Mercredi 9 juillet 2014
- Présidence de M. Michel Vergoz, vice-président -Examen en délégation du rapport sur les niveaux de vie dans les outre-mer
M. Michel Vergoz, président. - Mes chers Collègues, j'ai le plaisir de présider notre séance d'aujourd'hui en lieu et place du président Serge Larcher retenu en Martinique par le décès d'un proche et qui vous prie de bien vouloir l'excuser.
Nous voilà réunis pour une dernière séance de travail avant la suspension estivale et le renouvellement pour moitié du Sénat.
Après les enjeux relatifs aux potentiels des ZEE ultramarines au mois d'avril, il nous revient aujourd'hui d'entendre la présentation, par Éric Doligé et moi-même, puisque nous sommes co-rapporteurs, d'une étude sur les niveaux de vie dans les outre-mer, en lien avec la thématique de la vie chère, thématique que nous avions retenue pour nos travaux comme particulièrement emblématique de la vulnérabilité de nos territoires.
La vie chère constitue en effet une caractéristique commune à tous les outre-mer contre laquelle la parade n'a pas encore été trouvée. Malgré une prise de conscience des pouvoirs publics après la profonde crise qui a secoué les DOM en 2009 et l'adoption de mesures volontaristes tendant à actionner divers leviers - je pense en particulier à la LODEOM et à la loi plus récente de novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer -, le phénomène de vie chère perdure dans les outre-mer. En conséquence, les populations ultramarines connaissent des retards dans l'évolution de leur niveau de vie par rapport à l'hexagone, même si elles apparaissent généralement comme privilégiées par rapport aux voisins de leurs environnements régionaux respectifs.
La question des niveaux de vie recouvre deux volets complémentaires : celui des conditions d'accès aux denrées et services et notamment le niveau et le processus de formation des prix, d'une part, celui des moyens dont disposent les populations pour se les procurer, d'autre part. C'est, jusqu'à présent, le premier volet, celui des prix et de leur formation, qui a été au coeur des débats et des recherches de solution. Le second volet, celui des revenus et des niveaux de vie, n'est pourtant pas de moindre importance et a été choisi pour la présente étude.
Sauf observations à ce stade de votre part, je propose de « changer de casquette » et de passer immédiatement à la présentation du rapport.
M. Éric Doligé, co-rapporteur. - Mes chers collègues, avant d'entrer dans le vif du sujet, je commencerai par quelques explications méthodologiques.
Comme l'a indiqué à l'instant Michel Vergoz avec sa casquette de président de séance, notre choix s'est porté pour cette étude relative au thème de la vie chère sur la question des niveaux de vie dans les outre-mer plutôt que sur la question du niveau des prix et de leur formation. Le thème de la vie chère, dont le choix s'imposait tant il est prégnant dans nos outre-mer, est très vaste et recoupe l'ensemble des problématiques économiques et sociales : sauf à réaliser un travail global superficiel sans réel intérêt, il nous a semblé nécessaire d'adopter une démarche séquencée.
Sur la question des prix, plusieurs études sectorielles ont été publiées au cours des derniers mois - je pense notamment à celles sur les prix pratiqués par les compagnies aériennes desservant les outre-mer ou celles sur les tarifs bancaires -- et plusieurs réformes ont été engagées- je pense au décret sur le prix des carburants ou au bouclier qualité-prix - : aussi nous est-il apparu préférable de ne pas interférer. Mais nous pourrions imaginer de revenir sur ces questions de formation et de niveau des prix dans le prochain programme de travail de la délégation afin d'évaluer les dispositifs de régulation mis en place !
Pour aujourd'hui, avec Michel Vergoz, nous vous proposons de nous placer du côté des familles ultramarines, du côté des consommateurs de biens et de services et du marché du travail plutôt que du côté des mécanismes de marché et de formation des prix.
Nous nous sommes intéressés principalement aux ressources et aux modes de consommation des familles ultramarines tout en adoptant une démarche comparative - comparaison des outre-mer entre eux, comparaison avec l'hexagone mais aussi comparaison avec l'environnement régional - et en tentant une mise en perspective, notamment au regard des évolutions démographiques qui constituent le grand défi des prochaines décennies.
M. Michel Vergoz, co-rapporteur. - Si, en termes relatifs dans l'espace et dans le temps, les outre-mer ne paraissent pas si mal lotis, la progression des niveaux de vie semble cependant marquer le pas dans la période la plus récente. Les ressources des ménages ultramarins se caractérisent par de fortes spécificités et les évolutions démographiques et sociétales qui se dessinent appellent une adaptation corrélative des politiques publiques pour éviter de graves dérives.
Tout d'abord, dans leurs environnements régionaux respectifs et, plus globalement, si l'on observe les classements à l'échelle mondiale, les outre-mer français font le plus souvent figure d'eldorados.
Ils apparaissent en premier lieu comme de véritables îlots de prospérité au sein de leurs aires géographiques respectives : quelques exemples suffisent à s'en convaincre.
Dans l'Océan indien, le niveau de richesse par habitant de La Réunion est plus de trois fois supérieur à celui de l'île Maurice, qui est distante d'à peine 250 kilomètres ; celui de Mayotte, le moins riche de nos DOM, est plus de dix fois supérieur à celui des Comores et près de vingt fois supérieur à celui de Madagascar. Or, n'oublions pas que Madagascar dont le territoire est légèrement supérieur à celui de la France est peuplé de plus de vingt millions d'habitants. La Martinique et la Guadeloupe affichent quant à elles le niveau de vie le plus élevé du bassin caribéen, juste après la Barbade. En Amérique du Sud, la Guyane présente également le deuxième niveau de richesse par habitant après le Vénézuela.
Les COM et la Nouvelle-Calédonie offrent un tableau plus contrasté à cet égard, notamment parce que certaines d'entre elles sont voisines de pays qui comptent parmi les plus industrialisés et les plus riches du monde, comme les États-Unis, le Canada et la Nouvelle-Zélande. Pour autant, les territoires français du Pacifique se classent très honorablement par rapport à leurs voisins, notamment par rapport aux petits États insulaires : la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française se classent respectivement en troisième et quatrième position de la zone, tandis que Wallis-et-Futuna, dont le PIB par habitant n'est pas le plus élevé de nos outre-mer, fait figure de voisin riche par rapport au Vanuatu ou aux îles Fidji.
La mesure de la richesse économique ne peut cependant suffire à rendre compte du niveau de vie des territoires ultramarins : comme nous l'avions souligné lors de la conférence organisée en partenariat avec l'Agence française de développement (AFD) le 23 novembre 2012, il faut également prendre en compte l'indice de développement humain (IDH). Celui-ci repose sur l'agrégation de trois composantes - la mesure du revenu par habitant, de l'état de santé et du niveau d'éducation de la population - et permet ainsi de mesurer le développement d'un territoire à la fois dans son aspect économique et dans son aspect social.
De ce point de vue, nos outre-mer se situent également généralement dans le peloton de tête de leur environnement régional respectif, et affichent tous, à l'exception de Mayotte, un IDH comparable à celui des pays à développement humain très élevé ou élevé. Mayotte, qui se classerait dans le groupe des pays à développement humain moyen, se situe tout de même largement devant les Comores ou même devant l'Afrique du Sud.
Malgré ces performances régionales notables, et en dépit du rattrapage économique observé au cours des années 1990, l'écart de niveau de vie entre les outre-mer et l'hexagone demeure important et peine à se résorber, principalement sur le plan économique.
En moyenne en 2010, l'IDH des territoires ultramarins (hors Mayotte) était inférieur de 12 % à celui de l'hexagone, les écarts s'échelonnant de 7 % pour la Guadeloupe à 17 % pour la Polynésie française. Tous les outre-mer présentaient un IDH inférieur à celui du département hexagonal le moins bien classé, le Pas-de-Calais.
Il est à noter que les performances des outre-mer sont meilleures en matière sociale que dans le champ économique - à l'exception cependant de la Nouvelle-Calédonie, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin. Cette situation est assez originale, car on observe généralement une corrélation entre le niveau de la composante économique de l'IDH et celui de sa composante sociale.
Une analyse plus fine montre qu'au sein de l'indice de développement social, ce sont les performances en matière de santé plutôt que celles en matière d'éducation qui tirent l'IDH des outre-mer vers le haut : selon l'AFD, l'écart entre l'hexagone et les collectivités ultramarines était de 5 % seulement en matière sanitaire, contre 25 % dans le domaine de l'éducation. Pour autant, certaines évolutions récentes dans le domaine sanitaire délivrent des signaux alarmants : le rapport de la Cour des comptes sur la santé dans les outre-mer publié en juin 2014 met ainsi en évidence une progression de la mortalité infantile entre 2000 et 2012 dans plusieurs territoires ultramarins. Elle atteint jusqu'à 16,1 pour mille naissances en Guyane, contre 3,3 dans l'hexagone ; dans les autres outre-mer, le taux oscille entre 4,1 et 9,8.
Si la progression des taux de réussite au baccalauréat enregistrée dans plusieurs outre-mer au cours des dernières années offre un motif légitime de satisfaction, elle ne doit pas masquer la réalité du retard éducatif qui frappe une partie non négligeable de la jeunesse ultramarine - étant entendu qu'il existe d'importantes disparités entre les territoires. Alors que la part de jeunes de 18 ans en difficulté de lecture s'élève à 10 % en moyenne en 2012 pour l'ensemble de la France, elle atteint jusqu'à près de 50 % en Guyane et 75 % à Mayotte, toutes deux touchées par une non scolarisation massive de leur jeunesse.
Le caractère quelque peu bancal du niveau de développement des outre-mer, au détriment de son aspect économique, est confirmé par la comparaison de leur niveau de richesse par habitant avec celui de l'hexagone. Dans les DOM, il est inférieur de 31 et 37 % pour la Martinique et la Guadeloupe, 38 % pour La Réunion, 51 % pour la Guyane et jusqu'à 79 % pour Mayotte. Tandis que le niveau de richesse par habitant de Saint-Pierre-et-Miquelon et de la Nouvelle-Calédonie est comparable à celui de l'hexagone, il lui est inférieur de respectivement 43 % et 68 % en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.
L'écart de richesse entre les outre-mer et l'hexagone apparaît tout aussi clairement selon d'autres indicateurs. L'enquête « Budget des familles » réalisée par l'Insee dans les DOM a montré qu'en 2006, le revenu disponible par unité de consommation des ménages domiens était inférieur de 38 % à celui des ménages hexagonaux. Le niveau de vie médian mahorais ne correspondait même qu'à 16 % de celui de l'hexagone ! D'un point de vue fiscal, la tranche de revenus la plus basse, comprise entre 0 et 9 400 euros, concernait en 2010 un quart des ménages hexagonaux, contre la moitié des ménages domiens et deux-tiers de ceux de Saint-Martin - mais 26 % seulement de ceux de Saint-Barthélemy.
Des progrès importants restent donc à accomplir pour achever la convergence de niveau de vie entre l'hexagone et les outre-mer, entre lesquels subsiste un écart de développement estimé à 20 ans par l'AFD.
Or, la situation est d'autant plus préoccupante qu'après un rattrapage spectaculaire au cours des années 1990, le mouvement de résorption des écarts de niveau de vie entre les outre-mer et l'hexagone a connu un net ralentissement. Entre 1994 et 2010, l'écart du niveau de richesse par habitant observé entre la Guadeloupe et l'hexagone avait par exemple été ramené de 63 % à 37 %. Cependant, le tournant des années 2000, et plus encore la crise économique et financière qui a éclaté en 2008-2009, ont marqué une dommageable inflexion de ce mouvement. Dans les Antilles et en Nouvelle-Calédonie, les écarts de développement se comblent beaucoup plus lentement qu'autrefois. Dans les autres collectivités ultramarines, la tendance au rattrapage observée dans les années 1990 s'est interrompue ; en Polynésie française, on note même un nouvel accroissement des écarts.
M. Éric Doligé, co-rapporteur. - La première condition, pour remédier à cet état de fait, serait de pouvoir disposer de données fiables et actualisées, qui permettraient d'établir un constat documenté et actualisé à partir duquel élaborer des solutions précises et ciblées. Or, vous venez de l'entendre dans l'état des lieux que vient de dresser Michel Vergoz, il a souvent parlé à l'imparfait, ou alors n'a cité que quelques collectivités ultramarines : ce n'était pas que nous ayons volontairement sélectionné des données anciennes ou que nous n'ayons pas souhaité être exhaustifs dans l'élaboration de notre rapport, mais comme nous l'avons déjà maintes fois relevé, la couverture statistique des outre-mer est très insuffisante.
Les DOM sont ainsi exclus de certaines grandes enquêtes nationales conduites par l'Insee, et qui fournissent pourtant des éléments précieux sur les niveaux de vie des populations : je pense par exemple à l'enquête dite « ERFS » sur les revenus fiscaux et sociaux des ménages, ou encore à l'enquête statistique sur les revenus et les conditions de vie, dite « SRVC ». Dans ces conditions, le niveau de vie des populations d'outre-mer ne peut être évalué qu'à partir des résultats d'une enquête spécifique, l'enquête « Budget des familles »... qui n'est cependant conduite qu'une fois tous les cinq ans et dont les conclusions se font attendre. À l'heure où nous vous présentons ce rapport, nous attendons toujours les résultats de l'enquête menée en 2011, annoncés pour début 2014 et qui devraient être publiés prochainement. Nous n'avons donc pu nous fonder que sur les résultats de l'enquête menée en 2006.
La situation n'est pas meilleure pour les COM. Saint-Pierre-et-Miquelon n'est pas couverte par l'enquête « Budget des familles ». Dans les collectivités du Pacifique, où la conduite des enquêtes statistiques relève de la responsabilité des gouvernements locaux, les différences méthodologiques retenues dans les études ou leur ancienneté limitent la portée des enseignements que l'on peut en tirer.
Le caractère obsolète des données disponibles est particulièrement criant pour certaines collectivités : pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy, une donnée aussi fondamentale que le niveau de richesse par habitant n'a pas été actualisée depuis 1999, soit depuis 15 ans ! En tant que DOM, Mayotte sera désormais couverte par l'enquête « Budget des familles » ; cependant, pour l'élaboration du présent rapport, les éléments dont nous disposions remontaient le plus souvent à l'année 2009, voire à 2005.
Dans ce contexte, nous ne pouvons que préconiser une forte amélioration de l'évaluation statistique des outre-mer, ce qui pourrait passer par deux voies. Il serait tout d'abord pertinent d'élargir le champ d'action de l'Insee en direction des DOM avec la réalisation d'enquêtes plus fréquentes sur les revenus fiscaux et sociaux et sur les revenus et les conditions de vie. Afin d'harmoniser les méthodologies et les calendriers, on pourrait également imaginer un approfondissement du partenariat conclu en 2004 entre les différents instituts statistiques compétents outre-mer dans le cadre du projet « Comptes économiques rapides pour l'outre-mer » (Cerom), qui fonctionne semble-t-il de manière satisfaisante, et un resserrement des liens avec les instituts statistiques relevant de la compétence des collectivités du Pacifique.
Dans la même logique, il apparaît indispensable de développer les travaux des observatoires des prix, des marges et des revenus, et de les faire davantage porter sur la problématique des ressources.
Prévus par la loi d'orientation du 13 décembre 2000, et effectivement mis en place seulement sept ans plus tard dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon, les observatoires ont récemment vu leur indépendance et leurs attributions renforcées. Un décret du 6 juillet 2010 a prévu que leur présidence revenait non plus au préfet, mais à des magistrats des chambres régionales des comptes. La loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique des outre-mer leur a par ailleurs confié de nouvelles fonctions dans le cadre du dispositif du « bouclier qualité-prix ».
Pour autant, les observatoires se sont encore trop peu saisis de la question des ressources des ménages ultramarins, qui est pourtant indissociable du traitement de la question du pouvoir d'achat et de la vie chère en outre-mer. Depuis leur création, leur activité a presque exclusivement porté sur l'analyse et le suivi du niveau et de la formation des prix. Nous avons été informés qu'une enquête sur ce thème était en cours aux Antilles-Guyane, mais les résultats n'en sont malheureusement pas encore disponibles.
Cette lacune s'explique sans doute en partie par les obstacles matériels, juridiques et institutionnels auxquels se heurtent les observatoires et qui brident leurs possibilités d'investigation sur la question des revenus. Nous avons pu constater qu'ils faisaient face à une insuffisance criante de moyens, notamment humains. Par ailleurs, le secret des données fiscales et sociales qui peut leur être opposé, comme ce fut le cas à Saint-Pierre-et-Miquelon où une étude engagée en février 2011 a dû être suspendue, empêche tout travail d'ampleur sur les ressources des ménages. Enfin, la coordination de leur action apparaît encore insuffisante, malgré les réels progrès observés au cours des deux dernières années. Nous avons ainsi été informés qu'une réunion annuelle réunissant l'ensemble des présidents d'observatoires, en présence des préfets et de membres d'autres administrations intéressés comme la DGCCRF, s'était tenue au ministère des outre-mer au cours des deux dernières années. Il semble cependant nécessaire d'aller plus loin pour répondre à la demande des présidents des observatoires, qui réclament dans leur ensemble une coordination plus institutionnalisée.
Il s'agit d'éviter que les observatoires, qui pourraient constituer un outil très intéressant au service de la lutte contre la « vie chère », ne deviennent de simples vitrines ou coquilles vides. Nous avons identifié trois directions pour leur permettre de se saisir véritablement des prérogatives qui leur ont été confiées. En premier lieu, il est indispensable que soit dédié à chaque observatoire au moins un emploi de cadre permanent, en assurant la prise en charge des frais de fonctionnement afférents, indépendamment - et j'insiste sur ce point - de leur budget « études ». En second lieu, l'amélioration de la coordination entre les observatoires doit être poursuivie, dans un cadre plus institutionnalisé et de ce fait plus pérenne. Enfin, pour leur permettre de mener à bien leurs investigations dans le domaine des revenus, il pourrait être envisagé de prévoir des dérogations à la confidentialité des données fiscales et sociales. Ces dérogations seraient bien entendu très strictement encadrées pour tenir compte à la fois de la composition des observatoires et du caractère personnel et particulièrement sensible des données concernées.
M. Michel Vergoz, co-rapporteur. - Après cet exercice de comparaison, nous nous sommes intéressés dans un second temps aux particularités économiques et démographiques des sociétés ultramarines qui peuvent expliquer, au moins en partie, les écarts de niveau de vie avec l'hexagone.
Nous nous sommes tout d'abord penchés sur les inégalités de revenus dans les territoires ultramarins, qui apparaissent beaucoup plus marquées que dans l'hexagone, avec une forte prévalence des situations de pauvreté.
Dans les DOM, le rapport entre le revenu plancher par unité de consommation des 20 % des ménages les plus riches et le revenu plafond des 20 % les plus modestes est de 3,2, contre 2,2 dans l'hexagone. À La Réunion, l'indice de Gini est évalué à un niveau plus élevé que celui de Paris, qui constitue pourtant le département le plus inégalitaire de l'hexagone. D'une manière générale, et alors que l'on avait noté un mouvement de résorption des inégalités entre 1995 et 2001, l'Insee signale qu'elles tendent aujourd'hui à s'accroître plus rapidement que dans l'hexagone.
Les COM ne sont pas épargnées par cette exacerbation des inégalités. En Nouvelle-Calédonie, le niveau de l'indice de Gini se rapproche davantage de celui observé dans les pays sous-développés qu'à celui mesuré dans l'hexagone. Il a même légèrement augmenté entre 1991 et 2008 et stagne aujourd'hui à un niveau analogue à celui de pays comme le Burundi ou la Thaïlande. La situation de la Polynésie française est comparable de ce point de vue.
Ces inégalités se traduisent par des taux de pauvreté très élevés. Si l'on se fonde sur le seuil de pauvreté constaté au niveau régional, leur valeur s'échelonne de 17 % en Nouvelle-Calédonie et à La Réunion à près de 28 % à Mayotte, contre 13 % dans l'hexagone. La situation est d'autant plus inquiétante qu'elle ne semble pas s'améliorer : entre 2001 et 2006, la proportion de ménages pauvres a augmenté de 3 points à La Réunion et de 4 points aux Antilles, et il est à craindre que la crise financière que nous avons traversée n'ait encore accentué ce phénomène.
Cette prévalence des situations de pauvreté se reflète dans la structure de consommation des ménages ultramarins, qui se caractérise par l'importance des dépenses contraintes. Les produits alimentaires absorbent ainsi une part sensiblement plus importante du budget des ménages ultramarins que des ménages hexagonaux, notamment pour ceux qui se situent au-dessous du seuil de pauvreté : la proportion s'échelonne de 17 % en Guyane et 18 % en Nouvelle Calédonie, en passant par 22 % en Guadeloupe et 25 % en Polynésie française, jusqu'à 39 % à Mayotte - contre 16 % dans l'hexagone. Compte tenu de la cherté des produits alimentaires outre-mer, le poids des dépenses qui leur sont consacrées constitue un facteur essentiel du moindre niveau de vie des populations ultramarines.
Autre conséquence logique de ces inégalités, nous avons par ailleurs noté que la structure des ressources des ménages ultramarins se caractérisait par le poids important des transferts sociaux. La part des prestations sociales y apparaît notablement plus élevée que dans l'hexagone et la dépendance aux minima sociaux y est plus importante. En 2006, ceux-ci représentaient 1 % des ressources des ménages dans l'hexagone, contre 6,4 % en moyenne dans les DOM ; une personne sur trois serait aujourd'hui couverte par les minima sociaux dans les DOM, contre une sur dix dans l'hexagone. En revanche, la part des pensions de retraite dans les revenus ultramarins apparaît moins élevée, notamment en raison de la fréquence des petites retraites dans les outre-mer.
Ces inégalités sont par ailleurs à mettre en rapport avec les spécificités de la structure de l'emploi dans les outre-mer.
Dans les DOM, l'emploi salarié se caractérise par une faible proportion de cadres (de 8,5 % à La Réunion à 11 % en Guyane, contre 17 % dans l'hexagone ; en Polynésie française, cette part s'établit à 7 %). À l'inverse, les professions intermédiaires et les employés représentent une part plus importante de l'emploi domien. Il est à noter que, en raison de leur relative rareté sur les marchés de l'emploi ultramarins, la situation salariale des cadres est plus favorable que celle des autres catégories socioprofessionnelles.
Une deuxième spécificité de l'emploi ultramarin réside dans la prépondérance du secteur tertiaire non marchand, qui recouvre les administrations publiques ainsi que les activités éducatives, sanitaires et sociales. Dans les DOM, il emploie 42 % des salariés, contre 32 % dans l'hexagone. Le secteur public et parapublic y constitue dès lors la principale source de création de richesse : il représentait 26 % du PIB hexagonal en 2009, contre 38 % à La Réunion et 41 % en Guadeloupe.
Il ne faut pas voir là une hypertrophie du secteur public, comme on a trop souvent tendance à le considérer. Rapportés à la population globale sur chaque territoire, les effectifs de la fonction publique n'apparaissent pas beaucoup plus importants dans les DOM que dans l'hexagone : on compte en moyenne 8,8 agents publics pour 100 habitants dans les DOM, contre 7,6 dans l'hexagone. Selon nous, le poids du secteur public dans les économies ultramarines est davantage une conséquence mécanique de l'atrophie du secteur privé, pour les raisons que nous ne connaissons malheureusement que trop bien.
En tout état de cause, il est indéniable que le caractère attractif de l'emploi public dans les outre-mer s'explique en large part par le niveau élevé des rémunérations servies. Le salaire net annuel des fonctionnaires domiens est ainsi supérieur en moyenne de 19 % à celui des fonctionnaires hexagonaux. Cette différence s'explique par les sur-rémunérations dont bénéficient les agents publics en poste dans les outre-mer.
Mis en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les compléments de rémunération visaient à la fois à prendre en compte l'éloignement par rapport à l'hexagone, à compenser la cherté de la vie outre-mer, ainsi qu'à renforcer les effectifs de cadres ultramarins en accroissant l'attractivité de la fonction publique sur ces territoires. Ce qu'on appelle sur-rémunérations recouvre aujourd'hui une réalité composite, plusieurs dispositifs s'étant ajoutés et superposés au fil du temps au gré de la mise en oeuvre de règles législatives et réglementaires hétéroclites. Sans entrer dans le détail de ces dispositifs, qui sont d'une grande complexité, on peut retenir qu'elles se traduisent d'abord par des majorations de traitement, calculées par application d'un coefficient variable selon la collectivité concernée, et qui peuvent être à plusieurs strates avec des « compléments spéciaux ». En outre, le taux applicable n'est pas uniforme sur un même territoire, comme l'illustre le cas de Réseau Outre-mer 1ère ou de l'IEDOM à La Réunion. Il est à noter que les majorations de traitement ont été étendues à Mayotte, qui constituait jusqu'alors la seule collectivité ultramarine dans laquelle elles n'existaient pas, par un décret du 28 octobre 2013, avec effet rétroactif au 1er janvier 2013 et montée en charge progressive jusqu'en 2017. Il existe également des indemnités spécifiques d'éloignement, de sujétion et d'installation, qui peuvent représenter jusqu'à 23 mois de traitement indiciaire net pour 2 ans de service.
Au total en 2012, le montant des compléments de rémunérations dans l'ensemble des outre-mer s'est élevé à 1,36 milliard d'euros, en progression de 7,5 % par rapport à l'année 2011.
Le bien-fondé de ce dispositif est régulièrement remis en cause dans le débat public. Certaines des justifications qui ont présidé à sa mise en place semblent aujourd'hui historiquement datées ; surtout, le niveau des sur-rémunérations n'apparaît pas proportionné à la réalité des conditions de vie dans les outre-mer. Il apparaît par ailleurs certain que les sur-rémunérations contribuent à accentuer les écarts de revenus et donc les inégalités dans les territoires ultramarins. Selon l'Insee, le salaire net moyen est en effet supérieur de près de 40 % à celui du secteur concurrentiel dans les DOM, alors que ces niveaux sont proches dans l'hexagone ; en Nouvelle-Calédonie, l'écart atteint 57 %. Enfin, ainsi que nous l'a indiqué la DGOM, les compléments de rémunération participent de l'accentuation de la cherté de la vie, par leur incidence à la hausse sur les salaires du privé, à l'exception des salaires des ouvriers, et leur contribution à l'inflation locale.
Les propositions que nous faisons aujourd'hui s'inscrivent dans la ligne de celles qui avaient été avancées en 2009 dans l'excellent rapport d'information de mon collègue Éric Doligé, dans une perspective cependant plus opérationnelle et à partir de préalables clairement posés, à savoir :
- la non remise en cause des acquis : le nouveau dispositif ne devra s'appliquer qu'aux « nouveaux entrants » dans la fonction publique ;
- la définition d'un référentiel stable et régulièrement publié mesurant pour chacun des outre-mer le différentiel de coût de la vie, afin d'adosser à ce référentiel l'ajustement du niveau des sur-rémunérations » ;
- la mise en place d'un mécanisme garantissant la réinjection dans les économies ultramarines des sommes dégagées par l'ajustement des sur-rémunérations.
Il nous paraît en effet important de ramener le montant des sur-rémunérations au véritable différentiel du coût de la vie entre les outre-mer et l'hexagone. Mais j'insiste, et c'est là un point crucial, les sommes ainsi dégagées devront revenir à l'économie des départements et des collectivités d'outre-mer, qui ont notamment de grands besoins d'infrastructures. Ce mécanisme de réinjection dans les économies ultramarines reste à inventer et c'est pourquoi nous demandons au Gouvernement une étude détaillée à ce sujet, sur la base du cahier des charges précédemment défini.
M. Éric Doligé, co-rapporteur. - Nous avons enfin constaté que les différences de niveau de vie constatées dans les outre-mer s'inscrivent dans un cadre démographique particulièrement inquiétant pour l'avenir de ces territoires. Plusieurs d'entre eux sont en effet concernés par un phénomène de vieillissement démographique très rapide, qui pourrait renforcer les difficultés de financement de la protection sociale, dans un contexte où le chômage touche massivement les jeunes générations et alors que les solidarités intergénérationnelles, traditionnellement fortes, sont aujourd'hui en net recul.
Ce phénomène de vieillissement doit être nuancé : il n'est pas incompatible avec un certain dynamisme démographique - en 2009, un tiers des domiens avaient moins de 20 ans, contre un quart des hexagonaux - et il se pose en termes très différents d'un territoire ultramarin à l'autre. Pour autant, il frappe globalement par sa très grande rapidité, qui peut ouvrir un risque de « violence démographique » - selon l'expression très frappante utilisée devant nous par M. Claude-Valentin Marie, de l'Ined, lorsque nous l'avions auditionné.
L'enquête « Migrations, famille, vieillissement » conduite à partir de 2009 par l'Ined et l'Insee a ouvert une prise de conscience sur les profondes mutations démographiques en cours dans chacun des DOM. Selon cette étude, les populations des Antilles, qui étaient les plus jeunes de France au début des années 1960, devraient compter parmi les plus vieilles du territoire national en 2040 : 40 % de leurs habitants auront alors plus de 60 ans, et la chute de la natalité engagée aujourd'hui devrait contribuer à renforcer le « creux » déjà observable dans la classe d'âge des jeunes adultes. La Réunion doit, quant à elle, faire face au double défi que constitue la poursuite d'un accroissement soutenu de la population et la forte dynamique du vieillissement démographique, qui touchera de ce fait un nombre très important de personnes. En revanche, les populations guyanaises et mahoraises devraient rester caractérisées par leur jeunesse à l'horizon 2030, en raison de la conjonction d'une natalité très dynamique et d'une immigration importante.
La situation est tout aussi contrastée dans les COM. Tandis que Saint-Martin et Saint-Barthélemy seront confrontées à un vieillissement démographique modéré, la Polynésie française devrait faire face à un vieillissement brutal de sa population à compter de 2017. On observera au cours des prochaines années une diminution de la part des populations jeunes à Saint-Pierre-et-Miquelon comme à Wallis-et-Futuna, tandis que la Nouvelle-Calédonie devra composer avec un vieillissement progressif de sa population à partir de 2025.
Les déséquilibres démographiques induits par ces dynamiques sont porteurs de risques importants qu'il apparaît urgent d'anticiper, notamment s'agissant du financement des prestations sociales et de l'équipement des territoires en établissements d'accueil pour personnes âgées. La question doit être sérieusement étudiée, dans un contexte où les inégalités de santé, très importantes dans les outre-mer, frappent notamment les personnes âgées : selon une enquête de l'Ined, les populations domiennes vieillissent moins longtemps en bonne santé que celles de l'hexagone.
Ces évolutions emportent en outre des conséquences sociales importantes pour les populations ultramarines, en ce qu'elles induisent de profondes transformations des équilibres entre les différentes classes d'âge, alors que les besoins de solidarités deviennent plus importants. L'augmentation de la charge de la protection sociale, et notamment du financement des retraites, sera en effet de plus en plus grande pour la population d'âge actif, alors même que celle-ci tend à se contracter dans plusieurs outre-mer. Le rapport entre le nombre de personnes en âge de travailler et celui des personnes retraitées devrait ainsi connaître une dégradation marquée dès 2030 : en Polynésie française, on devrait compter à cette date, pour une personne âgée de 60 ans ou plus, 2,2 personnes d'âge actif - contre 4,5 en 2007 et 6 en 1988.
Ce mouvement est bien sûr accentué par l'importance du chômage dans les territoires ultramarins. Dans les DOM (hors Mayotte), le chômage touchait en moyenne un quart de la population active au premier trimestre 2014, contre 9,7 % dans l'hexagone. Il frappe particulièrement les jeunes : aux Antilles et à La Réunion, plus de la moitié des 15-24 ans présents sur le marché du travail étaient concernés à la même date. Bien que son évaluation statistique soit très difficile dans ces territoires, on peut également considérer que la situation de l'emploi est très dégradée dans les COM - à l'exception notable de Saint-Barthélemy - avec des taux de chômage s'échelonnant de 11,8 % à Wallis-et-Futuna à 27 % à Saint-Martin, en passant par 22 % pour la Polynésie française et 14 % en Nouvelle-Calédonie. Là encore, le chômage touche particulièrement les classes d'âge les plus jeunes.
Dans ce contexte, les solidarités intergénérationnelles traditionnellement fortes dans les outre-mer, et qui permettent bien souvent de compenser le sous-équipement des territoires, semblent aujourd'hui en recul. Les jeunes générations, qui font face à des difficultés économiques fortes, sont en effet de moins en moins en mesure d'apporter une aide à leurs aînés.
On le voit, les enjeux liés aux dynamiques démographiques dans les outre-mer sont donc très importants. Pour autant, leur prise en compte n'est apparue que très tardivement, en raison notamment des insuffisances de l'appareil statistique que nous évoquions déjà tout à l'heure. C'est là une preuve supplémentaire qu'il est urgent de le renforcer. Afin de pouvoir définir des politiques publiques adaptées en direction de la jeunesse et des personnes âgées, et de préparer ainsi l'avenir en s'appuyant sur les transformations démographiques à l'oeuvre, nous préconisons donc ici encore d'améliorer leur connaissance statistique, notamment par un renforcement de la fréquence des enquêtes, afin que tous les territoires ultramarins puissent disposer d'éléments statistiques comparables à ceux qui existent pour l'hexagone.
M. Jeanny Lorgeoux. - Comment explique-t-on une couverture statistique des outre-mer aussi mauvaise ? Ce constat est très préoccupant car il est indispensable d'établir un diagnostic concret et fiable pour asseoir une politique publique.
M. Michel Vergoz, co-rapporteur. - Ce constat, dressé tout au long du rapport, est surprenant et regrettable. Mais les services de l'État sont généralement incapables de fournir les données demandées.
M. Éric Doligé, co-rapporteur. - Nous achoppons pour chaque nouvelle étude sur le même écueil, le caractère lacunaire et souvent obsolète des données statistiques. Les explications à cet état de fait sont nombreuses : complexité d'évaluation due à la diversité des territoires, faible intérêt des administrations centrales pour les outre-mer, difficulté pour le ministère des outre-mer à rassembler des données collectées en ordre dispersé par d'autres administrations, manque de coordination entre les services de l'État implantés localement ou encore absence de remontée des informations collectées localement en vue de leur exploitation centralisée. Ces difficultés n'ont d'ailleurs pas facilité notre travail de synthèse pour la présente étude mais n'a pas empêché d'identifier les grandes tendances.
M. Jeanny Lorgeoux. - 'L'absence de vision globale et de coordination des politiques sectorielles est un vrai sujet de préoccupation et doit nous interpeller. C'est le fonctionnement même de l'État qui est en cause.
M. Michel Vergoz, co-rapporteur. - Nous pouvons évoquer l'exemple des sur-rémunérations pour lesquelles nous indiquons dans le rapport que les services déconcentrés de l'État n'ont pas été à même de nous renseigner sur les effectifs concernés ni le coût du dispositif.
M. Félix Desplan. - La première recommandation à formuler est la mise en place d'outils statistiques fiables permettant de recueillir des informations selon une périodicité régulière.
M. Éric Doligé, co-rapporteur. - Nos recommandations intègrent précisément cette préoccupation mais encore faut-il que nos préconisations réitérées soient effectivement prises en compte.
M. Jeanny Lorgeoux. - Quelle est la raison de cette inertie ? Les administrations ne disposent-elles pas elles-mêmes des informations demandées ou l'absence de réponse à nos questions résulte-t-elle d'une mauvaise volonté des services concernés ?
M. Éric Doligé, co-rapporteur. - La collecte des données est souvent lacunaire et l'absence de vision transversale est aussi due à un cloisonnement des administrations déconcentrées qui conduit parfois à des situations rocambolesques. J'ai pu très concrètement le constater lors de la mission d'information de 2009 sur la situation des DOM au sujet de la dette sociale des collectivités locales en Guadeloupe.
M. Michel Vergoz, co-rapporteur. - Autre exemple concernant La Réunion : lors du mouvement social relatif au recours aux contrats aidés dans les établissements scolaires, la préfecture s'est trouvée dans l'incapacité de me répondre sur le montant et la répartition des aides accordées.
M. Félix Desplan. - Il faudrait mener une réflexion sur la manière de faire prendre en compte nos préconisations.
Mme Karine Claireaux. - L'objection rituellement opposée par l'INSEE à nos demandes d'enquêtes statistiques est la question du seuil de population concernée. Concernant les observatoires des prix, des marges et des revenus, je souscris à l'idée de renforcer leurs moyens d'investigation car ils se heurtent, à l'heure actuelle, à l'opacité des mécanismes de formation des prix. Sur la question des sur-rémunérations, j'estime que leur suppression induirait une dégradation encore supérieure de la situation économique et qu'il faut se garder des généralités sur le sujet pour tenir compte, au contraire, de la grande diversité des territoires, notamment le paramètre de l'éloignement. J'observe d'ailleurs que la suppression de la prime d'éloignement conduit à accroître les difficultés de recrutement pour des postes clé comme ceux de contrôleur aérien.
M. Michel Vergoz, co-rapporteur. - Notre démarche n'a pas pour objectif de stigmatiser les fonctionnaires ni, bien sûr, de supprimer les sur-rémunérations. Il s'agit en revanche d'éviter que leur mise en cause périodique, dans la mesure où elles contribuent à aggraver les inégalités, ne conduise en définitive à cette suppression. Elles doivent donc s'adosser à une véritable justification, le différentiel réel de coût de la vie par rapport à l'hexagone, et tenir compte de la diversité des situations des territoires.
M. Jeanny Lorgeoux. - Il faut en effet que l'État puisse justifier du bien-fondé de l'affectation des sommes en jeu.
Mme Karine Claireaux. - Concernant le taux de chômage de plus de 36 % chez les hommes jeunes à Saint-Pierre-et-Miquelon, il convient de préciser qu'il s'explique pour une bonne part par la saisonnalité de l'activité dans le BTP où cette catégorie de la population active est très présente.
Mme Odette Herviaux. - Je souhaite exprimer mon adhésion à la démarche des rapporteurs tendant à distinguer la question des prix de celle des niveaux de vie et à établir des comparaisons régionales, lesquelles démontrent les résultats positifs de l'action de l'État outre-mer sur le long terme. Je souscris également pleinement à leurs recommandations. Les majorations de pensions de retraite pour les retraités établis outre-mer sont-elles toujours en vigueur ?
M. Éric Doligé, co-rapporteur. - Les majorations applicables aux pensions sont en voie d'extinction. C'est d'ailleurs au Sénat que revient l'initiative de leur suppression. Pour assurer leur pérennité, les sur-rémunérations doivent pouvoir s'adosser à des justifications solides.
La délégation sénatoriale à l'outre-mer a adopté le rapport à l'unanimité des présents.