Mardi 24 mars 2015
- Présidence de M. Vincent Capo-Canellas, président -La réunion est ouverte à 15 heures
Audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Merci, monsieur le ministre, d'avoir répondu à notre invitation. Le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques qui nous a été transmis de l'Assemblée nationale comporte deux articles qui relèvent de votre ministère. Notre commission a adopté l'article 47 sans modification. En revanche, nous désirons vous entendre sur l'article 50 A qui a été inséré en cours de débat à l'Assemblée par un amendement gouvernemental. Cet article lève les obstacles juridiques à la création de sociétés de projet en vue de la cession-bail de matériels militaires.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, ce qui justifie le recours à des sociétés de projet ? Pourquoi nous présenter un montage financier aussi complexe ? En quoi est-il utile à votre ministère ?
En outre, cet article ne risque-t-il pas d'être censuré par le Conseil constitutionnel dans la mesure où il a été présenté en cours de discussion à l'Assemblée ?
Cette audition est ouverte à tous les sénateurs, notamment ceux des commissions des finances et des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Daniel Reiner et Jacques Gautier ont d'ailleurs déjà eu l'occasion de s'entretenir de cette question avec notre rapporteure. En outre, Dominique de Legge, rapporteur spécial de la mission « Défense », vous interrogera certainement aussi.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. - Je suis heureux de pouvoir participer au débat de votre commission spéciale.
Tout d'abord, je me réjouis de votre vote sur le projet Kant qui permettra de construire l'Airbus de l'armement terrestre. Nos discussions avec nos partenaires allemands se déroulent dans de bonnes conditions et se poursuivront lundi. Cette alliance est rassurante pour l'entreprise Nexter. Nous pourrons ainsi mettre en oeuvre le programme Scorpion.
J'en arrive à l'article 50 A : la loi de programmation militaire (LPM) prévoit de mobiliser 31,4 milliards d'euros, pour la mission « Défense » en 2015, comme en 2012, 2013 et 2014. Les ressources de la mission « Défense » ont été sanctuarisées à plusieurs reprises par le Président de la République. Sur ce total, 2,4 milliards d'euros sont constitués de ressources exceptionnelles, dont 200 millions d'euros de ressources immobilières. La question est donc simple : comment mobiliser 2,2 milliards d'euros pour aboutir aux 31,4 milliards d'euros prévus ? On peut regretter d'avoir recours à ces ressources exceptionnelles, ce qui était d'ailleurs déjà le cas auparavant. Des ressources budgétaires auraient été plus simples, mais le fait est là.
L'article 3 de la LPM et le paragraphe 5-1 de son annexe précisent la nature de ces ressources exceptionnelles : il s'agit du programme d'investissements d'avenir, que nous avons mobilisé en 2014 à hauteur de 2 milliards d'euros, des ressources immobilières qui nous rapporteront cette année 200 millions d'euros, de la mise aux enchères des fréquences et, enfin, du produit des cessions de participation des entreprises publiques, donc des cessions d'actifs.
Pour 2015, nous comptions sur la vente de la bande des fréquences des 700 mégahertz, mais il est apparu qu'elle n'aurait sans doute pas lieu cette année. En conséquence, il me faut donc procéder à une cession d'actifs à hauteur de 2,2 milliards d'euros pour atteindre les 31,4 milliards d'euros prévus. Or, en vertu de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), ces cessions ne peuvent être utilisées que pour des opérations d'investissement en capital. Nous avons donc été contraints de rechercher une solution pour atteindre les objectifs que le Président de la République nous avait fixés. Comme ces 2,2 milliards d'euros sont destinés à des acquisitions de matériel, et non pas à des dépenses en fonctionnement, il nous a paru que la création de sociétés de projet était la solution la plus satisfaisante. Ainsi, sur financement de l'Agence des participations de l'État (APE), l'État pourrait créer des sociétés dédiées à l'acquisition et à la location d'équipements déjà commandés ou acquis par l'armée. L'État cèderait donc à ces sociétés la propriété des équipements, qui seraient immédiatement loués au ministère de la défense. Enfin, ce dernier pourrait acquérir à tout moment ces équipements durant la durée de la location.
Cette solution permet de régler l'absence provisoire de recettes issues de la mise aux enchères de la bande des 700 mégahertz. Lors de ses voeux aux armées, le Président de la République a validé ce dispositif et le ministre de l'économie a déposé un amendement non pas pour créer des sociétés de projets mais pour lever les obstacles juridiques préalables à leur mise en oeuvre.
Le schéma est simple : avec un capital de 2,2 milliards d'euros issus de cessions de participations de l'État, réalisées par l'APE, seront créées deux sociétés entièrement publiques. La première, dotée de 1,680 milliard d'euros, achètera trois frégates multi-missions (FREMM) devant être livrées à la marine nationale dans les années 2015-2017 et la seconde, dotée de 560 millions d'euros, quatre A400M, livrés à l'armée de l'air en 2016-2017. Ces matériels seraient immédiatement loués à l'armée. L'ensemble des services associés, notamment le maintien en condition opérationnelle, la formation et les assurances, resteront du ressort du ministère de la défense - qui est d'ailleurs son propre assureur - et des industriels sous contrat avec le ministère. Ce schéma sera rapidement mis en place, avant l'été.
À la demande du député Jean-François Lamour, le Gouvernement remettra un rapport au Parlement avant la création de ces sociétés de projet et je m'engage à le déposer à l'occasion de l'examen de l'actualisation de la LPM, c'est-à-dire un peu avant ce qui m'a été demandé puisque le projet de loi d'actualisation de la LPM sera présenté début mai au conseil des ministres, le débat ayant lieu au Parlement avant l'été.
Ces dépenses auront un impact sur le déficit public maastrichtien au moment de la livraison de ces matériels militaires. Cet impact sera donc étalé dans le temps et ne sera que temporaire puisqu'il sera effacé lors de la vente des fréquences hertziennes. En outre, ce schéma est largement neutre pour la dette publique puisqu'il est financé par des cessions d'actifs même si on ne peut exclure que ces sociétés aient, pour une petite part, recours à l'emprunt.
De plus, ce schéma est neutre pour l'actif de l'État puisque les sociétés de projet reconstitueront leur fonds propres au moyen des remboursements versés par la défense. Ces sociétés seront totalement contrôlées par l'État et ne prennent aucun risque dans l'opération, ce qui limite les coûts financiers associés. Lors de la vente des fréquences, ces sociétés seront supprimées, l'une après l'autre.
Enfin, je n'exclus pas que ce dispositif perdure d'une autre manière afin d'aider nos exportations. À deux ou trois reprises, j'ai en effet été contacté par des pays, y compris européens, qui souhaitaient louer du matériel français. Comme nous n'avions pas de solution à leur proposer, ces pays se sont adressés à nos concurrents.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Merci, monsieur le ministre, pour cet exposé très clair.
Selon certaines sources, dont un article signé par un ministre, il semble qu'il y ait un scénario principal, celui que vous nous avez exposé, et des scénarios secondaires. Est-ce le cas ?
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - La mise aux enchères des fréquences n'aura pas lieu en 2015, contrairement à ce qu'a affirmé le Premier ministre dans sa lettre au président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, Jean-Pierre Raffarin. C'est donc pour pallier cette absence provisoire de ressources que vous nous présentez cet article 50 A. Mais ces sociétés de projet seront-elles pérennes ?
Enfin, Bercy ne semble pas totalement convaincu par les sociétés de projet. Existe-t-il un plan B ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. - Le Président de la République m'a demandé de trouver une solution : je lui ai fait cette proposition. Dès lors que le conseil de défense l'a validée, j'exécute. Le ministère de l'économie a déposé un amendement pour rendre la création de sociétés de projet possible dans les prochaines semaines.
À ma connaissance, il n'y a pas de plan B, à moins qu'il s'agisse de la vente des fréquences, mais je doute qu'elle ait lieu cette année.
Mme Michelle Demessine. - Cet article 50 A ne risque-t-il pas d'être censuré par le Conseil constitutionnel, d'autant que ces sociétés de projet comportent des risques juridiques ?
La solution que vous nous présentez, séduisante à court terme, peut se révéler coûteuse à plus long terme. Quid aussi de notre indépendance stratégique ? Enfin, le ministère des finances semble réticent devant ce montage financier qui s'apparenterait, selon lui, à de nouvelles dépenses.
M. Michel Raison. - Je vous félicite, monsieur le ministre, de vous battre pour sanctuariser votre budget. J'ai en revanche plus de mal à croire que le coût de ce dispositif sera neutre pour l'État. N'est-on pas en train de créer une petite usine à gaz ? Des capitaux privés pourraient entrer dans ces sociétés : espérons qu'ils ne soient pas chinois... En fait, vous nous proposez un montage pour transformer des charges d'investissement en charges de fonctionnement. J'ai été agriculteur et responsable agricole : lorsqu'un éleveur m'annonçait qu'il avait vendu ses vaches mais qu'il les gardait en location, il était fréquent qu'il dépose rapidement son bilan. Espérons qu'il n'en ira pas de même avec ce montage.
Avec ces sociétés, nos militaires garderont-ils une totale liberté de choix et d'utilisation de leurs équipements ?
M. Alain Richard. - Quand un amendement est déposé par un ministre, il engage tout le Gouvernement et la décision de le déposer a été approuvée par le Premier ministre. L'amendement reflète donc l'arbitrage qui a eu lieu.
En outre, le marché des communications numériques évoluant à grande vitesse, la valeur des fréquences peut également varier : l'État, qui est un investisseur avisé, doit donc attendre le moment favorable pour vendre ce bien rare que sont des fréquences hertziennes.
Pour répondre à Michel Raison, la moitié des forces armées européennes louent leurs équipements et elles en ont une totale liberté d'utilisation.
Enfin, ce n'est ni la première, ni la dernière fois que nous voterons une autorisation au Gouvernement qui créera, au moment où il le jugera opportun, des sociétés de projet.
M. Dominique de Legge. - Nous sommes tous d'accord pour dire que la LPM doit être respectée. En revanche, nous pouvons diverger sur les façons d'atteindre cet objectif. En décembre, le Président de la République a écrit à Jean-Pierre Raffarin et Gérard Larcher pour leur dire que la vente des fréquences était toujours d'actualité. La lettre du Premier ministre que Jean-Pierre Raffarin a reçu hier ne dit pas autre chose, mais comme cette vente ne se fera sans doute pas en 2015, un plan B est nécessaire. Vous nous proposez donc, monsieur le ministre, une solution de substitution. Mais j'aimerais comprendre pourquoi le ministre des finances a estimé la semaine dernière qu'une autre solution était peut être envisageable alors que M. le ministre de la défense nous dit que les arbitrages ont été rendus. En outre, les sociétés ainsi créées pourraient perdurer. Qu'en est-il réellement ?
Le ministre de la défense pourra-t-il utiliser librement les FREMM et les A400M qui lui seront loués ? Qui en assurera l'entretien ?
Comment seront rémunérés les capitaux - notamment privés - investis ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. - On peut regretter que des ressources exceptionnelles permettent de respecter la LPM, mais c'est un fait.
M. Daniel Reiner. - Ça toujours été le cas.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. - La loi détermine une liste exhaustive des ressources exceptionnelles, dont les cessions d'actifs. Il n'y aurait pas eu de débat si j'avais pu en vendre pour acheter des équipements militaires, mais la LOLF m'oblige à réinvestir ces ressources en capital, d'où la nécessité de créer des sociétés de projet. Le Président de la République a validé le projet, le conseil de défense a donné son aval et l'amendement a été défendu par Emmanuel Macron.
Le capital des sociétés de projet sera entièrement public. Le problème de la contrainte dans les conditions d'utilisation des matériels me paraît réglé par ce biais.
Mme Fabienne Keller. - Il n'y aura pas de capitaux privés ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. - L'APE apportera le capital à ces sociétés de projet et j'espère que les frais financiers seront modérés. Nous en discutons actuellement avec le ministère des finances. Comme il s'agit de capitaux publics, l'autonomie stratégique, madame Demessine, ne sera nullement remise en cause.
Les critères maastrichtiens s'appliqueront, mais le plus provisoirement possible. À Jean-Claude Juncker qui appelait de ses voeux une armée européenne, Manuel Valls a répondu en lui disant qu'elle existait déjà et que c'était l'armée française. Les équipements qui seront loués seront utilisés librement par nos troupes. L'entretien de ces équipements sera assuré par l'armée.
Non, monsieur Raison, il ne s'agit pas d'une usine à gaz, mais d'une nécessité pour répondre aux commandes passées à nos industriels et aux besoins de nos armées. Je confirme aussi qu'il n'y a pas de plan B.
Nous avons multiplié nos exportations par près de deux en deux ans et le maintien de sociétés de projet permettrait de proposer à nos clients du matériel en leasing, comme le font les Américains ou les Chinois. Cet outil pourrait se révéler intéressant, mais il faudra l'adapter à la demande et des industriels pourraient alors participer au capital.
M. Daniel Reiner. - Ils y sont favorables !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. - Il me faudra dégager 5,5 milliards d'euros de ressources exceptionnelles d'ici 2017. Au deuxième semestre 2015, je devrai donc me demander comment mobiliser de nouvelles ressources pour 2016.
M. Gérard Longuet. - L'APE va fournir le capital des sociétés de projet et la contrepartie, à terme, sera la vente des fréquences détenues par votre ministère. Le ministère de la défense, dont le budget représente 20 % des dépenses de l'État, va supporter 100 % de la contrepartie, ce qui dénote une totale absence de solidarité budgétaire de l'État.
L'effort qui sera fourni en 2015 devra sans doute être prolongé en 2016 et en 2017. Des actifs seront-ils disponibles ? Le ministère de la défense sera-t-il seul à les apporter ?
Bercy va vendre des actifs qui rapportent des dividendes et qui dégagent des plus-values pour un usage locatif dont la rentabilité sera sans doute très modeste. Ne risque-t-il pas de demander plus, dans la mesure où les capitaux qu'il va mobiliser pourraient lui rapporter plus ? Chacune des parties risque d'être frustrée. Le Président de la République aurait mieux fait de mobiliser le budget de l'État.
La durée d'amortissement du matériel loué n'a pas été évoquée : si la procédure de mise aux enchères des fréquences s'enlise, Brienne - et demain Balard - risque de se retrouver sous la pression de Bercy qui voudra augmenter les prix de location de ces équipements.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Existe-t-il une estimation du manque à gagner qui résultera des cessions de participations ?
Comme nous l'avions dit lors de la loi de finances, une solution budgétaire aurait été préférable.
Une fois que nous aurons voté l'article 50 A et que les obstacles juridiques auront été levés, le Parlement n'aura plus son mot à dire.
Mme Nicole Bricq. - Si la société de projet a vocation à perdurer, notamment pour les matériels d'exportation, rien n'interdit qu'elle soit alimentée par des cessions d'actifs de l'État.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. - Elle va l'être.
Mme Nicole Bricq. - Il fallait que ce fût dit. Mieux vaut vendre les fréquences au bon moment, pour en tirer le meilleur prix.
Le rapport prévu par l'Assemblée nationale sera rendu avant l'été ; il devra détailler les conditions de l'ouverture à d'éventuels investisseurs privés, notamment étrangers, car il s'agit d'un domaine stratégique. Nous ne nous engageons pas à l'aveugle.
Opposer le ministre de la défense à celui des finances, c'est un peu facile. L'important, c'est que nous alimentions la LPM pour 2015.
Mme Fabienne Keller. - Quel est l'intérêt d'un montage aussi compliqué, sachant qu'il n'améliore ni la dette ni le déficit maastrichtien ? Pourquoi ne pas simplement modifier les règles d'affectation du produit des cessions de l'APE ?
Vous envisagez d'utiliser ces sociétés de projet pour les exportations de matériels militaires. Le taux de rémunération des actionnaires sera-t-il raisonnable, comme vous l'annoncez, si des entreprises partenaires, au raisonnement capitalistique, sont au capital ? N'y aura-t-il pas un télescopage d'intérêts entre les détenteurs de capital, voire un risque sur l'intérêt national ?
M. Claude Malhuret. - N'étant pas spécialiste de ces montages financiers, ma question risque de vous sembler naïve. Selon Alain Richard, l'intérêt de ce montage est de donner du temps à l'État pour vendre les fréquences au meilleur moment sur le marché, en 2016. Pour ce faire, l'APE va devoir céder des actifs avant la fin de l'été. C'est donc elle qui se retrouve acculée, ne pouvant choisir le meilleur moment pour vendre... Dans ces conditions, quel est l'intérêt ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. - Les candidats au rachat des 700 mégahertz ne sont pas nombreux ; le marché est très étroit, d'où la nécessité de bien choisir le moment de la cession. Pour l'APE, qui dispose d'une large palette d'actifs et en cède souvent, la difficulté n'est pas la même.
Madame Keller, le montage n'est pas compliqué. Certes, il aurait été plus clair d'affecter directement le produit de la cession d'actifs au budget de la défense, mais ce n'était pas légalement possible : une modification de la LOLF imposerait de passer par une loi organique. Je suis donc obligé de recourir à une société de projet.
Pour l'instant, nous créons deux sociétés de projet, Frégates et A400M, pour mobiliser les 2,2 milliards d'euros, mais rien n'interdit de poursuivre la réflexion avec les industriels concernés sur ce type de sociétés dans le cadre de projets à l'exportation.
S'agissant de la composition du capital, il n'y a pas de contradiction : nombre de sociétés d'armement associent capitaux publics et privés.
Je précise à Gérard Longuet que, contrairement aux fréquences qui ont été cédées par le passé, les 700 mégahertz n'appartiennent pas au ministère de la défense. Cela change la donne...
M. Gérard Longuet. - En effet.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. - J'ai bataillé, avec succès, pour que le produit de cette cession soit néanmoins affecté à la défense.
Madame Demessine, il ne s'agit pas d'externalisation. Il n'est pas rare que les armées utilisent des matériels qui ne leur appartiennent pas : au Royaume-Uni, il y a même un partenariat public-privé pour le ravitaillement en vol. Cela ne marche pas bien et coûte plus cher que prévu. Nous ne sommes pas dans ce cas-là.
Combien de temps le leasing durera-t-il ? Le temps opportun pour que nous retrouvions nos financements, dans la cohérence de la LPM.
Enfin, je précise à Mme Bricq que les sociétés de projets créées en 2015 ne comporteront que des capitaux publics.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Merci de ces précisions. Les questions ont été franches, les réponses claires.
La réunion est suspendue à 16 h 05
La réunion est reprise à 16 h 10
Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission spéciale
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Nous reprenons l'examen du rapport et du texte proposé par la commission spéciale sur les professions réglementées. Je précise que trois amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 40 : les amendements n° 1 et n° 39, identiques, et l'amendement n° 787.
M. François Pillet, rapporteur. - J'ai pour tâche de vous présenter les éléments propres à éclairer vos délibérations sur plusieurs secteurs : professions réglementées, pouvoirs et procédures de l'Autorité de la concurrence, procédures collectives, tribunaux de commerce, conseils de prud'hommes, droit commercial, droit des sociétés, droit de la communication.
N'ayant pas l'esprit dadaïste, je me dispenserai de synthèse introductive et vous proposerai d'aborder ces divers points par grands thèmes. Un mot toutefois sur notre travail préparatoire. Nous avons auditionné les représentants des professions concernées ainsi que de nombreuses autorités, universitaires ou ministérielles, susceptibles d'apporter un éclairage extérieur. J'ai indiqué, en votre nom, que la commission spéciale souhaitait que chacun pût faire connaitre son avis, qu'il soit auditionné ou pas ; nous ne voulons pas que les avocats souffrent d'une plaidoirie rentrée ! Toutes les auditions ont ainsi été enrichies ; j'ai sollicité l'avis de tous les premiers présidents de cour d'appel et du premier président de la Cour de cassation. Nous avons travaillé en collaboration avec les cabinets et les responsables des ministères des finances et de la justice. Il m'est arrivé d'auditionner certaines personnes à deux reprises pour mieux cerner certaines questions.
Dans mon esprit, il fallait satisfaire à l'objectif affiché par l'intitulé de la loi. J'ai ainsi expliqué aux professions concernées que la procédure parlementaire permettait deux attitudes : soit refuser toute réforme, soit accepter de débattre, modifier les équilibres en conservant l'objectif. J'ai précisé que la première attitude conduirait à l'adoption définitive du texte de l'Assemblée nationale, qu'il valait mieux que le Sénat apportât une plus-value, et, formule classique, que l'intérêt général ne coïncide que très rarement avec la somme des intérêts particuliers. Les professions ont été sensibles à ce discours, et nombre des amendements que je vous propose ont été discutés avec elles. Beaucoup de vos amendements seront satisfaits, au moins partiellement ; je m'opposerai à ceux qui ôtent tout objectif à la loi, et donc toute plus-value au Sénat.
Plutôt que d'aborder chaque profession successivement, j'ai préféré retenir trois éclairages : d'abord les dispositifs concernant chaque profession réglementée, prise individuellement, à examiner avec attention ; ensuite les dispositifs qui rassemblent plusieurs professions, à encourager avec efficacité ; enfin ceux qui les opposent, à apaiser avec mesure.
Je les ai abordés en tenant compte d'une part de la spécificité de la prestation juridique, d'autre part de la nécessité de préserver le maillage territorial de l'accès au droit, avec dans l'esprit d'aider la loi à atteindre les objectifs qu'elle s'est fixés.
Article additionnel avant l'article 12
M. François Pillet, rapporteur. - Le droit applicable aux professions juridiques et judiciaires réglementées est morcelé entre de très nombreux textes, souvent anciens - les notaires sont encore régis par une loi du 25 ventôse an XI - et au niveau normatif incertain. Cette fragmentation nuit à l'intelligibilité des règles et conduit parfois à des différences injustifiées de régime entre professions. L'amendement n° 846 propose de créer un code qui rassemble ces dispositions éparses, identifie les éléments communs et précise les spécificités de chacune des professions. S'adressant à tous les consommateurs de droit, il pourrait également accueillir les dispositions relatives à l'aide juridique et s'intituler : « code de l'accès au droit et de l'exercice du droit ». Le présent amendement se limite à créer le principe d'un tel code, qui supposera un travail rigoureux de codification.
M. Alain Richard. - Excellent amendement.
Mme Nicole Bricq. - Cet amendement est lourd de conséquences. Souvenez-vous de la création du code de l'environnement, qui a nécessité un travail exigeant et de très longue haleine ! Je remarque une constante dans les amendements du rapporteur : la défiance qu'ils traduisent vis-à-vis de l'économie, qui est pourtant le sujet de ce texte. Cet amendement, comme nombre d'autres, vise à tout rapatrier dans le giron de la Chancellerie. Ces professions sont certes réglementées, mais elles offrent des services au secteur économique, ce sont ce qu'on appelle des intrants. Le coût de leurs prestations, la manière dont elles sont exercées ont une influence directe sur le fonctionnement de l'économie, d'autant qu'elles sont parfois rassemblées au sein de sociétés. Il y a bien un rapport direct avec l'objet de ce texte, qui est de faciliter la lisibilité du fonctionnement de l'économie.
M. Jacques Bigot. - Je comprends l'intention du rapporteur, mais la codification ne règlera pas le problème de l'accès au droit.
M. François Pillet, rapporteur. - Bien sûr.
M. Jacques Bigot. - Les codes sont souvent des compilations de textes qui s'entremêlent. Regardez le code des sociétés ! Celui que propose cet amendement ne me parait pas indispensable, et en tout cas prématuré.
M. François Pillet, rapporteur. - Il s'agit de codifier une cinquantaine de textes, à droit constant, pour permettre au consommateur de droit de disposer d'un document clair.
« Défiance », le mot est un peu fort. Il n'est pas impossible que, dans certains domaines, j'ai cru bon de revenir à l'état qui me paraissait naturel, notamment en rendant au ministère de la justice ce qui a toujours été de sa compétence et de sa responsabilité.
L'amendement n° 846 est adopté et devient un article additionnel.
M. François Pillet, rapporteur. - L'article 12, qui réforme les tarifs des officiers publics ou ministériels et de certains auxiliaires de justice, a soulevé de vives critiques, parfois légitimes. Les amendements que je vous propose s'emploient à y remédier.
Lors des auditions, chacun a reconnu la nécessité d'une réévaluation régulière des tarifs, ainsi que d'une détermination plus pertinente et transparente des barèmes. En revanche, l'approche exclusivement économique qui inspire certaines dispositions du texte prend insuffisamment en compte les missions particulières confiées aux professions concernées ainsi que les sujétions qui leur sont imposées. Les missions de service public confiées aux officiers publics ou ministériels et à certains auxiliaires de justice, le haut niveau de sécurité juridique qu'ils offrent à nos concitoyens et le maillage territorial qu'ils assurent justifient que, sans pour autant les soustraire au jeu d'une concurrence encadrée, leurs prix soient réglementés et leur garantissent un juste niveau de rémunération.
Par conséquent, je vous propose de modifier l'article 12 dans quatre directions : en tenant compte de la spécificité de l'activité juridique, qui n'est pas une marchandise comme les autres ; en garantissant à tous les professionnels concernés une juste rémunération ; en renforçant le mécanisme de péréquation et en évitant sa dénaturation ; en simplifiant et en encadrant la remise tarifaire.
Mon amendement n° 847, qui en satisfera d'autres, retire le dispositif proposé du code de commerce pour l'introduire au présent article. En effet, l'appartenance à une des professions juridiques et judiciaires concernée est incompatible avec la qualité de commerçant. Surtout, ce rattachement au code de commerce confond symboliquement les prestations juridiques offertes par les intéressés, y compris celles constitutives de prérogatives de puissance publique, avec n'importe quel produit commercial.
L'amendement n° 850 restitue au seul ministre de la justice la compétence pour arrêter le tarif des professions concernées, en supprimant celle, conjointe, du ministre de l'économie.
Dans un souci d'équilibre avec le texte de l'Assemblée nationale, je vous proposerai néanmoins de conserver l'avis préalable de l'Autorité de la concurrence, contesté lors des auditions. L'amendement n° 855 simplifie la procédure d'avis, qui demeure purement consultatif.
M. Alain Richard. - L'Autorité de la concurrence n'est pas une autorité consultative.
M. François Pillet, rapporteur. - Il n'y a pas lieu de lui donner des pouvoirs normatifs.
M. Alain Richard. - C'est contestable.
M. François Pillet, rapporteur. - Enfin, l'amendement n° 848 rappelle que lorsqu'un professionnel est autorisé à exercer une activité dont la rémunération est fixée par un tarif propre à une catégorie qu'il s'agisse d'auxiliaires de justice ou d'officiers publics ou ministériels, sa rémunération est arrêtée conformément aux règles dudit tarif. Pour garantir à tous les professionnels concernés une juste rémunération, je vous propose de préciser que dans le cas des officiers publics ou ministériels la rémunération raisonnable tient compte des sujétions qui pèsent sur eux.
Pour que le mécanisme de péréquation tarifaire s'applique à toutes les professions et pas seulement aux notaires, mon amendement n° 851 prévoit d'inclure dans son champ les actes relatifs à des biens autres qu'immobiliers. Je vous propose également, dans l'amendement n° 852 de supprimer la disposition du texte selon laquelle le fonds de péréquation interprofessionnelle peut être utilisé au profit du financement de l'aide juridictionnelle et des maisons de justice et du droit. En effet, l'objet de la péréquation doit être de soutenir les professionnels contraints d'effectuer un nombre trop important d'actes à perte, grâce au prélèvement effectué sur ceux qui accomplissent un nombre suffisant d'actes très rémunérateurs. Dans la mesure où certaines études bénéficient d'un panier de prestations beaucoup plus rémunérateur que d'autres, la péréquation n'est pas seulement financière, mais aussi tarifaire. Je propose donc de supprimer le caractère interprofessionnel du fonds afin que ces péréquations soient l'une comme l'autre organisées spécialement au sein de chaque profession. On évitera ainsi de faire payer d'autres professionnels pour les imperfections du système de péréquation tarifaire retenu pour une seule profession. L'amendement n° 852 étend également la compétence du fonds de péréquation à l'indemnisation des professionnels ayant subi un préjudice du fait de l'installation d'un nouveau concurrent. Ce dispositif évitera que celui qui crée un nouvel office doive assumer la charge d'indemniser ses confrères en place, comme c'est le cas pour les jeunes notaires, six mois après leur installation.
Il est nécessaire de revoir le mécanisme de la remise proposé par les députés qui, en ne visant que les actes de moyenne gamme, risque de mettre en péril les unités économiques les plus fragiles et de préserver les plus rentables. Un tel risque serait dangereux pour le maillage territorial des officiers publics ou ministériels et contraire au principe d'une juste concurrence encadrée. Je vous propose, dans l'amendement n° 853 d'y substituer une remise possible sur les droits proportionnels, immobiliers ou non, pour un émolument supérieur à un seuil fixé par arrêté ministériel.
Enfin, l'amendement n° 854 prévoit de renvoyer à un décret en Conseil d'État la détermination des autres types de remises qui peuvent être consenties par les intéressés lorsque les prestations auxquelles s'appliquent leur tarif entrent en concurrence avec d'autres prestations accomplies par des professionnels non soumis, sur ce point, à un barème tarifaire. Cet amendement évitera par exemple que les notaires ne puissent plus consentir de remise en matière de négociation immobilière, alors que d'autres professionnels concurrents, comme les agents immobiliers, peuvent fixer librement leur rémunération.
Mme Nicole Bricq. - Vous proposez de retirer du code du commerce certaines prestations des professions réglementées, alors qu'il s'agit de prestations marchandes qui ont une influence sur la vie des entreprises et de l'économie. Il n'y a pas que les yaourts qui entrent dans le champ de la concurrence ! Votre défiance par rapport au ministère de l'économie et à l'Autorité de la concurrence est notable. Or, je rappelle ce qu'a dit Mme Taubira lors de son audition : la décision lui reviendra pour les professions réglementées. In fine, c'est le ministère qui décide, pas l'Autorité de la concurrence. C'est une conception originale de la péréquation que de l'étendre à des processus d'indemnisation tout en refusant que certaines professions financent l'aide juridictionnelle. Nous risquons de refuser beaucoup de vos amendements.
M. Jacques Bigot. - Le champ d'application du code du commerce est large : liberté des prix, concurrence, professions réglementées... Il aurait été plus simple de présenter un amendement pour le rebaptiser « code du commerce et de l'économie ». Les tarifs sont réglementés en fonction des contraintes professionnelles ; ils peuvent évoluer et être appréciés à leur juste valeur, ce qui n'a pas été toujours fait. L'Autorité de la concurrence est toute indiquée pour donner un avis. La pétition de principe d'exclusion du code du commerce n'est ni essentielle, ni fondamentale.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je suis très attaché à la spécificité du droit du ministère de la justice et aux prérogatives du garde des Sceaux. Par conséquent, je ne peux pas souscrire à une démarche qui banaliserait les actes pour en faire un sujet de concurrence. Cela n'empêche pas pour autant de recourir à l'avis de l'Autorité de la concurrence.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Lors de son audition, la garde des Sceaux a été très claire sur ce point.
M. Henri Tandonnet. - Je remercie le rapporteur pour sa proposition d'ensemble qui établit un équilibre entre l'aspect économique des prestations de service des professions réglementées et leur spécificité. Notre économie ne souffre pas de la concurrence, mais de conflits d'intérêts et de déontologie. Ce n'est pas le moment de céder ! Laisser les professions réglementées sous la coupe du garde des Sceaux est une très bonne chose. Le rapporteur fait preuve de nuance en n'évinçant pas l'Autorité de la concurrence dont la légitimité n'est pas toujours évidente. En ce qui concerne les tarifs, nos collègues de l'Assemblée nationale ont rétabli une certaine cohérence en soutenant les professionnels qui se trouvent dans des territoires économiques moins favorables. Le fonds de péréquation que le rapporteur propose de mettre à la disposition des professions réglementées favorise l'installation des jeunes. Il ne serait pas cohérent de l'utiliser pour activer l'aide juridictionnelle. Un projet est en cours à l'initiative du garde des Sceaux pour instituer une aide juridictionnelle généralisée. Si l'on doit faire des prélèvements, il faut que ce soit sur toutes les professions juridiques.
M. Michel Raison. - Je reste sceptique quand j'entends Mme Bricq affirmer qu'il n'y a pas que les yaourts qui entrent dans le champ de la concurrence. On ne va quand même pas passer un acte notarié en tête de gondole ! En matière de professions réglementées, le système français offre une sécurité juridique incomparable. On paie à chaque fois qu'on achète un yaourt ; ce n'est pas forcément le cas chez le notaire, qui est comme un médecin de famille. La concurrence n'est pas la même. Il faut favoriser l'installation des plus jeunes, certes ; il n'en reste pas moins que le système français est pris en exemple par nos voisins. Maintenant, si vous voulez que l'on puisse passer des actes notariés chez Leclerc, dites-le !
M. Jacques Bigot. - Se pose un problème de cohérence. Le rapporteur nous propose la création d'un code de l'accès au droit. C'est intéressant, car certains craignent qu'à trop glisser dans l'économique, on risque de négliger les solutions d'accès au droit que représentent les professions réglementées. Effectivement, dans certaines zones, les notaires n'arrivent pas à survivre, tandis que dans d'autres, les plus grosses études sont de véritables entreprises. Mais, l'accès au droit, c'est aussi l'accès à la justice, ce qui pose un problème de financement de l'aide juridique. On ne peut pas vouloir faciliter l'accès au droit, en refusant, comme nous le propose le rapporteur, d'y contribuer par un tarif réglementé.
M. Jean-Pierre Bosino. - Nous avons déposé un amendement pour supprimer l'article 12. Paradoxalement, il s'agit d'un débat à front renversé : en général, la gauche s'oppose à la dérèglementation...
M. Philippe Dallier. - C'était avant !
M. Jean-Pierre Bosino. - Les élections départementales ont montré que nos concitoyens avaient plus que jamais besoin de règles et de repères. L'activité juridique n'est pas une activité comme une autre, et notre système fonctionne relativement bien. Un article qui transforme la justice en yaourt ne fera pas avancer les choses. Il est important de veiller à ce que le ministre de la justice conserve ses prérogatives. L'économie n'est pas une science exacte : ce sont des hommes et des femmes qui font de la politique en prenant des décisions.
Mme Sophie Joissains. - Cela ne me choque pas que le fonds de péréquation serve aussi à financer l'aide juridictionnelle. Dans le rapport que nous avons rendu avec Jacques Mézard, nous avions plutôt parlé de pourcentages sur les actes réglementés et sur les contrats d'assurance juridique. En revanche, je crois que ce projet de loi n'est pas le lieu où traiter cette question, à moins de devenir un fourre-tout où l'on traite de manière égale des choses qui ne le sont pas. On ne peut pas comparer les pots de yaourt et l'accès au droit !
Mme Nicole Bricq. - Ne changeons rien !
Mme Sophie Joissains. - Changeons beaucoup de choses, mais restons cohérents. L'accès au droit n'a rien à voir avec la vente de yaourts !
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Madame la garde des sceaux a dit en substance que la justice et le droit ne pouvaient pas être abordés sous le seul angle économique, même si l'économie ne leur est pas étrangère.
M. François Pillet, rapporteur. - J'ai écouté avec intérêt les propos de Jean-Pierre Sueur. Je ne crois pas que la question de savoir si le code de commerce doit inclure ou non les dispositions dont nous discutons justifie l'anathème. Si certains tarifs sont déjà intégrés dans le code de commerce, c'est parce qu'ils concernent la législation sur le redressement des entreprises qui, elle, y a toute sa place. Je crois qu'il est important de rappeler que l'accès au droit n'est pas une activité purement économique.
Il faut également distinguer péréquation et aide juridictionnelle. Le système de péréquation aidera les notaires à supporter la masse des actes qui ne sont pas assez rémunérateurs, tout en facilitant l'indemnisation des notaires en exercice par leurs jeunes confrères qui s'installent. Je suis étonné que vous ne saisissiez pas cette perche.
J'en viens à mon premier amendement, le n° 847, qui retire les dispositions relatives aux tarifs réglementés du code de commerce. Je rappelle que l'Autorité de la concurrence intervient à titre d'avis. Je vous propose une solution d'équilibre entre le texte qui nous est proposé et les progrès qui restent à accomplir.
M. Alain Richard. - Les professions réglementées peinent à se développer dans les zones urbaines où le nombre des transactions a augmenté. Malgré l'existence d'un service propre aux professions juridiques, le ministère de la justice n'a pas exercé de fonction dynamique. L'Autorité de la concurrence a un rôle d'arbitrage et n'est pas consultative. Initialement, il existait un conseil chargé de lutter contre les positions dominantes, dont le rôle n'était que consultatif. Il a été remplacé par une autorité indépendante chargée de rompre les situations d'entente. L'évolution du nombre de notaires et leur répartition géographique représente bien la situation ankylosée contre laquelle nous sommes tous d'accord pour lutter. L'Autorité de la concurrence doit détecter les lieux où le chiffre d'affaires de l'activité notariale a augmenté sans création d'activité. Il serait plus cohérent qu'elle puisse identifier les départements où il manque des notaires et l'indiquer au garde des Sceaux.
M. François Pillet, rapporteur. - Nous pourrons avoir ce débat à l'article 13 bis.
L'amendement n° 847 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 848 prévoit que lorsqu'une profession exerce une activité dans le domaine d'une autre, elle applique les mêmes tarifs.
L'amendement n° 848 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 849 intègre dans l'appréciation du caractère raisonnable de la rémunération versée aux professionnels les sujétions particulières auxquelles ils sont soumis, telles que l'obligation d'instrumenter, les restrictions d'installation ou de développement ou encore les obligations d'archivage.
L'amendement n° 849 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 850 retire la compétence du ministre de l'économie pour arrêter les tarifs des professions du droit réglementées. En effet, cette attribution doit échoir au seul ministre de tutelle de ces professions, le ministre de la justice.
M. Michel Raison. - Mme Taubira nous a appelés au secours...
M. François Pillet, rapporteur. - Nous sommes en train de faire une loi pour encadrer un pouvoir qu'avait le Gouvernement et qui n'a jamais été exercé.
Mme Nicole Bricq. - J'ai bien compris que vous opposiez Mme Taubira et M. Macron. M. Richard l'a rappelé tout à l'heure : quand un texte arrive au Parlement, il a été arbitré, et il engage le Gouvernement. Dans l'audition de Mme Taubira, il n'y a qu'un moment d'ouverture : celui où elle a parlé des tribunaux de commerce spécialisés. Votre amendement est similaire au n° 522 de Mme Lamure pour le groupe UMP. Il y a bien une volonté politique de dessaisir le ministère de l'économie.
M. Alain Richard. - C'est une curieuse querelle. Dans la hiérarchie des normes, l'État et le Gouvernement sont compétents pour prendre cet arrêté. Je ne sais pas d'où vient la disposition actuelle de l'article L. 444.3 qui dit que ce tarif est arrêté « conjointement par les ministres de la justice et de l'économie ». Ce n'est juridiquement pas nécessaire. La compétence revient au Gouvernement.
M. François Pillet, rapporteur. - Même après un match de football, l'arbitrage est commenté par les joueurs.
L'amendement n° 850 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Pourquoi ne tarifer proportionnellement que les transactions immobilières d'un certain montant ? D'autres opérations peuvent porter sur des biens de grande valeur, qui ne sont pas forcément immobiliers. L'amendement n° 851 redonnera un sens au tarif : l'on taxera les prestations les plus importantes, ce qui va dans le sens de la loi.
L'amendement n° 851 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 852 modifie substantiellement le fond de péréquation prévu par les députés. Il faut lancer une réflexion générale pour que l'aide juridictionnelle soit financée par l'ensemble des professions et pas seulement par une seule.
M. Jean-Pierre Sueur. - Le rapport de nos collègues Joissains et Mézard est une très bonne référence qui pourrait inspirer la péréquation future.
L'amendement n° 852 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Le texte ne prévoit de remise que pour les petites et moyennes études. L'amendement n° 853 ouvre la possibilité d'une concurrence totale sur les actes les plus lourds en matière d'honoraires.
M. Jacques Bigot. - Il faudra en débattre dans l'hémicycle, avec le ministre.
Mme Nicole Bricq. - Vous supprimez le plafond et la possibilité des remises. Avoir l'éclairage du ministre aurait été souhaitable pour éviter de réaliser en séance un travail de commission.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Il ne faudrait pas à l'inverse faire le travail de séance en commission. Habituellement, le ministre n'assiste pas à l'examen des amendements du rapporteur, ce qui n'empêche pas que nous l'entendrions s'il avait des amendements substantiels à présenter ; le dialogue continue et le rapporteur, qui a présenté précisément ses amendements hier au cabinet du ministre, connaît la position du Gouvernement.
M. Alain Richard. - Quand le rapporteur sait que sa proposition est soutenue par le Gouvernement, il pourrait nous en informer.
M. Michel Raison. - Pourquoi ? Cela changerait-il votre position ?
Mme Nicole Bricq. - Cela m'intéresse.
M. Alain Richard. - Sur des sujets économiques qui concernent l'équilibre du territoire, cela m'intéresse de connaître la position du Gouvernement. Dans un régime parlementaire, il y a une solidarité entre le Gouvernement et la majorité. L'application d'une certaine concurrence sur les tarifs ne se produit pas forcément au bon point de l'échelle de rémunération. Tous les actes notariés ont un coût de base. Dans un département moyen, si les deux ou trois offices du chef-lieu font une remise de 20 % sur leurs prix, grâce à un volume d'activité important, les chiffres d'affaires des petits offices risquent de passer en dessous du point mort. Le modèle de concurrence sur les prix que propose le texte ne me paraît pas abouti.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Le rapporteur, même s'il est informé, n'est pas le plus autorisé pour engager le Gouvernement. Il faut trouver un équilibre.
M. François Pillet, rapporteur. - Prévoir des remises encadrées sur les zones intermédiaires du tarif n'est pas du tout concurrentiel. J'ai reçu, hier, les services de Bercy pour faire le point sur les amendements déposés. Lors d'une rencontre précédente, le ministre s'était montré très intéressé sur l'utilisation du fonds de péréquation pour indemniser les notaires spoliés. Sur d'autres points, les avis n'ont pas été très précis. Peut-être le texte sera-t-il modifié en séance ? Ma pratique a porté des fruits. Je voudrais que le Sénat apporte une plus-value dans un état procédural où il peut se retrouver avec un texte qui n'est pas le sien.
L'amendement n° 853 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 854, qui s'inscrit dans la logique du précédent, rétablit la possibilité pour le pouvoir réglementaire de prévoir d'autres facultés de remise, lorsqu'une profession réglementée exerce une activité qui est aussi celle d'une autre profession. Il faut que les notaires, confrontés à la concurrence des agents immobiliers, puissent appliquer des remises sur leur tarification de négociation.
L'amendement n° 854 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 855 procède à une nouvelle rédaction, sans en changer le sens, des dispositions relatives au pouvoir d'avis de l'Autorité de la concurrence sur les prix et tarifs réglementés. Le Gouvernement pourra saisir de ces questions l'Autorité de la concurrence, qui aura la faculté de s'en saisir elle-même. Réunissant les deux dispositifs dans un nouvel article, l'amendement simplifie la procédure informelle de consultation des associations de consommateurs comme des organisations professionnelles et oblige le Gouvernement à informer l'Autorité de la concurrence de son intention de réviser certains prix ou tarifs réglementés.
M. Alain Richard. - Sur ce point, les dispositions du texte ne concernent que les tarifs spécifiques à l'activité notariale. L'amendement précédent était-il justifié ? Lorsqu'il exerce son activité de négociation immobilière, le notaire est en tarification commerciale libre.
M. François Pillet, rapporteur. - Non, car il est tarifé ; il a droit à un émolument. Je l'autorise à s'aligner ou à faire concurrence.
M. Alain Richard. - Mais vous avez en même temps fait disparaître le plafonnement de la remise pour ces activités notariales.
L'amendement n° 855 est adopté.
L'amendement rédactionnel n° 856 est adopté, ainsi que l'amendement n° 857.
Les amendements nos 590, 814, 591, 666, 202, 518, 731, 721, 203, 722, 519 et 732 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. -Rien dans le dispositif tarifaire que je vous propose ne risque de porter atteinte à la mission de service public assurée par les greffiers des tribunaux de commerce : la péréquation existant entre les actes rémunérateurs et les actes accomplis en-deçà du prix coûtant sera maintenue. En revanche, il sera possible de vérifier que les tarifs ne peuvent pas être mieux alignés sur le coût réel des prestations délivrées. Avis défavorable aux amendements similaires nos 546, 565 et 829.
Les amendements nos 546, 565 et 829 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - J'ai recherché un équilibre acceptable entre le projet de loi et le respect de la spécificité des prestations juridiques : la compétence du ministre de l'économie est supprimée, mais l'avis, uniquement indicatif, de l'Autorité de la concurrence est maintenu. Ce faisant, l'amendement n° 813 est largement satisfait.
L'amendement n° 813 est retiré.
Les amendements nos 204, 520, 733, 205, 521, 593, 667, 734, 522, 595, 668, 735, 523, 597, 669 et 736 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 524. Le président Lasserre a dit à plusieurs reprises que pour exercer ses nouvelles missions l'Autorité de la concurrence aurait seulement besoin de trente agents et de sept millions supplémentaires.
M. Alain Richard. - Vous ne suivez pas la logique de votre co-rapporteur sur l'Autorité de régulation des activités ferroviaires.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Nous pourrons avoir le débat en séance.
L'amendement n° 524 devient sans objet ainsi que les amendements nos 737, 525 et 670.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 709 est satisfait par le projet de loi, dans la mesure où ce dernier ne porte que sur des actes tarifés, ce qui laisse en honoraires libres toutes les autres prestations accomplies par les officiers publics ou ministériels. Une obligation de convention d'honoraires peut être une bonne idée, mais il faudrait plutôt prévoir cette mention aux articles 14 à 16, consacrés à chaque profession, comme c'est le cas à l'article 13 pour les avocats. Je vous proposerai donc de retirer cet amendement et de le redéposer, pour la séance publique, aux articles 14 à 16. Je me tiens à votre disposition pour examiner avec vous les modifications nécessaires.
L'amendement n° 709 est retiré.
L'article 12 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - La postulation a suscité beaucoup de débats avec Mme la garde des Sceaux, notamment au sujet de la profession d'avocat. Elle protège le maillage territorial et le maintien de certains petits barreaux sans lesquels l'aide juridictionnelle et la garde à vue seraient compromises dans certains territoires. Elle est également intéressante pour les magistrats, car la mise en état des dossiers par voie informatique et dématérialisée n'est pas encore suffisamment avancée. Les expérimentations effectuées à Bordeaux-Libourne et Nîmes-Alès ne sont pas rassurantes. C'est pourquoi, l'amendement n° 864 propose que nous recourions à une expérimentation, ce qui est aussi l'avis que la rapporteure thématique de l'Assemblée nationale avait exprimé dans son rapport d'information.
Mme Nicole Bricq. - De notre côté, nous considérons que les expérimentations qui ont été menées sont positives. Pourquoi attendre encore et demander un rapport, alors que par principe vous demandez la suppression de tous les rapports ? Je ne suis pas favorable à cette proposition dilatoire.
M. François Pillet, rapporteur. - En plus du monopole du droit, les avocats ont celui de la représentation des parties devant le tribunal de grande instance. Quand un confrère de Paris veut suivre une affaire au tribunal de grande instance de Bordeaux, il a l'obligation de faire appel à un correspondant qui s'assurera de la régularité de la procédure pour un tarif qui portera sur la partie perdante. Cette mesure protégeait les avocats locaux contre la venue d'avocats extérieurs représentant une clientèle d'institutionnels importants. Elle assure également la pérennité des petits barreaux. L'expérimentation que je propose dans l'amendement n° 864 concerne les cours d'appel. Selon le bâtonnier de Libourne, ses confrères auraient perdu 70 à 80 % des dossiers de postulation. Une note de l'observatoire du Conseil national des barreaux du 7 octobre 2014 fait apparaître que dans le classement des dix barreaux dans lesquels les revenus moyens des avocats sont les plus faibles, on en retrouve cinq situés dans une zone de multipostulation : trois barreaux de la Cour d'appel de Paris (Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Essonne), ainsi que les barreaux de Libourne et Alès. La postulation demande à être maniée avec précaution. À terme, elle est amenée à disparaître. Cependant, la profession n'est pas encore prête pour cela. Aller brutalement à la multipostulation au sein d'une cour d'appel n'ira pas sans difficultés. La Chancellerie en est consciente. La solution que je propose est intermédiaire.
M. Philippe Dallier. - Dans le département de la Seine-Saint-Denis, les avocats sont très inquiets de cette déréglementation. Désert médical, désert juridique, ce département compte 1,5 million d'habitants. Bobigny est le deuxième parquet en nombre d'affaires traitées.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Quel était l'intérêt pour le Gouvernement de proposer ce qu'il a proposé ?
Mme Nicole Bricq. - Il voulait voir ce que cela donnerait.
M. Henri Tandonnet. - Je voulais supprimer cette mesure inappropriée. Je souscris à la proposition du rapporteur de tenter cette expérimentation au niveau de la cour d'appel. Cependant, la postulation reste au niveau du tribunal pour certaines matières comme les saisies immobilières, les licitations, les partages. On risque de multiplier les incidents de procédure. Supprimer la postulation au niveau de chaque tribunal de grande instance exigera du personnel de greffe supplémentaire. Le procès y perdra en sécurité. Mettre en place une postulation au niveau de la cour d'appel risque de déstabiliser les barreaux.
M. Jacques Bigot. - La postulation concerne de moins en moins de procédures. On est dans une forme d'hypocrisie, car la paupérisation de la profession d'avocat sévit surtout au barreau de Paris où il y a quelques riches grands cabinets et de nombreux autres très pauvres. Si l'on veut respecter les conditions d'accès au droit, la justice devra faire en sorte de s'en donner les moyens. Un compromis a été trouvé. On peut s'en tenir au texte adopté à l'Assemblée nationale.
Mme Nicole Bricq. - Il y a des exceptions à la multipostulation. L'Assemblée nationale a différé l'application de la mesure en prévoyant un délai d'un an après la promulgation de la loi. Peut-être est-il possible de concilier l'expérimentation supplémentaire avec ce délai.
M. François Pillet, rapporteur. - J'ai choisi de ne pas supprimer la mesure, car il me semble qu'elle s'inscrit dans l'avenir. Si l'effet de la loi est différé, nous pouvons en profiter pour tenter l'expérimentation.
L'amendement n° 864 est adopté.
Les amendements rédactionnels nos 858, 859 et 860 sont adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - L'obligation faite à un avocat qui dispose d'un bureau secondaire d'accomplir ses obligations en matière d'aide juridique dans le ressort du TGI où ce bureau est établi pose de multiples problèmes. Elle suppose un rattachement à deux barreaux. En outre, l'avocat aurait alors des obligations en matière d'aide juridique mais aurait l'interdiction de bénéficier des décisions d'aide juridictionnelle. Ceci est incohérent. C'est pourquoi, l'amendement n° 861 supprime les alinéas 12 et 13.
Mme Nicole Bricq. - L'avocat devra quand même satisfaire ses obligations en matière d'aide juridictionnelle.
M. François Pillet, rapporteur. - En l'espèce, l'avocat qui a un bureau secondaire est déjà soumis aux obligations liées à son bureau principal (garde à vue, etc.). Dans le cas du bureau secondaire, il ne bénéficiera pas des aides juridictionnelles normalement associées et, ce qui est encore plus étrange, il serait sous l'autorité de deux bâtonniers.
M. Henri Tandonnet. - Ça ne fonctionne pas !
L'amendement n° 861 est adopté.
L'amendement de coordination n° 862 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Soumettre les conventions d'honoraires conclues entre des avocats et leurs clients au contrôle de la DGCCRF pose de sérieuses difficultés. Soit ce contrôle est purement formel et se limite à vérifier l'existence de la convention, soit il porte sur son contenu et contrevient au secret professionnel. La DGCCRF, que j'ai rencontrée, me semble avoir compris le problème. Elle souhaitait uniquement un contrôle formel. Le débat public sera l'occasion d'une plus ample information sur ce point.
M. Jacques Bigot. - La convention d'honoraires, indiquant les modalités de rémunération, n'est pas couverte par le secret professionnel. Dès lors que les indemnités de l'article 700 couvrent les honoraires, les avocats auraient tout intérêt à la faire figurer dans les dossiers.
M. Henri Tandonnet. - Si la convention elle-même ne relève pas du secret professionnel, c'est bien le cas quand le montant de la rémunération dépend de la difficulté du procès. Le contrôle de la DGCCRF viendrait d'ailleurs s'ajouter à celui du bâtonnier.
Mme Nicole Bricq. - Toujours la même suspicion à l'égard des services du ministère de l'économie ! Lorsque l'Autorité de la concurrence a été créée en 2008, la DGCCRF s'est crue dépossédée de son pouvoir dans le domaine de la concurrence ; or tout s'est finalement très bien passé. Vous avez cependant raison de proposer que l'on vérifie en séance ce que le ministre entend par « le contrôle de la DGCCRF ».
M. François Pillet, rapporteur. - Ma propre pratique d'avocat était bien celle préconisée par Jacques Bigot : lorsqu'il s'agit de justifier un article 700, rien de tel que de produire sa convention d'honoraires. Tout dépend, cependant, de ce qu'elle stipule : si elle fixe simplement un tarif horaire, je suis prêt à la présenter à la DGCCRF ; mais certaines conventions - par lesquelles le justiciable est bien mieux informé - détaillent la stratégie qui mènera à tel et tel tarif - stratégie qui, elle, relève bien du secret professionnel. C'est pourquoi je souhaite une précision du ministre sur l'étendue du contrôle.
L'amendement n° 863 est adopté, ainsi que les amendements identiques nos 656, 571, 794 et 710.
Les amendements nos 572, 598, 795, 711 et 107 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 556 prévoit une postulation au niveau du département, alors que je vous ai proposé de l'expérimenter au niveau de la cour d'appel.
L'amendement n° 556 devient sans objet, ainsi que les amendements nos 764 et 108.
M. François Pillet, rapporteur. - Les auteurs de l'amendement n° 194 proposent de définir la consultation juridique, ce qui mérite réflexion. Pourquoi ne pas faire de même pour la rédaction d'actes sous seing privé, qui constitue l'autre prestation délivrée par les professionnels de droit ? La définition proposée pose un problème délicat au regard des obligations de lutte contre le blanchiment : les avocats sont exonérés de toute obligation déclarative touchant leurs consultations, sauf lorsqu'elles sont directement fournies à des fins de blanchiment ou de financement du terrorisme, ou lorsqu'ils savent que le client les demande à cette fin. Définir trop largement la consultation, en mettant le conseil sur le même plan que l'avis, diminue l'efficacité du dispositif TRACFIN. Avis défavorable.
L'amendement n° 194 est retiré.
Les amendements identiques nos 574, 657 et 797 ne sont pas adoptés.
Les amendements nos 573, 796, 193 et 712 deviennent sans objet.
L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - Consacré à la liberté d'installation, l'article 13 bis m'a semblé appeler, de même que l'article 12, la recherche d'un équilibre entre les objectifs de la réforme et la protection de notre maillage territorial, ainsi que le maintien d'un haut niveau de sécurité juridique.
Les amendements, dont je me suis entretenu avec les principales professions concernées, réaffirment, comme à l'article 12, la compétence du seul ministre de la justice : les nos 865 et 874 suppriment la compétence du ministre de l'économie et remplacent le pouvoir de proposition de l'Autorité de la concurrence par un avis simple, puisque ce pouvoir, qui liait nécessairement la compétence du ministre de la justice, est incompatible avec la portée donnée ici à la définition des zones qui en résulte. Plus encore que la concurrence et la libre installation, la sécurité juridique doit être prise en considération lorsqu'il s'agit de pourvoir un office public. Il revient au ministre de la justice d'en décider, suivant les circonstances.
Responsabilité et décision ne doivent pas être séparées. Si le ministre de la justice est l'autorité de tutelle des officiers publics ou ministériels, son pouvoir d'appréciation ne peut être transféré à une autre autorité, qui lierait sa décision sans en assumer la responsabilité.
Il convient d'aménager la procédure de libre installation afin de tenir compte des demandes concurrentes. L'article 13 bis ne dit rien du cas où plusieurs candidats se présenteraient dans une zone de libre installation. Comment concilier alors le principe de libre installation et la régulation de l'offre de service ? Mon amendement n° 868 prévoit que le ministre de la justice classe les demandeurs par ordre de mérite au terme d'un concours, avant de désigner ceux qui pourront créer un office. Il est également nécessaire de prévoir la situation dans laquelle l'offre de services serait devenue satisfaisante, grâce à des créations antérieures à la révision de la carte. Le ministre de la justice doit alors pouvoir refuser les demandes d'installation qui lui seraient encore adressées.
Distinguant deux zones, le dispositif retenu par le Gouvernement et les députés en laisse une troisième dans l'ombre. Entre celles où la proximité ou l'offre de services est insuffisante et celles où la création d'un nouvel office porterait atteinte à l'exploitation des offices existants, il y a celles où l'offre est satisfaisante mais où un office pourrait néanmoins être créé sans impliquer la faillite d'un autre. Dans le silence du texte, l'on ne sait si le ministre de la justice pourrait refuser une nouvelle demande de création. Une telle lacune caractériserait une incompétence négative du législateur. Mon amendement n° 870 comble cette lacune en laissant au ministre de la justice un réel pouvoir d'appréciation.
Afin de renforcer le dispositif indemnitaire, l'amendement n° 872 instaure, conformément à ce que je vous ai proposé à l'article 12, la prise en charge par le fonds de péréquation professionnelle de l'indemnisation que le nouvel officier public ou ministériel doit aux concurrents lésés par la création de son office. La profession participera ainsi, dans son ensemble, à l'installation de ses nouveaux membres.
Mon amendement n° 871, enfin, remplace le renvoi au juge de l'expropriation par un renvoi au tribunal de grande instance en cas de désaccord sur l'indemnisation. Le juge de l'expropriation, qui connaît ordinairement d'affaires opposant la puissance publique à un particulier, ne paraît pas le plus apte à traiter des contentieux indemnitaires entre personnes privées.
Mme Nicole Bricq. - L'amendement n° 865 revient sur des principes essentiels à l'esprit de la loi. Nous nous y opposerons. Vos autres amendements ont en revanche le mérite de combler des lacunes du texte. Nous vous donnons acte d'avoir accompli en cela votre travail de rapporteur.
M. Alain Bertrand. - La définition des zones où la création d'un nouvel office constituerait un préjudice doit reposer sur la notion de valeur patrimoniale : si, dans un petit département comme la Lozère, où cinq notaires font péniblement leurs affaires, vous en laissez s'établir un sixième, la valeur patrimoniale des études s'en trouvera considérablement réduite. Il en va de même des charges d'huissiers de justice, d'autant que leur ressort ne sera plus départemental, mais régional. Il faut songer à protéger les auxiliaires de droit qui sont au service des plus faibles dans les zones hyper-rurales. Quelqu'un de riche s'en sortira toujours.
M. Alain Richard. - Je suis déçu. Il m'avait semblé que le rapporteur reconnaissait que l'expérience actuelle, sans incitation à de nouvelles installations de notaires, était négative. La profession a été malthusienne, tout comme le service ministériel qui est son interlocuteur traditionnel. La définition de la carte, fixant une priorité d'installation là où l'Autorité de la concurrence aurait identifié des besoins non satisfaits, était une façon de changer la réalité. Si l'on se borne à un simple avis, la routine habituelle va reprendre.
Mme Nicole Bricq. - Exactement : on ne change rien.
M. François Pillet, rapporteur. - Un point change considérablement les données du ministère : l'avis de l'Autorité est désormais public.
M. Alain Richard. - Cela comptera-t-il plus que ses relations avec la profession ?
M. François Pillet, rapporteur. - S'agissant de la Lozère, il ne me semble pas qu'elle se trouve dans une zone carencée. Et si par hasard elle se trouvait dans une zone du second type, elle serait garantie par l'obligation d'obtenir l'avis du ministre. Monsieur Richard, nous sommes en train de faire une loi contraignant le Gouvernement à exercer ses propres pouvoirs. La proposition de l'Autorité de la concurrence lierait le ministre.
M. Alain Richard. - Sur le choix du lieu, non sur celui de la personne. Et l'expérience a montré que c'était nécessaire.
M. François Pillet, rapporteur. - Le ministre subira de surcroît la pression de l'opinion et des médias, puisque l'avis sera public. Vous ne contesterez pas mes efforts de conciliation.
M. Henri Tandonnet. - Demander à un ministère d'être responsable des professions réglementées et attribuer à un autre la fixation du nombre de professionnels en la faisant dépendre de l'avis d'une autorité indépendante ne fonctionnera pas. Les notaires maniant des fonds privés et publics, la surveillance de la profession entraîne des responsabilités importantes, que l'Autorité de la concurrence n'assumera pas. Je ne l'ai jamais vue, par exemple, se préoccuper des dégâts causés par l'évolution de l'implantation des stations-services à la campagne, alors que les collectivités territoriales sont désormais obligées de financer des points d'apport de produits pétroliers. Laissons cette Autorité dans son champ, qui est celui de la concurrence, non celui des professions réglementées.
M. Alain Richard. - De nombreuses communes de 20 000 habitants n'ont pourtant qu'un seul notaire.
M. François Pillet, rapporteur. - L'avis de l'Autorité de la concurrence, en plus de devenir public, sera élaboré à partir de données plus ouvertes que dans le cadre de la commission de localisation des offices de notaires (Clon).
L'amendement n° 865 est adopté.
L'amendement rédactionnel n° 866 est adopté, ainsi que l'amendement n° 867.
M. François Pillet, rapporteur. - Tout en conservant le principe de la liberté d'installation dans les zones où a été constaté un manque d'offices, l'amendement n° 868 l'aménage afin de tenir compte des situations dans lesquelles plusieurs demandes de création d'office se font concurrence.
L'amendement n° 868 est adopté, ainsi que l'amendement rédactionnel n° 869.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 870 confie au ministère de la justice l'autorisation de l'installation de nouveaux offices dans la troisième zone.
M. Alain Bertrand. - Cela va encore complexifier les choses.
M. François Pillet, rapporteur. - Pas le moins du monde : je ne crée pas cette troisième zone, je la supprime en apportant une solution au problème.
L'amendement n° 870 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Le tribunal de grande instance est le plus compétent pour trancher les conflits sur l'indemnisation des titulaires d'offices subissant une concurrence nouvelle, d'où l'amendement n° 871.
L'amendement n° 871 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - La mesure introduite par l'amendement n° 872 est, je vous le disais, d'une grande importance.
Mme Nicole Bricq. - Pourquoi n'avez-vous pas pensé à créer un fonds spécifique, plutôt que de la financer par la péréquation ?
M. François Pillet, rapporteur. - Un fonds spécifique serait forcément alimenté par une péréquation sur le coût de certains actes.
Mme Nicole Bricq. - Vous n'en faites pas moins d'une charge privée une charge publique.
M. François Pillet, rapporteur. - Pas du tout. Le ministre semblait intéressé.
M. Alain Richard. - Le projet du Gouvernement était de créer un fonds de péréquation interne à la profession. Le débat avec la majorité à l'Assemblée nationale a fait apparaître qu'il pouvait produire davantage, d'où la modification de l'affectation de ce fonds, désormais consacré à soutenir l'accès au droit. Cela suppose de le répartir entre les deux ou trois professions principales dont les recettes dépassent le seuil de subsistance.
M. François Pillet, rapporteur. - Je suis d'accord, c'est pourquoi j'ai proposé de supprimer cet aspect du texte.
L'amendement n° 872 est adopté, ainsi que l'amendement rédactionnel n° 873.
M. François Pillet, rapporteur. - L'Autorité de la concurrence n'est pas compétente en matière d'égal accès des femmes et des hommes aux offices publics ou ministériels. D'où l'amendement n° 874.
Mme Nicole Bricq. - Il ne serait pas mal qu'il y ait plus de femmes.
L'amendement n° 874 est adopté, ainsi que les amendements nos 876 et 875.
Les amendements nos 599, 602, 675, 526, 527, 528, 529 et 725 deviennent sans objet.
Les amendements de précision identiques nos 206, 321, 530, 671, 723 et 739 sont adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - Les critères de définition des zones de libre installation seront fixés par décret. Évitons de faire relever de la loi des dispositions d'ordre réglementaire. Avis défavorable à l'amendement n° 109.
L'amendement n° 109 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Les zones de liberté d'installation sont, par nature, des zones carencées où la création d'un nouvel office augmentera la qualité du service rendu. Avis défavorable aux nos 207, 531, 604 et 672.
Les amendements identiques nos 207, 531, 604 et 672 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - Obligeant le ministre de la justice à refuser toute installation qui risquerait de compromettre l'exploitation d'offices existants, l'amendement n° 208 est en retrait par rapport au droit en vigueur. Avis défavorable.
Les amendements nos 208, 322, 605, 674 et 745 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - Les amendements nos 212, 673 et 724 sont satisfaits par le texte.
M. Alain Richard. - La jurisprudence européenne reconnaît l'expérience professionnelle.
M. François Pillet, rapporteur. - Je me pencherai sur ce point d'ici la séance.
Les amendements nos 212, 673 et 724 deviennent sans objet, ainsi que les amendements nos 765 et 809.
L'article 13 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - Un notaire n'exerçant pas à proprement parler une profession libérale, puisqu'il est détenteur d'un office qui dépend de l'État, l'instauration d'une limite d'âge pour l'exercice de ses fonctions est opportune. L'amendement n° 877 supprime simplement la limitation à six mois du délai pendant lequel un notaire de plus de soixante-dix ans peut rester en fonctions dans l'attente de la prestation de serment de son successeur.
L'amendement n° 877 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 878 modifie la rédaction retenue pour l'article 4 de la loi du 25 ventôse an XI, afin de rappeler que le ministre de la justice est l'autorité compétente pour nommer les notaires et procéder aux créations, transferts ou suppressions d'offices. Il évite en outre une redondance de rédaction.
L'amendement n° 878 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Les clercs habilités déchargent les notaires de l'accomplissement de certaines formalités afin qu'ils soient en mesure d'instrumenter plus d'actes. Le présent article force les notaires à recruter des notaires salariés afin de maintenir le même niveau d'activité. Toutefois, compte tenu de la réforme tarifaire et de celle de l'installation, les notaires préféreront sans doute attendre que leur rentabilité soit stabilisée avant de recruter de nouveaux salariés. Il convient en outre de tenir compte du temps nécessaire pour que les clercs habilités, qui ne sont pas tous des notaires stagiaires, se reconvertissent ou passent le diplôme du notariat. C'est pourquoi l'amendement n° 879 prévoit une disposition transitoire : l'habilitation serait immédiatement supprimée, mais les habilitations conférées avant le 1er janvier 2015 continueraient de produire leurs effets pendant cinq ans.
M. Henri Tandonnet. - J'ai entendu l'avis de clercs habilités qui ne demandent pas du tout à devenir notaires salariés, la convention collective dont ils bénéficient actuellement leur étant plus favorable.
Mme Nicole Bricq. - Cinq ans, cela paraît très long.
M. François Pillet, rapporteur. - Monsieur Tandonnet, il faut effectivement examiner si une solution ne peut être trouvée du côté de la convention collective, qui pourrait être plus apte à traiter le problème.
M. Henri Tandonnet. - Tout à fait.
L'amendement n° 879 est adopté.
Les amendements nos 683, 505, 506, 532, 676, 726 et 740 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Avis défavorable au n° 727.
Les amendements identiques nos 727 et 743 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 753 supprime, au nom de la promotion des jeunes et des femmes, la condition d'expérience requise pour être nommé notaire. Ce n'est pas opportun.
L'amendement n° 753 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Même avis sur le n° 752, qui impose en outre au ministre de la justice de respecter la parité hommes femmes dans les nominations de notaires, alors qu'ils sont recrutés par concours.
L'amendement n° 752 n'est pas adopté.
Les amendements nos 533, 678, 744, 728, 534, 677 et 729 deviennent sans objet.
L'article 14 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 880 prévoit pour les huissiers la même disposition que nous avons adoptée pour les notaires.
L'amendement n° 880 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Même raisonnement.
L'amendement n° 881 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Les huissiers de justice ne sont pas opposés à l'extension du ressort de leur compétence du département à l'ensemble du territoire, mais demandent le temps de l'organiser. C'est pourquoi l'amendement n° 882 retient le 1er janvier 2017 comme date d'entrée en vigueur de la loi.
L'amendement n° 882 est adopté.
Les amendements nos 607, 689, 654, 653 et 820 deviennent sans objet.
L'article 15 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - Comme nous l'avons fait aux articles 14 et 15, l'amendement n° 883 modifie la rédaction retenue pour le texte de l'ordonnance du 26 juin 1816 relative aux commissaires-priseurs judiciaires, afin d'éviter une redondance de rédaction et de rappeler que le ministre de la justice est l'autorité compétente pour nommer les intéressés et procéder aux créations, transferts ou suppressions d'offices.
L'amendement n° 883 est adopté, ainsi que l'amendement n° 884.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 885 supprime le dispositif prévoyant que, lorsque, dans une zone carencée, le ministre de la justice lance un appel à manifestation d'intérêt pour une création d'office, toutes les demandes d'ouverture d'un bureau secondaire sont autorisées. Il le remplace par un mécanisme d'autorisation implicite au bout de deux mois, analogue à ce qui est prévu pour les avocats. Par coordination avec les amendements précédents, il supprime le dernier alinéa de l'article 12 de l'ordonnance de 1816, qui traite de la transformation d'un bureau annexe en office, puisque les règles relatives à la création d'offices devraient relever de l'article premier de cette ordonnance.
L'amendement n° 885 est adopté, ainsi que l'amendement rédactionnel n° 886.
M. François Pillet, rapporteur. - Par cohérence avec les votes intervenus précédemment, j'émets un avis défavorable aux amendements nos 608 et 684.
Les amendements nos 608 et 684 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n° 323.
M. François Pillet, rapporteur. - La précision proposée par l'amendement n° 823 est loin d'être anodine, puisqu'elle aboutirait à remettre en cause le monopole des notaires en matière de vente aux enchères de meubles incorporels. Je vous propose de le retirer, afin que nous examinions plus précisément la question en vue de la séance publique.
M. Henri Tandonnet. - Cette mesure contribuerait à libérer certaines activités.
L'amendement n° 823 est retiré.
M. Didier Mandelli. - L'objectif de l'amendement n° 324 est de prendre en compte les éléments incorporels inclus dans le patrimoine des entreprises en difficultés. Ainsi, lors de la liquidation de l'usine Fagor-Brandt de Vendée, le seul actif était les marques, dont la valorisation par les commissaires-priseurs est difficile.
M. François Pillet, rapporteur. - Cette intéressante question ne doit pas être tranchée au détour d'un amendement, sans concertation avec les professions concernées.
L'amendement n° 324 est retiré.
L'article 16 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 978 supprime la limitation de la durée pendant laquelle un officier public ou ministériel de plus de soixante-dix ans peut continuer d'exercer, dans l'attente de la prestation de serment de son successeur.
L'amendement n° 978 est adopté.
L'amendement n° 685 devient sans objet.
L'article 16 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 888 supprime le dispositif de liberté encadrée d'installation pour les avocats aux conseils et restitue au ministre de la justice le contrôle sur la création de ces offices. Le dispositif proposé présente le défaut de confier à l'Autorité de la concurrence le soin de se prononcer sur des matières qui échappent à sa compétence, tout en supprimant l'avis donné par le vice-président du Conseil d'État et les chefs de la Cour de cassation. Il lie, en outre, le pouvoir d'appréciation du ministre de la justice, qui ne pourrait plus refuser la création d'un office.
L'amendement réaffirme la compétence du ministre et conserve l'avis, à titre consultatif, de l'Autorité de la concurrence. Afin de garantir un suivi attentif de l'évolution de la situation, le ministre de la justice devrait examiner tous les deux ans s'il y a lieu de créer de nouveaux offices. Les avis qu'il aurait sollicités seraient rendus publics.
L'amendement ajoute aux critères à prendre en compte celui de l'accès à la justice ; il conserve le dispositif d'indemnisation prévu au présent article et revient enfin sur la rédaction de l'alinéa 16 qui supprimait indirectement la possibilité pour des professeurs de droit et des membres du Conseil d'État et de la Cour de cassation d'être dispensés de l'examen d'aptitude professionnelle pour exercer la profession d'avocat aux conseils. Les motivations de cet alinéa doivent tenir à la petite histoire...
M. Alain Richard. - Jalousie sociale... La Cour suprême des États-Unis juge 200 affaires par an, en décidant tout simplement d'écarter certains dossiers. La plupart des juridictions suprêmes européennes fonctionnent, pour éviter la multiplication des recours, avec un ordre d'avocats dédiés. Si c'est là une forme de filtrage de l'accès au juge, le Conseil et le Cour de cassation ont, depuis vingt ou trente ans, augmenté très substantiellement le nombre d'affaires qu'ils jugent et raccourci leurs délais de traitement. Le mode de filtrage pourrait être différent, mais celui-ci présente l'avantage de la sécurité juridique : la qualité technique des avocats membres de ces études est désormais incontestable. Si on relâche la sélection, le résultat sera le même que partout.
Mme Nicole Bricq. - L'un des objectifs de la loi est cependant d'atténuer le caractère rentier de certaines professions. Celle-ci en fait partie.
M. Alain Richard. - C'est sans commune mesure avec les rémunérations des grands cabinets internationaux.
M. Jacques Bigot. - Le Gouvernement s'en est remis à la sagesse sur cet amendement. Un problème d'accès à la justice est bien posé. Un amendement est-il même utile pour améliorer les choses ? Nous verrons bien quelle sera la position définitive du Gouvernement. La justice, en tout cas, ne semble pas pressée de voir le nombre d'affaires augmenter. Étant donnée la complexité des dossiers, on peut douter que, même si les avocats du barreau de Paris avaient accès au Conseil d'État et la Cour de cassation, les petits justiciables pourraient s'y adresser à meilleur coût.
M. Alain Richard. - Il existe une aide juridictionnelle pour ces juridictions.
M. François Pillet, rapporteur. - Le coût de la consultation d'un avocat auprès de l'une de ces juridictions, qui aboutit à vous dissuader de poursuivre, est infiniment inférieur à celui de la consultation de certains avocats spécialisés.
L'amendement n° 888 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination n° 887.
M. François Pillet, rapporteur. - Autoriser la création d'un nouvel office d'avocat aux conseils en cas de mésentente entre les associés risque d'entraîner une multiplication, sans qu'il y ait réelle mésentente... L'amendement n° 927 supprime cette modification introduite à l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 927 est adopté.
Les amendements nos 550, 609, 553 et 551 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - La modification proposée par l'amendement n° 552 n'est pas nécessaire puisqu'une codification est prévue à l'article 12 A.
M. Alain Richard. - La codification peut prendre du temps.
L'amendement n° 552 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Voici une proposition radicale : l'amendement n° 754 supprime la profession d'avocats aux conseils, ou au moins leur droit de présentation. Il aurait pour conséquence d'imposer à l'État de rembourser les titulaires de leur droit de présentation.
L'amendement n° 754 n'est pas adopté.
L'article 17 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 889 supprime le contrôle de la DGCCRF sur les conventions d'honoraires conclues entre un avocat aux conseils et son client.
L'amendement n° 889 est adopté.
L'article n° 17 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 890 supprime l'élévation transitoire du plafond de recrutement de notaires salariés de deux à quatre pour un titulaire.
L'amendement n° 890 est adopté, ainsi que l'amendement n° 891.
M. François Pillet, rapporteur. - Le régime de la caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels, officiers publics et des compagnies judiciaires (Cavom) serait menacé d'ici 2024, du fait du développement de l'exercice salarié chez ces cotisants, puisque les salariés relèveraient alors plutôt du régime général. L'amendement n° 928 rectifié incitera, je l'espère, le Gouvernement à réfléchir à ce problème très important et à nous donner des explications.
M. Jacques Bigot. - C'est un problème général, qui s'est posé pour les avocats. Des professions indépendantes ont cotisé dans ces caisses, puis la généralisation du salariat a remis en cause leur équilibre. Je rejoins l'avis du rapporteur.
L'amendement n° 928 rectifié, est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Rendre la clause de non-concurrence inapplicable aux contrats en cours peut aller à l'encontre de l'intérêt général qui s'attache à l'installation de nouveaux professionnels. Avis défavorable à l'amendement n° 655.
L'amendement n° 655 n'est pas adopté.
L'article 18 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
La réunion est levée à 19 heures
Présidence de M. Vincent Capo-Canellas, président -
La réunion est ouverte à 21 h 10
Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission spéciale
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Nous reprenons nos travaux à l'article 19.
M. François Pillet, rapporteur. - Cet article important a suscité nombre de réactions et d'interventions. Il organise la diffusion gratuite en open data des informations issues du registre du commerce et des sociétés (RCS), qui seraient confiées à l'Institut national de la propriété industrielle (Inpi). À titre expérimental, il confie en outre dans trois départements d'outre-mer la gestion du RCS à la chambre de commerce et d'industrie (CCI). Il est important de connaître l'état des relations entre l'Inpi et Infogreffe.
Mme Nicole Bricq. - Elles ne doivent pas être au beau fixe !
M. François Pillet, rapporteur. - La diffusion en open data des informations issues du RCS est un objectif légitime. L'article 19 prévoit que le greffier de chaque tribunal de commerce devra transmettre à l'Inpi, par voie électronique et sans frais, un document valant original des inscriptions effectuées au RCS et des actes et pièces qui y sont déposés. Actuellement, l'Inpi est légalement chargé de centraliser les RCS au sein du registre national du commerce et des sociétés (RNCS) à partir des documents transmis par les greffes, sous forme numérique - ou en format papier en Alsace-Moselle et dans les DOM. Avant l'ère informatique, la centralisation des données à l'Inpi, en plus de l'archivage aux greffes, garantissait la protection et la conservation des données. En 2009, l'Inpi a contractualisé ses relations avec Infogreffe et lui a rendu ces prérogatives. Du coup, l'Inpi et Infogreffe font doublon, ce qui n'est pas sans conséquences financières : aux frais de greffe s'ajoute une taxe perçue pour l'Inpi. Elle disparaîtra si nous supprimons la recentralisation des données.
Confier à l'Inpi la diffusion en open data des données recueillies par les greffes l'obligerait à reconstituer un service informatique conséquent. Mon amendement n° 939 recentre l'Inpi sur sa mission et laisse aux greffes leurs missions actuelles, auxquelles l'Inpi a renoncé. Ce dispositif n'empêcherait pas l'exploitation en open data, sous le contrôle de la Cnil. Bien sûr, cela imposerait que les données personnelles soient expurgées, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Le doublon actuel est coûteux et inefficace. Les redevances perçues lors de la commercialisation des licences étant vouées à disparaître, l'Inpi ne perdrait pas de recette en perdant cette compétence. C'est aux greffes qu'il reviendrait de facturer un service qu'ils ont créé et qu'ils font vivre. On peut objecter le coût prévisible. Mais c'est le Gouvernement, non les greffes, qui décide des tarifs - et le traitement informatique engendre des frais moindres que ceux qui existaient dans le passé.
Je vous renvoie au rapport, sur le rôle de l'Inpi et son évolution depuis 2009. Voulons-nous laisser les greffiers profiter seuls des sommes engendrées par l'exploitation d'Infogreffe ? Ce ne serait pas inéquitable, puisqu'ils l'ont créé. Puis, les tarifs peuvent être adaptés, je le répète, par l'autorité de tutelle. On m'a reproché d'être sévère envers l'Autorité de la concurrence. Je ne veux évidemment pas la supprimer, je vous ai au contraire demandé de voter contre des amendements en ce sens. En l'espèce, l'Autorité me donne raison en considérant qu'il faut en finir avec ce doublon.
Mme Nicole Bricq. - Vous préférez le GIE Infogreffe à un établissement public qui dépend du ministère de l'économie. Soit, c'est votre choix. Les deux systèmes sont-ils équivalents du point de vue de l'open data ? L'autorisent-ils tous deux ?
M. François Pillet, rapporteur. - L'open data serait imposé à Infogreffe, qui le gèrerait aussi bien.
Mme Nicole Bricq. - Se pose aussi la question de la gratuité.
M. François Pillet, rapporteur. - Celle-ci ne pose aucun problème. Si l'open data n'est pas envisageable actuellement, c'est que les données contiennent trop d'informations personnelles.
Mme Annie David. - Pourquoi a-t-on créé deux instances qui font doublon ? Pourquoi veut-on à présent revenir à la situation antérieure ?
M. François Pillet, rapporteur. - L'Inpi avait, au départ, une vocation spécifique, sur laquelle je souhaite qu'il se concentre à nouveau. On a pensé supprimer le doublon en 2009. Pourquoi le maintenir, sinon pour pérenniser une taxe que nous pouvons supprimer ? L'amendement n° 939 effectue un choix qui n'a rien de doctrinaire, il est purement pragmatique.
L'amendement n° 939 est adopté, ainsi que l'amendement n° 940.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 941 concerne l'outre-mer, où est prévue une délégation aux CCI du travail et des sanctions des greffes, ce qui pose à tout le moins un problème éthique : de nombreux conflits d'intérêts vont surgir lorsque les CCI seront saisies d'inscriptions au RCS de commerces appartenant à leurs membres. De plus, alors qu'il a été récemment décidé que des greffiers de tribunal de commerce viennent mettre bon ordre à la situation dans ces départements, ces agents n'ont toujours pas été désignés. La solution est simple : il faut les nommer !
L'amendement n° 941 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination n° 942.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement de suppression n° 610 tombe : la solution était plus extrême... La mienne est plus centriste !
Les amendements nos 610, 2, 548, 560, 824, 832, 547, 566, 830, 831, 562, 833 et 567 sont devenus sans objet.
L'article 19 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 892 précise qu'un diplôme de master ne dispense pas du stage professionnel ni de la réussite à l'examen d'aptitude pour l'inscription sur la liste des administrateurs ou mandataires judiciaires, mais seulement de l'examen d'accès au stage professionnel. Les diplômés pourront ainsi poursuivre leur formation au sein d'un cabinet professionnel. Nous devons protéger cette profession contre les « open ditches » qui pourraient se profiler, pour reprendre le terme dont Léon Zitrone se délectait quand il commentait les compétitions hippiques de saut d'obstacles.
L'amendement n° 892 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 893 rend aux commissions nationales d'inscription des administrateurs ou mandataires judiciaires la compétence d'octroyer une dispense de stage ou d'examen d'aptitude. Il s'agit de préserver la qualité des conditions d'accès à la profession d'administrateur judiciaire.
Mme Nicole Bricq. - Vous les verrouillez, dans un texte dont le but est de déverrouiller...
M. François Pillet, rapporteur. - Nous devons maintenir un certain niveau d'exigence à l'entrée dans la profession d'administrateur judiciaire.
L'amendement n° 893 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 894 innove, puisqu'il autorise le Gouvernement à fusionner les professions de commissaire-priseur judiciaire et d'huissier de justice en une même profession de commissaire de justice. Pourquoi pas ? Il faut toutefois veiller à ce qu'un huissier de justice soit capable d'évaluer les objets qu'il aura à mettre en vente, et à ce qu'un commissaire-priseur sache ce qu'est une injonction de payer ou un commandement. Il est donc nécessaire de prévoir un certain niveau de qualification, propre à chacune de ces professions. L'huissier de justice, tel que nous le montraient les dessins de Daumier, va disparaître.
L'amendement n° 894 est adopté.
Les amendements nos 190, 586, 588, 612 et 749 sont sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 613 supprime la possibilité de parvenir à cette nouvelle profession. Avis défavorable.
Mme Annie David. - Nous souhaitons simplement que cela ne soit pas fait par ordonnance.
M. François Pillet, rapporteur. - C'est pour cela que j'ai voulu préciser que l'ordonnance devrait faire référence à une qualification particulière.
L'amendement n° 613 n'est pas adopté.
M. Henri Tandonnet. - Je doute de la plus-value apportée par une fusion des professions de commissaires-priseurs judiciaires et d'huissiers de justice, dont les modalités d'intervention sont différentes. D'où notre amendement de suppression n° 822, que je présenterai de nouveau en séance.
Mme Sophie Joissains. - Moi aussi.
M. François Pillet, rapporteur. - Un huissier de justice peut déjà exercer les fonctions de commissaire-priseur.
M. Jean-Claude Lenoir. - Plusieurs autres professions ont cette prérogative. C'est notamment le cas des notaires, lors de successions, sous l'autorité du tribunal. J'ai souvent vu, dans mon département, des huissiers faire des ventes - certes modestes.
M. Henri Tandonnet. - Je maintiens mon amendement.
L'amendement n° 822 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Je comprends l'intention des auteurs de l'amendement n° 110 mais il n'y a que peu de différence entre les règles déontologiques applicables aux huissiers et aux commissaires-priseurs judiciaires. La profession commune sera dotée d'un corpus déontologique commun. Avis défavorable.
M. Jean Desessard. - Refusez-vous cet amendement parce que j'en suis l'auteur ?
M. François Pillet, rapporteur. - Pas du tout ! Plusieurs de vos amendements ont été satisfaits. Celui-ci n'est pas nécessaire.
M. Jacques Bigot. - Je suis favorable à cet amendement, qui précise utilement, notamment à ceux qui rédigeront l'ordonnance, que les règles de déontologie doivent s'imposer.
M. François Pillet, rapporteur. - J'y réfléchirai avant l'examen en séance publique.
M. Jean Desessard. - Réfléchissez-y de manière déontologique !
M. François Pillet, rapporteur. - Je cède à votre humour. Avis favorable.
L'amendement n° 110 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - La création d'un concours pour accéder aux fonctions de greffiers de tribunaux de commerce vise à remédier à certains défauts du système actuel, qui aboutit à une concentration des greffes entre les mains de quelques-uns. La mesure ne concernera pas seulement la création ou la vacance d'offices, mais aussi l'association au sein d'offices existants, les candidats étant classés par ordre de mérite. Avis défavorable à l'amendement n° 561, ainsi qu'à l'amendement n° 834 qui est presque identique.
L'amendement n° 561 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n° 834.
L'article 20 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'article 20 bis réécrit les prérogatives des experts-comptables. Ceux-ci sont soumis, pour les activités autres que comptables, à la règle du double accessoire : ils ne sont autorisés à pratiquer ces activités - consultation ou travaux administratifs, économiques, statistiques, juridiques - que si elles restent accessoires et si elles sont effectuées à l'occasion d'une mission comptable. L'article 20 bis, introduit à l'initiative du Gouvernement, lève cette seconde contrainte, sauf pour les prestations juridiques. Nous relançons la guerre du chiffre et du droit ! L'amendement n° 895 précise que les experts-comptables peuvent « effectuer toutes études ou tous travaux d'ordre statistique, économique et administratif et apporter, dans ces matières, leur avis devant toute autorité ou organisme public ou privé qui les y autorise » - déjà, ils ont le droit de faire des déclarations fiscales.
L'amendement n° 895 est adopté.
Les amendements nos 195, 575, 615, 658, 713, 798, 576, 799, 755, 714 et 756, sont sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 111 remet en cause le droit actuel en liant deux conditions actuellement alternatives pour autoriser l'exercice, par les experts comptables, de prestations juridiques. Avis défavorable.
L'amendement n° 111 n'est pas adopté.
L'article 20 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - Les trois articles suivants concernent la réforme des sociétés professionnelles. Le Gouvernement demandait une habilitation pour la réaliser par ordonnance. Les députés ont préféré inscrire dans la loi des dispositions d'application directe. Une telle démarche est souvent utile, mais, dans le cas présent, elle s'est avérée problématique, parce que la complexité et le peu de lisibilité des rédactions proposées ont interdit tout débat de fond à l'Assemblée nationale. Or les dispositifs proposés aux articles 20 ter et 22 posent de réelles questions. Ils sont inspirés par le souci légitime de rénover notre droit en matière de société d'exercice libéral (SEL) et de société de participations financières de professions libérales (SPFPL), afin d'offrir aux professions du droit les possibilités de s'associer plus librement et de développer entre elles des prises de participations croisées. Tels avaient d'ailleurs été les objectifs de la réforme de 2011, entrée en vigueur seulement au premier semestre de 2014, en raison des difficultés liées à la rédaction des décrets d'application. Il faut trouver le juste équilibre entre les avantages de la multi-professionnalité, la capacité à attirer des capitaux et le maintien des garanties d'exercice des professionnels du droit, qui sont soumis à des exigences d'indépendance fortes.
Le dispositif actuel repose, s'agissant des SEL, sur plusieurs types de garanties : détention majoritaire des droits de vote et du capital par les professionnels en exercice dans la société ; limitation des possibilités de prise de participations ; garantie sur la présence au sein des instances exécutives de la société et des organes de contrôle de professionnels en exercice dans la société ; garanties liées, s'agissant des offices publics ou ministériels, au contrôle du garde des sceaux sur les cessions de parts sociales.
Les articles 20 ter et 22 suppriment la quasi-totalité de ces garanties. Je l'ai dit au cabinet du ministre : cette rédaction est inaboutie. Ainsi, des sociétés d'avocats pourraient être détenues à 99 % par des notaires, et inversement. Les associés minoritaires de ces sociétés, ou les professionnels en exercice au sein de celles-ci, seraient privés de la maîtrise de leurs conditions de travail. Une société de participations financières de professions libérales (SPFPL) réunissant des notaires et des experts-comptables pourrait détenir, en plus de sociétés d'exercice libéral (SEL) correspondant à ces deux professions, la totalité des parts sauf une d'une SEL d'avocat, dont la dernière part serait attribuée à un avocat sous la responsabilité duquel travaillerait un nombre indéterminé d'avocats salariés. La question de la maîtrise des droits de vote et du capital n'est pas anodine, elle détermine la répartition des bénéfices.
Je ne remets nullement en question l'existence de ces sociétés. Il faut simplement que le Gouvernement revoie son texte. Outre les problèmes déontologiques, je note que les professions du droit sont moins bien traitées que les professions du chiffre, auxquelles est garantie la détention, pour les experts-comptables, d'au moins les deux tiers des droits de vote dans les sociétés qui les emploient, et pour les commissaires aux comptes, d'au moins les trois quarts. Or les missions de service public qui s'attachent aux officiers publics et ministériels méritent au moins autant de garanties que celles des professions du chiffre. Les amendements présentés ne comblent pas toutes ces lacunes. Même s'ils étaient adoptés, rien n'interdirait à une société d'experts-comptables - dont la majorité du capital, mais pas des droits de vote, serait détenue par une banque - d'être actionnaire majoritaire, via une holding, d'un cabinet d'avocats. Je vous propose donc de supprimer les articles 20 ter et 22. Il ne s'agit aucunement d'une fin de non-recevoir de ma part. Une réforme est attendue. Mais il est nécessaire que le Gouvernement propose un projet comportant plus de garanties : s'il ne souhaite pas modifier son texte, je vous proposerai des amendements avant l'examen en séance publique.
Mme Nicole Bricq. - Contrairement à ce qu'il a fait jusqu'ici, le rapporteur supprime cet article, avec l'amendement n° 896, au lieu de le modifier. On en resterait donc aux formes juridiques actuelles que sont les sociétés civiles professionnelles et les SEL.
M. François Pillet, rapporteur. - Je conserve l'article 21 et l'ordonnance.
Mme Nicole Bricq. - En supprimant l'article 20 ter, vous maintenez le statu quo.
M. François Pillet, rapporteur. - Oui, car nous n'avons pas mesuré toutes les conséquences des changements proposés. Dans ce domaine, il faut faire un travail d'orfèvre.
Mme Nicole Bricq. - Vous êtes opposé à l'ouverture à d'autres professions.
M. François Pillet, rapporteur. - Non !
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Je comprends que le rapporteur propose la suppression mais suggère qu'un autre dispositif soit présenté en séance.
Mme Annie David. - Je soutiens cet amendement. Nous avons eu un débat similaire, il y a quelques mois, sur les laboratoires d'analyses médicales, eux aussi confrontés à ce type de difficultés : de gros groupes investissent dans de petits laboratoires. Si les métiers du chiffre et du droit diffèrent en nature de ceux de la santé, ils sont confrontés eux aussi à ce type de danger, qui est réel. Nous avions trouvé une solution sur mesure, afin que l'activité se maintienne sur nos territoires.
M. Jacques Bigot. - Dont acte : le rapporteur veut faire évoluer les choses mais considère que la complexité du sujet impose le renvoi à une ordonnance. Cela se comprend. Depuis les années soixante-dix, il semble que dans les rapports entre le chiffre et le droit, le premier ait pris le dessus, faute que le second se soit assez intéressé au monde des affaires. La commission des lois conduit des auditions sur la pratique du droit à l'heure de la mondialisation des affaires. Nous devons réfléchir davantage aux manières de concevoir des associations respectant les règles déontologiques de chacun. Si nous supprimons cet article, nous n'apporterons guère de plus-value au texte. Pourquoi ne pas adopter un amendement fixant précisément le cadre de l'ordonnance ?
M. Jean-Pierre Sueur. - Autant je suis attaché à la modernisation de nos structures, autant je partage les préoccupations du rapporteur. La financiarisation généralisée aurait des conséquences lourdes - juridiques, déontologiques - sur ces professions. Je suis également sensible aux propos de Jacques Bigot : une rédaction de compromis reprenant les garanties proposées par le rapporteur serait préférable à la rédaction de l'Assemblée nationale comme l'habilitation à procéder par ordonnance, à moins qu'elle ne soit parfaitement encadrée ; M. Macron a le mérite d'avoir déjà consulté en profondeur la commission des lois sur un autre projet d'ordonnance.
M. Jean Desessard. - Existe-t-il une directive européenne fixant des obligations en matière d'association ou d'ouverture du capital ?
M. François Pillet, rapporteur. - Sur la circulation des capitaux, oui. Des avocats italiens ou des notaires anglais, pourraient, sauf erreur de ma part, faire partie d'une holding détenant une société d'exercice libéral française employant des huissiers de justice...
Cet article est illisible, et les risques qu'il fait encourir à la profession n'ont manifestement pas été mesurés. Si le Gouvernement demande une habilitation, à nous alors de fixer les garanties utiles. En toute hypothèse, supprimer cet article porteur d'une dérégulation totale ne veut pas dire que nous ne pourrions y revenir en séance publique. On dit parfois que le droit est l'école de l'imagination ; avec un peu d'imagination, on ferait dire n'importe quoi à l'article ainsi rédigé !
Les amendements nos 896 et 617 sont adoptés. L'article 20 ter est en conséquence supprimé.
Les amendements nos 697, 698, 699, 700, 701, 702, 703, 540, 679, 741, 577, 659, 800, 198, 578, 660, 715, 801, 579, 661, 802, 580, 662, 716, 803, 581, 717 et 804 deviennent sans objet.
Articles additionnels après l'article 20 ter (nouveau)
M. François Pillet, rapporteur. - Les amendements nos 112 et 113 obligent l'officier public ou ministériel qui veut céder ses parts à en informer ses salariés pour leur permettre de présenter une offre d'acquisition de l'office. C'est inutile et potentiellement dangereux puisque la méconnaissance de cette procédure très formaliste provoquerait la nullité de la cession. Avis défavorable.
L'amendement n° 112 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n° 113.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 943, comme plusieurs autres, tend à supprimer l'article et avec lui, l'habilitation donnée aux huissiers de justice et aux commissaires-priseurs judiciaires à exercer « à titre habituel » certaines fonctions de mandataire judiciaire pour les procédures de liquidation judiciaire modestes et impécunieuses. Le tribunal peut en effet déjà désigner un autre professionnel en qualité de mandataire judiciaire à titre accessoire, faculté qui n'est presque jamais utilisée car les juges préfèrent faire appel aux compétences spécifiques des mandataires judiciaires. De plus, cette rédaction emporte des exigences de formation pour les autres professionnels, elle pose les questions de l'accès au fonds de financement des procédures impécunieuses et de la souscription d'assurances sans accès à la caisse de garantie des administrateurs et mandataires judiciaires.
Plus encore, une telle disposition serait source de conflits d'intérêts significatifs car les huissiers disposent d'une clientèle, pas les mandataires judiciaires : quelle serait l'indépendance d'un huissier de justice désigné mandataire pour liquider une entreprise qui est sa cliente ? Quelle serait sa neutralité dans la représentation des intérêts collectifs des créanciers si certains sont ses clients ?
Enfin, une telle disposition remettrait en cause la logique suivie depuis la réforme de 1985 menée par Robert Badinter, qui a mis un terme à la profession de syndic de faillite, discréditée par les conflits d'intérêts.
M. Jacques Bigot. - Depuis trente ans, on essaye de développer l'économie individuelle. Un unique salarié et 100 000 euros de dette, voilà la très petite entreprise française par excellence. Or, dans nos territoires ruraux, l'huissier est seul entre les débiteurs et les créanciers pour régler les problèmes de ces petites structures. Qu'il soit chargé de régler leur liquidation me paraît sain, car les mandataires judiciaires sont retenus par des entreprises plus importantes - dont, d'ailleurs, ils s'occupent très peu. Bref, l'article 20 quater a du sens.
M. François Pillet, rapporteur. - La faculté de désigner des huissiers comme mandataire judiciaire à titre exceptionnel existe déjà, mais n'est pas utilisée...
M. Jacques Bigot. - Le législateur fait parfois bien d'insister pour que tout le monde comprenne.
Les amendements identiques de suppression nos 943, 191, 587, 589, 618 et 766 sont adoptés. L'article est supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - Il n'est pas possible d'autoriser la rémunération des experts-comptables au succès sur leurs activités accessoires dès lors que celle-ci est interdite ou encadrée pour les professions qui pratiquent les mêmes activités à titre principal. L'amendement n° 897 limite par conséquent cette possibilité aux seules activités principales, celles de gestion comptable. Qu'est-ce que le succès en cette matière ?
M. Jean Desessard. - Le ministre ne vous l'a pas dit ?
M. Philippe Dallier. - Très bonne question !
M. François Pillet, rapporteur. - Une prestation juridique accessoire peut être un montage d'optimisation fiscale - je ne parle bien sûr ni d'évasion ni de fraude...
Mme Catherine Deroche. - L'optimisation fiscale n'est pas interdite !
L'amendement n° 897 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 898 supprime du périmètre des professions susceptibles d'être intégrées au sein d'une société d'exercice libéral multiprofessionnelle celles pour lesquelles cette multiprofessionnalité poserait des problèmes de conflits d'intérêt ou de déontologie. Il en va ainsi des administrateurs et mandataires judiciaires, mais aussi des avocats aux conseils qui, pour jouer leur rôle de filtre du contentieux de cassation, doivent être indépendants des avocats qui ont représenté le client jusqu'en appel - faute de quoi l'on crée du litige.
L'amendement interdit aussi cette multiprofessionnalité entre le chiffre et le droit, car les règles applicables aux sociétés d'expertise-comptable réduiraient excessivement les droits de vote des professions du droit ; il intègre à cette multiprofessionnalité les conseils en propriété industrielle, qui pourront ainsi offrir au sein de structures communes avec des avocats une offre complète de services à leurs clients.
L'amendement n° 898 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Tel que rédigé par l'Assemblée nationale, l'article 21 rendrait possible la détention d'une société multiprofessionnelle d'avocats et de notaires par n'importe quelle autre profession du droit... L'amendement n° 899 limite la détention d'une telle société aux seules professions exercées en son sein.
Mme Catherine Deroche. - Cela paraît normal.
L'amendement n° 899 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 900 précise le champ de l'habilitation pour la création de sociétés multiprofessionnelles du droit, afin de garantir à chaque profession une maîtrise des conditions d'exercice de son activité au sein de la société, et une représentation équitable dans les organes dirigeants : celle qui aurait sept avocats et deux notaires ne devrait pas exclure ces derniers de son organe délibérant.
L'amendement n° 900 est adopté.
Les amendements nos 619, 815, 757, 200, 583, 663, 806, 816, 199, 718, 805, 582, 818 et 114 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Avis fermement défavorable au n° 696, qui ajoute aux professions susceptibles de constituer des sociétés multiprofessionnelles les commissaires aux comptes : le droit européen leur impose de posséder les trois quarts des droits de vote de leur société, ce qui créerait une asymétrie avec les autres professionnels. En outre, les risques de conflit d'intérêts sont nombreux, d'autant plus que les commissaires aux comptes, en France, sont souvent également experts-comptables.
Mme Élisabeth Lamure. - Je comprends.
L'amendement n° 696 est retiré.
Les amendements nos 209, 742, 536 et 817 deviennent sans objet.
L'article 21 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 21
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 345 confère la confidentialité aux avis juridiques rendus par les juristes d'entreprise. C'est important, car nos entreprises sont aujourd'hui contraintes de délocaliser leurs services juridiques là où existe ce legal privilege. Toutefois, bien que je sois sensible aux arguments des juristes d'entreprise, nous devons mener rapidement une réflexion sur un statut d'avocat d'entreprise, sous la maîtrise d'oeuvre de la Chancellerie. Les avocats sont très divisés sur ce sujet - la conférence des bâtonniers rassemble les plus réticents - mais semblent néanmoins prêts à y réfléchir. Dans leur esprit, un avocat d'entreprise serait indépendant mais doté d'une clientèle fixe et d'honoraires mensualisés. L'amendement va trop vite en besogne...
M. Alain Richard. - La profession trouve toujours des arguments nouveaux et rien n'avance. Le rapporteur croit-il que nous parviendrons à un compromis sans légiférer ?
M. François Pillet, rapporteur. - Ce texte, en l'état, n'aboutira à rien de constructif. L'affaire pourrait être relancée rapidement : il suffit que le Gouvernement se montre désireux de résoudre le problème. Les avocats ont évolué : ils rejetaient auparavant en bloc l'idée d'un statut d'avocat d'entreprise ; ce n'est plus le cas.
L'amendement n° 345 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 557 met en place le traitement dématérialisé des dossiers au sein des bureaux d'aide juridictionnelle. Le lien avec le texte n'est qu'indirect. Une telle disposition aurait plutôt sa place dans l'étude du domaine général de l'aide juridictionnelle que nous avons évoquée cet après-midi.
M. Alain Richard. - La loi est impérative ; or cet amendement crée une faculté...
L'amendement n° 557 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 558 pour des raisons analogues.
Mme Sophie Joissains. - L'absence de contrôle des ressources des demandeurs de l'aide juridictionnelle est un problème majeur, qui devra être abordé dans le cadre de la réflexion globale.
M. François Pillet, rapporteur. - C'est davantage du domaine réglementaire, et une telle réflexion aurait davantage sa place dans le cadre d'une loi de finances.
L'amendement n° 558 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n° 559.
M. François Pillet, rapporteur. - La jurisprudence citée par les auteurs de l'amendement n° 690 concerne uniquement l'exercice à titre habituel de la représentation devant les juridictions et n'interdit pas le recours ponctuel à un mandataire quelconque. En revanche, l'intéressé doit justifier d'un mandat spécial, qui prouve que son activité n'est pas exercée à titre habituel. L'amendement n'apporte rien : avis défavorable.
Mme Élisabeth Lamure. - Il est donc satisfait par le droit en vigueur ?
M. François Pillet, rapporteur. - Oui.
L'amendement n° 690 est retiré.
M. François Pillet, rapporteur. - Le tarif des huissiers sera réformé en application de l'article 12 du présent texte : l'amendement n° 705 n'est pas utile, et supprime un article dans un acte réglementaire, ce qui pose un problème de hiérarchie des normes...
M. Alain Richard. - ...sauf dans l'hypothèse où cet article serait du domaine de la loi !
M. François Pillet, rapporteur. - Ce qui n'est pas le cas.
L'amendement n° 705 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 758 crée un statut d'avocat salarié en entreprise. La réflexion n'est pas mûre sur ce sujet : avis défavorable à cet article supplémentaire...
M. Jean Desessard. - L'Assemblée nationale en a bien ajouté 200 !
Mme Catherine Deroche. - Ce n'est pas un concours !
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Les rapporteurs ont sagement veillé à limiter cette inflation. Favorisons plutôt le dialogue entre les deux chambres et les adoptions conformes quand elles sont possibles...
M. Jean Desessard. - Ce texte redéfinit le statut des avocats. Mme Aïchi propose de créer des avocats salariés en entreprise : on ne peut prétendre que son amendement n'a pas de rapport avec le texte !
M. François Pillet, rapporteur. - J'ai seulement dit que la réflexion n'était pas mûre. La notion d'avocat salarié pose d'énormes problèmes car le salariat implique une position de subordination incompatible avec l'indépendance des avocats.
L'amendement n° 758 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement de suppression n° 901 est de cohérence avec la suppression de l'article 20 ter.
Les amendements identiques nos 901, 549, 563, 621 et 835 sont adoptés. L'article est supprimé. Les amendements nos 584, 664, 719, 807, 537, 680, 210, 538, 681, 211, 539 et 682 deviennent sans objet.
Articles additionnels après l'article 22
M. François Pillet, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 759 qui annule tout ce que nous avons fait. Il supprime le monopole des notaires et des huissiers sur les actes authentiques : ce n'est pas l'objet du texte, et ce serait une révolution, budgétaire surtout, puisqu'il faudrait les indemniser... Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur. - Cela coûterait très cher.
L'amendement n° 759 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 825 est satisfait par le 928 rectifié.
Mme Sophie Joissains. - C'est la question que je me posais.
L'amendement n° 825 est retiré.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 37 rectifié, comme le suivant du reste, le n° 38 rectifié, rend possible la prise de participation majoritaire au capital des sociétés d'architecture par des sociétés d'ingénierie immobilière, ce qui aurait un effet terrible pour les procédures de marchés publics.
M. Jean-Pierre Sueur. - Les architectes seraient contents !
M. François Pillet, rapporteur. - Les représentants de la chambre nationale des architectes s'y sont effectivement vigoureusement opposés. Avis défavorable.
L'amendement n° 37 rectifié n'est pas adopté.
L'article 22 bis est adopté sans modification.
Article additionnel après l'article 22 bis
L'amendement n° 38 rectifié n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'article 11 du texte remplace la procédure d'injonction structurelle, ouverte en cas d'abus de position dominante et jamais utilisée à ce jour, par une nouvelle procédure pouvant être lancée par l'Autorité de la concurrence en cas de position dominante d'un opérateur soulevant des « préoccupations de concurrence ». Les pouvoirs d'enquête et de sanction du régulateur sont à cette fin significativement accrus : l'injonction structurelle pourrait être émise même en l'absence d'infraction, une préoccupation de concurrence suffit ; et l'Autorité pourrait imposer la cession d'une partie des activités, ce qui n'est pas nouveau mais assez exorbitant du droit commun. Les demandes de suppression totale de ce nouveau pouvoir sont nombreuses. Encadrons-le, plutôt, et renforçons le caractère contradictoire de la procédure et la protection des agents économiques. Le cabinet du ministre y a semblé favorable.
D'abord, écartons le critère des prix élevés, qui n'est en rien à lui seul un indice de défaut de concurrence. Les critères de position dominante et de part de marché supérieure à 50 % seraient plus utilement complétés par un critère de marges nettes anormalement élevées. Ensuite, précisons le déroulement de la procédure : formalisons les « préoccupations » de l'Autorité dans un rapport dûment justifié, soumis à l'entreprise, puis le cas échéant dans une décision motivée définitive. Une telle procédure existe dans d'autres domaines. Le président de l'Autorité de la concurrence m'a dit son accord sur ce point.
Rendons également les délais plus raisonnables
pour l'entreprise à qui l'on demande de céder une partie de
son activité dans un marché où l'offre serait
singulièrement faussée de ce fait : deux mois pour formuler
des observations sur les premières préoccupations de concurrence,
trois mois au lieu de deux pour présenter des engagements
- mais pouvant être portés à quatre -, six
mois au moins et non plus trois pour résilier des accords et actes
commerciaux, et six mois au moins pour céder des actifs. Excluons
l'utilisation des informations obtenues par l'Autorité à
l'occasion de cette procédure sans infraction dans le cadre d'une
procédure ultérieure pour pratique anticoncurrentielle.
Enfin, interdisons l'utilisation de cette procédure lorsque
l'Autorité, dans les trois années passées, a dû
clore une procédure pour abus de position dominante sans parvenir
à prouver l'infraction.
Si le recours n'est pas suspensif (il ne l'est jamais pour les décisions en matière de concurrence), l'entreprise pourrait, en cas de conséquences manifestement excessives de la décision de l'Autorité, saisir le premier président de la cour d'appel de Paris pour demander le sursis à exécution.
Tels sont les éléments qu'introduit l'amendement n° 967.
Mme Nicole Bricq. - Le Gouvernement est disposé à aller en votre sens, dites-vous. L'article pourrait être réécrit.
M. François Pillet, rapporteur. - Je ne prétends pas à la perfection ! Ce qui importe, c'est de réintégrer ce mécanisme exceptionnel - qu'il n'est pas pour autant illégitime de confier à l'Autorité de la concurrence - dans les règles de l'État de droit.
M. Jean Desessard. - Je me rallie à la position du rapporteur. Ce n'est sans doute pas une mesure de simplification, mais elle est légitime.
M. Jacques Bigot. - Voilà plus de trente ans que nous avons libéralisé les prix, et les concentrations se multiplient ; dans certains territoires prospèrent les groupes dominants, dans le secteur alimentaire ou la distribution. Je rejoins le rapporteur sur la nécessité d'une procédure contradictoire. Je ne suis en revanche pas convaincu qu'il faille abandonner le critère de prix et de marges élevés : certains groupes justifient de faibles marges par des investissements, et se rattrapent sur les prix proposés au consommateur... Maintenir ce double critère laisserait une possibilité d'appréciation à l'Autorité de la concurrence.
M. Jean-Marc Gabouty. - Je rejoins M. Bigot : la notion de marge nette ne suffit pas, il conviendrait de lui maintenir associé le critère de prix élevés.
M. François Pillet, rapporteur. - Ce qui pose problème dans le texte, c'est le caractère alternatif de ces critères ; les rendre cumulatifs est possible. Le prix dépend de nombreux facteurs : sur les Champs-Élysées par exemple, le niveau des loyers explique en partie celui des prix.
M. Alain Richard. - D'un point de vue économique, regarder les prix n'est pas utile, seules des marges anormalement élevées sont un signe de défaut de concurrence.
M. François Pillet, rapporteur. - C'était mon raisonnement. Je souhaite en rester à l'amendement tel que je vous le présente.
M. Alain Richard. - Il peut y avoir abus de position dominante avec des marges élevées mais des prix bas ; l'Autorité de la concurrence a déjà prononcé des sanctions sur ce fondement pour des produits d'utilisation courante...
M. Jacques Bigot. - Les grands groupes peuvent aussi justifier de faibles marges et demander à leurs fournisseurs des marges arrière...
M. François Pillet, rapporteur. - La procédure dont nous parlons s'applique aux zones de chalandise, non sur un groupe présent dans toute la France.
M. Jean-Marc Gabouty. - Un grand groupe peut dégager de fortes marges sur sa centrale d'achat. On déplace plus facilement les marges que les prix...
M. François Pillet, rapporteur. - Nous ne sommes alors plus dans le cadre de la procédure d'injonction structurelle... Nous en reparlerons en séance.
L'amendement n° 967 est adopté.
Les amendements nos 62 et 42 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Avis défavorable au n° 811.
M. Jean-Marc Gabouty. - Le sursis à exécution est assez fragile car les mesures prises par l'Autorité de la concurrence ont un caractère totalement irréversible.
M. François Pillet, rapporteur. - Le sursis à exécution couvre exactement l'hypothèse de la situation irréversible.
M. Henri Tandonnet. - L'interprétation des conséquences « manifestement excessives » varie selon les magistrats. Précisons cela dans le texte.
M. François Pillet, rapporteur. - C'est fait : le premier président de la cour d'appel de Paris sera seul autorisé à ordonner le sursis à exécution pour ce motif, en référé de surcroît.
Les amendements nos 811 et 810 sont retirés.
L'amendement n° 779 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'actuelle procédure d'injonction structurelle, issue de la loi de modernisation de l'économie de 2008 et prévue en cas d'abus de position dominante, n'a jamais pu être utilisée par l'Autorité de la concurrence et son président ne souhaite pas la conserver. La nouvelle procédure permettrait en outre de prononcer une injonction structurelle en l'absence d'abus de position dominante, rendant encore plus inutile l'ancienne procédure. Avis défavorable à l'amendement n° 353.
L'amendement n° 353 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 841 suscite un débat : la notion de préoccupation concurrentielle du code de commerce est imprécise, contrairement à l'atteinte à la concurrence, qui est une infraction. Ma proposition sur le débat contradictoire ayant été acceptée unanimement, cet amendement semble pouvoir être retiré. Le cabinet d'Emmanuel Macron estime que cette rédaction est un progrès.
L'amendement n° 841 est retiré.
Les amendements nos 839, 840 et 318 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Les associations de consommateurs n'étant pas parties dans le cadre des enquêtes de l'Autorité de la concurrence pour des faits de pratiques anticoncurrentielles, il est difficilement envisageable de les laisser accéder aux pièces du dossier comme le propose l'amendement n° 780. Il s'agirait d'une atteinte au secret professionnel et au secret de l'instruction, et serait encore plus problématique dans le cadre d'une procédure de transaction et même de clémence.
Les amendements nos 780 et 354 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 812 rejoint utilement la préoccupation de mon amendement n° 967 : autoriser l'Autorité de la concurrence à ré-intervenir avec l'injonction structurelle sur une opération de concentration déjà autorisée. Avis favorable sous réserve de compléter le dernier alinéa par les mots : « en l'absence de modification substantielle de la situation de concurrence du secteur économique et de la zone de chalandise concernés » et en y supprimant par cohérence les mots : « depuis moins de trois ans ».
M. Jean-Marc Gabouty. - Tout à fait ; je souhaitais éviter la redondance.
L'amendement rectifié n° 812 est adopté.
L'article 11 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
L'article 59 demeure supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 968 supprime la faculté offerte au président de l'Autorité de la concurrence de réviser une décision prise collégialement, car cela pose un problème de parallélisme des formes.
Mme Nicole Bricq. - Cette procédure interne à une autorité indépendante relève-t-elle de la loi ?
M. François Pillet, rapporteur. - Elle est prévue par la loi.
Mme Nicole Bricq. - À quel article ?
M. François Pillet, rapporteur. - L'article L. 461-3 du code de commerce, tel que modifié par l'ordonnance du 13 novembre 2008.
Mme Nicole Bricq. - C'est donc l'ordonnance que vous changez ?
M. François Pillet, rapporteur. - Je change un point qui a été codifié.
Mme Nicole Bricq. - Le président avait cette capacité et on la lui enlève. L'alinéa 7 de l'article 59 bis dispose : « La seconde phrase du dernier alinéa de l'article L. 461-3 est complétée par les mots : «, des décisions de révision des mesures mentionnées aux III et IV de l'article L. 430-7 ou des décisions nécessaires à la mise en oeuvre de ces mesures ».
M. François Pillet, rapporteur. - On retire au président une possibilité supplémentaire que lui créait le projet de loi.
L'amendement n° 968 est adopté.
L'article 59 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 59 ter
L'amendement de codification n° 969 est adopté.
L'article 59 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 59 ter
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 143 intègre au collège de l'Autorité de la concurrence un représentant d'une association de consommateurs et un représentant d'une association de protection de l'environnement. Il doit déjà y avoir des personnalités qualifiées dans le domaine de la consommation comme aujourd'hui la présidente de l'association CLCV.
L'amendement n° 143 est retiré.
Article 59 quater
L'amendement de correction d'erreur matérielle n° 970 est adopté.
L'article 59 quater est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 971 précise la nouvelle procédure de transaction devant l'Autorité de la concurrence, rénovant la procédure actuelle de non-contestation de griefs. Pour une meilleure prévisibilité de la sanction pécuniaire, la proposition de transaction devrait comporter un montant maximal, mais aussi un montant minimal. Il serait également possible de conclure une transaction sur une partie seulement des griefs : un désaccord sur un point ne ferait plus échouer une transaction. Cela serait applicable aux procédures ouvertes après la publication de la loi.
Mme Fabienne Keller. - L'Autorité de la concurrence peut remonter dans le temps sans délai pour prendre ses sanctions ; pour les meuniers, elle était remontée à plus de vingt ans.
M. François Pillet, rapporteur. - Elle est soumise aux règles de prescription habituelles, me semble-t-il.
M. Alain Richard. - Elles ne sont pas applicables aux autorités administratives indépendantes.
M. François Pillet, rapporteur. - Peut-être en effet devrions-nous rédiger un amendement d'ici la séance.
Mme Annie David. - Il est juste de remonter dans le temps lorsque les entreprises se sont enrichies indûment pendant tout ce temps. Je ne vois pas pourquoi nous devrions effacer l'ardoise.
L'amendement n° 971 est adopté.
Les amendements de suppression nos 355 et 781 sont sans objet.
L'article 59 quinquies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 11
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 294 affirme la liberté pour l'assuré de choisir l'expert de son choix pour évaluer son sinistre. La logique de l'assureur est d'imposer son expert, pour maîtriser l'évaluation. En droit toutefois, l'assuré a déjà toute latitude pour faire appel à un expert indépendant, à ses frais.
M. Philippe Dallier. - Je le sais bien ; mais tout le monde en est-il informé ?
M. François Pillet, rapporteur. - Il est difficile cependant de mettre à la charge de l'assureur le coût intégral de cette expertise extérieure, comme de prévoir un remboursement de l'expert extérieur uniquement si l'expert de l'assureur a mal évalué. Il y a enfin toujours la possibilité d'un expert indépendant nommé par référé. La présence de deux experts augmente beaucoup le coût pour ce type de sinistre. Enfin, l'amendement insère cette disposition au sein du chapitre du code des assurances relatif à l'incendie, alors qu'il souhaitait avoir une portée plus large. Retrait.
L'amendement n° 294 est retiré, ainsi que les amendements nos 295 et 296.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 161 crée une subrogation pour l'assuré qui fait réparer son véhicule chez un réparateur non agréé par son assureur. L'amendement n° 192, sous réserve de modification, devrait le satisfaire.
L'amendement n° 161 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Je propose donc de supprimer la seconde phrase de l'amendement n° 192, trop réglementaire.
L'amendement n° 192 rectifié est adopté.
Article 11 bis B
L'amendement n° 843 rédactionnel est adopté.
L'article 11 bis B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 11 bis B
M. François Pillet, rapporteur. - Les amendements identiques nos 784 et 359 ouvrent aux associations de consommateurs la possibilité d'agir, indépendamment de tout consommateur, pour obtenir réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif des consommateurs. Elles ont déjà de très nombreux moyens pour agir : action civile ; action de groupe ; action en cessation d'agissement illicite ; action en suppression de clause abusive.
Les amendements identiques nos 784 et 359 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 844 est l'une des rares suppressions d'article que je propose. L'article 11 bis C autorise l'association de consommateurs à engager son action en même temps que le consommateur, alors qu'aujourd'hui elle ne peut que s'y joindre une fois qu'un consommateur a lui-même intenté son action en responsabilité. La rédaction pose plusieurs difficultés : l'association n'aurait pas compétence pour engager d'elle-même cette action sans le consommateur ; l'action est abusivement dénommée action en réparation alors qu'elle porte aussi sur l'action en cessation d'agissement illicite ou en suppression de clauses abusives ; le dispositif ne précise pas quel serait le sort de l'action de l'association de consommateurs si le particulier avec lequel elle a engagé conjointement la procédure renonce à son action. Le dispositif ne semble pas abouti et n'apporte pas de nouveaux droits aux associations de consommateurs.
Mme Nicole Bricq. - Vous auriez pu chercher à rendre cet article plus opérationnel au lieu de le supprimer. Vous dites que les associations de consommateurs ont suffisamment de droits...
M. Jacques Bigot. - Je ne suis pas certain que les associations exercent si souvent leurs droits. Cela évite la pénalisation de tous les domaines, ce mal français. Les conflits civils sont plus sains que le renvoi au pénal, avec un procureur qui poursuit ou non. Dans ce dispositif, les associations interviennent à côté des consommateurs en raison de l'existence d'une atteinte collective. Il améliore sans révolutionner. Mais ce n'est pas l'essentiel du texte...
L'amendement n° 844 est adopté.
L'article 11 bis C est supprimé.
Articles additionnels après l'article 11 bis C
M. François Pillet, rapporteur. - Les amendements identiques nos 360 et 785 donnent aux associations de consommateurs compétence pour assister les justiciables devant les juridictions où la représentation n'est pas obligatoire. Ce serait une manière de contourner la règle selon laquelle nul ne plaide par procureur. Rien n'interdit actuellement aux associations d'aider les consommateurs, dans la construction de leurs dossiers, ni de les conseiller dans la procédure ; nous le voyons en entendant leurs argumentaires.
Les amendements nos 360 et 785 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 845 précise que l'association peut choisir si elle préfère que les indemnisations qu'elle reçoit, dans le cadre d'une action de groupe, soient remises à la caisse des dépôts et consignation ou à la caisse des règlements pécuniaires des avocats (Carpa). Si la seconde solution peut apparaître commode lorsque l'association a par ailleurs fait appel à un avocat pour l'aider à collecter les indemnisations, la première solution présente l'avantage d'un dépôt rémunéré, au profit des consommateurs - même si le taux actuel de rémunération des dépôts est plutôt symbolique.
L'amendement n° 845 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 751 est satisfait par mon précédent amendement.
L'amendement n° 751 n'est pas adopté.
L'article 11 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - La réforme de la juridiction prud'homale est nécessaire - surtout dans les conseils les plus importants - même si l'on se serait attendu à celle qu'elle intervienne plutôt dans le cadre de la réforme de la justice du XXIe siècle. Les amendements que je vous propose vont dans trois directions.
Réaffirmer d'abord la vocation judiciaire des prud'hommes en rappelant, ce qui a valeur de symbole, qu'ils sont de véritables magistrats, des juges, et qu'ils exercent des fonctions judiciaires. C'est l'objet de mon amendement n° 908 qui revient en partie au texte initial. Mon amendement n° 909 prévoit une formation initiale commune des conseillers prud'hommes salariés et employeurs - son absence participant des conflits au sein de certains conseils - placée sous la responsabilité de l'École nationale de la magistrature (ENM) ; je ne parle que de formation initiale, sous peine de ne pas trouver de consensus... Mon amendement n° 911 interdit à un conseiller prud'homme d'assurer la défense d'une partie devant le conseil prud'homme auquel il appartient, comme il en a aujourd'hui le droit, ce qui donne une image catastrophique, dévastatrice pour la crédibilité de l'institution. L'amendement n° 910 règle une difficulté relative à la désignation des membres de la commission nationale de discipline.
Prolonger ensuite la réforme procédurale. L'échevinage consiste à donner la présidence de certaines juridictions spécialisées à un magistrat professionnel, comme c'est le cas des baux ruraux, où sont représentés les fermiers et les propriétaires autour du juge d'instance, des tribunaux des affaires de sécurité sociale ou des tribunaux pour enfants. Au moins dans le premier des cas, cela fonctionne admirablement bien : qui parmi vous a déjà entendu une plainte à ce propos ?
M. Philippe Dallier. - Pas en Seine-Saint-Denis, en tout cas...
M. François Pillet, rapporteur. - Nous sommes nombreux à penser - tout le monde sauf les syndicats, en fait - que ce serait un progrès pour les conseils de prud'hommes : chaque partie apporterait sa technique, sa connaissance du milieu, et le juge son expertise juridique ; si l'employeur et le salarié sont d'accord contre le juge professionnel sur une solution, ce dernier est malgré tout chargé de l'écrire. Mais je dois l'écarter car, culturellement parlant, il n'est accepté, ni par les syndicats de salariés, ni par les employeurs ; il est de toutes manières impossible de prévoir dans le budget de l'État la nomination des juges supplémentaires nécessaires pour présider les conseils.
Il faut donc, comme le fait le texte, trouver d'autres solutions. La première source de retard est la mise en état, l'instruction des dossiers : la conciliation ne donne rien, devant la formation de jugement, l'un apporte ses pièces, mais l'autre demande un renvoi...
M. Jean Desessard. - L'employeur surtout !
M. François Pillet, rapporteur. - Les deux cas existent. La procédure orale autorise un nombre tel de renvois que le jugement est remis aux calendes grecques. Certaines convocations qu'envoie le conseil de prud'hommes de Paris mentionnent expressément qu'il n'y a pas d'erreur dans la date, car l'année pourrait surprendre ! La solution, c'est de donner aux magistrats des pouvoirs d'injonction. Les juges chargés de la mise en état pourront enjoindre au salarié de transmettre ses écritures, ses pièces, ses demandes à son adversaire avant telle date et à celui-ci de répondre avant telle autre date. Après l'ordonnance de clôture, aucun nouvel argument ne pourra plus être présenté. Cela renforcera la notion de mise en état déjà astucieusement introduite par le projet de loi.
Je propose de passer en appel à une procédure essentiellement écrite. Je souhaitais au départ une représentation obligatoire par un avocat ou un délégué syndical ; mais cela risquait de tomber sous le coup de l'article 40 de la Constitution. Les chambres sociales des cours d'appel savent imposer des délais. Une procédure essentiellement écrite n'empêche pas une plaidoirie, comme devant les tribunaux administratifs. Dans 90 % des cas, les parties sont déjà représentées en appel.
Comme le fait remarquer le projet de loi, bien des contentieux concernent l'interprétation d'une clause d'une convention collective. La question préjudicielle - si l'appellation n'est pas abusive - qu'il prévoit fera disparaître les contentieux, parfois nombreux, qui concernent la même clause. Je vous propose d'étendre au tribunal de grande instance - par nature celui qui interprète les conventions collectives - cette possibilité prévue pour les conseils de prud'hommes et la chambre sociale de la cour d'appel. Enfin, je propose de confirmer le statut du défenseur syndical.
Mme Annie David. - Merci de rappeler que personne ne veut de l'échevinage, sinon les magistrats professionnels. La réforme a reçu à ce titre un avis unanimement hostile du Conseil de la prud'homie, et donc des représentants tant des employeurs que des salariés. Je pourrais défendre certains de mes amendements puisque les vôtres ne les feront pas tomber
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 908 proclame que les prud'hommes sont des juges et qu'ils exercent une fonction et non un mandat. C'était pour partie dans le projet de loi et a été supprimé à l'Assemblée nationale.
Mme Nicole Bricq. - Ce sont déjà des juges.
M. François Pillet, rapporteur. - Autant le dire.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - La loi les consacre.
M. Jacques Bigot. - Les conseillers prud'hommes doivent leur mandat à leur élection, à la différence des juges - comme pour nous. Que l'on dise qu'ils sont des juges, soit ; mais ils doivent conserver un mandat et non des fonctions. Cela marque bien le fait qu'ils représentent des parties qui recherchent d'abord une conciliation. Gardons cet esprit particulier des prud'hommes.
M. François Pillet, rapporteur. - Ils ont certes un mandat de par leur élection ; mais lorsqu'ils siègent, ils exercent des fonctions, comme les juges au tribunal de commerce, pourtant élus eux aussi. Derrière ces mots, il y a un symbole, je l'admets.
Mme Annie David. - C'est bien pour cela que je suis contre cet amendement. Vous touchez au symbole de la prud'homie, mandat lié à leurs responsabilités syndicales, qu'elles soient salariales ou patronales. C'est cette représentation des deux parties qui fait leur force.
L'amendement n° 908 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 909 prévoit une formation initiale commune aux conseillers prud'homaux.
M. Alain Richard. - Ce n'est guère législatif...
M. François Pillet, rapporteur. - Mais si nous ne l'écrivons pas...
L'amendement n° 909 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 910 propose de revenir à la rédaction initiale du projet de loi, en y ajoutant la mention selon laquelle les désignations effectuées tiennent compte de la nécessité d'assurer une représentation équilibrée des hommes et des femmes au sein de la commission nationale de discipline. La règle de stricte parité adoptée par les députés conduit à une difficulté, puisque le magistrat et la magistrate doivent être nommés à partir d'une liste établie par les premiers présidents de cours d'appel qui auraient chacun arrêté un nom de magistrat. Comment assurer une parité dans ces conditions ?
Mme Annie David. - Il serait possible de décider que dans telle cour, le magistrat désigné serait un homme, puis une femme. Si nous, législateurs, qui donnons des leçons, ne sommes pas capables d'assurer la parité... Ou bien, il faut remplacer dans votre texte « tiennent comptent » par « respectent ».
M. François Pillet, rapporteur. - Je serais prêt à vous suivre. Mais dans certaines cours d'appel, les présidents n'auront à choisir qu'entre des femmes.
Mme Annie David et Mme Nicole Bricq. - Pour une fois ! Ce n'est pas dramatique !
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Ne contraignons pas trop.
Mme Catherine Deroche. - On ne peut pas rigidifier la réalité ainsi !
L'amendement n° 910 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'article L. 1453-2 du code du travail interdit à un conseiller prud'homme de représenter une partie devant la section, la chambre ou la formation de référé à laquelle il appartient. L'amendement n° 911 étend cette interdiction au conseil prud'homal.
M. Yannick Vaugrenard. - Ils connaissent tout le monde.
M. Alain Richard. - Il faudra corriger une coquille : le terme « chambre » doit être mis au pluriel.
Mme Annie David. - Chacun est à même de faire la part des choses. Les justiciables sont capables de le comprendre comme nous. Ce n'est pas du tout ce que demandent les prud'hommes. Je m'abstiendrai.
M. François Pillet, rapporteur. - Dans un même ordre d'idées, la Cour européenne des droits de l'homme interdit au magistrat instructeur de participer à la formation de jugement.
Mme Annie David. - C'est différent pour la prud'homie.
M. Alain Richard. - C'est une justice ! Les prud'hommes ont pour rôle de juger.
Mme Annie David. - Ce n'est pas une justice ordinaire. Pourquoi modifier ce point maintenant ? Si la Cour européenne des droits de l'homme nous condamne, il sera bien temps. Sous prétexte de problèmes certes bien réels de délais, ce texte veut casser une justice qui fonctionne très bien hormis ce point.
L'amendement n° 911 est adopté, ainsi que l'amendement rédactionnel n° 976.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 912 renforce les pouvoirs d'injonction.
L'amendement n° 912 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 925 de précision rédactionnelle autorise une partie à ne pas comparaître personnellement, sauf si le juge le lui a enjoint, tant qu'elle est représentée par l'avocat ou le défenseur syndical.
Mme Nicole Bricq. - Il est souhaitable que les deux parties soient présentes pour une conciliation.
M. François Pillet, rapporteur. - La Cour de cassation autorise la représentation par un avocat ; il faudrait en faire bénéficier le défenseur syndical. L'absence des parties rend parfois plus facile la conciliation.
Mme Catherine Deroche. - Ce n'est pas faux !
Mme Annie David. - Ce n'est pas toujours le cas. Cela peut aussi encourager les avocats à rester sur une ligne du type : « Cela est contraire aux intérêts de mon client ».
M. François Pillet, rapporteur. - Dans le droit actuel, une partie peut être absente si elle est défendue par un avocat, mais pas si elle l'est par un défenseur syndical.
L'amendement n° 925 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 913 établit une procédure écrite devant la cour d'appel.
M. Jacques Bigot. - La proposition du rapporteur est subtile. Des avocats de plus en plus spécialisés feront d'excellentes conclusions ; les défenseurs seront moins bien armés, mais auront droit à une procédure orale. Autoriser une personne soumise à une procédure écrite à se défendre seule est excessif, cependant. De plus, cela ne relève-t-il pas du réglementaire ?
M. Henri Tandonnet. - Il faut choisir entre une procédure orale et une procédure écrite, c'est une question de principe. Dans une procédure orale, il faut une assistance et non une représentation.
M. François Pillet, rapporteur. - La procédure « essentiellement écrite » est précisément celle qui régit les tribunaux administratifs, qui fonctionne remarquablement bien. Dirigée par un juge, elle est menée de fait par le greffe, qui transmet des écrits que les magistrats savent parfaitement interpréter, dans une procédure sans obligation de représentation. L'avantage, c'est que le magistrat impose des délais impératifs.
M. Jacques Bigot. - Les procédures ne sont pas forcément plus courtes...
M. François Pillet, rapporteur. - Pas pour les mêmes raisons. La représentation obligatoire, meilleur système, étant impossible, la procédure écrite est le moins pire. Les défenseurs syndicaux devant la cour d'appel savent écrire des conclusions ; ils sont spécialisés.
L'amendement n° 913 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Outre une précision juridique, l'amendement n° 914 tire les conséquences du statut de salarié protégé accordé au défenseur syndical, en prévoyant que son transfert, s'il est compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail.
L'amendement n° 914 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 972 autorise toutes les juridictions judiciaires éventuellement concernées à saisir la Cour de cassation de l'interprétation d'une convention collective présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges.
L'amendement n° 972 est adopté.
L'amendement n° 645 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 646, qui supprime une phrase donnant au délégué syndical la déontologie du juge ; je suis très attaché au contraire à ce qu'il devienne un juge au plus profond de lui.
Mme Annie David. - Cette déontologie est déjà comprise dans son mandat prud'homal. Je comprends qu'avec vos objectifs, vous ayez besoin d'insister autant...
M. François Pillet, rapporteur. - Ce faisant, je leur montre une grande confiance ; c'est un hommage que je leur rends.
M. Jean Desessard. - Cela s'applique seulement au tribunal ? Ou cela l'empêche de manifester ?
M. François Pillet, rapporteur. - Comme pour les juges : leur est interdit tout comportement incompatible avec leurs fonctions.
M. Jean Desessard. - Comme ?
M. François Pillet, rapporteur. - De critiquer publiquement une décision de justice.
L'amendement n° 646 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 647 supprime une réaffirmation nécessaire du respect du secret des délibérations.
Mme Annie David. - Cela fait partie du serment que les prud'hommes prêtent.
M. François Pillet, rapporteur. - C'est vrai.
Mme Annie David. - C'est redondant.
M. François Pillet, rapporteur. - Cela constituera le support législatif du serment.
L'amendement n° 647 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'alinéa supprimé par l'amendement n° 648 établit un équilibre entre droit de grève et devoir du juge. Avis défavorable.
Mme Annie David. - Le texte cherche à remédier à des difficultés qui ont pu apparaître ; mais il le fait par une véritable atteinte au droit de grève.
M. Alain Richard. - Je rejoins Mme David : il y a un problème de parallélisme des formes avec les magistrats statutaires qui peuvent interrompre leurs audiences.
M. François Pillet, rapporteur. - Le texte est limité à un cas : leur sont interdites des actions concertées de nature à entraver le fonctionnement des juridictions, lorsque le renvoi de l'examen du dossier « risquerait d'entraîner des conséquences irrémédiables ou manifestement excessives pour les droits d'une partie ».
M. Alain Richard. - Nous pouvons supposer que la déontologie y pourvoit.
Mme Annie David. - C'est la même que celle des juges professionnels - sachant qu'ils ont parfois la vie de certains entre leurs mains.
L'amendement n° 648 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 649 supprime le référentiel, pourtant purement indicatif même après passage à l'Assemblée nationale, et qui offre une prévisibilité aux parties. Il ne s'impose au juge que si les deux parties s'accordent pour le demander. De toutes manières, il existe déjà des référentiels.
Mme Annie David. - L'Accord national interprofessionnel (ANI) en a adopté, qui ne sont pas applicables. Ils ne le seront pas plus demain.
Mme Nicole Bricq. - Je suis pour le maintien du référentiel.
L'amendement n° 649 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n° 761.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 650, comme le n° 154, supprime la formation restreinte de jugement. Elle n'est pourtant pas forcément moins impartiale qu'une formation plénière ; de toute façon, sa composition reste paritaire : passer de deux contre deux à un contre un change peu de choses.
L'amendement n° 650 est retiré.
L'amendement n° 154 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 349, qui prévoit la durée des formations initiales de prud'hommes, est satisfait par le texte qui fixe une durée de cinq jours pour la formation initiale et de six semaines pour la formation continue.
L'amendement n° 349 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 348 est satisfait par l'actuelle rédaction.
L'amendement n° 348 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Les amendements identiques nos 665, 585, 808, 201 et 720 suppriment la possibilité pour le défenseur syndical, déjà autorisé aujourd'hui à intervenir devant les cours d'appel, d'exercer des fonctions d'assistance ou de représentation devant les cours d'appel en matière prud'homale. Avis défavorable.
Mme Nicole Bricq. - Tout à fait. Ce n'est pas acceptable !
M. Henri Tandonnet. - Ce serait pourtant logique si la procédure est uniquement écrite. L'utilisation du réseau privé virtuel des avocats (RPVA) rend obligatoire la représentation par avocat.
M. François Pillet, rapporteur. - Les défenseurs syndicaux spécialisés s'y adapteront très vite. Le RPVA n'existe d'ailleurs pas dans toutes les cours d'appel.
Les amendements identiques nos 665, 585, 808, 201 et 720 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 762 précise que seules les organisations syndicales représentatives de salariés au niveau national sont habilitées à présenter à l'administration des candidats aux fonctions de défenseur syndical, en visant explicitement l'article L. 2121-1 du code du travail. C'est oublier que le défenseur peut aussi être proposé par des organisations patronales. Avis défavorable.
L'amendement n° 762 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 763 oblige le défenseur syndical à souscrire une assurance responsabilité civile professionnelle. Son régime de responsabilité étant, me semble-t-il, celui d'un collaborateur occasionnel du service public de la justice, une assurance en responsabilité civile est inutile, le coût étant assuré par l'État. Avis défavorable.
M. Alain Richard. - Le statut spécifique du collaborateur occasionnel le place sous l'autorité du gestionnaire du service public. Le défenseur agit pour le compte d'une partie privée ; en cas de faute, il n'y a pas de dommages... Cela a sûrement dû être jugé.
M. Henri Tandonnet. - La responsabilité incombe au syndicat ; c'est donc lui qui doit être assuré. Il demande d'ailleurs une cotisation au salarié qu'il doit représenter, comprenant un certain pourcentage pour couvrir le cas de condamnation.
M. Jacques Bigot. - Si nous autorisons les défenseurs syndicaux à agir devant les cours d'appel, nous ne pouvons pas les dispenser - eux ou les syndicats - d'assurances qui seraient obligatoires pour les avocats.
M. François Pillet, rapporteur. - Je suis touché par votre argumentation. Je me demande s'il n'y a pas une jurisprudence qui les rapprochait des experts judiciaires. Je vous propose d'examiner ce point d'ici la séance.
L'amendement n° 763 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 651 ne porte pas sur les bons alinéas.
Mme Annie David. - Il concerne en effet les alinéas 72 à 76.
M. François Pillet, rapporteur. - Non, les alinéas 77 à 83.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Il faudra le modifier et le présenter en séance.
L'amendement n° 651 est retiré.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 155 vise les alinéas nos 78 à 83.
M. Jean Desessard. - Je le retire.
L'amendement n° 155 est retiré.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 347 impose un délai à la Cour de cassation : d'expérience, ces délais sont inopérants. Avis défavorable.
L'amendement n° 347 n'est pas adopté.
L'article 83 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 84
L'amendement de coordination n° 977 est adopté.
L'amendement n° 652 n'est pas adopté.
L'article 84 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
La réunion est levée à 0 heure 20.
Mercredi 25 mars 2015
- Présidence de M. Vincent Capo-Canellas, président -La réunion est ouverte à 10 heures
Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission spéciale
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 956 supprime l'article qui prévoit un rapport du Gouvernement, en application de notre jurisprudence constante.
L'amendement n° 956 est adopté ; en conséquence, l'article 60 bis est supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 957 supprime une disposition introduite par l'Assemblée nationale destinée à autoriser les élus qui souhaitent adresser leur compte rendu d'action à leurs administrés à passer outre aux autocollants « Stop pub » apposés sur les boîtes aux lettres. La disposition ne présente aucun lien avec le projet de loi ; sa portée est faible puisque l'autocollant n'a pas de valeur légale.
M. Philippe Dallier. - L'autocollant est-il opposable ?
M. François Pillet, rapporteur. - C'est de l'ordre des bonnes pratiques.
L'amendement n° 957 est adopté.
En conséquence, l'article 63 bis est supprimé et l'amendement n° 747 devient sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Le projet de loi prévoit la spécialisation de certains tribunaux de commerce pour connaître des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises les plus importantes. Les dispositions des articles 65 à 68 constituent l'un des volets d'une réforme plus vaste de la justice consulaire qui doit figurer dans le projet de loi justice du XXIe siècle. Cette méthode regrettable nous prive d'une vision d'ensemble ; sur le fond, ni la déontologie, ni la formation, ni l'élargissement du corps électoral aux artisans, ne sont évoqués. Quant à l'échevinage, c'est un sujet interdit...
Si le principe de spécialisation est désormais approuvé, y compris, à regret, par les juges consulaires, ses modalités d'application restent discutées : combien de juridictions ? Quel seuil pour une compétence automatique ou facultative ? Inclut-elle les mesures de prévention ? J'ai tenté de trouver les voies d'un compromis entre les objectifs du Gouvernement et les oppositions exprimées par les juges consulaires comme par les universitaires spécialistes des procédures collectives. Comme je l'ai indiqué au ministre, cette réforme constitue l'un des points très sensibles du texte. Si sa portée pratique est réduite, le symbole pourrait susciter une crise des vocations. Or si des tribunaux de commerce ferment, leur contentieux sera transféré aux tribunaux de grande instance, ce qui ne manquera pas de susciter des difficultés à la Chancellerie.
Non, je ne propose pas de remettre en cause le principe de l'existence de juridictions spécialisées. En l'état, le texte prévoit un tribunal spécialisé pour une ou plusieurs cours d'appel, avec un maximum d'un par cour d'appel, ce qui pourrait aboutir à huit ou neuf tribunaux spécialisés. Le texte soulève deux difficultés : il exclut l'outre-mer, ce qui est discutable ; dans certaines cours d'appel, telles Paris, Versailles ou Aix, il est inconcevable qu'un tribunal de commerce seulement soit compétent. Dessaisir Versailles ou Pontoise pour Nanterre n'aurait aucun sens. Dans ces conditions, je propose un tribunal spécialisé au moins par cour d'appel, ce qui pourrait conduire à 35 au total, sur 134. Vous m'objecterez que, dans le ressort des petites cours d'appel, la désignation du tribunal de commerce spécialisé ne s'imposera pas nécessairement. Nous attendons la réforme de la carte des cours d'appel...
Une rédaction du type « un ou plusieurs tribunaux dans le ressort d'une ou plusieurs cours d'appel » n'est pas opérante juridiquement compte tenu de l'objectif recherché par les auteurs des amendements qui le proposent : le Gouvernement pourrait en spécialiser un dans le ressort de plusieurs cours d'appel. Si l'on prévoit au moins un tribunal spécialisé par cour d'appel, l'exclusion de l'outre-mer a peu de sens car chaque département d'outre-mer compte une cour d'appel.
Le texte renvoie au pouvoir réglementaire le soin de fixer le seuil de compétence des tribunaux spécialisés. Les seuils de 150 salariés et 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, que le Gouvernement a évoqués, sont considérés comme assez bas et pourraient être relevés ; M. Macron a laissé la porte ouverte à cet égard. Dès lors, je vous propose un mécanisme à trois niveaux : une compétence de droit au-delà de 250 salariés, seuil qui parait acceptable pour les juges consulaires d'après les échanges que j'ai eus avec eux ; une compétence facultative entre 150 et 250 salariés, sur renvoi de la cour d'appel, tenue de statuer après avis du ministère public ; une compétence facultative en deçà de 150 salariés, sur renvoi de la cour d'appel dans le cadre actuel de la procédure de délocalisation. Le seuil de 250 salariés est le seuil inférieur des entreprises de taille intermédiaire et des grandes entreprises, catégories fixées par la loi de modernisation de l'économie ; le seuil de 150 salariés est celui de constitution obligatoire des comités de créanciers dans une procédure collective.
Ce système pourrait satisfaire les préoccupations exprimées par un grand nombre d'amendements, sans dénaturer le texte. Les procédures concernées seraient comprises entre 150 et 200 par an au-delà de 150 salariés et de l'ordre d'une soixantaine au-delà de 250. La complexité propre des procédures transfrontalières justifie à mon sens de n'en saisir que les tribunaux spécialisés.
Le champ de la spécialisation est incertain : il vise les procédures du livre VI du code de commerce, parmi lesquelles les procédures collectives : sauvegarde, redressement et liquidation. Qu'en est-il des mécanismes de prévention, qui ne sont pas qualifiés de procédures, par exemple le droit d'alerte du président du tribunal ou le mandat ad hoc ? Reposant sur la confidentialité et la compétence propre du président du tribunal, ils exigent une grande proximité incompatible avec le renvoi à un tribunal spécialisé.
Le regroupement des procédures concernant les entreprises d'un même groupe devant un seul tribunal doit être salué : il était attendu et devrait améliorer la cohérence économique des procédures collectives. Je vous proposerai de le systématiser et de ne pas le limiter aux tribunaux spécialisés.
Mme Nicole Bricq. - La spécialisation des tribunaux de commerce fait débat. M. Macron et Mme Taubira sont ouverts à une élévation des seuils, ce qui est positif. Le système que vous défendez est d'une incroyable complexité. Il ne simplifie ni la vie des entreprises ni celle des justiciables. Didier Guillaume et Catherine Tasca ont proposé une solution plus souple, qui laisse une marge d'appréciation, avec un ou plusieurs tribunaux spécialisés par cour d'appel. Nous nous abstiendrons donc sur votre amendement. Vous avez consulté les juges consulaires ; le Gouvernement pourrait se rapprocher des représentants de la justice commerciale.
Il est habituel de fixer des seuils liés au nombre de salariés et au montant du chiffre d'affaires mais, en l'espèce, le montant du chiffre d'affaires semble un critère plus pertinent. Il est normal que les juges consulaires ne veuillent pas être dessaisis de leurs plus beaux dossiers et mènent une campagne corporatiste mais la spécialisation est un mouvement irréversible et il est vain d'essayer d'arrêter le balancier du temps.
M. Jean Desessard. - Pour bien comprendre, vous proposez que les seuils de compétence des tribunaux spécialisés soient fixés par la loi et non par décret afin d'améliorer la sécurité juridique.
M. François Pillet, rapporteur. - Tout à fait.
M. Jean Desessard. - Vous préconisez également qu'une même juridiction traite des dossiers concernant les diverses sociétés d'un même groupe. Vous entendez ainsi supprimer ou limiter les inquiétudes.
L'amendement de coordination n° 959 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Je ne partage pas votre opinion sur la complexité du mécanisme que je propose.
Mme Nicole Bricq. - Disons qu'il ne simplifie pas les choses...
M. François Pillet, rapporteur. - Si vous voulez. Il me semble que la fixation des seuils dans la loi est de nature à apaiser la colère - vive - des tribunaux de commerce.
M. Henri Tandonnet. - Les tribunaux spécialisés ne sont pas une solution miracle. Le succès des procédures collectives requiert avant tout des professionnels compétents ; cela n'a pas toujours été la règle pour les mandataires liquidateurs. Les juges sont là pour juger, les juges les plus proches ne sont pas moins aptes à le faire que les parisiens. En pratique, les tribunaux de commerce n'ont pas à rougir de leurs décisions. Ils sont souvent attentifs au maintien de l'emploi local. De ce point de vue, confier les procédures collectives à des tribunaux spécialisés lointains n'est pas nécessairement une bonne chose. J'y suis réticent. Les juges consulaires, bénévoles, triés sur le volet, ne font pas preuve de corporatisme. Le président du tribunal de commerce d'Agen, expert-comptable confirmé, a sauvé une entreprise de plus de 150 salariés... qui embauche aujourd'hui.
Les propositions du rapporteur sont intéressantes. Si les seuils sont relevés, une grande partie des entreprises resteront sous la responsabilité des magistrats locaux.
M. François Pillet, rapporteur. - La création de juridictions spécialisées peut être débattue - la doctrine a été très critique. Le texte a été voté dans des conditions particulières, soit nous l'amendons, soit nous le laissons en l'état... Pour ma part, je cherche une solution plus satisfaisante pour les juges consulaires. M. Macron m'a paru, à titre personnel, très ouvert. Je pense pouvoir le convaincre.
M. Jean-Pierre Sueur. - Il arrive qu'une procédure jugée dans un département concerne en réalité d'autres départements. Récemment, le cas d'une affaire de volaille a été traité dans l'Ouest dans un contexte local qui pouvait prêter à discussion alors que l'entreprise comptait des établissements dans le Cher et le Pas-de-Calais.
Mme Catherine Génisson. - Absolument !
M. Jean-Pierre Sueur. - Votre proposition appréhende-t-elle ce type de situations ? Pourra-t-on confier un dossier à une autre juridiction que celle initialement saisie ?
M. François Pillet, rapporteur. - Oui. D'ailleurs même en l'état actuel du droit, le président de la cour d'appel de Rennes aurait pu dessaisir ce tribunal...
M. Alain Richard. - ... au profit d'un autre tribunal du ressort...
M. François Pillet, rapporteur. - ... ce qui aurait amené l'affaire à Rennes.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Les premiers présidents de cour d'appel considèrent cette hypothèse avec prudence.
M. François Pillet, rapporteur. - La Cour de cassation peut dessaisir au profit d'une juridiction située en dehors du ressort de la cour d'appel.
M. Jean-Pierre Sueur. - Il est important de le préciser.
M. Alain Richard. - La spécialisation se heurte à de nombreuses objections. Au sein de la justice commerciale, le ministère public peut contribuer à orienter le débat. Est-il envisageable de disposer d'un parquet spécialisé dans le ressort de chaque cour d'appel ? À mon sens, c'est la limite basse.
M. François Pillet, rapporteur. - Le problème pourrait être résolu par une circulaire du garde des Sceaux donnant instructions au parquet.
L'amendement n° 960 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 219 peut conduire in fine à une solution contraire à l'objectif de son rédacteur. Il est satisfait par l'amendement précédent.
L'amendement n° 219 devient sans objet.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Les amendements nos 261 et 748 sont satisfaits.
Mme Nicole Bricq. - Non, vous fermez le dispositif. Nous le laissions ouvert à la discussion et au rôle du Gouvernement.
M. François Pillet, rapporteur. - J'ai limité le rôle du Gouvernement volontairement.
Les amendements identiques nos 261 et 748 deviennent sans objet.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Les amendements nos 837, 570 et 686 sont satisfaits sous les mêmes réserves. Les amendements n° 828, 569 et 687 sont satisfaits.
Les amendements nos 837, 828, 569, 570, 686, 687 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. -L'amendement n° 215 n'est pas utile dans la mesure où la procédure de délocalisation est modifiée par l'article 67. Il est satisfait par le texte existant.
L'amendement n° 215 devient sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - J'avais pensé à un amendement semblable au 730 pour réduire les conflits mais il ne reçoit pas l'approbation des juges consulaires. Il conviendra d'en discuter le cas échéant en séance.
L'amendement n° 730 n'est pas adopté.
L'article 66 est adopté dans sa rédaction issue des travaux de la commission.
Article 67
L'amendement n° 961 est adopté.
Les amendements nos 218, 262 et 838 deviennent sans objet.
L'article 67 est adopté dans sa rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 67
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 962 rectifié élargit la solution intéressante que j'ai signalée tout à l'heure.
L'amendement n° 962 rectifié est adopté ; en conséquence, l'article additionnel est inséré.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 963 codifie les dispositions prévoyant que la compétence des tribunaux de commerce spécialisés ne s'applique pas aux entreprises des départements d'outre-mer ainsi que des collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon. Il est possible qu'il soit supprimé en séance : il est là à titre transitoire.
M. Alain Richard. - Le Gouvernement est favorable à la non-application.
M. François Pillet, rapporteur. - Chaque département d'outre-mer compte une cour d'appel. Je ne vois pas de raison de prévoir une exception mais je n'en fais pas un dogme.
Mme Nicole Bricq. - C'est peut-être un problème de seuil ?
M. François Pillet, rapporteur. - Non.
L'amendement n° 963 est adopté.
L'article 68 est adopté dans sa rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 964 supprime le mécanisme complexe et rigide de désignation obligatoire par le tribunal d'un deuxième administrateur judiciaire ou d'un deuxième mandataire judiciaire commun pour les procédures collectives concernant les entreprises d'une certaine taille. La précision des critères prévus ne prend pas en compte la diversité des cas pouvant justifier la désignation de plusieurs administrateurs ou mandataires tandis qu'elle rend obligatoire cette désignation dans des cas où elle n'est pas indispensable. Pourquoi désigner plusieurs administrateurs là où un seul peut suffire ? En tout état de cause, les tribunaux désignent fréquemment plusieurs administrateurs ou mandataires, en fonction des caractéristiques et des besoins de l'entreprise. Conservons cette souplesse. En outre, l'article 69 du projet de loi est satisfait par un amendement portant article additionnel après l'article 67, pour améliorer le traitement des groupes de sociétés, et par l'article 70 A, qui facilite la désignation de plusieurs administrateurs ou mandataires dès l'ouverture de la procédure soit d'office par le tribunal soit à la demande notamment de l'entreprise elle-même ou du parquet.
M. Henri Tandonnet. - Surtout si on a affaire à des juridictions spécialisées qui sont très compétentes.
L'amendement n° 964 est adopté ; en conséquence, l'article 69 est supprimé.
L'amendement n° 776 devient sans objet.
Article additionnel après l'article 69
M. François Pillet, rapporteur. - Dans le cadre des procédures collectives, le tribunal doit désigner des mandataires de justice qui présentent des garanties de compétence et d'indépendance. Il n'est pas opportun de nommer des sociétés privées de recouvrement de créances et de les faire entrer dans la catégorie des professions réglementées. Je suis défavorable à l'amendement n° 216.
L'amendement n° 216 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Je suis également défavorable à l'amendement n° 692.
L'amendement n° 692 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - En application de notre jurisprudence constante, l'amendement n° 965 supprime une demande de rapport.
L'amendement n° 965 est adopté ; en conséquence, l'article 69 bis A est supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - Devenu sans objet, l'amendement n° 620 est placé dans le titre relatif à la sauvegarde alors qu'il traite de la liquidation. Il est largement satisfait.
L'amendement n° 620 devient sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - L'article 56 bis rend possible le recours au salariat pour les administrateurs et les mandataires judiciaires. Il fixe le plafond de salariés au quadruple du nombre d'associés de la structure, alors qu'il serait du double pour les autres professions. Il semble plus raisonnable de retenir ce plafond du double car le recrutement de salariés peut nuire à la cooptation de nouveaux associés, d'où mon amendement n° 907.
Mme Nicole Bricq. - Nous en discuterons en séance.
M. Jean Desessard. - Vous proposez de limiter les délégations par les associés.
M. François Pillet, rapporteur. - Je propose de ne pas dépasser le chiffre de deux administrateurs ou mandataires salariés par associé ; à quatre, les associés hésiteront à accueillir de nouveaux associés. Nous avons retenu le chiffre de deux pour les notaires.
L'amendement n° 907 est adopté.
L'article 69 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 966 apporte des précisions procédurales, par coordination avec les règles d'ouverture des procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire, en vue de faciliter la désignation de plusieurs mandataires judiciaires ou administrateurs judiciaires dans le cadre d'une même procédure.
L'amendement n° 966 est adopté.
L'article 70 A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 70 A
M. François Pillet, rapporteur. - Il n'y a pas lieu d'imposer le ministère d'avocat pour les procédures de conciliation, de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaire. Il s'agit de procédures orales. Les avocats ne sont pas demandeurs.
M. Alain Richard. - Ce n'est pas un critère décisif.
L'amendement n° 760 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Avec l'amendement n° 973, je veux mieux encadrer la procédure de dilution forcée ou de cession forcée instaurée par l'article 70 à l'encontre des actionnaires opposés à un plan de redressement. Ou on musèle l'actionnaire opposant ou on l'oblige à céder ses actions. La dilution forcée est incompatible avec le droit européen qui dispose que toute augmentation de capital doit être décidée par l'assemblée générale et qui est strictement interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne. L'augmentation forcée de capital constitue de plus une atteinte sans contrepartie au droit de vote des actionnaires, attribut de leur droit de propriété. Je vous propose de supprimer cette source de fragilité du dispositif.
Le tribunal pourrait ordonner la cession des titres des actionnaires opposés au plan de redressement dans l'hypothèse où celle-ci constituerait la seule solution sérieuse évitant une cessation d'activité de nature à causer un « trouble grave à l'économie nationale ou régionale », ce dont le tribunal devra justifier. La cession forcée aboutit au même résultat que la dilution forcée, à savoir l'éviction des actionnaires qui refusent le plan de redressement au profit de personnes s'étant engagées à exécuter le plan. En application du principe de proportionnalité, il est de bonne précaution de relever le seuil des entreprises concernées de 150 à 250 salariés.
L'amendement réécrit la procédure pour la rendre plus claire, simple et lisible. Il lève des difficultés, par exemple l'obligation pour le tribunal de statuer par un seul jugement sur la cession et la valeur des parts ainsi cédées, alors que l'évaluation de la valeur de ces parts ne peut se faire qu'après la décision de cession. Il supprime enfin des dispositions inutiles ou redondantes.
En résumé, l'objet principal de l'amendement est d'écarter la dilution forcée au profit de la cession forcée. Même si celle-ci suscite bien des réserves de la part de la doctrine, de mandataires, de juges et d'avocats, elle paraît plus susceptible de passer le filtre constitutionnel et aboutit au même résultat.
Mme Nicole Bricq. - L'Assemblée nationale a voulu faciliter au maximum les reprises crédibles, quitte à bousculer le droit. Cependant, le Conseil d'État n'a pas émis de réserve sur cet article très important. Le texte soulève des interrogations : l'entreprise est-elle la propriété de ses actionnaires ? Est-elle un bien commun ? Une collectivité qui doit s'inscrire dans la durée ? Nous aurons un débat en séance à partir d'exemples concrets. La gauche et la droite ne donnent pas les mêmes réponses. Pour nous, l'entreprise est un bien collectif qui dépasse les intérêts de ses actionnaires. Pragmatiquement, nous devons parfois faciliter l'entrée au capital de repreneurs. La procédure de cession forcée a été encadrée par l'Assemblée nationale. On peut discuter de ses contours, mais elle est utile.
M. Jean Desessard. - En cas de blocage dans une entreprise de plus de 150 salariés, le gouvernement préconise la nomination d'un mandataire et l'ouverture du capital ; vous prévoyez que le tribunal ordonne la cession des parts. C'est bien cela ?
M. Jean-Pierre Masseret. - Il y a aussi une divergence concernant les seuils.
M. Alain Richard. - Le texte risque de se heurter à un obstacle constitutionnel puis à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne. Il faut sécuriser le dispositif. Le droit de propriété des actionnaires est protégé par les traités et par la Déclaration des droits de l'homme. Lui porte-t-on davantage atteinte en cas de dilution forcée qu'en cas de cession forcée ? Si la sécurité juridique est davantage assurée par la cession forcée, je suis prêt à adopter votre proposition, mais ce n'est pas certain.
M. Jacques Bigot. - Depuis la Révolution française, la propriété est un droit sacré mais les théories sur l'abus de droit se sont développées récemment. Le texte actuel comporte des garde-fous puisque les conditions dans lesquelles la dilution forcée peut intervenir sont restrictives. Dans le contexte de mondialisation, certaines stratégies actionnariales sont guidées par la volonté d'éviter le développement de concurrents. Devons-nous privilégier la protection du droit de propriété ou la lutte contre les abus du droit de propriété qui empêchent la poursuite de l'activité et la préservation de l'emploi ? Il nous faut nous battre contre les abus malgré les difficultés d'ordre constitutionnel - d'ailleurs non avérées - ou le contenu de directives. Le sauvetage de notre économie est à ce prix.
M. François Pillet, rapporteur. - Ce débat de société dépasse les questions juridiques. On peut concevoir une société totalement différente...
M. Jean Desessard. - Nous sommes d'accord.
M. François Pillet, rapporteur. - L'hypothèse de la dilution est plus gravement inconstitutionnelle en ce qu'elle affecte les droits de vote alors que dans la cession, l'on indemnise. La cession forcée peut alors être acceptée, s'il y a proportionnalité, d'où les seuils. L'atteinte au droit de propriété est raisonnable. Aller plus loin serait inconstitutionnel et contreviendrait à la convention.
L'amendement n° 973 est adopté.
L'article 70 est adopté dans sa rédaction issue des travaux de la commission.
L'amendement n° 693 devient sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Mon amendement n° 974 est un peu moins libéral que le texte qui autorise le tribunal à prononcer une interdiction de gérer à l'encontre des seuls chefs d'entreprise ayant omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure collective. Même des gens de bonne foi sont dans l'incapacité totale de gérer. Il appartient au tribunal d'en juger.
L'amendement n° 974 est adopté.
L'article 70 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 975 introduit des précisions qui aideront le Gouvernement à revenir sur une jurisprudence très stricte de la Cour de cassation.
L'amendement n° 975 est adopté.
L'article 70 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - En raison de sa technicité, j'ai soumis l'amendement n° 944 aux services de la Chancellerie. Il clarifie la rédaction des mesures de simplification des règles de cession du fonds de commerce. Il apporte également des mesures complémentaires de simplification, inspirées pour certaines de la proposition de loi de notre collègue Thani Mohamed Soilihi. Il s'agit notamment d'allonger le délai d'inscription du privilège du vendeur du fonds de commerce au registre tenu par le greffe du tribunal de commerce, par cohérence avec le délai prévu pour l'enregistrement de l'acte de cession du fonds ; de permettre à un créancier du vendeur du fonds de former opposition au paiement du prix par lettre recommandée ; de rendre au président du tribunal de commerce sa fonction naturelle de juge des litiges relatifs à la cession du fonds de commerce.
L'amendement n° 944 est adopté.
L'article 28 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
L'article 28 ter est adopté sans modification, de même que les articles 33 septies et 41 A.
M. François Pillet, rapporteur. - Le principe d'innovation peut présenter une utilité pour préciser l'interprétation du principe de précaution. Cependant cet article est dépourvu de portée normative. C'est pourquoi mon amendement n° 930 propose de le supprimer.
M. Alain Richard. - L'idée venait de l'UMP.
M. François Pillet, rapporteur. - De l'office parlementaire des choix scientifiques et technologiques.
L'amendement n° 930 est adopté ; en conséquence, l'article 41 B est supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 902 procède aux coordinations requises pour harmoniser les règles prohibant le démarchage en matière juridique. Il supprime en outre la mention selon laquelle, dans le cadre d'une sollicitation personnalisée le professionnel devrait communiquer des informations générales sur le droit de la propriété industrielle.
L'amendement n° 902 est adopté.
L'article 41 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 926 supprime une demande de rapport au Gouvernement.
Mme Nicole Bricq. - Il est question de rapatrier vers la BPI la partie publique du financement de la Coface. Dans ce contexte, un rapport sur l'efficacité de cet organisme peut être intéressant.
M. François Pillet, rapporteur. - Cela relève plutôt de la compétence de la commission des finances.
Mme Nicole Bricq. - Le travail en commission n'exclut pas le rapport.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Le rapport serait annuel.
Mme Nicole Bricq. - Il faudrait amender le texte sur ce point.
M. Jacques Bigot. - Ce n'est pas parce des rapports n'ont pas d'intérêt que tous en sont dépourvus. La garantie publique coûte de l'argent ; il n'est pas inutile de voir, avant le budget, ce qu'elle rapporte.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - La jurisprudence rapports souffre des amodiations. L'article figurera dans le code des assurances. Est-ce justifié ?
Mme Nicole Bricq. - Oui, puisqu'il s'agit d'une assurance pour les entreprises.
M. François Pillet, rapporteur. - C'est une question dont la commission des finances peut se saisir.
Mme Annie David. - D'autant que la Coface intervient dans des domaines plus larges. Elle est notamment en charge de l'accréditation des laboratoires médicaux. Je me rappelle du débat qui a eu lieu sur ce sujet. Il est nécessaire que cet organisme qui a beaucoup de pouvoirs rende un rapport sur ses activités. De là à faire figurer cela dans le code des assurances, et à rendre l'obligation annuelle... On peut en discuter.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - L'article étant mal rédigé, il est préférable de ne pas l'adopter pour pouvoir éventuellement le modifier en séance.
L'amendement n° 926 est adopté ; en conséquence, l'article 41 bis A est supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - L'article apporte une précision qui n'est pas nécessaire. Il va de soi qu'il entre dans les finalités de la compagnie nationale des conseils en propriété industrielle d'oeuvrer pour promouvoir l'accès aux prestations délivrées par ces professionnels. Mon amendement n° 903 propose de supprimer l'article.
L'amendement n° 903 est adopté ; en conséquence, l'article 41 bis B est supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - Il s'agit d'une demande de rapport. Si nécessaire, ce point pourra être évoqué lors de la discussion générale, en séance. Par conséquent, mon amendement n° 931 propose de le supprimer.
L'amendement n° 931 est adopté ; en conséquence, l'article 41 bis C est supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - Même raisonnement que pour l'article précédent. Je propose un amendement de suppression n° 933.
L'amendement n° 933 est adopté ; en conséquence, l'article 41 bis D est supprimé.
Article 41 bis
L'amendement rédactionnel n° 935 est adopté.
L'article 41 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 936 supprime une demande de rapport.
L'amendement n° 936 est adopté ; en conséquence, l'article 41 ter est supprimé.
Article additionnel après l'article 41 ter
M. François Pillet, rapporteur. - Le droit en vigueur satisfait l'amendement n° 746. Le Gouvernement pourra le confirmer. Avis de retrait.
L'amendement n° 746 devient sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Le droit actuel est clair, stable et connu des professionnels, de sorte que les précisions supplémentaires que prévoit cet article créeraient une insécurité juridique pour les personnes concernées. D'où mon amendement de suppression n° 945.
Les amendements nos 945 et 312 sont adoptés ; en conséquence, l'article 55 A est supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 946 précise les conditions dans lesquelles une entreprise en cessation totale temporaire d'activité peut être dispensée pour une durée ne pouvant excéder deux ans de tout ou partie de ses obligations comptables, selon qu'elle est une personne physique ou une société, dans le respect du droit européen en matière comptable. Deux conditions seraient requises : n'avoir aucun salarié et avoir procédé à une inscription auprès du registre du commerce et des sociétés. Cette seconde condition serait plus précise que ce que prévoit actuellement le projet de loi : avoir demandé une inscription au registre accompagnée d'une déclaration sur l'honneur de cessation temporaire d'activité. L'attestation sur l'honneur ne présente pas d'intérêt juridiquement, dans la mesure où une inscription frauduleuse peut déjà être sanctionnée.
L'amendement n° 946 est adopté.
L'article 55 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 55
M. François Pillet, rapporteur. - Le Gouvernement a annoncé le dépôt d'un amendement en séance pour corriger le dispositif d'information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise défini par la loi Hamon. Par conséquent, je propose le retrait des amendements similaires nos 289, 288, 291 et 290.
L'amendement n° 289 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos 288, 291 et 290.
Article 55 bis
L'amendement rédactionnel n° 947 est adopté.
L'article 55 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 948 précise et clarifie la rédaction de l'article 55 ter, qui instaure une insaisissabilité de droit de la résidence principale de tout entrepreneur individuel.
M. Alain Richard. - Qu'est-ce qui change par rapport au droit en vigueur ?
M. François Pillet, rapporteur. - Le droit en vigueur implique de passer par un acte notarié. En précisant la mesure, qui est bonne dans le principe, on évitera les contentieux.
M. Jean Desessard. - Votre amendement vise à ce que l'insaisissabilité ne s'applique qu'à la résidence principale ?
M. François Pillet, rapporteur. - Il vise à préciser la rédaction de l'article.
M. Philippe Dominati. - Ne vaut-il pas mieux en rester à la situation présente où le détenteur va chez un notaire pour rendre sa résidence principale insaisissable, tout en gardant la possibilité de la mettre en garantie ?
M. François Pillet, rapporteur. - Non. Il s'agit d'une protection automatique à laquelle l'entrepreneur peut renoncer. Un petit entrepreneur dont la résidence principale est automatiquement rendue insaisissable pourra tout à fait la porter en garantie pour obtenir un prêt de la banque.
M. Jacques Bigot. - Si le bien n'est pas déclaré insaisissable, n'importe quel créancier peut s'en saisir dans le cadre d'une liquidation. Dans le cas d'une hypothèque, la personne qui aura été en liquidation n'aura plus qu'à lever l'hypothèque et pourra continuer à rembourser le prêt sans forcément mettre le bien aux enchères. Dans notre pays, il manque une culture de la protection pour les entrepreneurs individuels.
Mme Nicole Bricq. - Cela ne pose-t-il pas problème d'étendre la mesure à la succession ?
M. François Pillet, rapporteur. - J'ai limité la durée de la succession à deux ans. À l'heure actuelle, c'est le décès qui met fin à la garantie.
L'amendement n° 948 est adopté.
L'article 55 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel avant l'article 56
M. François Pillet, rapporteur. - Cet amendement bouleverse le champ d'application des baux commerciaux qui est bien connu. La jurisprudence est précise. Il n'y a pas lieu de vouloir modifier tout cela. Je demande le retrait de l'amendement n° 300.
M. Pierre Médevielle. - Les clarifications qu'il apporte dans les conditions d'éligibilité des baux éviteraient pourtant certains contentieux.
M. François Pillet, rapporteur. - Je crains au contraire qu'il n'en crée d'autres.
L'amendement n° 300 est retiré.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 949 garantit la sécurité juridique des relations entre bailleur et locataire dans le régime des baux commerciaux, afin d'éviter les risques contentieux, lorsque la loi prévoit un formalisme substantiel à peine de nullité pour les actes les plus lourds de conséquence pour les parties. En effet, la logique de simplification et de réduction des coûts ne doit pas trop affaiblir la sécurité juridique pour les parties. Si la possibilité de recourir à la lettre recommandée avec demande d'avis de réception est une mesure utile de simplification pour la plupart des actes prévus dans le régime des baux commerciaux, il est préférable de conserver la signification par huissier pour les deux plus importants, qui doivent comporter un certain nombre d'énonciations à peine de nullité. Sont concernés le congé et le refus de renouvellement, domaines dans lesquels le contentieux vient souvent d'une erreur de forme.
M. Henri Tandonnet. - Le fait qu'un professionnel engage sa responsabilité est une avancée pour les bailleurs comme pour les locataires.
L'amendement n° 949 est adopté.
Les amendements nos 704 et 819 deviennent sans objet.
L'article 56 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 56
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 821 rend obligatoire le dépôt du règlement des jeux et concours auprès d'un huissier de justice. Il s'agirait d'une contrainte supplémentaire pour les entreprises, je n'y suis pas très favorable. D'autant qu'une telle mesure risquerait de créer des difficultés par rapport au droit européen qui considère les loteries comme licites en elles-mêmes. Le code de la consommation a été modifié en ce sens, l'an dernier. Le contrôle obligatoire du règlement par un huissier pourrait être interprété comme une entrave à la liberté commerciale du point de vue du droit européen. Il aurait été préférable de conserver notre législation nationale antérieure, mais elle était incompatible avec la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne. En matière de consommation, le droit français offre un niveau de protection élevé qui est en général affaibli par les exigences européennes. Retrait.
M. Henri Tandonnet. - Je retire mon amendement, même s'il était dans l'intérêt des consommateurs.
L'amendement n° 821 est retiré.
M. François Pillet, rapporteur. - Les huissiers de justice ne peuvent assurer l'exécution des décisions de justice que si un juge s'est prononcé ou si l'acte a été revêtu du caractère exécutoire. Sauf dans le cas très précis des chèques non payés, ils n'ont pas la compétence pour se conférer à eux-mêmes ce titre exécutoire. L'article 56 bis autorise l'huissier qui serait parvenu à un accord avec le débiteur, dans le cas d'une créance inférieure à 2 000 euros, à formaliser cet accord par écrit et à lui conférer un caractère exécutoire, ce qui peut sembler choquant, car cela revient à ce qu'une partie se confère à elle-même le titre exécutoire. Mon amendement n° 904 prévoit que l'huissier fait homologuer l'accord par un juge qui en fixera le caractère exécutoire. On évite ainsi les conflits d'intérêts. Les magistrats bondissent à la lecture de cet article ! Ma solution a aussi le mérite de simplifier la procédure d'injonction de payer. Et les huissiers sont ainsi à l'abri des critiques ! Notre droit de la consommation protège très bien les consommateurs ; or le présent article, à l'inverse, ne prend pas en compte le risque d'un accord non éclairé donné par le débiteur, par exemple la renonciation, par ignorance, à une prescription acquise. Cela me gêne.
Mme Nicole Bricq. - Vous auriez pu limiter la portée de la mesure aux entreprises sans l'étendre aux crédits à la consommation. La déjudiciarisation ne plaît pas aux magistrats, c'est une réaction humaine... Elle facilite néanmoins l'obtention rapide d'un titre exécutoire. C'est intéressant pour les entreprises, et le projet de loi a pour but de faciliter la vie des entreprises. Mais je comprends que vous souhaitiez ne pas fâcher les magistrats qui vous ont alerté.
M. Henri Tandonnet. - Je partage les craintes du rapporteur au sujet des conflits d'intérêts. Il est dangereux de ne prévoir aucune possibilité de recours pour saisir le magistrat. Faire homologuer l'accord par le juge évitera des dérives.
M. Jacques Bigot. - En cas d'accord entre deux parties, notre système juridique prévoit une clause exécutoire de plein droit. Mais c'est le notaire mandaté par le créancier qui convoque le débiteur, sans forcément l'alerter sur les garanties.
Dans une société coopérative HLM de ma commune, nous avons mis en place un système d'accords avec les locataires qui ont des loyers en retard, en confiant au tribunal le soin d'homologuer la transaction. Les magistrats souhaitent assurer le contrôle, mais l'engorgement des tribunaux les en empêche, la tâche revenant aux greffiers, à moins qu'il n'y ait automaticité. Si la procédure proposée ne garantit aucune protection, elle présente un intérêt pour les petites créances. Sans doute faudrait-il renforcer les contraintes sur les huissiers pour qu'ils respectent les contestations de la part des débiteurs. Mais cette nouvelle attribution ne me choque pas, les huissiers sont des officiers ministériels.
Mme Nicole Bricq. - Monsieur Tandonnet, les créances sont plafonnées à 1 000 ou à 2 000 euros.
M. François Pillet, rapporteur. - La faiblesse du taux fait que les petits débiteurs seront les plus concernés par cette procédure. Le mécanisme que je propose a l'avantage de la rapidité par rapport à l'injonction de payer, ce qui est intéressant pour l'accès au droit. Mon mécanisme est beaucoup plus rapide que l'injonction de payer, car le juge se borne à vérifier l'accord, ce qui est rapide.
M. Henri Tandonnet. - Dans ce genre de contentieux, les présidents des tribunaux de grande instance établissent des jurisprudences. Ils pourraient s'en servir pour éviter les dérives.
M. Jacques Bigot. - L'homologation par le juge ne donne aucune garantie au débiteur, sauf à exiger qu'elle soit contradictoire. Or, les magistrats n'auront pas le temps de le faire. Dans le cas des petites créances, l'huissier fait surtout des saisies sur salaires qui renvoient nécessairement devant le juge de l'exécution, laissant ainsi ouverte la possibilité d'une contestation. Je ne suis pas convaincu qu'on protège les débiteurs en changeant ce système.
Mme Nicole Bricq. - Cette question mérite un débat en séance.
L'amendement n° 904 est adopté.
Les amendements nos 217, 836, 213 et 691 deviennent sans objet.
L'article 56 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 950 vise à préciser l'habilitation relative à la transposition de la directive du 26 février 2014 sur l'attribution des contrats de concession. L'objectif est d'éviter, à la demande de l'AMF, toute sur-transposition et de garantir que ne seront pas remises en cause les règles applicables aux contrats qui n'entrent pas dans le champ de la directive, de façon à préserver, en particulier, le régime institué par la loi dite « Sapin ». Cet amendement ne sera pas contesté par le Gouvernement qui en a accepté l'esprit.
M. Alain Richard. - S'agit-il de l'Autorité des marchés financiers ou de l'Association des maires de France ?
M. François Pillet, rapporteur. - L'Association des maires de France.
L'amendement n° 950 est adopté.
L'amendement n° 635 devient sans objet.
L'article 57 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement de suppression n° 951 vise une disposition dérogatoire du droit commun des marchés publics concernant les départements d'outre-mer. Certaines entreprises attributaires d'un marché public, créancières d'un établissement public ne parviennent pas à s'acquitter de leurs obligations fiscales et sociales, faute d'être payées. L'article prévoit une attestation reconnaissant le caractère débiteur de la collectivité. Il est curieux de déséquilibrer ainsi l'égalité des candidatures à un marché public.
M. Alain Richard. - On craint sans doute des marchés infructueux faute d'entreprises remplissant les conditions pour poser leur candidature ! Légiférer, sur un tel sujet, n'est pas de bonne méthode.
L'amendement n° 951 est adopté.
L'article 57 bis est supprimé.
Article additionnel après l'article 57 bis
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 280 est satisfait dans l'état du droit actuel. Avis défavorable.
L'amendement n° 289 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - La publicité autour de la sanction est parfois le moyen le plus efficace de réparer le trouble causé par l'agissement illicite d'un professionnel à l'égard des consommateurs. Fixer un plafond au coût de cette publicité risque toutefois de priver d'effet cette publicité. Tel est notamment le cas lorsque l'effet de l'agissement illicite ne peut être annulé que par une publicité suffisante, par exemple une campagne d'affichage. En revanche, il est tout à fait judicieux d'avertir le professionnel, avant le prononcé de la sanction, de la nature et des modalités de publicité envisagées. Il pourra la contester lors de la procédure contradictoire et en obtenir, le cas échéant, l'aménagement. Tel est l'objet de l'amendement n° 905.
L'amendement n° 905 est adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - La suppression de l'amende créée par la loi « Alur » pour sanctionner le non-respect par les professionnels de l'immobilier de leur obligation d'information sur leurs honoraires ne se justifie pas. Le risque d'inconstitutionnalité n'est pas fondé. Il repose sur la crainte d'un cumul entre les sanctions administratives et les sanctions pénales. Or, le code de la consommation prévoit ce cas, puisqu'il dispose, conformément à la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel que « lorsqu'une amende administrative est susceptible de se cumuler avec une amende pénale infligée à raison des mêmes faits à l'auteur du manquement, le montant global des amendes prononcées ne dépasse pas le maximum légal le plus élevé ». L'amendement n° 906 rétablit l'amende.
M. Jean Desessard. - Il s'agit de rétablir la mesure qui figurait dans la loi « Alur » ?
M. François Pillet, rapporteur. - Oui.
L'amendement n° 906 est adopté.
Les amendements de suppression nos 140 et 361 deviennent sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Les amendements identiques nos 362 et 786 tendent à rétablir la possibilité, pour les consommateurs, d'utiliser leur droit de rétractation dès la conclusion du contrat en matière de vente à distance, avant que le bien soit livré. Cette mesure est tout à fait opportune. Avis favorable.
Les amendements identiques nos 362 et 786 sont adoptés.
L'article 58 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 952 vise à ajuster les conditions d'insertion dans le code de commerce des règles de cumul des mandats sociaux applicables aux dirigeants des sociétés cotées, telles qu'elles figurent dans le code de gouvernement d'entreprise Afep-Medef. Chacun devrait être satisfait.
Mme Nicole Bricq. - Vous maintenez les trois mandats proposés par l'Assemblée nationale, plutôt que cinq ?
M. François Pillet, rapporteur. - Oui.
M. Alain Richard. - En quoi modifiez-vous le texte de l'Assemblée nationale ?
M. François Pillet, rapporteur. - J'en clarifie la rédaction, en précisant que l'on exclut les sociétés d'investissement, car on ne peut pas leur imposer cette règle puisqu'elles investissent par nature dans plusieurs sociétés.
Mme Nicole Bricq. - Le but de la mesure était de pouvoir prendre des participations.
M. François Pillet, rapporteur. - Cela sera d'autant plus facile grâce à mon amendement.
M. Philippe Dominati. - Avez-vous une idée de ce que font les autres pays européens sur ce sujet ?
M. François Pillet, rapporteur. - Non. La disposition figure dans le code de l'Afep-Medef, ce qui m'a incité à considérer qu'il n'y avait pas de crispation.
L'amendement n° 952 est adopté.
L'article 58 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 953 supprime l'article, introduit à l'Assemblée nationale par amendement du Gouvernement, et qui consiste à revenir sur un accord intervenu en commission mixte paritaire, le 25 novembre 2014, sur la loi du 20 décembre 2014.
M. Jean Desessard. - Quel est l'enjeu ?
M. François Pillet, rapporteur. - Le transfert des sièges sociaux des SARL.
Mme Nicole Bricq. - Je reste partagée sur ce point. Il est classique qu'un Gouvernement revienne sur une décision de CMP à quelques mois de distance. Cependant, la CMP est normalement un moment où le Parlement est à l'abri de l'exécutif. C'est de moins en moins vrai.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Le Gouvernement aurait pu déposer un amendement sur les conclusions de la CMP. Il ne l'a pas souhaité, par égard pour le Parlement.
M. Jean Desessard. - Quelle différence y a-t-il entre l'amendement de la CMP et ce que propose le Gouvernement ?
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement de la CMP autorise le gérant d'une SARL à décider seul du déplacement du siège social de son entreprise au sein du département. L'amendement du Gouvernement autorise ce déplacement sur l'ensemble du territoire.
M. Jean Desessard. - La proposition du Gouvernement est plus souple.
M. François Pillet. - Elle donne le pouvoir au gérant sans l'accord des associés. Soyez assurés que j'ai la même attitude à l'égard de tout Gouvernement qui ne respecte pas le travail parlementaire.
Les amendements identiques nos 953 et 636 sont adoptés. L'article 58 bis est en conséquence supprimé.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 954 supprime une disposition introduite par l'Assemblée nationale et contrevenant à l'objectif de simplification, puisqu'elle instaure une contrainte supplémentaire pour certaines sociétés cotées alors que le droit en vigueur suffit : le code de commerce prévoit déjà que le président du conseil d'administration, dans les sociétés cotées, rend compte dans un rapport aux actionnaires « de la composition du conseil et de l'application du principe de représentation équilibrée des femmes et des hommes en son sein, des conditions de préparation et d'organisation des travaux du conseil », etc. Il serait donc redondant de prévoir que ce rapport du président, dans les sociétés cotées d'une certaine taille, comporte « des informations sur la diversité de la composition du conseil d'administration ». Cette formulation est du reste moins précise.
L'amendement n° 954 est adopté.
L'article 58 ter est supprimé.
Article additionnel après l'article 58 ter
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 141 prévoit que les conseils d'administration des sociétés anonymes sont informés chaque année des risques liés à la fraude fiscale, qui est une infraction, et à l'optimisation fiscale, qui ne l'est pas. L'intérêt et la portée normative de cet amendement sont incertains. Avis défavorable. Qui assurerait cette information ?
M. Philippe Dallier. - Le spécialiste de la fraude !
M. Alain Richard. - Encore un degré supplémentaire d'infantilisation...
L'amendement n° 141 est retiré.
M. François Pillet, rapporteur. - Une disposition a été introduite par l'Assemblée nationale pour permettre aux micro-entreprises de demander que l'intégralité de leur compte annuel ne soit pas publiée. Cette faculté ne serait pas ouverte aux établissements de crédit ni aux entreprises d'assurance. Difficile pour les greffiers de vérifier s'il n'y a pas un lien pré-contractuel ! Le gestionnaire d'une entreprise de crédit se passera bien de demander au greffier les informations qu'il n'a pas et les demandera directement au demandeur de crédit, qui, s'il ne les fournit pas, n'obtiendra pas son prêt... Mon amendement n° 955 clarifie la rédaction.
M. Alain Richard. - Quel est l'objectif de cette disposition ? S'agit-il de permettre à des acteurs économiques de ne pas publier leurs comptes ?
M. François Pillet, rapporteur. - C'est le droit européen.
M. Alain Richard. - Le droit européen autorise à dispenser de publier ses comptes. Pourquoi en dispenserions-nous quiconque ?
M. François Pillet, rapporteur. - La question de la publicité légale auprès des tribunaux de commerce est débattue depuis longtemps. L'Assemblée nationale a pris position.
M. Alain Richard. - Cela demeure obscur. Pourquoi rendre les comptes clandestins ?
M. François Pillet, rapporteur. - Ils ne le seront pas pour ceux qui sont en relations contractuelles avec l'entreprise.
M. Jean Desessard. - Je voterai contre cet amendement, car je souhaite supprimer cet article, par l'amendement n° 142 : je suis pour la transparence.
Mme Annie David. - Même avis. Nous présentons le n° 637.
M. François Pillet, rapporteur. - Le Gouvernement a déjà autorisé par ordonnance certaines micro-entreprises à ne pas publier leurs comptes. Il ne s'agit que d'étendre cette mesure. Vous pourrez en débattre avec le ministre !
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Notre rapporteur n'est pas radical...
M. Philippe Dominati. - Beaucoup d'entreprises ne déposent pas leurs comptes, par simple commodité, et parce que la sanction financière est faible.
L'amendement n° 955 est adopté. Les amendements nos 142, 637 et 197 deviennent sans objet.
L'article 58 quater est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 58 quater
M. François Pillet, rapporteur. - La rédaction de l'amendement n° 827 laisse à désirer, mais il procède d'une idée intéressante. Il s'agit d'instaurer, à l'image du rescrit fiscal, un rescrit « innovation », pour les activités économiques innovantes qui ne font pas encore l'objet d'une réglementation complète et adaptée. Retrait, ou avis défavorable.
L'amendement n° 827 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 958 apporte des clarifications rédactionnelles reprenant essentiellement les recommandations du code de gouvernement d'entreprise Afep-Medef.
Mme Nicole Bricq. - Il n'est pas entièrement rédactionnel : son « C.- » prévoit un montant supérieur à 3 %...
M. François Pillet, rapporteur. - Ce n'est pas une novation, puisque le texte dit déjà : « Le quantum de l'accroissement annuel des droits conditionnels mentionnés à l'avant-dernier alinéa du présent article ne peut excéder 3 % de la rémunération annuelle servant de référence au calcul de la rente versée dans le cadre de ces régimes ».
L'amendement rédactionnel n° 958 est adopté. L'amendement n° 638 devient sans objet.
M. François Pillet, rapporteur. - Il existe une législation précise sur la rémunération des dirigeants mandataires sociaux des sociétés anonymes, qui fait intervenir également les actionnaires. Avis défavorable à l'amendement n° 639.
Mme Annie David. - Nous aurons ce débat en séance.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Elle sera animée ! Tant mieux.
L'amendement n° 639 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 640, déjà satisfait par les obligations actuelles d'information sur la rémunération des dirigeants mandataires sociaux : voyez les articles L. 225-40, L. 225-42-1 et L. 225-102-1 du code de commerce.
Mme Annie David. - Nous le retirons, ainsi que l'amendement n° 641.
Les amendements nos 640 et 641 sont retirés.
M. François Pillet, rapporteur. - Le droit commun de la responsabilité permet déjà de mettre en cause la responsabilité des dirigeants mandataires sociaux au titre de leurs décisions : l'article 1382 du code civil, pour les tiers, et l'article 1134 pour les personnes liées contractuellement. La jurisprudence est abondante, et le droit boursier connaît aussi ce type d'action en responsabilité. Avis défavorable à l'amendement n° 642, donc : les textes rédigés à une époque où la loi était moins bavarde suffisent encore.
Mme Annie David. - Il me semble que notre amendement les complète, mais j'accepte de le retirer.
M. François Pillet, rapporteur. - Il porte sur un point juridique bien connu : je ne crois pas qu'il apporte quoi que ce soit au droit existant.
L'amendement n° 642 est retiré.
M. François Pillet, rapporteur. - De même, l'amendement n° 643 instaure un principe qui existe déjà en droit des sociétés : un mandataire social ne peut conclure un contrat de travail avec la société sauf à en être salarié avant sa nomination au conseil d'administration. Une seule entorse a été prévue, pour les PME, par la dernière loi Warsmann. Avis défavorable - sauf à vouloir remettre en cause cette entorse !
Mme Annie David. - Je maintiens cet amendement.
M. François Pillet, rapporteur. - J'y réfléchirai avant la séance.
L'amendement n° 643 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 624, qui instaure un principe existant déjà dans le droit des sociétés.
L'amendement n° 644 n'est pas adopté.
L'article 64 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 64 bis
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 163 intègre dans le code de commerce la notion jurisprudentielle d'abus de majorité. Intégrer cette notion dans la loi ne serait guère utile, car il faudra de toute façon saisir le juge pour faire constater cet abus. De plus, l'amendement ne vise que les sociétés non cotées et ne reprend pas la notion d'abus de minorité en cas de détention d'une minorité de blocage, alors qu'elle existe aussi. Il risque donc de perturber la jurisprudence. Dans cette rédaction, les actionnaires qui commettraient un abus de majorité devraient racheter les titres des autres actionnaires dans un délai donné, si leur responsabilité n'est pas recherchée au titre de l'abus de majorité, ce qui suppose que le juge ne serait pas saisi. Un tel dispositif ne peut pas fonctionner puisque seul un juge pourrait, le cas échéant, constater l'abus. Sur le fond, il s'agit de résoudre le problème - qu'un cas particulier a pu mettre en lumière - du financement insuffisant des PME françaises. Je doute que des artifices de droit des sociétés, a fortiori s'ils sont inopérants, puissent avoir cet effet. Retrait, ou avis défavorable.
L'amendement n° 163 n'est pas adopté.
M. François Pillet, rapporteur. - Même avis sur les amendements nos 694 et 695.
Les amendements nos 694 et 695 ne sont pas adoptés.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement n° 146 n'a avec le texte qu'un lien ténu. Je rappelle en outre que l'optimisation fiscale est légale, quand la fraude fiscale est un délit. Retrait, ou avis défavorable.
L'amendement n° 146 est retiré.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Merci à notre rapporteur pour sa plaidoirie sur cette vaste matière.
M. François Pillet, rapporteur. - Mon objectif a toujours été que le Sénat apporte une valeur ajoutée au texte, notamment en désamorçant, par la recherche du consensus, des inquiétudes légitimes qui auraient pu limiter sa portée. J'ai travaillé dans la perspective d'une commission mixte paritaire intéressante et constructive.
M. Alain Richard. - Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre...
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Nous partageons votre ambition.
Mme Nicole Bricq. - Merci au rapporteur, qui a évité autant que possible les amendements de suppression. Souhaitons que cette bonne atmosphère perdure en séance...
M. Jean-Pierre Sueur. - Je n'en doute pas, connaissant M. Pillet.
M. François Pillet, rapporteur. - Je vous répondrai par une boutade. Je suis, par mes ancêtres, Berrichon. Lorsqu'il constituait ses régiments, Napoléon préconisait à ses généraux de ne pas mettre de Berrichons à l'avant, car ils n'avancent jamais, mais de les mettre à l'arrière, car ils ne reculent pas !
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Je souhaite que notre travail inspire les débats en séance.
La réunion est levée à 12 h 25
Présidence de M. Vincent Capo-Canellas, président -
La réunion est ouverte à 15 h 30
Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission spéciale
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Nous en venons à présent aux articles relatifs à la sphère sociale, dont Mme Catherine Deroche est rapporteure.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Reprenant la plupart des propositions du rapport du Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (Copiesas) du 26 novembre 2014, le projet de loi poursuit quatre objectifs principaux.
Le premier objectif vise à simplifier et à harmoniser les règles relatives à la participation, à l'intéressement et aux plans d'épargne salariaux. Les règles de conclusion d'un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) seront alignées sur celles applicables aux accords de participation ; tous les salariés disposant de ce plan pourront lui transférer l'équivalent monétaire de dix jours de congés non pris, qu'ils bénéficient ou non d'un compte épargne-temps.
Ensuite, le texte encourage le développement des dispositifs d'épargne salariale. Le forfait social passera de 20 % à 8 % pendant six ans dans les entreprises de moins de cinquante salariés mettant en place volontairement et pour la première fois un accord de participation ou d'intéressement. Les conditions d'attribution des actions gratuites sont assouplies, tandis que leur cadre fiscal et social est allégé. Afin de renforcer l'attractivité du Perco, le texte supprime la contribution sur les abondements des employeurs dépassant 2 300 euros par an et par bénéficiaire, et autorise des versements unilatéraux périodiques de l'entreprise. Les branches professionnelles devront en outre négocier avant fin 2017 des accords de participation, qui seront directement applicables dans les entreprises qui le souhaitent.
Le troisième objectif concerne le renforcement de la transparence et de l'information sur ces dispositifs. Le Copiesas devra désormais être saisi pour avis de tout projet de loi ou d'ordonnance relatif au déblocage de l'épargne salariale. Le livret d'épargne salariale sera recentré sur les dispositifs effectivement mis en place dans l'entreprise, et tout salarié qui quittera son entreprise sera systématiquement informé des frais financiers qui s'appliquent sur ses comptes d'épargne salariale.
Enfin, le texte vise à mieux orienter l'épargne salariale vers le financement de l'économie. C'est la philosophie du nouveau Perco, ou « Perco plus », qui devra comporter au moins 7 % de titres dans des fonds qui financent le développement des PME et des entreprises de taille intermédiaire. En contrepartie, le taux du forfait social est abaissé à 16 %.
Ni les membres du Copiesas ni les partenaires sociaux ne souhaitent réformer de fond en comble l'épargne salariale, après des années d'instabilité législative. Le principal point d'achoppement avec le Gouvernement concerne le forfait social, qui s'applique à tous les dispositifs d'épargne salariale, et dont le taux est passé progressivement de 2 % lors de sa création en 2009 à 8 % au 1er janvier 2012, puis brutalement à 20 % depuis le 1er août de la même année. Le rendement de cette contribution est considérable : 4,6 milliards d'euros en 2013, dont 80 % bénéficient à la Caisse nationale d'assurance vieillesse, le reliquat étant versé au Fonds de solidarité vieillesse. Le ministre de l'économie, lors de son audition devant notre commission, a estimé que le coût de la présente réforme oscillerait entre 60 et 80 millions d'euros par an, essentiellement en raison des baisses ciblées du forfait social. Le meilleur moyen d'encourager l'épargne salariale serait d'abaisser son taux, mais les conséquences pour les finances publiques seraient majeures.
Conservant les grands équilibres de la réforme, et inscrits dans la continuité des propositions du Copiesas, mes amendements visent essentiellement à développer l'épargne salariale dans les entreprises employant moins de cinquante salariés, pour un coût acceptable pour nos finances.
D'autres mesures sont également destinées à améliorer le financement des entreprises, en particulier des PME, comme la création de la société de libre partenariat, un nouveau véhicule de capital risque destiné à attirer les investisseurs institutionnels étrangers. Il faut également relever que l'article 35 bis assouplit à la marge les réductions d'impôt ISF-PME et « Madelin » en réduisant de dix ans à sept ans de la condition de non-remboursement des apports.
J'observe que ces dispositifs fiscaux, dont l'objet de favoriser le renforcement des capitaux propres des PME, ont suscité le dépôt d'un certain nombre d'amendements sur lesquels la commission se prononcera tout à l'heure. Je crois qu'il y a effectivement des mesures à prendre pour améliorer ces dispositifs qui offrent un levier puissant pour le développement des jeunes PME en croissance. Cependant, pour établir l'avis que je vous proposerai sur ces amendements, j'ai souhaité retenir trois critères.
Premièrement, les conséquences budgétaires : le Gouvernement n'a malheureusement pas dégagé dans la dernière loi de finances les économies qui auraient rendu possibles des gestes fiscaux d'envergure en faveur de la relance de l'activité économique et du développement des entreprises. Le texte actuel n'est pas le véhicule approprié pour y remédier, dans la mesure où il ne peut conjuguer réduction des dépenses et réduction des impôts.
Deuxièmement, les conséquences économiques : il importe de conserver l'attractivité des dispositifs destinés à encourager la prise de risque que représente l'investissement dans de jeunes PME. Exonérer tous les investissements sans distinguer ceux orientés vers les PME assècherait une source de financement importante pour les PME, au bénéfice des grandes entreprises qui se financent actuellement à bon compte.
Troisièmement, la dimension européenne : le dispositif ISF-PME entre dans le champ des aides d'État dont la Commission européenne vérifie la conformité au droit européen. Or le dispositif français doit être refondu, car il est insuffisamment ciblé sur les jeunes PME en croissance. La France est très en retard sur ce point et des discussions sont actuellement en cours avec Bruxelles. Nous aurons l'occasion, sans doute dès la prochaine loi de finances initiale, d'engager un débat global sur la refonte du dispositif « ISF-PME ».
Compte tenu de ces contraintes, je proposerai dans la plupart des cas aux auteurs d'amendements de se rallier à ceux que j'ai déposés sur ces deux dispositifs fiscaux.
Mme Nicole Bricq. - Distinguons bien l'actionnariat salarié de l'épargne salariale. L'enjeu est de renforcer l'attractivité de la France pour les entreprises innovantes qui ont du mal à grandir, et, pour cela, de récompenser le risque - que l'on n'aime guère en France. Donnons leur chance aux entreprises qui peuvent devenir moyennes puis grandes, ce que nous faisons moins bien que des pays voisins.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - J'applaudis ce discours.
Mme Nicole Bricq. - Je l'ai toujours tenu !
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Lorsque les actions détenues par le personnel de la société représentent plus de 3 % de son capital social, un ou plusieurs administrateurs sont élus par l'assemblée générale des actionnaires sur leur proposition. Les nouvelles modalités de calcul adoptées à l'Assemblée nationale, conçues pour prendre en compte les actions attribuées gratuitement aux salariés et supprimer la condition relative à la période d'incessibilité, rendent difficile l'identification des actions détenues par le personnel salarié puisque les actions au porteur seraient désormais incluses dans la part des titres de l'entreprise détenus par les salariés. Or connaître l'identité de l'actionnaire nécessiterait de recourir à une procédure particulièrement lourde pour arriver jusqu'à l'identité du porteur. C'est pour cette raison qu'une telle modification a toujours été écartée depuis 1994. Par ailleurs, compte tenu des différents articles visés, la rédaction de l'Assemblée nationale ne permettrait pas de prendre en compte les actions attribuées gratuitement aux salariés et ferait perdre à certains salariés leur droit de participer à la désignation d'un administrateur.
En conséquence, mon amendement n° 929 propose de ne prendre en compte que les actions détenues au nominatif, d'inclure effectivement les actions gratuites en faisant référence à l'article L. 225-197-1 du code de commerce et de permettre aux salariés ayant obtenu des actions au titre d'anciens dispositifs de participer à la désignation d'un administrateur en continuant de les inclure dans les modalités du calcul de la part des titres de l'entreprise détenus par les salariés.
L'amendement n° 929 est adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 932 restreint aux PME le champ de l'aménagement proposé relatif à la période d'acquisition et à la durée de conservation des actions gratuites, dont la durée cumulée minimale serait abaissée de quatre à deux ans. La réduction non ciblée prévue par le présent article est contraire aux objectifs de fidélisation des salariés et de stabilisation du capital social des entreprises. En Allemagne et au Royaume-Uni, la durée minimale de détention d'actions gratuites est respectivement de sept et cinq ans pour bénéficier d'allègements fiscaux et sociaux.
L'aménagement du Gouvernement ne peut se justifier que pour certaines jeunes entreprises soutenues par des business angels dont l'horizon d'investissement est nécessairement limité, non pour les entreprises matures et les filières industrielles classiques.
Mme Nicole Bricq. - Nous tenons beaucoup à ce dispositif - qui peut certes être corrigé... La portée de l'amendement n'a pas été bien évaluée ; nous le ferons d'ici la séance. À ma connaissance, le Royaume-Uni n'a pas de durée conservatoire.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Cet amendement s'inspire notamment des recommandations de l'Autorité des marchés financiers (AMF) qui, loin de suggérer une réduction de la période d'acquisition et de la durée de conservation, demande une application exigeante de ces obligations.
L'amendement n° 932 est adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 622 vise à supprimer l'article 34, qui propose notamment d'assouplir le cadre fiscal et social applicable aux actions gratuites. J'émets un avis défavorable sur cet amendement, qui revient à considérer que le salaire constitue le seul mode acceptable de rémunération du travail.
L'amendement n° 622 n'est pas adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 596 exonère de la contribution patronale spécifique les entreprises de taille intermédiaire qui n'ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis trois ans. Or celles-ci bénéficient déjà de la suppression de la cotisation salariale spécifique, de la baisse du taux de la contribution patronale spécifique ainsi que de la possibilité de profiter de l'abattement pour durée de détention lors de la taxation du gain d'acquisition. Mieux cibler les PME se justifie par la réticence particulière des investisseurs à leur égard. Élargir cette incitation aux ETI reviendrait à nier les difficultés spécifiques des PME en matière de financement. Le coût de la mesure proposée, évalué par Bercy à 200 millions d'euros, est trop important compte tenu de la situation de nos finances publiques. Avis défavorable.
Mme Nicole Bricq. - Vous avez dit vouloir faire des économies...
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je veux surtout aider les entreprises : cela exige en effet de faire des économies.
Mme Élisabeth Lamure. - Toutes les dispositions susceptibles de faire grandir les PME sont les bienvenues, car nous avons des lacunes en la matière. Distinguer les grosses PME et les petites ETI n'est guère pertinent. Je retire l'amendement, nous en reparlerons en séance.
M. Jean-Marc Gabouty. - L'État ne perd rien dans les allègements de charges pour les PME et les ETI puisque, ne pratiquant pas l'optimisation fiscale, ces entreprises s'acquittent des 33 % d'impôt sur les sociétés...
L'amendement n° 596 est retiré.
L'article 34 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 34
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 600 autorise l'assureur à régler les sommes dues au titre des contrats d'assurance sur la vie investis pour plus de 125 000 euros en unités de compte, à hauteur de 10 % maximum, par la remise de parts de fonds communs de placement à risques ou de fonds contractuels spécialisés investies en titres de PME ou d'ETI non cotées.
Il pose plusieurs problèmes en termes de protection de l'assuré et de ses bénéficiaires : les parts de FCPR sont peu liquides et la durée de vie de ces fonds est en général d'une dizaine d'années ; le capital n'est pas garanti et le risque de perte est très important ; c'est l'assureur et non l'assuré qui choisit les fonds dont les parts sont remises en règlement des sommes dues et le dispositif proposé n'encadre pas l'âge des fonds ni leur durée de vie résiduelle ; la mesure proposée vise également les versements au bénéficiaire du contrat d'assurance sur la vie ; les fonds contractuels spécialisés ne constituent pas une catégorie définie par le code monétaire et financier, qui ne mentionne que les fonds professionnels spécialisés, anciens fonds contractuels réservés à des clients professionnels. Retrait ?
Mme Élisabeth Lamure. - Vous privilégiez donc la protection des petits épargnants ?
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Tous, pas uniquement les petits.
Mme Élisabeth Lamure. - Le minimum requis est en l'espèce de 125 000 euros... Cela concerne donc les épargnants avisés. De plus, cette épargne tend à fuir vers le Luxembourg, où le dispositif est plus attractif qu'en France.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Certes, 125 000 euros, ce n'est pas négligeable. L'Autorité des marchés financiers (AMF) retient pourtant le seuil de 500 000 euros pour les clients professionnels. Le succès du dispositif d'assurance-vie luxembourgeois repose d'abord sur la possibilité pour l'assureur de régler les sommes dues sous forme de titres non cotés, mais aussi sur une plus grande souplesse dans la gestion des actifs. Ceux-ci peuvent tout à fait être investis dans des titres non cotés ; certains contrats sont d'ailleurs dans l'obligation de le faire pour offrir un régime fiscal favorable, comme le contrat vie-génération. De même, le contrat euro-croissance a été conçu pour limiter la contrainte de liquidité de l'assureur et donc contribuer plus largement au financement de l'économie. Enfin la sortie en titres n'a d'intérêt pour le souscripteur que s'il y a eu un apport en titres, ce qui est interdit en France en raison du risque d'abus fiscal.
Mme Élisabeth Lamure. - Il serait regrettable que ce qui fait le succès du dispositif au Luxembourg ne le fasse pas en France... Nous aurons ce débat en séance.
L'amendement n° 600 est retiré.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - L'amendement n° 187 rectifié est identique au précédent.
M. Philippe Adnot. - Un mot de précision : le remboursement d'une assurance-vie, qu'elle ait été investie en euros ou dans des actifs plus risqués, se fait toujours sous forme financière. Résultat : l'argent ne reste pas dans les entreprises. Rendre possible la sortie d'une assurance-vie sous forme de titres pérenniserait le financement des entreprises. Je ne comprends pas que l'on ne soit pas favorable à une telle proposition.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'assuré ne serait pas forcément remboursé par la vente des titres par l'assureur.
M. Philippe Adnot. - Si, qu'il le soit en euros ou en unités de compte importe peu. Je vous demande de bien réfléchir au sujet...
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Mais les fonds sont mutualisés.
M. Philippe Adnot. - Le choix de sortir du dispositif en argent n'est pas bon pour les entreprises... Votons, afin de voir qui est favorable à leur financement à long terme !
M. Jean-Claude Lenoir. - M. Adnot m'avait déjà convaincu de signer cet amendement sur un précédent texte. L'on nous disait alors qu'il était trop tôt, qu'il fallait réfléchir... Il y a, à présent, matière à se prononcer.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Reste que le bénéficiaire conserve des titres dont il ne voulait pas forcément...
M. Philippe Adnot. - À hauteur de 10 % de son portefeuille !
Mme Élisabeth Lamure. - Si nous votons, je resterais sur ma position, bien que j'aie retiré le précédent amendement au bénéfice de la discussion promise en séance...
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Fractionner l'assurance-vie peut avoir des effets pervers.
L'amendement n° 187 rectifié est adopté ; l'article additionnel est inséré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 186 modifie le mode de calcul du pourcentage maximal du capital social pouvant être attribué gratuitement, en ne prenant en compte que les actions n'ayant pas fait l'objet d'une attribution définitive. Le droit en vigueur porte déjà le pourcentage maximal du capital social pouvant être attribué gratuitement de 10 % à 30 % lorsque l'attribution bénéficie à tous les salariés. L'adoption de cet amendement, qui vise en réalité à rendre inopérant le mécanisme de plafonnement, conduirait à surexposer les salariés au risque de faillite de leur entreprise. Retrait ?
M. Philippe Adnot. - Ou l'on considère que l'intéressement est utile et dynamise nos entreprises, ou bien il n'a plus lieu d'être une fois le plafond atteint. Dans la première hypothèse, il faut maintenir la dynamique...
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Le plafond, qui peut être porté à 30 % lorsque l'attribution bénéficie à l'ensemble du personnel salarié, est déjà significatif. Si l'entreprise fonctionne mal, le risque est non négligeable.
Mme Annie David. - Je suivrai la rapporteure sur ce point. Le plafond de 30 % est bien suffisant.
M. Philippe Adnot. - Vous l'avez dit, le plafond n'est à 30 % que lorsque tous les salariés en bénéficient, sinon, il reste à 10 %. Mon amendement ne fait que surmonter l'obstacle à l'intéressement pour les entreprises en croissance. Je vous demande à nouveau de bien expertiser la chose avant de vous prononcer...
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Vous proposez, dans les faits, de rendre inopérant le mécanisme de plafonnement...
M. Philippe Adnot. - Non, resterait le plafond à 10 %, mais l'on continuerait à intéresser les salariés. J'accepte de retirer l'amendement pour le retravailler d'ici à la séance publique.
L'amendement n° 186 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 188 exonère d'impôt sur le revenu les plus-values réalisées à l'occasion de cessions de valeurs mobilières dès lors que le produit de ces cessions est intégralement versé sur un PEA-PME. Je partage le souci de ses auteurs de favoriser le financement des PME, mais ne pas conditionner l'exonération à une durée minimale d'investissement dans le PEA-PME expose à des abus. Le dispositif donne en réalité la possibilité de réaliser un aller-retour : vente des titres suivie d'un versement sur un PEA-PME avant le 31 décembre 2015, puis retrait des fonds versés.
Mme Nicole Bricq. - Cet amendement part d'un bon sentiment : activer le PEA-PME, créé l'année dernière, qui n'a pas connu un franc succès. Sauf que l'exonération totale des plus-values de cession va trop loin ! Ce n'est pas l'esprit du dispositif original. Nous voterons contre.
M. Philippe Adnot. - Le PEA-PME est une bonne mesure, mais elle n'a pas encore porté ses fruits : la somme moyenne investie est de 3 000 euros au lieu des 75 000 prévus, et les investisseurs rechignent à sortir du plan par crainte de l'imposition sur les plus-values. Nous proposons que pour la seule année 2015, afin de redynamiser l'économie, les détenteurs de ces plans puissent réaliser leur plus-value à condition d'investir dans le PEA-PME. L'État n'y perd rien : la plus-value resterait imposée à la sortie du plan.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Reste que le dispositif est gagé...
M. Philippe Adnot. - Si l'argent sort ! Cet amendement redonne de l'élan à notre économie.
Mme Élisabeth Lamure. - Je suis favorable à tout nouveau dispositif susceptible de dynamiser le financement des PME, à condition que les règles de durée soient bien observées.
Mme Annie David. - Comment en être sûr ?
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je partage l'objectif de M. Adnot, mais sa rédaction laisse craindre des abus.
L'amendement n° 188 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 325 limite aux dirigeants personnes physiques l'interdiction, issue de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, de détenir directement ou indirectement les obligations émises par leur association. Avis favorable : les personnes morales administratrices d'une association pourront en soutenir financièrement les projets.
L'amendement n° 325 est adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Avis favorable au n° 554, qui ramène de six à quatre mois le délai dans lequel l'administration doit se prononcer sur une demande de rescrit-valeur. Grâce à ce dispositif, avant de donner les titres d'une société, le dirigeant d'entreprise soumet à l'administration fiscale la valeur vénale pour laquelle il les estime ; l'administration dispose alors d'un délai de six mois pour se prononcer ; en cas d'acceptation, l'assiette taxable ne peut être remise en cause.
L'amendement n° 554 est adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je ne suis pas opposée sur le fond à l'amendement n° 555, qui simplifie les obligations déclaratives du « Dutreil-transmission », en remplaçant l'obligation déclarative annuelle à la charge de la société par une déclaration à l'expiration de l'engagement collectif de conservation. Il mériterait néanmoins d'être amélioré techniquement d'ici à la séance publique. Le rapport de Thierry Mandon sur la simplification de l'environnement réglementaire et fiscal des entreprises avait proposé de substituer l'obligation déclarative par une obligation de transmission à première demande tant par la société au cours de l'engagement collectif que par les bénéficiaires de la transmission au cours de la période de l'engagement individuel.
L'amendement n° 555 n'est pas adopté.
L'article 34 bis est adopté sans modification, ainsi que l'article 35.
Articles additionnels après l'article 35
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 707, qui exonère d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales les rémunérations versées au titre des heures supplémentaires, entraînerait une perte de recettes d'un milliard d'euros en 2014, à laquelle il faudrait ajouter plus de 1,5 milliard d'euros de pertes de cotisations sociales. Cette question exigerait un débat général sur la durée légale du temps de travail.
Mme Élisabeth Lamure. - C'est vrai, supprimer le dispositif a été une erreur. Le bulletin de paie de 8 millions de salariés s'en est ressenti. Cela mériterait un débat économique approfondi.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Les salariés ont été les premiers pénalisés, c'est certain. Nous en reparlerons en séance.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Nous avons déjà voté sur ce point dans la loi de finances rectificative pour 2014, et plusieurs fois depuis. Vous savez la ligne directrice retenue par notre commission : ne pas rouvrir tous les sujets à ce stade.
M. Jean-Marc Gabouty. - Le pouvoir d'achat que le dispositif supprime apportait incontestablement aux salariés était aléatoire, les entreprises décidant des heures supplémentaires en fonction du niveau d'activité et des conventions collectives, d'où des effets indésirables en termes de productivité et de performance.
L'amendement n° 707 n'est pas adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 708 demande un rapport : avis défavorable à défaut d'un retrait.
M. Philippe Dallier. - Les auteurs de cet amendement semblent regretter que le taux de TVA applicable au e-commerce soit celui du pays de l'acheteur, et non celui du pays du vendeur. Voilà pourtant un moment que nous nous inquiétons de l'évaporation de la base de TVA...
M. Philippe Adnot. - Bien sûr !
L'amendement n° 708 n'est pas adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'article 35 bis A institue une niche fiscale spécifique afin d'exonérer les incubateurs, les pépinières d'entreprises ou encore les hôtels d'entreprises de deux taxes franciliennes (taxe annuelle sur les locaux et redevance pour création de bureaux). Outre que l'on peut douter de l'effet désincitatif de ces deux taxes sur l'installation d'incubateurs, la rédaction proposée ne couvre pas l'objectif visé et pourrait conduire à des abus, sachant qu'il n'existe pas de définition juridique claire des incubateurs d'entreprises, d'où mon amendement de suppression n° 922.
Mme Nicole Bricq. - Cela renforce l'attractivité de la région dans la bataille avec Londres. La TLE est une spécificité francilienne. J'en conviens, la rédaction n'est pas satisfaisante. Je souhaite que le Gouvernement procède à un ajustement d'ici la séance.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Voter l'amendement évitera un conforme.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'idée est d'obtenir une rédaction correcte.
M. Philippe Dallier. - Quel est son coût ?
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je l'ignore. Est-ce vraiment désincitatif ?
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Cela mérite d'être retravaillé...
Les amendements identiques nos 922 et 623 sont adoptés ; en conséquence l'article 35 bis A est supprimé.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 924 supprime, conformément à notre jurisprudence, une demande de rapport sur le calcul de la TVA sur les services en ligne.
L'amendement n° 924 est adopté ; en conséquence, l'article 35 bis B est supprimé.
Articles additionnels après l'article 35 bis B
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 147 instaure une obligation de déclaration préalable des schémas d'optimisation fiscale - qui ne sont pas illégaux - pesant sur les personnes qui les élaborent, les développent ou les commercialisent. L'article 96 de la loi de finances pour 2014, qui instituait une telle obligation, a été censuré par le Conseil constitutionnel parce que faute de définition précise, il portait atteinte à la liberté d'entreprendre. Les amendements déposés en projet de loi de finances pour 2015 posaient le même problème, même si celui-ci définit plus clairement la notion.
D'importants travaux sur le sujet ont été lancés. La direction générale des finances publiques élabore actuellement une liste des schémas d'optimisation fiscale qu'elle considère comme les plus contestables ; l'OCDE, dans le cadre de son projet Base Erosion and Profit Shifting (BEPS), fera connaître en octobre 2015 ses recommandations sur le sujet. Je suggère d'attendre la conclusion de ces travaux pour élaborer un dispositif plus solide en vue d'une prochaine loi de finances.
L'amendement n° 147 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 132 impose aux entreprises effectuant des opérations avec des régimes fiscaux privilégiés de justifier leur méthode de définition des prix de transfert en matière d'actifs immatériels. Son intention est louable mais sa portée juridique faible, d'autant que l'article 238 A du code général des impôts subordonne la déductibilité des sommes versées à des entreprises établies dans un régime fiscal privilégié à la démonstration, par la partie versante, « que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré ». En outre, depuis le 1er janvier 2010, l'article L13 AA du livre des procédures fiscales impose aux grands groupes de tenir à disposition de l'administration une documentation justifiant leur politique de prix de transfert, notamment en matière d'actifs incorporels. Retrait sinon avis défavorable.
M. Jean Desessard. - Disposer du texte de vos interventions nous aiderait à préparer les nôtres...
L'amendement n° 132 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'article 35 bis ramène de dix à sept ans le délai au cours duquel les remboursements d'apports donnent lieu à reprise de l'avantage fiscal du Madelin et de l'ISF-PME. Je suis, bien sûr, défavorable à l'amendement de suppression n° 624.
L'amendement n° 624 n'est pas adopté.
L'article 35 bis est adopté sans modification.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 934 propose un alignement complet des exceptions à la condition de détention de cinq ans prévues pour le dispositif Madelin sur celles actuellement prévues pour le dispositif ISF-PME, dans un souci de lisibilité et de sécurité juridique. Il ne semble toutefois pas opportun de maintenir la nouvelle exception introduite en séance publique à l'Assemblée nationale. Attention à la stabilité de l'actionnariat des PME !
L'amendement n° 934 est adopté.
L'amendement n° 625 devient sans objet, ainsi que l'amendement n° 626.
L'article 35 ter A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 35 ter A
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 938 vise à renforcer les fonds propres des petites et moyennes entreprises en assouplissant le dispositif ISF-PME qui fait actuellement l'objet d'une négociation entre le Gouvernement et la Commission européenne afin de le rendre compatible avec le nouveau règlement européen déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur. Il est curieux que le Gouvernement ne se soit pas encore saisi du problème, alors même que le nouveau règlement est déjà entré en vigueur et que voilà plus de deux ans que ces modifications sont discutées.
Dans le cadre de la négociation en cours, le présent amendement vise à encourager le Gouvernement, en contrepartie du meilleur ciblage qui pourrait être exigé par la Commission européenne, à doubler le plafond du dispositif ISF-PME. Cela nous rapprocherait progressivement des autres pays d'Europe continentale. Le montant du nouveau plafond, même porté à 90 000 euros, reste plus de dix fois inférieur au plafond anglais, qui est actuellement d'un million de livres.
Mme Nicole Bricq. - Nous y sommes défavorables : l'ISF-PME a été réduit à sept ans ; ça va ! Vous proposez de la doubler : voilà une niche fiscale carabinée !
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Il s'agit d'envoyer un signal au Gouvernement, au bénéfice des PME.
M. Yannick Vaugrenard. - Pas des recettes de l'État !
L'amendement n° 938 est adopté ; en conséquence, l'article additionnel est inséré.
L'amendement n° 226 devient sans objet, ainsi que l'amendement n° 777.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 601 retient la date limite de dépôt de la déclaration de revenu papier pour référence dans la fixation de la période ouvrant droit à une réduction d'impôt au titre du dispositif ISF-PME. Je suggère le retrait de cet amendement, qui présente un intérêt limité et porte atteinte à l'objectif de stabilité du cadre juridique et fiscal des entreprises.
Mme Élisabeth Lamure. - J'ai bien entendu que la rédaction n'était pas parfaite ; mon but était de simplifier la vie des entreprises.
L'amendement n° 601 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Ayant déjà fait un geste sur l'ISF, je demande le retrait de l'amendement n° 223, qui attribue aux droits sociaux soumis à un engagement collectif de conservation la qualité de biens professionnels.
L'amendement n° 223 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos 224 et 327.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je comprends l'objectif de mes collègues à travers l'amendement n° 688, qui vise à exonérer les parts d'entreprises de l'assiette de l'ISF. Je suggère toutefois aux auteurs de se rallier à mon amendement sur l'ISF-PME.
L'amendement n° 688 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 603 raccourcit de cinq à trois ans le délai de détention des titres requis pour bénéficier des réductions d'impôt ISF-PME et Madelin, dans le seul cas des investissements en direct dans des sociétés de moins de sept ans. Sur la forme, la modification proposée ne semble pas tenir compte de l'article 35 ter A, sur lequel la commission spéciale s'est déjà prononcé. Sur le fond, je demande le retrait de cet amendement, dans un souci de stabilité de l'actionnariat des PME.
Mme Élisabeth Lamure. - Sur le fond, je soutiens cet amendement mais je le regarderai plus en détail avant la séance.
L'amendement n° 603 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 937 renforce les fonds propres des petites et moyennes entreprises en corrigeant une incohérence du dispositif Madelin : la réduction d'impôt sur le revenu est égale à 18 % des versements effectués dans la limite annuelle, pour un couple, de 100 000 euros. Or, cette réduction d'impôt est en pratique soumise au plafonnement global des niches fiscales de 10 000 euros. Pour les sommes investies au-delà de 55 500 euros, le foyer fiscal ne peut donc plus bénéficier de la réduction d'impôt. C'est pourquoi je porte ce plafond à 18 000 euros.
Mme Nicole Bricq. - Vous revenez sur le plafonnement des niches fiscales, une idée qui n'est pas née en juin 2012. Nous avons certes abaissé le plafond et peut-être avons-nous été un peu durs. Mais votre amendement est politique et non technique.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Tout à fait. Nous le faisons pour le développement des PME.
Mme Nicole Bricq. - Cela, c'est le prétexte !
Mme Annie David. - J'y suis défavorable.
L'amendement n° 937 est adopté ; l'article additionnel est inséré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je demande le retrait des amendements nos 227 et 606, au profit du mien.
L'amendement n° 227 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n° 606.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 611 rend les sociétés en participation éligibles aux dispositifs Madelin et ISF-PME afin de faciliter l'investissement collectif au sein d'un même projet. Son intérêt est limité au regard des risques de contournement du contrôle de l'AMF, pourtant indispensable à la protection des épargnants. Je demande le retrait.
L'amendement n° 611 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 225, régulièrement rejeté par les commissions des finances des deux chambres, autorise tout associé ayant investi plus de 100 000 euros dans une entreprise bénéficiant du régime des sociétés de personnes à imputer les déficits sur son revenu global. Je suggère le retrait de cet amendement, qui revient à traiter de la même façon sur le plan fiscal un gestionnaire et un investisseur.
L'amendement n° 225 n'est pas adopté.
L'article 35 ter est adopté sans modification.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 627 supprime l'article 35 quater qui crée un nouveau véhicule d'investissement en capital risque, les sociétés de libre partenariat. Avis défavorable : les sociétés en commandite simple offrent un cadre familier aux grands investisseurs institutionnels nordiques et anglo-saxons, propre à les inciter à investir en France. Cette mesure est favorable à la fois au secteur de la gestion d'actif français et au financement des entreprises non cotées.
Mme Annie David. - Je voterai cet amendement.
L'amendement n° 627 n'est pas adopté.
L'article 35 quater est adopté sans modification.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 919 supprime l'article 35 quinquies qui dispose que le conseil de surveillance des fonds commun de placement d'entreprise comporte au minimum deux tiers de représentants des salariés, contre une moitié actuellement. Les conseils de surveillance de FCPE fonctionnent de manière satisfaisante. La modification de leur composition emporterait plus de difficultés qu'elle ne viendrait en résoudre, en particulier dans les sociétés non cotées qui assurent la liquidité des titres détenus par les salariés. La parité des conseils de surveillance donne les garanties nécessaires au dirigeant d'entreprise pour développer en toute confiance l'actionnariat salarié au sein de sa société. Le Gouvernement semble plutôt favorable à cette suppression.
Mme Nicole Bricq. - C'est l'épargne des salariés : il est logique qu'ils aient un droit de regard et une représentation préférentielle.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - En dépit de la parité, ils en assurent toujours la présidence. L'article pose un réel problème aux sociétés non cotées et nos collègues de l'Assemblée l'ont perçu.
L'amendement n° 919 est adopté ; en conséquence, l'article 35 quinquies est supprimé.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 923 supprime l'article 35 sexies qui autorise les règlements de fonds commun de placement d'entreprise imposant à la société de gestion de prendre en compte le type d'entreprise financée dans ses décisions d'investissement. Selon ses auteurs, cela pourrait orienter les fonds investis vers les PME et les ETI. Si l'objectif est louable, le dispositif est particulièrement imprécis. De plus, le règlement d'un fonds peut déjà définir une politique d'investissement prenant en compte la taille des entreprises financées.
L'amendement n° 923 est adopté ; en conséquence, l'article 35 sexies est supprimé.
L'article 35 septies est adopté sans modification.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 628 supprime l'article 35 octies, par opposition de principe au Perco. Avis défavorable.
Mme Annie David. - Je vote pour.
L'amendement n° 628 n'est pas adopté.
L'article 35 octies est adopté sans modification.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Nous abordons maintenant une série d'amendements sur le forfait social. L'amendement n° 915 baisse son taux de 16 à 12 % pour les versements issus de la participation ou de l'intéressement effectués sur un Perco, dont au moins 7 % des titres sont destinés au financement des PME et des ETI. Le ministre a reconnu en audition que la baisse prévue dans le texte était sans doute insuffisante. L'amendement précise également que les fonds visés à cet article pourront investir non seulement dans des titres de capital ou des titres de créances mais également dans des parts de fonds communs de placement autorisés par le code monétaire et financier.
Mme Annie David. - Le taux baissait déjà de 20 à 16, et vous le fixez à 12 ! Je ne vous suivrai pas.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Voulons-nous encourager l'épargne salariale ou non ? Chacun sait qu'en matière de fiscalité, une base large avec un faible taux est préférable à une base restreinte accompagnée d'un taux élevé.
M. Philippe Adnot. - C'est un principe simple.
Mme Annie David. - Simpliste, plutôt.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Les retraités y gagnent aussi.
Mme Nicole Bricq. - Si la baisse de 20 à 16 % était raisonnable, je ne suis pas sûre qu'une baisse de 20 à 12 % soit justifiée. Je m'interroge sur le coût de cet amendement.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Le coût global de mes deux amendements portant sur le forfait social a été chiffré à 50 millions d'euros environ.
M. Jean-Marc Gabouty. - Je me rallie au taux de 12 % et retire ma proposition d'un taux de 8 %.
Mme Nicole Bricq. - Qui dit mieux ?
M. Jean-Marc Gabouty. - Mais je proposais également aussi un meilleur fléchage en direction des PME.
Mme Fabienne Keller. - Je soutiens cet amendement qui envoie un signal clair à l'égard des salariés. Sans vouloir remonter à une époque lointaine, je rappellerai que l'épargne sociale a longtemps été exonérée de toute forme de taxation. Les montants épargnés sont parfois faibles, mais ils contribuent à distribuer une partie des résultats de l'entreprise parmi les salariés. En somme, votre amendement s'inscrit dans la tradition gaullienne, car il est conforme à l'esprit qui a présidé à la création des régimes de participation et d'intéressement.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Mon amendement défend à la fois les intérêts des entreprises et des salariés lorsqu'ils seront à la retraite.
L'amendement n° 915 est adopté.
L'amendement n° 616 devient sans objet, ainsi que l'amendement n° 770.
L'article 35 nonies est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Le rapport du Copiesas ainsi que le projet de position commune des partenaires sociaux recommandaient l'exonération de forfait social pendant trois ans pour les entreprises employant moins de cinquante salariés qui concluent pour la première fois un accord d'intéressement ou de participation. Tel n'a pas été le choix de l'Assemblée nationale, qui a prévu un forfait social de 8 % pendant les six premières années suivant la mise en place d'un régime de participation ou d'intéressement dans ces entreprises. A travers l'amendement n° 921, je propose une exonération pendant les trois premières années puis un taux réduit de 8 % les trois années suivantes. Cela n'entraînera pas une perte de ressources importante pour la sécurité sociale, car de tels accords sont quasiment inexistants aujourd'hui.
Mme Nicole Bricq. - C'est tout de même un manque à gagner !
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Le coût est difficile à évaluer mais il sera sans doute très faible. L'amendement étend également le dispositif aux entreprises qui n'ont pas conclu d'accord de participation ou d'intéressement au cours des trois années précédant la date d'effet du nouvel accord. Il procède également à des modifications rédactionnelles et des coordinations juridiques.
Mme Annie David. - Nous n'étions déjà pas favorables au texte ; nous le sommes encore moins à l'amendement, qui va au-delà.
Mme Nicole Bricq. - Ma position est la même que sur l'amendement précédent.
L'amendement n° 921 est adopté.
L'amendement n° 634 devient sans objet, ainsi que les amendements nos 768, 775 et 773.
L'article 40 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 40 ter
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 769 abaisse le forfait social à 16 % pour l'ensemble des contributions des employeurs aux dispositifs d'épargne salariale et aux plans d'épargne salariaux. Cette baisse modeste et ciblée du taux de forfait social sur les contributions employeurs constitue une piste intéressante, mais elle pourrait coûter plusieurs dizaines de millions d'euros. Je vous propose à ce stade de notre réflexion de nous contenter de mes deux amendements sur le forfait social.
M. Jean-Marc Gabouty. - Mon approche à travers cet amendement était d'encourager les contributions des employeurs, et, dans le suivant, de varier le taux de forfait social selon la taille des entreprises, toujours dans l'objectif de développer l'épargne salariale.
L'amendement n° 769 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 774 abaisse effectivement le taux du forfait social à 15 % pour les entreprises employant entre 51 et 249 salariés, et à 8 % pour celles de moins de 50 salariés. Certes la hausse du forfait social a eu des conséquences fâcheuses sur l'évolution de l'épargne salariale, mais cet amendement risquerait là encore d'entraîner une perte de recettes difficile à évaluer pour la sécurité sociale. En outre, il faudrait aussi réfléchir en termes de durée de détention de l'épargne : le Perco devrait être moins taxé par le forfait social que le PEE, qui lui-même serait moins taxé que les versements directs aux salariés, afin de privilégier le long terme. C'est pourquoi je demande là encore le retrait de cet amendement.
L'amendement n° 774 est retiré.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 826, que M. Dassault défend avec détermination et constance, serait source de rigidité. Si l'on peut entendre la volonté que l'intéressement des salariés soit égal aux dividendes, il risque d'avoir des effets pervers : la mesure mérite une étude d'impact et une large concertation. Aborder ce débat en commission au détour d'un amendement n'est peut-être pas le plus approprié.
Mme Élisabeth Lamure. - Voilà pourtant un bel exemple de bonne pratique en entreprise.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement pose une question intéressante mais peut entraîner une rigidité pour les entreprises. Il mérite un débat en séance.
Mme Annie David. - M. Dassault a évolué : il proposait d'abord un partage par tiers, actionnaires, salariés, investissement. Il avait même déposé une proposition de loi. Sans être favorable à la participation, je suis sensible à sa proposition. Quel dommage que tous ceux qui se félicitent de sa générosité jugent impossible de mettre en oeuvre ce qu'il applique dans ses entreprises. Pourquoi ne pas voter cet amendement ?
M. Jean-Marc Gabouty. - Il peut y avoir une réserve spéciale de participation, même quand il n'y a pas distribution de dividende. Or l'amendement implique que, même lorsque l'entreprise a besoin d'investissement, les dividendes ne peuvent être inférieurs à la réserve de participation.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - La limite du dispositif est la rigidité qu'il impose à certaines entreprises. Voyons-le en séance et écoutons M. Macron.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Je connais des entreprises qui appliquent cette règle, il est vrai dans le même secteur que Dassault Aviation.
Mme Annie David. - À titre personnel, je voterai l'amendement. Les groupes de gauche l'avaient déjà repris quand, sous une autre majorité, le Gouvernement avait convaincu M. Dassault de le retirer.
L'amendement n° 826 n'est pas adopté.
L'article 37 est adopté sans modification.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 631 supprime l'article 37 bis A qui améliore les conditions d'allocation d'actifs des FCPE. Avis défavorable.
L'amendement n° 631 n'est pas adopté.
L'article 37 bis A est adopté sans modification, ainsi que les amendements nos 37 bis et 38.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 632 supprime l'article 39 par hostilité au Perco. Avis défavorable.
L'amendement n° 632 n'est pas adopté.
L'article 39 est adopté sans modification.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 920 supprime l'obligation, de nature réglementaire, de mettre à disposition des représentants du personnel le livret d'épargne salariale sur la base de données économiques et sociales.
L'amendement n° 920 est adopté.
L'article 39 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
L'article 39 ter est adopté sans modification, ainsi que l'article 39 quater.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 633 supprime l'article 40 qui vient pourtant combler un vide juridique dans le code du travail. Les salariés peuvent actuellement demander la renégociation de tout accord d'intéressement sauf s'il est issu d'un projet unilatéral de l'employeur qui a été approuvé par referendum interne de l'entreprise par deux tiers du personnel. Cet article harmonise les règles de dénonciation et de reconduction des accords d'intéressement : si aucune des parties ne demande la reconduction de l'accord d'intéressement dans les trois mois précédant son expiration, quelle que soit sa modalité de conclusion, il sera tacitement reconduit pendant trois ans. Il renforce donc les droits des salariés : dans les entreprises de moins de 50 salariés, 90 % des accords d'intéressement sont conclus à la majorité des deux tiers des salariés. Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n° 633 n'est pas adopté.
L'article 40 est adopté sans modification.
Articles additionnels après l'article 40
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je suis défavorable à l'amendement n° 133 pour deux raisons. Tout d'abord, je ne vois pas bien la raison d'être de cette nouvelle forme de « transparence ». Ensuite, la publication annuelle de ce rapport peut poser des problèmes de confidentialité en fonction de la taille du « bassin de vie » retenue.
L'amendement n° 133 n'est pas adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Je demande le retrait de l'amendement n° 336, car nous avons pris la décision de principe de ne pas demander de rapport supplémentaire dans ce texte.
L'amendement n° 336 n'est pas adopté.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Nous revenons à l'examen de l'article 50 A qui avait été reporté. Entre temps, nous avons entendu le ministre de la défense, et nous nous sommes entretenus avec les membres de son cabinet. À l'issue de ces auditions, je maintiens mon amendement de suppression n° 465. Je vais vous en lire l'objet.
Mme Nicole Bricq. - Nous l'avons lu !
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'affaire est suffisamment importante pour en donner connaissance à tous nos collègues.
« De manière constante, le Sénat a considéré qu'il était indispensable de garantir au ministère de la défense les ressources prévues par la loi de programmation militaire (LPM). En effet, le respect de la programmation conditionne la capacité des forces armées à faire face à la dégradation de la situation sécuritaire sur le plan international et national. L'enjeu est également considérable sur le plan industriel et de l'emploi. La fragilité des hypothèses du Gouvernement concernant les recettes exceptionnelles du ministère de la défense a maintes fois été dénoncée au Sénat, que cela soit au moment du vote de la loi de programmation militaire 2014-2019 ou de la loi de finances pour 2015. Cette fragilité est désormais reconnue par le Gouvernement qui a introduit dans le présent projet de loi un amendement visant à lever les obstacles juridiques pour la mise en place de sociétés de projet. Alors que le montage envisagé par le Gouvernement paraissait encore très flou, les travaux de votre commission et de vos rapporteurs ont permis de clarifier un certain nombre de points. L'opération viendrait aggraver le déficit public maastrichtien ; les sociétés seraient dans un premier temps exclusivement publiques mais pourraient par la suite accueillir des investisseurs privés ; des sociétés pourraient être créées de manière pérenne et fournir des services complémentaires au ministère de la défense. En revanche, ni le ministère de la défense, ni les ministères de l'économie et des finances n'ont fourni de réponse à la question du coût pour les finances de l'État, que cela soit la rémunération des capitaux investis ou le manque à gagner lié à la cession de participations publiques. Il apparaît ainsi que, si les sociétés de projet permettent effectivement à court terme de garantir les ressources prévues par la loi de programmation militaire, elles ne sont pas sans risque sur le plan financier et pourraient contribuer à moyen terme à une précarisation supplémentaire des moyens du ministère de la défense, au travers d'une débudgétisation et d'une externalisation croissante.
« Cette solution est donc loin d'être idéale mais pourrait être acceptée s'il apparaissait qu'elle était la seule à même d'assurer le financement dont le ministère de la défense a besoin. Sur ce point, le Gouvernement maintient une grande ambiguïté, que la réponse du Premier ministre au courrier de M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères et de la défense, n'a fait que confirmer : le scénario central serait encore l'attribution du produit de cession de fréquences au ministère de la défense avant la fin de l'année, les sociétés de projet n'étant qu'un plan de repli en cours d'étude.
« Les déclarations publiques du ministre des finances, complétées par les éléments recueillis lors de l'audition par votre rapporteur du cabinet du secrétaire d'État au budget, laissent penser qu'une troisième solution est également étudiée par les services de Bercy, qui présenterait moins d'inconvénients que les sociétés de projet mais ne serait pas encore aboutie. Vos rapporteurs considèrent que ces atermoiements sont particulièrement tardifs. Le ministère de la défense a besoin d'être assuré de ses ressources afin de pouvoir réaliser le programme d'investissement prévu par la LPM. Toute ambiguïté doit donc être levée au plus vite.
« C'est pourquoi vos rapporteurs vous proposent de supprimer l'article 50 A, afin que d'ici l'examen en séance publique du présent projet de loi, les arbitrages du Gouvernement, qui n'ont que trop tardé, soient clairement exposés. Cette suppression constitue un appel solennel au Gouvernement pour qu'il garantisse dans les faits, et non plus seulement dans le discours, le financement de nos forces armées. Pour cela, le Parlement doit être en mesure de statuer sur la meilleure solution permettant d'atteindre ce but, y compris, le échéant, si elle consiste en la création de sociétés de projet ».
Mme Nicole Bricq. - Lors de son audition, le ministre de la défense n'a éludé aucune question ; il a clairement exposé le choix du Gouvernement. C'est votre droit de contester le financement de la loi de programmation militaire sans proposer aucune autre solution de financement. J'espère, cependant, que la majorité sénatoriale mesure qu'elle alimente les doutes sur les capacités de nos armées à honorer leurs engagements et qu'elle prend ainsi une lourde responsabilité.
M. Jean-Marc Gabouty. - Dans le principe, ce n'est pas forcément une mauvaise chose que d'externaliser le financement d'un certain nombre d'équipements militaires. C'est une forme de crédit-bail. Cependant, la constitution du capital des sociétés de projet reste opaque, de même que la manière dont elles sont financées. Dans ces conditions, il est difficile de porter un jugement sur la méthode. Je comprends le sens de la démarche, mais il est difficile de donner un chèque en blanc au Gouvernement pour mettre en place un dispositif dont on sait très peu de choses.
Mme Fabienne Keller. - J'admire l'habileté de Nicole Bricq qui pratique l'inversion des responsabilités : c'est le Gouvernement qui est en charge ! Nous sommes tout à fait prêts à soutenir dans le principe une solution grâce à laquelle la France pourra respecter les engagements de la loi de programmation militaire. Pour cela, il nous manque 2,2 milliards d'euros. Notre rapporteure a des inquiétudes sur le financement de ces engagements. Il semblerait qu'il existe d'autres solutions. Hier, j'ai proposé d'affecter des cessions d'actifs de l'État à certains investissements. Sur des sujets aussi stratégiques, nous devons y voir clair. C'est le sens de cet amendement de suppression.
Il s'agit quand même de l'achat de quatre A 400 M et de trois frégates FREMM et, ultérieurement, de créer des sociétés support pour l'exportation de matériel militaire ! Le Gouvernement a dix jours pour clarifier sa position et répondre à nos questions.
M. Yannick Vaugrenard. - Je regrette la position que la majorité a adoptée, et j'espère qu'il ne s'agit pas d'un positionnement. Pendant deux heures, Jean-Yves Le Drian a répondu clairement à l'ensemble des questions que nous lui avons posées. Quelle est l'utilité de cet amendement ? Comment donner plus d'explications ? Tout est toujours possible, y compris en séance. Quelle réaction attendre dans les pays voisins ? Il ne faudrait pas fragiliser notre pays par rapport à ses armées. Quant aux cessions de fréquence, j'ai entendu l'argument du ministre. Si l'État les vend fin décembre, il en tirera 2 milliards ; en janvier ou février, il les vendra peut-être 2,5 milliards. C'est à l'État de choisir le meilleur moment pour effectuer la vente. Tout le Parlement doit afficher un accord unanime sur le déficit de Maastricht. En intervenant pour réduire le risque djihadiste, nos soldats font le travail pour l'ensemble des pays d'Europe : c'est ce qu'a dit le Premier ministre ; il serait donc logique que Bruxelles en tienne compte dans les critères de Maastricht.
Je suis surpris par votre réaction : les sociétés de projets sont un bon moyen de financement. D'autres pays, comme l'Allemagne, l'Angleterre ou l'Espagne ont recours au leasing : c'est une idée à creuser. Le ministre de la défense a donné des assurances lors de son audition ; pourquoi remettre en cause des propos tenus au nom du Gouvernement ? Enfin, vous avez proposé des amendements de suppression - au sujet de la loi TEPA, par exemple - qui suppriment des recettes de l'État. Il faut être cohérent. Quelle objectivité comptable aurons-nous, si nous supprimons des recettes ?
Le sujet est sensible et concerne toute la représentation parlementaire. Pensons à l'image que nous donnons à l'extérieur.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Nous n'avons pas voté les amendements sur la loi TEPA.
Mme Nicole Bricq. - Pour M. Gabouty et Mme Keller, le Gouvernement devrait clarifier sa position. Le ministre a pourtant répondu à toutes les questions ! Vous proposez en fait une suppression sous condition suspensive ; mesurez la responsabilité que vous prenez à l'égard de nos armées, de nos concitoyens et de ceux qui comptent sur la France pour défendre nos valeurs. L'ordre du jour de la conférence des présidents prévoit un débat sur la loi de programmation militaire, le 2 avril. Vous avez le droit de prendre une posture, mais pensez aux conséquences de vos décisions !
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Nous avons l'habitude de prendre nos responsabilités et de mesurer les conséquences de nos décisions.
M. Philippe Dominati. - Le 2 juin 2014, le président de la République rendait un arbitrage devant le ministre de la défense, M. Sapin et le ministre du budget, après que la Cour des comptes a déclaré que les recettes exceptionnelles de l'État sur la cession des fréquences hertziennes étaient aléatoires. Qui n'ose pas prendre ses responsabilités ? Est-ce nous ou le Gouvernement ? Le Parlement est en droit de poser clairement la question de la pérennité de ces recettes. Cela fait maintenant un an que le Gouvernement a ouvert la polémique, en se refusant à arbitrer.
M. Jean-Pierre Masseret. - Pour avoir été rapporteur spécial des équipements militaires à la commission des finances du Sénat en 2012, plus particulièrement sur les fréquences hertziennes, je sais qu'il y a belle lurette que la fragilité des recettes exceptionnelles est connue. Le ministre de la défense a fait preuve d'une loyauté remarquable durant son audition en nous faisant part des difficultés rencontrées et en nous expliquant pourquoi les sociétés de projet sont la seule solution envisageable. Je suis navré comme citoyen de la posture que vous adoptez, d'autant qu'elle est sans doute plus politicienne que politique.
Mme Fabienne Keller. - C'est celui qui dit qui est !
M. Jean-Pierre Masseret. - Puisque vous le prenez ainsi, votre posture est une imposture démocratique contre la Nation.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Celle du Gouvernement est au minimum une imposture budgétaire.
M. Henri Tandonnet. - Le budget de l'État ne suffit pas à maintenir les moyens nécessaires pour notre armée, et la solution des sociétés de projets reste aléatoire. Le ministre, même s'il a été sincère, n'a pas donné l'origine des capitaux de ces sociétés ; ce seront surement des capitaux privés, puisque le public n'a plus les moyens.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - Il est injuste de nous accuser d'adopter une posture politicienne. La semaine dernière, nous avons décalé l'examen de cet amendement pour pouvoir obtenir des réponses de la part du Premier ministre et du ministre de la défense. M. Le Drian nous a éclairés sur certains points, comme le déficit de Maastricht ou le fonctionnement des sociétés de projets. La réponse du Premier ministre n'a pas été aussi satisfaisante. Pourquoi aurions-nous prolongé le débat, si nous étions dans une posture politicienne ? Le Premier ministre nous a dit que le scénario central reposait sur la vente des fréquences ; M. Le Drian nous a dit le contraire. Les ministres ont alimenté nos doutes par leurs réponses contradictoires. Si les réponses avaient été claires, le problème ne se poserait pas. Nous sommes tous d'accord pour soutenir nos armées avec un budget qui correspond à leur engagement : ne renversons pas les responsabilités !
Quant aux sociétés de projet, si nous avons obtenu quelques éclaircissements grâce au ministre de la défense, le Premier ministre est resté vague sur la question. Dans la presse, le ministre des finances a parlé d'un troisième scénario possible : nous n'en avons pas connaissance. Il faudrait que le Gouvernement harmonise ses positions et arbitre entre les ministères. Tel est l'objet de notre amendement de suppression. L'expérience du leasing au Royaume-Uni a été plutôt négative, en termes de coût et d'efficacité. Enfin, en ce qui concerne le déficit de Maastricht, le débat se fera à Bruxelles, et ne dépend pas de nous. Les sociétés de projet sont peut-être une parenthèse pour Bercy ; le ministre de la défense les considère comme une solution pérenne. Que le Premier ministre tranche ! Et nous accuser de politique politicienne, c'est un peu fort de café...
M. Yannick Vaugrenard. - Il est important que nous ayons une position commune sur le déficit de Maastricht. Faisons en sorte que notre pays soit entendu à Bruxelles. L'armée française intervient pour les autres ; elle doit obtenir une compensation budgétaire.
Le courrier du Premier ministre est antérieur à l'audition de M. Le Drian.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - C'est le même jour.
M. Yannick Vaugrenard. - Je ne vois pas de contradiction entre la position du Premier ministre et celle du ministre de la défense. Tant que les cessions de fréquences n'auront pas eu lieu, il est légitime d'envisager une autre solution.
Sur un tel sujet, il ne devrait pas y avoir place pour la polémique.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - J'ai participé à l'ensemble des auditions menées par la rapporteure ; nous avons eu un entretien approfondi avec le cabinet du ministre de la défense. Il y a eu le courrier du Premier ministre, l'audition très fouillée, hier, du ministre de la défense. Hier également, nous avons rencontré pendant une heure le directeur de cabinet du secrétaire d'État au budget. De ces auditions, sont sortis des éléments d'information nouveaux. La position du ministre de la défense est claire et robuste. Il propose un scénario qui présente des désavantages financiers à terme, mais qui reste acceptable. Nous le soutenons, comme nous soutenons la création des sociétés de projet. Ce qui nous inquiète, en revanche, c'est que le Premier ministre écrit que le Président de la République a donné instruction au ministre de la défense d'étudier ce scénario. Il est bien tard pour étudier quand les armées n'auront plus de crédits en septembre. On nous parle également d'un troisième scénario sans le préciser. Et quand le Premier ministre ajoute qu'il faut écarter toute solution susceptible d'aggraver le déficit de Maastricht, cela veut dire qu'il n'est pas favorable aux sociétés de projet. Pouvons-nous continuer à entretenir une telle confusion sur un sujet régalien majeur ? Selon le directeur de cabinet du ministre du budget, la solution sera arrêtée lors de la discussion sur la loi de programmation militaire, à la mi-juin : c'est d'une grande légèreté et c'est faire de la cavalerie budgétaire que de ne pas savoir comment on paiera les commandes et les soldes de l'armée dans les prochains mois.
La commission a trois solutions. Soit elle vote, soit elle amende - mais tout espoir de conforme disparait -, soit elle demande au Gouvernement de clarifier son argumentation pour qu'un débat ait lieu. Dans ce dernier cas, il faut supprimer l'article 50 A.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - La porte n'est pas fermée ; il reste trois semaines. Si le ministre dépose un amendement pour rétablir l'article, il devra s'expliquer en toute clarté.
Les amendements identiques nos 465, 40 et 71 sont adoptés et l'article 50 A supprimé.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - L'amendement n° 278 vise à changer l'intitulé du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques en : « Projet de loi visant à la réorganisation de certains secteurs de l'économie ». J'y suis défavorable au vu des amendements que nous avons adoptés depuis deux semaines et qui ont notablement renforcé l'impact du projet de loi.
M. Jean-Claude Lenoir. - C'est pourtant un amendement très pertinent, car le texte s'est considérablement éloigné de son objectif initial : il ressemble fort à ce que l'on appelait autrefois un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier (DDOEF). J'y suis favorable.
Mme Catherine Deroche, rapporteure. - C'était vrai au départ. Nous avons ensuite proposé des amendements forts en matière de maintien de l'emploi ou de pénibilité, par exemple.
M. Jean-Claude Lenoir. - Cet amendement contribuerait à donner à la CMP un texte sur lequel elle pourrait s'appuyer.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - L'idée m'a démangé... L'auteur de cet amendement reconnaîtra, j'en suis sûr, que nous avons inscrit dans le texte des dispositions substantielles qui l'ont rapproché de son objectif initial.
M. Jean-Claude Lenoir. - Je me range à votre avis.
La commission adopte le projet de loi dans la rédaction issue de ses travaux.
M. Vincent Capo-Canellas, président. - Merci à tous.
La réunion est levée à 18 h 15
Le sort des amendements examinés par la commission spéciale est retracé dans le tableau suivant :