- Mercredi 21 novembre 2012
- Loi de finances pour 2013 - Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » - Examen du rapport pour avis
- Loi de finances pour 2013 - Mission « Santé » - Examen du rapport pour avis
- Loi de finances pour 2013 - Mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et article 70 rattaché - Examen du rapport pour avis
- Organismes extraparlementaires - Désignation de candidats
- Loi de finances pour 2013 - Audition de M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social
Mercredi 21 novembre 2012
- Présidence de Mme Annie David, présidente -Loi de finances pour 2013 - Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » - Examen du rapport pour avis
Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission procède à l'examen du rapport pour avis de Mme Gisèle Printz, sur le projet de loi de finances pour 2013 (mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »).
Mme Gisèle Printz, rapporteure pour avis. - La mission budgétaire « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » rassemble l'ensemble des mesures qui constituent le droit à réparation que ceux qui ont servi la patrie au combat tiennent de leur sacrifice. Sur le plan symbolique, son examen constitue, chaque année, l'occasion pour la représentation nationale et le Gouvernement de témoigner leur reconnaissance envers les différentes générations du feu et les victimes de guerre.
Le constat concernant le monde combattant est chaque année le même : il poursuit son déclin démographique, avec le vieillissement de sa plus importante composante, les anciens d'Algérie, qui ont, pour les plus jeunes, soixante et onze ans. Ainsi, le nombre de titulaires d'une pension militaire d'invalidité devrait diminuer de 5,2 % entre 2012 et 2013 et celui des bénéficiaires de la retraite du combattant diminuera de 3,5 %.
En conséquence, le budget de la mission est en baisse et se monte, pour 2013, à 2,88 milliards d'euros en crédits de paiement. Toutefois, comme le ministre l'a souligné lorsque nous l'avons auditionné le mois dernier, cette diminution n'est pas proportionnelle à celle du nombre d'anciens combattants ; elle lui est inférieure. Si une règle arithmétique avait été appliquée, il aurait fallu amputer le budget de 4,4 %, soit 133 millions d'euros. Les arbitrages rendus limitent la baisse à 2,6 %, soit 75,3 millions d'euros de moins en 2013 qu'en 2012.
C'est un signal fort de l'engagement du Gouvernement en faveur des anciens combattants et la marque de sa volonté de ne pas porter atteinte à leurs droits acquis. C'est également le reflet de la nécessité de tenir les engagements pris l'an dernier par l'Etat envers eux. Ainsi, la loi de finances pour 2012 a revalorisé de quatre points la retraite du combattant au 1er juillet de cette année. C'est donc en 2013 qu'il faut en supporter le coût en année pleine, soit une dépense additionnelle de 54 millions d'euros.
Venons-en aux politiques thématiques mises en oeuvre dans le cadre de cette mission.
La première vise le développement des liens entre la Nation et son armée. La Journée défense et citoyenneté (JDC) en fait partie. Elle est suivie chaque année par près de 750 000 jeunes, soit la quasi-intégralité d'une classe d'âge. Je ne vais pas revenir sur le très intéressant débat que nous avons eu à ce sujet lors de l'audition du ministre, sinon pour vous rappeler qu'il n'est pas envisageable de revenir au service national tel que nous l'avons connu jusqu'à sa suspension par Jacques Chirac.
Néanmoins, la JDC est désormais mise en oeuvre par une administration, la direction du service national, qui achève sa modernisation. Elle est encore amenée à évoluer : pourquoi ne pas en faire un moment de sensibilisation aux problématiques de la sécurité routière ou du don du sang ? Des partenariats sur ces points sont à l'étude pour aller plus loin que l'initiation aux gestes de premier secours qui est aujourd'hui proposée.
Le second volet d'un ancrage profond du lien armée-Nation tient en une politique de mémoire ambitieuse et à la hauteur de la richesse du calendrier commémoratif à venir. Sur ce point, je me félicite que le Gouvernement ait enfin pris la décision de renforcer les moyens qu'il y consacre. Les quatre prochaines années seront riches en commémorations, avec le centenaire de la Grande Guerre et le soixante-dixième anniversaire de la Seconde Guerre mondiale. En conséquence, ce sont 5 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2012 qui y seront affectés en 2013, pour un total de 17,2 millions d'euros. Cela peut sembler faible par rapport à la somme totale des crédits de la mission, mais c'est une hausse de plus de 40 %.
Vous êtes nombreux au sein de cette commission, chers collègues, à être élus de territoires qui, à un moment ou à un autre de la Grande Guerre, ont fait partie de la ligne de front. De droite comme de gauche, je sais que vous travaillez déjà depuis plusieurs années sur sa commémoration et la valorisation du patrimoine mémoriel qu'elle vous a légué. Depuis le mois d'avril dernier, un groupement d'intérêt public (GIP) est chargé de coordonner les efforts interministériels en la matière et d'établir le programme officiel des cérémonies et hommages nationaux qui auront lieu en 2014. Il travaille en lien avec des comités départementaux ainsi qu'avec nos partenaires étrangers.
Les moyens pour l'entretien et la rénovation des sépultures de guerre ont également été renforcés dans le cadre du centenaire, au côté d'autres initiatives pour promouvoir le souvenir des conflits du XXe siècle. Ainsi, 2 millions d'euros seront consacrés l'an prochain à la préparation du soixante-dixième anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Sur ce point, je pense que la polémique consécutive à l'annonce par le ministre de la création d'une mission interministérielle des anniversaires des deux guerres mondiales mérite d'être close. Deux structures distinctes, le GIP pour le centenaire et la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA) du ministère pour le soixante-dixième anniversaire, piloteront les commémorations. Il n'est donc pas illogique, dans un souci de meilleure coordination administrative et politique, qu'une structure dédiée assure leur supervision. Il n'est évidemment pas question de mélanger des mémoires qui ne peuvent l'être et de créer une confusion des messages pédagogiques. J'y serai attentive dans l'année à venir.
La mémoire de la quatrième génération du feu, celle des opérations extérieures, n'est pas oubliée. Un million d'euros sont inscrits au budget pour la construction d'un monument aux morts qui sera situé à Paris, place Vauban, derrière les Invalides.
Pour finir sur ce sujet, quelques mots sur le tourisme de mémoire. Je vous rappelais l'an dernier que cette filière génère un chiffre d'affaires direct de 45 millions d'euros et des retombées indirectes sans doute bien plus importantes. C'est une opportunité de développement économique intéressante pour des territoires parfois lourdement touchés par la désindustrialisation. Des centaines de milliers de visiteurs étrangers sont attendus pour les quatre ans que durera le centenaire. Il faut faire en sorte qu'ils puissent découvrir la richesse du patrimoine mémoriel français dans les meilleures conditions ; ils seront alors, dans leurs pays respectifs, nos meilleurs ambassadeurs.
La reconnaissance et la réparation en faveur du monde combattant appellent des mesures tangibles. La réforme de l'administration à son service est désormais terminée et les difficultés qu'elle avait causées, notamment en matière d'attribution des cartes du combattant et de délai de traitement des dossiers, ont été corrigées. L'Onac est l'opérateur de proximité de cette politique, il ne faut donc pas remettre en cause son ancrage départemental.
L'attribution de la carte du combattant aux soldats ayant servi en Opex est facilitée et monte en puissance depuis le début de l'année : déjà 5 280 cartes attribuées, soit plus que le total cumulé de 2010 et 2011. Il reste encore une revendication légitime à satisfaire : l'attribution de la carte du combattant à ceux qui ont passé quatre mois en Algérie « à cheval » sur le 2 juillet 1962. Le ministre s'est engagé à ce que ce soit fait dans le budget 2014. J'y serai vigilante.
Un effort significatif est réalisé en matière de solidarité à l'égard du monde combattant, avec une augmentation de 500 000 euros par an pendant trois ans du budget de l'Onac. Cela lui permettra d'agir plus efficacement à l'égard de tous ses ressortissants, notamment nos soldats de retour d'Opex, et d'augmenter progressivement le plafond de l'aide différentielle au conjoint survivant (ADCS). Celui-ci est actuellement de 900 euros ; il faut parvenir à le porter à 964 euros, seuil de pauvreté calculé par l'Insee. Les anciens combattants les plus démunis ne doivent pas être oubliés ; les travaux préparatoires à la création, sur le modèle de l'ADCS, d'une allocation qui leur serait spécifiquement dédiée doivent être poursuivis. Elle pourrait être mise en oeuvre dès que les moyens budgétaires adéquats pourront être mobilisés.
Un mot enfin sur la réinsertion des militaires, notamment ceux qui ont servi en Opex. Pourquoi ne pas leur faciliter l'accès aux écoles de réinsertion de l'Onac, qui n'accueillent aujourd'hui, sur 1 800 stagiaires, que 80 militaires ? J'en ai parlé à son directeur général qui m'a indiqué qu'une réflexion sur l'offre de formation ainsi qu'une inspection interministérielle sont en cours.
Il y a un point sur lequel, par-delà les clivages politiques, on ne peut être que déçu : c'est celui de l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Seulement sept dossiers en deux ans ont été jugés recevables. Les contraintes fixées par la loi Morin sont trop strictes, malgré un décret pris récemment qui augmente le nombre de lieux et de maladies concernées. J'espère que le Gouvernement tiendra compte de l'urgence à régler cette situation dramatique.
Je suis également très heureuse qu'un sujet qui me tient particulièrement à coeur soit sur le point d'être réglé. Les discriminations entre « Malgré-nous » selon qu'ils aient été détenus par les Soviétiques à l'Ouest ou à l'Est de la ligne Curzon devraient disparaître prochainement. Après tant de promesses non tenues, le ministre doit prendre un décret dans ce sens dans les semaines à venir. Je lui fais confiance mais je serai très attentive à sa mise en oeuvre.
Cela ne comblera toutefois pas le déficit d'information des Français sur la tragédie des « Malgré-nous » et les drames de l'annexion de l'Alsace-Moselle. Comme chaque année, je renouvelle le souhait de voir l'histoire de cette période figurer de manière plus détaillée dans les manuels scolaires et faire l'objet d'une meilleure prise en compte par le ministère de l'éducation nationale dans ses programmes.
Voila donc un budget qui montre que le monde combattant sera en 2013 comme pendant la mandature au coeur des préoccupations du ministre délégué. Je vous propose donc de donner un avis favorable à son adoption.
Je vous présente maintenant les quatre articles qui y sont rattachés. Ce sont des demandes de rapports qui ont été ajoutées par l'Assemblée nationale.
L'article 62 bis demande un rapport sur la situation des conjoints des plus grands invalides dont l'indice de pension était supérieur ou égal à 2 000 points. Ces conjoints, qui ont souvent cessé toute activité professionnelle pour s'occuper d'un grand invalide, voient leurs revenus s'effondrer à la mort de celui-ci car leur pension de réversion est plafonnée à un niveau très bas. Une majoration est prévue uniquement pour les conjoints des plus grands invalides. La question soulevée ici est donc très pertinente.
L'article 62 ter demande un rapport sur la situation des veuves d'anciens combattants résidant hors de France. Sachant qu'elles ne sont actuellement pas éligibles à l'ADCS, une réflexion sur l'aide qui pourrait leur être apportée est nécessaire.
L'article 62 quater demande un rapport sur l'application de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés. Le champ de celle-ci dépasse le domaine des anciens combattants, mais le souhait de la députée à l'origine de cet article, Mme Poznanski-Benhamou, qui est la rapporteure pour avis de la commission de la défense, est avant tout d'avoir des précisions sur l'activité de la Fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie. Celle-ci, dotée d'un capital important, a fait bien peu parler d'elle en cette année de cinquantenaire de la fin du conflit.
Enfin, l'article 62 quinquies demande un rapport sur l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français et l'opportunité de modifier le décret d'application de la loi Morin. Il ne semble toutefois pas prendre en compte le fait qu'un décret du 30 avril dernier le modifie déjà en élargissant la liste des maladies radio-induites et des zones géographiques concernées. Un nouveau décret sera-t-il suffisant ou bien ne faudrait-il pas plutôt modifier la loi elle-même ? Je suis plus réservé sur cet article, il faudra interroger le Gouvernement sur ce point.
Mme Catherine Deroche. - Un effort particulier avait été fait ces dernières années par le précédent gouvernement en faveur des anciens combattants. Le présent budget est donc la poursuite du travail antérieur.
Concernant la JDC, je suis dubitative sur son organisation actuelle. On peut toujours l'élargir à de nouveaux domaines, mais ne s'éloigne-t-elle pas alors de son rôle ?
Pouvez-vous me préciser ce que vous entendez par attribution de la carte du combattant à ceux qui ont passé quatre mois en Algérie « à cheval » sur le 2 juillet 1962 ? L'extension de l'attribution de la carte est une revendication forte au sein des associations départementales à laquelle je souscris pleinement.
Enfin, pour l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, il est toujours difficile de déterminer précisément le lien entre la présence sur les lieux et la pathologie survenue ultérieurement. Ce qui était déjà valable sur ce point l'an dernier, lorsque le secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants nous l'avait expliqué, l'est encore aujourd'hui. Il serait bon de réaliser une étude plus fine sur le sujet.
M. Ronan Kerdraon. - Ce budget s'inscrit dans un contexte difficile, mais il est néanmoins préservé. Quelques interrogations demeurent : l'allocation différentielle, la campagne double, la carte du combattant « à cheval ». Avec Alain Néri, nous déposerons des amendements sur ces points pour améliorer la situation.
Je partage l'analyse de la rapporteure sur la loi Morin. Elle semble inefficace pour ceux auxquels elle était destinée. On ne peut pas parler de reconnaissance dans ce domaine.
Cela a été peu souligné, mais le passage d'un secrétariat d'Etat à un ministère délégué est tout sauf de l'affichage. Le budget qui l'accompagne va au-delà du simple protocole.
Mme Christiane Kammermann. - Je suis sensible à la problématique liée au rapport demandé par l'article 62 ter, c'est-à-dire la situation des veuves des anciens combattants résidant hors de France. Représentant le Sénat au conseil d'administration de l'Onac, je peux vous dire que ce sujet a été abordé et je m'associerai volontiers à la rapporteure pour qu'une solution y soit apportée.
Mme Isabelle Debré. - Concernant les veuves d'anciens combattants, je ne comprends pas pourquoi cette demande de rapport porte uniquement sur celles résidant hors de France. J'ai déjà reçu à plusieurs reprises des veuves vivant en France et qui se trouvent dans une situation de grande pauvreté. Sans remettre en cause les difficultés de celles vivant à l'étranger, je suis surprise qu'il n'y ait rien sur les veuves de guerre résidant sur notre territoire.
Mme Gisèle Printz, rapporteure pour avis. - On parle de carte du combattant « à cheval », et c'est l'expression consacrée, dans le cas de soldats dont la période de service en Algérie a commencé avant le 2 juillet 1962 mais s'est poursuivie après cette date. A l'heure actuelle, la carte du combattant est attribuée pour quatre mois de présence en Algérie avant le 2 juillet 1962. Certains soldats sont arrivés dans le pays moins de quatre mois avant cette date. Ils ont connu la guerre et sont restés sur place ensuite. Ils méritent donc qu'on leur donne la carte.
Les veuves d'anciens combattants résidant en France bénéficient déjà de plusieurs mesures, comme l'ADCS. Il n'y a rien pour celles qui vivent hors de France, d'où la demande d'un rapport sur le sujet. Un problème du même ordre se pose pour les veuves des plus grands invalides de guerre. Il faut agir en leur faveur, mais les marges de manoeuvre budgétaires sont très limitées.
Il faudra interroger le ministre sur la loi Morin, car il est trop tôt pour évaluer les effets du dernier décret et il est fort possible qu'il se révèle insuffisant.
Enfin, il faut essayer d'innover avec la JDC. Il est évident qu'une seule journée ne permet pas de prendre de nombreuses initiatives, mais on ne va pas rouvrir le débat sur la suspension du service national.
Mme Annie David, présidente. - La JDC a été récemment transformée : elle porte sur la défense et la citoyenneté. C'est la raison pour laquelle d'autres questions que celles liées à nos armées et à la défense nationale sont abordées.
Mme Catherine Génisson. - La reconnaissance des victimes des essais nucléaires français n'est pas qu'un problème financier. Il me semble qu'il est surtout nécessaire d'admettre cet état de fait, d'accepter que nos soldats et les populations civiles ont été irradiés.
Je tiens à préciser que la polémique sur le GIP et la mission interministérielle est désormais close. Lors de la dernière réunion du conseil d'administration du GIP où je siège, le ministre, ainsi que son président, l'ont très clairement affirmé.
Mme Isabelle Pasquet. - Je voudrais faire une déclaration générale, au nom du groupe CRC, sur l'ensemble des budgets que la commission va examiner. Le contexte économique dans lequel le projet de loi de finances (PLF) pour 2013 est examiné est marqué par un nombre considérable et sans cesse croissant de salariés privés d'emploi. Cette situation accentue les contraintes pesant sur l'Etat tout en renforçant le besoin d'une action de sa part en matière de solidarité. Le PLF intègre des dispositions que nous approuvons et il ne contient pas de dispositions qui nous paraissent inacceptables, contrairement au PLFSS. Nous constatons que le Gouvernement n'a pas renoncé à certaines mesures du précédent gouvernement, comme le gel du barème de l'impôt sur le revenu, que toute la majorité sénatoriale avait combattues.
Nous proposerons, lors de l'examen de la première partie du PLF, des amendements pour renforcer les finances publiques et porter les crédits des missions au niveau nécessaire pour que l'Etat joue pleinement son rôle. Certaines missions, comme la mission « Santé », sont marquées par un désengagement conséquent de l'Etat tandis que la hausse de la mission « Travail et emploi » n'est due qu'aux emplois d'avenir, que nous n'avons pas votés.
Pour autant, nous voterons les rapports afin que l'examen en séance publique des crédits des différentes missions puisse se faire dans les meilleures conditions possibles. Ce vote ne signifie pas que nous approuvons les crédits eux-mêmes ; notre position sur la question sera arrêtée en séance publique.
La commission donne un avis favorable à l'adoption sans modification des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».
Loi de finances pour 2013 - Mission « Santé » - Examen du rapport pour avis
La commission procède à l'examen du rapport pour avis de M. Dominique Watrin sur le projet de loi de finances pour 2013 (mission « Santé »).
M. Dominique Watrin, rapporteur pour avis. - Le budget de la mission « Santé » s'élève à 1,29 milliard d'euros pour 2013, en baisse de 0,1 milliard. Les changements de périmètre sur le programme 204, qui constituaient l'essentiel des modifications budgétaires de l'année dernière avec la budgétisation de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) devenue Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), sont cette année très réduits : la mission intègre désormais dans son périmètre l'agence de santé de Wallis-et-Futuna qui dépendait auparavant du budget de l'Outre-mer.
L'essentiel du poids des réductions de crédits est supporté par les agences sanitaires, qui représentent 75 % du budget. Leurs fonds de roulement sont réduits en moyenne de 2,5 %, ce choix étant néanmoins censé préserver leurs crédits de fonctionnement.
Le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) voit ainsi ses crédits baisser de 50 millions sur la dotation Etat (auxquels il faut ajouter une baisse de 200 millions de la dotation de la branche AT-MP dans le PLFSS). Cette baisse de 50 millions, qui réduit à néant la dotation de l'Etat, doit être reconduite au cours des deux années suivantes, soit une réduction totale de 150 millions d'euros.
L'existence d'un fonds de roulement du Fiva correspondant à près d'une année de dépenses pose question sur la manière dont il est géré. La Cour des comptes se penche actuellement sur ce problème et ses conclusions nous seront communiquées en début d'année.
Plus largement, je m'interroge sur la rigueur peut-être trop grande des contrôles exercés par le Fiva qui est particulièrement mal perçue par les victimes et leurs associations.
Enfin est-ce qu'en programmant la suppression de 150 millions d'euros de crédits pour le Fiva, on ne se prive pas des moyens nécessaires pour répondre aux évolutions souhaitées par les victimes de l'amiante ? Chacun s'accorde à dire que le personnel du Fiva subit une surcharge de travail. Cet argent aurait pu être utilisé pour améliorer les conditions de travail du personnel et accélérer les procédures d'indemnisation.
S'agissant du programme 183, la dotation de l'Etat pour le financement de la CMU-c est supprimée et remplacée par l'affectation du produit des taxes sur les boissons à sucre ajouté et contenant des édulcorants, les crédits de l'aide médicale d'Etat restent stables.
Les crédits du fonds d'intervention régional (FIR) créé en 2012 pour financer les actions de prévention des ARS baissent également (- 32,4 millions). Cette baisse devrait être compensée par une augmentation de la dotation de l'assurance maladie au FIR financée par les taxes comportementales (bière et tabac). Ce choix n'est pas sans conséquence car il contribue à brouiller la répartition des compétences entre l'Etat et l'assurance maladie. Il ajoute par ailleurs à la complexité des tuyauteries financières entre l'Etat et l'assurance maladie. Il signifie enfin que des taxes affectées à l'assurance maladie ne servent pas à financer la protection sociale mais à compenser la baisse des engagements de l'Etat.
Je rappelle ici que madame la ministre s'est engagée, au cours du débat sur le PLFSS, à fournir un tableau récapitulatif des dotations budgétaires par ARS. Il sera en effet très utile de comparer les données et de vérifier dans quelle mesure les territoires qui cumulent des retards sanitaires bénéficient d'une correction en termes de dotation. S'agissant du FIR, on peut d'ores et déjà constater que les critères qui président actuellement à la répartition de ce fonds entre les régions ne permettent pas d'assurer une véritable péréquation. Par exemple, le Nord-Pas-de-Calais reçoit à peine plus que son poids démographique.
L'Etat joue-t-il bien ici tout son rôle ?
En effet, la mission « Santé » est composée pour l'essentiel de crédits d'intervention. Toute diminution de son budget signifie donc à court ou moyen terme une réduction des actions de l'Etat. L'application de normes de limitation au budget des opérateurs pose donc problème au moment où les agences sanitaires voient leurs missions de contrôle accrues.
La mission « Santé » ne comporte pas les frais de personnel des opérateurs des programmes (ministère de la santé, agences et ARS) qui sont inclus dans la mission « Solidarité ». Il y a de ce point de vue un problème de lisibilité des crédits présentés par le programme annuel de performance (le bleu budgétaire). Certes, le programme présente, pour information, une vision des emplois des agences, mais il ne récapitule ni les emplois du ministère au sein de ses différentes directions générales, ni ceux des ARS.
On sait que les opérateurs et, au premier rang d'entre eux, les agences sanitaires auront moins de crédits pour effectuer leurs missions et moins de personnel pour les mettre en oeuvre. Mais il nous est impossible, en dehors d'une étude au cas pas cas lors des auditions, de mesurer l'interaction entre ces deux dimensions. Ainsi l'Institut de veille sanitaire (InVS) voit son plafond d'emploi réduit de sept postes en 2013, ce qui signifie le non-renouvellement de contrats à durée déterminée et des redéploiements de personnel, au détriment de ses antennes chargées de la collecte des données épidémiologiques au niveau régional. L'InVS devra également renoncer au développement du suivi de l'habitat insalubre faute de moyens humains.
Il s'agit évidemment d'un budget de crise, tourné vers le redressement des finances publiques. Nous le savons, pour être efficace et juste la diminution des crédits doit s'accompagner d'une vision claire des objectifs en matière de santé.
C'est dans cette voie que s'est engagée la ministre, afin de redéfinir les priorités qui n'ont pas été revues depuis la loi de santé publique de 2004. Deux axes semblent privilégiés, la définition de thématiques larges (les maladies infectieuses, la santé des jeunes) et la prise en charge de proximité afin d'assurer la prévention des risques liés à la santé. Les ARS sont ainsi désormais chargées de définir des territoires d'intervention correspondant à des « bassins de santé » dont la taille sera inférieure à celle des « territoires de santé » actuellement prévus. Elle tournerait autour de 40 000 habitants en zone urbaine et moins en zone rurale.
L'approche territoriale constituera le levier de l'action publique. Elle reposera sur la contractualisation entre équipes de soins de proximité et les « acteurs de la proximité » que sont les élus locaux, CPAM, rectorats, responsables de la médecine du travail, de la PMI, de la santé scolaire, animés par les délégués territoriaux des agences régionales de santé.
En complément de cette action de terrain, plusieurs mesures de rationalisation sont également envisagées dont l'unification du système de vigilance en matière sanitaire. D'autres porteront notamment sur les actions de prévention. Elles auront un impact financier car elles doivent aboutir à éliminer les actions concurrentes et à faire financer celles qui demeurent par un seul des trois financeurs : les collectivités, l'assurance maladie ou l'Etat. Néanmoins, l'ampleur des marges de manoeuvres budgétaires potentiellement dégagées n'est pas évaluée.
Ainsi les projets de loi envisagés pour le premier semestre 2013 sur la santé publique et sur l'accès aux soins poseront le cadre de la politique sanitaire dans lequel s'inscriront les prochains budgets.
Notre rapport budgétaire de l'année dernière avait noté que le ministre en charge de la santé, pris entre l'importance financière prédominante de l'assurance maladie et la capacité d'initiative des agences sanitaires au détriment du ministère, pouvait subir la tentation de placer au second plan les questions de santé publique.
La ministre de la santé s'est engagée résolument à rompre avec cette tendance et à organiser une politique de santé publique impliquant au premier rang la direction générale de la santé, chargée de la coordination des agences. J'ai pu noter qu'en l'espace d'un an, le nouveau DGS, M. Jean-Yves Grall, a mené une action ferme pour assumer pleinement cette fonction, qui rétablit la chaine des responsabilités administratives et politiques et offre aux agences sanitaires l'appui dont elles ont besoin de la part de leur tutelle pour mener leurs actions.
Plusieurs rapports des corps de contrôle, Cour des comptes en 2011, Igas, Inspection générale des finances (IGF) et Conseil d'Etat en 2012, critiquent le système actuel inutilement complexe, peu lisible pour le citoyen et porteur de redondances. Les agences, entre elles et sous la tutelle de la DGS, ont néanmoins défini des protocoles d'action conjoints et travaillent en étroite coopération les unes avec les autres. J'espère que le nouveau rapport Igas-IGF, qui examinera notamment le périmètre des agences face aux administrations centrales, n'aboutira pas à défaire un système qui fonctionne.
Plus fondamentalement, il convient de nous interroger, dans l'optique de la future loi de santé publique, sur la place des agences spécialisées comme l'Institut national du cancer (INCa). Constitue-t-il une exception dont les missions pourraient être assumées directement par le ministère de la santé ou faut-il imaginer la création d'instituts capables de mobiliser les ressources et les énergies sur les principales thématiques de la santé publique ?
Un des apports incontestables de l'INCa a été le rapprochement de la recherche et du soin. Il a permis d'apporter aux patients les fruits des recherches les plus poussées en matière de diagnostic et de traitement. Porter les soins sur l'ensemble du territoire à leur plus haut niveau me semble conforme à la nature même de notre pacte républicain qui repose sur la solidarité et sur le progrès.
Une coopération plus étroite entre l'Inserm et le ministère de la santé me semble également nécessaire. La mission de l'Inserm, qui est de coordonner la recherche biomédicale en France, se heurte à une relative atomisation des structures de recherche hospitalo-universitaires dont certaines sont financées directement par le ministère de la santé. Cette situation devrait être remise à plat.
J'ai choisi de traiter cette année trois sujets plus précisément. Le premier concerne la santé au travail. La détermination des liens entre travail et santé est l'un des axes de travail de l'InVS. A cette fin, il a mis en place les groupes d'alerte en santé travail (Gast) qui sont chargés d'organiser en région la réponse aux signalements d'événements sanitaires inhabituels en milieu professionnel. Chaque Gast regroupe les acteurs locaux de la santé au travail et s'articule avec les plateformes régionales de veille et d'urgences sanitaires placées au sein des ARS. Après la région Aquitaine, pilote depuis 2008, plusieurs régions ont décidé de mettre en place ce dispositif d'alerte : Languedoc-Roussillon, Pays de la Loire, Auvergne et Midi-Pyrénées en 2011, Lorraine, Centre et Nord Pas-de-Calais en 2012.
Ces groupes doivent permettre une détection et une action rapides face à un risque sanitaire émergeant au sein d'une entreprise en raison d'un produit, d'un processus ou de l'organisation du travail. Plus la détection est précoce, mieux le risque peut être circonscrit, ce qui limite le nombre de victimes dans et potentiellement hors de l'entreprise.
Le déploiement et le fonctionnement des Gast se heurtent pourtant à une difficulté. Les observations en matière de santé au travail dépendent du réseau de quelque mille médecins du travail qu'a constitué l'InVS afin de recueillir des informations individuelles au service de la surveillance sanitaire en santé travail. Ce réseau a été recruté progressivement en collaboration avec les médecins inspecteurs régionaux du travail (Mirt). Le rôle des Mirt est fondamental pour assurer la cohérence des actions, ils sont chargés de faire le lien entre les médecins du travail et l'InVS et d'animer les réseaux, ce qui est indispensable pour les maintenir actifs. De plus, leurs connaissances en font des experts particulièrement précieux pour contribuer à l'analyse des signaux.
Or, actuellement, il y a un déficit de Mirt dans quasiment toutes les régions (un seul à Marseille sur trois postes ; huit en Ile-de-France sur douze postes...). La raison semble résider dans un manque d'attractivité des postes, en particulier au regard de l'équilibre entre les salaires et les exigences et responsabilités. Dans ce contexte, les Mirt étant très mobilisés par les activités multiples qui leur sont dévolues, leur contribution à la veille sanitaire n'est pas toujours considérée comme prioritaire. L'InVS a parfois des difficultés dans certaines régions pour que leur rôle d'animation et d'impulsion de la contribution des médecins du travail s'exerce réellement. Cette situation risque de s'aggraver car de nombreux Mirt démissionnent régulièrement pour retourner à la médecine du travail.
De plus, la situation de la médecine du travail est inquiétante au niveau des postes de coordination, mais aussi parmi les praticiens de terrain puisque 32 % des postes ouverts à l'internat ne sont pas pourvus. Cela pose aussi la question de la reconnaissance des médecins du travail et de leur apport dans l'entreprise.
Malgré la récente loi sur la santé au travail, il me semble donc que nous aurons à nouveau à nous pencher sur cette question.
Le deuxième sujet que je souhaite aborder est celui de l'accès aux soins, au travers de la question des centres de santé. Ceux-ci sont porteurs d'une vision de la médecine centrée non sur l'acte, mais sur le soin dont a besoin la personne, et sur l'exercice coordonné par les différents professionnels de santé. Ceci aux tarifs opposables de sécurité sociale et avec possibilité de tiers payant.
Il est donc impératif qu'ils soient mieux pris en compte. Lors de leur congrès en octobre dernier la ministre a déclaré : « Je veux clairement affirmer ici que les centres de santé ont toute leur place dans l'organisation des soins. A la différence des gouvernements précédents qui, depuis dix ans, ont tout fait pour les mettre en situation critique, je souhaite que la place des centres de santé soit pérennisée. »
J'estime que le budget de l'Etat, et singulièrement la mission « Santé », devrait prévoir une subvention aux centres afin de participer aux frais de coordination qui ne sont pas couverts par les tarifs et qui restent à leur charge. Ces frais reposent à l'heure actuelle sur les instances qui assument la charge financière des centres : collectivités locales, mutuelles, associations, régime de sécurité sociale minier alors qu'ils correspondent à une mission essentielle de service public pour permettre la continuité des soins et l'adhésion aux traitements.
Ceci m'amène au dernier point que je souhaite aborder, celui de l'impact de la crise économique sur la santé des Français et particulièrement des plus démunis. Comme chaque année j'ai reçu l'association Médecins du monde dont les centres de santé ont connu plus de 40 000 visites en 2011, un chiffre qui a augmenté de 22 % en trois ans. Dans près de 80 % des cas, les malades sont éligibles à des droits pour leur permettre l'accès aux soins, aide médicale d'Etat ou couverture maladie universelle, mais seuls 16 % d'entre eux ont des droits ouverts. Le système reste trop complexe pour les plus fragiles et, je renvoie ici aux propositions de Médecins du monde.
J'attire l'attention de la commission sur une expérimentation intéressante menée par cette organisation qui doit nous aider à mieux cerner les difficultés d'accès aux soins des travailleurs pauvres. Rappelons que près de quatre millions de Français, dont de nombreux salariés, ne disposent pas d'une mutuelle.
J'aborde enfin la question des déterminants sociaux de la santé. L'Inpes s'est engagée dans des études très intéressantes sur ce point et lance des actions en partenariat avec les collectivités locales pour cibler les populations fragiles. Le poids des facteurs autres qu'individuels dans la santé apparaît d'autant plus important que la personne appartient à une catégorie de population défavorisée. C'est donc là qu'il faut agir. Nous avons les instruments pour le faire. Il faut nous en donner les moyens.
A la fin de ce panorama, je ne peux donc que regretter que le budget de la mission « Santé » soit en baisse. On peut y voir une étape de transition vers de nouveaux objectifs de santé publique.
Malgré les réserves personnelles que j'ai pu émettre dans ce rapport, je vous propose néanmoins de donner un avis favorable dans l'attente des réponses qui pourront être apportées par le Gouvernement en séance publique et pour permettre la poursuite des débats.
M. Marc Laménie. - Je souhaite revenir sur la question des ARS. Il y a en ce domaine un réel manque de clarté. Comment faire pour avoir une vision plus précise des crédits qui leur sont alloués ? Leur rattachement à la mission « Santé » paraît relever du bon sens.
Mme Catherine Procaccia. - J'ai plusieurs questions et remarques. Tout d'abord, vous indiquez que les fonds de roulement des agences vont être réduits. Ce n'est pas en soi un problème si elles ont accumulé des sommes les années précédentes sans les dépenser. Mais avez-vous des informations sur les incidences éventuelles de cette décision ? Par ailleurs, vous notez que la baisse des crédits du fonds d'intervention régional (FIR) va être compensée par des taxes comportementales. N'arriverons-nous pas bientôt aux limites de ce mode de taxation, une fois que nous aurons imposé tout ce qui peut se manger ou se boire, d'autant qu'il vise à décourager la consommation sur les produits concernés ?
S'agissant de la baisse du nombre d'emplois à l'InVS, s'agit-il également des personnels mis à disposition ?
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette notion nouvelle de bassins de santé qui conduirait, compte tenu des chiffres que vous indiquez, à subdiviser les villes les plus importantes ?
Enfin, sur quoi se fonde la ministre pour affirmer que la majorité précédente a tenté d'entraver l'action des centres de santé ?
La conclusion du rapporteur tend à me laisser penser que s'il n'était pas dans la position qui est la sienne, il n'adopterait pas les crédits de cette mission.
M. Jean-Pierre Godefroy. - Je souhaite marquer mon soutien au rapporteur s'agissant de son analyse de la situation du Fiva. L'absence de dotation de l'Etat pour les trois années à venir pose un réel problème. Je rappelle que notre mission d'information sur l'amiante avait préconisé une participation de l'Etat à hauteur de 30 % des fonds. Nous en sommes loin !
S'agissant des contrôles exercés par le Fiva, je rappelle que nous avions déposé un amendement tendant à les alléger dans le cadre du PLFSS. Il convient de mieux articuler le travail des CPAM et celui du Fiva pour éviter que celui-ci ne devienne un organisme de contrôle, ce qui n'est pas sa vocation.
Vous évoquez des problèmes de personnel, il me semble qu'il s'agit plutôt d'un dysfonctionnement au sein du conseil d'administration.
Mme Catherine Génisson. - Le rapporteur pose plusieurs problèmes importants. Sur la réduction du budget des agences, sur quoi devront-elles faire des économies ? Je partage le sentiment que les taxes comportementales ne peuvent assumer un financement pérenne de la politique de santé. Il me semble par ailleurs que les élus locaux - en particulier les élus régionaux - devraient être plus associés à la direction des ARS comme ils l'étaient à celle des agences régionales de l'hospitalisation (ARH).
Il m'apparaît essentiel de préserver le fonctionnement de l'INCa dont les réalisations ont été très importantes et je partage l'avis du rapporteur sur la nécessité d'un rapprochement entre le ministère de la santé et l'Inserm.
Nous avons un vrai problème de recrutement des médecins du travail et il faut nous pencher sur cette question.
Je suis d'accord sur la place centrale qu'ont les centres de santé en matière d'accès aux soins, de même qu'il me semble important de nous pencher sur les déterminants sociaux de santé.
M. René-Paul Savary. - Vous évoquez une nouvelle loi de santé publique. Est-ce bien opportun alors que les ARS n'ont pas encore trouvé vraiment leur place sur le terrain et qu'il n'y a pas de nouveau financement de prévu ?
S'agissant des centres de santé, les économistes de la santé nous disent que le système à l'acte produit trop alors que le système salarié ne produit pas assez. Il me semble qu'il faut trouver un système mixte et ne pas bouleverser le système actuel.
Mme Catherine Deroche. - Le désengagement de l'Etat du financement du Fiva est préoccupant. Le niveau de la dotation de la branche AT-MP devra nécessairement être relevé en 2014. L'important fonds de roulement qui a été constitué nous a été présenté comme lié à des difficultés de ressources humaines.
S'agissant du financement de la politique de santé publique par des taxes, il me semble qu'une augmentation générale de la TVA serait préférable.
M. Alain Milon. - Nous ne pouvons que noter la chute du financement en matière de santé alors que nous nous sommes toujours opposés à la baisse de ce budget. La mise en place des réformes est renvoyée à l'adoption de plusieurs lois dont on sait qu'elles ne pourront être mises en oeuvre avant fin 2013 au plus tôt. C'est donc là une perte de temps au détriment de l'action en matière de santé publique et l'UMP ne peut qu'être opposée à l'adoption des crédits de cette mission.
M. Dominique Watrin, rapporteur pour avis. - S'agissant des ARS, un amendement déposé sur le PLFSS demandait un rapport annuel présentant au Parlement l'ensemble de leurs crédits. C'est une piste à approfondir. Comme Catherine Génisson, j'estime que les élus locaux doivent être mieux associés à la direction des ARS. Mon expérience personnelle me montre que même en présidant une commission en lien avec l'ARS on ne dispose que d'une vision partielle des problèmes existant à l'échelle d'un territoire.
Les agences voient le nombre de postes en équivalents temps plein (ETP) dont elles disposent, réduits dans des proportions importantes. L'InVS perd sept ETP, l'Inpes cinq. Quant à l'INCa, son budget se réduit de 5 millions d'euros. Ceci aboutit concrètement à ce que les équipes arrivent à saturation. Effectivement, les agences ont pu puiser les années précédentes dans leurs fonds de roulement. Mais les marges de manoeuvre ont quasiment disparu et on peut craindre que les actions elles-mêmes en pâtissent.
Je souhaite également un financement pérenne des actions de prévention, car les taxes comportementales ont par nature vocation à détruire la base sur laquelle elles s'appliquent.
S'agissant des bassins de santé, nous ne disposons pas d'autres informations que celles fournies par la ministre. J'attire votre attention sur le fait que la rationalisation des politiques de prévention ne doit pas aboutir à un transfert vers les collectivités locales de nouvelles charges financières.
Les centres de santé ont été considérablement fragilisés ces dernières années par la question du financement, par exemple dans les Bouches-du-Rhône ou pour les centres dépendants de la sécurité sociale des Mines. Il y a aujourd'hui urgence à traiter ces problèmes si on ne veut pas voir les centres disparaître. Il n'est pas question de se substituer à la médecine libérale, mais de s'inscrire en complément dans l'offre de soins. Par nature, les centres produisent moins d'actes car ils ont aussi des missions en matière de prévention et d'éducation à la santé qui doivent être valorisées.
Enfin, sur l'Inserm, la précarisation des chercheurs est un élément inquiétant d'autant que le budget public américain est trente fois supérieur au nôtre. La position de la recherche française dans la concurrence internationale se trouve donc fragilisée.
M. Jacky Le Menn. - Je signale que lors de la dernière réunion du bureau de la commission, nous avons envisagé que la Mission d'évaluation et de contrôles des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss) se penche sur la question des ARS. Le rapport que nous venons d'entendre milite, me semble-t-il, pour que nous traitions rapidement ce sujet.
Suivant son rapporteur, la commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé ».
Loi de finances pour 2013 - Mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » et article 70 rattaché - Examen du rapport pour avis
La commission procède à l'examen du rapport pour avis de Mme Aline Archimbaud sur le projet de loi de finances pour 2013 (mission « Solidarité, insertion et égalité des chances »).
Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis. - La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » constitue l'un des principaux piliers budgétaires de la politique sociale mise en oeuvre par l'Etat. Composée de cinq programmes au poids budgétaire très inégal, elle traite aussi bien de la politique du handicap, de la lutte contre la pauvreté que de l'égalité entre les femmes et les hommes ou du fonctionnement des administrations sociales.
Elle ne couvre cependant pas l'ensemble de l'action de l'Etat dans le champ social puisque d'autres missions - je pense en particulier à la mission « Travail et emploi » et à la mission « Egalité des territoires, logement et ville » - concourent également à la politique nationale en faveur de l'inclusion sociale.
Le budget de cette mission pour 2013 s'élève à 13,4 milliards d'euros en crédits de paiement, en hausse de 5,6 % par rapport à 2012.
Cette augmentation résulte principalement d'un effort budgétaire significatif en faveur de la politique du handicap ainsi que du dynamisme des programmes relatifs à l'égalité entre les femmes et les hommes et au financement des administrations sociales.
A contrario, le programme de lutte contre la pauvreté enregistre une importante baisse de ses crédits qui, certes, est la conséquence de rentrées fiscales plus importantes mais qui, en termes d'affichage politique, n'est pas satisfaisante en période de crise.
Le programme « Handicap et dépendance », qui concentre à lui seul plus de 80 % des crédits de la mission, est doté de 11,2 milliards d'euros pour 2013, soit une augmentation de 6,3 % par rapport à cette année.
Ces moyens significatifs sont majoritairement destinés à financer l'allocation aux adultes handicapés (AAH) qui a pour objet de garantir aux personnes handicapées un minimum de ressources d'existence. Pour l'exercice 2013, les crédits demandés à ce titre s'élèvent à 8,4 milliards d'euros, soit une hausse de 8,5 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2012, sous le double effet de l'accroissement du nombre de bénéficiaires, qui devrait dépasser le million en 2013, et des suites de la dernière tranche de revalorisation de son montant, intervenue en septembre dernier.
Malgré cet important effort financier, je regrette que le Gouvernement n'ait pas réexaminé le contenu de la réforme des conditions d'attribution de l'AAH mise en oeuvre par la précédente majorité au cours de l'année 2011.
Partant du constat, bien réel, de pratiques très différentes en matière d'appréciation de la « restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi » de la part des commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), cette réforme visait non seulement à réduire les disparités territoriales, mais aussi et surtout à endiguer l'évolution, particulièrement dynamique ces dernières années, du nombre de bénéficiaires de l'AAH.
Ainsi, la nouvelle définition de la notion de « restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi », plus restrictive, exclut de facto du bénéfice de l'allocation des personnes anciennement titulaires.
Qui plus est, l'éligibilité à l'allocation pour les bénéficiaires présentant un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79 % est désormais réexaminée tous les deux ans, mesure totalement inepte au vu de l'engorgement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).
Bien sûr, il ne s'agit pas de remettre en cause les objectifs, parfaitement louables, d'harmonisation des pratiques et d'équité territoriale, mais je ne peux admettre qu'une telle réforme conduise à un nivellement par le bas dans l'attribution de l'AAH ainsi qu'à des difficultés de fonctionnement supplémentaires pour les MDPH.
Le programme retrace également la contribution de l'Etat au financement des MDPH, laquelle s'élève à 62,8 millions d'euros pour 2013, soit une augmentation de 7,8 % par rapport à 2012. Je me félicite de cette hausse, à l'heure où les MDPH peinent à disposer des moyens financiers nécessaires à l'accomplissement de leurs missions, ainsi que l'ont mis en évidence nos collègues Claire-Lise Campion et Isabelle Debré dans leur rapport sur l'application de la loi Handicap de 2005.
Enfin, 2,6 milliards d'euros sont consacrés au fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail (Esat), montant stable par rapport à celui prévu pour 2012.
Ainsi que nous l'a indiqué la ministre lors de son audition, il n'est pas prévu de nouvelles créations de places dans ces structures l'année prochaine, priorité étant donnée aux places déjà autorisées. Ce choix, dicté par les contraintes budgétaires actuelles, met, il est vrai, fin à la dynamique engagée ces dernières années en matière de création de places.
J'en viens maintenant au programme « Lutte contre la pauvreté », qui regroupe à titre principal les crédits destinés au financement de la partie « activité » du revenu de solidarité active (RSA) et de l'économie sociale et solidaire. Ce programme phare de la mission accuse un nouveau recul : de 453 millions d'euros en 2012, les crédits passent à 404 millions en 2013, soit une baisse de 10,9 %.
Plus de 90 % des crédits du programme sont consacrés au financement du « RSA activité » au moyen d'une subvention d'équilibre de l'Etat au fonds national des solidarités actives (FNSA), qui s'établit à 373 millions d'euros pour 2013, en diminution de 48,8 millions d'euros par rapport à 2012.
Cette baisse de la subvention de l'Etat est présentée comme la conséquence directe de l'augmentation corrélative des recettes fiscales du FNSA prévue par le PLFSS pour 2013 (passage de 1,1 % à 1,45 % du taux de la contribution sociale sur les revenus de placement et de patrimoine). Je ne peux cependant me satisfaire de cette seule explication d'ordre technique, s'agissant d'un dispositif particulièrement symbolique et nécessaire en temps de crise économique.
Cela fait en effet plusieurs années que, face à la sous-consommation des crédits du « RSA activité », l'Etat diminue sa propre contribution et utilise les réserves du FNSA pour financer d'autres prestations comme la prime de Noël. Depuis sa création en 2009, le FNSA a fait l'objet d'une programmation budgétaire défaillante qui résulte d'hypothèses trop optimistes quant à la montée en charge du « RSA activité », dont il faudra bien, un jour, tirer les conséquences.
Le nombre effectif d'allocataires du RSA est toujours resté largement en deçà des prévisions initiales. Alors que le dispositif devait concerner plus de 3,5 millions de personnes dont 2,2 millions de travailleurs pauvres, on comptait, au 31 décembre 2011, 1,8 million d'allocataires du RSA, dont seulement 477 000 au titre du « RSA activité » et 229 000 au titre du « RSA socle et activité », ce qui témoigne d'un fort taux de non-recours à la prestation.
Le rapport remis, en décembre 2011, par le comité national d'évaluation du RSA, permet de chiffrer et d'analyser ce différentiel entre le nombre de bénéficiaires et le public cible. Il apparaît que, si le non-recours au RSA en général s'établit à environ 50 % en moyenne, il est plus particulièrement marqué pour sa partie « activité » : 68 % des bénéficiaires potentiels du « RSA activité » n'ont en effet pas recours à l'allocation, contre seulement un tiers pour le RSA socle. Près de quatre ans après son lancement, le « RSA activité » n'a donc pas trouvé son public.
Les causes sont connues : la trop grande complexité du dispositif, l'information insuffisante des bénéficiaires potentiels, la réticence que leur inspire un mécanisme jugé « socialement disqualifiant ».
Au vu de ce constat, je souhaite que la Conférence sociale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, prévue pour les 10 et 11 décembre prochain, soit l'occasion de proposer une refonte du dispositif du « RSA activité ». Cette conférence devra également poser la question de l'avenir du « RSA jeunes » qui, on le sait, est un échec, la condition des deux années travaillées à temps complet étant totalement inadaptée à la réalité de la jeunesse française.
Le programme « Lutte contre la pauvreté » propose également une présentation rénovée des crédits concourant au développement et à la promotion de l'économie sociale et solidaire (ESS), rendant compte de la volonté du Gouvernement de doter cette politique publique d'une plus grande visibilité et de nouvelles ambitions avec la nomination d'un ministre délégué dédié à ce domaine. Je me réjouis de cette évolution qui témoigne d'une meilleure prise en compte, par les pouvoirs publics, de la plus-value apportée par l'ESS à la richesse et à la solidarité nationale.
Les crédits alloués pour 2013, d'un montant de 5 millions d'euros, sont destinés à soutenir les acteurs de terrain (coopératives, régies de quartiers, associations intermédiaires, etc.) qui, comme je le constate dans mon département de Seine-Saint-Denis, font un travail remarquable d'insertion sociale et professionnelle.
Enfin, le programme accueille les crédits dédiés à la politique de soutien à l'aide alimentaire, précédemment portés par la mission « Egalité des territoires, logement et ville ». La dotation pour 2013, qui s'élève à près de 23 millions d'euros, doit permettre l'achat de denrées alimentaires et participer au financement des associations intervenant dans ce domaine.
A cet égard, je rappelle que l'aide alimentaire, en France, permet chaque année la fourniture de 800 millions de repas à environ trois millions de personnes. Dans le contexte d'augmentation de la pauvreté, la précarité alimentaire constitue un enjeu de plus en plus prégnant au même titre que l'accès au logement et à l'emploi.
Je ne peux terminer cette présentation sans évoquer trois autres programmes qui, en 2013, verront leurs crédits augmenter.
Le programme « Actions en faveur des familles vulnérables » poursuit simultanément trois objectifs : la protection juridique des majeurs, le soutien à l'exercice des fonctions familiales et parentales, le financement de groupements d'intérêt public dans les domaines de l'adoption internationale et de la protection de l'enfance.
Doté pour 2013 d'environ 245 millions d'euros, ce programme bénéficie d'une augmentation de crédits de 4,6 % par rapport à 2012. Après les coupes budgétaires de ces dernières années, le projet de la loi de finances pour 2013 témoigne ainsi de l'attention nouvelle portée par le Gouvernement à la politique de soutien envers les familles les plus en difficulté.
Je regrette cependant que, cette année encore, aucune subvention de l'Etat au fonds national de financement de la protection de l'enfance (FNPE) ne soit budgétée au sein de ce programme, alors que l'aide sociale à l'enfance représente une charge croissante pour les départements.
Plus petit programme de la mission, celui consacré à l'« Egalité entre les femmes et les hommes » bénéficie lui aussi d'une nouvelle dynamique, liée à la création d'un ministère de plein exercice dédié aux droits des femmes. Ses crédits augmentent de 3 millions d'euros par rapport à 2012, pour atteindre 23,3 millions. Cette hausse s'explique principalement par la création d'un fonds de financement d'expérimentations en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes, dont on peut toutefois regretter qu'il capte une partie des financements destinés à des actions de promotion déjà mises en place.
Le nouvel élan politique impulsé en matière de droits des femmes se traduit aussi par l'arrêt de la baisse des subventions aux associations nationales : 3,5 millions d'euros leur seront versés l'année prochaine.
Quant au programme « Conduite et soutien », qui porte l'ensemble des moyens de fonctionnement des administrations sociales, il voit ses crédits augmenter de 5 %, principalement à destination du financement des agences régionales de santé.
Au final, les crédits 2013 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » traduisent la volonté du Gouvernement de conduire une politique de solidarité et de justice sociale, tout en poursuivant l'objectif de redressement des comptes publics. Je vous propose donc de donner un avis favorable à leur adoption, ainsi qu'aux articles rattachés.
M. Jean-Noël Cardoux. - Je vous remercie pour ce rapport important, qui ouvre des pistes, et voudrais intervenir sur trois points très précis.
Le premier concerne les MDPH. Comme vous le soulignez, il est totalement inepte de faire repasser, tous les deux ans, devant les CDAPH les dossiers de personnes dont le taux d'incapacité se situe entre 50 % et 79 %. On sait bien qu'à un tel niveau d'incapacité, il est peu probable, sauf cas très particuliers, que la situation ait évolué sur une telle période. Je pense qu'il faudrait réfléchir à une simplification du fonctionnement des CDAPH parce que leurs réunions sont de véritables marathons pour tous les participants, qu'ils soient associatifs ou élus. Dans mon département, nous avons essayé de trouver des méthodes alternatives, qui permettent d'aller beaucoup plus vite dans la prise de décision et la notification.
Le deuxième point concerne le RSA et plus particulièrement le « RSA activité ». Je partage votre constat. C'est un système qui ne fonctionne pas, du moins qui fonctionne mal, comme pour le « RSA jeunes ». Bien sûr, vous faites allusion à un problème de communication et d'information, mais aussi aux réticences de certains bénéficiaires potentiels face à ce dispositif. J'ajouterai qu'il y a un problème de fond, constaté sur le terrain. Quand on entre dans le « RSA activité », simultanément, un certain nombre d'avantages légaux ou extra-légaux attachés tombent. C'est en effet dissuasif pour certains allocataires. Il faudrait mener une véritable réflexion sur ce sujet.
Le troisième point sur lequel je souhaitais intervenir porte sur l'aide alimentaire. De nombreuses associations intervenant dans ce domaine (le Secours populaire, le Secours catholique, la Banque alimentaire...) m'ont alerté sur la diminution voire, à terme, la suppression de la dotation européenne, dont elles bénéficiaient jusqu'à présent. Une solution intermédiaire a été trouvée l'année dernière, pour essayer d'amortir le processus mais celle-ci n'est valable que pour un an. L'année prochaine, les associations ne percevront plus rien de l'Union européenne. Il s'agit d'un véritable problème auquel nous devons faire attention parce que nous serons bientôt confrontés à des ruptures d'approvisionnement dans certaines régions, ce qui risque d'être dramatique.
M. Georges Labazée. - Comme mon collègue, je m'inquiète des dispositions que compte prendre la Commission européenne, en particulier sous la pression de l'Allemagne, sur les mécanismes de subventionnement aux associations intervenant dans le domaine de l'aide alimentaire, lesquelles iraient dans le sens d'une suppression. Je souhaite, madame la rapporteure, que vous puissiez utiliser la tribune du Sénat pour assurer le Gouvernement de notre soutien sur la démarche qui est la sienne dans le cadre des négociations actuellement en cours entre les Etats membres. J'ai récemment assisté, dans mon département, à une assemblée de la Banque alimentaire au cours de laquelle tous les participants ont exprimé leur vive inquiétude sur ce sujet.
M. René-Paul Savary. - Tout d'abord, je m'étonne de l'avis favorable donné par la rapporteure, eu égard au contenu de son rapport. Je m'attendais plutôt à un avis réservé de sa part.
J'effectuerai ensuite quelques remarques sur l'AAH. Les dépenses au titre de cette allocation s'élevaient à 4 milliards d'euros, il y a quelques années. Elles sont depuis passées à 8,5 milliards. Ce qui montre bien que, lorsque l'Etat est responsable du financement d'une prestation de solidarité nationale, il y consacre des moyens financiers conséquents. En revanche, lorsque cette responsabilité incombe aux départements, les moyens ne sont pas là ! Je pense en particulier à la prestation de compensation du handicap (PCH), au « RSA socle » et à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Aussi, je plaide pour un financement des prestations de solidarité nationale par un impôt national. Le Président de la République a récemment annoncé que l'ensemble de la politique en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées serait confié aux départements, dans le cadre de l'acte III de la décentralisation. Il est hors de question que l'AAH soit transférée aux départements si, en face, il n'y a pas de compensation ! Les départements, qui sont déjà exsangues financièrement, ne s'en sortiraient pas.
En ce qui concerne le « RSA activité », j'ai eu l'occasion de participer aux travaux du comité national d'évaluation en tant que représentant de l'association des départements de France (ADF). Il est vrai que le système est particulièrement complexe et que les allocataires doivent déclarer l'ensemble de leurs ressources tous les trimestres, pour un montant de compensation parfois faible. Tout ceci n'incite pas à entrer dans le dispositif. Cependant, il faut rappeler que la montée en charge de ce type de prestation est toujours longue, comme ce fut le cas pour le revenu minimum d'insertion (RMI). En outre, il y aura toujours une partie du public-cible qui ne sera pas touchée, cela fait partie du comportement sociétal actuel. Ce qui n'empêche toutefois pas de faire des efforts de communication auprès des allocataires potentiels. Par ailleurs, faisons en sorte que la prime pour l'emploi (PPE) ne vienne pas perturber le dispositif.
Le « RSA jeunes » n'a pas, lui non plus, répondu aux attentes, ce qui semble logique au vu des conditions d'éligibilité particulièrement restrictives. Il faut le revoir impérativement, tout comme le « RSA socle ». Quand on fait une comparaison coût/résultats de cette prestation, on est en droit de se poser des questions sur son efficacité !
Enfin, j'abonde dans votre sens, madame la rapporteure, lorsque vous regrettez l'absence de financement du fonds national de protection de l'enfance par l'Etat. Ce fonds devait recevoir, chaque année, un abondement de la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) et de l'Etat. Or, non seulement celui-ci ne remplit pas ses engagements financiers mais en plus, il se sert du fonds pour un certain nombre d'actions nationales, alors que celui-ci devrait être consacré à des actions départementales !
Mme Michelle Meunier. Je vous remercie pour ce rapport qui, comme le précédent, est sans concession. J'aimerais, pour ma part, insister sur les aspects positifs de cette mission qui, il faut le rappeler, s'inscrit dans un contexte budgétaire très contraint. Et pourtant, elle connaît une augmentation de ses crédits de 5,6 %.
Je partage tout ce qui a été dit par mes collègues sur la politique du handicap, en particulier sur la nécessité de travailler, avec les départements, en vue d'améliorer le fonctionnement des MDPH.
S'agissant de la lutte contre la pauvreté, je place beaucoup d'espoir en la Conférence sociale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, qui se tiendra les 10 et 11 décembre prochain. Il faudra, à cette occasion, remettre à plat les dispositifs d'insertion qui ne fonctionnent pas comme le « RSA activité » et le « RSA jeune ». Ces prestations doivent être revues afin qu'elles permettent à leurs allocataires de vivre dans de meilleures conditions.
Pour terminer, je souhaite insister sur l'effort significatif qui est fait, cette année, en faveur des familles vulnérables ainsi que de l'égalité entre les femmes et les hommes. Une nouvelle dynamique est engagée, avec notamment la volonté d'aller beaucoup plus loin dans les expérimentations locales.
Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis. - S'agissant des MDPH, je crois effectivement que les procédures gagneraient à être simplifiées, ce qui ne coûte pas cher à mettre en oeuvre. La Conférence sociale de décembre prochain sera sans doute l'occasion d'aborder cette question.
M. Jean-Noël Cardoux. - Je pourrais, peut-être, demander à la MDPH du Loiret de m'adresser une note sur ce sujet.
Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis. - Je l'ai dit dans mon intervention, le programme « Handicap et dépendance» enregistre une forte hausse de ses crédits pour 2013, effort qu'il convient, bien sûr, de saluer dans le contexte actuel.
En ce qui concerne le « RSA activité », j'ai alerté la ministre, avec d'autres parlementaires, sur les faiblesses du dispositif. Elle s'est engagée à traiter cette question rapidement. On ne peut, en effet, pas encore attendre un an de plus pour agir. Le problème des droits connexes est réel ; si l'on perd certaines allocations ou indemnités au moment de l'entrée dans le « RSA activité », quel est l'intérêt d'entamer des démarches souvent longues et complexes ?
Sur l'aide alimentaire, j'ai bien entendu l'inquiétude de mes collègues et je la partage. Les associations que j'ai reçues m'ont toutes signalé la montée préoccupante de la précarité dans notre pays. Elles constatent une hausse de la fréquentation de leurs lieux d'accueil et voient arriver de nouveaux publics, en particulier des salariés et des familles. Le budget européen 2014-2020 est en cours de négociation et nous savons que l'aide alimentaire est fortement menacée. Il est de notre rôle de parlementaire de peser dans la discussion pour ne pas laisser les associations à leur propre sort.
S'agissant du « RSA jeune », le constat d'échec est encore plus évident que pour le « RSA activité ». Tant que la condition de deux années travaillées ne sera pas supprimée, parler de « RSA jeunes » sera une contre-vérité ! Il faudrait réaffecter les crédits non utilisés vers d'autres actions en faveur de la jeunesse.
M. René-Paul Savary. - Par exemple vers les emplois d'avenir ?
Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis. - Oui, c'est une possibilité.
Sur l'absence d'abondement du fonds national de protection de l'enfance, je ne manquerai pas d'interpeller la ministre en séance publique.
Plus généralement, il est vrai que mon rapport est sans concession mais, je le dis, j'appelle à voter cette mission, avec conviction et ce, pour plusieurs raisons.
Premièrement, sa dotation globale augmente significativement, et cette hausse concerne pratiquement tous les programmes.
Deuxièmement, elle propose un certain nombre d'actions nouvelles qui me paraissent intéressantes en période de crise économique et sociale. Je pense notamment aux expérimentations en matière d'insertion professionnelle et d'égalité entre les femmes et les hommes. C'est un signal positif en direction des associations qui, sur le terrain, font un travail remarquable.
Troisièmement, une meilleure visibilité est donnée à l'économie sociale et solidaire à laquelle je crois beaucoup. L'ESS est, en effet, une réponse non marginale et non expérimentale à la pauvreté et je me félicite que le ministre délégué en charge de ce domaine ait présenté, devant le Parlement, une feuille de route précise.
Quatrièmement, la ministre s'est engagée, et je m'en réjouis, à réformer rapidement les dispositifs d'insertion qui ne fonctionnent pas.
Pour l'ensemble de ces raisons, j'estime que ce budget va dans le bon sens.
Suivant sa rapporteure, la commission donne un avis favorable aux crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », ainsi qu'aux articles rattachés 70, 70 bis et 70 ter.
Organismes extraparlementaires - Désignation de candidats
La commission désigne Mme Gisèle Printz, candidate appelée à siéger en qualité de suppléante au sein du conseil national du bruit.
Puis la commission procède à la désignation de Mme Aline Archimbaud et M. Michel Vergoz, candidats titulaires, et MM. Michel Fontaine et Marc Laménie, candidats suppléants, appelés à siéger au sein de la Commission nationale d'évaluation des politiques de l'Etat outre-mer.
Loi de finances pour 2013 - Audition de M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social
- présidence de Mme Annie David, présidente, puis de M. Jacky Le Menn, vice-président -
Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission procède à l'audition de M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur le projet de loi de finances pour 2013.
M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. - Le contexte dans lequel nous avons élaboré ce budget vous est connu. D'une part, après dix-sept mois consécutifs de hausse du chômage, le nombre de demandeurs d'emploi dépasse les trois millions, et certaines catégories (jeunes, chômeurs âgés, chômeurs de longue durée) posent des problèmes difficiles à résoudre. D'autre part, la contrainte des finances publiques a conduit le Gouvernement à vouloir maîtriser le déficit budgétaire afin de faire décroître notre endettement. Nous avons donc choisi de nous battre activement sur le front du chômage, tout en faisant preuve de responsabilité sur le plan budgétaire.
Les crédits budgétaires consacrés au travail, à l'emploi, à la formation professionnelle et au dialogue social augmentent de 4 % : c'est considérable, mais ce n'est pas à cela que nous jugeons de la qualité du budget. D'ailleurs, toutes les actions que nous conduirons en 2013 ne sont pas inscrites dans ce budget. Le contrat de génération, après une négociation réussie entre les partenaires sociaux, sera adopté en conseil des ministres le 12 décembre et débattu au Parlement en janvier, nous ne pouvions donc pas encore en prévoir les conséquences dans le projet de loi de finances. De même, la grande négociation sur la sécurisation de l'emploi, complexe mais si importante pour l'avenir de notre pays, pourrait avoir des conséquences sur le budget : meilleure mobilisation du chômage partiel ou des capacités de formation avant licenciement.
Ce budget finance d'abord l'urgence : les contrats aidés et les emplois d'avenir. Il y aura 1,479 milliard d'euros en crédits de paiement pour créer 340 000 contrats aidés dans le secteur non marchand, et 50 000 dans le secteur marchand, comme l'année passée. Mais nous étalerons ces créations tout au long de l'année, et nous allongerons la durée de ces contrats, qui n'a cessé de décroître à mesure que le nombre de bénéficiaires augmentait : j'ai donné des instructions très fermes aux préfets de région à cet égard. Les emplois d'avenir ne sont pas financés par une diminution des crédits consacrés aux emplois aidés. Nous commençons à les mettre en oeuvre, et l'émotion qui se dégage des réunions organisées à cette occasion confirme, s'il en était besoin, que nous avons visé juste. D'ailleurs, des élus de tout bord nous rejoignent sur ce dispositif, même s'ils s'y étaient opposés au plan national. Les autorisations d'engagements s'élèvent à plus de 2 milliards d'euros, et les crédits de paiement sont calculés en retenant l'hypothèse d'une montée en puissance progressive au cours de l'année - mais si elle devait être plus rapide que prévu, nous ferons les choix nécessaires pour que rien ne l'entrave.
Ce budget finance la consolidation du service public de l'emploi, particulièrement en renforçant les moyens de Pôle emploi. Dès le mois de juin dernier, dans l'urgence, j'avais décidé de renforcer ces moyens par l'embauche en CDI de 2 000 agents supplémentaires. Leur recrutement est progressif, et 2 000 autres viendront les renforcer grâce à des redéploiements internes, de sorte que ce sont 4 000 agents supplémentaires qui accompagneront les demandeurs d'emploi. Nous augmentons donc en conséquence la subvention à Pôle emploi pour qu'il puisse financer ces postes supplémentaires. Les missions locales, autre pilier du service public de l'emploi, voient également leurs crédits maintenus, et même augmentés, puisque 30 .millions destinés à l'accompagnement des emplois d'avenir iront vers les missions locales. Les maisons de l'emploi, enfin, dont les crédits avaient diminué, quoiqu'elles fussent de création assez récente, bénéficient d'une reconduction de leurs crédits. L'accompagnement financier des demandeurs d'emploi en formation est l'objet d'une participation volontaire du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP). Les allocations de solidarité sont également financées à hauteur de 834 millions d'euros.
Ce budget renforce le soutien à des publics spécifiques qu'il s'agit d'aider à entrer dans l'emploi. Les mesures en faveur des personnes handicapées sont significativement développées, avec des crédits de 337 millions d'euros - en hausse de 9 % - pour les aides aux postes dans les entreprises adaptées, ce qui permettra de créer mille places supplémentaires. Cet engagement avait été pris au cours de la conférence nationale du handicap de juin 2011, et sera tenu sur plusieurs années. Les crédits pour l'insertion par l'activité économique (IAE) sont reconduits à 197 millions d'euros et l'Assemblée nationale les a augmentés de 10 millions d'euros, créant ainsi ce que j'ai appelé une provision pour réforme à venir : il faut simplifier les dispositifs d'insertion par l'activité économique, et une mission conjointe de l'Igas et de l'IGF est lancée pour faire le point - pour simplifier et rendre plus efficace, non pour diminuer, comme en témoigne cette provision. Nous avons préservé les sommes nécessaires pour que le contrat d'insertion dans la vie sociale (Civis) continue à soutenir 135 000 jeunes. Un nouveau marché public va être mis en oeuvre pour assurer le volet pédagogique des formations professionnelles à destination des publics spécifiques (détenus, ultra-marins, Français de l'étranger), en attendant de voir ce qu'ils deviendront par la suite dans le cadre de la décentralisation. Les crédits pour les écoles de la deuxième chance sont également conservés. Et le fonds d'insertion professionnelle des jeunes (FIPJ) est renforcé par un amendement adopté à l'Assemblée nationale.
Ce budget vise aussi à anticiper et à accompagner les restructurations industrielles et les mutations économiques, dans le but de prévenir les licenciements, en développant l'activité partielle, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), la formation : c'est là que les conséquences de la négociation sur la sécurisation de l'emploi rendront sans doute nécessaires des évolutions du budget en cours d'année. Ce sont 60 millions d'euros de crédits budgétaires qui sont mobilisés pour financer les accords de GPEC déjà signés, ou qui le seront l'an prochain, chiffre que l'Assemblée nationale a augmenté de 15 millions prélevés sur d'autres actions de mon ministère. Nous avons prévu 70 millions de crédits budgétaires pour l'activité partielle : c'est la dépense constatée en 2011, nous verrons si c'est le bon niveau. La dotation globale de restructuration est également reconduite, ainsi que les conventions de formation et d'adaptation du FNE et les cellules d'appui à la sécurisation professionnelle. Pour l'accompagnement social des restructurations, l'allocation temporaire dégressive est reconduite au niveau de 11 millions d'euros. Nous pérennisons le contrat de sécurisation professionnelle, pour un coût prévisionnel de 70 millions d'euros.
Ce budget finance l'adaptation des qualifications, la reconnaissance des compétences, la formation professionnelle et l'alternance. M. Repentin développera ce point.
Notons aussi les actions en faveur du développement de l'emploi : l'Etat compense à la sécurité sociale des exonérations de cotisations patronales spécifiques en fonction du territoire ou du secteur d'activité. Nous finançons aussi la création ou la reprise d'entreprises, avec des dispositifs comme le Nacre, qui est utile, le fonds de cohésion sociale, l'exonération liée au régime des micro-entreprises. Les conventions pour la promotion de l'emploi ou les dispositifs locaux d'accompagnement développent d'autres formes d'emploi.
Quelques mots enfin des moyens de la politique du travail : santé et sécurité au travail, qualité et effectivité du droit, dialogue social et démocratie sociale sont des sujets très importants pour nous. Le deuxième plan « santé au travail » sera donc financé par une augmentation sensible des crédits de paiement inscrits sur la ligne « recherche et exploitation des études », et la fixation à 9 millions d'euros de la subvention à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail. Des crédits de 10,6 millions d'euros sont aussi prévus pour la préparation des élections prudhommales, 7,2 millions pour la formation des conseillers prudhommes et 24 millions pour la formation économique, sociale et syndicale des salariés appelés à exercer des fonctions syndicales.
Ce budget, enfin, participe à l'effort de réduction des déficits. Le schéma d'emplois du ministère intègre 141 suppressions de postes - c'est moins que ce qui se faisait auparavant, mais c'est notre participation à la création de postes dans les secteurs prioritaires : éducation, justice et police. Les dépenses de fonctionnement sont en baisse de 3,7 % grâce à des efforts sur les dépenses de fonctionnement courant, de gestion et d'entretien du parc, d'infrastructure et de réseau. Par ailleurs, l'alignement du dispositif d'auto-entrepreneur sur celui d'entrepreneur individuel a pour effet de réduire la compensation à la sécurité sociale de 130 millions d'euros.
M. Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l'apprentissage. - Pour développer l'adaptation des qualifications, la reconnaissance des compétences, la formation professionnelle et l'alternance, l'Etat dispose de plusieurs outils.
La compensation des exonérations de charges au bénéfice des entreprises qui accueillent dans leurs effectifs des apprentis coûte 1,234 milliard d'euros, auxquels s'ajoutent une quinzaine de millions d'euros pour les contrats de professionnalisation, ciblés sur les demandeurs d'emploi de plus de quarante-cinq ans.
La dotation globale de décentralisation compense aux régions le coût financier des compétences qui leur ont été transférées en matière de formation professionnelle et d'apprentissage : elle s'élève à 1,702 milliard d'euros. Une partie de cette somme provient du compte d'affectation spéciale « financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » (FNDMA) créé en 2011 pour rendre plus lisible le dispositif global concernant l'alternance. Pour 825 millions de dépenses, il est doté pour 2013 de 688 millions d'euros de recettes, auxquelles s'ajoutent 160 millions d'euros d'excédent constaté. Ces recettes proviennent de la taxe d'apprentissage et du malus payé par les entreprises de plus de 250 salariés, qui sont soumises à une contribution supplémentaire dès lors qu'elles n'ont pas au moins 4 % d'apprentis dans leurs effectifs. Les dépenses sont réparties entre trois programmes : 450 millions d'euros pour la péréquation entre les régions et la compensation au titre du transfert du versement d'indemnités compensatrices forfaitaires, 360 millions d'euros pour les contrats d'objectifs et de moyens avec les régions au titre de la contractualisation pour le développement et la modernisation de l'apprentissage, et 15 millions d'euros pour l'incitation financière en direction des entreprises respectant les quotas en alternance. Le regroupement des moyens affectés au développement de l'apprentissage sur le compte d'affectation spéciale FNDMA leur donne une meilleure lisibilité. Leur montant global a été préservé, ce dont on ne peut que se féliciter.
L'Etat pourvoit aussi au financement de ce qu'on appelle les « savoirs de base », ou « accès aux compétences-clef » à hauteur de 55 millions d'euros. L'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) va prévoir de nouveau 87 millions d'euros en 2013 pour un accompagnement en ce domaine. Ces actions ne seront plus financées par un prélèvement sur le FPSPP mais par le budget de l'Etat. La validation des acquis de l'expérience fait l'objet de crédits d'un montant de 6,77 millions d'euros et la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle est prévue à hauteur de 185 millions d'euros.
M. Claude Jeannerot, rapporteur pour avis. - Nous aimerions être éclairés sur les perspectives qui sont les vôtres au sujet de l'allocation équivalent retraite (AER). Des demandeurs d'emploi âgés, qui pensaient percevoir cette allocation à l'arrivée à expiration de leurs droits à l'assurance chômage, se retrouvent aujourd'hui titulaires de minima sociaux du fait de la suppression de l'AER.
Le contrat de génération fera sans doute l'objet d'un collectif budgétaire en début d'année, mais avez-vous déjà une idée de son coût annuel ?
Concernant l'Afpa, son président nous a indiqué que les besoins de recapitalisation s'élevaient à 200 ou 300 millions d'euros et que la cessation de paiement menaçait dès janvier 2013. Nous connaissons votre engagement en faveur de l'Afpa. Ses difficultés actuelles résultent du fait qu'elle a été plongée brutalement et sans préparation dans la concurrence. Peut-être faudrait-il veiller à aménager les conditions de cette concurrence en définissant un service d'intérêt économique général (SIEG) pour rétablir la situation ?
Enfin, l'objectif de 500 000 apprentis à la fin du quinquennat est ambitieux. La dégradation de la conjoncture sera-t-elle un obstacle à sa réalisation ? Quels moyens nécessite-t-il ?
M. Michel Sapin, ministre. - Je commence par le sujet le plus délicat et le plus douloureux dont nous ayons débattu à l'Assemblée nationale : l'AER. Pour ceux qui croyaient pouvoir en bénéficier et qui ont été soudain frustrés de cette espérance, la situation est très pénible, à la fois pour eux-mêmes bien sûr mais aussi pour l'Etat qui ne joue pas un beau rôle dans cette affaire. Mais rétablir le dispositif coûterait 800 millions d'euros, c'est-à-dire que cela se ferait au détriment d'autres actions. Peut-on en rétablir au moins une partie ? A 1 000 euros par mois et par personne, les chiffres sont vite considérables, et en agissant pour certains seulement, on exacerberait le sentiment d'injustice chez les autres. La position du Gouvernement, qui a été acceptée par les partenaires sociaux, est que cette question devra être abordée au cours du premier semestre de l'année prochaine dans le cadre de l'état des lieux sur le financement des régimes de sécurité sociale et sur les premières propositions pour maintenir un mécanisme de financement solidaire des régimes de retraite. Cela dit, le dispositif de départ à soixante ans, qui a fait l'objet d'un décret en juillet applicable à compter du 1er novembre, permettra de régler une partie du problème, puisque, parmi les quelque 100 000 personnes qu'il concerne, certaines auraient pu toucher l'AER. Par ailleurs, j'ai donné instruction aux préfets de veiller à ce que la mise en place des emplois d'avenir permette de consacrer un plus grand nombre de contrats d'accompagnement vers l'emploi (CAE) à des chômeurs âgés. Ces deux facteurs devraient faire baisser un peu le nombre de ces personnes en grande détresse, sans, hélas, le ramener à zéro.
S'agissant du contrat de génération, à quelle vitesse va-t-il monter en puissance ? Dans les entreprises de plus de trois cents salariés, il ne coûtera rien, et j'espère qu'il ne rapportera rien : cela voudrait dire qu'elles ne le mettent pas en place et sont sanctionnées. Entre cinquante et trois cents salariés, un accord doit être recherché, en l'absence duquel un plan unilatéral de l'entreprise doit être présenté. Cela demandera un peu de temps, quelques mois sans doute. Dans les entreprises de moins de cinquante salariés en revanche, l'application sera immédiate, ce qui peut créer un effet d'entraînement assez considérable. Nous souhaitons une montée en puissance rapide, et nous évaluons le coût pour l'année prochaine à 150 ou 200 millions d'euros, et pour une année pleine, à 800 millions ou 1 milliard, qu'il faudra prendre en compte dans le pacte de compétitivité présenté par le Premier ministre. Les crédits seront affectés à Pôle emploi, qui a l'habitude de ce type de dispositif et fera les versements. C'est donc Pôle emploi qui en assurera la trésorerie en début d'année.
M. Georges Labazée. - Combien de contrats prévoyez-vous en tout, compte tenu de la situation économique?
M. Michel Sapin, ministre. - Notre objectif est d'arriver à 500 000 contrats, dont peut-être 100 000 ou 150 000 mille la première année. Cela concernera donc un million de personnes en tout. Cette aide doit durer trois ans.
M. Thierry Repentin, ministre délégué. - Dès ma première réunion de travail avec Michel Sapin nous avons évoqué le dossier de l'Afpa. La formation professionnelle est en effet une partie importante de la politique de l'emploi et l'Afpa est un des acteurs majeurs pour la formation des demandeurs d'emploi. Nous avons apporté à l'Afpa une subvention de 20 millions d'euros cet été et, en votant le texte sur les emplois d'avenir, vous nous avez permis de lui allouer 20 millions d'euros supplémentaires pour les prestations que l'Etat lui avait demandées mais qu'on ne pouvait lui payer faute de support législatif. Au-delà de ces 40 millions d'euros, le nouveau président, Yves Barou, a pour mission de préparer un plan de refondation sur la période 2013-2016, qui se déploiera sur trois axes : redresser les finances de cette association, qui n'est pas, je le rappelle, une agence de l'Etat, développer son activité en retissant du lien avec les donneurs d'ordres et transformer son modèle pédagogique. Dans ce cadre, l'Etat est sollicité sur trois plans. D'abord, contribuer à la recapitalisation, qui est en réalité une capitalisation puisque l'Afpa n'a pas de fonds propres, afin de redonner à l'Afpa la capacité d'emprunter et d'investir pour son avenir, notamment à travers la souscription de titres associatifs. L'ordre de grandeur de 200 millions d'euros, que vous avez évoqué, me semble réaliste et nous devrons préciser ce montant début 2013. Ensuite, faire évoluer le statut de son patrimoine : il n'appartient pas à l'Afpa, ce qui ne facilite pas sa modernisation ni son adaptation aux besoins de l'activité. Maintenir, enfin, le niveau des subventions qui étaient apportées à l'Afpa à 87 millions d'euros : c'est un signe de confiance que nous lui donnons. Nous réfléchissons aussi à l'émergence d'un service d'intérêt économique général au bénéfice des publics les plus éloignés de l'emploi : cette solution, compatible avec le droit européen, pourrait trouver sa place dans le texte nouveau sur la décentralisation qui sera présenté au Parlement en 2013. Quoi qu'il en soit, l'Etat a la ferme volonté de maintenir cet outil : dites-le autour de vous, afin d'apaiser l'inquiétude - légitime - qu'ont pu ressentir les quelque 9 300 salariés de l'Afpa.
Vous avez raison d'évoquer l'importance de la conjoncture économique à propos de l'objectif de 500 000 apprentis : le développement de l'apprentissage est corrélé avec l'activité économique. En période difficile, les chefs d'entreprise ont moins d'appétit pour accueillir des apprentis. Mais nous avons l'objectif, volontariste, de voir progresser le nombre d'apprentis de 420 000 à 500 000 d'ici la fin du quinquennat : il nous faut donc une progression annuelle de 3 %. Nous avons adressé un courrier conjoint aux chambres consulaires, leur annonçant que nous prendrions en charge les développeurs de l'apprentissage. Ils ont pour mission de démarcher les entreprises n'ayant pas d'apprentis pour leur faire connaître les dispositifs d'allègements de charges et leur faire comprendre l'intérêt qu'elles auraient à en recruter. Nous présenterons en 2013 un plan de développement, dont le Parlement aura à connaître, sur l'ajustement des dispositifs d'allègement de charges, tout en sollicitant certaines branches professionnelles qui sont en retard dans le développement de l'apprentissage, mais aussi les collectivités territoriales qui sont, elles, très en retard : elles emploient moins de 8 000 des quelque 400 000 apprentis que compte la France !
Il existe des freins à l'embauche de jeunes dans les collectivités territoriales, mais certaines d'entres elles recrutent des apprentis. J'étais hier à Libourne, une ville moyenne, qui en accueille une vingtaine. Au-delà de l'adoption de mesures fiscales et budgétaires, des engagements sont à passer avec les présidents de région pour donner leur chance à des jeunes qui ne trouvent pas d'employeurs alors qu'ils ont une place dans un centre de formation des apprentis (CFA).
Mme Gisèle Printz. - Quel sort faites-vous précisément aux auto-entrepreneurs dans ce budget ? Souvent, il s'agit de jeunes qui débutent dans la vie professionnelle.
Mme Christiane Demontès. - La formation tout au long de la vie bénéficie surtout aux diplômés. Que faire pour les autres, ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi ? Le Gouvernement a créé les emplois d'avenir, que je lance dans ma commune. Comment individualiser le plus possible leur volet formation, en particulier, sur les pré-requis ? Quelle compatibilité avec les marchés publics ? C'est la condition de la réussite des emplois d'avenir mais aussi de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels. Tout le problème est de susciter l'appétence de ceux qui gardent un mauvais souvenir de leur scolarité. Où en est la réflexion sur ce sujet ?
Mme Catherine Procaccia. - Monsieur Sapin, vous avez évoqué, concernant l'aide aux publics spécifiques, des dispositifs multiples et complexes, notamment 1 000 postes adaptés pour les personnes handicapées. Avez-vous l'intention de mettre un peu d'ordre dans des contrats qui ont eu leur logique mais qui, pour certains, n'en ont peut-être plus ? Cela simplifierait les choses, à la fois pour les personnes concernées et pour les entreprises.
A une époque, il a été question de réforme des élections prud'homales. Quels sont vos objectifs ?
Les contrats de génération, avez-vous dit, seront financés ultérieurement, sans doute par un projet de loi de finances rectificative. Et pour les emplois d'avenir ? En cas de succès, et je note votre prudence, vous avez évoqué des choix financiers. Pouvez-vous en dire plus ? Dans le même ordre d'idées, le financement des maisons de l'emploi s'arrêtera-t-il à la liste des maisons agréées il y a deux ou trois ans ou évoluera-t-il ?
Je veux dire ma satisfaction devant vos projets importants pour l'apprentissage. Nous voulons tous ici soutenir ce type d'emploi et de mise sur le marché du travail. Pour autant, les entreprises, de plus en plus sollicitées, peinent à dégager du temps pour former les apprentis. Qu'en est-il de la carte nationale d'apprenti, évoquée par Laurent Wauquiez, et dont on a reparlé au Sénat lors des dernières journées de l'apprentissage ? Enfin, une question récurrente depuis plusieurs années, le transport et l'hébergement de ces jeunes qui doivent faire la navette entre leur lieu de travail et leur établissement. Comment avancer ?
M. René-Paul Savary. - Le président Hollande s'est engagé à infléchir d'ici un an la courbe du chômage...
M. Michel Sapin, ministre. - Non, à l'inverser ! C'est mieux qu'avant : l'ancien Président, lui, parlait de baisse de la hausse tendancielle du chômage...
M. René-Paul Savary. - Je vous souhaite de réussir ! Vous le devriez avec vos 100 000 emplois d'avenir, 100 000 contrats de génération, 4 000 agents de plus à Pôle emploi, 60 000 postes dans l'éducation nationale sans parler du reste. Mais n'y-a-t-il pas une contradiction à constater l'importance du déficit et à proposer des mesures qui accroissent la dépense publique ?
Les contrats aidés ? Le contrat de génération, parce qu'il est davantage tourné vers le secteur marchand, est plus prometteur que les autres. Le problème, nous le savons, est la sortie de ces contrats, surtout en période de crise. Les gens se retrouvent sur le carreau, à la case départ, ce qui les déçoit terriblement.
La contrainte budgétaire vient souvent contredire la volonté d'insertion que portent les départements. Pour un conseil général, cela vaut le coup de miser sur les contrats aidés pour les plus de vingt-cinq ans car cela signifie autant de gens au RSA en moins. Un mécanisme qui ne jouera pas pour les emplois d'avenir qui s'adressent aux 16-25 ans.
L'accueil d'apprentis, c'est exact, n'est pas une habitude des collectivités territoriales. C'est un peu antinomique, d'ailleurs, de leur demander cet effort quand beaucoup d'entre elles sont, par la force des choses, engagées dans une stratégie difficile de réduction du personnel en période de crise. Quelle que soit notre volonté de lutter pour l'emploi nous nous heurtons à une contrainte budgétaire.
M. Jacky Le Menn, président. - Ce budget pour l'emploi dans une conjoncture économique difficile marque la volonté forte du Gouvernement de lutter contre le chômage, on ne peut que s'en féliciter. Nous devons tous donner priorité à l'emploi, Etat et collectivités territoriales.
Je salue la consolidation du service public de l'emploi après la fusion difficile de l'ANPE et des Assedic. Grâce aux 4 000 postes supplémentaires, le portefeuille des agents diminuera-t-il ? D'après nos contacts sur le terrain, ces derniers, qui sont eux-mêmes en emploi précaire...
M. Michel Sapin, ministre. - Nous créons des CDI !
M. Jacky Le Menn, président. - Très bien ! Ces agents, donc, n'ont pas le temps de rechercher des emplois auprès des entreprises - en particulier de convaincre les plus petites, là où sont les gisements d'emplois les plus importants - et d'accompagner correctement les personnes les plus éloignées de l'emploi. Pouvez-vous me rassurer ? Ne vend-on pas de l'illusion à nos concitoyens ?
M. Thierry Repentin, ministre délégué. - Madame Procaccia, le plan de développement de l'apprentissage de 2013, dont je vous ai parlé, intègre un volet « qualité » qu'on a trop souvent négligé par le passé. Concernant l'hébergement, les investissements d'avenir pourraient financer des projets de construction au bénéfice des apprentis. Des collectivités territoriales ont déjà déposé des projets. J'ajoute qu'une petite ligne budgétaire a été votée à l'Assemblée nationale pour l'accompagnement des apprentis les plus en difficulté.
Madame Demontès, l'intérêt des emplois d'avenir réside dans la formation qui l'accompagne pour des jeunes qui n'en ont précisément pas, une formation qui est obligatoire. Pour eux, il faut un plan de formation spécifique et individualisé. Parce que l'Etat ne peut pas y parvenir seul, nous avons noué des partenariats avec les régions afin qu'elles revoient leur offre de formation pour les 16-25 ans, avec les organismes paritaires collecteurs agréés qui dédieront une partie de leurs recettes à l'accompagnement individualisé de ces jeunes et avec le FPSPP qui travaillera sur l'acquisition des compétences socles et la lutte contre l'illettrisme, un fléau plus répandu qu'on ne le croit. Grâce à la mise en place d'un service d'intérêt économique général de la formation avec un agrément délivré pour plusieurs années, nous aurons des interventions plus fines sur la pédagogie. L'accès rapide à la formation professionnelle sera un des critères de l'agrément.
Voilà l'ensemble des moyens que nous aurons à mettre en musique l'an prochain, j'espère le soutien du Parlement !
M. Michel Sapin, ministre. - Madame Printz, nous touchons à un tout petit avantage des auto-entrepreneurs en alignant leur taux de cotisation sur celui des autres travailleurs indépendants. L'essentiel demeure, c'est-à-dire l'allègement des formalités déclaratives et le principe du « zéro chiffre d'affaires, zéro charges ». J'ajoute que ma collègue Sylvie Pinel est chargée d'étudier les améliorations que nous pourrions apporter à ce régime.
Madame Procaccia, 1 000 postes seront créés dans les entreprises adaptées pour les personnes en situation de handicap dans les trois prochaines années, soit 3 000 postes supplémentaires. Vous avez parlé de complexité : elle est surtout palpable dans le secteur de l'IAE car chaque filière a son propre mécanisme d'aide. Une étude est en cours pour parvenir à une simplification qui n'a pas pour but, je le précise, de faire des économies. Cela dit, votre question portait plus largement sur les contrats aidés. Nous verrons s'il faut procéder éventuellement à des fusions après la montée en puissance des emplois d'avenir et des contrats de génération. S'agissant des élections prud'homales, le Gouvernement s'en tient pour l'heure au calendrier prévu, la preuve en est l'inscription des crédits au budget. Des évolutions ultérieures ne sont pas à exclure.
Le financement des emplois d'avenir s'il y a une montée en charge plus rapide que prévu ? Nous réglerons la question en gestion ce qui, en langage budgétaire, signifie que nous procéderons par ajustement au vu de la réalisation dans une loi de finances rectificative. Nous avons employé cette méthode pour financer les contrats aidés supplémentaires décidés en cours d'année. Cette approche vaut pour des montants inférieurs à 100 millions d'euros ; au-delà, il faudrait prendre des mesures complémentaires d'économies ou de recettes.
Les crédits des maisons de l'emploi sont maintenus. Comment mieux les répartir ? On a tendance, vous le savez, à reconduire les crédits de l'année antérieure, de sorte que des disparités considérables persistent entre les maisons, qu'il faudrait réduire.
Monsieur Savary, les emplois d'avenir ont un intérêt pour les départements. L'intervention des collectivités aura un effet d'entraînement car elles connaissent associations et établissements sociaux sur leur territoire. Les emplois d'avenir ne représentent pas des dépenses supplémentaires s'ils s'inscrivent dans une logique de gestion prévisionnelle des emplois. Je m'explique : si le départ en retraite d'un agent est prévu, pourquoi ne pas former un jeune, qui n'en a pas actuellement les compétences, pour le remplacer ? Voilà une manière intelligente de renforcer les effectifs et de former les jeunes. Il ne s'agit pas de demander aux collectivités territoriales à la fois de dépenser plus et de serrer les boulons...
Monsieur Le Menn, votre question sur Pôle emploi est la bonne : 2 000 postes créés, c'est mieux que les 1 800 supprimés par l'ancien gouvernement en période de hausse du chômage. A ces créations de postes, il faut ajouter les 2 000 que Pôle emploi s'est engagé à redéployer vers l'accueil des chômeurs. Déjà, des améliorations sont sensibles. Surtout, Pôle emploi s'est engagé dans une réforme importante : passer d'un système standardisé d'accueil au sur-mesure. Le jeune débrouillard, qui sait parfaitement utiliser internet, n'a pas besoin de rencontrer fréquemment un conseiller; un échange de courriers électroniques suffit peut-être. En revanche, les personnes les plus éloignées de l'emploi ont besoin d'un contact humain avec leur conseiller, à échéances rapprochées. Cette réforme oblige à modifier les affectations et les compétences. Les personnels réclament des moyens supplémentaires, mais apportent leur soutien à cette personnalisation de l'accueil.
Pour finir, monsieur Savary, personne n'a jamais dit, et surtout pas moi, que les politiques publiques de l'emploi suffiraient à régler la question du chômage. Les contrats aidés, les emplois d'avenir, les contrats de génération, la politique de suivi et de formation viennent en complément des mesures sur la compétitivité, l'équilibre des comptes publics, la réorientation du projet européen vers la croissance. Les entreprises doivent redevenir créatrices d'emploi, c'est l'objectif. Avec cette politique économique, et vous examinerez les dernières décisions plus rapidement que vous ne le pensez, nous créons les conditions pour atteindre cet objectif mobilisateur qu'est l'inversion de la courbe du chômage.
M. Jacky Le Menn, président. - Merci de votre disponibilité.