Mardi 25 septembre 2018
- Présidence de Mme Corinne Imbert, présidente -
La réunion est ouverte à 20 h 25.
Examen et adoption du rapport de la mission
Mme Corinne Imbert, présidente. - Nous voici parvenus au terme des travaux de notre mission d'information, créée en avril à l'initiative du groupe du RDSE. Nous avons dû décaler cette réunion en raison de l'ordre du jour de la séance ; merci à vous d'être présents à cet horaire peu usuel.
Depuis fin mai et jusqu'à la toute fin du mois de juillet, nous avons mené 23 auditions, tables-rondes ou visio-conférences en réunion plénière qui nous ont permis d'entendre une soixantaine de personnes. Le rapporteur a organisé, par ailleurs, une quinzaine d'auditions ouvertes à l'ensemble d'entre nous. Nous avons complété ces échanges par deux déplacements, les 27 et 30 juillet, à Chemillé-en-Anjou et dans la Drôme, qui ont été particulièrement enrichissants.
Merci de vous être montrés aussi assidus que possible, alors que les agendas de la séance publique et de nos commissions respectives étaient denses sur cette période. Je remercie Joël Labbé pour avoir initié cette réflexion qui nous a permis de rencontrer des acteurs issus d'horizons très divers, passionnés et enthousiasmants.
Nous avons bien perçu l'intérêt et le potentiel de la filière des plantes médicinales pour le développement de nos territoires et sa contribution à la préservation de la biodiversité végétale. Nous avons également entendu combien l'herboristerie, à travers le recours à des soins perçus comme plus naturels, fait écho à des attentes de nombre de nos concitoyens, sur la façon dont ils souhaitent aborder leur santé au quotidien.
Je parle ici de santé au sens large, en vous rappelant la définition qu'en donne l'Organisation mondiale de la santé (OMS) : « un état de complet bien-être physique, mental et social [qui] ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité ».
Lors de notre échange de vues le 25 juillet dernier, nous avons constaté que nous partagions un grand nombre d'orientations, mais également que des divergences s'expriment sur la question d'un métier d'herboriste autonome de celui de pharmacien. J'ai exprimé à cette occasion mes réserves sur ce sujet car il me semble que nous devons rester vigilants et porter notre priorité sur la protection de la santé publique. Le recours aux plantes n'est pas anodin, en particulier chez des patients qui présentent des problèmes de santé ou suivent des traitements lourds ; le « consommateur » de plantes médicinales est aussi un « patient ». Peut-on d'ailleurs distinguer les deux ?
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, le conseil en santé doit donc continuer de se faire sous la responsabilité d'un professionnel ayant en main l'ensemble des connaissances nécessaires. Nous avons pour cela un réseau qui maille le territoire, c'est celui des officines de pharmacie.
Ce point particulier reste discuté entre nous et nous aurons l'occasion de l'évoquer. Je remercie néanmoins le rapporteur d'avoir accepté le dialogue pour ne pas faire de ces divergences un obstacle à l'avancée de nos travaux. Je remercie également ceux d'entre vous qui nous ont adressé au cours de l'été, au-delà de l'échange de vues, des contributions écrites.
Les propositions et le rapport préparé par Joël Labbé, qui sont soumis à notre approbation, ont été mis en consultation. Je vais laisser le soin à notre rapporteur de vous les présenter. Si une grande partie des orientations peut sans doute recueillir un large consensus entre nous, j'ai eu l'occasion d'exprimer à Joël Labbé mes réserves sur celles qui portent sur le point que je viens d'évoquer.
M. Joël Labbé, rapporteur. - À mon tour de vous remercier pour l'intérêt que vous avez porté à ce sujet dont j'ai souhaité, avec mon groupe, l'examen dans le cadre pluri-politique d'une mission d'information du Sénat. Je remercie Mme la présidente de nous avoir permis de mener, avec un esprit d'ouverture, un travail dense, passionnant, très attendu par les acteurs, au carrefour de questions sociétales. Nous l'avons mesuré au fil de nos travaux, ce sujet est au croisement de nombreux enjeux d'avenir : relatifs à la santé, à l'environnement, au développement des territoires. L'herboristerie est à la fois héritage de savoirs traditionnels, populaires, mais aussi une source potentielle d'innovations et de nouveaux usages, en santé comme dans d'autres domaines.
Les questions posées sont complexes. Le travail que nous avons mené est nécessaire et utile et je suis heureux que nos travaux se soient déroulés, grâce à vous tous, dans un climat apaisé, respectueux des opinions des uns et des autres.
Le sujet avait jusqu'alors donné lieu à des initiatives politiques - plusieurs propositions de loi, notamment celle présentée en 2011 par Jean-Luc Fichet et plusieurs sénateurs de son groupe, et des questions écrites - ciblées sur la renaissance d'un métier d'herboriste qui a bénéficié d'un statut en France de 1803 à 1941. Toutefois, il n'y avait jamais eu de mise à plat portant sur l'ensemble de la filière : or, il y avait une cohérence à se pencher sur toute la chaîne de valorisation de la ressource végétale.
Nos auditions et travaux ont permis cette consultation large. C'est en soit une avancée déjà importante. Le rapport dont vous avez pu prendre connaissance marque pour moi un point de départ. Si vous en approuvez la publication, je souhaiterais, comme je l'ai proposé à Mme la présidente, que nous demandions dans les prochaines semaines l'inscription d'un débat en séance publique.
J'en viens aux principales propositions qui vous sont soumises, sans être exhaustif pour laisser la place aux échanges ; ces orientations s'inscrivent dans le prolongement de notre échange de vues. Elles sont aussi nourries de contributions écrites de certains d'entre vous.
J'ai eu l'occasion, comme la présidente l'a rappelé, d'en discuter longuement avec elle avant notre réunion et je prends la mesure de ses réserves. Je tiens toutefois à ce que nous ayons un débat entre nous.
Le premier axe touche à la dimension patrimoniale de la culture et de l'usage des plantes médicinales. Nombre des acteurs que nous avons entendus s'inscrivent dans une démarche de transmission, de sauvegarde de savoirs et de savoir-faire ancestraux qui sont également une source précieuse de connaissances à redécouvrir. Tout comme la matière végétale est vivante, il s'agit bien de valoriser un patrimoine vivant, non pas figé dans le passé. C'est le sens d'une série de propositions que je vous soumets, comme l'idée d'une inscription à la liste du patrimoine culturel immatériel de l'Unesco que pourraient porter plusieurs pays au-delà du nôtre.
D'autres propositions portent sur l'amont de la filière, à savoir la production agricole des plantes médicinales, englobée dans la filière des PPAM, les plantes à parfum, aromatiques et médicinales. Les surfaces cultivées ont augmenté de 40 % de 2010 à 2016 du fait de l'augmentation du nombre d'exploitations, soit en diversification d'autres cultures, soit comme activité principale, essentiellement sur des petites parcelles souvent désertées par l'agriculture conventionnelle. Nous savons l'impact socio-économique que cette activité peut avoir dans des territoires ruraux.
Cette dynamique s'ancre sur des marchés porteurs en aval, mais elle se heurte à des freins : des freins réglementaires - j'y reviendrai - mais aussi la concurrence de pays à plus bas coûts de production, à laquelle est exposée cette filière consommatrice en main-d'oeuvre. Par exemple, nous importons, outre des plantes exotiques, du thym en provenance de Pologne, alors que celui-ci pousse parfaitement sous nos latitudes.
Les propositions que je vous soumets visent à adapter l'offre de formation professionnelle agricole à cette dynamique de croissance, à structurer ses acteurs, hétérogènes et éclatés, pour renforcer les logiques de coopération ou de mutualisation.
Les particularités de cette production d'une matière végétale emportent en effet des coûts de contrôle qualité qui pèsent lourdement sur les producteurs. Il paraît en outre indispensable de mieux aider cette filière en ajustant les aides à sa réalité économique, alors que plus de la moitié des exploitations couvrent moins de 5 hectares.
Un autre axe est de promouvoir une filière française d'excellence et écoresponsable. La production de PPAM est déjà exemplaire avec une part de surfaces cultivées en agriculture biologique déjà plus de deux fois supérieure à celle des autres surfaces agricoles ; parallèlement de nombreuses démarches d'agrobiologie sont portées par de petits producteurs. La nature de cette production et sa destination rendent cette exigence prioritaire. Je vous propose donc de fixer une haute ambition de développement des surfaces en « bio », avec un renforcement des aides à la conversion, mais aussi de valoriser les externalités positives de la filière en matière environnementale. Par ailleurs, la création d'un label « plantes de France » évoquée lors de nos auditions serait un moyen de donner une plus forte visibilité à notre production.
La recherche en agronomie, dont on nous a souligné le caractère très insuffisant aujourd'hui, doit également être soutenue pour répondre à des enjeux comme celui du réchauffement climatique.
Nous avons porté au cours de nos travaux une attention particulière aux outre-mer, sous le regard attentif de notre collègue Maurice Antiste, qui m'a demandé d'excuser son absence, étant retenu par la visite du président de la République. Ces régions, riches de traditions, abritent 80 % de notre richesse végétale : mais cela a été longtemps oublié. La valorisation de cette ressource présente un intérêt réel, au service de la diversification des cultures agricoles, de la biodiversité et du développement économique local. Il faut travailler avec chacun de ces territoires à une stratégie de structuration de la filière, encore souvent embryonnaire, en développant l'offre de formation correspondante, elle aussi inadaptée au potentiel d'emplois.
J'en viens au cadre réglementaire de la commercialisation des plantes médicinales et produits à base de plantes dont on nous a souligné la grande complexité ; le rapport l'expose, je n'y reviendrai pas en détail. Cette complexité se justifie car nous parlons d'une matière vivante, en lien avec la santé ; mais on note certaines limites. Ainsi, le caractère segmenté des normes ne permet pas une information complète sur des produits multi-usages comme les huiles essentielles. Comme on nous l'a dit à plusieurs reprises, c'est aussi un véritable casse-tête pour les petits producteurs dont l'activité repose en grande partie sur la vente directe : il est utile de les aiguiller dans ce maquis réglementaire, mais aussi d'ajuster certaines normes inadaptées au caractère artisanal de leur activité, comme c'est le cas en cosmétique. Cela ne doit pas conduire à transiger, toutefois, avec la qualité et la sécurité.
Je vous propose aussi de réexaminer la liste des 148 plantes médicinales sorties en 2008 du monopole pharmaceutique, pour y inclure des plantes ultramarines (inscrites seulement en 2013 à la pharmacopée) et des plantes métropolitaines ne présentant pas de risque d'usage particulier. Certains s'étonnent que près de 1 000 plantes puissent être vendues hors pharmacie sous forme de gélules dans des compléments alimentaires, mais pas sous forme d'infusette de tisane. Il faut bien sûr rester très prudent, mais un nouvel examen s'impose. Il me semblerait également utile d'associer à cette liste de plantes en vente libre leurs usages traditionnels contre de petits maux du quotidien, dans un cadre validé et sécurisé, pour canaliser une information aujourd'hui éclatée sur Internet qui n'est pas toujours de qualité. Un cadre national de ce type existe nous a-t-on dit en Autriche.
Une autre évolution, évoquée par des industriels du complément alimentaire, vise à débloquer l'évaluation des allégations de santé concernant les plantes, dont le niveau de preuves attendu n'est pas adapté à la spécificité des plantes. Il est en effet plus exigeant à ce jour que celui pour les médicaments à base de plantes. Il s'agit là aussi, au final, de favoriser une information transparente des consommateurs.
La réglementation se révèle enfin un frein dans certains domaines spécifiques : c'est le cas pour les soins vétérinaires, mais aussi sur la filière de production du chanvre à usage thérapeutique. Les représentants de cette filière solide en France, tournée vers le secteur de l'industrie, s'inquiètent de leur désavantage sur le marché international. L'ouverture proposée concerne la production, elle ne vaut pas prise de position sur l'usage thérapeutique du cannabis.
Un autre axe du rapport concerne la prise en compte, à leur juste place c'est-à-dire en complémentarité, des soins à base de plantes au sein du système de santé. L'OMS, qui donne une définition large de la santé comme l'a rappelé Mme la présidente, promeut aussi les médecines traditionnelles aux côtés des médecines conventionnelles. Les auditions ont montré que l'intérêt du recours aux plantes se pose en santé humaine comme en santé animale, notamment pour réduire le recours aux antibiotiques. Cette dimension doit donc être mieux intégrée dans la formation des professionnels compétents.
Il faut aussi pouvoir s'appuyer sur des travaux de recherche solides pour confirmer les usages traditionnels ou affiner la connaissance sur les vertus thérapeutiques des plantes ou leurs risques d'utilisation : la création d'un institut spécialisé en phyto et aromathérapie serait une piste en ce sens.
Bien sûr le pharmacien est au coeur du conseil en santé associé à la vente de plantes médicinales. Déjà les facultés de pharmacie assuraient jusqu'en 1941 la formation des herboristes et les pharmaciens sont, à l'origine, également herboristes, même si leur degré d'implication dans ce domaine est variable. Plusieurs propositions visent à consolider ce rôle et cette spécialisation. Cela répond d'ailleurs à des attentes des praticiens comme le montre l'essor des diplômes universitaires en phyto-aromathérapie depuis 10 ans. Pour les professionnels ultra-marins, les enseignements doivent bien entendu être basés sur la pharmacopée locale pour bien la valoriser.
Cela doit-il faire obstacle à la reconnaissance de métiers d'herboristes distincts de celui de pharmacien, que ce soit l'herboriste « de comptoir » ou le paysan-herboriste ? À titre personnel, pour sécuriser leurs pratiques et préserver ces compétences, je suis favorable à une telle reconnaissance, tout en l'encadrant : c'est-à-dire un socle de formation solide, une charte d'exercice précisant la portée de l'information qu'ils sont susceptibles d'apporter et les limites à leurs prérogatives. L'exemple de la Belgique est intéressant : il ne s'agirait surtout pas de faire de l'herboriste un thérapeute et tout diagnostic serait bien sûr exclu. L'herboriste pourrait proposer seulement les produits en vente libre, et donner des informations validées sur les usages traditionnels de ces plantes. Son rôle se situerait dans le domaine du bien-être et des petits maux du quotidien. Cela suppose un travail en bonne intelligence avec les professionnels de santé, comme cela se passe d'ailleurs sur le terrain. J'entends les réticences que cela suscite, de la part des représentants des médecins ou des pharmaciens qui y voient un risque de perte de chances pour les patients ou de confusion. Mais on trouve aussi des pharmaciens pour qui les herboristes pourraient avoir un rôle, pour donner des informations sur les nombreux produits aujourd'hui vendus hors pharmacie. Il me semble donc qu'un encadrement de ces métiers pourrait être un rempart contre le charlatanisme, et répondrait aux attentes des patients ou consommateurs qui se tournent et se tourneront, quoi qu'on en dise, vers d'autres sources de conseil et d'information. Il suffit de voir que 90 % des huiles essentielles sont vendues hors des officines, sur Internet ou dans des boutiques.
Si nous devions constater un désaccord entre nous sur ce sujet, il me semble néanmoins essentiel de poursuivre la réflexion dans un cadre pluri-politique, comme nous l'avons fait au cours de cette mission. Je propose un groupe de travail ou, à défaut, un cadre informel, pour envisager, dans la concertation, des évolutions y compris au niveau législatif.
Parallèlement, nous avons constaté plusieurs initiatives en matière de formation, tant à destination des herboristes de comptoir que des paysans-herboristes : cela montre qu'il y a une demande, une attente réelle sur le terrain. Selon moi nous aurions tout à gagner à accompagner cette professionnalisation. Je suis à présent à l'écoute de vos observations.
M. Alain Milon. - Vous m'excuserez, mais je vais devoir vous quitter rapidement. Il y a deux ou trois ans, j'avais commis un rapport avec M. Mézard sur les dérives médicinales et sectaires en matière de santé. Nous avions rencontré divers charlatans qui soignaient par les plantes ; certains préconisaient ainsi des lavements par la chicorée pour soigner des cancers du côlon.
Je suis très réservé sur les soins par les plantes, surtout si un professionnel de santé ne les supervise pas. Monsieur le rapporteur, si vous deviez aller jusqu'à la mise en place d'un diplôme hors des professionnels de santé, ces individus ne pourraient exercer leur activité que dans le cadre d'une officine et sous la responsabilité directe d'un pharmacien.
Le vote de ce soir n'engage pas que la mission d'information, mais l'ensemble du Sénat. Si vous adoptez ce rapport, demain tout le monde dirait que le Sénat souhaite instaurer un diplôme d'herboriste. Je n'y suis pas favorable et je demande un vote défavorable si vous maintenez cette partie du rapport en l'état.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Ce rapport propose simplement de poursuivre le travail de réflexion et de concertation, de façon pluri-politique. Il n'est pas question à ce stade de demander la création d'un diplôme d'herboristerie.
M. Alain Milon. - Je refuse l'idée d'un diplôme donné à des non-professionnels.
Mme Élisabeth Lamure. - Merci pour ce travail très intéressant. Il est bon de dire que plantes et chimie ne s'opposent pas et que tradition et science peuvent avancer de concert.
Je regrette que le rapport ne fasse pas plus de place à tout ce qui concerne la transformation des plantes : cela concerne pourtant les débouchés des producteurs. Le chapitre III traite de la complexité normative et réglementaire, mais ne propose que peu de solutions pour lever les freins.
Enfin, je suis hostile à l'instauration d'un diplôme d'herboriste, distinct de celui de pharmacien. En revanche, le pharmacien diplômé qui souhaite pratiquer la phyto-aromathérapie en dehors des officines est rayé du Conseil de l'ordre et ne peut faire état de son diplôme. Le rapport ne pourrait-il mentionner cette incongruité ?
M. Pierre Médevielle. - Les principes actifs des plantes sont des composés chimiques : on ne peut donc opposer plantes à chimie.
L'exercice de la pharmacie en dehors des officines existe déjà : c'est la parapharmacie. La grande distribution et des chaînes de parapharmacie recrutent des pharmaciens.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Notre collègue Elisabeth Lamure fait allusion aux pharmaciens qui ont le DU de phytothérapie et qui ouvrent une herboristerie.
Nous avons auditionné un pharmacien de Marseille qui semble être le seul herboriste à respecter la règlementation car il assure également la vente de médicaments, même si cela ne représente que de l'ordre de 2 % de son chiffre d'affaires. Tous les autres sont menacés d'exercice illégal de la pharmacie, alors qu'ils ont fait 10 ans d'études.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Ma réponse à M. Milon a été suffisamment claire : la réflexion doit se poursuivre.
M. Gérard Dériot. - Alors, il ne faut pas présenter ce rapport.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Je propose de ne pas prendre de décisions, mais de poursuivre la réflexion !
Mme Corinne Imbert, présidente. - Si notre rapporteur ne modifie pas son texte, nous voterons sur le rapport qu'il nous a transmis la semaine dernière.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Madame Lamure, je regrette effectivement de ne pas avoir développé suffisamment le chapitre sur la transformation industrielle des plantes, mais le temps nous était compté.
Nous ne pouvions pas faire de propositions concrètes pour réduire la complexité normative, car les normes sont en grande partie édictées par l'Europe.
Mme Élisabeth Lamure. - Pourquoi ne pas faire des recommandations ?
M. Joël Labbé, rapporteur. - Faites-nous des propositions en ce sens.
Enfin, je constate et regrette comme vous que les pharmaciens qui veulent officier comme herboristes ne peuvent faire état de leur diplôme.
M. Bernard Jomier. - Je suis très heureux d'avoir participé à cette mission : j'ai beaucoup appris.
La filière doit se développer : on ne peut se satisfaire de la situation actuelle où 80 % des plantes consommées en France sont importées. Un certain nombre d'exploitants pourraient se lancer dans ces cultures dont les revenus sont loin d'être négligeables. Je crois que nous sommes tous d'accord sur ce point.
La consommation de plantes s'accroît, mais sans garde-fous. Nos concitoyens achètent des plantes sur Internet, sans aucun conseil. Je regrette que nous n'ayons eu que peu de temps pour travailler, mais le Règlement du Sénat s'applique à nous. Lors d'une audition de représentants des pharmaciens, j'ai été surpris par des propos très conservateurs, même si une partie de l'argumentation était entendable. Si nous voulons avancer pour sortir du statu quo actuel, nous devons rapprocher les points de vue. Je ne crois pas à une réforme qui se ferait contre une profession. Nous avons donc besoin de temps pour poursuivre la discussion avec les pharmaciens, avec les herboristes, avec les universitaires qui délivreraient de nouveaux diplômes.
Approfondir la réflexion, certes, mais dans quel cadre ? Un groupe informel ? Des portes ont été ouvertes et il est indispensable d'avancer.
Mme Angèle Préville. - La mission a été très riche et j'ai beaucoup appris, notamment sur l'indigo de la Guadeloupe. Quelle richesse ultramarine !
Le rapport traduit bien ce qui nous a été dit durant les auditions et les propositions de notre rapporteur reflètent les propos tenus.
La production de plantes en France permettrait un complément de revenus pour nos exploitants agricoles. Les herboristes de comptoir et les paysans herboristes souhaitent une formation diplômante afin d'être reconnus. Nous ne pouvons laisser les choses en l'état : encadrons les pratiques. Mais reconnaissons aussi que la réflexion doit se poursuivre.
M. Daniel Chasseing. - Ce travail été nécessaire : merci à notre rapporteur.
Nous devons réduire les importations de plante en mobilisant les chambres d'agriculture et l'outre-mer.
Le rapport mentionne des risques d'interaction entre plantes et médicaments ; c'est bien le pharmacien qui contrôle l'ordonnance du médecin. Il est dit que 5 % des signalements aux centres antipoison sont dus aux plantes. L'herboriste ne pourrait-il pratiquer sous la responsabilité d'un pharmacien ? N'oublions pas le maillage territorial des pharmacies.
Nous pourrions proposer une formation diplômante et une autre formation - comme des BEP ou CAP délivrés par les chambres d'agriculture - de paysan herboriste.
Lors de leurs études, les pharmaciens font beaucoup de botanique mais sans doute pas assez d'herboristerie : pourquoi ne pas demander de renforcer l'enseignement de cette matière ?
M. Raymond Vall. - Cette mission m'a beaucoup appris.
Je n'aime pas qu'une discussion commence par une forme de chantage. Tout ce travail ne peut être rejeté sous prétexte que notre rapporteur dirait qu'il faut créer un diplôme et un métier d'herboriste, car tel n'est pas le cas. Dès qu'on parle d'herboristerie, les corporatismes font front commun. Or, la culture des plantes peut sauver ou créer des emplois ruraux : 1,5 ETP pour 3 hectares, nous dit-on. Nous devons donc adopter les deux premières parties de ce rapport sur la production, l'organisation de la filière, les transformations et l'accès aux marchés.
Une pétition en ligne sur la reconnaissance du métier d'herboriste a déjà rassemblé plus de 100 000 signatures : si le Sénat rejette le travail de notre rapporteur, il ne va pas se couvrir de gloire ! Ne bloquons pas la situation, d'autant que celle-ci n'est absolument pas satisfaisante. Acceptons donc de nous donner plus de temps pour étudier sous quelles conditions nous pourrions proposer la création d'un diplôme et d'un métier d'herboriste. N'oubliez pas non plus que le Gouvernement est en train d'ouvrir les études de médecine à d'autres qu'aux scientifiques.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Les propos du président Milon semblent avoir étonné ou choqué certains. Mais la pétition en ligne ne saurait nous distraire de la sagesse inhérente au Sénat. J'entends aussi parler de corporatisme : il ne s'agit pas de cela.
Le certificat d'herboriste n'a été reconnu par l'État que pendant quelques décennies. Certes, l'attente sociétale est importante et la filière est en forte croissance, mais nous ne pouvons dissocier le consommateur du patient. Le principe de précaution doit donc s'appliquer.
La proposition n° 39 qui figure à la page 104 fait état d'écoles d'herboristerie et laisse entendre que les pharmaciens-herboristes devraient passer par celles-ci plutôt que par la faculté de pharmacie. N'oublions pas que des formations universitaires sont déjà dispensées dans les facultés de pharmacie.
M. Guillaume Gontard. - J'ai été heureux de participer à ce travail qui répond à une véritable attente. Je viens d'un territoire de montagne : cette filière est prometteuse. Deux personnes peuvent vivre sur moins de cinq hectares. Les propositions qui vont vers plus de qualité ne peuvent qu'être approuvées. La filière chanvre sur mon territoire est en plein développement, mais nous sommes en retrait par rapport à la Suisse ou à l'Allemagne. Tout ce qui est dit sur les soins aux animaux par les plantes me convient parfaitement.
Notre seul désaccord tient à l'encadrement du futur métier d'herboriste. Nous ne pouvons en rester au statu quo car, pour l'instant, l'hypocrisie règne en maître. Voyez ce qui se passe sur Internet, sur les marchés ! Aujourd'hui, tout un chacun peut s'approvisionner là où il veut, sans aucun conseil. L'encadrement est nécessaire.
La proposition n° 40 est intéressante : la réflexion doit en effet se poursuivre.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Je propose de supprimer la référence aux paysans herboristes et aux herboristes de comptoir qui figure dans la proposition n° 39. Nous devons avancer.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Il me parait difficile de dissocier le métier d'herboriste de la formation, d'autant que ce que vous préconisez s'apparente aux études de préparateur en pharmacie. C'est la formation que l'université de Paris Descartes envisage de mettre en place dans un proche avenir. Formations et métiers sont étroitement liés.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Je propose alors de fusionner les propositions nos 39 et 40.
M. Bernard Delcros. - J'ai, moi aussi, beaucoup appris grâce à cette mission, notamment le fait qu'un grand nombre de plantes sont vendues en dehors des pharmacies. Ce sujet d'avenir est à fort enjeu sociétal et économique.
La situation actuelle ne peut rester en l'état : les risques existent et s'accroissent.
Seul un sujet pose problème : la formation et le métier d'herboriste. Mais comme le statu quo n'est pas acceptable, ce rapport doit avoir une suite, mais nous devrons essayer de rapprocher les points de vue. Nous n'allons pas décider ce soir de formations ni de nouveaux métiers, mais nous n'allons pas non plus dire qu'il ne faut rien faire.
Mme Patricia Schillinger. - Cela fait 14 ans que je suis sénatrice et cela fait 14 ans que j'entends les mêmes choses. En tant que législateurs, prenons nos responsabilités. Les achats se multiplient, sans aucun contrôle : le principe de précaution doit s'appliquer. Si nos concitoyens se soignent par les plantes, c'est qu'ils ne veulent pas de produits chimiques.
En Suisse et en Allemagne, des professionnels donnent des conseils qui permettent d'acheter des produits sans prendre de risques, ce qui n'est pas le cas en France. Arrêtons d'être tièdes !
Mme Marie-Pierre Monier. - J'ai pris un grand plaisir à participer à cette commission. On ne peut balayer ce rapport d'un revers de main, comme je l'ai entendu en début de réunion. L'attente et les enjeux sont importants. Le Sénat se doit d'être à l'écoute des territoires. Notre débat se cristallise autour d'un hypothétique affrontement entre herboristes et pharmaciens. Mais la page 104 du rapport est très claire : les herboristes ne doivent pas prendre part au diagnostic.
Si nous laissons les choses en l'état, les dérives vont se multiplier. Certes, 5 % des cas d'empoisonnement sont liés à des plantes, mais 98 % des cas relevés sont bénins. Deux cas par million sont graves, contre 27 cas par million pour les médicaments. Restent les interférences entre les plantes et les médicaments : faut-il laisser les choses en l'état ? Certes non !
Les propositions nos 39 et 40 disent qu'il faut accompagner le développement des formations existantes. Donnons-nous le temps de compléter notre travail et montrons que le Sénat sert à quelque chose.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Je propose de fusionner les propositions nos 39 et 40. Ainsi, il serait écrit : « Poursuivre la concertation avec l'ensemble des acteurs concernés pour envisager la reconnaissance des métiers d'herboristes, les contours de formations adaptées et les évolutions législatives correspondantes ».
M. Daniel Laurent. - Que deviendrait la proposition n° 39 ?
M. Joël Labbé, rapporteur. - Elle serait supprimée et l'actuelle proposition n° 40 deviendrait la proposition n° 39.
M. Gérard Dériot. - Merci pour le travail accompli.
Nous parlons de plantes médicinales, qui sont donc des médicaments. D'ailleurs, la plupart des médicaments actuels sont extraits de plantes ensuite synthétisées. Avec les plantes, on ne sait jamais exactement quelles quantités de produits actifs sont contenues. C'est un problème majeur.
La filière de la culture des plantes doit être développée dans nos territoires, d'autant que nous ignorons tout des conditions de culture de celles que nous importons. Le label « Plantes de France » me convient parfaitement.
Pour le reste, une formation approfondie du fonctionnement du corps humain est nécessaire pour délivrer des médicaments ou des plantes. Le diplôme de pharmacien répond donc à cette nécessité, et des enseignements spécifiques en botanique et en herboristerie sont délivrés. Des DU peuvent compléter cette formation initiale.
Pour bien conseiller, il faut bien connaître. N'oublions pas que 60 à 70 % du temps passé en officine par les pharmaciens est consacré au conseil. Le réseau compte plus de 20 000 pharmacies réparties sur tout le territoire et leur approvisionnement est journalier. Les conseils sont donnés en fonction des thérapies et en se référant au dossier médical partagé (DMP).
Si les gens veulent jouer avec leur santé, qu'ils continuent à acheter sur Internet. Le rôle des pharmaciens est de protéger et de contrôler les ordonnances des médecins.
Les préparateurs en pharmacie ont un CAP de 2 ans puis un BEP de 3 ans : en tout, 5 ans d'études ! Ils peuvent donc aider en toute connaissance de cause les pharmaciens. Pourquoi modifier ce système qui marche à la satisfaction de tous et qui offre la meilleure sécurité ?
Le président Milon est logiquement contre ce rapport car il refuse la création d'un diplôme d'herboristerie.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Vous venez de faire un plaidoyer pour le métier de pharmacien - un métier noble s'il en est. Mais le métier d'herboriste existe déjà, il est pratiqué, et les herboristes ne donnent pas de conseil médical. Une liste de 148 plantes est déjà ouverte, et je suis persuadé qu'elle sera étendue, notamment aux productions d'outre-mer. Il existe aussi des compléments alimentaires disponibles, sans parler des huiles essentielles. Tout cela est en vente libre, et nos concitoyens ne vont pas chercher ces produits en pharmacie. Voulons-nous le statu quo, avec d'une part des pharmaciens, d'autre part des herboristes sans formation reconnue ? Ou, pour éviter le charlatanisme et faire avancer les choses, allons-nous reconnaître des formations et un métier d'herboriste ? Le statu quo est inacceptable pour la population française, vous le verrez si le rapport n'est pas adopté. Nous parlons des petits maux du quotidien...
M. Gérard Dériot. - Qui n'ont aucune définition médicale !
M. Joël Labbé, rapporteur. - Pouvons-nous essayer d'aboutir à une proposition commune ?
Mme Corinne Imbert, présidente. - Je rappelle que ce n'est pas la pharmacie contre le reste du monde... Le circuit pharmaceutique français est bien sécurisé - ce qui nous protège du trafic international de faux médicaments, plus lucratif encore que celui de la drogue. Les 148 plantes que vous évoquez ont été libérées du monopole pharmaceutique il y a dix ans parce qu'elles sont considérées comme à visée alimentaire ou condimentaire plus que médicale. Oui, le métier d'herboriste est déjà pratiqué, mais aussi par des pharmaciens - même si ceux-ci n'ont pas le droit de communiquer à ce sujet. Et les consommateurs ont une responsabilité individuelle. Par ailleurs, les médecins doivent être davantage à l'écoute de cette tendance. Mais le plus grand danger reste la banalisation. On banalise déjà à l'excès le médicament. Le paracétamol, par exemple, dont on a fait un produit de consommation courante, peut être dangereux. Gardons-nous donc de banaliser aussi l'usage médicinal des plantes : si celles-ci contiennent un principe actif, elles deviennent des médicaments ! Souvent, d'ailleurs, c'est le déremboursement qui banalise un médicament...
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. - N'ouvrons pas trop les possibilités, tout de même. Il serait bon, en revanche, de stimuler davantage l'intérêt des futurs agriculteurs, dès le stade de la formation, pour ces cultures, puisque 80 % des plantes consommées sont importées.
M. Claude Haut. - Nous disons tous la même chose, sauf sur un point. Le rapporteur fait beaucoup d'efforts de synthèse et de conciliation. Il me semble que nul ne saurait douter de la capacité des pharmaciens à aider de leurs conseils leurs clients. Il n'y a donc pas lieu de les défendre.
M. Gérard Dériot. - Je n'ai fait que rappeler quelques vérités.
M. Claude Haut. - Au fond, le rapport ne va pas si loin que ça. Les propositions qu'il comporte sur la formation me conviennent. Qu'un herboriste soit diplômé comme un pharmacien ne peut que renforcer la sécurité des usagers. Mais nous devons approfondir encore notre réflexion.
M. Raymond Vall. - Nous sommes tous confrontés à la désertification médicale, et nous souhaitons tous conserver les officines sur nos territoires. Or celles-ci, beaucoup plus que par les plantes médicinales, sont menacées par des décisions qui nous sont imposées sur la parapharmacie ou le regroupement en pharmacies centrales. Pour que les pharmaciens vendent, il faut que les médecins prescrivent. Il convient donc de sécuriser la production et la consommation des plantes, ce qui permettra d'accroître les prescriptions - à condition de mettre en place aussi des formations. Si les diplômes sont comparables, les herboristes et les pharmaciens travailleront ensemble.
M. Daniel Chasseing. - Rappelons que c'est le médecin qui porte le diagnostic et fait la prescription, et que le pharmacien contrôle l'ordonnance. Si le patient veut consommer des plantes en sus de ses prescriptions, il est fondamental que le pharmacien puisse lui signaler d'éventuelles contre-indications. Mme Schillinger dit que les plantes sont déjà en vente partout et que le législateur doit protéger. Il me semble que si le client se fournit ailleurs qu'en pharmacie, la responsabilité du législateur est dégagée. Du reste, si nous posons pour principe que l'herboriste ne peut exercer que sous la responsabilité d'un pharmacien, je ne vois pas où est le problème.
M. Gérard Dériot. - Je rappelle que M. Milon a estimé qu'il était inutile de créer un certificat d'herboriste. Enlevons donc, dans la proposition n° 40, les considérations relatives à cette perspective.
M. Bernard Delcros. - La nouvelle rédaction appelle simplement à poursuivre la concertation ; elle ne crée par un métier d'herboriste.
Mme Élisabeth Lamure. - Nous pourrions écrire « ... reconnaître, ou pas... ».
M. Bernard Delcros. - Ou « éventuellement ».
M. Joël Labbé, rapporteur. - Cet adverbe me coûte...
Mme Marie-Pierre Monier. - L'idée est de professionnaliser ces pratiques. Mais nous sommes bien d'accord que l'herboriste n'est ni un médecin, ni un pharmacien. Pour autant, son activité doit être encadrée. Pour l'heure, seules 10 % des huiles essentielles sont achetées en pharmacie ! Du coup, les acheteurs ne disposent pas des informations utiles.
M. Pierre Médevielle. - Ce chiffre demande à être vérifié...
M. Bernard Delcros. - En somme, la question est de savoir si nous sommes d'accord sur le fait qu'il faut continuer à travailler sur le sujet.
M. Bernard Jomier. - Nous sommes tous d'accord sur le fait qu'il faut que ces plantes soient vendues par des professionnels, soit sous la responsabilité d'un pharmacien, soit par des herboristes travaillant de manière autonome, hors responsabilité des pharmaciens. Quelle que soit l'option retenue, la formulation envisagée pour la proposition n° 40 laisse la porte ouverte. Dès lors, en quoi pose-t-elle problème ? Elle ne préjuge pas du point d'atterrissage de la réflexion.
M. Gérard Dériot. - Elle mentionne le métier d'herboriste.
M. Bernard Jomier. - Elle l'envisage.
M. Gérard Dériot. - Pourquoi ne pas ajouter « éventuellement » ?
M. Bernard Jomier. - Le verbe « envisage » est suffisant. Rajouter un « éventuellement » serait un pléonasme.
Mme Marie-Pierre Monier. - Dans le Diois, les médecins et les pharmaciens travaillent étroitement avec les producteurs.
M. Gérard Dériot. - Voilà qui ne serait pas possible partout.
M. Pierre Médevielle. - La chaîne qui va du producteur au consommateur doit être aussi sûre en herboristerie qu'en pharmacie, vu l'exigence de traçabilité qui est désormais absolue en cas d'incident.
M. Raymond Vall. - Nous avons progressé ! Au début, il était question de ne pas voter le rapport s'il mentionnait le métier d'herboriste, et voilà que nous cherchons une formulation adéquate pour envisager des formations. Il me semble que le statu quo, de toute façon, n'est pas acceptable.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Mais il existe déjà une formation, et certains ont fait jusqu'à dix années d'étude ! L'ancien certificat d'herboriste, d'ailleurs, était délivré par la faculté de pharmacie. Ce n'est pas parce qu'il y a un engouement sociétal que nous devons céder au mouvement de banalisation.
Mme Patricia Schillinger. - Le pharmacien est déjà herboriste. Pourquoi ne pas ouvrir d'autres qualifications diplômantes pour l'exercice de ces fonctions ?
M. Bernard Jomier. - Médecin généraliste, j'ai exercé en soins palliatifs. Certains patients prenaient aussi des plantes, et me demandaient si c'était compatible. J'ai consulté la pharmacienne hospitalière, qui n'en savait rien. Il aurait été profitable que l'équipe comprenne un professionnel de l'herboristerie.
M. Bernard Delcros. - Sommes-nous donc d'accord qu'il faut continuer à travailler ?
Mme Élisabeth Lamure. - Pouvons-nous insérer ma proposition ? Je suppose un pharmacien qui, disposant d'un DU de phytothérapie, s'installerait en dehors du réseau d'officines. Pourrions-nous l'autoriser à faire valoir ses connaissances de pharmacien ?
M. Joël Labbé, rapporteur. - À mon sens, oui, mais je sais que cela ne fait pas consensus.
M. Bernard Delcros. - Nous verrons cela lorsque nous reprendrons le travail.
M. Pierre Médevielle. - Ce ne sera pas possible car c'est une profession réglementée...
Mme Marie-Pierre Monier. - Ne peut-on faire évoluer la réglementation ?
M. Gérard Dériot. - Votons sur la proposition n° 40.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Pourquoi ne pas la simplifier en « Continuer la concertation et la réflexion sur l'herboristerie » ? Et quid du texte qui précède la proposition n° 39, pages 102 à 105 ? Je le supprimerais.
Mme Marie-Pierre Monier. - Qu'y a-t-il dans ces pages qui vous gênent ?
M. Raymond Vall. - À partir des mots « Dans cette perspective... » nous pouvons garder tout.
M. Joël Labbé, rapporteur. - J'ai, à dessein, inséré à plusieurs reprise les mots « selon votre rapporteur ».
M. Gérard Dériot. - Certes, mais, une fois voté, ce rapport engage le Sénat. Donc chaque mot compte. J'ai réexpliqué le travail du pharmacien car tout le monde ne le connaît pas. S'il existe une formation à l'herboristerie et à la botanique, c'est celle du pharmacien. Dès lors qu'on parle de plantes médicinales, on a des enjeux de santé publique. Je supprimerais également les pages 102 à 105.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Dites-nous ce qui vous y choque. Ce rapport doit aussi refléter les auditions que nous avons tenues. Nous ne pouvons pas tout enlever.
M. Bernard Delcros. - La suite n'aurait plus de sens...
M. Daniel Laurent. - Peut-être pouvons-nous modifier le texte de ces pages ?
Mme Corinne Imbert, présidente. - Si on les lit attentivement, on comprend qu'elles expriment le point de vue du rapporteur. Mais une lecture rapide donne l'impression qu'il s'agit de recommandations du Sénat. Si donc nous voulons atteindre un consensus et voter ce rapport, nous devons être prudents.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Je suis d'accord pour ôter le deuxième paragraphe de la page 104 - ou peut-être en en conservant la première phrase ?
Mme Angèle Préville. - Et nous supprimerions le dernier paragraphe de la page 102.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Nous avons entendu les paysans-herboristes et les herboristes de comptoir. Je prends sur moi de maintenir ce paragraphe, qui du reste n'engage à rien.
Mme Corinne Imbert, présidente. - La première phrase du deuxième paragraphe de la page 104, que vous voudriez conserver, me gêne. Pourquoi évoquer des propositions de formation alors que nous voulons confier cette réflexion à un groupe de travail ?
Mme Angèle Préville. - Lors des auditions, la question de la formation a été maintes fois évoquée. Ne faut-il pas le mentionner ?
Mme Corinne Imbert, présidente. - Les comptes rendus en gardent la trace. Ils pourront servir au groupe de travail.
Mme Élisabeth Lamure. - Si nous supprimons la proposition n° 39, le titre du 3) n'est plus adapté. Je propose « Une réflexion à approfondir sur la reconnaissance des métiers d'herboriste. »
M. Joël Labbé, rapporteur. - Du coup, il faut mentionner « les paysans-herboristes et les herboristes de comptoir » dans le texte. Nous les avons entendus.
La proposition n° 39 est supprimée. La proposition n° 40 devient proposition n° 39, dans la rédaction issue des travaux de la mission d'information.
Mme Patricia Schillinger. - Je souhaiterais renforcer la proposition n° 30 en utilisant par exemple les mots « interpeller la Commission européenne ».
Mme Marie-Pierre Monier. - Je partage l'avis de Mme Schillinger. Les différences de réglementation font des ravages en agriculture. Il faut une harmonisation.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Nous devons être moteurs sur ce sujet. Pourquoi ne pas écrire « Porter les réflexions... » ?
Mme Patricia Schillinger. - Mieux : « Exiger l'établissement... ».
La rédaction de la proposition n° 30 issue des travaux de la mission d'information est adoptée.
M. Raymond Vall. - Je vous ai fait parvenir un amendement à la proposition n° 3 : les jardins botaniques créés dans les écoles, collèges et lycées devraient intégrer la biodiversité et l'entomologie, voire s'inscrire dans le réseau « Oasis Nature » d'Hubert Reeves.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Ces considérations trouveraient mieux leur place dans le corps du rapport.
M. Raymond Vall. - Sur la proposition n° 4, je propose de ne pas nous limiter au bio.
M. Joël Labbé, rapporteur. - L'agriculture conservatrice admet l'usage du glyphosate...
Mme Corinne Imbert, présidente. - Ne soyons pas contre-productifs. Oublions donc cette proposition.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Que pensez-vous de la proposition n° 28 ?
M. Joël Labbé, rapporteur. - Elle s'inspire de la réglementation autrichienne, et viserait seulement « les petits maux du quotidien.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Je suis réservée, car elle ouvre sur des indications thérapeutiques.
M. Gérard Dériot. - En effet. Et les petits maux du quotidien, cela ne veut rien dire...
Mme Marie-Pierre Monier. - Cela cadrera les vertus prêtées à chaque plante.
M. Gérard Dériot. - Un tel flou est dangereux.
M. Daniel Chasseing. - Un insuffisant respiratoire, par exemple, atteint d'un rhume, ne guérira pas sans antibiotiques.
M. Gérard Dériot. - C'est la beauté de la médecine !
Mme Angèle Préville. - On voit que certaines tisanes, par exemple, sont appelées « douce nuit » ou « belle nuit », ce qui est une manière de suggérer une allégation de santé.
M. Bernard Jomier. - Pour toutes les plantes qui ne sont plus sous monopole pharmaceutique, cette proposition améliorerait l'information du consommateur. Nous pourrions simplement abaisser d'un niveau la recommandation, et écrire « Étudier la possibilité d'associer... ».
M. Joël Labbé, rapporteur. - D'accord.
Mme Angèle Préville. - La présidente indiquait que ce sont des plantes alimentaires et condimentaires.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Oui, les 148 plantes en question ont été libérées car c'était leur usage principal. Mais cela ne préjuge pas de celles qui le seront à l'avenir et qui relèvent d'un décret du ministre.
La rédaction de la proposition n° 28 issue des travaux de la mission d'information est adoptée.
La mission d'information adopte le rapport d'information dans la rédaction issue de ses travaux, et en autorise la publication.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Je vous propose d'adopter un nouveau titre : « La plante médicinale et l'herboristerie : à la croisée de savoirs ancestraux et d'enjeux d'avenir ».
Mme Corinne Imbert, présidente. - La publication sera retardée d'une semaine, le temps que les groupes nous fassent parvenir leurs contributions.
M. Joël Labbé, rapporteur. - Je souhaite que ce rapport fasse l'objet d'un débat en séance publique.
Mme Corinne Imbert, présidente. - Il faudrait d'abord constituer le groupe de travail évoqué. J'estime qu'il est trop tôt pour envisager d'ores et déjà un débat en séance publique.
Mme Patricia Schillinger. - Et nous devons solliciter l'Union européenne. Pourquoi ne pas demander à la commission des affaires européennes de se saisir du sujet ?
La réunion est close à 23 h 30.