Jeudi 5 mars 2020
- Présidence de M. Michel Magras, président -
Étude sur les enjeux financiers et fiscaux en 2020 pour les outre-mer - Audition de M. Thierry Santa, président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, de M. Cédric Chan Yone, directeur de cabinet et de Mme Brigid Morel, conseillère auprès du président du gouvernement
M. Michel Magras, président. - Mes chers collègues, nous poursuivons ce matin notre consultation des territoires ultramarins sur la thématique des enjeux financiers et fiscaux européens pour les outre-mer en 2020, par une visioconférence avec la Nouvelle-Calédonie. Nos précédentes visioconférences nous ont permis d'échanger avec La Réunion et la Guadeloupe, pour tenir compte des situations des différentes régions ultrapériphériques (RUP) de l'Union européenne. La présente audition concerne une collectivité présentant un statut différent au sein de l'Union européenne, celui de PTOM. Cette audition va nous permettre aussi d'étendre notre travail à un autre bassin océanique, le Pacifique, qui a ses caractéristiques propres.
Nous sommes ce matin en liaison avec M. Thierry Santa, Président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, que je remercie chaleureusement de participer à cet échange. Il est entouré de M. Cédric Chan Yone, directeur de cabinet, qui prendra le relai tout à l'heure, et de Mme Brigid Morel, conseillère.
Je vous rappelle que nos collègues Vivette Lopez, Gilbert Roger et Dominique Théophile sont les trois rapporteurs de cette étude qui a pour objet d'alerter sur le caractère crucial de l'année 2020, qui pourrait être « l'année de tous les risques » pour les outre-mer si nous n'y prenons garde !
En effet, les menaces sont multiples. Le nouveau cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027 doit déterminer les ambitions que se fixe l'Europe pour la prochaine décennie. Il se trouve doublement contraint par la baisse des recettes, baisse qui est liée au Brexit, et par l'émergence de nouvelles priorités comme la défense, la souveraineté numérique, le Fonds pour une transition juste ou le Pacte vert. L'échec du dernier Conseil européen a montré les très profondes divergences entre les États de l'Union et entre les institutions européennes elles-mêmes, la Commission et le Parlement ayant adopté des propositions très divergentes. Dans ce contexte, vous estimez-vous, Monsieur le Président, suffisamment informé et associé à ces négociations ? Jugez-vous que les intérêts des outre-mer sont pris en compte par les autorités françaises et européennes ? Le cas échéant, quelles améliorations proposez-vous, que ce soit à l'échelon de la Représentation permanente de la Nouvelle-Calédonie à Bruxelles ou de l'antenne de l'OCTA (Association des pays et des territoires ultramarins), qui est également présente à Bruxelles ? La décision d'association des PTOM avec l'Union européenne, la DAO, vient d'être renégociée. Nous connaissons l'implication ainsi que le rôle actif que la Nouvelle-Calédonie a toujours joué au sein de l'OCTA. Cette organisation vous semble être vraiment assez structurée pour assurer sa mission représentative et dispose-t-elle de tous les moyens lui permettant d'assurer une telle mission. Entretenez-vous des relations directes avec la Représentation permanente de la France à Bruxelles ?
Je reviens un instant au cadre financier pluriannuel 2021-2027. Il existe un risque qu'il ne soit pas adopté avant la fin de l'année 2020. Quelles seraient les conséquences pour la Nouvelle-Calédonie de l'adoption d'un budget transitoire ?
Ainsi que vous pouvez l'imaginer, la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne nous préoccupe vivement. Par le biais des accords commerciaux, et en devenant pays ACP après le Brexit, les anciens PTOM britanniques ne risquent-ils pas de recevoir davantage de fonds que les PTOM français ? Par ailleurs, comment la Nouvelle-Calédonie envisage-t-elle de valoriser sa position d'avant-poste de l'Union européenne dans le Pacifique, sachant que la France est le seul État membre de l'UE présent dans cette région ? Ce sujet est important pour la délégation parce qu'il pose aussi la question de l'influence chinoise dans le Pacifique.
Je précise également que nous avons déjà réalisé dans le cadre de notre étude une dizaine d'auditions, notamment avec Eurodom, la FEDOM, le Délégué interministériel à la transition agricole des outre-mer, M. Arnaud Martrenchar, et le SGAE (Secrétariat général des affaires européennes). À Bruxelles, nous avons échangé notamment avec le Président du Comité exécutif de l'OCTA, M. Olivier Gaston. Nous avons été reçus au Parlement européen et à la Commission européenne ainsi qu'à la Représentation permanente. Je n'en dirai pas davantage de façon à vous donner la parole, Monsieur le Président, et vous permettre de développer votre analyse des enjeux majeurs concernant la Nouvelle-Calédonie. Une trame vous a été transmise sur laquelle nos rapporteurs vous interrogeront ensuite. Je vous remercie de votre attention.
M. Thierry Santa, Président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. - Je vous remercie sincèrement, Monsieur le Président, de vous intéresser à ces questions si importantes pour notre petite île du Pacifique. Je vous prie de m'excuser par avance car je devrai m'absenter. Je tâcherai cependant de répondre à certaines de vos questions, Monsieur le Président. Je laisserai alors mes deux collaborateurs poursuivre la formulation de ces réponses sur la base de la trame qui nous a été remise.
Vous m'interrogez donc, Monsieur le Président, sur le fait de savoir si les PTOM, en général, et la Nouvelle-Calédonie, en particulier, sont réellement et qualitativement pris en considération par les autorités françaises et européennes. Depuis ma prise de fonction, j'ai eu l'occasion à deux reprises de me déplacer à Bruxelles pour rencontrer les représentants de l'UE, la première fois en octobre 2019 et la seconde il y a une quinzaine de jours. J'ai, à cette occasion, pu constater que la connaissance de notre territoire a progressé entre ma première et ma seconde visite. J'ai notamment pu relever que les demandes qui ont été formulées par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie auprès de l'Union européenne ont été en partie prises en considération, notamment sur notre souhait de travailler davantage en synergie avec les territoires français du Pacifique et les pays ACP qui les entourent. Nous avons notamment suggéré la mise en place d'instruments financiers nous permettant d'envisager la mise en oeuvre de programmes communs dans le Pacifique.
Dans les îles du Pacifique, nous partageons tous la même préoccupation à propos des effets du changement climatique. Certains petits États du Pacifique risquent de disparaître purement et simplement. Ce changement climatique a des impacts qui se font ressentir sur notre environnement, en général, et sur la biodiversité, en particulier, qui est exceptionnelle dans le Pacifique et que nous avons le souci de préserver. La Nouvelle-Calédonie se trouve dotée d'un parc naturel, le parc naturel de la mer de Corail. Il couvre une surface maritime considérable, surface qui correspond à celle de la zone économique exclusive de la Nouvelle-Calédonie. Cette zone représente 1,3 million de kilomètres carrés. Cette zone présente des atouts majeurs : elle intègre un tiers des récifs « pristine » du monde. Sur les sept hotspots mondiaux en termes de biomasse maritime, quatre d'entre eux font partie du parc naturel de la mer de Corail. Notre responsabilité internationale pour préserver ces espaces est grande. La demande qui a été exprimée par la Nouvelle-Calédonie l'année passée, visant à envisager la mise en oeuvre de programmes communs avec les pays ACP, a été entendue par l'UE. En effet, l'instrument financier qui est envisagé aujourd'hui intègre désormais une enveloppe interrégionale qui n'existait pas auparavant. En effet, nous avions des enveloppes territoriales dans le cadre des différents FED et des enveloppes régionales qui concernaient les trois PTOM français du Pacifique et les îles Pitcairn, le seul PTOM britannique de la région. Les pays ACP relevaient de l'accord post Cotonou. Cette enveloppe nouvelle devrait permettre la mise en oeuvre de programmes communs entre la Nouvelle-Calédonie et les pays ACP. Il convient donc que cette déclinaison des programmes interrégionaux existant à l'échelon des PTOM soit étendue aux pays ACP. Nous n'avons pas, à ce stade, d'assurances à ce sujet. En outre, il faut que les PTOM puissent aussi participer aux instances de discussion des pays ACP. Notre demande à ce sujet a été, semble-t-il, entendue puisqu'il est envisagé que les PTOM soient un volet spécifique de l'accord post Cotonou. Ces éléments positifs doivent cependant être précisés dans les décisions finales de l'Union européenne.
La Représentation française permanente auprès de l'Union européenne effectue un travail très important. Nous considérons que leur démarche pourrait cependant être plus efficace et leur soutien plus fort, même si leur contribution mérite d'être saluée. Lors de mon dernier déplacement à Bruxelles, j'ai eu l'opportunité de rencontrer M. Koen Doens, le directeur général de la coopération internationale et du développement (DG DevCo) à la Commission européenne, en charge de la gestion des PTOM et des ACP. Lui-même envisage une démarche transversale entre les différentes directions générales de la Commission européenne : il constate, en tant que DevCo, que les autres directions générales de la Commission ont mis à disposition des pays internationaux des outils générant une certaine forme d'incohérence dans la politique de l'Union européenne à l'égard des PTOM. Il nous a fait part de son intention d'initier une réflexion visant à coordonner la totalité des programmes et des aides que l'Union octroie à tous les pays du monde. Il nous semble qu'une telle démarche est utile car une de nos demandes vise à rendre les PTOM éligibles au même titre que les autres pays ayant la même préoccupation à propos des effets du changement climatique. Certains petits États sont éligibles aux programmes européens, bien au-delà des programmes spécifiques actuels dont ils peuvent bénéficier de manière à la fois superficielle et ponctuelle. Il nous semble que l'information sur les programmes européens doit être mieux structurée et être plus largement diffusée auprès des PTOM. Ceci nous renvoie en particulier à l'OCTA dont la Nouvelle-Calédonie va assurer la présidence à partir de septembre 2020. Nous en assurons actuellement la vice-présidence. Il serait pertinent de faire de l'OCTA la courroie de transmission de l'information sur les programmes européens accessibles aux pays et territoires ultramarins afin qu'ils puissent en bénéficier au maximum.
Le Parlement européen, sur proposition de l'ancien député européen calédonien M. Maurice Ponga, avait envisagé de porter l'enveloppe dédiée aux PTOM à 669 millions d'euros. Malheureusement, à notre connaissance, la Commission envisage de maintenir ce montant à 500 millions d'euros, l'équivalent de ce dont nous avons bénéficié lors du précédent instrument financier. La révision à la hausse de cette enveloppe nous permettrait, si elle était mise en oeuvre, de rééquilibrer notre situation par rapport au Groenland qui a une part prépondérante par rapport aux autres PTOM. Quand le Parlement a proposé de porter l'enveloppe à 669 millions d'euros, il ambitionnait de rééquilibrer la situation à notre bénéfice. Mais il n'en sera pas ainsi.
M. Michel Magras, président. - Je tiens à vous remercier pour la clarté et pour la précision de votre exposé liminaire. La Nouvelle-Calédonie est un des principaux moteurs de la représentation des PTOM à Bruxelles. Vous avez évoqué à l'instant l'enveloppe de 500 millions d'euros à destination des PTOM. Cette enveloppe est-elle maintenue malgré le départ des Britanniques de l'Union européenne ? Estimez-vous que la démarche de Maurice Ponga a définitivement échoué ?
M. Thierry Santa. - L'enveloppe des 500 millions d'euros n'est pas confirmée. Son montant n'a rien d'officiel. Quant à la proposition du Parlement européen, elle est, pour le moment, écartée.
M. Michel Magras, président. - Je crois savoir que la discussion entre la Commission et le Parlement sur ce point fut très difficile. Le parc naturel régional de la mer de Corail sera-t-il financé grâce à des fonds interrégionaux ou par le biais du Pacte vert ?
M. Thierry Santa. - Nous espérons que le Pacte vert permettra de financer de façon plus conséquente ce parc, que ce soit par le biais d'une enveloppe territoriale ou de l'enveloppe régionale dont je vous parlais tout à l'heure. Nous voulons, en effet, faire adhérer à ce projet nos voisins, en l'occurrence l'Australie, le Vanuatu, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et les îles Salomon. Il s'agirait alors d'un espace plus large encore que celui que j'ai évoqué précédemment mais cela serait cohérent. En effet, si nous parvenons à protéger notre parc et si les autres pays limitrophes ne prennent pas les mesures qui s'imposent, celles que nous aurons prises seront d'un effet limité. La Nouvelle-Calédonie est protégée des pêches illégales, en particulier grâce à l'action de l'UE face aux exactions répétées des blue boats du Vietnam. Il ne s'agit là que d'un exemple. Si nous protégeons notre espace mais que le Vanuatu ou les îles Salomon continuent à commercialiser des licences de pêche comme ils le font aujourd'hui, des bateaux continueront à faire des détours dans notre parc naturel. Nous essayons de mettre en avant le caractère potentiellement promoteur de développement économique de la préservation de cet espace naturel, avec des filières de pêche locales. Nous sommes prêts à partager notre expertise. Peut-être ne le savez-vous pas : en septembre 2019, la Nouvelle-Calédonie a été le seul territoire d'outre-mer lauréat de l'appel à projets de l'État « Territoires d'Innovation » dans lequel est prévue une série d'actions en lien avec le secteur privé pour créer de nouvelles activités de surveillance maritime, de surveillance de notre biodiversité, de nos récifs, de la pêche, avec une perspective de développement économique et de promotion des innovations au niveau régional, voire international. Retenez simplement que nous espérons coopérer avec tous les pays voisins et bénéficier du soutien de l'UE afin de mettre en avant et de promouvoir nos actions communes.
M. Michel Magras, président. - Cela me semble être une excellente initiative. Je cède à présent la parole à mes deux collègues rapporteurs.
Mme Vivette Lopez, rapporteur. - Je suis ravie de vous entendre dire, Monsieur le Président, que la Nouvelle-Calédonie est à présent mieux prise en considération à Bruxelles. Pour autant, il ne faut pas relâcher la vigilance et nous devons continuer à rappeler votre « existence » aux autorités européennes !
J'aurais, pour ma part, souhaité connaître les programmes phares que vous avez pu mener à bien grâce aux fonds et aux programmes européens dont vous avez bénéficié au cours de la période 2014-2020. J'ai cru comprendre que vous étiez associés à différentes négociations sur ces programmes. Avez-vous identifié des dysfonctionnements ? Je voudrais à présent revenir sur la comparaison que vous avez établie avec le Groenland. Quels sont vos points de vigilance sur la budgétisation du FED et la DAO ? Comment défendre le budget relatif aux PTOM français par rapport au Groenland ? Souhaitez-vous que les États membres soient associés au pilotage stratégique des projets financés par le FED ? Les PTOM vont devenir des pays tiers ACP après le Brexit ne vont-ils pas recevoir davantage de fonds que les PTOM français ?
M. Michel Magras, président. - Je vais laisser Gilbert Roger intervenir avant que vous ne répondiez, Monsieur le Président.
M. Gilbert Roger, rapporteur. - Je siège au sein de la Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. C'est à l'aune de cette participation que je vous poserai mes questions. Comment, d'un point de vue géopolitique, pouvons-nous mesurer l'impact du Brexit, tout particulièrement sur nos relations avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande ? Certes, le Royaume-Uni a quitté l'Union européenne, mais le Commonwealth perdure et les deux pays que je viens de citer en font partie. Vous avez évoqué d'autres risques, notamment celui lié à l'influence de la Chine et du Vietnam. Existe-t-il par ailleurs un risque lié au taux de TVA applicable à certains produits, notamment ceux considérés comme étant de « première utilisation » par les concitoyens ?
M. Thierry Santa. - Des accords commerciaux existent entre les différents États qui ont la même préoccupation à propos des effets du changement climatique. Un accord de libre-échange a été passé entre l'Union européenne et l'Australie, fixant des droits de douane très réduits. Ces droits de douane sont si faibles que l'accord spécifique dont la Nouvelle-Calédonie bénéficie - et notamment l'exonération de droits de douane - a perdu de son intérêt, du fait de cet accord commercial passé entre l'Union européenne et l'Australie. Pourtant nous avions alerté les autorités nationales sur les risques afférents à un tel accord, en particulier concernant le thon, le cobalt et les crevettes. Le risque lié au cobalt a été pris en considération. Il a été exclu de l'accord de libre-échange mais il n'en a pas été de même du thon et des crevettes quand bien même elles représentent une part non négligeable des exportations de la Nouvelle-Calédonie aujourd'hui. Le risque se situe à ce niveau-là.
En revanche, il n'y a pas de risque particulier concernant le taux de TVA. Je souhaiterais répondre à la question qui m'a été posée au sujet des grands projets dont la Nouvelle-Calédonie a bénéficié sur la période 2014-2020 grâce au FED. Notre territoire en a bénéficié au travers d'un programme d'insertion et d'emploi - en particulier à destination du public en difficulté - qui était dans la continuité du précédent, lequel était davantage focalisé sur la formation professionnelle. Nous avons aussi pu bénéficier du projet régional océanien des territoires pour la gestion durable des écosystèmes baptisé « Protège » avec la Polynésie française, Wallis-et-Futuna et les îles Pitcairn. Les îles Pitcairn en sont désormais exclues. Ce programme, qui est en cours sur les quatre années à venir, a quatre thématiques portant respectivement sur la gestion de l'eau, la gestion des espèces envahissantes, l'agriculture et la foresterie, l'aquaculture et la pêche.
Vous me demandez aussi si les ex-PTOM britanniques bénéficieront de financements plus importants que les PTOM français. J'estime que la question ne se pose pas parce que les PTOM britanniques ne sont pas indépendants et ne sont donc pas considérés comme des pays ACP. Logiquement, ils ne devraient donc plus bénéficier de financements européens. C'est la position que nous défendons. Au sein de l'OCTA, on comptait 25 PTOM, dont 12 britanniques qui ne sont donc plus censés en faire partie. Nous sommes toutefois en discussion avec eux pour les conserver au sein de l'OCTA en tant que membres associés et partager les informations sur l'actualité et l'économie du Pacifique. J'ai mis en avant cet argument pour justifier le maintien de la subvention européenne au bénéfice de l'OCTA.
Vous m'avez demandé tout à l'heure si la structure actuelle de l'OCTA est adaptée. Je ne le crois pas. Son bureau est constitué d'une structure permanente de trois personnes avec un financement à hauteur de 500 000 euros. Il conviendrait que l'OCTA monte donc un peu en puissance mais tout dépendra de l'accord de mes collègues d'outre-mer d'augmenter - ou pas - leurs cotisations pour compenser la baisse des cotisations de nos collègues britanniques et de la possibilité de faire évoluer à la hausse l'enveloppe globale de fonctionnement de la structure.
M. Michel Magras, président. - Je vous remercie, Monsieur le Président, de nous avoir consacré ce moment. J'ai apprécié le sentiment d'optimisme qui se dégage de vos propos. Je ne manquerai pas d'interroger vos deux collaborateurs sur le statut ACP des territoires britanniques. Il s'avère que nous sommes confrontés au même problème dans les Caraïbes.
M. Cédric Chan Yone, directeur de cabinet. - Le sujet de l'Union européenne et des enjeux fiscaux européens est un enjeu de très grande importance pour nous. Le Président Thierry Santa a dressé un large panorama de la politique qu'il entend mettre en oeuvre dans le cadre de ses relations avec l'Union européenne. Un certain nombre de questions lui ont été posées. Concernant les politiques européennes qui sont applicables sur notre territoire, le Président Thierry Santa a notamment cité le Fonds européen de développement et le FED territorial qui se focalise actuellement sur l'emploi, l'insertion et la formation professionnelle. Ce FED territorial progresse, mais il est compliqué à mettre en oeuvre. Il s'élève à 29,8 millions d'euros. Nous venons d'obtenir, sans réelles difficultés, le décaissement de la troisième tranche. Évoquons aussi l'enveloppe régionale à hauteur de 36 millions d'euros. Cette enveloppe a été multipliée par trois, signe de l'intérêt que porte l'Union européenne à notre île. Le programme régional « Protege » relie les trois PTOM français et un PTOM britannique, actuellement dans une situation assez difficile. Le prochain comité de pilotage (COPIL) du programme « Protege » devrait se tenir à la fin du mois de mars ou mi-avril en Polynésie française. Ce projet a une forte connotation d'intégration régionale et permettrait d'illustrer notre volonté de travailler avec des pays ACP. Nous disposons aussi d'une enveloppe thématique dont le montant s'élève à 20 millions d'euros. Cette enveloppe finance en partie la subvention de l'OCTA et un programme thématique dédié à l'énergie durable et au changement climatique, y compris la réduction des risques de catastrophes naturelles. Ce dernier sujet peine à démarrer parce qu'il n'y a toujours pas eu de programmation.
L'enveloppe territoriale du FED semble bien fonctionner. Nous avons rencontré quelques difficultés, liées à sa structuration, au cours du 9ème FED et la Nouvelle-Calédonie a servi, en quelque sorte, de « cobaye ». Les outils du FED ne sont pas faciles à utiliser pour des pays et territoires géographiquement assez éloignés de l'Union européenne : la cartographie, la mise en place d'indicateurs et du cadre logique, leur respect ensuite, sont compliqués. Les difficultés sont aussi liées au fait que nous manquons localement de personnels spécialistes des programmes de l'Union européenne. Nous nous attelons à mettre en place un programme d'enrichissements de nos ressources humaines, mais cela nécessitera un peu de temps, notamment avec l'aide de l'Union européenne.
La consommation de l'enveloppe territoriale européenne avance bien. La deuxième tranche a été très compliquée : nous avons, en effet, dévissé sur un indicateur. L'Union européenne s'est toutefois montrée clémente à notre endroit. Nous partons du principe qu'un indicateur doit être SMART (simple, mesurable, atteignable, réaliste, temporellement défini). Il s'est avéré que les discussions avec l'Union européenne sur la constitution de ces indicateurs ont été rugueuses, voire rigides. Sur la deuxième tranche, nous avons donc dévissé, notamment sur l'insertion professionnelle, ce qui nous a amenés à renégocier un avenant pour cette tranche. Mais la troisième tranche s'est parfaitement bien déroulée puisque nous avons décaissé la totalité des fonds. Nous avons remercié l'Union européenne et son ambassadeur, basé à Fidji, qui a suivi étroitement le sujet.
Les trois PTOM français ont participé au financement du programme régional dans l'optique de se dédouaner de la contrainte du D+3. Nous pouvons désormais assumer ce programme sur 4 années, tout en sachant que la première année a été consacrée à la structuration de la gouvernance. Si l'on fait un historique, il faut rappeler que l'Union européenne avait financé en 2018, via le 10ème FED régional, le programme Integre avait connu quelques difficultés ce qui avait un peu échaudé nos partenaires polynésiens et wallisiens. Le budget avait été triplé et la gouvernance du projet revue mais les conclusions sont restées en demi-teinte.
Pour le programme Integre, la Nouvelle-Calédonie est ordonnateur régional. Nous avons la lourde tâche de coordonner nos actions et de trouver des solutions consensuelles sur les quatre thématiques que le président Santa a citées au début de notre entretien.
L'instrument financier qu'est le Fonds européen de développement inclut un volet local, régional pour reprendre les termes du Président Santa. Ce volet local est le programme « Protege » interrégional destiné à financer des programmes liés à l'environnement. Ce programme, est en cours sur les quatre années à venir
Sur l'enveloppe thématique qui accompagne la subvention de l'OCTA, vous avez sans nul doute compris l'état d'esprit du Président Santa : il souhaite faire bouger les lignes et veut être force de proposition. Je m'interroge donc sur la capacité à initier une enveloppe thématique liée à une meilleure connaissance des programmes de l'Union européenne à destination de l'intégralité des PTOM. À ce stade, nous ne profitons pas de l'intégralité des programmes de l'Union européenne dont nous pourrions bénéficier. Cela est regrettable : l'Union européenne se coupe d'un relais efficace de son action dans le Pacifique. Je pense qu'il manque donc une courroie de transmission que pourrait être l'OCTA, en dépit de la modestie de ses moyens. Nous souhaitons donc mettre en place une gouvernance et des moyens associés à l'action de l'OCTA : dans le cadre du budget primitif de 2020, nous avons décidé de ré-abonder notre subvention au titre de l'année 2020 et nous avons aussi volontairement doublé notre subvention à l'OCTA. C'est un signal adressé à nos partenaires, notamment dans le cadre du Brexit et de la sortie de 12 PTOM britanniques.
Sur les programmes de l'Union européenne auxquels le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a soumissionné, il y a le programme « Horizon 2020 », lié à la recherche. Sont concernés l'Agence de développement de la Nouvelle-Calédonie (ADECAL), l'institut Pasteur de la Nouvelle-Calédonie, la société Le Nickel (SLN) et l'Université de la Nouvelle-Calédonie. Nous bénéficions également du programme « Erasmus + » qui permet une ouverture sur le monde au travers des échanges bilatéraux d'étudiants. Nous avons accueilli l'an passé des étudiants en provenance des Canaries. Le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie bénéficie également du programme européen pour la compétitivité des entreprises et des petites et moyennes entreprises (COSME), via l'ADECAL qui est un membre du réseau Enterprise Europe Network, et du programme « Best 2.0 », au travers du programme régional océanien de l'environnement (PROE), du conservatoire des espaces naturels de Nouvelle-Calédonie (CEN) et de la communauté du Pacifique (CPS). Ce dernier programme a concerné notamment la commune de Houaïlou particulièrement marquée par des décès à la suite des précipitations qui ont provoqué des éboulements et un glissement de terrain. La commune a pu bénéficier d'aides pour lutter contre ce désastre. Malheureusement, lorsque nous interrogeons nos services, les acteurs économiques locaux et les entreprises sur un recensement des programmes de l'Union européenne auxquels la Nouvelle-Calédonie pourrait être éligible, il s'avère que pas un d'entre eux n'est en mesure de fournir des statistiques consolidées. Cela est bien fâcheux. Quand on demande à l'Union européenne des financements, une éligibilité, une meilleure vision des programmes auxquels nous devrions avoir accès, il faut que nous soyons en capacité de justifier des avancées et des programmes pour lesquels nous avons candidaté. C'est une faiblesse de la Nouvelle-Calédonie que nous avons notée et qui pourrait peut-être être solutionnée en lien avec l'OCTA.
En effet, L'OCTA pourrait jouer un rôle éminent en matière de diffusion de l'information auprès des PTOM. Cela sera débattu lorsque la Nouvelle-Calédonie en assurera la présidence au titre de la feuille de route 2020/2021. Chaque PTOM pourrait communiquer sur les secteurs potentiellement visés au premier chef par une stratégie de développement ; l'OCTA jouerait le rôle de courroie de transmission, à charge ensuite à chaque PTOM de se structurer et de mettre en place un organisme (un service gouvernemental, une agence, un GIP, un établissement public...) qui diffuserait localement ces informations. À cette fin, notre service de coopération régionale et des relations extérieures pourrait, dans un premier temps, jouer ce rôle de diffuseur. Diffuser l'information est bien, pouvoir candidater, et être éligible c'est encore mieux. Réaliser les programmes est encore bien mieux. Nous avons un besoin d'accompagnement auprès de nos acteurs (entreprises, structures publiques) de manière à ce que chacun d'entre eux puisse être formé correctement pour pouvoir répondre dans des conditions idéales. Si les dossiers ne sont pas examinés pour la simple raison qu'ils ne respectent pas le formalisme attendu, nous passons à côté de l'objectif.
Vous posiez tout à l'heure la question de l'organisation des autorités chargées de la gestion des fonds. Je vous ai dit que la Nouvelle-Calédonie est ordonnateur territorial et régional des fonds du FED. L'appui dont notre Gouvernement bénéficie s'entend souvent sur le plan budgétaire. Le Gouvernement s'appuie sur des équipes techniques pour la réalisation et la mise en oeuvre des instruments financiers DAO : la direction du travail et de l'emploi, la direction de la formation professionnelle, la direction du budget et des affaires financières et le service de coopération régionale et des ressources extérieures(SCRRE). Nous nous appuyons aussi sur la Communauté du Pacifique sud (CPS) et le Programme régional océanien pour l'environnement (PROE). Notre SCRRE est en pleine mutation. Il ne compte à cette date que deux chargés de mission spécialisés sur les relations avec l'Union européenne. L'un d'entre eux doit prendre ses fonctions à la mi-mars car la personne qui occupait le poste vient de réussir le concours d'administrateur territorial. L'autre est installé à Paris, à la Maison de la Nouvelle-Calédonie. Il effectue de fréquents aller-retour à Bruxelles. Ces deux antennes nous rendent compte régulièrement et nous permettent d'avancer. Cela ne nous empêche toutefois pas d'assurer notre propre travail auprès de l'Union européenne. Le Président du Gouvernement effectue à chaque déplacement métropolitain une visite à la Commission européenne. Nous avons constaté que la Nouvelle-Calédonie n'y est pas assez connue. Il nous appartient donc de faire sa promotion auprès des autorités européennes, avec des axes thématiques sur lesquels nous nous retrouvons comme le Pacte vert, à savoir la préservation de la biodiversité ou nos actions contre le changement climatique. Il nous apparaît également nécessaire de décrire les enjeux des PTOM en général auprès de l'Union européenne.
M. Michel Magras, président. - Je vous remercie, Monsieur Chan Yone, pour la qualité de votre exposé qui appelle de notre part d'autres questions. Cependant avant de vous livrer mon sentiment personnel, je voudrais céder la parole à M. Stéphane Artano, qui fut le Président de la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon et de l'OCTA.
M. Stéphane Artano. - Je souhaiterais vous livrer mon sentiment en qualité d'ancien Président de collectivité puisque j'ai été amené à négocier deux FED. J'ai assuré la présidence de l'OCTA à deux reprises, le Groenland en assurait alors la vice-présidence. Je tiens à saluer l'action du duo permanent technique français composé de Chloé Calvignac et d'Olivier Gaston.
Ma première remarque est la suivante : d'un point de vue strictement politique, il est essentiel que tous les PTOM français intègrent le fait qu'ils doivent être ordonnateurs territoriaux, c'est-à-dire qu'ils sont responsables et comptables vis-à-vis de l'Union européenne du décaissement des fonds européens sur leur territoire et de leur utilisation. J'ai été élu en 2006 à la tête de Saint-Pierre-et-Miquelon. Le Préfet était alors ordonnateur parce que la collectivité faisait l'objet d'un protocole de restructuration budgétaire du fait de son déficit. J'ai très rapidement demandé à ce que cette responsabilité incombe à nouveau aux acteurs politiques de la collectivité. Je l'ai demandé tout simplement parce qu'il est essentiel d'assurer un portage politique de haut niveau en lien étroit avec les instances européennes (DEVCO et le commissaire européen correspondant). J'ai relevé l'importance de ce lien au travers des deux FED que Saint-Pierre-et-Miquelon a négociés en direct avec les services de l'Union européenne. Systématiquement, je portais personnellement le dossier. Ces services ont eux-mêmes insisté pour déployer ce portage politique de haut niveau. Il était donc essentiel de le mettre en oeuvre. Le président Santa a parfaitement raison d'aller systématiquement à leur rencontre. Cela ne remet évidemment pas en cause notre lien étroit avec l'État parce qu'il nous accompagne sur le dispositif. Cela n'a fonctionné que parce que nous disposions d'un lien étroit entre le territoire et les services de l'Union européenne, tout en tenant évidemment informés les services français - y compris la Représentation permanente à Bruxelles - des démarches que nous entreprenions auprès de l'Union européenne. Les échanges que nous avons pu avoir avec ces services ont été parfois très rudes notamment parce que l'État considérait - et le préfet ne manquait pas de nous le rappeler - que le FED correspondait aux fonds que la France versait à l'Union européenne et, qu'à ce titre, la France pouvait - et devait - bénéficier d'un droit de regard quant à leur utilisation. J'ai institué un comité de pilotage (COPIL), au sein duquel siégeaient le préfet et un représentant de notre collectivité, mais aussi l'ensemble des forces politiques du territoire et la chambre de commerce, avec une coprésidence pour garantir la transparence, en charge du suivi de l'utilisation de ces fonds européens sur les différents projets au profit de nos territoires. Ce sont des fonds que la collectivité reçoit et qu'elle met en oeuvre au travers d'une politique qu'elle a décidée. À partir de 2008, l'Union européenne nous a demandé d'élaborer des schémas de développement économique territoriaux. Quand je lui avais présenté le contrat de développement État-collectivité, l'Union européenne nous avait dit que cela ne l'intéressait pas et qu'elle voulait l'émanation du territoire, la stratégie territoriale avec un document à l'appui. Il est important d'avoir une vision transversale afin de comprendre comment fonctionne cette mécanique éminemment juridique mais également éminemment politique. Je me félicite du soutien que tous les Gouvernements français nous ont apporté. La ministre Marie-Luce Penchard avait pris position sur la budgétisation et une note interne pourrait d'ailleurs être très utile aux travaux de la délégation car la France avait, à cette époque, exprimé une position sur la budgétisation en disant qu'il faudrait malgré tout, au sein de cette budgétisation, une enveloppe qui préserve les PTOM pour qu'ils ne soient pas noyés dans la masse globale de l'Union européenne. Victorin Lurel et Annick Girardin nous ont également soutenus. La relation de notre collectivité s'entend donc à l'échelon hexagonal et également en direct à l'échelon européen.
Vous avez eu raison d'insister sur l'importance des indicateurs de réussite qui font généralement l'objet d'âpres discussions avec les services de l'Union européenne. En la matière, il faut donc être raisonnablement ambitieux. C'est la partie la plus délicate de l'enveloppe territoriale. À Saint-Pierre-et-Miquelon, nous n'émargeons que sur celle-ci. C'est difficile de faire de la coopération régionale : notre secteur est celui du Canada ! Plus sérieusement, la maturité de l'Union européenne sur les risques climatiques permettrait d'envisager des coopérations régionales ou thématiques avec les autres PTOM français sur ce thème. Nous nous étions posé la question avec Pascal Bolot lorsqu'il était préfet des TAAF. Il se faisait fort de mettre en place un projet de recherche scientifique conjoint entre Saint-Pierre-et-Miquelon et les TAAF.
Quant au Brexit, il pourrait potentiellement générer un effet direct sur le fonctionnement de l'OCTA puisque nos amis britanniques ont toujours été très impliqués dans le fonctionnement du Comité exécutif de l'organisation. Au-delà de l'aspect budgétaire, le fonctionnement de l'OCTA pourrait être déséquilibré. Je serais très étonné qu'ils acceptent de participer gracieusement à ce fonctionnement, même de façon associée, sans en toucher les bénéfices pécuniaires. Nous avons toutefois encore besoin d'eux car ils bénéficient de compétences sur le plan technique. Je pense qu'il nous faudra renforcer le fonctionnement et les moyens affectés à l'OCTA d'autant plus que le départ du Royaume-Uni pourrait générer, par des enveloppes thématiques, un abondement du budget de fonctionnement de la structure afin d'avoir la capacité de diffuser l'information sur les budgets et les programmes auxquels nous sommes éligibles.
M. Michel Magras, président. - Monsieur Chan Yone, vous avez noté tout à l'heure l'importance de disposer de spécialistes en mesure de contribuer au fonctionnement de ces institutions et au traitement des dossiers. Les régions périphériques accordent une très grande importance à cette question. Vous avez cité la Maison de la Nouvelle-Calédonie, à Paris, structure que je connais bien. En revanche, je m'interroge sur les délais d'utilisation et de mobilisation des fonds et de réalisation des programmes. Comme vous le savez, l'Union européenne entend réduire les délais de traitement en passant de N+3 à N+2. Ce choix politique de l'Union européenne ne vous inquiète-t-il pas ?
M. Cédric Chan Yone. - L'Union européenne est effectivement attentive à la question du délai de l'utilisation de ses fonds. Mais se souvient-elle que la mise en application des décaissements n'intervient que trois ans après son accord de principe au déblocage de ces fonds, notamment dans le cadre des FED territoriaux ? Il y a de l'inertie mais nous nous inscrivons dans une optique de réalisation de notre stratégie. Les outils FED nous aident notablement à nous structurer à travers la réalisation et l'identification de nos stratégies. Le Président Santa a évoqué l'idée de proposer comme futur secteur de concentration pour le prochain instrument financier DAO la thématique de l'emploi et de l'économie verte et bleue. Cela nous permettrait de participer pleinement à l'objectif du Pacte vert. Même si la volonté existe, la mise en oeuvre est souvent délicate. Il nous faudrait peut-être profiter de la mise en place de ce futur instrument qui intègre le budget de l'Union européenne et sacralise le budget des PTOM pour nous assurer de l'éligibilité des PTOM aux programmes horizontaux de l'UE, le Green Deal en particulier. Encore faut-il que nous nous assurions que l'enveloppe qui nous est dédiée ne soit pas consommée par des tiers. Nous n'avons déjà que des miettes ! Il faut nous mettre en marche pour consommer au mieux. S'agissant de l'enveloppe de 500 millions d'euros, je vous confirme ce que vous disait le Président Santa : elle n'est pas confirmée à date. Quant à la proposition du Parlement européen de fixer son montant à 669 millions d'euros, elle est, pour le moment, écartée. Même si le député Stéphane Bijoux, que nous avons rencontré il y a deux semaines, continue à la porter. Les PTOM francophones du Pacifique peuvent être de véritables relais de l'action de l'Union européenne dans notre région, notamment sur l'application du Pacte vert. Dans cette dynamique, l'Union européenne a investi dans l'initiative Pacifique, gérée par l'Agence française de développement, dans laquelle nous retrouvons l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Canada et la France et qui est dotée d'une enveloppe de 30 millions d'euros. Dans les faits, malgré la volonté de l'AFD de pousser les gens à la consommation et à émarger, il n'y a aujourd'hui aucun guide pratique. Seuls 3 millions d'euros sont destinés aux PTOM et ils sont issus des reliquats du FED pour les ACP dont nous ne pouvions pas bénéficier ! Nous sommes, pour notre part, disposés à nous inscrire dans le cadre du Pacte vert mais libérez-nous déjà les programmes et les budgets auxquels nous pourrions émarger.
Comme l'indiquait M. Artano, nous devons trouver les moyens de structurer et de former des experts auprès de l'Union européenne. Malheureusement, dans les PTOM, dès que nous avons un expert, il s'arrache à prix d'or ! Il faudrait parvenir à réaliser un maillage dans notre stratégie. Pour cela, nous avons pour objectif de transformer notre service de coopération régionale et des relations extérieures en une véritable direction des relations extérieures, démontrant ainsi l'ambition portée par la Nouvelle-Calédonie de s'intégrer pleinement dans notre bassin. Nous souhaitons également renforcer le triptyque francophone du Pacifique, avec Wallis-et-Futuna et la Polynésie française. Au mois de juin, nous signerons un avenant à l'accord particulier avec Wallis-et-Futuna qui renforcera les relations entre nos deux territoires. En avril, nous signerons un accord-cadre de partenariat à large spectre avec la Polynésie française. Notre objectif est de parvenir à tenir des positions communes entre nos trois collectivités lors des discussions avec l'État et l'Union européenne. Nous avons prévu des actions de coordination préalable à tout engagement. C'est dans ce sens que le Pacifique et les PTOM francophones du Pacifique peuvent être de véritables relais de l'action de l'Union européenne.
Je vous remercie de votre attention.
M. Michel Magras, président. - Je vous remercie d'avoir insisté sur la place singulière de la Nouvelle-Calédonie. Nous en tiendrons évidemment compte dans le rapport que nous allons produire. J'insiste encore sur la volonté de l'Union européenne de raccourcir les délais et de cibler l'utilisation des fonds européens alors que l'Union n'est même pas capable d'adopter son budget cette année. La responsabilité n'est donc pas nécessairement de notre côté ! Sachez toutefois que nous sommes preneurs de tous les éléments que vous voudrez bien nous faire parvenir car nous avons à coeur de défendre la cause des outre-mer.
Je vous remercie tous les trois de votre présence et de votre maîtrise des dossiers. J'appartiens à une collectivité qui n'émarge qu'au fonds du FED régional mais elle est solidaire avec vous. J'avais apprécié la démarche du député Maurice Ponga lorsqu'il avait souhaité une globalisation avec une répartition par territoire, mais le Gouvernement français n'avait pas retenu cette proposition.
M. Cédric Chan Yone. - Je vous remercie à mon tour d'être le relai des enjeux de la Nouvelle-Calédonie et de nos engagements. Nous comptons sur votre expertise, sur votre appui et sur votre soutien pour défendre efficacement nos intérêts au bénéfice de l'ensemble des PTOM.