard mon collègue Christophe Blanchet pour la qualité de nos nombreux échanges en amont de cette réunion. J'adresse également un clin d'oeil à Maxime Minot qui avait déposé une proposition de loi sur le même thème.
Dans cette perspective, réintroduire, tout en conservant le mécanisme adopté par le Sénat, la possibilité pour les salariés de renoncer à des jours de repos non pris serait une source de complexité supplémentaire pour les entreprises. Il me semble toutefois qu'elle peut être acceptée à condition que l'accord de l'employeur demeure nécessaire.
En outre, si je crois indispensable de conserver une borne temporelle, il apparaît cependant que l'échéance du 31 août 2020 est certainement trop brève pour permettre au dispositif d'être efficace en générant un nombre de dons suffisant. Avec Christophe Blanchet, nous vous proposerons donc de reporter cette échéance au 31 octobre prochain.
Afin de mettre en oeuvre ce mécanisme le plus vite possible, nous vous proposons de renvoyer les modalités d'application à un décret simple au lieu d'un décret en Conseil d'État.
Les modalités de répartition des chèques-vacances seraient également déterminées par décret, étant précisé qu'elles devraient tenir compte des effectifs des établissements et services concernés. J'avoue regretter que ces modalités de répartition ne puissent être mieux encadrées par la loi. C'est pourquoi nous proposons que le Gouvernement soit tenu de remettre au Parlement, au plus tard le 31 mars 2021, un rapport retraçant l'ensemble des sommes collectées et distribuées sous forme de chèques-vacances dans le cadre de ce dispositif. Il sera ainsi possible de vérifier - nous y sommes attachés - si la loi a rempli ses objectifs.
Enfin, il paraît possible de préciser dans ce texte que l'acquisition de chèques-vacances au titre de ce dispositif est exonérée de l'impôt sur le revenu, conformément à l'intention exprimée à l'Assemblée nationale par le Gouvernement.
M. Christophe Blanchet, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je suis ravi que nous nous retrouvions ce matin - c'est ma première CMP ! - autour d'un texte que j'ai porté à l'Assemblée nationale avec plusieurs collègues de la majorité.
Ce texte est né d'une idée simple : permettre aux Français qui applaudissaient les soignants pendant le confinement de donner des jours de repos. Elle est le fruit d'une initiative citoyenne, celle du groupe Pasteur Mutualité, qui a sans doute été inspirée par les dispositifs existants de dons de jours de repos entre les salariés d'une même entreprise au bénéfice d'un proche aidant ou d'un parent d'enfant malade.
Cette proposition de loi vise ainsi à lever un obstacle législatif et à permettre une nouvelle forme de solidarité. Elle est aussi le reflet d'un élan transpartisan : d'autres propositions de loi, issues des rangs des Républicains, par les voix de Maxime Minot, à l'Assemblée nationale, et d'Édouard Courtial, au Sénat, ou des rangs socialistes, par le biais de Christophe Bouillon, allaient dans le même sens, sans pour autant être identiques.
En offrant des chèques-vacances aux soignants, nous leur permettons de profiter davantage de leur temps libre et de s'offrir des loisirs supplémentaires dans l'une des 200 000 structures en France qui acceptent les chèques-vacances, qu'il s'agisse de restaurants, de lieux d'hébergement, de théâtres, de parcs d'attraction, de musées, etc.
L'examen à l'Assemblée nationale a permis de préciser le dispositif sur un certain nombre de points. Il a ainsi été décidé de limiter le périmètre des bénéficiaires des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social dont les revenus n'excèdent pas 3 SMIC ; de permettre aux entreprises d'abonder les dons de leurs employés ; de mettre en place un compte, géré par l'ANCV, pour lui permettre de récolter des dons financiers de personnes physiques et morales.
Ce texte était toutefois loin d'être parfait. Et pour cause : l'Assemblée nationale n'a eu que très peu de temps pour l'examiner. La décision du Gouvernement d'inscrire rapidement ce texte à l'ordre du jour de ses travaux se comprend néanmoins : il fallait que le dispositif entre en vigueur avant que l'élan de solidarité de Français envers les soignants ne s'estompe.
J'ai bien entendu les critiques que le Sénat a émises lors de l'examen du texte, mais vous avez décidé de jouer le jeu et de porter la proposition de loi tout en développant une approche différente. Vous avez proposé non pas des dons de jours de repos, mais des dons de journées de travail sur le modèle de la Journée de solidarité afin de permettre à tous les salariés de pouvoir faire un don en autorisant leur employeur à prélever une partie de leur salaire au profit des soignants.
Je ne reviendrai pas sur toutes les précisions qui ont été apportées par le Sénat. J'ai toutefois relevé que vous avez délimité dans le temps la période durant laquelle les personnels devront avoir travaillé pour bénéficier des chèques-vacances - entre le 12 mars et le 10 mai, c'est-à-dire la période du confinement. Vous avez également fixé une date-butoir avant laquelle les chèques-vacances devront avoir été distribués, en l'occurrence le 31 décembre 2020. Cette échéance me paraît tout à fait adaptée et permettra la distribution des chèques-vacances pour les fêtes de fin d'année.
Un certain nombre de points du texte adopté par le Sénat méritent toutefois d'être précisés ou modifiés.
Tout d'abord, je tiens à souligner que les deux approches du don au profit des soignants, que ce soit au titre d'une journée de travail ou d'un jour de repos, ne sont pas concurrentes ; elles sont au contraire complémentaires. C'est d'ailleurs tout le sens du texte que nous examinons aujourd'hui : il combine les dispositifs adoptés par l'Assemblée et le Sénat.
S'il est adopté, un salarié pourra donc soit donner une partie de son salaire, notamment s'il ne dispose pas de jours de RTT ou s'il souhaite les garder pour lui, soit donner des jours de repos, qu'il a pu accumuler sur un compte épargne-temps par exemple, en accord avec son employeur. Ces jours de repos feront l'objet d'une monétisation, dont les modalités seront précisées par voie réglementaire.
Parmi les modifications proposées aujourd'hui figure également le report du 31 août au 31 octobre 2020 de la date limite pour effectuer un don. Ce délai me semble raisonnable : il n'est ni trop court, ni trop long.
Afin de mettre rapidement en oeuvre ces mécanismes de don, il est proposé d'en renvoyer les modalités d'application à un décret simple au lieu d'un décret en Conseil d'État, dont la parution prendrait nécessairement plus de temps.
Il est également proposé de préciser que l'acquisition de chèques-vacances au titre de ce dispositif est exonérée de l'impôt sur le revenu. Le Gouvernement avait exprimé son intention de garantir une telle exonération lors de l'examen par l'Assemblée nationale en réponse à une intervention d'Agnès Firmin Le Bodo.
Enfin, je crois également utile de demander au Gouvernement un rapport, d'ici au 31 mars prochain, pour pouvoir nous assurer de l'application du dispositif et retracer la distribution des chèques-vacances.
Pour terminer, je rappellerai, une fois de plus, que ce texte n'a pas vocation à répondre aux attentes de revalorisation salariale des personnels soignants et à se substituer aux mécanismes de solidarité nationale par l'impôt. Il revient au Ségur de la santé de le faire. Les premières annonces du ministre de la santé envoient déjà un signal fort : une enveloppe de 6 milliards d'euros sera ouverte pour revaloriser les salaires des personnels soignants des hôpitaux et des établissements pour personnes âgées.
Je vous invite donc à adopter le texte que nous vous proposons avec Frédérique Puissat, que je remercie pour la qualité de nos échanges.
Article 1er
M. Christophe Blanchet, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je viens de vous exposer les modifications que nous vous proposons. La proposition commune de rédaction se justifie par son texte même.
Mme Frédérique Puissat, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Permettez-moi de vous faire remarquer que notre crédibilité dépendra de la promotion de ce dispositif qui s'ensuivra. Je le dis très ouvertement, le Gouvernement porte une responsabilité, de même que le groupe Pasteur Mutualité, qui est à l'initiative de ces mesures.
En accord avec un certain nombre de collègues, dont Pascale Gruny, j'ai une pensée pour les comptables et les responsables des ressources humaines qui devront mettre ce texte en application. En effet, je tiens à le souligner, les modalités pratiques ne sont pas très simples.
M. Bernard Jomier, sénateur. - Notre collègue député a pris soin de préciser que nous étions dans le domaine non pas de la solidarité, mais de la générosité. Notons l'empressement du Gouvernement à faire voter ce dispositif, dont la durée de validité est brève. Il sera d'ailleurs très intéressant de voir en novembre prochain son impact réel. Était-il nécessaire de mettre en place un dispositif complexe pour en appeler à la générosité des Français ? Je ne le pense pas. Ceux-ci ont témoigné d'un élan de générosité sous diverses formes, au niveau parfois de l'entreprise et souvent de la communauté nationale.
Il n'y a rien d'indigne ni de répréhensible dans ce texte, mais nous estimons que cette loi sera inutile. Or, comme vous le savez, les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires, y compris auprès de l'opinion publique. C'est pourquoi nous ne le voterons pas.
Mme Sereine Mauborgne, députée. - Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous, mes chers collègues. J'ai deux parents retraités de la fonction publique, qui avaient envie de faire un don concret : on leur donne, avec ce texte, la possibilité d'abonder un fonds dédié. La proposition de loi présente l'originalité de passer par le dispositif du chèque-vacances, qui est souvent utilisé localement : même si la collecte n'est pas très importante et que l'on remet aux personnels concernés un chèque-vacances de 30 euros, cela permettra de relancer l'économie locale. L'effet win-win n'est pas inintéressant.
M. Martin Lévrier, sénateur. - Je suis toujours prudent à l'égard des lois généreuses, « d'émotion » pour reprendre une formule que j'avais employée lors de la discussion générale au Sénat. Pour autant, dans ce contexte de crise profonde, il est intéressant de permettre aux personnes qui le souhaitent de faire un don.
Je relève que, sur ce texte, le bicamérisme a été très efficace. Un clin d'oeil à mes collègues du Sénat : il est bon d'écouter notre groupe de temps en temps, car c'est, à quelques nuances près, ce que nous avions proposé. Je me réjouis de cet accord qui est en train de se construire, car nous n'y sommes pas pour rien !
Mme Catherine Deroche, sénatrice. - Une fois n'est pas coutume !
Mme Pascale Gruny, sénateur. - Je rappelle qu'il y avait deux propositions de loi émanant du groupe Les Républicains, une à l'Assemblée nationale et une au Sénat.
La générosité est toujours touchante, et nous avons spontanément envie de cosigner ce texte. Je ne l'avais pas fait, car j'estime que c'est de l'affichage. Si chacun reçoit un chèque-vacances de 30 euros, tant mieux : cela signifiera que je me suis trompée.
Nous sommes en période de vacances, les salariés sont passés à autre chose. Comment communiquer autour de ce dispositif ? Ils risquent de ne pas être informés. Si l'activité partielle a été une très bonne mesure, la baisse de rémunération qui en résulte finit par peser en fin de mois. Les salariés sont reconnaissants vis-à-vis des soignants, mais avec un petit salaire, un don de 100 euros, cela fait déjà beaucoup.
Je voterai ce texte, en croisant les doigts pour que le dispositif fonctionne.
Mme Jocelyne Guidez, sénatrice. - J'ai trois filles qui travaillent dans le secteur médico-social. Quand je les ai interrogées à propos de cette proposition de loi, elles m'ont répondu : revalorisation des salaires et amélioration des conditions de travail.
Les Français sont solidaires, nous l'avons vu pendant la pandémie. Il est dommage que l'on n'ait pas pensé à d'autres catégories méritantes, comme les pompiers. Mais le champ aurait peut-être été trop large. Je voterai cette proposition de loi, car derrière il y a de l'humain !
Mme Michèle de Vaucouleurs, députée. - Je salue le travail effectué par le Sénat, qui permet au texte de gagner en opérationnalité. Je déplore toutefois que l'on n'ait pas pu élargir le dispositif à d'autres personnels qui méritaient tout autant de bénéficier de ce type d'action, comme les caissiers. Espérons que l'application de cette loi montrera qu'il s'agissait d'une belle action nécessaire, utile et généreuse !
M. Alain Milon, sénateur, président. - Le paragraphe III de l'article 1er prévoit que les sommes qui n'ont pas été distribuées sous forme de chèques-vacances au 31 décembre 2020 sont reversées au Trésor public. La publicité de cette disposition risquerait de freiner l'élan de solidarité !
M. Christophe Blanchet, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je ne referai pas le débat qui a eu lieu à l'Assemblée nationale comme au Sénat. Tous les arguments sont bons, mais l'important était de répondre à la demande de certains salariés qui étaient dans l'impossibilité de faire de tels dons. Je pense aux agents de l'Urssaf du Val de Loire, qui en ont manifesté le désir dès le mois de mars.
La réussite du dispositif passe par la promotion de cette proposition de loi, que nous devrons faire de concert avec le Gouvernement. Les entreprises risquent de rencontrer des soucis techniques et comptables, mais nous devons rebondir sur la volonté des Français d'exprimer leur générosité vis-à-vis du monde soignant.
La proposition de loi a été améliorée par les travaux du Sénat : je le dis très sincèrement, car vous avez pointé des éléments dont nous n'avions pas pris conscience, notamment en termes d'impact sur les collectivités locales. Nous sommes parvenus à un bon texte, et nous espérons que les montants récoltés seront importants. Avec le rapporteur du Sénat, nous avons réfléchi à un geste symbolique que les parlementaires pourraient faire pour lancer le dispositif. Nous devrons également travailler avec le groupe Pasteur Mutualité, qui est, je le redis, à l'initiative de cette idée.
Avec le triptyque Parlement-Gouvernement-groupe Pasteur Mutualité, nous devrions parvenir à faire fonctionner ce dispositif et à permettre aux Français de se l'approprier.
M. Alain Milon, sénateur, président. - L'article 1er bis ayant été supprimé et en l'absence de proposition pour le rétablir, je mets aux voix la proposition commune de rédaction sur l'article 1er constituant l'ensemble de la proposition de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de covid 19.
La proposition commune de rédaction est adoptée.
L'article 1er constituant l'ensemble de la proposition de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de covid-19 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 1er bis (supprimé)
L'article 1er bis est supprimé.
Mme Pascale Fontenel-Personne, députée, vice-présidente. - Je vous remercie, monsieur le président, de nous avoir reçus pour cette commission mixte paritaire, qui était également pour moi une première.
Selon moi, il n'y a pas de loi inutile quand on fait preuve de générosité ; d'ailleurs, il y a des lois inutiles qui ne sont même pas généreuses !
Au travers de l'outil du chèque-vacances, il faut que nous nous penchions sur les moyens de faire évoluer cette générosité et de revitaliser nos territoires.
En conséquence, la commission mixte paritaire vous demande d'adopter la proposition de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de covid-19 dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.
La réunion est close à 9 h 35.