- Mercredi 18 décembre 2019
- Proposition de résolution européenne de M. Richard Yung et les membres du groupe La République En Marche sur les enfants privés de tout lien avec leur parent européen à la suite d'un enlèvement commis par leur parent japonais : rapport de Mme Véronique Guillotin
- Déplacement en Ukraine dans le cadre du suivi du Partenariat oriental, du 10 au 14 octobre 2019 : communication de Mme Gisèle Jourda
- Conférence interparlementaire sur les priorités de la politique étrangère de l'Union européenne pour le nouveau cycle institutionnel du 4 décembre 2019 : communication de Mme Gisèle Jourda
Mercredi 18 décembre 2019
- Présidence de M. Jean Bizet, président -
La réunion est ouverte à 13 h 30.
Proposition de résolution européenne de M. Richard Yung et les membres du groupe La République En Marche sur les enfants privés de tout lien avec leur parent européen à la suite d'un enlèvement commis par leur parent japonais : rapport de Mme Véronique Guillotin
M. Jean Bizet, président. - Pour notre dernière réunion de l'année 2019, nous avons trois points à l'ordre du jour : l'examen d'une proposition de résolution européenne déposée par notre collègue Richard Yung et deux comptes rendus de déplacements récemment effectués pour notre commission par l'une de ses membres, Gisèle Jourda, l'un en Ukraine, l'autre à Bruxelles.
Je laisse d'abord la parole à notre collègue Véronique Guillotin, que je remercie d'avoir accepté de rapporter sur la proposition de résolution européenne de M. Richard Yung et ses collègues du groupe La République En Marche. Ce texte traite du cas des enfants privés de tout lien avec leur parent européen, à la suite d'un enlèvement commis par leur parent japonais. C'est un sujet auquel Richard Yung avait déjà sensibilisé le Sénat il y a presque dix ans. En tant que sénateur représentant les Français de l'étranger, il a dû être confronté à des situations humaines délicates. À son initiative, le Sénat avait alors adopté une résolution relative aux enfants franco-japonais privés de liens avec leur parent français en cas de divorce ou de séparation. Notre collègue reprend son bâton de pèlerin et nous soumet aujourd'hui une résolution, européenne cette fois, pour traiter du même sujet, mais impliquant des parents européens et non seulement français.
Mme Véronique Guillotin, rapporteure. - Notre commission est saisie d'une proposition de résolution européenne sur les enfants privés de tout lien avec leur parent européen à la suite d'un enlèvement commis par leur parent japonais, à l'initiative de nos collègues Richard Yung, François Patriat, André Gattolin, Claude Haut et les membres du groupe La République En Marche.
Nous sommes sensibilisés à ce sujet. En effet, le 25 janvier 2011, le Sénat avait adopté une résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution concernant les seuls enfants franco-japonais, puis, le 8 octobre dernier, plusieurs de nos collègues, également à l'initiative de Richard Yung, très investi depuis des années dans ce dossier, ont déposé une proposition de résolution sur le même fondement.
Certains enfants issus de couples composés d'un ressortissant d'un État membre et d'un japonais se trouvent au centre d'un conflit parental. À la suite de la séparation ou du divorce de leurs parents, ils sont privés de tout contact avec leur parent européen. Ils ont fait l'objet, soit d'un enlèvement international commis par leur parent japonais, soit d'un enlèvement parental à l'intérieur du Japon. Leur parent non japonais ne peut donc plus exercer ses droits parentaux.
Les auteurs de la proposition de résolution européenne indiquent, dans l'exposé des motifs, que « ces situations dramatiques découlent principalement de l'application de la législation nipponne en matière de droit de la famille ». En effet, le droit japonais ne reconnaît ni le partage de l'autorité parentale ni la garde alternée. Par ailleurs, les juges japonais appliquent le principe non écrit dit de continuité, qui consiste à attribuer l'autorité parentale et la garde exclusive de l'enfant au parent ravisseur. Enfin, le droit de visite, qui n'existe pas dans la loi japonaise, est laissé à l'appréciation du juge aux affaires familiales et son exercice dépend du bon vouloir du parent auquel est attribuée l'autorité parentale. Bref, nous sommes confrontés à des problèmes juridiques qui trouvent leur origine dans des différences culturelles entre l'Europe et le Japon, où l'intervention de l'État dans les affaires familiales est très mal perçue. Il n'existe d'ailleurs pas de revendications audibles émanant de la société civile japonaise sur les droits du parent séparé. Les seules véritables pressions viennent d'États étrangers tels que les États-Unis, le Canada ou l'Italie.
Depuis 1994, le Japon est partie à la convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989. Aux termes de l'alinéa 1 de l'article 3, « dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ». Et l'alinéa 3 de l'article 9 prévoit que les « États parties respectent le droit de l'enfant séparé de ses deux parents ou de l'un d'eux d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant ».
On le voit, le Japon ne satisfait pas pleinement à ses obligations conventionnelles. Diverses actions diplomatiques l'ont certes conduit à évoluer. Ainsi a-t-il adhéré, en janvier 2014, à la convention sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants du 25 octobre 1980, dite « convention de La Haye ». Ce texte s'applique lorsqu'un enfant a été déplacé illicitement du pays d'un des parents vers celui de l'autre ou lorsqu'un parent ne résidant pas dans le même pays que son enfant souhaite voir reconnus ou respectés ses droits de garde et de visite.
Toutefois, il existe d'autres cas qui ne relèvent pas de la convention de La Haye : les déplacements illicites d'enfants intervenus avant l'entrée en vigueur de la convention ; les déplacements d'enfants à l'intérieur du territoire japonais sans dimension d'extranéité ; les conflits familiaux relatifs à des difficultés d'exercice des droits de visite et d'hébergement entre parents résidant au Japon. Dans les deux derniers cas, ce sont les juridictions japonaises qui sont compétentes pour statuer sur le fond, en raison de la résidence habituelle au Japon.
Pour autant, la situation ne se serait guère améliorée depuis 2014. Ce fait est d'ailleurs largement admis, y compris par le Comité des droits de l'enfant de l'ONU. De même, le Président de la République a évoqué ce sujet lors de sa visite officielle au Japon, le 26 juin dernier. La principale difficulté tiendrait au défaut d'exécution d'ordonnances de retour et de décisions accordant un droit de visite au parent non japonais. En mai dernier, le parlement japonais a adopté une loi, qui entrera en vigueur le 1er avril prochain et qui modifie la législation relative à l'exécution des décisions en matière civile. Néanmoins, les auteurs de la proposition de résolution européenne paraissent sceptiques sur les effets concrets de cette réforme. Ils rappellent également que plusieurs enlèvements d'enfants ont eu lieu avant l'entrée en vigueur de la convention au Japon, c'est-à-dire avant le 1er avril 2014.
Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, que j'ai interrogé, a indiqué que, pour les seuls enfants franco-japonais, il existe onze dossiers actifs, dont huit sont relatifs à des conflits autour de droits de garde et de visite, et trois concernent des déplacements illicites d'enfant. Parmi ces onze dossiers, sept entrent dans le cadre de la convention de La Haye, dont quatre concernent des droits de garde et de visite, et trois des déplacements illicites. Ainsi, quatre dossiers actifs actuellement suivis sont hors convention de La Haye. Selon le ministère, « il est très difficile d'estimer de façon précise le nombre de parents se trouvant dans une situation similaire. En effet, certains cas très anciens ne font pas (ou plus) l'objet d'un suivi par nos services. D'autres cas ne sont tout simplement pas portés à notre connaissance. L'association Sauvons nos enfants - Japon évoque, de son côté, une centaine de cas connus, sans qu'il soit toutefois possible de vérifier l'exactitude de ce chiffre ». De même, aucune information sur le nombre d'enfants dont l'un des parents est un citoyen européen ne m'a été communiquée.
Quelles sont les actions envisageables au niveau national et au niveau européen ? Pour les cas ne relevant pas de la convention de La Haye, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères intervient en soutien de l'action du ministère de la justice et accompagne les parents lorsqu'ils en font la demande. Il l'a indiqué en réponse à une question écrite de notre collègue Jacky Deromedi. Les services du ministère apportent alors leur soutien au parent victime au titre de la protection consulaire telle que prévue par la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963. Une liste de notoriété des avocats spécialisés en droit de la famille peut lui être communiquée. Une tentative de prise de contact avec l'autre parent peut aussi être initiée, dans l'objectif de solliciter son accord pour organiser une visite consulaire au domicile de l'enfant et ainsi s'enquérir de ses conditions de vie matérielles. La médiation reste en effet souvent la voie à privilégier pour le parent victime, tout particulièrement au Japon : des moyens importants d'aide à la médiation y ont été mis en place. En France, la Cellule de médiation familiale internationale peut apporter son concours en vue de favoriser un accord amiable entre les deux parents.
Néanmoins, comme le rappelle le ministère, les autorités françaises ne sont pas compétentes pour faire exécuter une décision française sur le territoire japonais. Les parents souhaitant faire reconnaître et exécuter une décision de justice française au Japon doivent demander, avec l'aide d'un avocat, l'exequatur de cette décision au Japon.
Enfin, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères m'a indiqué qu'« une réflexion spécifique aux conflits familiaux au Japon est menée en lien avec les autorités japonaises afin d'explorer les possibilités de faciliter la résolution de ces situations difficiles pour les parents concernés ». Une délégation de représentants des ministères des affaires étrangères et de la justice s'est rendue au Japon, les 20 et 21 mai 2019, où elle a pu obtenir des informations confirmant que ce pays était insuffisamment respectueux des droits des deux parents en cas de séparation. Elle a fait part des préoccupations françaises. Surtout, elle a proposé aux autorités japonaises de définir un cadre de travail bilatéral, notamment la réactivation d'une instance de dialogue bilatéral ad hoc, qui avait été instituée en 2009, puis supprimée après l'adhésion du Japon à la convention de La Haye. Cette proposition a été formalisée dans une lettre adressée par le Président de la République, le 4 octobre dernier, au Premier ministre japonais, puis réitérée par Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de affaires étrangères, pendant un entretien bilatéral avec le ministre des affaires étrangères japonais, le 23 novembre dernier, en marge d'une réunion des ministres des affaires étrangères du G20, à Nagoya. Notre ambassadeur à Tokyo s'est également entretenu avec un représentant du ministère de la justice japonais, qui lui a confirmé que le Premier ministre japonais avait donné des instructions afin que la proposition française soit examinée prochainement dans un cadre interministériel. Une telle instance bilatérale permettrait d'évoquer régulièrement les situations individuelles et de mettre en évidence les dispositions du droit japonais soulevant des difficultés.
Au niveau européen, l'Union s'est dotée en 2003 d'un règlement qui constitue le pendant européen de la convention de La Haye, le règlement dit « Bruxelles II bis ». Par ailleurs, dans un avis d'octobre 2014, la Cour de justice de l'Union européenne a considéré que l'acceptation de l'adhésion d'un État tiers à la convention de La Haye relevait de la compétence exclusive de l'Union européenne. Il est donc possible de considérer que l'Union a un intérêt à agir dans ce dossier. Enfin, l'Union européenne et ses États membres ont signé avec le Japon, en juillet 2018, un accord de partenariat stratégique, dont l'article 32 est relatif à la coopération judiciaire et dont la coordination est confiée à un comité mixte. Néanmoins, à ma connaissance, le Conseil ne s'est jamais prononcé explicitement sur cette question qui n'a été abordée que lors d'un groupe de travail sur le droit civil, en septembre 2012, sous l'angle de l'adhésion du Japon à la convention de La Haye. L'Union européenne aurait donc intérêt à prendre position. Elle pourrait aussi conduire un travail d'influence par le droit, d'autant plus que le Japon, pays de droit écrit, réalise actuellement une étude des législations étrangères visant à une éventuelle évolution de son droit en matière d'autorité parentale.
À l'issue de cette présentation, je propose que notre commission soutienne les objectifs poursuivis par cette proposition de résolution européenne, qui aborde un sujet humain sensible et soulève de vraies difficultés d'application du droit international, ayant des répercussions quotidiennes sur des citoyens européens, que l'on peut présumer certes peu nombreux, mais fortement affectés.
Deux points n'ont pas échappé aux auteurs de la proposition, mais je souhaiterais néanmoins y revenir, car ils sont importants et doivent avoir des conséquences sur la rédaction du texte que nous adopterons. Le premier est que nous sommes ici sur une matière - le droit de la famille - qui touche à l'identité nationale et à la souveraineté étatique, qui plus est d'un État non membre. Le second point, qui accentue encore la portée du premier dans le cas d'espèce, est que les difficultés d'exercice des droits parentaux après une séparation ou un divorce concernent aussi, et même d'abord, les parents japonais. En fait, ces difficultés sont générales au Japon.
Sur le fond, nous pouvons souscrire aux intentions de nos collègues ; sur la forme, je vous propose à la fois de modifier le texte et d'affirmer notre position de deux manières distinctes.
D'une part, il me semble nécessaire d'adapter quelque peu la rédaction.
Les modifications que je propose ne sont pas substantielles et n'altèrent en rien la portée de la proposition de résolution européenne. Certaines d'entre elles sont rédactionnelles, en particulier pour ménager la souveraineté du Japon. Mais la plupart visent à renforcer la normativité du texte, à laquelle le Sénat est, à juste titre, très attaché dans la conduite de ses travaux législatifs. Je comprends très bien que les auteurs d'une proposition de résolution européenne souhaitent apporter un maximum de précisions pour éclairer le lecteur. Néanmoins, je crois que, pour plus d'efficacité et de lisibilité, nous devons viser, dans la mesure du possible, un texte plus ramassé. En particulier au niveau des visas et, surtout, des considérants qui sont nombreux et dont plusieurs descendent à un degré de détail qui n'est sans doute pas indispensable ici. L'objet des considérants n'est pas de faire office de « rapport déguisé », ce qui risquerait d'affaiblir la portée du dispositif.
D'autre part - et ce point est lié au précédent -, nous gagnerions en efficacité en distinguant deux exercices différents. En effet, une proposition de résolution européenne est adressée au Gouvernement, sur le fondement de l'article 88-4 de la Constitution. Or, certains alinéas du texte de nos collègues visent explicitement la Commission européenne. C'est pourquoi je vous propose, comme notre commission le fait d'ailleurs régulièrement, d'adopter non seulement une proposition de résolution européenne, mais aussi un avis politique qui sera adressé à la Commission au titre du dialogue politique. Ce faisant, la position du Sénat aura une plus large diffusion. L'avis politique reprend en grande partie les termes de la proposition de résolution européenne, sous réserve de quelques aménagements qui concernent plus spécifiquement la Commission.
M. Jean Bizet, président. - Merci pour votre rapport sur ce sujet qui n'est pas nouveau mais reste sensible. La réactivation de cette instance de dialogue bilatéral constitue une avancée, dans le respect de la culture du Japon, et qui ne peut être que bénéfique. J'espère qu'elle aboutira. En attendant, notre rapporteure nous propose d'adopter la proposition de résolution européenne et l'avis politique avec quelques modifications de forme.
M. André Gattolin. - Je salue le travail de dentelle de notre rapporteure qui, en praticienne du droit aguerrie, a su distinguer entre ce qui relevait de la proposition de résolution européenne et ce qui ressortait de l'avis politique. En ma qualité de cosignataire du texte que nous examinons, je veux aussi saluer l'initiative de Richard Yung sur ce sujet. J'ai eu l'occasion de m'intéresser aux questions juridiques japonaises ces derniers temps. J'ai ainsi rencontré François Zimeray, l'un des avocats de Carlos Ghosn, qui a été diplomate et ambassadeur de la France pour les droits de l'Homme. Il a appelé mon attention sur l'importance du droit coutumier non écrit qui conduit à réinterpréter les principes fondamentaux du droit. La question de l'autorité parentale risque de rester posée longtemps, car elle ne concerne pas seulement la relation entre des Japonais et des étrangers, mais elle illustre une dimension de la société japonaise. Il suffit de regarder la composition du parlement japonais pour voir que les femmes sont très sous-représentées. Cela reflète la culture de la société japonaise où l'homme occupe une place très importante.
Il est aussi intéressant de constater l'importance de réseaux d'influence et de diplomatie parallèles dans ce pays, en particulier les cercles de jeu de go. Les ministres se retrouvent dans ces cercles et discutent des affaires en cours. Il peut toujours être utile de passer par ce canal pour faire avancer un dossier.
Il me semble important de rappeler à nos partenaires japonais que notre coopération ne saurait se réduire aux dimensions économiques ou militaires, mais qu'elle concerne aussi les droits des personnes et qu'un État doit respecter les conventions internationales qu'il a signées.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Je salue aussi la qualité du travail de notre rapporteure et remercie M. Richard Yung pour sa proposition de résolution. Ce dossier est très complexe. En 2010, j'étais allée au Japon rencontrer le ministre japonais pour plaider la cause de l'adhésion de son pays à la convention de La Haye. J'avais pu constater sa méconnaissance de la culture européenne. Heureusement, le Japon a signé la convention de La Haye, mais tout n'est pas résolu. Ce pays ne respecte pas le droit et ne fait pas appliquer les jugements de ses tribunaux. La France n'est pas le seul pays concerné. J'ai en tête des affaires similaires qui concernent aussi des parents américains, italiens ou australiens. Ainsi, un Italien, dont la femme japonaise, qui avait le droit de garde, est décédée, ne parvient toujours pas à récupérer la garde de ses enfants en dépit d'un arrêt de la justice japonaise en sa faveur.
La réactivation d'une instance de dialogue bilatéral ad hoc constituerait une avancée. Une telle commission avait donné de bons résultats avec l'Allemagne. Je connais aussi M. François Zimeray, ardent défenseur des droits de l'Homme et avocat de Carlos Ghosn. Il évoque un déni de justice. Le Japon reste un pays fortement replié sur lui-même, marqué depuis des temps immémoriaux par une certaine méfiance vis-à-vis de l'extérieur. Je l'avais constaté lorsque j'ai étudié la culture japonaise à la Maison de la culture du Japon, à Paris. Nous devons continuer à essayer d'avancer avec prudence, sans prendre le risque de brusquer nos partenaires japonais. C'est pourquoi j'avais une réticence sur la première proposition de Richard Yung, car je suis soucieuse de ménager les sensibilités. Toutefois, nous sommes parvenus à des situations extrêmes et il convient d'avancer.
Il faut toutefois relever des signes d'espoir. Notre ambassadeur au Japon m'indiquait que les mentalités de certains députés hommes étaient en train d'évoluer. Je dois réaliser une mission sur ce sujet et sur l'affaire Carlos Ghosn. En ces matières, nous devons faire preuve de prudence et travailler en lien étroit avec notre ambassade. Ces affaires sont terribles. Des parents privés de leurs enfants se sont déjà suicidés. Ces situations risquent de se multiplier si nous n'avançons pas en commun avec les autorités japonaises.
M. Jean-Yves Leconte. - Je tiens à remercier Richard Yung et notre rapporteure du travail qu'ils ont accompli sur un sujet très douloureux. Les séparations de familles binationales sont toujours difficiles, mais le Japon est vraiment un cas particulier. Il faut bien avoir conscience que ces drames ne sont qu'une minorité par rapport à ceux qui se jouent au sein des familles japonaises. Les séparations sont extrêmement violentes au Japon, mais les mentalités de ce pays n'abordent pas cette question de la même manière que nous. Mme Akiko Santo, alors présidente du groupe d'amitié Japon-France, et maintenant présidente de la Chambre des conseillers, le Sénat japonais, m'avait déclaré que cette manière d'appréhender la question était étrangère à sa culture : elle ne voyait rien que d'habituel dans ces situations.
Nous devons donc nous attaquer à ces drames avec notre sensibilité, mais en évitant de le faire de façon frontale si l'on veut faire évoluer les mentalités. Seul un changement culturel profond peut répondre à nos attentes.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Il faut avancer à pas mesurés sur ce dossier !
M. Richard Yung. - Merci, madame la rapporteure : tout ce que vous avez dit est exact et je souscris à votre technique parlementaire de séparation entre la proposition de résolution européenne et l'avis politique. En déposant cette proposition de résolution européenne, nous avons voulu passer à un niveau d'action supérieur, même si je présenterai également une proposition de résolution strictement franco-japonaise, en février prochain, en séance publique. Notre action est aujourd'hui européenne : nous avons eu des contacts avec d'autres ambassades européennes au Japon ; des démarches communes ont été engagées, notamment avec l'ambassadeur d'Italie, très engagé sur cette question.
Cette question touche aux valeurs profondes de l'identité japonaise, que nous devons respecter, même quand elles nous semblent curieuses. Un groupe de députées japonaises m'avait reçu : elles m'ont expliqué que le fait de confier systématiquement à la mère la garde de l'enfant était pour elles une grande conquête de l'après-guerre car la société japonaise traditionnelle ne donnait de droits qu'au père ! Elles nous accusaient donc d'attaquer les droits acquis des femmes japonaises !
Mme Véronique Guillotin, rapporteure. - Les modifications que j'ai apportées à la présente proposition de résolution européenne ne visent évidemment pas à altérer sa portée, bien au contraire. J'ai simplement voulu donner plus d'efficacité et d'intelligibilité à ce texte. Il m'a semblé nécessaire d'apporter des modifications de nature rédactionnelle afin de ne pas donner à nos amis japonais l'impression que nous leur donnerions des leçons de droit de la famille. Ce domaine relève de la souveraineté d'un État aux traditions juridiques et culturelles bien différentes des nôtres. J'ai en outre estimé que ces modifications seraient bien accueillies par la commission des lois, à laquelle ce texte sera envoyé. Si de nombreux alinéas paraissent supprimés, ce n'est que l'application des principes que je vous ai exposés, qui ont conduit à une rédaction plus concise. Plus ramassé, le texte que je vous propose d'adopter n'en conserve pas moins l'essentiel du dispositif initial.
M. Richard Yung. - Très bien !
M. Jean Bizet, président. - J'espère que, grâce à ce texte, nous allons passer des frémissements aux résolutions !
À l'issue du débat, la commission adopte à l'unanimité la proposition de résolution européenne, dans la rédaction suivante :
La commission adopte également l'avis politique suivant qui sera adressé à la Commission européenne :
Déplacement en Ukraine dans le cadre du suivi du Partenariat oriental, du 10 au 14 octobre 2019 : communication de Mme Gisèle Jourda
M. Jean Bizet, président. - Mme Gisèle Jourda va à présent nous rendre compte de son déplacement en Ukraine en octobre dernier dans le cadre du suivi du Partenariat oriental de l'Union européenne ; cette communication nous intéressera d'autant plus que vient de se tenir à Paris la première réunion en format « Normandie » réunissant les présidents russe et ukrainien, MM. Poutine et Zelensky.
Mme Gisèle Jourda. - Notre commission a créé en son sein un groupe de travail et de suivi du Partenariat oriental. Parmi les six pays d'Europe orientale qui bénéficient de cette politique européenne, on trouve l'Ukraine, où je me suis rendue en mission du 10 au 14 octobre dernier, d'abord à Kiev, puis à Verkhivnia, et enfin à Lviv, ancienne capitale de la Galicie austro-hongroise et aujourd'hui capitale culturelle de l'Ukraine.
Avant d'envisager avec vous les progrès de la mise en oeuvre de l'accord d'association qui lie l'Union européenne et l'Ukraine, accord entré en vigueur le 1er septembre 2017, je souhaiterais vous faire part des impressions personnelles que j'ai retirées de ce premier contact avec l'Ukraine.
Le premier élément qui m'a frappée est le lien inextricable, aux yeux des Ukrainiens, entre leurs relations avec l'Union européenne et celles qu'ils veulent nouer avec l'OTAN. En arrivant à Kiev, j'ai trouvé le centre-ville pavoisé de grandes banderoles bleues célébrant le soixante-dixième anniversaire de l'Alliance atlantique ; un peu plus tard, on m'a indiqué l'ancien musée Lénine, devenu Maison de l'Europe.
Au-delà des symboles, l'opinion publique adhère largement à un destin européen et tourne résolument le dos à ce que certains appellent maintenant l'« occupation » russe. L'Ukraine aspire à une intégration euro-atlantique qui comprendrait l'adhésion tant à l'Union européenne qu'à l'OTAN. De ce fait, au cours de nos entretiens officiels, les aspects plus concrets de l'application de l'Accord d'association ont souvent été relégués au second plan. L'obligation morale essentielle qui guide nos interlocuteurs est bel et bien le retour de leur pays sur la carte de l'Europe.
La deuxième impression que j'ai ressentie a été une profonde tristesse. La guerre du Donbass a déjà fait 13 000 morts ; durant les quatre jours de ma présence en Ukraine, ce conflit a fait vingt-trois victimes supplémentaires. Les murs du monastère Saint-Michel-au-Dôme-d'or, au coeur de Kiev, sont couverts de photos de soldats et de civils morts dans le Donbass ; des cierges brûlaient, des familles pleuraient, vision de détresse sous un si beau soleil. Cette guerre était par ailleurs présente dans tous nos entretiens.
Ma troisième impression a été forgée par l'ampleur des contrastes que j'ai remarqués entre la capitale et la province, mais aussi entre l'est et l'ouest de l'Ukraine. Ils sont si forts que je m'interroge sur la difficulté qu'aura le nouveau gouvernement de l'Ukraine à maintenir l'unité du pays autrement que par un sentiment d'appartenance nationaliste, lequel s'est fortement affirmé depuis la naissance des conflits séparatistes et l'ingérence russe.
Après ces remarques liminaires, j'en viens à la place de l'Ukraine dans le Partenariat oriental et à la mise en oeuvre de l'Accord d'association.
Le Partenariat oriental a été conçu comme une offre faite à des États soucieux de rester libres et démocratiques, et non comme un chemin qui conduirait automatiquement à l'adhésion à l'Union. Nous avons parfois eu du mal à le faire comprendre à nos interlocuteurs de ces pays ! Le Partenariat n'est qu'une première marche ; l'adhésion à l'UE ne peut advenir que longtemps après la signature d'un accord d'association et d'un accord de libre-échange ; ceux-ci ne constituent, pour l'UE comme pour ces pays, ni une promesse ni une obligation.
L'Ukraine a signé ces deux accords destinés à rapprocher ce pays de l'Union européenne sur le plan politique, mais aussi sur le plan économique ; il s'agit également de réaffirmer que nous partageons des valeurs communes à l'Europe tout entière depuis longtemps. Un troisième accord a par ailleurs été signé pour la libéralisation du régime des visas.
Depuis 2014, l'Ukraine s'est engagée dans une politique ambitieuse de réformes visant à stabiliser son économie et à améliorer le niveau de vie de ses ressortissants.
Parmi les priorités, il faut noter la lutte contre la corruption, la réforme judiciaire, la réforme constitutionnelle, la réforme des modes de scrutin, l'amélioration du climat des affaires, la réforme énergétique et la réforme de l'administration et de l'organisation territoriale. L'Union européenne a prévu d'aider l'Ukraine dans la réalisation de cette politique exigeante, à hauteur de 12,8 milliards d'euros sur les sept ans qui viennent (11 de prêts ; 1,8 de dons).
Quatre objectifs majeurs sont visés par cet ambitieux programme de réformes.
Il s'agit, d'abord, d'aller vers une meilleure gouvernance, ce qui implique un programme de décentralisation et le renforcement de l'administration territoriale, la formation de nouveaux fonctionnaires, un programme de lutte contre la corruption et un programme de développement du secteur privé.
Le deuxième objectif consiste à aller vers une plus grande connectivité. Le premier enjeu, de ce point de vue, est l'approvisionnement énergétique et la distribution de l'énergie. Il convient d'établir un régulateur indépendant, de moderniser le transport du gaz, de garantir que les conséquences de Tchernobyl restent maîtrisées et de s'assurer que l'indépendance énergétique vis-à-vis de la Russie continue à s'améliorer. Enfin, il faut poursuivre l'oeuvre de reconnexion de l'Ukraine au reste de l'Europe par la route et le rail.
Le troisième objectif est la consolidation de l'économie ukrainienne. Pour atteindre ce but, il faut que l'accord de libre-échange puisse s'appliquer, ce qui implique un contrôle des normes et des douanes efficace, ainsi qu'un plus grand développement du secteur privé.
Enfin, le quatrième objectif consiste à se diriger vers une société civile plus unie et en lien avec l'Ouest. Depuis le 11 juin 2017, les Ukrainiens dotés d'un passeport biométrique ont la possibilité d'entrer sur le territoire de l'UE sans visa. 5 000 étudiants ukrainiens bénéficient du programme Erasmus. Des actions doivent encore être menées pour renforcer la cohésion de la société civile et lui permettre de faire face aux pressions déstabilisatrices engendrées par ce vaste programme de réformes.
Les progrès accomplis ne sont pas négligeables. À en croire le dernier rapport de la Commission européenne, qui remonte à 2018, des progrès notables ont été accomplis et un grand nombre de lois ont été adoptées concernant le droit de la propriété intellectuelle, l'environnement, le droit des affaires, la sécurité alimentaire et l'énergie.
Il est en outre avéré que des progrès appréciables ont été enregistrés par la Commission européenne dans le contrôle sanitaire et phytosanitaire, la concurrence, les services commerciaux, la transparence, les marchés publics, les barrières non tarifaires, l'environnement, l'action contre le réchauffement climatique, les services financiers, les douanes, la comptabilité et le contrôle de gestion.
Quant aux réformes effectivement mises en oeuvre, elles concernent surtout les retraites, la santé et l'éducation. La mise en oeuvre de la réforme de l'administration et de la décentralisation entamées dès 2014 se poursuit avec régularité. Dans le domaine judiciaire et celui de la lutte contre la corruption, la Commission déplore un rythme plus lent. La loi créant la Haute Cour contre la corruption a été adoptée en juin 2018, mais sa mise en place est toujours en cours. Le système automatisé des déclarations de patrimoine des élus et de la haute administration est également en cours de réalisation, à un rythme peu satisfaisant. La question délicate de l'obligation qui devrait être faite aux membres étrangers des conseils d'administration des entreprises d'État de déclarer leur patrimoine est toujours en suspens.
Pour autant, les privatisations se poursuivent, aidées par la réforme du secteur bancaire et le renforcement des règles et de la supervision. On regrette toutefois que le problème des prêts non performants ne soit toujours pas réglé et que la réforme des banques d'État se fasse attendre. Le cas de la PrivatBank est emblématique : cette banque privée, fondée en 1992, a été nationalisée en 2016 quand elle a connu des difficultés et accuse toujours une perte de 5,5 milliards de dollars, apparemment détournés par ses précédents propriétaires, dont l'oligarque Ihor Kolomoïski, qui serait un proche de l'actuel Président.
Le rapport fait état de peu de progrès dans la création d'opérateurs et de distributeurs privés et indépendants de gaz et d'électricité.
À ce propos, les contrastes sont frappants en matière de dureté de la vie : si, à Kiev ou à Lviv, il y a l'électricité, l'eau courante et l'assainissement, il n'y a en revanche plus rien à la campagne, hormis l'électricité !
Il est aussi rappelé dans le rapport de la Commission européenne que l'économie de l'Ukraine reste dépendante du FMI et des programmes d'assistance de l'UE. En revanche, le même rapport salue une loi importante pour le secteur de la sécurité intérieure.
Le rapport indique que tous ces progrès se font malgré les manoeuvres de déstabilisation lancées par la Russie dans l'est du pays, notamment son ingérence dans le Donbass et son appropriation de la mer d'Azov.
La bonne gouvernance passe aussi par une bonne organisation territoriale. Or la réforme de la décentralisation date de 2015 et piétine encore, même si elle a déjà permis un regroupement communal, qui s'effectue sur la base du volontariat, mais est fortement encouragé par des reversements substantiels du produit de l'impôt national et par la bonification des dotations. C'est ainsi que l'Ukraine comptait avant 3 372 communes et n'en compte plus que 725.
Pour autant, nous n'avons pas vraiment ressenti sur le terrain les effets de cette décentralisation. Les fonds promis ne semblent profiter qu'aux agglomérations centrales et à leur première couronne ; on observe des ruptures d'égalité flagrantes dans l'organisation territoriale !
Concernant la justice, la liberté et la sécurité, le Bureau national ukrainien contre la corruption a lancé 644 enquêtes, mais elles n'ont abouti qu'à 21 mises en examen. Il a été créé une cour anticorruption. Une réforme de la police est en cours.
Les indicateurs économiques se sont améliorés en 2018 : la croissance du PIB s'établit à 3,5 %, contre 2,5 % en 2017 ; le déficit à 1,7 %, contre 2,2 % ; l'inflation à 8,9 %, contre 14,4 % ; le taux de chômage à 9,2 %, contre 9,4 %. Les investissements étrangers sont soutenus : ils s'élevaient à 2,3 milliards de dollars en octobre 2018 ; en revanche, les douanes fonctionnent encore trop peu efficacement, le développement des PME est particulièrement lent, et la réforme agraire progresse difficilement, notamment en raison du défaut de fiabilité du cadastre.
Même si nous pouvons trouver les progrès encore peu satisfaisants, il m'a semblé que nous ne devions pas relâcher nos efforts en faveur de l'Ukraine, qu'il s'agisse de la politique du Partenariat oriental ou de la recherche d'une solution apaisée au conflit du Donbass grâce aux rencontres au format « Normandie ».
Le projet européen que nous soutenons en Ukraine n'est en rien une menace pour la Russie ; le Partenariat oriental n'est pas une machine de guerre, mais une proposition faite à nos amis de l'Est.
En avril 2019, Volodymyr Zelenskyi, un comédien et producteur de télévision de 41 ans, a remporté l'élection présidentielle avec plus de 73 % des voix au second tour contre le sortant Petro Poroshenko. Il était lancé en politique à peine quatre mois plus tôt avec la déclaration de sa candidature. Auparavant, il était surtout connu pour son rôle auto-écrit dans la célèbre série télévisée Servant of the People où, en tant que professeur d'histoire, il est propulsé à la présidence pour nettoyer son pays de la corruption. Son statut de nouveau venu en politique et d'artiste représente le rejet du peuple à l'égard des politiciens et sa faible confiance dans les institutions. La corruption persiste et les oligarques conservent leur contrôle sur la politique, les médias et l'administration. De plus, le conflit dans le Donbass, où les escarmouches et les pertes n'ont pas cessé, pourrait se durcir à nouveau. Le contrôle de facto de la mer d'Azov par la Russie a de graves répercussions sur les ports ukrainiens limitrophes. Enfin, le conflit risque de compliquer la question du transit du gaz de la Russie vers l'UE par l'Ukraine, alors que l'accord conclu il y a dix ans entre Gazprom et Naftogaz, qui génère des redevances fluctuant entre 2,5 et 3 % du PIB ukrainien, arrive à expiration le 31 décembre 2019. Toutefois, la majorité absolue en siège obtenue par le parti présidentiel « Servant of the People » aux législatives de juillet 2019 pourrait faciliter les réformes
Notre espoir est celui d'un progrès économique et démocratique continu vers l'Est, projet qui permettrait d'effacer petit à petit les différences encore criantes entre les deux moitiés de notre continent. Souvenez-vous de ce que nous disaient les Ukrainiens avant la signature de l'Accord d'association : « En 1989, les Polonais étaient aussi pauvres que nous ; aujourd'hui, ils sont quatre fois plus riches que nous. Faites que nous devenions aussi riches que les Polonais ! »
Je tempérerai cette conclusion en évoquant un entretien très émouvant que nous avons eu avec le maire de Lviv. Il a une espérance démesurée dans l'Europe, serait même prêt à accepter le désarmement de son pays s'il était placé sous notre protection, mais il se sent aujourd'hui quelque peu esseulé. Que faire pour conforter nos amis ukrainiens ? Si nous pouvions les aider, nous ne ferions pas mentir l'adage : « Aide-toi et le ciel t'aidera ! »
M. Jean Bizet, président. - Et l'Europe t'aidera aussi !
M. René Danesi. - Je veux remercier Mme Jourda pour son rapport extrêmement intéressant, mais je tiens à le replacer dans son contexte historique et géopolitique.
Le Partenariat oriental a connu des résultats très intéressants en Géorgie, mais je suis beaucoup plus sceptique concernant l'Ukraine, pour plusieurs raisons.
L'Ukraine connaît des problèmes existentiels. C'est un État dont les frontières ont toujours été définies par Moscou et non par les Ukrainiens eux-mêmes. Cet État a connu une éclipse de sept siècles entre les invasions mongoles et 1917, et encore : la république créée alors sous protection allemande a vite été balayée par les bolchéviques. En 1922, l'Ukraine a réapparu, mais sous la forme d'une république vassale intégrée à l'URSS. Elle ne contenait alors ni la Crimée ni la Galicie : cette dernière lui a été intégrée en 1940 à la suite du partage de la Pologne entre Hitler et Staline ; la Crimée a quant à elle été offerte par Khrouchtchev à l'Ukraine en 1954, hormis Sébastopol, port stratégique sur lequel Moscou voulait conserver un contrôle direct.
Il est intéressant de noter que, lors du référendum organisé par Mikhaïl Gorbatchev en 1991 sur l'avenir de l'Union soviétique, auquel plusieurs républiques ont refusé de participer, l'Ukraine a très largement voté en faveur du maintien de l'URSS. Cela montre l'influence politique et psychologique exercée par Moscou, influence dont l'Ukraine peine à se défaire. En 2014, Moscou a repris la Crimée, parce que Vladimir Poutine n'avait aucune envie de voir la marine américaine mouiller à Sébastopol en lieu et place de la flotte russe, ce qui peut se comprendre.
Il faut ensuite noter le poids économique et politique majeur des oligarques dans ce pays qui a, du fait de son histoire, un personnel politique de deuxième choix. L'URSS a tout fait pour cela. Ses efforts ont commencé avec l'Holodomor, famine sciemment organisée par Staline et qui a tué 3,9 millions d'Ukrainiens entre 1932 et 1933 : la paysannerie a été décimée. En outre, avant même le massacre de Katyn, Staline a liquidé toute l'intelligentsia ukrainienne. Il n'y avait plus d'élite, et celle qui s'est reformée était communiste et soumise à Moscou, pour sa propre survie. L'Ukraine a donné trois secrétaires généraux au Parti communiste de l'Union soviétique : Khrouchtchev, Brejnev et Tchernenko. En outre, l'économie ukrainienne était profondément intégrée avec l'économie russe.
C'est pourquoi, quand l'Union soviétique a éclaté, les oligarques ont dépecé le pays et vivent encore aujourd'hui sur la bête ! Malheureusement, les Ukrainiens n'ont pas eu de Poutine et de FSB pour les en débarrasser. Derrière chaque président ukrainien, quelle que soit sa tendance politique, il y a eu un ou plusieurs oligarques, ce qui explique une corruption généralisée, combattue avec plus ou moins d'ardeur.
Le troisième problème majeur de l'Ukraine est l'influence extraordinaire qu'y ont les nationalistes. C'est le seul pays européen où l'on peut parader en uniforme de la Wehrmacht, voire de la SS ! Cela peut en partie s'expliquer par la réaction antisoviétique consécutive à l'Holodomor, qui a conduit à la création de la division SS Galicie, acteur majeur de la Shoah par balles, mais qui, outre les Juifs, a également massacré environ 100 000 Polonais. Ces nationalistes, antisémites, antipolonais, antisoviétiques et antirusses, sont aujourd'hui également anti-UE ! Certes, c'est une minorité, mais elle est très agissante et influente. Ainsi, le 1er janvier 2014, le parti d'extrême droite Svoboda a célébré le cent-cinquième anniversaire de Stepan Bandera, figure de la collaboration avec les nazis, par des marches aux flambeaux en uniformes de la division SS Galicie. En automne 2014, le président Porochenko a institué la Journée des défenseurs de l'Ukraine, fixée au 14 octobre, date de la fondation du parti de Bandera. Les bataillons Azov, dignes héritiers de la division Galicie, néonazis revendiqués, se battent contre les séparatistes prorusses avec l'aval et sous le commandement du ministère de la défense ukrainien, avec des méthodes pour le moins expéditives, torture comprise. Le 13 octobre dernier, le Premier ministre ukrainien était présent à un concert néonazi !
Enfin, l'Ukraine est devenue un enjeu géostratégique entre, d'une part, la Russie et, d'autre part, les États-Unis et leur sous-traitant, l'Union européenne, qu'ils chargent d'appâter l'Ukraine. Il faudrait pourtant ajouter quelques zéros aux montants octroyés au titre de l'aide à cet État. En Géorgie comme en Albanie, j'ai déjà été frappé par la faiblesse des aides européennes par rapport aux besoins de ces pays. Il ne faut pas s'étonner que leurs populations attendent avant tout des visas, pour faire leurs valises ! Si l'on veut que le Partenariat oriental soit efficace, il faut plutôt trouver les moyens financiers nécessaires pour aider ces pays. N'oublions pas que cela ne peut que profiter aux entreprises européennes !
En somme, je ne suis pas optimiste sur le Partenariat oriental, en particulier pour l'Ukraine, prise dans un maelstrom qui la dépasse !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Mon cher collègue, j'ai eu l'impression d'entendre un texte écrit par un membre du KGB ou de la garde rapprochée de Vladimir Poutine ! Franchement, c'est ce que j'entends les prorusses dire depuis 2014 ! Quant au référendum de 1991, vous savez bien comment les élections se passaient en URSS. Les gens avaient peur !
Je tiens en revanche à féliciter Mme Jourda pour son excellent rapport. Elle relate avoir vu partout le drapeau de l'OTAN ; en 2014, sur la place Maïdan, parmi les révolutionnaires, il n'y avait que des drapeaux européens. Je rejoins donc, malgré tout, les dernières phrases de René Danesi : il est vrai que les Ukrainiens ont été extrêmement déçus par l'Europe.
Mme Gisèle Jourda. - Tout à fait !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Toute l'Europe centrale et orientale fait le lien entre UE et OTAN. Je regrette beaucoup, de ce point de vue, les annonces du Président de la République sur l'élargissement de l'Union, qui sont très décourageantes pour ces pays. Heureusement, le discours de M. Le Drian à Prague les a quelque peu rattrapées. Il est important que notre commission travaille sur ces sujets.
M. Jean Bizet, président. - Ce sujet provoque beaucoup d'émotions et il est extrêmement important du point de vue géostratégique.
Mme Gisèle Jourda. - Certes, l'histoire des peuples importe, monsieur Danesi, mais le but de ma communication était plutôt de restituer ce que vit l'Ukraine en ce moment. Ce pays connaît un tiraillement entre la volonté d'indépendance, ou d'Europe, d'une partie de la population, et les craintes des nombreux russophones. Le nouveau Président de la République est d'ailleurs russophone. Nous avons voulu prendre la température de ce pays. Il faut selon moi éviter de laisser ces pays esseulés et, pour cela, consolider le Partenariat oriental.
Conférence interparlementaire sur les priorités de la politique étrangère de l'Union européenne pour le nouveau cycle institutionnel du 4 décembre 2019 : communication de Mme Gisèle Jourda
M. Jean Bizet, président. - Mme Jourda va maintenant nous relater la récente conférence interparlementaire organisée par la commission des affaires étrangères du Parlement européen sur les priorités de la politique étrangère de l'Union européenne pour le nouveau cycle institutionnel. Cela aussi tombe à point nommé après les propos du Président de la République sur l'élargissement de l'UE.
Mme Gisèle Jourda. - Je me suis en effet rendue à Bruxelles le 4 décembre dernier pour participer à cette conférence. Notre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées y participait également, représentée par notre collègue Ronan Le Gleut.
Nous avons ainsi pu échanger avec M. Josep Borrell, vice-président de la Commission, haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune, puis avec Olivér Várhelyi, commissaire chargé du voisinage et de l'élargissement.
Parallèlement à cette conférence, je me suis également entretenue avec la conseillère en charge des Balkans occidentaux et de l'Association européenne de libre-échange (AELE) à la représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne, puis avec l'ambassadrice, représentante permanente de la France au Comité politique et de sécurité (COPS) de l'Union européenne.
Cette conférence intervenait dans un contexte marqué par les déclarations du Président de la République sur l'état de « mort cérébrale » de l'OTAN et par la décision du Conseil européen d'ajourner l'ouverture des négociations d'élargissement avec l'Albanie et la Macédoine du Nord.
Je vais plus particulièrement évoquer les enjeux relatifs à l'élargissement, qui ont été au coeur des échanges de cette journée, mais je voudrais auparavant vous dire quelques mots sur l'OTAN et la situation au Sahel, sujets qui ont également été évoqués lors de cette journée.
S'agissant de l'OTAN, sans surprise au regard de sa fonction, la représentante permanente de la France au COPS nous a tenu un discours très optimiste concernant les propos tenus par le Président de la République, propos qu'à titre personnel je partage largement. Elle a reconnu que ce discours « de vérité » avait heurté certains États membres, mais elle a minimisé l'ampleur des réactions négatives qui ressortent des déclarations publiques.
Elle nous a fait valoir que les propos du Président de la République étaient en réalité mieux compris que certaines déclarations ne le laissaient supposer : de fait, de nombreux États membres constatent les difficultés de fonctionnement de l'OTAN.
Elle a également souligné la montée en puissance progressive de la politique de sécurité et de défense commune et insisté sur l'importance de la création d'une nouvelle direction générale relative à l'industrie de la défense et de l'espace, mais aussi de la mise en place du Fonds européen de défense.
Compte tenu du mode de fonctionnement des institutions européennes, elle a appelé à considérer ces développements dans une perspective de moyen terme, en dressant un parallèle avec les développements constatés dans le domaine de la justice et des affaires intérieures.
Lors de la conférence interparlementaire, M. Borrell a mis en avant le retour d'une concurrence stratégique entre grandes puissances. Selon lui, l'OTAN restera le cadre fondamental de défense de la plus grande partie des États européens. Il a toutefois relevé un certain nombre de défis, qui font écho au constat dressé par le Président de la République : l'attention croissante des États-Unis envers l'Asie, le manque de cohérence des États-Unis concernant la situation en Syrie et dans le Golfe, le lien entre l'engagement des États-Unis et ses intérêts économiques, mais aussi le Brexit.
Il a jugé nécessaire de renforcer l'OTAN tout en développant des capacités complémentaires au niveau de l'Union européenne, car il a reconnu que l'OTAN n'était pas l'outil adapté pour faire face à certains défis comme les menaces hybrides ou le terrorisme. Il a souligné la nécessité pour les États européens de se forger une culture stratégique commune et de se montrer en capacité d'agir plus rapidement.
Dans le prolongement de sa présence remarquée aux Invalides lors de l'hommage national rendu aux treize soldats morts en opération, M. Borrell a également évoqué la situation au Sahel, une zone qu'il connaît bien. Répondant à notre collègue Ronan Le Gleut, il a estimé que l'Union européenne « ne fait pas assez ». Selon lui, il n'y aurait pas d'unanimité pour déclencher une mission de maintien de la paix européenne, mais des démarches volontaires pourraient permettre de mobiliser des moyens européens supplémentaires au Sahel.
J'en viens à la question de l'élargissement et de la perspective donnée aux Balkans occidentaux, qui a été au coeur des échanges de cette journée. Je vous rappelle que, lors du Conseil européen des 17 et 18 octobre, la France a marqué son refus d'ouvrir le processus d'adhésion pour l'Albanie et la Macédoine du Nord.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Hélas !
Mme Gisèle Jourda. - Concernant l'Albanie, le point de vue français était partagé par le Danemark et les Pays-Bas. En revanche, la France était officiellement isolée pour ce qui est de la Macédoine du Nord. Le découplage des deux dossiers n'aurait pas permis de surmonter la difficulté, un certain nombre d'États membres refusant cette perspective.
Les réactions de nombreux États membres et de la Commission ont été vives, le Président Juncker parlant même « d'erreur historique ».
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Absolument !
Mme Gisèle Jourda. - La conseillère en charge des Balkans occidentaux à notre représentation permanente a rappelé que la France ne remettait nullement en question la perspective européenne des Balkans occidentaux. En revanche, elle a appelé à ne pas engendrer de confusion en utilisant l'élargissement comme un moyen de stabiliser ces pays.
Elle a également souligné la divergence d'appréciation entre la France et la Commission quant aux conclusions à tirer de l'évaluation de la situation en Albanie et en Macédoine du Nord : la France estime que les critiques formulées par la Commission elle-même empêchaient d'aboutir, à ce stade, à l'ouverture de négociations d'adhésion avec ces deux pays.
Plus largement, le Gouvernement considère que la politique d'élargissement telle qu'elle a été menée a perdu de sa cohérence, qu'elle s'appuie sur un processus inadapté, qu'elle n'empêche nullement les influences extérieures à l'Union de s'exercer dans ces pays et qu'elle est, en l'état, contraire à l'affirmation d'une Europe puissance. Le Président de la République l'a dit très clairement dans l'interview qu'il a accordée à The Economist, dans laquelle il fait de la réforme de l'Union européenne elle-même « une condition préalable, indispensable et honnête » à un nouvel élargissement.
Face aux critiques, le gouvernement français a essayé de reprendre la main en mettant sur la table un « non-papier » proposant une révision du processus d'adhésion. Ce texte plaide pour un processus plus graduel, permettant notamment aux États candidats à l'accession de sentir plus rapidement les effets positifs de leur rapprochement avec l'Union européenne, mais assorti de conditions rigoureuses et d'une appréciation réversible des critères de référence.
La représentation permanente de la France à Bruxelles nous a présenté une vision optimiste de la démarche française, que nous n'avons pas tout à fait retrouvée lors de la conférence interparlementaire.
Josep Borrell a fait valoir qu'il y a aujourd'hui une « grande déception dans les Balkans » et a estimé que « nous ne pouvons pas rejeter la perspective européenne des Balkans ». Répondant à un parlementaire croate et à un membre du Parlement européen, il a affirmé qu'« on ne peut pas remettre en cause la politique de l'Union européenne à l'égard des Balkans occidentaux, qui doivent rester une priorité de notre agenda. À moyen et long terme, rien n'a changé. Nous devons travailler pour garantir le sommet de mai 2020 des Balkans occidentaux à Zagreb. »
De son côté, tout en paraissant faire des ouvertures, le commissaire à l'élargissement Olivér Várhelyi s'est employé à « enjamber » le refus français et, d'une certaine manière, à minimiser l'importance des propositions formulées par la France.
Il a évoqué le refus d'ouvrir les négociations comme une « déconvenue pour un grand nombre d'entre nous », en affirmant que l'engagement de la Commission reste inchangé : « La Commission ne sera pas crédible sur le plan géopolitique si nous ne menons pas à bien nos relations avec nos voisins les plus proches, qui sont plus que des voisins et qui sont au coeur de l'Europe. » Il a souhaité qu'une décision positive pour l'ouverture de ces négociations puisse être adoptée bien avant le sommet de Zagreb. Il a également fait part de son souhait d'accélérer les négociations en cours avec la Serbie et le Monténégro.
La Commission formulera en début d'année prochaine des propositions pour revoir le processus d'adhésion et le rendre plus efficace et plus dynamique. La « méthodologie de l'élargissement » figure d'ailleurs à l'ordre du jour prévisionnel de la réunion du collège de la Commission européenne le 29 janvier 2020.
Le développement économique, l'État de droit et la réforme des institutions publiques devraient être des priorités. Olivér Várhelyi a également évoqué la perspective d'une intégration plus approfondie et plus précoce, en souhaitant que le processus d'adhésion entraîne des changements sensibles. Ces propos semblent faire écho aux propositions formulées par la France dans son « non-papier ». Pourtant, interrogé spécifiquement sur les propositions françaises, le commissaire à l'élargissement a déclaré à plusieurs reprises qu'elles n'étaient qu'un élément de proposition parmi d'autres.
M. Várhelyi viendra à Paris pour mieux comprendre les préoccupations françaises. Il a affirmé être prêt à se pencher sur la méthodologie, mais non sur le principe même de la perspective européenne des Balkans : « Modifier la méthodologie est une chose », a-t-il dit, « remettre en cause la politique d'élargissement en est une autre. » Il a également considéré que la nouvelle méthodologie ne devrait s'appliquer qu'aux nouveaux entrants dans le processus, et non à ceux qui ont déjà entamé les négociations.
J'ai notamment interrogé M. Várhelyi sur l'articulation entre la réforme interne de l'Union et son élargissement. Il m'a répondu que la réforme interne de l'Union ne saurait être un préalable à l'adhésion d'un nouveau membre, en précisant que « l'Union européenne devrait être capable de travailler à nouveau à 28 États membres ».
Il a par ailleurs réfuté la perspective d'un découplage de l'appréciation du dossier de l'Albanie et de celui de la Macédoine du Nord. La Commission considère que ces deux pays ont rempli les critères qui leur étaient imposés au même moment et qu'une décision d'ouverture des négociations avec ces deux pays devrait être prise en même temps. Il a toutefois indiqué avoir bien perçu les préoccupations exprimées concernant la situation de l'Albanie.
Tout en refusant de donner une date précise concernant un prochain élargissement, son but est qu'au moins un pays soit prêt à entrer dans l'Union avant la fin de son mandat, en 2024.
On voit donc, au travers de ces différentes déclarations, que la pression en faveur de l'ouverture de négociations d'élargissement avec l'Albanie et la Macédoine du Nord reste très forte, le sommet de Zagreb apparaissant comme un moment clé du premier semestre 2020.
Monsieur le président, peut-être l'avez-vous également constaté lors de votre déplacement sur place avec nos collègues Nicole Duranton, Claude Kern et Simon Sutour, la semaine dernière.
Des concessions seront vraisemblablement faites à la France sur la méthodologie de l'élargissement. Il faudra toutefois être attentif au détail des propositions qui seront formulées par la Commission en début d'année, pour apprécier s'il s'agit de concessions symboliques ou d'évolutions réellement substantielles.
Même si chacun était dans son rôle, je retire de cette journée l'impression d'un écart notable, à ce stade, entre le discours volontariste de la représentation permanente française et les propos tenus par les commissaires lors de la conférence interparlementaire.
M. Jean Bizet, président. - Le sujet de l'élargissement de l'Union européenne est trop important pour qu'on n'y revienne pas. À la suite du déplacement que Simon Sutour, Claude Kern, Nicole Duranton et moi-même venons d'effectuer, nous reviendrons sur cette question. J'avoue avoir été désagréablement surpris par la position de la France au Conseil européen, compte tenu des efforts accomplis, surtout, par la Macédoine du Nord. Cela dit, la proposition française qui a suivi me paraît plus pertinente quand on l'examine dans le détail. Il faudra voir comment elle sera appréhendée par nos 26 partenaires. Si elle est mise en oeuvre correctement, cette méthode pourra être plus fructueuse que la formule antérieure. Il nous faudra tenir un débat sur ce sujet.
M. René Danesi. - Il faudra aussi que nous évoquions la position de l'Allemagne sur les Balkans, comme il faut le faire sur tout sujet relatif à l'Europe centrale ou à l'Ukraine.
La réunion est close à 15 heures.