Mardi 5 novembre 2013
- Présidence de M. Daniel Reiner, vice-président -Loi de finances pour 2014 - Audition du Général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'Air (mission Défense)
La commission auditionne le général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'Air, sur le projet de loi de finances pour 2014 (mission Défense).
M. Daniel Reiner, président. - Avant d'aborder notre ordre du jour, nos collègues André Vallini et Jean-Marie Bockel m'ont demandé la parole.
M. André Vallini. - En tant que rapporteur pour avis des crédits du programme « action audiovisuelle extérieure », je voudrais avec notre collègue Joëlle Garriaud-Maylam, exprimer notre sympathie à la direction de Radio France Internationale et aux collègues de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, assassinés samedi dernier à Kidal au Mali.
M. Daniel Reiner. - La commission s'associe à leur deuil. Nous nous étions réjouis lors de notre dernière réunion de la libération des quatre otages. Ces assassinats viennent nous rappeler la complexité de la situation sécuritaire au Mali.
M. Jean-Marie Bockel. - Nous venons d'apprendre la dissolution du 110e régiment d'infanterie stationné à Donaueschingen. Il s'agit d'une unité de la brigade franco-allemande. Je souhaiterais que notre commission se penche sur le devenir de cette brigade.
M. Daniel Reiner, président. - Cela pose effectivement des questions de fond sur la relation franco-allemande en matière de défense.
M. Jean Besson. - Notre commission devrait être porteuse de cette exigence d'une coopération franco-allemande en matière de défense. Nous pourrions nous en entretenir avec nos collègues parlementaires allemands.
M. Daniel Reiner, président. - Nous allons maintenant entendre le Général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'Air, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2014.
Il s'agit de la première annuité d'application de la LPM, or il est évident que la fin de gestion 2013 conditionne mécaniquement l'entrée en gestion 2014. Nous avons de ce point de vue, sinon des inquiétudes, en tout cas des interrogations.
Il nous est donc particulièrement utile de vous entendre sur l'armée de l'air et son devenir. Je rappelle que le Livre blanc et la LPM prévoient un nouveau resserrement du format. Vous nous direz comment le principe de différenciation et celui de mutualisation aboutissent à faire aussi bien demain qu'aujourd'hui. Vous nous ferez, j'en suis sûr, un point sur le projet « Cognac 2016 » et sur votre appréciation de l'appareil d'entraînement des pilotes de combat dont l'acquisition devrait être actée au prochain comité ministériel d'investissement.
Nous avons également beaucoup de points de préoccupation sur la cohérence de l'ensemble, sur l'activité opérationnelle, sur l'entretien, sur la manoeuvre RH, sur les perspectives exportations du Rafale, sur les restructurations.
Général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'Air- C'est toujours avec fierté et plaisir que je m'exprime devant la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat en tant que chef d'état-major de l'armée de l'air.
Après une année passée à la tête de l'armée de l'air, j'ai pu mesurer avec beaucoup de satisfaction combien les hommes et les femmes de l'air savaient être au rendez-vous lorsque notre pays fait appel à eux quand les circonstances l'exigent. Ce fut le cas en début d'année au Mali où la totalité de nos capacités ont été mobilisées avec une extrême réactivité et une grande efficacité. C'est le cas aussi, et il ne faut pas l'oublier, au quotidien, lorsque nous assurons nos missions de dissuasion et de protection sur le territoire national. Partout où ils sont engagés, les aviateurs forcent mon admiration par leur motivation et leur niveau opérationnel fondé sur une formation et un entraînement de haut niveau mais aussi et surtout sur leur aptitude à toujours innover, à travailler ensemble et avec leurs partenaires des autres armées ou d'armées de l'air alliées et à s'adapter à toutes les situations. Ils sont la première capacité de l'armée de l'air et ce sont eux qui nous ont permis les nombreux succès que nous avons connus dans l'exécution de nos missions permanentes ou d'intervention.
Dans le cadre des travaux de rédaction du dernier Livre blanc auxquels j'ai eu l'honneur de contribuer, j'ai toujours défendu l'idée que, au-delà des formats, le maintien de la cohérence entre les capacités est essentiel. Les choix que nous avons proposés et qui ont été repris dans la loi de programmation militaire 2014-2019 permettent à l'armée de l'air de maintenir cette cohérence. Le projet de loi de finances pour l'année 2014 qui nous réunit aujourd'hui est la déclinaison de la première annuité de cette LPM.
Même si d'importants efforts nous sont demandés, la poursuite de la modernisation de nos équipements et la priorité donnée à l'activité opérationnelle sont les leviers qui préservent cette cohérence. Ces efforts s'accompagneront aussi d'une diminution des effectifs que le contexte budgétaire rend nécessaire pour atteindre les objectifs fixés dans la LPM. Ces trois points sont pour moi essentiels : ils concernent directement les aviateurs à travers leur aptitude à assurer leurs missions, la garantie de leurs conditions de vie et de travail et la valorisation de leurs compétences. C'est ce projet de loi de programmation et sa première déclinaison, avec le projet de loi de finances 2014, que je souhaiterais aborder avec vous avant de répondre à vos questions.
Depuis le début des années 60, l'armée de l'air s'est structurée autour de deux missions permanentes : la protection de notre espace aérien national et la mission de dissuasion avec la mise en oeuvre de la composante aéroportée. Deux missions dont l'importance est confirmée dans le Livre blanc 2013.
Ces deux missions exécutées 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, nécessitent un système de détection performant, la mise en réseau de nos bases aériennes avec des centres de commandement et de conduite armés en permanence, une capacité d'appréciation juste et précise des situations, des équipements, des systèmes d'armes et un personnel très entraîné en raison de la complexité et de la grande réactivité des missions qui leurs sont confiées.
La mission de sûreté aérienne est une mission permanente qui garantit la souveraineté de notre espace aérien national. Grâce à la couverture radar de cet espace aérien et la mise en oeuvre de capacités d'intervention immédiates, nous sommes en mesure de faire face à l'ensemble des situations qui peuvent se présenter comme l'interception d'un aéronef hostile ou l'assistance à des appareils en difficulté. La loi de programmation 2008-2013 a décalé de plusieurs années la rénovation de nos radars. La 4e étape du programme SCCOA a été scindée en deux phases dans la précédente LPM, avec un décalage de trois ans a minima de la livraison de nouveaux radars de surveillance et de défense aériennes. Nous ne pouvons plus décaler les livraisons de ces radars car les obsolescences profondes du parc actuel, à la disponibilité de plus en plus précaire, aux coûts de maintenance élevés, fragilisent la protection du territoire national.
La LPM 2014-2019 a pris en compte ce besoin avec l'inscription de la poursuite du programme SCCOA qui amènera les centres français de détection et de contrôle au standard OTAN en 2015 et débutera le renouvellement indispensable des radars de défense aérienne. Dans ce cadre, le PLF 2014 prévoit la livraison de trois radars haute et moyenne altitude ainsi que la poursuite du processus de qualification de nos centres de détection et de contrôle.
Deuxième de nos missions permanentes : la mise en oeuvre de la composante aéroportée de la dissuasion. C'est une mission dont nous célèbrerons le cinquantième anniversaire l'année prochaine. Depuis 1964 l'armée de l'air contribue à la préservation de nos intérêts vitaux. C'est une composante, dont le coût actuel ne représente que 7% du budget global alloué à la dissuasion et qui a été réduite d'un tiers lors de la précédente LPM puisque nous sommes passés de trois à deux escadrons de chasse, suivant le respect du principe de stricte suffisance. La modernisation de cette composante a été inscrite dans la prochaine LPM et se traduira notamment dès l'année prochaine par le lancement de l'acquisition de la flotte d'avions ravitailleurs de type MRTT. En outre, l'année 2014 verra la poursuite des travaux liés à la rénovation à mi-vie de l'ASMP-A et les premiers travaux pour la définition de son successeur. Je tiens à signaler la réussite le 23 septembre dernier d'un tir d'évaluation des forces d'un ASMP-A par un Mirage 2000N. Le PLF 2014 prévoit des mesures de modernisation des transmissions nucléaires ainsi que les premières livraisons des Rafale biplace destinés à remplacer nos Mirage 2000N. Ces derniers équipent notre second escadron nucléaire qui sera transformé sur Rafale, au cours de la LPM à venir. Je souligne que les avions des forces aériennes stratégiques, les FAS, ne sont pas dédiés exclusivement à la mission nucléaire. Ils sont aussi capables d'agir sur tout le spectre des missions conventionnelles. Ce fut le cas lors des opérations en Libye et au Mali où des avions et des équipages des FAS ont été engagés avec succès. La préparation et l'exécution des raids lointains de Rafale armés de missiles de croisière SCALP présentent de nombreuses similitudes avec les missions exécutées dans le cadre de la dissuasion.
Je tiens à le préciser car nos deux missions structurantes de défense aérienne et de dissuasion nous ont permis de construire, autour d'une permanence forte centrée sur la réactivité, nos capacités de planification et de conduite des opérations aériennes, notre aptitude à recueillir et à fusionner tous les types de renseignement, à travailler en réseau, à basculer instantanément du temps de paix au temps de crise et à conduire des missions longues et complexes depuis le territoire national. Agrégées, ces capacités nous permettent d'être capables d'intervenir en toute autonomie dans une vraie cohérence d'ensemble. Si une de ces capacités venait à manquer, c'est l'efficacité globale du dispositif qui serait menacée.
Aujourd'hui, l'armée de l'air dispose d'une véritable capacité d'intervention dans un large spectre de crises. Parce que nous disposons d'avions ravitailleurs, nous sommes en mesure d'agir, à partir de nos bases aériennes, avec une très forte réactivité pour atteindre n'importe quel point dans la zone géographique d'intérêt définie par le Livre blanc. C'est ce que nous avons pu démontrer en Libye en 2011 et au Mali cette année. Capable de monter en puissance de façon très discrète au sein de nos bases aériennes, ou au contraire de façon visible, l'armée de l'air a démontré qu'elle pouvait offrir au décideur politique une large variété de modes opératoires, réversibles et dont la force peut être adaptée au contexte particulier de chaque crise.
La loi de programmation militaire 2014-2019 nous garantit le maintien de cette cohérence parce que, justement, elle préserve ces capacités socles en les modernisant, sans en privilégier une par rapport à une autre. Une modernisation qui se fera à un rythme moins rapide que nous l'avions souhaité initialement, une modernisation qui se fera sur des formats plus réduits, mais une modernisation qui privilégiera la cohérence de notre capacité opérationnelle globale. Le projet de loi de finances 2014, avec les livraisons et commandes prévues, s'inscrit dans la poursuite de notre modernisation. Mais il est indispensable pour cela qu'il s'appuie sur une loi de programmation qui garantit la cohérence pour l'avenir et permet un meilleur contrôle des engagements.
L'opération Serval au Mali, a démontré le potentiel et le niveau d'expertise acquis par l'armée de l'air qui, pour la première fois depuis très longtemps, a mené une opération multinationale en assumant sous l'autorité du CEMA le commandement de la composante aérienne. Nous avons pu planifier et conduire des opérations aériennes complexes à partir de la métropole, comme le 13 janvier lorsque nous avons conduit le raid aérien le plus long de l'histoire de l'armée de l'air et comme le 27 janvier avec l'opération aéroportée sur Tombouctou, la plus importante depuis Kolwezi en 1978. Cette capacité de commandement et de contrôle sera modernisée dans la LPM avec la poursuite, que j'évoquais précédemment, de l'évolution de nos centres d'opérations et de nos centres de contrôle vers le système ACCS de l'OTAN, un système otanien mis en oeuvre par les Européens et développé avec l'industrie européenne. L'interopérabilité avec nos partenaires de l'Alliance atlantique et européens constitue un axe majeur de la modernisation de ces moyens. La poursuite de la rénovation de nos centres de contrôle locaux et de nos avions AWACS contribuera à améliorer encore cette capacité de commandement et de contrôle. Le premier avion AWACS rénové sera livré l'année prochaine.
Ces avions AWACS participent également à notre capacité à recueillir du renseignement. Au coeur de la fonction connaissance anticipation, l'armée de l'air possède une aptitude naturelle à recueillir du renseignement parce qu'elle agit dans tout le spectre de la troisième dimension. Sur la période 2014-2019 cette capacité bénéficiera de l'acquisition de nombreux équipements comme en atteste la commande prévue de quatre systèmes de drones MALE représentant 12 vecteurs. Afin de répondre au besoin opérationnel immédiat, deux Reapers ont été commandés pour être déployés en opérations et compléter l'action de nos Harfang très sollicités sur le théâtre malien puisqu'ils viennent récemment de franchir la barre des deux mille heures de vol depuis leur engagement le 17 janvier dernier.
Des avions légers de surveillance et de renseignement, dont l'emploi répond au besoin mutualisé des services de renseignement, permettront de compléter le dispositif d'évaluation et de suivi des crises. L'acquisition d'une première capacité est inscrite dans le PLF 2014. Les capacités de renseignement d'origine électromagnétique électronique du Transall Gabriel, appareil indispensable présent sur tous les théâtres d'opérations, seront remplacées, à l'horizon de l'arrêt de la flotte Transall, avec l'entrée en service de la charge universelle de guerre électronique CUGE, qui sera mise en oeuvre sur un vecteur à déterminer. Enfin, le domaine spatial bénéficiera de la consolidation de moyens existants de surveillance de l'espace extra-atmosphérique ainsi que de la mise sur orbite durant la LPM de deux nouveaux satellites d'observation MUSIS et du développement du programme CERES prévu pour une mise en service au plus tard en 2020.
Comme vous pouvez le constater, la LPM nous permet d'accroître notre capacité à recueillir du renseignement. C'est pourquoi nous travaillons actuellement sur l'organisation destinée à tirer le meilleur parti de tous ces capteurs afin d'être capables de traiter la considérable quantité d'informations qu'ils permettront d'obtenir, en temps différé ou en temps réel selon la situation.
Nos capacités d'intervention vont se moderniser avec la poursuite de la montée en puissance de la flotte Rafale dont la livraison s'effectuera à un rythme différent de celui qui était prévu : 19 Rafale rejoindront l'armée de l'air sur la période de la LPM. L'année prochaine ce sont 9 avions issus de la quatrième tranche qui nous seront livrés avec des évolutions majeures puisqu'ils seront notamment équipés du nouveau radar à antenne active, une première pour un appareil de combat en Europe, ainsi que d'une nouvelle version du système SPECTRA de guerre électronique. En parallèle de ces livraisons, les capacités des Rafale en service vont évoluer puisque la LPM prévoit l'intégration sur cet appareil du missile air-air longue portée METEOR et du pod de désignation de dernière génération.
Le ralentissement des livraisons de Rafale sera compensé par la rénovation des Mirage 2000D et l'utilisation prolongée de flottes plus anciennes comme celle des Mirage 2000-5, ce qui nous permettra de préserver la cohérence de notre aviation de chasse en suivant le principe de différenciation des forces défini par le Livre blanc. La répartition Rafale-Mirage 2000 évoluera dans le temps en fonction des besoins de remplacement de la flotte Mirage 2000 après 2020 et nous travaillons à un schéma directeur de l'aviation de combat qui éclairera l'avenir afin d'y intégrer les réflexions sur les futures évolutions du Rafale et l'arrivée des futurs systèmes de combat aériens.
Je rappelle que le format de notre aviation de chasse aura été diminué deux fois d'un tiers en deux lois de programmation. La première diminution en 2008 a été compensée par la polyvalence du Rafale. Celle à venir le sera grâce aux efforts portés sur le MCO et à la différenciation de l'entraînement possible avec la mise en place du projet Cognac 2016. Cette dernière évolution est la dernière marche pour que notre aviation de chasse reste encore une capacité de combat majeure capable d'être engagée sur tous les théâtres d'opérations extérieures et sur le territoire national.
La cohérence passe nécessairement par la détention de capacités de projection qui sont essentielles à l'ensemble de nos missions.
Les avions ravitailleurs sont la clé de voûte de toutes nos opérations aériennes. Sans eux, nous ne pouvons disposer de la réactivité, de l'allonge et de l'endurance nécessaires pour assurer nos missions de dissuasion et d'intervention. Sans eux, l'emploi de notre aviation de chasse serait peu ou prou limité au territoire national. Sans eux il n'y aurait pas de composante aéroportée de la dissuasion. Le raid du 13 janvier vers le Mali a nécessité cinq ravitaillements en vol impliquant 3 C135. L'âge avancé de ces 14 appareils, bientôt cinquante ans, fait peser un risque de rupture capacitaire constant et leur utilisation impose de nombreuses heures de maintenance. Leur remplacement constitue pour moi une priorité essentielle. Je suis heureux de voir que la commande de 12 avions de type MRTT, dont deux seront livrés sur la période de la LPM, est prévue dans le PLF 2014. La commande de MRTT représente une avancée importante mais qui nous impose une vigilance accrue sur nos C135 que nous allons conserver de nombreuses années encore en raison du calendrier de livraison. Si nous devions connaître une embellie budgétaire dans les années à venir, je recommande que la priorité soit donnée à l'accélération des livraisons des MRTT, projet par ailleurs porteur de belles coopérations européennes. Par leur polyvalence et leurs performances, ces avions vont nous offrir de nombreuses et nouvelles perspectives d'emploi. Ils remplaceront nos C135 mais aussi nos trois Airbus A310 de transport stratégique. Enfin, l'acquisition de nos deux A340, que nous louons actuellement, est inscrite dans le PLF 2014. Ces avions nous sont indispensables pour le transport de troupes sur de très longues distances.
Dans le domaine du transport tactique nous disposerons en fin de LPM de 15 A400M. L'opération Serval a démontré combien cette composante était indispensable à la manoeuvre aéroterrestre pour se poser au coeur des zones de combat sur des terrains sommaires. L'A400M va donner une nouvelle dimension à notre aviation de transport et la faire entrer dans une nouvelle ère. L'arrivée officielle du premier appareil, baptisé « ville d'Orléans » a été marquée par une cérémonie fin septembre en présence de M. le ministre de la Défense. Un deuxième avion devrait bientôt rejoindre la base aérienne orléanaise ainsi que quatre autres en 2014 comme le prévoit le PLF.
Le décalage du calendrier de livraisons de ces appareils nous oblige à maintenir en service 14 C160 afin de préserver les compétences tactiques de nos équipages et notre capacité opérationnelle. C'est le même principe qui a prévalu pour l'aviation de chasse : maintenir des flottes plus anciennes pour pallier l'étalement des livraisons et préserver la cohérence d'ensemble. C'est une nécessité mais aussi un défi. Je suis également très satisfait de la rénovation des 14 C130, utilisés notamment par les forces spéciales, indispensables pour l'exécution de leurs missions dans l'avenir.
Enfin la modernisation de nos équipements prévue dans la LPM prend également en compte nos capacités d'entraînement qui sont essentielles pour que nous disposions d'équipages prêts à intervenir sans délais. Pour cela la refonte de l'entraînement et de la formation des pilotes de chasse dans le cadre du projet Cognac 2016 est fondamentale. Ce projet s'appuie sur l'acquisition d'avions d'entrainement turbopropulsés de dernière génération. Ils nous permettront de mieux former nos jeunes pilotes et de mettre en oeuvre le principe d'un entrainement différencié qui garantira notre aptitude à soutenir les opérations dans la durée dans un format réduit. C'est une approche innovante, dont je constate qu'elle intéresse de nombreuses armées de l'air, qui permet de nous adapter de façon réaliste au contexte budgétaire tout en modernisant nos capacités de formation. Ce projet permettra en outre de diminuer significativement les coûts de fonctionnement de notre flotte école. C'est pourquoi je lui accorde tant d'importance en visant un lancement au plus tôt pour être au rendez-vous de la livraison des appareils en 2017.
La modernisation de nos équipements constitue donc ma priorité pour préserver la cohérence de l'armée de l'air. Elle est indissociable du maintien d'une activité aérienne suffisante qui représente aussi une priorité. Une priorité essentielle parce que toutes les opérations récentes ont démontré que, pour réaliser les missions les plus difficiles, notamment l'entrée en premier sur un théâtre d'opérations, qui se joue toujours en quelques heures après la décision du Président de la République, il est indispensable de disposer d'équipages entraînés au meilleur niveau.
Notre capacité opérationnelle repose sur le maintien en conditions de nos matériels aéronautiques qui nécessite un pilotage au plus près des forces et de leur activité réelle et une dotation suffisante en entretien programmé du matériel, l'EPM.
Le MCO aéronautique est le coeur du domaine d'expertise de la SIMMAD et de l'armée de l'air. Nous avons réorganisé nos structures et mobilisé tous les acteurs du MCO, les forces bien sûr mais aussi l'industrie étatique et privée. La SIMMAD, aux côtés des unités de soutien aéronautique et en lien avec les industriels et la DGA, a ainsi fait évoluer les marchés d'une logique de disponibilité vers une logique d'activité, en préservant la flexibilité exigée par les engagements opérationnels et avec un souci constant de maîtrise et de réduction des coûts. Le plus important est de disposer du nombre suffisant d'aéronefs disponibles lorsque nous en avons vraiment besoin. La mise en place de plateaux techniques dans la dynamique du pôle de MCO aéronautique bordelais a très rapidement porté ses fruits. L'identification des difficultés technico-logistiques et la définition en commun de solutions appropriées ont permis d'aboutir à des résultats significatifs. À Saint-Dizier par exemple, la qualité de l'activité des Rafale a été considérablement augmentée alors que la disponibilité en OPEX reste exceptionnelle. Ces résultats démontrent la pertinence et la cohérence des choix qui ont été faits dans le domaine de la gouvernance du MCO, tant au niveau de la SIMMAD qu'à celui du soutien opérationnel sur les bases aériennes. Ces succès nous encouragent à poursuivre dans cette voie mais il ne s'agit que d'une première étape, de nombreux efforts restent à faire.
Le MCO aéronautique nécessite également de disposer d'une dotation suffisante en entretien programmé du matériel, l'EPM. Cela n'a pas été le cas lors de la précédente LPM puisque la sous-dotation de l'EPM a conduit à un déficit, sur la période 2009-2014, de plus de 1 milliard d'euros de crédits d'activité par rapport au besoin. En 2013, l'armée de l'air a dû limiter l'activité des équipages et prendre des mesures affectant le niveau de formation et d'entraînement telles que l'annulation de notre participation à des exercices majeurs, comme Red Flag aux Etats-Unis par exemple et à retirer de façon anticipée des équipages des unités de combat.
Les perspectives 2014-2015 conduisent à maintenir le niveau d'activité de 2013, grâce à l'effort financier important consenti sur l'EPM par la LPM, mais cette activité restera insuffisante (environ -20% par rapport aux normes d'entraînement). Elle ne pourrait être maintenue à ce niveau dans le temps sans dégradation considérable du niveau opérationnel. C'est pour moi une préoccupation majeure car le maintien de certaines compétences est dès à présent fragilisé. Notre objectif est de remonter l'activité aérienne au niveau requis après 2016 en s'appuyant sur la rejointe du nouveau modèle, sur la mise en place de l'entraînement différencié et sur un plan d'optimisation du MCO élaboré par la SIMMAD en associant bien sûr la DGA.
Enfin, la dernière priorité, la plus importante, que je souhaiterais aborder devant vous, concerne les hommes et les femmes de l'armée de l'air. Au cours de la dernière loi de programmation, ils ont su faire face avec beaucoup d'abnégation aux différentes réformes qui les ont directement touchés. Je rappelle que suite aux réformes annoncées en 2008 nous avons dû procéder à la fermeture de 12 bases aériennes et à la dissolution d'une quinzaine d'unités majeures ainsi qu'à la diminution de nos effectifs de 15900 personnes sur la période de la LPM précédente, ce qui correspond à une baisse du quart de nos effectifs.
De nouveaux efforts important seront demandés aux aviateurs. Les cibles en effectifs définies dans la LPM prévoient une réduction de 34 000 postes au sein du ministère sur la période 2014-2020. Pour 2014, la cible de déflation de nos effectifs est de 2 100 personnes sur les 7 881 du ministère de la Défense, soit 26% du total.
Pour l'armée de l'air, qui vient de mener une réforme importante depuis 2008, il n'y a quasiment plus de réduction d'effectifs possibles par des réorganisations fonctionnelles. Nous les avons faites lors de la précédente LPM. Réduire les effectifs nécessite donc la mise en place d'un nouveau plan de restructurations. Les mesures à venir en 2014 qui ont été annoncées par le ministre de la Défense concernent de nombreuses implantations. Parmi ces mesures je souligne à titre d'exemple la fin de l'activité aérienne à Dijon et le transfert à Cazaux de l'escadron d'entraînement 2/2 « Côte d'Or », la dissolution de l'escadron de défense sol/air de Luxeuil, la fermeture du détachement air de Varennes sur Allier, la transformation des bases de Saintes et de Châteaudun en éléments air. Pour parler franchement, ce plan me paraît indispensable car certains rapprochements nous permettront de mieux fonctionner avec une armée de l'air resserrée mais dont la réussite opérationnelle est conditionnée par son aptitude à engager toutes ses capacités dans une manoeuvre d'ensemble.
Ces restructurations ne peuvent être conduites isolément. Elles prennent en considération les bases de défense, dont j'aime souligner qu'elles participent aux missions opérationnelles de l'armée de l'air qui opère au quotidien à partir de ses implantations, que ce soit pour les missions permanentes ou pour les missions d'intervention. Elles intègrent aussi les services et directions interarmées dans lesquels travaillent 22% des aviateurs.
Nous conduisons une vaste réflexion sur le modèle RH futur de l'armée de l'air prenant en compte notamment l'aspect échantillonaire de certaines spécialités, le recrutement, l'avancement dans le contexte de limites d'âge allongées, la mobilité, etc. C'est un chantier important qui prend en compte les aspirations de notre personnel et vise avant tout à le valoriser car comme je le soulignais au début de cette intervention, il constitue notre première capacité opérationnelle. Ce travail s'accompagne d'une réflexion sur l'identité de l'aviateur dans le contexte interarmées que nous connaissons.
Mesdames, messieurs les sénateurs, pour conclure je souhaiterais vous indiquer que les aviateurs sont conscients de l'effort que la Nation réalise à travers cette loi de programmation pour préserver leur capacité à exécuter leurs missions. Ils sont aussi conscients des efforts qui leur seront demandés pour que les objectifs de cette loi de programmation soient atteints.
Avec eux j'ai souhaité mettre en place un projet « Unis pour Faire Face » afin de ne pas subir notre destin mais de le prendre en main. C'est un projet qui s'inscrit dans les priorités du Livre blanc et de la loi de programmation que nous venons d'évoquer : modernisation de nos capacités, activité aérienne, simplification de nos structures, ouverture vers l'extérieur, valorisation des aviateurs, sont autant d'axes d'effort portés par ce projet. Ce dernier donne à l'armée de l'air une direction cohérente avec les moyens qui nous sont alloués. Cette modernisation est lancée, elle nous permettra de nous ouvrir toujours plus vers l'extérieur car les projets qu'elle porte sont des viviers de coopération formidables, notamment au niveau européen.
L'A400M, porté par sept pays européens, va donner une dynamique encore plus forte au commandement du transport aérien européen qui est engagé sur une voie d'ouverture et de standardisation des normes européennes. S'agissant des ravitailleurs MRTT, nous travaillons à la mutualisation de leur emploi avec six autres nations européennes dans des domaines ciblés comme la formation et la maintenance. L'acquisition de drones Reaper ouvre la voie à la création d'un groupe d'utilisateurs européens, l'évolution du SCCOA vers le système ACCS va renforcer les coopérations, la mise en oeuvre de normes européennes communes est un chantier prometteur. Ces quelques exemples montrent que la future LPM ouvre de nombreuses opportunités dans le domaine aéronautique que nous devons absolument saisir pour avancer de façon réaliste et pragmatique vers une défense plus européenne sans abandonner notre autonomie d'action et de décision.
Cette ouverture concerne aussi directement nos bases aériennes. Elles évoluent, je les souhaite ouvertes vers la société civile car elles présentent pour cela des atouts remarquables pour notre Nation et son développement. Le tutorat de jeunes lycéens par nos élèves officiers est un projet superbement réussi qui profite à tous et que je souhaite voir étendu à l'ensemble de nos bases aériennes. Ces dernières peuvent être le creuset de rapprochement entre les armées et l'enseignement, l'industrie, ou la recherche, en partenariat avec les collectivités.
Vous le constatez notre projet est résolument tourné vers l'avenir et vers l'extérieur. Un avenir qui nous est ouvert par les perspectives de la loi de programmation qui débute dans deux mois avec l'annuité 2014. La vertu d'une loi de programmation est de fixer les engagements pour les années à venir. C'est pourquoi nous en avons tant besoin, notre modèle nécessitant ces engagements sur l'avenir qui sont ensuite déclinés par les PLF. En revanche, c'est de sa réalisation, plus tendue que les précédentes mais je l'espère plus vertueuse, que dépendra notre cohérence et notre capacité à assurer nos missions. L'exercice est difficile mais je peux vous assurer que notre pays pourra compter sur les capacités d'adaptation et d'innovation des aviateurs pour parvenir aux objectifs fixés.
M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis du programme 146 « équipement des forces » - Comment voyez-vous le futur de l'aviation de combat européenne ? Il y a en effet trois avions de combat européens, certains disent même quatre avec le Joint Strike Fighter (JSF) - comment cela pourrait-il converger ? D'autant qu'il faut également prendre en compte les drones de combat. Deuxième question : les drones MALE Reaper, nous avons toujours dit ici au Sénat qu'il ne fallait pas les franciser inutilement et qu'il convenait de conserver notre argent pour la troisième génération. Comment voyez-vous les choses ? Il n'y aura pas de certification pour les deux premiers acquis en urgence opérationnelle, au moins dans un premier temps. Mais faut-il certifier les dix autres et si oui cette certification ne risque-t-elle pas de bloquer l'achat des dix autres Reaper ? Concernant les missiles, nous sommes très inquiets au Sénat de la réduction des cibles des programmes et en particulier, pour ce qui concerne l'armée de l'air, pour les missiles Aster qui équipement les systèmes de défense anti-aérienne SAMP/T et les missiles air-air Meteor. Est-ce que l'on a passé un seuil critique ? Enfin, en tant que sénateur de Gironde, je constate que la presse locale se fait l'écho de rumeurs inquiétantes concernant la SIMMAD. Qu'en est-il ?
Général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'Air- Le futur de l'aviation de combat est un vrai sujet qui conditionne l'avenir de nos capacités militaires et l'avenir de notre industrie aéronautique. Il y a eu une étude très intéressante de l'Académie de l'Air et de l'Espace sur le sujet à laquelle je vous renvoie. Je marquerais néanmoins une légère différence d'appréciation avec les auteurs de cette étude, car pour moi le Rafale est un avion de combat beaucoup plus proche de la cinquième génération que de la quatrième, ce qui n'est le cas ni du Gripen, ni de l'Eurofighter, même si je considère comme peu pertinente cette approche par « génération ». Ce qui fait la différence en sa faveur, c'est sa polyvalence, sa capacité de fusion des informations fournies par les capteurs et sa capacité de guerre électronique. Pour autant, il faut préparer l'avenir du Rafale, et c'est maintenant qu'il faut prendre les décisions qui s'imposent. Nous sommes en train de mener une étude approfondie sur ce sujet au sein de l'armée de l'air. Ce qui est clair pour moi c'est qu'il ne faut pas focaliser le début de la réflexion sur les équipements - avions de combat ou drones de combat. La future capacité de combat aérienne sera un « système » capable d'associer de la façon la plus efficace possible des capteurs et des effecteurs. Les capacités critiques de ce « système » reposeront sur sa capacité d'intégration des données et des missions ainsi que sur ses liaisons de données. Il faut travailler à l'établissement de normes dans ce domaine dès aujourd'hui au niveau européen, si on veut éviter de se les faire imposer demain. Toute la question est de savoir avec qui travailler ? C'est une coopération qui ne se limite pas aux seuls pays européens.
Concernant le Reaper, la réponse dépend du périmètre mis dans le mot « francisation ». Nous avons déjà fait le choix des satellites de communication avec lesquels nous opérerons cette capacité. Il y a ensuite un travail important sur la certification et la navigabilité pour les intégrer dans l'espace aérien européen. Je suis personnellement tout à fait en faveur d'une filière de drones MALE européens dans l'avenir. Mais cette filière, si elle voit le jour, ne sera pas en mesure de fournir des drones MALE avant 2022-2023. D'ici là, il faut impérativement combler la lacune capacitaire et plus encore acquérir l'expérience qui nous permettra de spécifier avec précision les besoins opérationnels. Il y aura bientôt l'exercice SERPENTEX - à Solenzara, au mois de décembre prochain. Il est prévu qu'un drone Reaper italien décolle d'Italie et opère en France. Une réussite de cette mission représenterait un premier pas vers la certification européenne. Le niveau suivant de francisation concernera la capacité à intégrer nos propres capteurs.
Concernant les stocks de missiles et de munitions, les cibles seront atteintes plus lentement que prévu. C'est le cas notamment pour le Meteor et l'Aster 30. C'est un vrai sujet sur lequel nous devons rester vigilants, mais la LPM prévoit la livraison de ces armements.
Enfin, concernant la SIMMAD, nous avons une vision différente de la DGA ; celle-ci propose de reprendre une partie des missions de la SIMMAD sous couvert de son expertise dans les négociations avec les industriels. Nous avons un projet différent qui préconise de passer d'une logique de disponibilité à une logique d'activité. Nous avons mis en place des « guichets » avec les industriels sur nos bases aériennes et des plateaux techniques à la SIMMAD afin de coller au mieux la disponibilité à notre activité. Nous ne souhaitons pas revenir en arrière. Compte tenu des difficultés budgétaires il s'agit pour nous d'ajuster au plus près le besoin opérationnel aux moyens budgétaires. Il nous faut travailler ensemble avec tous les acteurs du MCO, dont la DGA, pour examiner, flotte par flotte, ce qui permet le mieux d'ajuster les contrats aux besoins réels.
M. Daniel Reiner, président - Les trois industriels Dassault, Finmeccanica et EADS viennent de réitérer l'offre qu'ils avaient déjà faite pour le renouvellement de l'offre sur le Talarion pour un milliard d'euros. J'ai écouté ce matin Michel Barnier à l'IHEDN ; je serai quand même très étonné que les chefs d'Etat et de gouvernement ne fassent pas une annonce à Bruxelles en décembre sur ce sujet.
En ce qui concerne l'aviation de combat, nous avons été avec mon collègue Xavier Pintat, dans le cadre de l'assemblée parlementaire de l'OTAN, visiter les usines de Lockheed Martin à Dallas Fort Worth. Cet avion n'a en réalité rien d'extraordinairement nouveau par rapport aux autres avions de combat, à part le fait qu'il puisse emporter les armes dans sa soute, ce qui lui confère une certaine furtivité. Pour le reste, les équipements sont sans doute meilleurs que les équipements actuels, mais pas en rupture. Pourtant le fait qu'un certain nombre de pays européens soient englués dans cette affaire compromet le futur de l'aéronautique militaire européenne. Pour les drones de combat, nous savons en revanche que c'est l'accord entre la France et le Royaume-Uni qui conditionne l'avenir. Alors que pour les drones MALE, ce sera l'accord que nous serons capables de faire ou pas avec les Allemands et les Italiens. Je voudrais par ailleurs savoir comment fait-on pour régénérer le matériel que nous déployons dans les opérations extérieures. Il s'use beaucoup. Comment gère-t-on cela ?
Général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'Air- Concernant la proposition d'un MALE européen je pense qu'elle est tout à fait intéressante. Un milliard pour trois pays, cela représente trois cent trente-trois millions par pays sur dix ans, soit environ une trentaine de millions d'euros par an. Si nous ne sommes plus capables de consentir cet effort au sein du budget de recherche et de développement, autant renoncer à cette capacité industrielle. Il y a également la proposition d'une communauté européenne Reaper qui est très séduisante et très complémentaire. Il faut absolument que nous acquérions de l'expérience pour construire l'avenir sur des bases solides, en sachant ce que l'on veut. Pour ce qui concerne le JSF, le Rafale intègre déjà de nombreuses fonctionnalités de cet appareil pour autant que j'en connaisse.
S'agissant de la régénération du potentiel, nous savons exactement chiffrer combien ce que les OPEX coûtent en plus de l'activité normale. C'est pourquoi il faut que cela soit pris en compte hors du budget de la défense, car nous n'avons pas les moyens de financer ces surcoûts.
M. Daniel Reiner, président - Nous savons tous que la façon dont nous entrerons dans la LPM - c'est-à-dire avec quel report de charge - sera déterminant pour son exécution. Nous en avons beaucoup débattu au Sénat. Et nous avons prévu une clause de revoyure à la fin 2015 ; nous avons mis le doigt sur le sujet.
Général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'Air- Nous avons une grande confiance en vous. Pour ma part, vous le savez, j'ai deux priorités majeures: le ravitaillement en vol et le maintien de l'activité.
M. Jean-Pierre Chevènement. - Pourriez-vous nous parler de la rénovation des Mirage 2000. J'avais cru comprendre que ce programme était abandonné. On me dit qu'il est repris, mais je crains qu'il ne porte que sur un trop petit nombre d'unités. Par ailleurs, les premières unités rénovées seront livrées en 2018. N'est-ce pas trop tard ? Comment allez-vous faire jusque-là ?
Général Denis Mercier, chef d'état-major de l'armée de l'Air- N'oublions pas que le format de l'aviation de combat a été réduit d'un tiers en 2008 et à nouveau d'un tiers en 2013 - ce qui fait une réduction de moitié sur deux LPM. On ne peut pas aller au-delà sans changer le niveau d'ambition. Le format de l'aviation de combat repose sur deux flottes : le Rafale bien sûr qui fait l'objet d'une modernisation régulière et le Mirage 2000D que nous essaierons de maintenir opérationnel au-delà de 2025. Bien sûr je souhaite voir arriver les premiers avions rénovés au plus tôt. . En raison de l'étalement des commandes de Rafale, nous conserverons aussi plus longtemps le 2000-5 qui est un avion dont le radar est tout à fait performant mais dont la cellule a été prévue pour 5 000 h de vol ; nous l'avons déjà porté à 7 000 h de vol. Il faut être sûr de pouvoir l'amener jusqu'à 9 000 h. Des études vont être menées pour vérifier la faisabilité de cette extension. Sur les 2000-D nous avons prévu de traiter les obsolescences du radar, d'apporter la capacité canon, d'intégrer les missiles MICA à la place des MAGIC et enfin, d'intégrer la nacelle ASTAC des Mirage F1. Nous remplacerons au-delà de 2020 ces appareils par des Rafale. Ce qui est une excellente nouvelle pour le Rafale, car cela signifie que la chaîne de production restera active encore très longtemps. Donc au bout du compte, nous nous y retrouvons.
Loi de finances pour 2014 - Audition de l'amiral Bernard Rogel, chef d'état-major de la Marine (mission Défense)
La commission auditionne l'amiral Bernard Rogel, chef d'état-major de la Marine, sur le projet de loi de finances pour 2014 (mission Défense).
Amiral Bernard Rogel, chef d'état-major de la Marine - Je suis heureux de me trouver à nouveau devant vous pour vous donner mon appréciation du projet de loi de finances 2014. Vous le savez, j'ai coutume de commencer mes auditions en rappelant les opérations que la marine réalise, tous les jours, tout au long de l'année, sur tous les océans. Je l'avais fait en juin, je l'ai refait en septembre, en insistant sur les trois pieds que sont les opérations permanentes, les opérations extérieures et notre participation à l'action de l'État en mer. Vous en êtes familiers. Aussi vais-je vous les présenter aujourd'hui sous la forme d'une remise à jour car il est important pour moi de vous démontrer que les missions sur mer se déroulent au quotidien. Je voudrais d'ailleurs commencer par vous dire qu'en moyenne, 4 000 marins sont en mer tandis que 1 700 autres assurent une veille ou une alerte sur nos côtes, car je ne voudrais pas que l'on oublie tous ceux qui assurent une tâche quotidienne permanente au service de nos concitoyens : cross, sémaphores, alerte et missions de recherche et de sauvetage (SAR), moyens de remorquages ou anti-pollution, appartenant en propre à la Marine ou affrétés.
Revenons aux opérations : pour les opérations extérieures, notons notre participation continue à la mission SERVAL, avec un détachement d'Atlantique 2 et des commandos marine, la mission ATALANTA, assurée pour nous a minima en octobre par un de nos avions Falcon 50 déployé à Djibouti et enfin la mission CORYMBE de présence dans le Golfe de Guinée, qui est toujours instable, comme l'a encore montré l'enlèvement de deux ressortissants américains sur un supply ship très récemment.
Mais aussi les opérations permanentes : la mission de dissuasion, dont on ne parle jamais, je pourrais même dire qui est ignorée tellement elle fonctionne bien, mais qui est assurée de manière permanente et remarquable par nos sous-mariniers. Elle inclut également un volet de sûreté de nos approches en Atlantique, que nous menons de façon régulière, et qui ont mobilisé, à titre d'exemple, en octobre, pas moins de deux frégates, un patrouilleur de haute mer, un sous-marin d'attaque, deux avions Atlantique 2 et une grande partie des moyens de guerre des mines stationnés à Brest .
Citons notre présence également en ce moment en Méditerranée orientale, où nos moyens (bâtiments, sous-marins et avions de patrouille maritime), continuent à recueillir des renseignements précieux. La frégate anti-aérienne Cassard a relevé le Chevalier Paul, qui, en retour de mission a assuré, pour un temps, les fonctions défense aérienne du porte-avions américain Nimitz qui vient de se déployer en Méditerranée. Il l'avait déjà fait dans le Golfe arabo-persique au profit du porte-avions Uss John Stennis, ce qui est un gage très fort de confiance de la part de nos alliés américains.
Ou celle dans le Golfe arabo-persique, puisque la frégate Aconit assure une présence aujourd'hui dans cette zone où nous avons déployé jusqu'à la fin du mois de juillet deux chasseurs de mines pour participer à la cartographie de cette zone à fort potentiel de danger mais vitale pour notre économie. Notons là encore que nous avons été sollicités par les Américains pour participer à l'escorte, lors d'un transit dans le détroit d'Ormuz, du porte-avions USS Truman. Je n'oublierai pas le très prochain déploiement du Groupe aéronaval en océan Indien.
Le domaine de l'action de l'État en mer n'est pas en reste. Le patrouilleur l'Adroit a participé du 16 septembre au 11 octobre au Sud de l'Espagne à la campagne de lutte contre l'immigration illicite coordonnée par l'agence FRONTEX. 347 migrants ont été interceptés (je pourrais dire sauvés) lors de cette opération par l'ensemble des participants. Notons qu'au cours de cette opération, menée conjointement avec les Espagnols, les Portugais et les Islandais, 3,2 tonnes de cannabis ont été interceptées.
Dans le domaine de la lutte contre le trafic de drogue, que nous menons conjointement avec les pays riverains du Golfe du Mexique, citons la saisie par la frégate Ventôse, en juillet dernier, de 438kg de cocaïne sur le voilier espagnol Troll au large de la Martinique ou encore le 10 octobre dernier l'interception par la frégate Germinal de retour d'une mission Corymbe dans le Golfe de Guinée du voilier Blue Eyes transportant plus de 300 kg de cocaïne. Je vous rappelle à cette occasion que plus de 35 tonnes de drogue ont été saisies en deux ans par les moyens de la Marine sur tous les océans.
Enfin, en matière de police des pêches, nos bâtiments stationnés en Guyane ont participé en septembre à une opération conjointe avec la marine brésilienne permettant de dérouter en quelques jours six navires de pêche brésiliens en situation irrégulière. En Nouvelle Calédonie, un pécheur chinois illicite en infraction, observé par un Gardian, a été intercepté par un patrouilleur P400 dans notre zone économique exclusive (ZEE) et ramené à Nouméa.
À la pointe de la Bretagne pendant la dernière tempête nous avons assisté un chimiquier en avarie à 15 nautiques des côtes et assuré la recherche de nombreux conteneurs perdus par un navire entre l'Espagne et la pointe de la Bretagne, autant de dangers pour la sécurité des bâtiments. Je n'oublie pas non plus les deux sauvetages effectués par un patrouilleur de service public (PSP) la semaine dernière lors de la mini-transat mise à mal par les mauvaises conditions météo.
Enfin, de façon générale, notre qualité de pays riverain sur tous les océans nous confère une place de droit dans les institutions de dialogues régionaux, que ce soit dans le Pacifique, ou dans l'océan Indien ; cette place est renforcée par la participation régulière de nos bâtiments à des coopérations navales avec nombre de pays partenaires. Ce volet diplomatique met en lumière une autre facette de l'activité opérationnelle de nos bâtiments, qui agissent 24 heures sur 24 sur toutes les mers. Il est d'ailleurs largement développé dans le Livre blanc mais son application quotidienne pour la marine mérite d'être signalée.
Venons-en maintenant plus précisément au projet de loi de finances pour l'année qui vient. En juin, je vous avais donné mon point de vue sur le Livre blanc et avais évoqué ce que j'avais appelé les quatre « fragilités ». En septembre, j'étais revenu sur ces quatre points en les nommant désormais « points de vigilance », dans le cadre de la construction de la LPM. Nous voici dans les prévisions concrètes pour 2014, il s'agit donc désormais pour nous d'« axes d'effort ». Car la première annuité d'une LPM est essentielle. Elle confirme le cap et oriente l'ensemble de la LPM.
En effet, si cette première annuité de la nouvelle LPM est évidemment cohérente avec la programmation sur le moyen terme, elle permet aussi d'en déterminer dès maintenant les limites et les mesures associées.
En premier lieu, j'avais abordé la tension sur les effectifs liée aux déflations. Leur volume en 2014 pour la marine correspond au reste-à-faire de la précédente loi, à savoir environ 650 postes. Ces postes, nous les avons presque tous identifiés. Leur suppression répond à une logique de rationalisation très poussée de nos structures, qui avait été menée lors de la précédente LPM et RGPP en raison de l'effort considérable qui avait été demandé à la Marine. Cet effort a abouti à une organisation la plus simple qui soit, à double titre :
- du point de vue géographique, nous sommes désormais concentrés sur 4 ports dont 2 principaux et 2 que je pourrais qualifier de ports de construction et 4 bases aéronavales (1 pour les avions de patrouille maritime PATMAR, 1 pour la Chasse et 2 pour les hélicoptères) ; chaque site est regroupé, optimisé, rationnalisé, densifié à l'extrême en fonction des distances géographiques d'intervention et des économies réalisables par regroupement de fonctions. C'est pour cela que les deux plus importantes bases de défense (BDD) hors Paris sont des BDD « marine » ;
- du point de vue fonctionnel, la logique de milieu est respectée avec des mutualisations déjà opérées, en matière d'entraînement notamment.
J'ajoute, que, en matière de soutien commun, tout ce qui a pu être mutualisé a été transféré aux bases de défense. Enfin, les fonctions qui avaient leur équivalent dans les autres armées ont été intégralement mises en commun, qu'il s'agisse de la formation des pilotes, du maintien en condition opérationnelle (MCO) aéronautique, de la gestion des munitions, du soutien médical, des réseaux de télécommunication, du commissariat ou des essences.
Dans ces domaines, la marine n'a pas fait que partager une partie de sa compétence, elle a tout confié aux différents organismes, sans conserver aucune structure dédiée en interne. Il n'y a pas de doublons.
Dans ce cadre, quels efforts supplémentaires sur les effectifs pouvons-nous fournir ? J'ai d'ores et déjà pris la décision de retirer de façon anticipée deux bâtiments de la liste de la flotte, le transport de chaland de débarquement Siroco et le pétrolier ravitailleur Meuse, conformément au Livre blanc. Ces retraits du service actif auront lieu en 2015, afin de permettre la manoeuvre des ressources humaines associée. D'autres désarmements interviendront par la suite, dont des bâtiments anciens qui seront remplacés par d'autres à équipages réduits, notamment les frégates multi missions (FREMM).
Nous continuons à réfléchir à la suite, dans le cadre plus large des analyses fonctionnelles à l'échelle du ministère demandées par le ministre. Mais ne vous leurrez pas : les rationalisations et regroupements ont déjà eu lieu et tout effort supplémentaire reviendrait encore à attaquer, d'une manière ou d'une autre, les forces opérationnelles.
Un autre volet me préoccupe cependant. Il s'agit de la déflation en officiers, qui s'avère plus importante que prévue, soit 88 postes pour l'année 2014 dans la marine au lieu des 20 à 30 que constituait le flux moyen dans la période 2008-2013. C'est assumé, mais je reste vigilant, car nous sommes là dans des petits chiffres. Et, pour les raisons que j'évoquais à l'instant, dans la marine, ces petits chiffres ne se traduisent pas par des petites conséquences.
Au bilan, la marine voit son Titre II légèrement diminuer de façon cohérente avec les prévisions de déflations, mais sans aucune marge.
En second lieu, je vous avais parlé de l'activité. En la matière, la priorité affichée par la LPM est respectée. Les crédits d'entretien programmé du matériel sont abondés en 2014, ce qui nous permettra de maintenir le taux d'activité à la mer à un niveau comparable à celui de 2013, c'est-à-dire, en moyenne 15% en-dessous de la norme rappelée dans le rapport annexé du projet de LPM. Ils ne nous permettront pas, en revanche, de combler les retards accumulés pour le re-complètement des stocks de rechange. C'est donc, pour ce qui concerne l'activité, un projet de loi de finances de maintien, dans l'attente d'une remontée en 2016/2017.
Quelles en sont les conséquences ? Du point de vue de nos capacités, cela nous permet, conformément aux orientations du Livre blanc, de conserver l'ensemble du spectre de nos missions. C'est essentiel pour ne pas casser notre outil. La rejointe rapide des normes d'activité, en revanche, est importante, car cela a des conséquences directement opérationnelles. En effet, comme vous le savez, l'activité de la marine est constituée pour une grande majorité de missions opérationnelles permanentes. Je n'ai pas dit opérations extérieures, qui n'en sont qu'une partie, mais bien missions opérationnelles.
Certaines sont sanctuarisées. C'est le cas de toutes celles qui sont liées à la permanence de la dissuasion : activité à la mer des SNLE, bien entendu, mais également des frégates qui les accompagnent, des avions de patrouilles maritimes, des hélicoptères, des chasseurs de mines.
Pour les autres, il faut faire des choix. Moins d'activité, c'est une baisse de nos capacités de déploiement permanent tels que ceux que nous maintenons en ce moment en Méditerranée orientale ou dans la Golfe de Guinée, mais aussi de nos capacités d'intervention dans le domaine de l'action de l'État en mer. Très concrètement, cela veut dire également que nos bâtiments seraient moins présents dans le cadre de l'action de l'État en mer. Pour vous donner un exemple : pour assurer une permanence quelque part, il nous faut 3 frégates capables de naviguer pendant 120 jours par an. Si vous réduisez l'activité de ces frégates à 90 jours, il vous en faut non pas 3 mais 4 pour assurer la permanence et cette 4ème manquera dans l'une des autres missions.
C'est dommageable car c'est bien notre présence en mer qui permet d'obtenir les résultats que j'égrainais à l'instant. Il faut avoir bien conscience que l'activité, pour la marine, n'est pas qu'une question de préparation opérationnelle pour aller faire des OPEX, qui, par leur définition même, sont des opérations inattendues et sont remboursées par un BOP particulier. L'activité pour la marine, c'est son coeur de métier c'est-à-dire sa présence à la mer dans des opérations sur notre territoire maritime et à l'extérieur de ce territoire. Opérations à l'extérieur et pas seulement opérations extérieures : voilà ce qui rend les crédits d'activité fondamentaux pour la Marine pour assurer ses missions permanentes. Rejoindre la norme d'activité dès 2016 doit donc demeurer une priorité absolue.
Il reste que le volume de l'activité de 2014 n'est pas uniquement et directement proportionnel aux crédits d'entretien programmé du matériel inscrits dans le projet de loi de finance. Plusieurs raisons à cela.
Tout d'abord, nos bâtiments sont entretenus selon un cycle alternant périodes à la mer et arrêts techniques, lesquels sont programmés au travers de contrats de disponibilité passés sur plusieurs années. C'est tout l'intérêt de la loi de programmation militaire et la nécessité de la continuité dans les lignes de crédits. En l'occurrence, les crédits que vous vous apprêtez à voter pour 2014 auront des répercussions sur les deux ans qui viennent, de la même façon que l'activité 2014 dépend des lois de finances précédentes.
Ensuite, parce que l'activité dépend d'autres facteurs, tels que :
- les équipements d'accompagnement. Il s'agit là du petit matériel - matériel de sécurité, aussières, véhicules spécifiques, outillage, matière première des ateliers, mais aussi munitions - qui conditionne directement la capacité de faire appareiller nos bâtiments. Les crédits afférents ont été là aussi abondés mais le retard accumulé en 2013 ne sera pas rattrapé et reste légèrement inférieur au besoin.
- autre facteur : les affrètements et l'externalisation des « plastrons ». Les retards sur le programme BSAH (bâtiments d'assistance et de soutien hauturier), entre autre, induisent des dépenses supplémentaires. Ce projet de loi les inclut bien pour 2014, mais des interrogations subsistent pour la suite.
- mais également les crédits de fonctionnement, qui, en 2014, vont subir une nouvelle baisse forfaitaire de 7%. Or, de quoi parlons-nous ? Nous ne parlons pas de confort, nous ne parlons pas de superflu, encore moins de factures d'eau et d'électricité ou encore de véhicules de fonction, qui aujourd'hui dépendent des crédits des bases de défense. Nous parlons des frais de mutations et de formation indispensables pour maintenir les compétences, ce qui est vital pour la marine. Je ne redirai jamais assez combien la marine est construite sur une juxtaposition de micro-filières, qui comptent parfois quelques dizaines de personnes voire qui tiennent sur les doigts d'une main. Nous avons d'ores et déjà mis en place une politique d'allongement des affectations et de fidélisation des experts formés pour réduire les coûts autant que possible, mais nous savons que nous ne rentrerons pas dans l'enveloppe. Je vous l'avais dit en septembre lorsque nous débattions du projet de loi de finances, « il faut rester très attentif à la démultiplication de l'effet que peut avoir une économie d'opportunité sur un pan qui romprait la cohérence d'ensemble ». C'est l'image de l'édifice qui a besoin de toutes les briques, qu'a employée récemment le président Carrère. Je risque d'être amené, en cours de gestion, et en vertu du principe de fongibilité, à faire les rééquilibrages nécessaires.
Que faut-il en conclure ? Que l'activité constitue, certes, un axe d'effort, mais qu'elle risque, si nous n'y prenons garde, d'être grevée par des réductions opérées sur d'autres postes de dépenses.
En troisième lieu, je vous avais parlé du calendrier de livraison des équipements. Ce projet de loi prévoit pour la marine la livraison de la deuxième frégate multi-missions, la Normandie, ainsi que de trois hélicoptères Caïman, de deux Rafale Marine et de 60 missiles de croisière navals, ce qui est conforme aux prévisions. Il engagera également la commande du quatrième sous-marin Barracuda, et des deux patrouilleurs guyanais. Elle verra aussi, comme l'a décidé le ministre de la défense, la commande des bâtiments multi missions (B2M) qui nous permettra, comme je vous l'ai déjà indiqué, de conserver un niveau d'activité minimal outre-mer.
C'est tout à fait positif, car ces livraisons permettront à la Normandie d'être dotée de missiles de croisière dès sa mise en service. La France détiendra alors une capacité de frappe à très longue distance susceptible de modifier sa stratégie dans la gestion des crises. L'arrivée des hélicoptères Caïman et des avions Rafale est elle aussi très attendue.
Mes préoccupations, en matière de livraison de matériel, sont désormais de deux ordres :
- tout d'abord, l'année s'avèrera difficile pour ce qui concerne les programmes moins emblématiques, ce que l'on appelle les autres opérations d'armement, les « AOA » : engins portuaires, bouées de détection sous-marine embarquées à bord des avions Atlantique etc. A l'instar des équipements d'accompagnement pour le programme 178, ces matériels engagent directement les capacités des forces aéromaritimes à réaliser leurs missions. Il s'agira d'y porter une attention toute particulière ;
- autre préoccupation : la problématique des BSAH, qui est toujours en cours d'examen, alors qu'elle devait être réglée en 2013. Ces bâtiments répondent pourtant à un besoin opérationnel avéré pour accompagner les sous-marins ou remorquer les bâtiments de très grande taille mais aussi dans le cadre de missions de l'action de l'État en mer telles que l'assistance maritime, les sauvetages ou la lutte anti-pollution. Il y a donc urgence à trouver rapidement une solution pour remplacer nos très vieux bâtiments de soutien dont aucun ne pourra être prolongé au-delà de 2017.
En conclusion, je dirais que ce projet de loi de finances 2014 prévoit un budget acceptable au vu des contraintes que nous connaissons. C'est-à-dire qu'il permettra à la marine de fonctionner dans un volume légèrement réduit par rapport à la norme, en cohérence avec les décisions de la LPM. Ce projet de loi de finances, et très probablement le suivant, doit être pris comme un budget d'attente. Nous attendrons donc impatiemment les crédits attendus en deuxième partie de LPM pour remonter le niveau d'activité. Mais pour que cette solution soit viable, elle nécessite qu'il n'y ait en conduite aucune autre contrainte supplémentaire sur le volume financier prévu, d'une part, et je le dis et le répète, sur la mise à disposition des budgets d'autre part. Il y va de la capacité de la marine d'accomplir dans la durée les missions qui lui sont dévolues dans le Livre blanc.
M. Philippe Paul. - Le départ de la mini Transat, depuis ma commune, a subi 17 jours de retard du fait des intempéries. Le patrouilleur de la Marine nationale, Le Cormoran, a secouru deux navigateurs, dont un skipper qui avait déclenché sa balise de détresse. Nous venons d'apprendre des organisateurs que l'escale à Lanzarote n'aura finalement pas lieu. Amiral, le patrouilleur de la Marine nationale pourra-t-il dans ces conditions continuer à accompagner la course ? Plus globalement, disposez-vous des moyens suffisants pour mener à bien cette importante mission qu'est l'action de l'État en mer ?
M. Daniel Reiner, président. - Nous sommes là au coeur d'une des missions de la Marine nationale. La Transat Jacques Vabre a elle aussi été décalée. Les intempéries justifiaient-elles vraiment un tel report ?
Amiral Bernard Rogel, chef d'état-major de la Marine - Les rafales atteignaient 100 km/h au moment où la Jacques Vabre aurait dû partir. Cette décision était donc, de mon point de vue, très sage... Pour la mini Transat, il s'agit de bateaux de petite taille et d'une course en solitaire : les risques sont forcément plus grands. Pour répondre au sénateur Philippe Paul, le dispositif n'a pas encore été arrêté précisément car nous venons tout juste d'apprendre que les skippers étaient désormais autorisés à rejoindre le port de leur choix, au lieu de l'escale initialement prévue à Lanzarote. Nous suivons le déroulement de la course de très près, car, une chose est sûre, c'est à nous que seront demandés, le cas échéant, les moyens nécessaires pour assurer la sécurité des navigateurs. En cette période où les intempéries sont nombreuses sur la pointe bretonne, nous sommes très attentifs à la sécurité non seulement des navigateurs mais aussi des pêcheurs, et surtout des bâtiments de commerce qui croisent au large de nos côtes. Tout récemment, un chimiquier chargé de 18 000 tonnes de produits dangereux s'est trouvé en avarie de propulsion à 31 nautiques seulement au large de l'Ile d'Ouessant. L'armateur a été mis en demeure par le préfet maritime, et l'Abeille Bourbon a été positionnée pour l'assister le cas échéant. Ce bâtiment a finalement réussi à redémarrer ses moteurs à 15 nautiques seulement de nos côtes. La tempête battait son plein et le contexte n'était pas sans me rappeler celui de l'Amoco Cadiz, mais nous avons encore aujourd'hui les moyens de faire face à une telle situation.
Aujourd'hui, la Marine nationale dispose des moyens nécessaires pour mener à bien sa mission relative à l'action de l'État en mer. De ce point de vue, l'arrivée des hélicoptères NH90, hélicoptères lourds de 11 tonnes pouvant voler loin, de nuit, dans de mauvaises conditions, a constitué pour moi un réel soulagement, car la flotte vieillissante des Super frelons avait été arrêtée et cela pouvait faire craindre une rupture capacitaire de longue durée. Je ne vous cache pas que je suis toutefois préoccupé dans la mesure où les futurs bâtiments de surveillance et d'intervention maritime (BATSIMAR) ne remplaceront pas tout de suite les patrouilleurs de surveillance des pêches et les patrouilleurs de haute mer, eux aussi vieillissants, et sur lesquels le risque d'avarie est grand.
M. Alain Gournac. - Je me félicite que vous ayez évoqué les sous-marins et la force océanique stratégique, dont on ne parle pas assez. La présence de la Marine nationale lors des grands événements sportifs est très positive en termes d'image et de visibilité. Vous n'avez pas parlé des restructurations, pourtant nombre d'officiers se posent des questions. J'ai pu le constater tout récemment sur la base de Houilles. Or, nous le savons, le moral des marins est la clé de leur performance pour la réussite de leurs missions.
M. Jean-Pierre Chevènement. - En matière de dissuasion nucléaire, pouvez-vous nous expliquer les raisons de l'échec du tir de missile M 51 ? Quel est le calendrier pour le lancement du SNLE de 3e génération ? En Nouvelle-Calédonie -la question se pose d'ailleurs aussi pour les autres collectivités d'outre-mer- quelle présence pourrez-vous maintenir dans une région, le Pacifique, tout à fait stratégique et où l'Australie et la Nouvelle-Zélande, jadis rétives à la présence française, y semblent désormais ralliées ? Disposez-vous, enfin, des moyens nécessaires à la lutte contre la piraterie, qui se développe à l'est comme à l'ouest de l'Afrique ?
M. André Trillard. - La Marine nationale est-elle à même d'assurer la protection de la zone économique exclusive française ? Quel niveau d'activité pouvons-nous y déployer : intense, moyenne ou tout juste raisonnable ? Je pense en particulier au Pacifique, où notre zone économique exclusive représente deux fois le territoire de l'Union européenne. Comment être présent aussi loin de l'hexagone ? Où en est le programme de définition des aires marines protégées ?
Amiral Bernard Rogel, chef d'état-major de la Marine - Le moral des marins est une de mes toutes premières préoccupations. Pour les équipages embarqués, dès lors que l'activité est suffisante, je n'ai pas d'inquiétude, même si je sais qu'ils sont confrontés à des difficultés concernant par exemple les stocks de pièces de rechange. Nous faisons globalement un effort pour assurer le bon déroulement des missions opérationnelles : en mer, nos marins sont, par nature, heureux dès lors qu'il y a des missions et que nous pouvons maintenir le volume nécessaire d'activité. Les marins à terre sont, quant à eux, touchés de très près par l'incertitude concernant l'organisation des soutiens. C'est d'autant plus vrai en région parisienne, où, du fait de l'intégration du site de Houilles à la base de défense de Saint-Germain en Laye, du transfert programmé vers Balard et de la fermeture des sites de la Pépinière et de l'Hôtel de la Marine, nos marins sont confrontés à une réelle perte de repères. Il ne faut pas oublier que les restructurations issues de la RGPP sont très difficiles.
J'ai entamé une tournée des ports pour expliquer le projet et les trajectoires financières et d'équipements portés par le Livre blanc et la loi de programmation militaire, afin de mobiliser toutes les énergies pour assurer la pleine réussite de leur mise en oeuvre. Je ne manque jamais de souligner que la modernisation de notre marine, tant attendue, est désormais enclenchée. Je reste vigilant, mais je n'observe pas, pour l'instant, de baisse significative dans les recrutements. S'agissant plus précisément du site de Houilles, encore une fois, il n'appartient plus à la marine mais à la base de défense.
Si on y met les moyens, la lutte contre la piraterie est efficace : nous le voyons avec l'opération Atalanta au large des côtes somaliennes, nous l'avons vu par le passé dans le détroit de Malacca, où les états riverains, par l'octroi de droits de poursuite réciproques et la mise en place d'un centre de surveillance commun, ont jugulé le phénomène. Je suis actuellement préoccupé par la situation dans le golfe de Guinée, où le brigandage prend désormais des proportions de véritable piraterie, avec des pétroliers saisis au mouillage. La prise de conscience est amorcée chez les États riverains, qui ont également pour objectif de lutter contre la pêche illicite et de protéger leurs zones économiques exclusives. Une conférence s'est tenue à Yaoundé au printemps dernier. La Marine nationale participe à la formation des marines de ces pays, par les actions de coopération structurelle menées par la DCSD du ministère des Affaires étrangères, mais aussi au travers de la mission Corymbe. Ainsi, par exemple, de nombreux marins gabonais ont été embarqués, à des fins de formation, à bord des bâtiments Corymbe. Les États-Unis sont présents au travers de « Africa partnership », les Néerlandais et les Portugais seraient prêts à s'investir.
M. Jean-Pierre Chevènement. - Qu'en est-il de nos partenaires britanniques et allemands ?
Amiral Bernard Rogel, chef d'état-major de la Marine - Les Britanniques ne déploient traditionnellement que peu de moyens dans cette zone. Les Allemands n'y sont pas présents.
Les configurations maritimes de chaque collectivité d'outre-mer sont spécifiques : ainsi les missions en Guyane, qui nécessitent des bâtiments à faible tirant d'eau, se distinguent-t-elles par exemple de celles réalisées en Polynésie française. Je me félicite que l'appel d'offres pour le programme bâtiment multi-missions (B2M) ait été lancé, même si ce bâtiment de nature essentiellement civile et faiblement armé, opéré par la marine nationale, vient en remplacement du programme BIS (bâtiment d'intervention et de souveraineté) qui était initialement destiné à remplacer le BATRAL (bâtiment de transport léger) amphibie, dont le dernier vient de quitter la Nouvelle-Calédonie. Nous avons besoin d'un minimum de capacité de haute mer. Ainsi, pour la Nouvelle-Calédonie, pour maintenir un niveau de présence minimal, nous aurons une frégate de surveillance, un patrouilleur P400, et un B2M pour compenser-en 2018 seulement- la disparition du BATRAL. Avec ces moyens, nous pouvons mener des opérations de lutte antidrogue, d'interception de bâtiments de pêche illicite et de surveillance de notre zone économique exclusive. Mais nous ne pouvons pas tout faire ! Un mot sur le programme BATSIMAR : les patrouilleurs P400, qui ont un âge avancé, devront être prolongés du fait du décalage de 2014 à 2024 de la livraison du premier exemplaire. C'est un facteur de risque, je ne vous le cache pas.
Je ne dispose pas de tous les éléments issus de l'enquête en cours à la Direction générale de l'armement sur le tir du missile M51. De toute manière, une audition du CEMM se prête mal à de telles explications. S'agissant du SNLE de 3e génération, programme à horizon 2030, nous sommes engagés dans les premières définitions avec la DGA.
Quelle présence sommes-nous capables d'assurer dans nos zones économiques exclusives ? Je dirais que c'est un peu comme sur les routes : nous avons des « radars fixes » dans des zones où se concentrent les activités illégales, par exemple pour y conduire des missions de lutte contre la piraterie, contre le trafic de drogue et l'immigration clandestine, contre la pêche illicite, et des « radars mobiles », opérations « coup de poing » menées ponctuellement dans le reste de la zone, en fonction des déploiements possibles. C'est dans ce cadre que nous avons pu notamment intercepter dans le canal du Mozambique un bâtiment de recherche sismique explorant notre zone économique exclusive...
Les ambitions internationales exprimées en matière d'aires marines protégées reviendraient à classer 10% de la surface des océans, y compris dans les eaux internationales. Je ne peux qu'être favorable au principe, mais j'observe que, sans moyens -probablement interministériels- dédiés, la notion de protection reste virtuelle.
M. Gilbert Roger. - Qu'en est-il du démantèlement ou de la vente des bâtiments retirés du service actif ? La modernisation des Atlantique 2, repoussée l'an dernier, est-elle enclenchée ? Faites-vous des études en matière de drones ?
Amiral Bernard Rogel, chef d'état-major de la Marine - La déconstruction des navires de surface par la marine (celle des sous-marins relevant de la DGA) mobilise un flux d'environ 10 millions d'euros par an et suit un processus très rigoureux qui consiste tout d'abord à retirer toutes les matières polluantes pour obtenir un « passeport vert » puis à lancer un appel d'offres européen. Les ex-bâtiments de débarquement de chars (BDC) Dives et Argens, et l'ex-pétrolier-ravitailleur d'escadre Saône sont actuellement démantelés suivant ce processus ; le Colbert et la Jeanne d'Arc devraient faire l'objet d'un appel d'offres prochain. Je regrette que peu d'entreprises françaises y soumissionnent. Pour les gros bâtiments, la vente de métal couvre les frais du démantèlement, ce qui n'est pas le cas des petits. Nous vendons aussi des bâtiments : les patrouilleurs P400 pourraient par exemple intéresser des marines africaines ; le bâtiment de transport de chalands de débarquement Sirocco sera prochainement mis en vente.
Le ministre de la défense a annoncé récemment à Brest la rénovation de quinze Atlantique 2, le reste de la flotte étant reconverti en avions de surveillance maritime.
La Marine nationale réfléchit activement à l'emploi des drones : un drone à voilure tournante est expérimenté sur l'Adroit. Les drones sont susceptibles d'augmenter de 60 nautiques le rayon de recueil d'informations autour des bâtiments et sont à cet égard extrêmement intéressants. Nous en sommes encore au stade de l'expérimentation ; il n'est pas évident de faire décoller ni atterrir un drone en pleine mer... J'ajoute que les drones sous-marins joueront un rôle décisif dans les nouveaux programmes de chasse aux mines, qui verront le jour vers 2020, et qui pourraient être portés en collaboration avec les Britanniques, voire avec d'autres états européens.
Mercredi 6 novembre 2013
- Présidence de M. Robert del Picchia, vice-président -Loi de finances pour 2014 - Audition de Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger (programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires » de la mission Action extérieure de l'Etat)
La commission auditionne Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger, sur le projet de loi de finances pour 2014 (programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires » de la mission Action extérieure de l'Etat).
M. Robert del Picchia, vice-président, co-rapporteur des crédits du programme 151. - Nous sommes heureux de vous recevoir, Madame la Ministre, chère Hélène, pour la présentation de votre budget. Bien que ces 375 millions d'euros puissent paraître modestes, les crédits alloués aux Français de l'étranger revêtent une grande importance : outre le financement de l'aide sociale et des bourses scolaires, je veux signaler combien la réactivité du réseau consulaire français, dans la délivrance des visas par exemple, contribue à l'attractivité économique de la France, aux recettes du tourisme. Le réseau est cependant sous pression et va devoir gérer une actualité dense : les élections européennes et celles des conseillers consulaires, suivies par celles de l'assemblée des Français de l'étranger ; la mise en oeuvre de la réforme du système d'attribution des bourses ; l'accompagnement de l'évolution de l'enseignement du français à l'étranger.
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger. - Le budget du programme 151, « Français à l'étranger et affaires consulaires », est l'expression des priorités retenues par le Gouvernement en faveur des 2, 5 millions de nos compatriotes établis hors de France. Il est préservé, malgré une double contrainte : celle de l'augmentation régulière du nombre des Français inscrits dans les consulats (sauf en Allemagne, en Israël et en Espagne) ; celle du nécessaire effort de redressement des finances publiques, auquel le ministère des Affaires étrangères apporte une contribution exceptionnelle de 22 millions d'euros.
Les dotations des secteurs et actions prioritaires n'en sont pas moins renforcées : sécurisation de nos installations, bourses scolaires, action sociale. Avec 118,8 millions d'euros, l'aide à la scolarité est la principale ligne budgétaire du programme, elle représente 75 % du budget total hors dépenses de personnel. L'augmentation de 8,5 millions d'euros concrétise notre engagement, pris l'an dernier.
La suppression de la prise en charge (PEC) des frais de scolarité pour les lycéens français dès septembre 2012 - mesure que le gouvernement précédent n'avait pas financée - a été suivie par une profonde réforme des modalités d'attribution des bourses scolaires sur critères sociaux, ce qui était la moindre des choses. Notre objectif était double : répartir de manière plus juste le budget des bourses et garantir un soutien pérenne de l'État à la scolarisation des enfants dans l'ensemble du réseau. Après une année de mise en oeuvre, cette réforme répond manifestement aux objectifs poursuivis.
Pour introduire davantage de justice dans ce système, il fallait redistribuer l'enveloppe budgétaire. Une famille percevant plus de 110 000 dollars par an - plus de trois fois le revenu médian annuel des ménages français - pouvait toucher une aide de plus de 20 000 dollars ! Un léger rééquilibrage a aussi tendu à corriger des inégalités géographiques au profit du Proche et Moyen-Orient (17 % de boursiers supplémentaires) ainsi que de l'Asie et de l'Amérique centrale et du Sud (3 % de plus).
Alors que le nombre d'élèves scolarisés augmente continument et que les droits d'écolage se renchérissent, nous avons réussi à aider 12 % de familles de plus que l'année passée - la hausse s'élève à 10 % pour les familles monoparentales, infirmant l'idée que le nouveau système les défavorise. Davantage de progressivité a été instillée dans les quotités accordées. Nous continuons à prendre intégralement en charge les frais de scolarité de 43 % des élèves boursiers.
La réforme donne davantage de responsabilités aux commissions locales, qui connaissent la réalité des situations sociales et ont pu ajuster les quotités au plus près des besoins. Dans tous les cas, nous procéderons aux ajustements utiles. Un bilan de la réforme sera dressé après la tenue de la Commission nationale des bourses (CNB) du mois de décembre.
Les crédits consacrés à l'aide sociale sont cette année encore préservés : leur enveloppe, la deuxième la plus importante du programme 151, s'élève à 19,8 millions d'euros, dont 16 consacrés aux plus démunis et aux handicapés. C'est bien le signe que le soutien à nos compatriotes les plus en difficulté demeure une priorité du réseau consulaire. La France est l'un des rares pays à mettre en oeuvre une telle solidarité. Le maintien de ces crédits relève d'un choix politique que je tiens à souligner.
Sur l'ensemble de l'année 2012, 5 077 Français ont bénéficié de l'aide consulaire ; 3 653 ont été aidés pour accéder au marché de l'emploi grâce à nos consulats, en lien avec les chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger ; et 407 ont été rapatriés pour raisons sociales et sanitaires. Je signale que la Caisse des Français de l'étranger (CFE) a retrouvé une enveloppe d'un niveau acceptable, en hausse par rapport à l'an dernier.
L'année 2014 sera riche en échéances électorales. Les Français de l'étranger pourront à nouveau participer aux élections européennes grâce à leur rattachement administratif à l'Île de France. La dotation du programme 151 est abondée au total de 6 millions : 2 pour l'organisation de ces élections ; 4 pour couvrir les dépenses liées aux élections des conseillers consulaires. Pour la première fois, les Français de l'étranger éliront, le 24 et le 25 mai 2014, des élus de proximité, les conseillers consulaires qui, un mois plus tard, désigneront en leur sein les 90 conseillers de la nouvelle Assemblée des Français de l'étranger. Cette élection se fera à budget constant, conformément à la loi du 22 juillet 2013.
Dès ma prise de fonctions, j'ai confié à l'ambassadeur M. Daniel Lequertier une mission sur la modernisation du réseau consulaire. Ses principales recommandations ont été reprises dans le rapport de la Cour des comptes consacré à l'évolution des missions et l'organisation des consulats français à l'étranger.
Pour adapter ses moyens à ses missions, le réseau doit évoluer. Il sera recentré sur une ou deux missions prioritaires dans les treize postes de présence diplomatique à format très réduit, où une activité consulaire minimum sera maintenue : Brunei, Cap-Vert, Erythrée, Guinée-Bissau, Honduras, Jamaïque, Kirghizistan, Libéria, Népal, Papouasie-Nouvelle Guinée, Tadjikistan, Trinité et Tobago, Zambie. Trois nouveaux consulats généraux en capitale, à Libreville, Ouagadougou et Washington, seront transformés en sections consulaires, ce qui n'aura aucune incidence sur la qualité du service rendu.
Les consulats européens dits « à gestion simplifiée » seront adossés à des représentations, notamment culturelles, du réseau de l'État. Cela sera le cas à Stuttgart en 2014, à Düsseldorf, Turin et Naples en 2015. Nous veillerons néanmoins à ce qu'un guichet consulaire soit maintenu.
Enfin, certaines activités telles que l'état-civil ou l'établissement des visas pourront être centralisées sur un seul poste consulaire dans les pays européens où l'on en compte plusieurs : c'est déjà le cas en Allemagne, à Berlin.
Là où les Français sont éloignés de leur consulat de rattachement, nos consuls honoraires jouent un rôle essentiel. Leur présence assure un service public de proximité, notamment pour la délivrance de passeports. Ce réseau de relais bénévoles se verra renforcé - ainsi à Madagascar, Hambourg et dans l'Ouest canadien - au fur et à mesure de l'émergence des besoins de nos communautés. Pour partie au moins, ils pourront être dotés de nouvelles compétences en matière de prise d'empreintes biométriques, et de nouveaux moyens humains, quand cela est possible et justifié, comme à Tamatave, Majunga et Hambourg, et de moyens financiers grâce à l'octroi de subventions annuelles, proportionnées à leur activité.
Le Programme d'amélioration et de modernisation de l'action consulaire (Pamac), qui a débuté en 2012, vise à améliorer la qualité de service aux usagers et à dégager des gains de productivité en tenant compte de l'augmentation de la population des Français de l'étranger. Les procédures seront simplifiées : suppression des timbres de chancellerie, mise en place du passeport grand voyageur, rationalisation des procédures de contrôle des mariages et de transcription des actes d'état-civil. Le périmètre des missions consulaires sera redéfini, grâce à la réforme supprimant le notariat consulaire, et à l'adaptation de la journée Défense et citoyenneté aux réalités locales. La téléadministration, l'informatisation et la dématérialisation seront développées grâce à la mise en place d'un registre électronique d'état-civil et au déploiement d'Itinera.
J'en viens à la sécurité de nos concitoyens dans le monde. Comme nous l'avons fait au lendemain de l'intervention Serval en janvier 2013, nous renforçons nos dispositifs dans les zones sensibles et redistribuons les moyens ; 20 millions d'euros supplémentaires seront consacrés au plan de sécurisation de nos implantations. On ne peut ignorer le maintien de la menace terroriste au Moyen-Orient, dans la corne de l'Afrique ou dans l'arc sahélien. Les mesures de sécurité doivent en permanence évoluer en fonction des menaces. Conseils aux voyageurs et le site Ariane ont été adaptés pour un meilleur suivi et une meilleure protection des Français qui voyagent à l'étranger. Des exercices régionaux auront lieu, comme le 13 novembre prochain à l'ambassade de France à Jakarta, au consulat général de France à Pondichéry et à l'ambassade de France à Colombo. Afin de mieux répondre aux demandes des postes, le Centre de crise - d'où je suivrai l'exercice en novembre - sera doté de 800 000 euros supplémentaires et continuera d'envoyer dans les postes des missions de préparation à la gestion de crise.
Nous avons donc conservé l'essentiel en affectant à nos priorités les moyens requis, dans un contexte économique contraint.
M. Jean-Marc Pastor, co-rapporteur des crédits du programme 151. - La hausse de l'enveloppe budgétaire est justifiée, ne serait-ce que par l'obligation d'organiser des élections. Le maintien des mesures prises dans le domaine éducatif, comme le système des bourses, doit être souligné.
La Cour des comptes constate que nos consulats offrent des services plus performants que ceux de nos partenaires. Elle propose d'abandonner certaines tâches comme le notariat, voire l'établissement de la carte d'identité. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur ce point ?
La directive sur la protection consulaire va obliger la France à prendre en charge, dans les pays en crise, tous les ressortissants de pays européens non représentés. Le texte européen ne prévoit aucun mécanisme de financement communautaire. La charge va donc peser sur notre réseau. Quel est le coût potentiel ? Où en sont les discussions avec nos partenaires ?
En 2014, certains consulats vont passer à la gestion simplifiée. Cette évolution n'est sans doute pas achevée : cache-t-elle encore d'autres étapes, d'autres « opérations de modernisation de l'action publique » ?
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée. - Le réseau consulaire assume des tâches qui ne sont pas du ressort des affaires étrangères, comme le notariat ou l'organisation de la journée Défense. Il doit faire des économies. Or les demandes des Français sont de plus en plus nombreuses ; celles des étrangers également, pour les visas de tourisme en particulier - le consulat est alors le premier point de contact avec la France. Pour qu'il continue à offrir un service de qualité et à assurer au personnel des conditions de travail acceptables, il a fallu repenser les missions et se concentrer sur l'essentiel. Le Pamac y contribue.
Le notariat, outre la charge de travail qu'il constitue, pose un problème de sécurité et de responsabilité juridique. Au lieu des cinq années d'études nécessaires, nos agents reçoivent quelques jours de formation. C'est ce que j'ai fait valoir au président du Conseil supérieur du notariat. Nous réfléchissons ensemble à une refonte des tâches.
J'ai récemment rassemblé les ambassadeurs des pays de l'Union européenne pour une discussion franche et informelle sur la directive relative à la protection consulaire. Nombre de nos partenaires demeurent réservés à l'égard de l'évolution que nous proposons, un partage des frais correspondant au niveau réel de service rendu. La France assure en effet un service optimal, ce qui n'est pas le cas de la plupart des autres représentations. Nous nous retrouvons souvent en première ligne, alors que les problèmes de sécurité s'aggravent dans le monde.
M. François Saint-Paul, directeur des Français à l'étranger et de l'administration consulaire. - L'article 20 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit, dans les pays tiers, la protection consulaire des ressortissants des pays européens non représentés par toute représentation d'un Etat membre. Son deuxième paragraphe prévoit l'adoption d'une directive à la majorité qualifiée après avis du Parlement européen. Or, comme l'a relevé la Cour des Comptes, les pays européens offrent des degrés de protection consulaire très différents. Les négociations ont lieu en ce moment au sein du groupe de travail « Cocon », chargé de la protection consulaire. La France, en raison de ses intérêts, y est très active. Elle défend trois principes : le remboursement de toute prestation fournie au profit d'un ressortissant d'un Etat membre ; le partage des responsabilités ou burden sharing, sur place, entre les pays représentés - sachant cependant que chaque ressortissant s'adresse à la représentation de son choix ; et le rôle de coordination du Secrétariat européen aux Affaires étrangères.
La décision du 19 décembre 1995 oblige à obtenir l'accord de l'État dont l'intéressé est le ressortissant dans le cas où la protection accordée entraîne une dépense. Dans la directive en revanche, plus besoin d'accord, la protection sera automatique : alors la facture doit l'être aussi. La négociation est difficile. Nous soulignons que nos services, rapatriements, visites aux détenus, etc. sont souvent plus larges que ceux assurés par nos partenaires. A preuve, les réactions lors de l'épisode du volcan islandais : tout le monde préférait recourir au consulat français plutôt qu'au britannique.
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée. - Nous avons rompu avec la logique de la fermeture des consulats. Au moment où se met en place une diplomatie économique, il serait paradoxal de quitter des pays qui pourraient se développer dans l'avenir, et dont le potentiel n'a pas encore été exploité. Nous préférons rechercher les économies sur d'autres lignes budgétaires. Aucune fermeture n'interviendra, hors celle du poste de Calgary, et encore, il est remplacé par deux agences consulaires, une sur place et une à Edmonton, au plus près de nos communautés.
La réflexion en silo a fait long feu, nous pensons dorénavant de façon transversale. Pour préserver nos services, nous les adossons par exemple à un institut culturel - le directeur d'un Institut français devenant consul. Les économies en équivalents temps plein réalisées dans le cadre du Pamac n'amènent pas à exercer de pression indue sur les agents consulaires : ils pourront continuer à travailler correctement.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Ce n'est pas la première fois que les Français élisent des « conseillers de proximité », Madame la Ministre : ils sont déjà 155, élus au suffrage universel !
La revalorisation du rôle des consuls honoraires me tient à coeur, vous le savez. La stabilité du budget correspondant fait suite à une baisse de 6,6 % en 2013. Le projet de loi de finances ne traduit donc pas vraiment la recommandation n° 9 de la Cour des Comptes, « développer et animer le réseau des consuls honoraires ». C'est une bonne chose que de leur donner des nouvelles compétences, encore faut-il augmenter leurs moyens, or cela n'est pas inscrit dans votre budget.
Les treize postes très allégés que vous avez mentionnés compteront désormais quatre personnes contre douze auparavant. Or M. Fabius affirmait il y a quelques mois dans un twitt qu'un poste à trois ou quatre agents « ne peut pas fonctionner ».
Pourquoi le budget du poste téléadministration et accueil diminue-t-il de 12%, alors que l'on cherche à développer ce pôle ?
Le budget des bourses scolaires dans le programme 151 augmente de 8,5 millions d'euros. Pourtant l'enveloppe des bourses stagne. Le document issu de la Commission nationale des bourses (CNB) indique que le montant de l'enveloppe globale des bourses scolaires devrait passer de 101,9 millions à 90,8 millions, soit une diminution de 10 %. Dans un document du ministère, celle des bourses pour les pays du rythme Nord passerait de 82,2 millions d'euros à 80, 9 millions, soit une baisse de 1,5 %. Mais peut-être ai-je mal lu ?
Nos établissements français à l'étranger s'inquiètent du désengagement à l'égard de l'AEFE. La réforme des bourses comporte une révision de la pondération en fonction du coût de la vie dans les différents pays. Cependant l'enveloppe de l'indemnité spécifique liée aux conditions de vie locale (ISVL) n'est pas réévaluée. De plus, la hausse de 8, 5 millions du budget de l'AEFE est corrélée à une baisse équivalente de son budget dans le programme 185. N'y a-t-il pas là un tour de passe-passe ? Quelle latitude auront les établissements pour réorganiser leur fonctionnement ?
En dépit de l'augmentation de l'enveloppe budgétaire des bourses, le reste à charge pour les parents augmente, du fait de la baisse de quotité pour les boursiers partiels et de la hausse des frais de scolarité. L'absence d'étude rend difficile l'évaluation des effets réels de la réforme. De plus, les résidents demeurent exclus de ces aides.
Vous vous étiez félicitée l'été dernier de ce que l'État prend entièrement en charge 40 % de boursiers. Mais le réseau AEFE ne compte que 9 % d'élèves disposant d'une bourse totale et 11 % d'une bourse partielle, soit 23 157 élèves sur 115 000. L'incohérence des chiffres appelle des éclaircissements. La prise en charge subit d'ailleurs une vraie diminution, puisqu'il y avait 24 732 boursiers l'année passée, hormis les 8 000 enfants scolarisés gratuitement.
On observe en outre une déscolarisation, 2 000 enfants cette année. Certes, des raisons financières sont invoquées dans seulement 2% des cas : mais 60 % des départs ont eu lieu pour raisons « inconnues », ce qui rend les chiffres peu pertinents - certains parents ne veulent pas avouer un motif financier.
M. Jean-Pierre Cantegrit. - Le montant de l'aide sociale en faveur de nos compatriotes, maintenu à 19,8 millions malgré les difficultés budgétaires, est demeuré inchangé depuis plusieurs années : exprimé en euros constants, il est en diminution. Toutefois la France est l'un des rares pays à assurer une telle aide, gérée avec grande rigueur par la direction des Français de l'étranger, ce dont je me félicite.
Le montant de la troisième catégorie aidée, dites-vous, est en augmentation. En fait, ce n'est pas le cas : il demeure de 498 000 euros. Les avances partielles accordées d'une année sur l'autre ont pu vous induire en erreur. Ce chiffre représente un cinquième du total de la troisième catégorie aidée. Nous sommes loin du compte, par rapport à ce que prévoyait la loi de modernisation sociale, une prise en charge totale de l'aide par une ligne budgétaire. La Caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger, que je préside, a néanmoins fait face à ses obligations ; elle a dû augmenter très légèrement ses cotisations. Le recul du nombre de bénéficiaires au titre de la troisième catégorie est surprenant, compte tenu des difficultés actuelles ; c'est que la CFE et les consulats ont examiné les dossiers avec une grande rigueur.
Les sociétés de bienfaisance prennent une part de plus en plus importante dans l'aide à nos compatriotes. Il est souhaitable que nos consulats et la direction des Français de l'étranger les entourent.
Dans le projet de loi de financement tel que voté à l'Assemblée nationale, ceux des frontaliers qui adhéraient sur place à un régime étranger ou à une assurance privée seront tenus de cotiser à la sécurité sociale. Trop nombreux sont ceux qui cherchent une échappatoire en demandant à adhérer à la CFE. Plus de 110 000 personnes à la seule frontière suisse ! Nous ne pouvons faire face. Je souhaite qu'une réponse claire leur soit apportée, rappelant l'obligation de cotiser en France. J'espère que l'examen de la loi de financement au Sénat sera l'occasion de préciser les choses de façon définitive.
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée. - Les futurs élus seront plus proches de la communauté dont ils sont issus : aujourd'hui, certains représentent les Français de plusieurs pays, voire d'un continent entier.
Sur la délivrance des cartes d'identité et des passeports par les consuls honoraires, nous menons une réflexion avec le ministère de l'Intérieur, qui a la compétence sur ce sujet.
Madame Garriaud-Maylam, il ne faut pas confondre des données qui correspondent à une année budgétaire et celles qui concernent une campagne de bourses, à cheval sur deux exercices budgétaires. Nous vous répondrons très précisément par écrit afin que vous puissiez communiquer sur cette question en toute clarté.
Attention, sur la réforme de l'aide à la scolarité, aux termes employés ; certains instillent la peur au sein des familles. Ma seule volonté, dans la limite de l'enveloppe attribuée, abondée chaque année, est d'être au plus près des familles qui en ont le plus besoin. Dans le passé, la Prise en charge (PEC) a donné l'impression qu'une gratuité pour tous était possible ; mais l'État ne peut plus se permettre cette générosité. Une famille qui dispose d'un revenu de plus de 110 000 dollars a-t-elle vraiment besoin de la solidarité nationale ? N'oublions pas qu'une aide à un enfant scolarisé dans tel continent représente -une dizaine ou une vingtaine d'aides ailleurs, tant les niveaux de vie et les frais de scolarité sont divers. Prudence, également, lorsque vous parlez de déscolarisation. Je voudrais bien connaître les noms de ces 2 000 élèves ! Savez-vous que 7% des enfants ayant reçu des bourses n'effectuent pas la rentrée ? Les familles sont mobiles et font parfois le choix de déménager ou de scolariser leur enfant, finalement, dans un autre établissement.
L'aide sociale est essentielle. Cela a été un choix politique que de préserver la ligne budgétaire correspondante. Son montant est inchangé depuis 2005, c'est vrai, malgré une augmentation de la population française à l'étranger. Mais grâce à une plus grande rigueur dans l'attribution, nous avons pu couvrir la totalité des demandes éligibles, et revaloriser cette année les taux de base, qui s'appliquent aux pouvoirs d'achat les plus faibles, tout en augmentant de 30% les secours occasionnels et aides ponctuelles. En 2014, nous prévoyons de revaloriser l'allocation enfant handicapé.
Oui, les sociétés de bienfaisance jouent un rôle important. Les consuls en ont pris la mesure. À Rome ou même à Monaco - où les façades opulentes cachent parfois des tragédies humaines - j'ai vu des sociétés de bienfaisance aider des personnes âgées, en difficulté notamment pour se loger convenablement. J'y suis attentive et rencontre à chaque voyage les présidents de ces associations, lesquelles gagneraient à grouper leurs forces pour lever ensemble plus de fonds et pour se faire connaître auprès des entreprises françaises, souvent généreuses.
Vous m'interrogez sur les frontaliers : j'organiserai une conférence sur les problématiques propres aux personnes qui résident dans un pays et travaillent dans un autre ; c'est un beau thème avant des élections européennes, car ce phénomène prospère grâce à la liberté de mouvement et à la monnaie unique. Certains problèmes restent à régler, nous y travaillons. Nous rassemblerons ainsi diplomates, administration française et élus. Je n'ai pas de réponse à vous apporter aujourd'hui, mais j'espère que vous participerez à cette conférence au printemps prochain.
M. Jean-Pierre Cantegrit. - J'insiste sur l'urgence de publier le texte imposant aux frontaliers de cotiser à la sécurité sociale française, car nous ne pouvons les accueillir tous.
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée. - Je saisirai sur ce point la ministre des affaires sociales. Quant à la question de Mme Garriaud-Maylam sur les 8,5 millions d'euros : c'est par hasard que ce montant est aussi celui des économies demandées à l'AEFE. Celle-ci n'échappe pas aux efforts que doivent consentir tous les opérateurs de l'État ; elle peut s'en acquitter grâce à des économies liées notamment au déménagement de son siège et à des versements de pensions civiles inférieurs à la prévision triennale. Il s'agit de deux programmes différents, 151 et 185. Rassurez-vous, ni l'enseignement, ni les frais de scolarité ne seront touchés.
M. Robert del Picchia, vice-président, co-rapporteur. - Je vous ferai mes questions par écrit, et attends particulièrement une réponse concernant le vote par internet pour les élections européennes, objet d'une proposition de loi débattue le 12 décembre au Sénat : j'espère que vous la soutiendrez.
Nous vous remercions.