- Mercredi 18 février 2015
- Mise en oeuvre de la convention d'assurance chômage du 14 mai 2014 et perspectives financières de l'Unédic - Audition de M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic
- Organisme extraparlementaire - Désignation
- Adaptation de la société au vieillissement - Audition de Mmes Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie
Mercredi 18 février 2015
- Présidence de M. Alain Milon, président -Mise en oeuvre de la convention d'assurance chômage du 14 mai 2014 et perspectives financières de l'Unédic - Audition de M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic
La réunion est ouverte à 10 heures.
Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission procède à l'audition de M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic, sur la mise en oeuvre de la convention d'assurance chômage du 14 mai 2014 et les perspectives financières de l'Unédic.
M. Alain Milon, président. - Je remercie M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic, accompagné d'Isabelle Jourdan, directrice des relations publiques, d'avoir bien voulu venir devant notre commission ce matin.
Le régime d'assurance chômage est géré par les partenaires sociaux. En dehors de grands principes relevant de la loi, ses règles sont fixées par les conventions qu'ils renégocient périodiquement. Quant à ses recettes et ses dépenses, elles ne sont pas examinées par le Parlement.
Nous avons donc peu d'occasion d'évoquer ces questions alors que les règles d'indemnisation ont un impact très concret sur un grand nombre de nos concitoyens, compte tenu du niveau de chômage, et qu'elles participent aussi du fonctionnement du marché du travail. Par ailleurs, les cotisations d'assurance chômage constituent des prélèvements obligatoires et le déficit de l'Unédic entre dans les comptes publics.
C'est pourquoi il m'a paru nécessaire de pouvoir faire le point, avec son directeur général, sur la situation de l'Unédic.
Je souhaiterais qu'au cours de cette audition nous puissions aborder la mise en oeuvre de la nouvelle convention d'assurance chômage, signée le 14 mai 2014, qui est entrée en vigueur pour partie en juillet dernier et pour partie en octobre. Elle a introduit des novations, comme les droits rechargeables dont le Parlement avait adopté le principe dans la loi de 2013 sur la sécurisation de l'emploi.
Cette nouvelle convention visait aussi à réduire, au moins en partie, le déficit du régime. Celui-ci est demeuré au niveau de 4 milliards en 2014, comme en 2013, et selon les prévisions que vous avez publiées en janvier dernier, il passerait à 4,6 milliards en 2015, ce qui porterait le niveau de la dette à près de 26 milliards en fin d'année.
Nous souhaiterions donc également évoquer avec vous les perspectives financières de l'assurance chômage, d'autant que dans ses objectifs de réduction des déficits, le Gouvernement incluait des économies sur le régime.
Je vous laisse la parole, Monsieur le directeur général, pour un exposé introductif. Nos collègues vous poseront ensuite leurs questions.
M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic. - Je voudrais tout d'abord aborder la situation financière de l'Unédic, qui dépend pour l'essentiel du contexte macro-économique français. Conséquence de la conjoncture dégradée depuis 2009, le chômage a augmenté. Or, l'assurance chômage jouant un rôle d'amortisseur économique et social, il est logique que son déficit augmente en période de faible croissance. La situation financière de l'Unédic s'explique davantage par des raisons conjoncturelles que structurelles. Aujourd'hui, le déficit annuel est d'environ 4 milliards d'euros. La dette avoisine 26 milliards d'euros, soit neuf mois de recettes. Son coût est de 300 millions d'euros, soit 1 % de nos recettes. Le consensus des économistes a légèrement revu à la hausse les perspectives de croissance en France pour 2015, de 0,8 à 0,9 %, ce qui demeurera insuffisant pour faire reculer le chômage, mais aura des conséquences positives sur notre situation financière.
Cette situation est-elle tenable ? Tout d'abord, je rappellerai que la nouvelle convention d'assurance chômage permettra une économie d'environ 800 millions d'euros en année pleine, et qu'elle sera renégociée dès le premier semestre 2016, afin de s'ajuster aux évolutions macro-économiques. Ensuite, notre stratégie financière nous permet de verser les allocations dans les délais, grâce à des maturités d'emprunt diversifiées et à la garantie explicite de l'Etat votée chaque année en loi de finances. Lors de notre première émission obligataire cette année, nous tablions sur un objectif de 2 milliards d'euros, mais nous avons finalement levé 3 milliards à un taux d'intérêt de 0,62 % à dix ans, soit seulement 9 points de base au-dessus du niveau auquel emprunte l'Etat. C'est dire à quel point les conditions de financement sont actuellement très favorables. Enfin, comme vous le savez, l'article 29 de la loi du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 oblige l'Unédic à transmettre chaque année au Parlement et au Gouvernement, au plus tard le 30 juin, ses perspectives financières triennales, en précisant notamment les effets de la composante conjoncturelle de l'évolution de l'emploi salarié et du chômage sur l'équilibre financier du régime d'assurance chômage. Les choix des partenaires sociaux lors de la renégociation de la convention d'assurance chômage découleront des conclusions de ce rapport. Ceux-ci disposent donc des moyens juridiques de corriger le déséquilibre financier de l'assurance chômage, qui s'explique selon moi essentiellement par des raisons conjoncturelles.
J'en viens maintenant à la présentation des nouvelles règles d'assurance chômage. L'un des objectifs des signataires de la convention était d'inciter au retour à l'emploi, tout en conservant les fondamentaux de l'assurance chômage, comme la proportionnalité de l'allocation par rapport au salaire (une journée travaillée ouvre droit à une journée d'indemnisation, dès lors que la personne a travaillé quatre mois), ou encore la durée du versement de cette allocation (deux ans, voire trois ans pour les personnes âgées de plus de 50 ans). Deux mécanismes ont été mis en place pour encourager la reprise d'activité et protéger dans la durée les demandeurs d'emploi qui alternent des périodes de travail et de chômage. D'une part, la création de droits rechargeables permettra, sans exception, d'ouvrir de nouveaux droits à l'assurance chômage pour tout demandeur d'emploi en cours d'indemnisation qui retrouve un emploi, même de courte durée. D'autre part, le cumul entre allocation chômage et salaire est désormais possible quel que soit le nombre d'heures de travail dans le mois, afin de rendre systématiquement plus intéressant financièrement le cumul plutôt que le simple bénéfice de l'allocation.
Parmi les grandes mesures d'économies figurent notamment l'allongement du différé d'indemnisation en cas d'indemnité de rupture supérieure au minimum légal (par exemple dans le cas des ruptures conventionnelles), afin de limiter les effets d'une entente entre salarié et employeur au détriment de l'assurance chômage, la révision des seuils pour l'allocation (qui ne peut être inférieure à 57 % du salaire de référence, contre 57,4 % auparavant, pour les salaires dépassant 1,5 Smic), la prise en compte du décalage de l'âge de départ en retraite, ou encore la modification des règles spécifiques aux intermittents du spectacle.
Je voudrais par ailleurs souligner que l'Unédic a travaillé en parfaite intelligence avec Pôle emploi. Alors que certains craignaient cet été un dysfonctionnement informatique majeur chez l'opérateur public, les allocations chômage ont été versées en temps et en heure, grâce à l'engagement de la direction et du personnel.
Si l'accord entre partenaires sociaux, à l'origine de la nouvelle convention d'assurance chômage, a été conclu en mars 2014, la réflexion a été lancée dès le début 2013. Elle fait aujourd'hui l'objet d'un suivi régulier par le bureau de l'Unédic, pour détecter notamment les problèmes liés aux droits rechargeables. Les média ont relayé de nombreux cas dans lesquels les bénéficiaires étaient indemnisés sur la base de leur ancienne allocation. Parmi le million de bénéficiaires, 30 000 cas ont été identifiés, ce qui ne remet pas en cause à nos yeux le bienfondé de cette mesure. Les partenaires sociaux se réuniront cependant début mars pour trouver un remède à cette situation.
Je voudrais enfin conclure sur l'articulation entre les règles de l'assurance chômage et le fonctionnement du marché du travail. Si la flexibilité du marché du travail français est globalement comparable à celle des autres pays européens, et notamment à l'Allemagne, notre pays se singularise sur deux points. D'une part, la proportion de contrats de travail à durée limitée, voire à très courte durée, y est plus forte qu'ailleurs. D'autre part, la probabilité pour une personne de passer d'un emploi précaire vers un emploi permanent a diminué. Les perspectives de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en matière d'emploi pour 2014 ont montré que 15 % seulement des salariés français en emplois temporaires accèdent à un emploi permanent sur une période de trois ans, ce qui place notre pays dans une situation atypique sur la scène internationale. L'assurance chômage est le miroir de cette situation. Je rappelle à cet égard que la moitié des allocataires actuellement indemnisés par l'Unédic sont des personnes qui ont terminé leur contrat à durée déterminée ou leur mission d'intérim, les personnes licenciées pour motif économique ne représentant que 10 % de nos allocataires. En outre, la moitié des allocataires travaillent chaque mois, ce qui montre à quel point les notions de demandeurs d'emploi et de travailleurs se chevauchent. La France se distingue également par une hausse du chômage de longue durée. En 2014, on comptait 800 000 personnes éloignées de l'emploi depuis plus de deux ans, contre 500 000 en 2011. La nouvelle convention vise à inciter la reprise d'emploi, par des règles simples, qui ne laissent aucun doute sur l'intérêt financier à sortir du chômage.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Lors de sa conclusion, en mai 2014, l'impact financier de la nouvelle convention Unédic était évalué à 300 millions d'euros en 2014 et à 830 millions d'euros en 2015. Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement l'a chiffré à 1 milliard d'euros en 2015. Après actualisation des perspectives financières, quel est l'impact en 2014 et les prévisions pour 2015 ? Quelle est la part respective, détaillée pour les mesures principales, de l'apport de recettes nouvelles, des moindres dépenses et des dépenses nouvelles ?
Le Gouvernement a par ailleurs annoncé et intégré, dans son plan de 9,6 milliards d'économies, un effort de 1,2 milliard de la part des régimes à gestion paritaire. Pouvez-vous nous indiquer quelle sera la participation de l'Unédic à cet effort ?
La dette de l'Unédic devrait s'élever à près de 26 milliards d'euros fin 2015. Pouvez-vous nous donner des précisions sur sa gestion concrète ?
M. Vincent Destival, directeur général de l'Unédic. - Les 830 millions d'économies générées par la nouvelle convention d'assurance chômage en 2015 se décomposent en 640 millions d'euros de moindres dépenses et 180 millions d'euros de recettes nouvelles, principalement issues de l'assujettissement à cotisations des salariés de plus de 65 ans, en cohérence avec la réforme des retraites, et de l'actualisation de la cotisation applicable aux intermittents, en application du principe, arrêté en 2003, selon lequel elle est doublée par rapport à la cotisation des autres salariés.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Pouvez-vous nous indiquer le montant moyen de l'indemnisation des intermittents ?
M. Vincent Destival. - Il y a plusieurs façons d'envisager cette question. Si l'on considère l'écart entre les contributions reçues et les allocations versées, les intermittents représentent 200 millions d'euros en recettes et 1,2 milliard d'euros en dépenses, soit un écart d'un milliard d'euros. Dans l'hypothèse, qui n'est pas à l'ordre du jour, d'une suppression de leur régime spécifique - le Gouvernement s'étant engagé début janvier à l'inscrire dans la loi - les intermittents bénéficieraient du régime de droit commun. Or, l'indemnisation des fins de contrats de courte durée est également déficitaire. Le surcoût spécifique du régime des intermittents était de l'ordre de 300 millions d'euros avant la conclusion de la nouvelle convention, qui le réduit à environ 130 millions d'euros.
M. Alain Milon, président. - Mais l'application de cet aspect de la nouvelle convention a été suspendue ?
M. Vincent Destival. - L'Etat a pris l'engagement de supporter le coût du différé d'indemnisation des intermittents, soit une charge d'environ 100 millions d'euros. L'allocation moyenne des intermittents est d'environ 1 100 euros, elle est de 1 000 euros pour les demandeurs d'emploi du régime général.
La contribution de l'assurance chômage aux économies est de 830 millions d'euros en 2015 au titre de la mise en oeuvre de la nouvelle convention. Les équilibres définis en loi de financement de la sécurité sociale comprennent par ailleurs 100 millions d'euros d'économies liées à une moindre revalorisation des allocations mais je ne peux pas préjuger de la décision des partenaires sociaux sur ce point, qui interviendra au mois de juin prochain.
La gestion de la dette est une responsabilité propre de l'Unédic. Elle fait l'objet d'une coordination étroite avec l'Agence France Trésor, gestionnaire de la dette de l'Etat. Les émissions sont coordonnées et nous poursuivons le même intérêt : couvrir un besoin de financement dans les meilleures conditions possibles, ce qui suppose d'offrir une lisibilité aux investisseurs sur les stratégies de financement des acteurs relevant du périmètre de Maastricht.
Notre objectif est de présenter des ratios de liquidité reconnus de bonne qualité par les investisseurs financiers. Il nous a conduits à augmenter la maturité moyenne de la dette : de 2 ans en 2012, elle est passée à 5 ans aujourd'hui et ne cesse d'augmenter, sans pour autant que le coût moyen de la dette ne progresse puisqu'il s'établit à 1,2 - 1,3 % par an sur la période 2012-2014. Une remontée des taux courts, probable et même souhaitable puisqu'elle serait le signe d'une reprise de la croissance, n'aura ainsi pas d'impact brutal sur le coût de notre dette. Dans ces circonstances, l'Unédic a moins besoin d'avoir recours au marché pour se financer. Sa dette est à taux fixe et libellée en euros ; elle n'est donc pas exposée au risque de change. Sans que le niveau de la dette puisse être considéré comme satisfaisant, sa gestion est efficace.
M. Dominique Watrin. - La situation financière de l'Unédic reflète l'atonie de l'économie, le développement du travail précaire et le ralentissement de l'évolution du salaire moyen par tête. Au 1er semestre 2014, malgré l'augmentation du chômage, on observe une stabilité du nombre de chômeurs indemnisés. Il semble que le système d'indemnisation exclue de nombreux demandeurs d'emploi. Quel est la part des chômeurs indemnisés par rapport au nombre de personnes inscrites à Pôle emploi ? Quel est l'effet de la nouvelle convention sur le montant de l'indemnisation ? Quelles pistes sont envisagées pour adapter le système des droits rechargeables ? Ne serait-il pas préférable, par exemple, d'opérer une comparaison des droits et d'appliquer le régime le plus favorable ? Quelles sont, enfin, les modalités de la prise en charge par l'État du maintien du régime applicable aux intermittents du spectacle ?
M. René-Paul Savary. - Quelle est la position de l'Unédic sur le renforcement de la coordination régionale du service public de l'emploi, soutenu par notre commission et le Sénat lors de l'examen du projet de loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République (Notre) ?
Mme Anne Emery-Dumas. - Est-il possible de connaître la part des seniors dans l'évolution du chômage de longue durée ? Le report de l'âge de la retraite n'a-t-il pas pour effet mécanique une augmentation du chômage de ces personnes ? Que représente le transfert de ce coût de l'assurance retraite vers l'assurance chômage ?
Mme Pascale Gruny. - La nouvelle convention a pour objectif de garantir que la reprise d'un emploi est toujours plus favorable que la perception des allocations de chômage. Il subsiste pourtant des situations, notamment lorsqu'il s'agit d'un contrat aidé, où le chômage reste plus favorable. Comment expliquez-vous que le RSA-activité ne soit pas davantage sollicité ? Je voudrais par ailleurs témoigner de la méconnaissance par Pôle Emploi des besoins des entreprises qui explique que beaucoup d'offres d'emplois ne sont pas déposées auprès de Pôle Emploi, mais aussi que beaucoup d'entre elles demeurent infructueuses.
M. Vincent Destival. - L'allongement de la durée du chômage explique la diminution de la part des chômeurs indemnisés. Sur le nombre total de demandeurs d'emploi, deux-tiers (3,2 millions) sont couverts par Pôle emploi, dont 2,5 millions indemnisés par l'assurance chômage et un demi-million (10 % du total) relevant du régime de solidarité. Au sein du tiers restant, beaucoup relèvent du RSA. Les 10 % de chômeurs qui ne perçoivent aucun revenu de transfert sont surtout des jeunes qui arrivent sur le marché du travail.
Cette préoccupation est à l'origine des nouvelles règles d'indemnisation. La mise en oeuvre des droits rechargeables permettra l'indemnisation de 120 000 demandeurs d'emploi supplémentaires. Le risque pour un chômeur d'arriver en fin de droits devrait passer de 34 à 25 %. Le cumul d'un salaire et d'une allocation permettra également une meilleure couverture. Ces éléments tiennent compte des conséquences de la conjoncture.
Il n'y a pas de baisse du niveau des allocations. En application de la règlementation précédente, l'allocation était immédiatement ajustée au nouveau niveau de salaire lorsqu'une personne reprenait un emploi. La nouvelle règle sur les droits rechargeables permet une prolongation de l'indemnisation mais il n'est tenu compte du nouveau salaire que lors de l'épuisement des droits, ce qui peut expliquer des difficultés dans les cas où les personnes se trouvent indemnisées sur la base de leur ancien salaire alors même qu'elles ont repris un emploi mieux rémunéré. Cette situation n'était pas souhaitée et il faut lui apporter une réponse dans le cadre de la négociation entre les partenaires sociaux.
Les seniors représentent un tiers de la progression du chômage de longue durée. Pour autant le recul de l'âge de la retraite n'a pas d'effet significatif. Une étude de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) indique que les ruptures de contrat sont, dans une certaine mesure, indexées sur l'âge légal de la retraite, avec une forme d'organisation concertée entre employeurs et salariés. Ce calendrier se déforme dans le temps en fonction de l'allongement de l'âge de la retraite, ce qui explique qu'il n'y a pas d'impact sur l'assurance chômage. Il y a un effet du recul de l'âge de la retraite sur l'augmentation de la population active mais il n'y a pas de transfert de l'assurance retraite vers l'assurance chômage.
Les règles de cumul entre revenus d'activité et allocations ont été précisément conçues pour que la reprise d'un emploi soit systématiquement plus favorable. Je suis preneur de cas concrets qui iraient à l'encontre de cet objectif. La nouvelle règle a pour effet que chaque euro de salaire procure un supplément de revenu. A l'occasion du changement de règle au 1er octobre, il se peut que de manière transitoire la nouvelle règle soit moins favorable.
Les conditions de prise en charge par l'Etat de la non-application des règles prévues pour les annexes 8 et 10 font l'objet d'une convention qui sera présentée la semaine prochaine au bureau de l'Unédic. Depuis le 1er juillet 2014, l'indemnisation est conforme aux engagements de l'Etat. Le calcul de la compensation à apporter par l'Etat est effectué par Pôle Emploi allocataire par allocataire de façon à établir une facture fiable. Les flux financiers ne sont donc pas encore mis en oeuvre mais ils sont repérés et documentés et donneront lieu à une convention.
Les évolutions envisagées dans le cadre du projet de loi Notre ont donné lieu à une opposition unanime des partenaires sociaux pour trois raisons principales : la dimension nationale de la politique de l'emploi doit être conservée, l'articulation entre indemnisation et accompagnement des demandeurs d'emploi est nécessaire, et Pôle Emploi, qui a connu une forte mutation depuis 2008, doit stabiliser son offre de services. Cet argumentaire n'enlève rien à la nécessité pour l'opérateur public de mieux s'ancrer dans les territoires et d'articuler son action avec celle des collectivités territoriales. La complémentarité avec les politiques placées sous la responsabilité des collectivités territoriales mérite d'être améliorée.
La méconnaissance des entreprises par Pôle Emploi est un constat partagé. La convention tripartite y apporte des réponses en prévoyant que des équipes dédiées sont constituées afin de faire entrer l'entreprise au sein de Pôle Emploi. Il faut améliorer le lien de confiance tout en veillant à une bonne articulation avec l'offre de services destinés aux demandeurs d'emploi.
Mme Élisabeth Doineau. - Je voudrais souligner les conséquences du chômage de longue durée sur les finances des départements. En matière de formation professionnelle des chômeurs, que pensez-vous des expériences de portefeuilles des compétences ? La segmentation des différents types de contrats de travail est plutôt un obstacle à l'emploi.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Sur longue période, la situation de l'assurance chômage s'est dégradée. Comment la dette pourra-t-elle être remboursée ? Est-il prévu d'y affecter d'éventuels excédents ? Je rejoins par ailleurs la préoccupation exprimée par mes collègues sur la segmentation du marché du travail.
Mme Catherine Procaccia. - Je souhaiterais savoir si la réforme de la durée minimale hebdomadaire du travail à temps partiel a eu un impact sur l'emploi.
Mme Annie David. - Les chômeurs parvenus à l'âge de la retraite ont souvent un faible niveau de vie. Est-il prévu de remplacer l'allocation équivalent retraite (AER) par une autre allocation, comme s'y est engagé le Président de la République ?
M. Olivier Cadic. - Je suis également préoccupé par la situation financière de l'assurance chômage. Il faut rappeler que les cotisations pèsent sur la compétitivité des entreprises. Que pensez-vous des solutions consistant à plafonner le montant des allocations et à interdire aux partenaires sociaux d'avoir recours à l'emprunt ?
M. Georges Labazée. - Je voudrais rappeler que le fait que des chômeurs basculent dans le revenu de solidarité active (RSA) représente une charge très importante pour les départements sur laquelle ils n'ont aucune maîtrise.
M. Jean Desessard. - Pourriez-vous nous faire parvenir les chiffres relatifs à l'incidence du recul de l'âge de la retraite sur les ruptures de contrat des seniors ?
Mme Corinne Imbert. - Le coût représenté par la mise en oeuvre des droits rechargeables permettra-t-il de respecter l'objectif d'économies défini pour la nouvelle convention ? Quel est l'objectif fixé pour la prochaine convention dont la renégociation est prévue en 2016 ?
Mme Chantal Deseyne. - Je m'interroge sur l'impact du travail dissimulé sur les finances de l'Unédic.
M. Daniel Chasseing. - Vous nous avez indiqué que la flexibilité du travail en France était comparable à celle d'autres pays. Elle n'est pourtant pas ressentie comme telle par les employeurs qui craignent de ne pouvoir se séparer de leurs salariés lorsque la situation l'exige.
M. Jean-Louis Tourenne. - Il n'est pas juste de considérer que la situation financière de l'Unédic s'est dégradée continûment alors qu'elle était à l'équilibre sous le gouvernement de Lionel Jospin. Je suis frappé par le fait que la situation du chômage est examinée uniquement sous l'angle comptable, sans prise en compte des effets psychologiques du chômage. Lorsqu'un salarié perd son emploi, ne serait-il pas possible de préserver son statut et sa dignité ?
Mme Isabelle Debré. - Pensez-vous que les Français sont suffisamment informés sur leurs droits à retraite ?
Mme Michelle Meunier. - Je partage les propos tenus sur l'importance des aspects psycho-sociaux du chômage. Je voudrais ajouter qu'il y aurait des mesures spécifiques à prendre pour les hommes et les femmes.
Mme Patricia Schillinger. - Pouvez-vous nous apporter des précisions sur la façon dont la Suisse compense à la France le coût de l'indemnisation du chômage des travailleurs frontaliers ? Cette indemnisation n'est apparemment que très partielle.
M. Vincent Destival. - Depuis juillet dernier, on bascule moins souvent dans les dispositifs de solidarité, car l'un des objectifs de la nouvelle convention est d'éviter que les bénéficiaires arrivent en fin de droit. On a ainsi estimé que l'économie au titre de l'allocation spécifique de solidarité (ASS) s'élèverait à 100 millions d'euros. Nous n'avons pas pu réaliser une évaluation analogue pour le revenu de solidarité active (RSA), ce dispositif n'étant pas géré par Pôle emploi, mais il y a nécessairement un effet bénéfique à en attendre.
S'agissant de la formation des demandeurs d'emploi, je rappellerai que les partenaires sociaux sont conscients des difficultés actuelles. Ils ont ainsi défendu des dispositifs comme le compte personnel de formation, qui privilégie l'individu et non son statut et qui a vocation à simplifier le paysage de la formation professionnelle, tandis que les moyens du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) sont renforcés. Le taux de retour à l'emploi des demandeurs d'emploi ayant bénéficié d'une formation demeure malheureusement faible, de l'ordre de 30 %, malgré un investissement conséquent en termes financiers et humains.
S'agissant du marché du travail français, sans préjuger de la perception que peuvent en avoir les chefs d'entreprise, nous constatons que la flexibilité externe, à travers le développement des emplois précaires, vient pallier les insuffisances de la flexibilité interne. Compte tenu des besoins de la vie économique, les entreprises recourent aux emplois précaires pour obtenir une flexibilité qu'elles ne trouvent pas par ailleurs.
Les questions d'ordre financier qui m'ont été posées, notamment en termes d'objectifs d'économies, relèvent de la compétence des partenaires sociaux. Interdire le déficit de l'assurance chômage ne me semble pas être une bonne solution. Avant les années 2000, les partenaires sociaux modifiaient rapidement les règles d'indemnisation, au risque de ne pas permettre au régime de jouer son rôle de stabilisateur automatique. La France est l'un des pays où le taux de chômage a le plus augmenté depuis 2008, tout en enregistrant une faible évolution du taux de pauvreté. Je pense que l'approche retenue dans le rapport précité de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 répond à la bonne problématique. Certains évoquent la possibilité d'abaisser le plafond des allocations d'assurance chômage. Mais une telle mesure entraînerait vraisemblablement une baisse des cotisations chez certains salariés comme les cadres, qui risquerait d'aggraver in fine le déséquilibre financier de l'Unédic, car notre système d'indemnisation est par nature assurantiel, avec une proportionnalité entre la contribution et le montant de l'allocation. Si l'Unédic devait enregistrer des excédents, ils seraient affectés à la réduction de sa dette.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - Avez-vous réalisé des prospectives financières, afin notamment de connaître l'évolution de votre dette à moyen et long terme, à l'instar de l'assurance maladie ?
M. Vincent Destival. - Au printemps 2014, nous nous sommes livrés à cet exercice, sur une période de trois ans, à partir d'hypothèse macro-économiques plus favorables que celles dont nous disposons aujourd'hui. Résultat : en 2016, la dette devait atteindre 28,5 milliards d'euros.
M. René-Paul Savary. - Quand est prévu le retour à l'équilibre de vos comptes ?
M. Vincent Destival. - Nous n'avons pas à ce jour d'horizon pour un retour à l'équilibre de nos comptes. Je constate que le chiffrage des économies issues de la nouvelle convention demeure crédible, et que les prévisions macro-économiques restent valables. Mais in fine, l'évolution de notre situation financière dépendra de la conjoncture.
Nous ne connaissons pas l'impact sur l'emploi de la durée minimale hebdomadaire du travail à temps partiel, alors que cette question est importante.
Nous vous communiquerons les références de l'étude de la Dares qui montre l'incidence du recul de l'âge de la retraite sur les ruptures de contrat des séniors.
Il revient à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), qui chapeaute le réseau des Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf) chargées de percevoir les cotisations d'assurance chômage, d'évaluer le manque à gagner pour l'Unédic que représente le travail dissimulé.
Nous n'avons pas été contactés par le Gouvernement sur le projet de réforme de l'AER.
Je ne sais pas si nos concitoyens sont suffisamment informés de leurs droits à retraite.
La proposition de conserver le statut de salarié aux personnes licenciées est l'une des caractéristiques justement du contrat de sécurisation professionnelle (CSP), qui s'adresse aux salariés dont le licenciement économique est envisagé dans les entreprises non soumises à l'obligation de proposer un congé de reclassement. Ce contrat, d'une durée maximale de douze mois, a pour objet l'organisation et le déroulement d'un parcours de retour à l'emploi, en conservant la personne au sein du collectif de travail de l'entreprise. Créé en 2011, le CSP a fait récemment l'objet d'un accord entre partenaires sociaux, afin de rendre plus incitatif le retour à l'emploi, car son efficacité demeure perfectible.
Des règlements européens assurent la coordination entre Etats au sujet de l'assurance chômage. Lors de leur révision en 2010, la Suisse a annoncé ne plus vouloir en être partie prenante. L'Unédic s'est alors retrouvée à verser les allocations aux demandeurs français transfrontaliers qui avaient travaillé en Suisse, mais sans recevoir de compensation de son homologue helvète. La Suisse a décidé, il y a deux ans, de réintégrer la coordination européenne, ce qui permet à l'Unédic de facturer une partie significative des allocations versées aux frontaliers français ayant travaillé en Suisse. C'est un progrès, même si la compensation n'est pas intégrale. Un autre problème mérite d'être signalé, celui de l'écart de salaire ces deux pays, qui rend difficile la reprise d'un travail dans l'hexagone pour les anciens salariés en Suisse.
Nous tenons à votre disposition des statistiques relatives aux femmes. Parmi les 20 % de nos allocataires indemnisés pour un emploi occupé à temps partiel, la plupart sont des femmes. De même, environ 60 % des 30 000 cas qui posent difficulté dans l'application des droits rechargeables les concernent.
Organisme extraparlementaire - Désignation
La commission propose la candidature de M. Georges Labazée pour siéger au sein du Comité de surveillance du Fonds de solidarité vieillesse.
La réunion est levée à 11 h 48.
Adaptation de la société au vieillissement - Audition de Mmes Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie
La réunion est ouverte à 16 heures 45.
Au cours d'une deuxième réunion tenue dans l'après-midi, la commission procède à l'audition de Mmes Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie, sur le projet de loi n° 804 (2013-2014) adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'adaptation de la société au vieillissement (MM. Georges Labazée et Gérard Roche, rapporteurs).
M. Alain Milon, président. - Nous avons le plaisir de recevoir Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie pour débattre avec elles du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement. Les rapporteurs du projet devant la commission des affaires sociales sont MM. Labazée et Roche ; Mme di Folco est rapporteure pour avis de la commission des lois.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. - Les sujets du vieillissement et de la perte d'autonomie sont pour nos concitoyens des préoccupations quotidiennes. Comme vous, Laurence Rossignol et moi avons été parlementaires. Nous avons été confrontées, dans nos permanences, à des demandes très fortes de soutien, d'accompagnement, parfois d'hébergement, pour des personnes âgées vieillissantes, dont certaines avaient perdu leur autonomie.
Notre démarche ne doit pas être purement administrative. Le vieillissement de notre population est un phénomène heureux. La société attend des réponses structurantes pour faire face à ce qu'elle perçoit comme un défi, notamment financier. Sans doute cela explique-t-il qu'au cours des dix dernières années les responsables politiques ont beaucoup parlé de ce que l'on nommait la dépendance, sans avancer de proposition nouvelle. Dès 2012, nous avons engagé l'élaboration de cette loi, conformément à l'engagement pris par le Président de la République. Je tiens à rendre hommage à Michèle Delaunay, qui a oeuvré à la préparation de ce texte. Il appartient désormais à Laurence Rossignol de le défendre devant la représentation nationale.
L'examen du texte s'est déroulé dans des conditions particulièrement satisfaisantes à l'Assemblée Nationale. Les députés lui ont apporté des améliorations importantes, consolidant notamment la gouvernance locale de la politique en faveur de l'autonomie des personnes âgées. Vos débats seront, je n'en doute pas, tout aussi fructueux et constructifs. Laurence Rossignol vous présentera en détail le texte issu des travaux de l'Assemblée. Je souhaiterais pour ma part vous exposer les points essentiels qui ont guidé sa construction.
Notre premier choix est de favoriser le maintien à domicile. Ce texte ne concerne donc pas l'hébergement dans des établissements spécialisés. Non qu'il n'y ait aucune question à se poser à ce sujet, mais la première demande de nos concitoyens nous semble être de rester chez eux aussi longtemps que possible. Cette priorité est cohérente avec d'autres choix de la politique gouvernementale, en particulier de la loi de santé, qui met en place une organisation de proximité favorisant le maintien à domicile de personnes malades. Associations et élus ont porté cette demande tout au long de la concertation. Plusieurs mesures, sur lesquelles je reviendrai, traduisent cette ambition : ainsi l'aide à l'adaptation des logements ou encore le soutien aux proches aidants.
Nous voulons apporter des réponses aux inégalités face au vieillissement. Si le temps passe à la même vitesse pour tous, il ne produit pas les mêmes effets, et l'âge accentue les disparités sociales, du fait des conditions de travail ou de logement, et des possibilités inégales de prévention. Il importe donc d'anticiper et de repérer les premiers facteurs de la perte d'autonomie, afin de la prévenir tout au long de la vie. Cette loi aura des effets concrets sur le quotidien de nombreuses personnes : toutes n'ont pas, par exemple, les moyens de réaménager leur intérieur. Un plan national d'adaptation assurera la rénovation de 80 000 logements d'ici 2017. Transformer une salle de bains, faciliter l'accès d'un appartement à un fauteuil roulant semblent des objectifs modestes ; pourtant, quel soulagement pour les personnes qui bénéficieront de cette aide !
Nous avons fait le choix résolu de poursuivre le mouvement de prise en charge collective du vieillissement. Si ce principe semble acquis, vous vous rappelez que d'autres propositions ont, récemment encore, été défendues : elles tendaient à faire évoluer notre système vers une prise en charge au moins partiellement privée, reposant sur la souscription d'assurances. Nous nous inscrivons au contraire dans la perspective ouverte par le gouvernement de Lionel Jospin, lorsqu'il a créé l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). La loi d'adaptation de la société au vieillissement constitue une nouvelle étape de cette politique : l'APA sera revalorisée afin d'accroître l'accompagnement à domicile et le reste à charge financier sera réduit.
Notre choix se porte ainsi sur le financement solidaire de l'accompagnement de la perte d'autonomie : la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa) financera l'ensemble des droits nouveaux. Elle est désormais intégralement affectée à la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Les ressources qui ne seront pas utilisées en 2015 iront à la politique d'accompagnement de la perte d'autonomie. 300 millions d'euros seront ainsi dédiés à un plan pluriannuel d'aide à l'investissement sur la période 2015-2017.
Laurence Rossignol et moi avons décidé d'affecter une partie de la Casa à une mesure de justice sociale pour les salariés de l'aide et des soins à domicile. En décidant d'agréer l'avenant salarial signé par les partenaires sociaux en novembre dernier, nous autorisons la revalorisation de 1% des salaires, gelés depuis 2009, avec un effet rétroactif au 1er juillet 2014. Cette mesure modeste a été saluée comme le début d'un déblocage longtemps attendu. Elle bénéficiera aux 230 000 professionnels du secteur - dont 97 Di% sont des femmes - qui oeuvrent au quotidien pour améliorer la prise en charge des personnes fragilisées.
Nous faisons enfin le choix stratégique de porter une politique globale. Le vieillissement n'est pas un phénomène uniforme, et nous n'entendons pas nous concentrer uniquement sur la perte d'autonomie. Nous soutenons un projet de transformation de l'ensemble de l'action publique pour tenir compte des besoins des personnes âgées, notamment en matière de transports ou de logement. Notre politique tient également compte de la place déterminante qu'occupent les personnes âgées au sein de notre société. Le projet de loi entend favoriser leur engagement associatif et leur participation citoyenne, afin que cette période de leurs vies soit un temps de transmission et d'entraide.
Le projet de loi accorde enfin une place décisive au soutien aux aidants familiaux. Ils sont plus de 4,3 millions dans notre pays à accompagner et soutenir leurs proches. Une étape a été franchie lorsque la loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites a supprimé toute condition de ressources pour l'affiliation gratuite à l'allocation vieillesse des parents au foyer. La continuité dans les droits à la retraite des aidants est ainsi mieux garantie. Cette loi a également créé une nouvelle majoration de durée d'assurance pour les aidants familiaux d'un adulte dépendant. Le texte que nous vous présentons aujourd'hui ira plus loin, en instaurant notamment un droit au répit : 500 euros seront attribués chaque année à tout aidant afin qu'il puisse recourir à des aides extérieures et bénéficier de périodes de repos.
Ce texte s'inscrit dans la continuité de la politique menée par le Gouvernement depuis bientôt trois ans : nous renforçons notre protection sociale en l'adaptant aux nouveaux besoins et aux nouvelles aspirations de nos concitoyens. Nous faisons de la prévention un élément clef des mesures visant à prolonger la vie en bonne santé. Nous réduisons le reste à charge des familles. Nous répondons à l'aspiration d'autonomie et de dignité des personnes âgées. Son examen est un temps fort dans l'expression des ambitions sociales du Gouvernement, et nos échanges permettront de l'améliorer.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. - Lors de la présentation de l'agenda des réformes, en décembre dernier, le Premier ministre s'est engagé à ce que ce projet de loi, très attendu par les professionnels, les élus, et surtout par nos concitoyens, soit définitivement adopté et ses décrets d'application publiés avant la fin de 2015, pour une entrée en vigueur pleine et entière au 1er janvier 2016.
Ce texte répond à des attentes fortes, auxquelles vous avez certainement été confrontés en tant qu'élus. En dissociant vieillesse et déclin, il promeut un changement de regard sur les personnes âgées. Il mobilisera la société toute entière autour du défi du vieillissement, dans sa double dimension du bien vieillir et de la protection des plus vulnérables.
Cela suppose de se donner les moyens de repérer et de combattre les facteurs de risque. C'est pourquoi ce projet de loi prévoit de développer des actions de prévention définies par le nouveau plan national de prévention de la perte d'autonomie, articulé autour de la préservation de l'autonomie, de l'adaptation de l'environnement, et du repérage des fragilités. Il contient des actions déjà amorcées, comme la lutte contre l'isolement par le dispositif Monalisa, que vous connaissez sans doute dans vos départements, ou encore l'expérimentation Paerpa (Parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d'autonomie), qui accompagne par exemple les sorties d'hospitalisation. D'autres actions sont encore à développer : promotion d'une alimentation saine et de l'activité physique, prévention de la dépression, actions en faveur d'un bon usage des médicaments. Le texte prévoit également de faciliter l'accès aux aides techniques modernes, non substituables, mais bien complémentaires des aides humaines.
La prévention de la perte d'autonomie ne pourrait être réalisée sans la mobilisation de l'ensemble des politiques publiques. Le second axe de ce projet de loi, le plus interministériel de tous, adapte les politiques publiques au vieillissement. Celles du logement, de l'urbanisme et des transports sont particulièrement sollicitées.
Un plan national d'adaptation de 80 000 logements privés d'ici à 2017, associant la Caisse nationale d'assurance vieillesse et l'Agence nationale de l'habitat, est programmé. Dès cette année, la Casa contribuera au financement de l'Anah à hauteur de 20 millions d'euros pour la rénovation de 15 000 logements.
La vie à domicile devient parfois difficile sans pour autant que la vie en établissement paraisse souhaitable. C'est pourquoi nous tenons à développer et moderniser les formes d'habitat collectif pour personnes âgées. Les missions des logements foyers, renommés « résidences autonomie », seront redéfinies en vue d'un renforcement des actions de prévention, grâce à une aide financière, le forfait autonomie, versée à ces résidences sur la base de conventions. Le régime juridique des résidences services sera quant à lui sécurisé. Le paiement des services rendus dans ces structures ne sera dû que lorsqu'ils seront réellement utilisés.
Anticiper la perte d'autonomie ne signifie pas nier son existence. Comme l'a souligné Marisol Touraine, l'accompagnement à domicile constitue un axe fort de ce projet de loi. Le second acte de l'APA est une réforme importante, qui donne accès à davantage de prestations et réduit la participation financière des usagers. Il s'agit également d'une illustration concrète de la politique de justice sociale menée par le Gouvernement puisque, dès 2016, le reste à charge sera réduit pour les 60 % de bénéficiaires de l'APA qui vivent à domicile, soit 730 000 personnes. En outre, celles dont les plans d'aide sont les plus lourds, et qui ont atteint le maximum de prise en charge, pourront bénéficier d'une heure d'APA supplémentaire par jour.
Accompagner les personnes âgées à domicile, c'est aussi donner aux proches qui les aident les moyens de prendre du repos. Ils sont soutenus par cette loi, qui reconnait leur rôle dans l'accompagnement et leur droit au répit, en finançant l'accueil ou l'hébergement temporaire de la personne aidée dans une structure adaptée.
Continuer de vivre à son domicile n'est cependant pas toujours la meilleure solution. Nous tenons à ce que le choix d'entrer dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) soit parfaitement éclairé sur le plan financier, par la publication des tarifs sur la base d'un socle de prestations identiques dans toutes les structures. Le groupe de travail sur la simplification et la modernisation de la tarification des Ehpad lancé le 9 décembre dernier, étudie actuellement les moyens d'améliorer l'efficience des établissements et d'en responsabiliser les gestionnaires. Il doit rendre ses travaux d'ici la fin du mois de juin.
Les droits et libertés des personnes âgées sont réaffirmés afin de garantir qu'elles soient traitées dignement. Des mesures sont prévues pour lutter contre les abus de faiblesse. Le contrat de séjour en établissement pourra intégrer, si nécessaire, une annexe contenant les mesures prises pour assurer le respect de l'intégrité physique de la personne et sa sécurité.
Le projet de loi engage une réflexion commune sur la délicate question du consentement et de l'expression de la volonté des personnes âgées, lorsqu'elles rencontrent des difficultés dans la connaissance et la compréhension de leurs droits. Elles auront désormais la possibilité de désigner une personne de confiance qui les accompagne dans leurs démarches. Nous sommes toutefois soucieux de ne pas restreindre à l'excès la parole de ceux de nos concitoyens que l'âge a rendu particulièrement vulnérables.
Ce projet de loi comporte également un volet transversal relatif à la gouvernance. Les députés ont en effet voté, sur proposition du Gouvernement, la réintégration des articles relatifs à la gouvernance locale, après un travail de mise en cohérence avec l'attribution des compétences sociales aux départements. La représentation des personnes âgées est unifiée et trouve pleinement sa place au sein de cette gouvernance, au travers notamment des conseils départementaux de la citoyenneté et de l'autonomie (CDCA). Elle favorisera la coordination institutionnelle et la participation des principaux intéressés à l'élaboration des politiques publiques de l'autonomie.
Le Haut Conseil de la famille et des âges de la vie (HCFAV) aura pour mission d'apporter aux pouvoirs publics une expertise prospective et transversale sur les questions liées aux familles et à l'enfance, à l'avancée en âge et à l'adaptation de la société au vieillissement.
Quant au financement des mesures nouvelles, le Gouvernement n'a pas la prétention de répondre à l'ensemble des besoins avec l'enveloppe dédiée, qui était connue dès l'ouverture de la concertation. Dans la situation actuelle de tensions sans précédent sur les finances publiques, les 650 millions d'euros de la Casa en 2015, qui évolueront à la hausse, représentent un effort important rendu possible grâce à la solidarité nationale et à l'engagement présidentiel. Avec 78 millions d'euros pour le nouveau droit au répit des aidants et 375 millions d'euros pour la réforme de l'APA à domicile et l'amélioration des conditions de travail des intervenants, l'Etat mobilisera 453 millions d'euros par an, soit une revalorisation de 13 % du budget de l'APA à domicile. Ces dépenses supplémentaires changeront le quotidien des familles dès l'entrée en vigueur de la loi. 5 millions d'euros viendront par ailleurs alimenter le fonds de compensation du handicap.
Le volet anticipation est lui aussi doté d'un budget conséquent : 185 millions d'euros par an. Enfin, pendant la phase de montée en charge des mesures financières pérennes de la loi, une enveloppe de 84 millions d'euros financera des actions d'adaptation des logements et de modernisation des résidences autonomie. Des mesures ont déjà été arrêtées avant l'adoption définitive du texte : 20 millions d'euros sont consacrés au plan national d'adaptation des logements privés à la perte d'autonomie porté par l'Anah ; nous avons décidé de la revalorisation des salaires de la branche de l'aide et des soins à domicile avec une compensation du coût auprès des départements pour un montant de 25 millions d'euros. La Casa non consommée en 2015 sera en partie utilisée pour le financement d'un plan pluriannuel d'aide à l'investissement, qui doit être doté de 300 millions d'euros pour la période 2015-2017, dont 100 millions d'euros en 2015. Le reste sera bien affecté aux réserves de la CNSA, comme cela apparaît dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.
Plusieurs actions ont déjà été engagées en amont afin d'enrichir ce texte et de préparer au mieux son entrée en vigueur. Les départements seront ainsi appelés à candidater afin de participer à la préfiguration de la conférence des financeurs. Les conclusions du groupe de travail sur les Ehpad viendront progressivement alimenter le projet de loi. Quant à la question des résidences services, le texte pourra être enrichi des dispositions proposées par l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD).
Je voudrais enfin aborder la situation des services d'aide à domicile. Le rapport sénatorial de juin 2014 de Jean-Marie Vanlerenberghe et Dominique Watrin sur l'aide à domicile auprès des publics fragiles nourrira probablement vos débats. Je sais que les rapporteurs sont attentifs au problème de la dualité des régimes juridiques d'agrément ou d'autorisation des service d'aide à domicile, qui est 1'héritage de la loi Borloo de 2005. Le projet du Gouvernement porte déjà aux articles 31 et 33 la promotion de la contractualisation (Cpom), préconisée par les députées Martine Pinville et Bérengère Poletti, pour une convergence vers un régime unifié. Sur ce sujet complexe, je suis à l'écoute du Parlement. L'évolution devra préserver les services existants, quel que soit leur statut - privé, lucratif, associatif ou public -, qui emploient 450 000 personnes. 56 % des Saad associatifs et publics sont uniquement agréés par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte). Mon objectif est de structurer une offre d'accompagnement à domicile de qualité, solide, innovante et économiquement viable. Une réforme organisationnelle et culturelle est indispensable pour cela, et les acteurs de terrain y sont favorables. Je l'ai engagée par la promotion des services polyvalents d'aide et de soins à domicile (Spasad) qui décloisonnent les interventions afin de rompre l'isolement des professionnels par un travail en équipe valorisant et des perspectives d'évolution de carrière. J'ai fixé un cap à cinq ans pour conduire cette transformation.
M. Georges Labazée, rapporteur. - Nous avons besoin de clarifications sur le financement. Le Gouvernement a fléché des crédits de la Casa vers le fonds de solidarité vieillesse en 2013 et 2014. Nous avons ensuite été assurés qu'à partir de 2015 le produit de la Casa serait orienté vers le projet de loi en discussion à l'Assemblée nationale. Or le jeu des navettes fait que le texte ne sera pas voté avant la fin de l'année 2015. Comment s'établiront les articulations des financements ? Une partie de l'argent qui ne sera pas utilisé cette année ira-t-elle au plan d'aide à l'investissement, comme il en avait été question lors du débat sur la loi de financement de la sécurité sociale ?
Nous avons reçu aujourd'hui les représentants de la CNSA. Nous nous sommes penchés avec eux sur le détail des financements - ceux notamment du relèvement du plafond d'aide, de la réduction du ticket modérateur, du dispositif, très important à nos yeux, du droit au répit - et leur avons demandé comment ils entendaient flécher les crédits à destination des départements. Leur réponse, globale, nous inspire une certaine inquiétude. Un fléchage précis, indiqué d'emblée, aiderait les départements à répartir les nouveaux crédits que leur destine le projet de loi.
M. Gérard Roche, rapporteur. - Les articles 9 et 10 tendent à favoriser l'engagement bénévole des personnes âgées. Vous proposez de limiter la délivrance de l'attestation de tutorat d'un jeune en service civique aux seules personnes âgées de 60 ans et plus. Or, les personnes que nous avons reçues nous ont assuré que le système actuel fonctionnait et que l'article 9 n'apporterait rien. Quant à la notion de « service civique senior » introduite à l'article 10, elle fait craindre aux associations une séparation entre de bons volontaires reconnus et d'autres qui ne le seraient pas. Le label « service civique senior » ne leur paraît pas nécessaire.
M. Georges Labazée, rapporteur. - Le projet de loi transforme les logements-foyers en résidences autonomie. Certains bénéficiaient d'un forfait soins. Vous prévoyez un nouveau forfait autonomie, auquel sont affectés 40 millions d'euros. Pourquoi exclure du forfait autonomie les résidences bénéficiant du forfait soins ?
M. Gérard Roche, rapporteur. - Le recul de l'âge moyen d'entrée en Ehpad de dix ans environ créait un vide entre ce moment et celui où les personnes âgées ne peuvent plus vivre à leur propre domicile. Vous l'avez comblé en créant les résidences autonomie. Quant aux résidences services, si certaines sont partagées entre copropriétaires et bien encadrées par l'article 15 du projet de loi, les résidences services de nouvelle génération, gérées par un unique propriétaire bailleur, appellent un encadrement légal. A minima, l'adoption d'une charte de bons comportements semble nécessaire pour protéger leurs locataires. Nous restons donc très prudents.
M. Georges Labazée, rapporteur. - La dualité des dispositifs d'agrément et d'autorisation suscite de vives discussions et fait même l'objet d'une procédure européenne qui pourrait nous valoir une condamnation. Envisagez-vous une convergence vers un unique régime d'autorisation ?
M. Gérard Roche, rapporteur. - Si la création d'un Haut Conseil de l'âge semblait extrêmement intéressante, celui-ci s'intitule désormais « Haut Conseil de la famille et des âges de la vie ». L'ancienne appellation avait pourtant le mérite d'attirer l'attention sur le problème du vieillissement. Quitte à réduire le nombre d'instances nationales de réflexion, n'aurait-il pas mieux valu rapprocher ce haut conseil des instances représentatives des personnes handicapées, afin de lui conférer une compétence globale sur l'ensemble du champ de l'autonomie et d'assurer sa cohérence avec la gouvernance qui se mettra en place au niveau départemental dans les conseils départementaux de la citoyenneté et de l'autonomie ? Nous aurions, en tout état de cause, préféré un Haut Conseil de l'âge.
M. Georges Labazée, rapporteur. - L'article 54 ter crée les maisons départementales de l'autonomie. Les départements ont eu, ces dernières années, à structurer les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) en leur donnant la forme de groupements d'intérêt public. Les associations sont très attachées au maintien de ce statut. Qu'en pensez-vous ? Quelles sont vos préconisations à ce sujet ?
M. Gérard Roche, rapporteur. - Le Conseil constitutionnel a estimé, en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), que le président d'un conseil général ne pouvait être juge et partie dans le contentieux de l'aide sociale. Le projet de loi prévoit d'habiliter le Gouvernement à réformer ce contentieux, notamment par la création d'un recours administratif préalable obligatoire. Nous n'y sommes pas favorables. Concernant la protection des droits des personnes âgées, nous avons reçu hier les représentants des institutions de tutelle - associations et tuteurs privés - dont les demandes m'ont cependant semblé difficiles à synthétiser.
Mme Catherine di Folco, rapporteure pour avis de la commission des lois. - Un éclaircissement supplémentaire sur les ordonnances prévues à l'article 55 paraît en effet nécessaire.
Mme Marisol Touraine, ministre. - J'ai pris des engagements lors de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale : contrairement aux années précédentes, les ressources produites par la Casa seront affectées aux réserves de la CNSA, de manière à ce que nous puissions garantir l'engagement de programmes indépendamment du programme pluriannuel déjà prévu. Ce sera donc une démarche indépendante du calendrier parlementaire.
Loin de vouloir instaurer pour les bénévoles une espèce de podium fictif, le projet de loi entend créer, à travers le service civique senior, une gratification symbolique. Si nous pouvons évidemment en discuter, je regretterais que cette formalisation de la reconnaissance que nous leur devons ne puisse intervenir dans la loi. Cela dit, je suis ouverte sur les modalités.
Le débat sur les maisons de l'autonomie n'est pas nouveau. Partisans et détracteurs du passage des MDPH à des maisons de l'autonomie se sont exprimés lors de l'élaboration de la loi. Y sont particulièrement opposées les associations représentant les personnes handicapées, qui craignent que la spécificité du handicap ne soit oubliée. La rédaction de la loi autorise donc une évolution là où elle paraît utile. Elle a déjà eu lieu dans certains départements. Il s'agit désormais de travailler à un cahier des charges qui puisse être décliné localement, au gré des acteurs.
La question des contentieux relève de bien d'autres ministères que du seul ministère des affaires sociales, en particulier de la chancellerie. Nous avons besoin d'une harmonisation des procédures. Les recours amiables ou contentieux contre les autorités de tutelle sont des procédures classiques du droit administratif français.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - Georges Labazée a évoqué les financements. Cette loi a été construite d'une manière inédite : nous sommes partis des recettes - c'est-à-dire de l'enveloppe annuelle de la Casa - pour déterminer les dépenses. C'est donc par définition une loi pleinement financée, ce qui doit nous rassurer.
Le service civique senior ? J'ai observé, pour avoir été longtemps élue locale chargée de la vie associative, que les retraités en sont la principale ressource humaine. C'est pourquoi nous avons abordé la question de la reconnaissance symbolique de cet engagement, qui fait d'eux la réserve de la République. Je suis toutefois ouverte à l'évolution du texte sur ce point.
L'article 11 pose en principe que le forfait autonomie sera attribué aux résidences autonomie, à l'exception de celles qui perçoivent déjà le forfait soins courants. Les crédits du forfait autonomie sont donc concentrés sur les structures les moins pourvues en personnel, afin qu'elles puissent mutualiser leurs crédits et regrouper leurs actions. Destiné à rémunérer les actes infirmiers, le forfait soins garantit la présence d'un personnel qualifié en matière de prévention de la perte d'autonomie.
J'attends le rapport de l'Igas et du CGEDD sur les résidences services de première génération pour déterminer la réalité et les dimensions du problème qu'elles posent. L'Igas a attiré notre attention sur la nécessité de ne pas déstabiliser les structures existantes.
Quant aux résidences services de seconde génération, l'essentiel des réponses se trouve dans la charte des bonnes pratiques. Aucun financement public ne leur étant destiné, il s'agit plutôt de régulation et de contractualisation avec leurs habitants, au travers des chartes des droits et devoirs des locataires, et surtout des bailleurs. Je vous communiquerai, dès que j'en disposerai, les préconisations des rapports sur ce sujet. Je suis bien entendue ouverte aux propositions du Sénat pour la protection des consommateurs.
Le double régime d'agrément ou d'autorisation des services d'aide à domicile ne coïncide pas avec la dualité des activités lucratives ou non : toutes les entreprises privées ne sont pas agréées et toutes les associations ne sont pas autorisées. Si cette dualité n'existait pas, je ne la créerais pas.
Les articles 31 et 33 sur les Cpom favorisent la convergence de ces deux régimes. Nous sommes cependant soumis à la pression d'une saisine de la Commission européenne au motif d'une distorsion à la concurrence. La discussion est ouverte et je suis toute prête à écouter les propositions du Sénat.
J'ai hérité d'un projet de loi dont je ne suis que la mère porteuse, puisqu'il avait déjà été validé par le Conseil d'Etat. A la différence de mes prédécesseurs, j'ai un portefeuille large où figurent l'enfance, la famille et les personnes âgées. La création du Haut Conseil de l'âge figurait dans le texte dont j'ai hérité. Il existait déjà un Haut Conseil à la famille et une demande forte se manifestait en faveur de la création d'une structure identique pour l'enfance. Il m'a semblé judicieux d'envisager les âges de la vie dans leur ensemble. La famille est un immeuble, avec une génération par étage et des femmes qui circulent dans l'escalier pour aller s'occuper de chaque âge. Mon objectif est de créer des monte-charges et de faire sortir les hommes dans les escaliers, bref de faciliter le travail des femmes. Qu'il s'agisse de l'aide aux personnes âgées, de la garde des enfants pendant les vacances ou du soutien aux grands-parents, les femmes sont en première ligne. Le sujet des aidants concerne tout autant le Haut Conseil à la famille que les personnes âgées. Il en va de même pour tout un ensemble de sujets qui portent sur la vie des générations dans la structure de solidarité qu'est la famille. Vous avez fait allusion, monsieur le rapporteur, à la volonté exprimée par le Gouvernement de ne pas multiplier les autorités. Ma demande est fonctionnelle en plus d'être sociologique. Il serait vain de construire trois silos empêchant le dialogue sur des sujets connexes. En intégrant les trois sections de l'enfance, de la famille et des personnes âgées, le Haut Conseil de la famille et des âges de la vie favoriserait l'interaction entre les acteurs et la fluidité dans le traitement des sujets.
Enfin, le contentieux sur l'aide sociale est un sujet technique et interministériel. Si vous souhaitez le faire évoluer, nous n'y sommes pas hostiles.
M. Jean-Marie Morisset. - Ce projet de loi est très attendu par les acteurs de terrain. Il répond à des défis sociaux et financiers, à des défis en termes de pouvoir d'achat, à des défis du quotidien, lorsqu'il s'agit d'accompagner les aidants. Beaucoup s'attendaient à ce que cette loi ne se limite pas au maintien à domicile, mais apporte un soutien aux 10 000 établissements présents sur notre territoire. Je regrette que ce ne soit pas le cas, et qu'aucune aide ne vienne encourager la politique volontariste des départements pour développer les Ehpad. Vous avez dit que c'était une bonne méthode de partir des recettes pour définir les dépenses ; je croyais qu'il fallait faire l'inverse : recenser les besoins pour chercher ensuite les recettes. Quant à la Casa, vous constatez qu'elle est limitée. Pourquoi ne pas l'avoir affectée à son objet dès 2013 ? En prévoyant la disparition du régime d'agrément au profit de l'autorisation, ce projet de loi bouleverse les 2 872 établissements de France qui devront souscrire des contrats pluriannuels, pour continuer à accompagner les personnes à domicile, à moins qu'ils ne cessent tout simplement leur activité. A cela s'ajoute le désengagement des caisses de retraite sur le terrain. Comment remédier à cet abandon ? Le cas des personnes handicapées vieillissantes est peu pris en compte. Certains départements les prennent en charge, ce qui soulage les établissements et services d'aide par le travail (Esat), car parfois une personne handicapée devient vieillissante à cinquante ans. Ne faudrait-il pas également simplifier la procédure de la double compétence des ARS et des conseils généraux, pour faciliter le transfert des aides aux départements ? Enfin, beaucoup d'acteurs craignent que cette loi soit publiée tardivement. Elle a été annoncée pour le 1er janvier 2016. Il faudrait faire en sorte que les crédits de la Casa restent disponibles jusqu'à cette date.
M. Jean-Noël Cardoux. - Vous vous satisfaisez d'avoir aligné les dépenses sur les recettes. Notre lecture est moins optimiste : comment utiliser les montants de la Casa limités à 645 millions pour financer le maintien à domicile et la prévention du vieillissement ? Si on limite les recettes, la loi manquera forcément de souffle. Plusieurs réformes de fond auraient mérité d'être abordées, comme celle de l'APA, pour réévaluer les niveaux de GIR et les aides allouées en fonction de ces niveaux. Vous souhaitez diminuer le reste à charge en fonction du niveau du GIR - le GIR 1 étant plus aidé que le GIR 3 - alors qu'une logique de justice sociale voudrait que ce reste à charge soit plus élevé pour les gros revenus et plus modeste pour les autres. Vous n'abordez pas non plus la réforme de la tarification des établissements, alors que beaucoup de conseils généraux souhaitaient que leurs présidents puissent prendre des arrêtés fixant un tarif pour les ressortissants de l'aide sociale, et des tarifs pour les autres, dans une démarche d'équité garantissant un certain équilibre au sein des Ehpad. Les problèmes dont nous avons hérité sur l'aide à domicile découlent de la loi de 2005. Cependant, vous ne réformez qu'à la marge. Certains intervenants à domicile sont assujettis à la taxe sur les salaires, d'autres non. Une réforme de fond consisterait à assujettir l'ensemble des prestations à domicile au taux réduit à 5,5 % de TVA, qui mettrait tout le monde sur un pied d'égalité avec un amortissement du coût horaire. Enfin, je continue de m'interroger sur la réticence du Gouvernement à utiliser la démarche assurantielle privée pour couvrir la dépendance. Deux leviers inciteraient les futurs éventuels dépendants à s'assurer : le recours sur succession et l'obligation alimentaire. Cette loi contient de bonnes dispositions, mais elle est limitée par le manque de ressources financières.
M. Michel Amiel. - On ne peut que se féliciter de l'aspect prévention de la loi. Il n'en demeure pas moins qu'à un moment donné le maintien à domicile devient impossible, et on ne peut pas éluder la question de la dépendance. Ne faudrait-il pas favoriser une approche plus globale de l'APA plutôt que de se concentrer uniquement sur le maintien à domicile ? De nouveaux métiers pourraient être créés dans le domaine du maintien à domicile, avec des possibilités de défiscalisation supplémentaire, ce qui provoquerait un manque à gagner. Enfin, ne pourrait-on pas développer les microstructures d'accueil familial pour accueillir les personnes âgées en dehors des établissements ?
M. Dominique Watrin. - On connaît les difficultés financières de l'Anah et de la Cnav. Par anticipation de la loi vieillissement, il est prévu d'attribuer 20 millions d'euros à l'Anah, dès 2015, puis 20 millions d'euros l'année suivante. Un aménagement coûte souvent plusieurs milliers d'euros. Les aides de l'Anah ne sont attribuées qu'aux plus modestes, ceux dont le revenu est inférieur à 1 200 euros par mois, pour couvrir la moitié de leurs frais. Comment financeront-ils l'autre moitié ? A quelles aides peuvent prétendre les autres propriétaires occupants qui touchent plus de 1 200 euros par mois sans pour autant être riches ? L'amélioration de l'APA va dans le bon sens, avec notamment les 153 millions d'euros dont disposeront les départements pour compenser l'augmentation des plafonds. Cependant, si l'on considère qu'une heure d'aide à domicile coûte 21 euros en moyenne, ce montant couvre 7 millions d'heures par an, soit 600 000 heures par mois, 5 heures par mois pour les plus dépendants et donc au final une heure par semaine seulement, et pas une heure par jour, comme l'avait annoncé Jean-Marc Ayrault. Pourriez-vous nous préciser les résultats de l'étude d'impact qui a été menée sur le sujet ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Les orientations de ce projet de loi sont bonnes, mais les moyens sont limités. La Cour des comptes a préconisé la fusion entre la Casa et la CSG vieillesse. Cela simplifierait la lecture des contributions et des cotisations. Avec mon collègue Dominique Watrin, nous avons préconisé de maintenir un système d'autorisation pour l'aide à domicile, sans supprimer les avantages offerts par l'agrément. Il faut trouver un juste équilibre. Je suis heureux que vous soyez à notre écoute sur le sujet. Quant à l'APA, nous souhaitions le doublement voire le triplement de ce que vous accordez sur les tarifs horaires de l'aide à domicile. C'est une aumône quand on voit les difficultés qu'ont les associations à gérer leur personnel, dont l'indice de salaire vient d'être revalorisé, alors qu'il était gelé depuis 2009. Il est indispensable d'aider les départements à améliorer les tarifs de l'aide à domicile. Ces derniers varient de 17 à 25 euros, avec une moyenne à 21 euros. Vous avez fixé au 30 juin 2015 la date à laquelle vous commencerez à tirer les conséquences des expérimentations tarifaires. Le délai est court. Je m'en réjouis néanmoins, car les expériences qui ont été menées dans une quinzaine de départements méritent un examen approfondi. La globalisation de la prestation contribue à améliorer les conditions de travail des intervenants qui sont souvent obligés de se déplacer. Il faut aller vite. Enfin, il existe actuellement une centaine de Spasad. Ces services sont une voie de progrès pour décloisonner les actions.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - Je comprends les frustrations qui se sont exprimées par rapport à ce projet de loi. La collectivité publique consacre 12 milliards d'euros par an à la prise en charge du vieillissement ; il faudrait trois à quatre milliards de plus pour répondre à l'ensemble des besoins. Tant que le redressement des comptes publics n'aura pas produit ses effets, la situation restera difficile. Cependant, cela fait au moins dix ans que l'on évoque ce projet de loi. Il est là, aujourd'hui. Nous ne pouvons que nous en féliciter. La prise en charge de nouvelles dépenses sociales, la création de nouveaux droits sociaux sont des mesures exceptionnelles qui indiquent que le Gouvernement et l'ensemble de la représentation nationale considèrent la question du vieillissement de la société comme une priorité. J'ai mis en place un groupe de travail pour garantir aux usagers une meilleure lisibilité des tarifs pratiqués dans les Ehpad. Les compensations n'ont fait que se dégrader depuis une quinzaine d'années. Nous avons commencé à relever leur montant. Les compensations versées par l'Etat via la CNSA étaient de 43 % en 2002, 32 % aujourd'hui. La loi devrait nous permettre d'arriver à 36 %. La double compétence de l'ARS et des conseils généraux est rendue nécessaire par la nature même de la prise en charge du vieillissement. Elle peut néanmoins être fluidifiée.
Monsieur Cardoux, le reste à charge dépend des ressources des bénéficiaires. Le ticket modérateur peut passer de 90 % à 0 % selon les revenus du bénéficiaire de l'APA. On ne peut forcer personne à souscrire un contrat assurantiel. On peut néanmoins se demander pourquoi ces contrats n'ont pas plus de succès. Une difficulté est sans doute que les compagnies d'assurance ont leurs propres critères d'évaluation de la perte d'autonomie. Il faudrait sans doute harmoniser ces critères pour faciliter le succès de ces contrats. Il n'en reste pas moins que la structure principale de prise en charge est d'abord la solidarité collective.
Monsieur Amiel, les 650 millions d'euros ne vont pas qu'à l'APA. La prise en charge du vieillissement ne se limite pas à compenser la perte d'autonomie. Elle tient compte de tout un environnement. C'est en travaillant sur cet environnement que l'on retardera la perte d'autonomie et la nécessité de recourir à l'APA. Quant aux dépenses d'adaptation de l'habitat, elles ne sont pas forcément élevées : il peut simplement s'agir de remplacer une baignoire par une douche à l'italienne ou de réorganiser une maison en rez-de-chaussée.
Monsieur Vanlerenberghe, l'augmentation des salaires dans la branche de l'aide à domicile est attendue ; elle sera rétroactive au 1er juillet 2014. J'attache une importance particulière aux Spasad. Les expériences existantes nous encouragent à aller plus loin dans cette voie.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Vous repoussez l'évaluation des expérimentations prévues par le projet de loi à septembre 2016.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - On ne peut pas réformer la société française sans l'adhésion des acteurs qui portent ces réformes. Le secteur de l'aide à domicile est mûr pour que soit expérimenté le modèle des Spasad. Les dates seront toilettées au Sénat en fonction de la nouvelle date d'application prévue pour la loi.
Mme Corinne Imbert. - Ce projet de loi a été pensé dans la perspective d'une politique globale, qui est aussi celle qu'ont adoptée les départements pour élaborer leurs schémas. En ce qui concerne les aides de l'Anah pour l'adaptation des logements, le compte n'y est pas. Je me réjouis néanmoins des moyens mis en oeuvre, car en 2012, on avait diminué la part consacrée à l'autonomie des personnes. Cette erreur est corrigée. Je partage les inquiétudes de mes collègues sur l'aspect financier de cette loi. J'ai bien peur que de nouvelles charges viennent alourdir les difficultés financières des départements. Je salue la reconnaissance des aidants familiaux. Comment faciliter le recours à l'accueil de jour, qui peut constituer un temps de répit pour les aidants ? Le dispositif est soutenu par les ARS. En zone rurale, le transport des personnes jusqu'aux zones d'accueil de jour peut néanmoins poser problème. Quelle place accordez-vous à l'accueil familial, et avez-vous l'intention de favoriser l'accueil familial regroupé ? Ces solutions sont intéressantes, car elles sont moins traumatisantes qu'un départ en établissement. Je partage votre préoccupation sur les services d'aide à domicile, qui sont un gisement d'emplois. Enfin, vous avez mis en valeur le bénévolat. Récemment, certaines Direccte ont porté un jugement sévère sur la qualification de certains de ces bénévoles travaillant dans des services d'aide à domicile, qualifiés d'incompétents. Ils ont pourtant un rôle à jouer.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - J'invite les associations bénévoles à rejoindre le réseau Monalisa, qui coordonne l'ensemble des structures associatives engagées auprès des personnes âgées. Les Direccte n'ont pas à porter de tels jugements ; le bénévolat n'exclut pas les compétences. L'encadrement par une structure est la meilleure réponse contre ce type d'attaque déplacée. Les articles 39 et 64 favorisent le respect du libre choix, ce qui inclut l'accueil familial. Nous allons consacrer 1 million d'euros par an à la formation des accueillants familiaux. Dans l'ouest du pays, cette solution fonctionne très bien, dans d'autres régions, moins bien.
M. Georges Labazée, rapporteur. - Cela fonctionne très bien, avec néanmoins un problème en ce qui concerne la rémunération des accueillants. Nous allons déposer un amendement, qui ne coûtera pas un centime, pour régler le problème.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - J'en prends note. Je ne suis pas étonnée que les départements aient adopté une démarche similaire à celle qui a présidé à l'élaboration de ce texte : en fait, cette loi est aussi un recueil de bonnes pratiques. Elle n'est pas l'oeuvre de technocrates, mais témoigne de la richesse des initiatives.
L'accueil de jour et le transport des personnes âgées peuvent entrer dans le droit au répit auquel doit être consacrée une enveloppe de 500 euros par an par aidant. Mais le transport relève de la compétence du département...
Mme Corinne Imbert. - C'est un peu facile !
M. Jean-Marc Gabouty. - Le logement est une donnée importante dans le maintien à domicile. Il est également nécessaire de réfléchir à la place que l'on veut donner aux personnes âgées dans la ville ou dans la commune. Cela implique de définir une politique d'urbanisme qui prend en charge le commencement de dépendance et contribue à en ralentir le développement, en prévoyant par exemple des structures commerciales de proximité. Cette approche autant humaine qu'urbanistique exige une forte volonté de la part des élus locaux. L'initiative doit venir de la commune. Il faut également développer la mixité générationnelle dans le logement social.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - Une politique de peuplement, en quelque sorte...
M. Jean-Marc Gabouty. - Oui, pour que les personnes dépendantes restent partie intégrante de la société. Les structures d'accompagnement qui sont mentionnées dans le texte sont utiles à la coordination des aides, même si elles sont parfois synonymes de lourdeur. Pour atteindre nos objectifs, nous devons déployer des moyens et avoir des idées, il nous faut des initiatives et de l'incitation. Des quotas sont réservés aux logements adaptés dans les programmes de logements sociaux. Même si cela représente davantage d'investissement, c'est une économie de fonctionnement à terme. Les EPCI ont un rôle à jouer dans la libération du foncier. Pourquoi ne pas bonifier les logements adaptés au regard des contraintes et des engagements quantitatifs prévus par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU) ?
M. Daniel Chasseing. - Les crédits sont limités, mais il faut traiter les problèmes. La dépendance en Ehpad a augmenté de manière importante. Le GIR moyen pondéré explose. Le personnel est insuffisant. Les ARS ne peuvent pas donner plus de crédits qu'elles n'en ont. L'indicateur de besoin en soins Pathos traduit également la nécessité d'augmenter le forfait de soins pour adapter le personnel aux besoins de prise en charge de la dépendance. En ce qui concerne l'accueil de jour, il faut six pensionnaires pour obtenir l'agrément. En milieu rural, il serait préférable de réduire ce quota à quatre pensionnaires.
Mme Agnès Canayer. - La loi intègre une approche globale et prend en compte la nécessité de coordonner les actions. On a beaucoup parlé du rôle des départements en oubliant celui des villes et des communes, crucial dans la prévention du vieillissement, notamment par l'intermédiaire des centres communaux d'action sociale (CCAS). Je continue à avoir des doutes sur le bien-fondé d'une extension du service civique aux personnes âgées bénévoles. Il ne s'agit pas du même type d'engagement. Il s'agit de rompre l'isolement et de donner sens à une action. De plus, une telle mesure risque de dévaloriser le service civique des jeunes.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - En milieu rural, on assiste à une fragilisation du tissu associatif qui peut aller jusqu'à la cessation d'activité, ce qui pose problème pour le maintien à domicile. Ne faudrait-il pas compléter le texte du Gouvernement en prenant en compte cette difficulté ? Le rapport de nos collègues Jean-Marie Vanlerenberghe et Dominique Watrin nous ouvre des pistes. Sur le terrain, les attentes sont là. La décision rendue par le Conseil d'Etat, le 7 janvier 2013, sur le calcul de la dotation versée aux Ehpad pose une difficulté pratique. Le manque à gagner risque d'être significatif pour certains établissements. Comment le législateur pourrait-il intervenir pour lever cet obstacle ? Ce texte suscite des attentes fortes. Beaucoup de choses ont été accomplies depuis 2012. Nous devons faire preuve de pragmatisme.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - Monsieur Gabouty, je distingue logement et habitat. Il n'existe pas de nomenclature des conditions qui rendent un logement adapté aux personnes âgées. Certains travaux sont éligibles au crédit d'impôt, sans qu'aucune vraie définition juridique n'ait été établie. La politique de peuplement dont je parlais consiste à assurer une mixité générationnelle dans l'habitat. Elle fonctionne depuis longtemps en Suisse. Dans notre pays, certains référentiels freinent le développement de cette politique. Le débat reste ouvert.
Monsieur Chasseing, on entre de plus en plus tard dans les Ehpad, avec des pertes d'autonomie de plus en plus importantes. La médicalisation des établissements se poursuit, puisque 93 % d'entre eux sont tarifés sur la base du GIR moyen pondéré soins. Une enveloppe de 100 millions d'euros est prévue dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 pour achever ce processus. J'ai demandé qu'on étudie l'opportunité d'ouvrir les pôles d'activités et de soins adaptés (Pasa) à l'accueil de jour. Quant au service civique, effectivement, il faut lever les ambiguïtés tout en valorisant les retraités actifs dans le bénévolat. Les collectivités font beaucoup pour la prévention, qu'il s'agisse des conseils généraux ou des communes, par l'intermédiaire des CCAS. Dans les départements, les conférences des financeurs coordonnent l'ensemble des acteurs de la prévention.
M. Daniel Chasseing. - Il serait tout à fait judicieux d'ouvrir les Pasa à l'accueil de jour, ce qui est pour l'instant interdit.
M. Alain Milon, président. - Tout à fait. Il me semble que M. Lemoyne attend encore une réponse...
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - ... sur les difficultés des services d'aide à domicile, en effet. Les 350 millions d'euros injectés dans l'APA seront une bouffée d'oxygène pour ces services. J'ai confronté la place faite à l'aide à domicile dans le projet de loi à la réalité de ces difficultés. Les associations s'en sortent plus ou moins bien selon les endroits. C'est pour cela que nous souhaitons renforcer les Spasad : je suis convaincue qu'ils apportent la réponse attendue par les usagers, qui ont besoin d'intervenants coordonnés, par les salariés de l'aide à domicile, pour lesquels le travail d'équipe est infiniment plus valorisant, et par les aidants, qui doivent s'entendre avec plusieurs interlocuteurs. Cela contribuera enfin à des économies de gestion.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Et la décision du Conseil d'Etat ?
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'Etat. - Votre question est très pertinente. J'y apporterai une réponse lors du débat en séance.
M. Alain Milon, président. - Que mesdames les ministres soient vivement remerciées des éclairages qu'elles nous ont apportés.
La réunion est levée à 18 h 50.