Mercredi 15 juin 2011

- Présidence de M. Jean Arthuis, président -

Recommandations de la Commission européenne sur le programme de stabilité actualisé de la France pour la période 2011-2014 - Communication

La commission entend tout d'abord une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur les recommandations de la Commission européenne au Conseil européen sur le programme de stabilité actualisé de la France pour la période 2011-2014.

M. Jean Arthuis, président. - Pour la première fois, le 27 avril dernier, le Sénat s'est prononcé par un vote sur la déclaration du Gouvernement sur le projet de programme de stabilité, en application de l'article 50-1 de la Constitution. La recommandation de la Commission européenne au Conseil concernant le programme national de réforme de la France pour 2011 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité actualisé de la France pour la période 2011-2014, adoptée le 7 juin 2011, exprime des analyses très proches de celles de la commission.

M. Philippe Marini, rapporteur. - La recommandation de la Commission européenne rejoint en effet pleinement les analyses de la commission des finances, telles qu'elles ont été en particulier exprimées dans mon récent rapport d'information (n° 456, 2010-2011) sur le projet de programme de stabilité.

Ainsi, selon la Commission européenne :

- « sur la base de l'évaluation du programme de stabilité effectuée conformément au règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil, [il apparaît] que le scénario macroéconomique sur lequel se fondent les projections budgétaires est trop optimiste. Les taux de croissance prévus sont légèrement supérieurs aux projections les plus récentes des services de la Commission pour 2011 et 2012 et restent nettement supérieurs à la croissance potentielle dans les dernières années » ;

- « la trajectoire d'ajustement du déficit et de la dette est entourée de plusieurs risques liés notamment à la possibilité que le scénario macroéconomique soit moins favorable qu'escompté, au manque de précision de certaines mesures et au fait que les objectifs n'ont souvent pas été atteints par le passé. Par conséquent, en l'absence de mesures supplémentaires, il ne peut pas être garanti que le déficit excessif sera corrigé en 2013 au plus tard » ;

- « l'effort budgétaire annuel moyen sur la période 2010-2013, fondé sur la tendance du solde structurel (recalculé), est légèrement inférieur à l'effort (supérieur à 1 % du PIB) préconisé par le Conseil » ;

- « pour rétablir une position budgétaire viable, il est indispensable d'éviter le dérapage des dépenses en étayant le renforcement de l'effort budgétaire par des mesures clairement définies, notamment parce que l'objectif 2013 ne laisse aucune marge de sécurité par rapport au seuil de 3 % du PIB » ;

- enfin, « la Commission considère que la France doit préciser davantage sa stratégie d'assainissement budgétaire, notamment pour 2012 et les années suivantes, afin de corriger son déficit excessif en 2013 au plus tard et de ramener sa dette sur une trajectoire descendante. Toute recette exceptionnelle devrait être utilisée pour accélérer la réduction du déficit et de la dette ».

Lors de l'examen de ce qui est devenu la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, le Sénat a souhaité que le Gouvernement s'engage sur un certain effort structurel si, comme le juge probable la présente recommandation, la croissance était inférieure aux hypothèses retenues. Il est résulté de cette demande l'insertion dans le rapport annexé à cette loi de deux paragraphes, selon lesquels « dans un scénario alternatif où la croissance de l'activité n'atteindrait que 2 % par an sur 2012-2014 », il faudrait réaliser un effort supplémentaire « compris entre 4 milliards d'euros et 6 milliards d'euros chaque année », ce à quoi le Gouvernement « ferait face par des mesures d'économies supplémentaires sur les dépenses et les niches fiscales ou sociales pour assurer le respect de la trajectoire de déficit fixée dans la présente loi de programmation. »

La recommandation de la Commission européenne rejoint également les analyses de la commission des finances en matière fiscale. Elle souligne en particulier la nécessité du basculement du système fiscal vers ce qu'il est convenu d'appeler la « TVA sociale » : « La France - souligne-t-elle - est l'un des pays de l'Union européenne où les impôts et les charges sociales sur le travail sont les plus élevés, tandis que la consommation y est relativement peu taxée. De plus, la part des recettes des taxes environnementales dans le PIB est elle aussi nettement inférieure à la moyenne de l'Union européenne. Un rééquilibrage du système fiscal par le déplacement de la charge fiscale du travail vers la consommation et l'environnement aurait probablement des effets bénéfiques sur l'emploi et sur la réalisation des objectifs environnementaux ».

La Commission européenne souligne en outre la nécessité de réduire les allégements de prélèvements obligatoires. Selon elle, « les exonérations fiscales et sociales (notamment les « niches fiscales ») (...) font peser un risque sur l'assainissement des finances publiques. (...) Les dépenses fiscales sont utilisées pour mettre en oeuvre une politique économique précise, mais aucune évaluation systématique n'est réalisée pour déterminer si les objectifs visés ont été atteints. Enfin, la possibilité de les substituer aux dépenses publiques a permis aux autorités françaises de respecter officiellement les règles existantes en matière de dépenses ». Tout cela est dit assez élégamment.

Ainsi, la Commission européenne propose que le Conseil recommande que la France s'attache, au cours de la période 2011-2012, à « (...) accroître l'efficacité du système fiscal, notamment (...) en mettant en oeuvre la réduction prévue du nombre et du coût des exonérations fiscales et sociales (y compris les « niches fiscales ») ».

Nous devons nous féliciter des convergences des analyses de la commission et de celles de la Commission européenne. Cela peut tout à fait motiver le texte de la résolution que je vais vous soumettre.

L'alinéa 7 se réfère à une « recommandation de recommandation », ce qui est du « langage européen ». C'est pour le plaisir de parler une langue incompréhensible !

M. Jean Arthuis, président. - C'est la Commission européenne qui recommande au Conseil d'adopter une recommandation.

M. Philippe Marini, rapporteur. - Selon le texte que je vous propose, le Sénat :

« - souligne que les programmes de stabilité doivent reposer sur des hypothèses de croissance correspondant à la croissance potentielle de l'économie, pour ne pas surestimer l'amélioration du solde public ; que le programme de stabilité 2011-2014, qui retient des hypothèses de 2,25 % en 2012 et 2,5 % en 2013 et en 2014, ne satisfait pas à cette exigence ;

« - observe que l'autre raison principale du non respect de la trajectoire de solde de la quasi-totalité des programmes de stabilité passés réside dans une hypothèse de croissance des dépenses publiques de l'ordre de 1 % en volume, contre une exécution en moyenne supérieure à 2 % ; qu'en conséquence, l'objectif de 0,6 % du programme de stabilité 2011-2014 devrait être mieux documenté ;

« - se félicite de ce que la recommandation au Conseil souligne la nécessité de déplacer la charge fiscale du travail vers l'environnement et la consommation, et de réduire les allégements de prélèvements obligatoires ;

« - constatant que la plupart des programmes de stabilité présentés en avril 2011 par les autres Etats membres de la zone euro comportent plusieurs scénarios de croissance, incite le Gouvernement à inclure dans ses prochains programmes de stabilité un scénario alternatif reposant sur une hypothèse de croissance de 2 % par an ;

« - demande au Gouvernement de confirmer au Conseil son engagement, résultant du rapport annexé à la loi n° 2010-1645 précitée, de prévoir dès l'automne 2011 des mesures supplémentaires pour respecter sa trajectoire de solde, s'il apparaissait que la croissance ou les dépenses publiques devaient être respectivement inférieure ou supérieures aux hypothèses retenues. »

M. Jean Arthuis, président. - On a l'impression que ce sont les travaux de la commission qui viennent de recevoir le « visa » de la Commission européenne !

M. Denis Badré. - Ne faudrait-il pas évoquer la « TVA sociale » et les allégements de prélèvements obligatoires dans deux alinéas distincts ?

Mme Nicole Bricq. - Le texte du rapporteur montre bien toute la vanité de la révision constitutionnelle en cours. Si le Gouvernement voulait réellement réduire le déficit, il ne s'exposerait pas à de telles appréciations de la part de la Commission européenne.

M. Jean Arthuis, président. - Il n'est pas le seul à retenir une hypothèse de croissance de 2,5 % !

Mme Nicole Bricq. - Je ne vois pas l'intérêt d'une résolution. Le Sénat a voté favorablement, le 27 avril dernier, sur la déclaration du Gouvernement sur le projet de programme de stabilité. S'il désapprouvait ce projet, pourquoi avoir voté favorablement ? C'est une « procédure de complaisance ». Par ailleurs, je suis contre la TVA sociale. Je ne puis voter en faveur de ce texte.

M. Jean-Pierre Fourcade. - Peut-être faudrait-il mentionner explicitement la dette publique ?

M. Yann Gaillard. - Je suis un peu triste, et gêné que la commission se réjouisse de ce que la Commission européenne donne à la France une « mauvaise note » !

M. Jean Arthuis, président. - Nous ne nous réjouissons pas. Nous remarquons la proximité de nos analyses et de celles de la Commission européenne.

M. François Marc. - J'approuve ce qu'a dit Nicole Bricq. La volonté d'alourdir la TVA procède d'une tendance libérale, conservatrice, qui a pour objet d'alléger l'imposition du patrimoine.

M. François Fortassin. - Nous pouvons certes nous congratuler de la convergence de nos analyses avec celles de la Commission européenne. Mais nous sommes dans la position des sociétés savantes ! Nous ne sommes pas écoutés par le Gouvernement. Le « rabot » a en réalité été une « lime à ongles ». La commission des finances devrait exprimer son point de vue avec plus de force.

M. Jean Arthuis, président. - Ce qui confirme la nécessité du texte qui vous est proposé !

M. Joël Bourdin. - Je pense, comme Jean-Pierre Fourcade, qu'il faudrait évoquer la dette publique. Par ailleurs, les économistes ne sont pas d'accord sur l'estimation de la croissance potentielle.

M. Philippe Dominati. - Dans l'optique libérale qui est la mienne, je ne vois pas l'intérêt de la TVA sociale, ni, d'une façon générale, d'une augmentation des impôts.

M. Jean Arthuis, président. - Il ne s'agit pas d'augmenter les impôts, mais de les déplacer !

M. Roland du Luart. - Je suis d'accord sur le fait que la commission devrait exprimer son point de vue avec davantage de fermeté. Elle doit demander la suppression de tous les « comités Théodule » !

M. Jean Arthuis, président. - Ce sera possible dans le projet de loi de finances rectificative.

M. Philippe Marini, rapporteur. - Je me félicite de l'ensemble des interventions. Je réponds à notre collègue Nicole Bricq qu'une fois que le Parlement a voté sur le projet de programme de stabilité, il ne lui reste d'autre moyen de s'exprimer que l'adoption d'une résolution. C'est une façon de dire : « Ecoutez-nous davantage ». Le passage du texte que je vous propose relatif à la TVA sociale est conforme aux positions précédemment exprimées par la commission des finances.

En réponse aux suggestions de nos collègues Jean-Pierre Fourcade et Joël Bourdin, je vous propose d'insérer un alinéa selon lequel le Sénat « rappelle que le respect de la trajectoire de solde conditionne la réduction du ratio d'endettement public à compter de 2013 ».

A l'issue de ce débat, la commission conclut au dépôt de la proposition de résolution présentée par M. Philippe Marini, rapporteur, ainsi modifiée, et décide de fixer au lundi 20 juin 2011 à 12 heures le délai-limite de dépôt, par tout sénateur, d'amendements éventuels à ce texte, dont l'examen interviendra lors de la réunion de la commission du mercredi 22 juin 2011 à 9 heures 30.

Loi de finances rectificative pour 2011 - Examen du rapport

La commission procède ensuite à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur le projet de loi n° 612 (2010-2011), adopté par l'Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2011.

EXAMEN DU RAPPORT

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Ce projet de loi de finances rectificative traite de la fiscalité du patrimoine mais aussi de différents aspects budgétaires. C'est donc un collectif comme les autres.

Tout d'abord, quelques considérations sur la crise de la dette souveraine. L'actualité éclaire à nouveau de manière crue la situation de la Grèce. Les dépenses ont été supérieures aux prévisions en 2010. Les analyses de la Commission européenne mettent en évidence les problèmes de gouvernance propres à cet État (fraude fiscale et mauvaise collecte des impôts). Le nouveau plan de mesures annoncé le 3 juin comporte des projets de privatisations à hauteur de 50 milliards sur lesquelles il est impossible de se faire une opinion sérieuse. Il y a deux scenarii possibles : un rose et un noir. La dette grecque s'élève à 150 points de PIB. Dans le scénario rose, elle devra, dans un premier temps, se stabiliser en valeur absolue grâce à un solde budgétaire proche de l'équilibre, avant, dans un deuxième temps, de se réduire progressivement en points de PIB grâce à la croissance. Si les Etats de la zone euro continuent de lui prêter à un taux de l'ordre de 5 % aussi longtemps que nécessaire, il n'y a aucune raison qu'elle fasse défaut. C'est toute la logique du plan d'ajustement. Si nous craignons un défaut de la Grèce - ce qui correspond au scénario noir -, c'est parce que nous ne pouvons pas analyser rationnellement ce plan. La BCE estime que les conséquences psychologiques d'un défaut de ce pays seraient de nature à remettre en cause la solidité des banques. Même si les pertes de ces grands établissements financiers ne seraient pas de nature à remettre en cause leurs grands équilibres, un tel phénomène ferait fuir les investisseurs et les effets en seraient difficiles à prévoir. Les engagements des banques françaises sur les titres de dette publique représentent 11 milliards - et 17 milliards pour les banques allemandes. Si une fraction de ces créances devait être abandonnée, il ne se passerait de ce seul fait rien de grave pour ces banques, mais les appréciations portées sur les créances des autres pays pourraient devenir incontrôlables, et les banques risquent de cesser de se prêter entre elles, suscitant une crise analogue à celle de 2008-2009. Nous nous orientons probablement vers un scénario ni noir, ni rose : les États de la zone euro cherchent à gagner du temps pour atteindre 2013 et la mise en place du mécanisme européen de stabilité (MES). D'ici là, d'autres stress tests auront lieu. Lorsque le MES entrera en vigueur, il incorporera la possibilité de défaut d'un État puisque les créanciers pourront prendre leur décision à la majorité qualifiée.

J'en reviens à l'article 33 du projet de loi de finances rectificative, qui porte sur le Fonds européen de solidarité financière (FESF) : par amendement, l'Assemblée nationale a augmenté le plafond de la garantie de la France à ses émissions. Le Fonds ne peut bénéficier de la meilleure notation qu'à condition que ses prêts n'excèdent pas la garantie apportée par les seuls Etats bénéficiant du « triple A ». Cette réalité avait été négligée durant la première étape, de sorte qu'au lieu des 440 milliards prévus, la capacité de prêt du FESF n'aurait plus été que de 255 milliards, d'où la nécessité de relever les montants de garantie à l'article 33. A compter de la mi-2013, le MES devrait disposer d'une capacité de prêt de 500 milliards. Notre participation au capital, de 16,3 milliards, devra être versée en cinq ans, à un rythme susceptible d'être accéléré. Je tiens à faire remarquer que, même s'ils ne dégradent pas le solde public au sens de la comptabilité nationale, ces 16,3 milliards sont des dépenses budgétaires. Il faut donc être bien conscient que la solidarité européenne n'est pas une solidarité morale : elle dégrade nos finances publiques et sa mise en jeu va ralentir et compliquer la trajectoire de dette que nous nous sommes fixée. Je suis assez surpris que personne n'ait soulevé cette question dans le débat public. Pour l'instant, tout se passe comme si la solidarité était strictement morale.

M. Denis Badré. - C'est aussi le cas !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Nous devrons tirer les conséquences budgétaires de ces dépenses d'investissement. Or, pour l'instant, elles ne figurent pas dans la loi de programmation des finances publiques, ce qui est une grave lacune.

Mme Nicole Bricq. - Et en 2010 ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Non ! Je parle de 2013, avec la mise en place du Mécanisme européen de stabilité.

M. Jean Arthuis, président. - Le MES prendra le relais du FESF, qui est un engagement hors bilan. Nous avons d'ailleurs trop souvent tendance à négliger ces engagements hors bilan qui font pourtant partie intégrante de notre situation patrimoniale. Si nous n'aidons pas la Grèce, nous devrons secourir les banques, comme après la faillite de Lehman Brothers.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - C'est tout à fait exact, mais nous devrons intégrer les 16 milliards dans la programmation budgétaire, ce qui n'a pas été fait jusqu'à présent.

M. Aymeri de Montesquiou. - Sauf s'il n'y a pas accord des ministres des finances !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Je rappelle que nous devrons verser 16 milliards et garantir environ 125 milliards. La décision de mise en oeuvre de ce mécanisme sera prise, d'un commun accord, par le conseil des gouverneurs, c'est-à-dire les ministres des finances de la zone euro.

M. Jean-Claude Frécon. - Devrons-nous verser 16 milliards par an ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Non, sur cinq ans. En revanche, le conseil des gouverneurs pourra accélérer les versements et accroître la capacité de prêts. Le Gouvernement devra correctement informer le Parlement. Pourquoi s'intéresser à la refacturation du salaire d'un professeur d'université si nous ne sommes pas capables d'avoir une vision sur des engagements qui portent sur plusieurs milliards ?

J'en viens à la révision de l'équilibre budgétaire proposée dans ce collectif. Je note d'abord une petite diminution des recettes fiscales du budget général. Les recettes non fiscales attendues de la Caisse des dépôts vont se réduire de 262 millions - les membres de la commission de surveillance sont convaincus des chiffres de la Caisse.

Dans le projet de loi initial, les dépenses du budget général sont stabilisées : les ouvertures nettes sont gagées par des annulations à due concurrence. Certaines ouvertures sont légitimes, car non prévisibles. D'autres ouvertures de crédit renvoient à des sous-budgétisations, notamment par le ministère de la culture, mais aussi en ce qui concerne l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile et le fonds interministériel de prévention de la délinquance. Nous y reviendrons lors de l'examen des amendements. Pour les opérations extérieures (Opex), apparemment, tout va bien puisqu'aucune demande de crédits supplémentaires n'est indiquée. Heureuse constatation, quand notre pays intervient davantage dans plus d'opérations militaires, nous n'avons pas besoin d'augmenter les crédits.

Le Gouvernement relève les prévisions d'inflation de 1,5 % à 1,8 %. Dès lors que les enveloppes hors pensions sont stabilisées en valeur, cette remontée de l'inflation prévisionnelle, n'offre au Gouvernement aucune marge de manoeuvre supplémentaire.

Plusieurs mouvements importants affectent les comptes sociaux, mais ils sont globalement équilibrés. De même, le projet de loi de finances rectificative prévoit, Madame Bricq, une nouvelle tranche de prêt pour la Grèce pour un montant de 1,5 milliard, mais cette dépense est compensée par une amélioration de la situation d'autres comptes spéciaux.

Lorsque ce texte est arrivé à l'Assemblée nationale, son impact sur le solde budgétaire était négligeable : 10 millions. Mais le vote des députés a dégradé les recettes fiscales de 136 millions. En outre, l'État devra payer 460 millions dans la vieille affaire des frégates taïwanaises, qui vient de connaître son épilogue judiciaire. Cette dépense devra être gagée pour respecter la règle du « zéro valeur », ce qui n'a pas été fait dans le cadre de ce projet de loi de finances rectificative puisque la décision de justice a été rendue très récemment.

Nous aurons également à prendre en compte la prime de partage de la valeur ajoutée qui sera présentée dans le cadre d'un futur projet de loi de financement rectificative. Cette prime, certainement brillante, aura des conséquences en termes de prélèvements obligatoires puisqu'elle sera assujettie à la CSG et à la CRDS et qu'elle sera prise en compte pour le calcul de l'impôt sur le revenu. En revanche, elle sera déductible de l'impôt sur les sociétés. Il faut donc s'attendre à un surcroît de recettes pour la sécurité sociale de 375 millions d'euros et à une réduction du rendement de l'impôt sur les sociétés de 395 millions d'euros en 2011 et de 785 millions d'euros dès 2012. Le coût de cette initiative intéressante et imaginative sera donc de 20 millions d'euros en 2001 et de 305 millions dès 2012. A ce stade, je ne sais pas comment nous financerons les contreparties de cette prime.

La loi de programmation prévoit des mesures nouvelles pour améliorer les recettes : 11 milliards d'euros en 2011 et 3 milliards chaque année suivante. Les mesures déjà adoptées pour 2011 vont au-delà des 11 milliards prévus. Je note cependant une certaine dégradation en cours d'exercice. Je me suis demandé si ce projet de loi de finances rectificative et le projet de loi de financement rectificative respecteraient les normes constitutionnelles si, par miracle, la révision constitutionnelle était adoptée. Certes, ces deux lois rectificatives dégradent le solde pour 2011, mais elles permettent de demeurer au-dessus du seuil de 11 milliards d'euros de mesures nouvelles. Le Conseil constitutionnel n'y trouverait donc rien à redire.

J'en viens aux mesures qu'il faudra prendre à partir de 2012 pour respecter la trajectoire de solde. Même si la croissance s'établit à 2 % dès cette année, nous devrons faire des efforts supplémentaires pour accroître les recettes et diminuer les dépenses afin d'améliorer notre solde, à une hauteur que je continue d'évaluer entre 5 et 10 milliards d'euros, si l'on prend notamment en compte le fait que la réduction de la croissance des dépenses publiques en 2012 n'est pas encore pleinement documentée. Étant donnée la situation du premier trimestre de l'année, nous atteindrons sans doute les 2 % de croissance en 2011, ce qui nous permettra de respecter le plafond de déficit à 5,7 % du PIB.

J'en arrive à la réforme de la fiscalité du patrimoine. Je vous fais grâce de l'historique que vous connaissez tous. La fiscalité du patrimoine est complexe et pénalisante. L'ISF a de nombreux défauts et le bouclier fiscal encore plus. Le taux nominal de prélèvement sur l'épargne est de 31,3 %, mais des régimes spécifiques permettent de contourner ce taux apparent, si bien que les niches fiscales n'ont plus aucune cohérence - leurs contradictions autorisent à s'interroger sur l'efficacité de ces coûteuses mesures.

Le projet de loi de finances rectificative prévoit la suppression du bouclier fiscal à partir des restitutions dues au titre des impôts directs afférents aux revenus de l'année 2011, une auto liquidation obligatoire et le plafonnement de la taxe foncière pour tenir compte de la situation des redevables modestes propriétaires de leur logement. Cette dernière mesure n'aura pas d'incidence pour les finances locales car ce coût sera pris en charge par l'État. La suppression du bouclier devrait rapporter à l'État 300 millions d'euros en 2012, 420 en 2013 et 720 en 2014.

Réaménagé, l'ISF devient plus acceptable : la première tranche est supprimée, ce qui règle en grande partie la question de la résidence principale. La révision des taux correspond mieux au rendement des actifs financiers, les formalités déclaratives sont allégées pour les plus modestes et quelques rectifications permettent de mieux prendre en compte les pactes d'actionnaires et de donner des biens professionnels une définition plus adaptée à la réalité des PME.

Des recettes nouvelles devraient assurer l'équilibre de cette réforme : la fiscalité des donations et des successions est en effet réaménagée. Cette adaptation ne me paraît pas contredire la loi de 2007 qui avait exonéré les successions entre conjoints, ce qui est l'acquis principal de la loi Tepa. Il est donc prévu ici de relever de six à dix ans le délai de rappel des donations et de supprimer les réductions des droits de donation liées à l'âge du donateur. Enfin, les successions les plus importantes devront contribuer davantage. Tout cela est cohérent si l'on veut que cette réforme, qui va permettre à 300 000 foyers d'échapper à l'ISF, voie le jour.

Deux autres mesures permettront de la financer : une taxe sur les résidences en France des non-résidents, dont nous reparlerons, Monsieur Ferrand, et une exit tax, qui permet d'imposer les plus-values latentes lors du transfert par les contribuables de leur domicile hors de France. La réforme de la fiscalité du patrimoine va donc bénéficier à une partie des contribuables à l'ISF, mais se fera en défaveur des bénéficiaires actuels du bouclier fiscal. Les 176 millions d'euros que rapporterait la taxe sur les non-résidents semblent nécessaires à l'équilibre financier de la réforme.

Enfin, le projet de loi de finances rectificative prévoit de lutter contre l'évasion fiscale internationale. Mais il s'agit de recettes exceptionnelles, qu'on ne devrait mettre qu'en face de dépenses tout aussi exceptionnelles. A partir de 2013, ces recettes diminueront puis disparaîtront. En outre, elles auraient été acquises en tout état de cause, même si elles n'avaient pas été inscrites dans ce texte. Il s'agit donc d'un simple jeu d'écriture.

M. Jean Arthuis, président. - Oui, le compte n'y est pas.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Ou alors simplement de façon optique. Une part du chemin a été faite, mais il faudra aller plus loin. J'aurai quelques propositions à formuler en ce sens en espérant que l'on ne creusera pas d'autres trous pendant que j'en reboucherai...

L'Assemblée nationale a proposé à juste titre de doubler le taux du droit de partage, c'est-à-dire le droit à acquitter en cas de partage d'actifs ou en cas de vente de biens immobiliers par licitation. Cette mesure devrait rapporter 116 millions d'euros en 2011 et 253 millions à partir de 2012. Mais les députés ont instauré un abattement partiel de 20 % par année sur la valeur des donations effectuées avant l'entrée en vigueur du nouveau délai de rapport fiscal de dix ans. Nos collègues ont pourtant fait un bon travail puisque si la balance est défavorable pour 2011, pour la suite, les recettes seront plus élevées que les dépenses créées. Il faudrait toujours faire de la sorte. Les autres modifications prévues par les députés n'ont pas une portée financière très importante. A l'issue des délibérations des députés, l'équilibre a évolué et sera mieux assuré à partir de 2012.

Ce projet de loi de finances rectificative traduit donc de bonnes orientations, mais n'épuise pas, loin de là, le débat fiscal. Réjouissons-nous donc à l'avance des séquences suivantes que nous aurons sur l'imposition des très hauts revenus, sur la fiscalité de l'épargne qui devra être davantage tournée vers le financement de l'économie, sur l'assurance-vie.

M. Jean Arthuis, président. - Nous voici donc éclairés. Au-delà de votre présentation pédagogique, je tiens à vous rendre hommage, car vous avez travaillé dans des conditions difficiles. Je note que le montant des Opex est stable et qu'il n'est pas prévu de primes pour l'agriculture.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Il n'y a en effet ni dépenses, ni financements prévus pour les mesures annoncées. Il y a encore certains imprévus.

M. Jean Arthuis, président. - Les deux milliards d'euros remboursés par l'industrie automobile permettent de verser 1,5 milliard à la Grèce.

Mme Nicole Bricq. - Malgré ce qu'a dit le rapporteur général, on a bien débloqué des fonds pour la Grèce cette année.

M. Jean Arthuis, président. - J'ai une certaine nostalgie pour le triptyque cher à mon coeur.

M. Philippe Adnot. - Nous avions emprunté pour prêter 2 milliards à l'industrie automobile. Qu'elle nous rembourse ne nous donne pas des moyens supplémentaires.

M. Jean Arthuis, président. - Non, car nous gardons l'emprunt...

M. Philippe Marini, rapporteur général. - ... pour prêter à la Grèce.

M. Philippe Adnot. - C'est bien ce que je voulais dire !

Mme Nicole Bricq. - Dans les lois de finances et de financement rectificatives, il y a des recettes fiscales et sociales supplémentaires et un alourdissement des niches. Je me demande à quoi rime le débat constitutionnel : norme ou pas norme, on continue comme avant.

Pouvez-vous nous dire à combien s'élèvera le plafonnement de la taxe foncière pour les redevables les plus modestes imposables à l'ISF ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'État prendra en charge les 7 millions d'euros que coûtera cette mesure.

Mme Nicole Bricq. - En ce qui concerne l'évasion fiscale internationale, le projet de loi de finances rectificative prend-il en compte ce que l'État a récupéré au titre des établissements qui se trouvent dans des territoires non coopératifs ? Nous avions voté un amendement de transparence : le ministère devait fournir le détail de ce qui a été récupéré.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Je vérifierai ce point pour vous apporter une réponse précise, mais la question est excellente.

M. François Fortassin. - Je voudrais remercier notre rapporteur général pour la clarté de son exposé. La semaine dernière, j'ai interrogé le Gouvernement sur les incidences des prêts consentis à la Grèce, à l'Irlande et au Portugal alors que les autres membres de la zone euro vont supporter une charge qui ne sera sans doute pas remboursée de si tôt. A moins que ma structure mentale ne m'ait pas permis de saisir certains éléments, le Gouvernement m'a fait une réponse dilatoire. Quel sera l'impact sur nos finances publiques ?

Radical, donc partisan de l'impôt sur le revenu, je me félicite de la disparition du bouclier fiscal, mais fallait-il en même temps alléger l'ISF ? Quelles que soient ses raisons techniques, la mesure a une portée symbolique : nos concitoyens auront le sentiment qu'on favorise une fois de plus les plus aisés.

En Grèce, de nombreux observateurs, y compris à l'ambassade de France, estiment que l'évasion fiscale représente 80 % du potentiel fiscal. Ne pourrait-on demander à ce pays de se pencher sérieusement sur ce problème ?

M. Jean Arthuis, président. - C'est fait ! Il est vrai qu'on ne peut accepter un double langage.

M. André Ferrand. - L'article 17 prévoit de taxer les résidences françaises des non-résidents et donc les Français vivant à l'étranger. Monsieur le rapporteur général évoquait un débat : je confirme l'émotion des Français de l'étranger, qui s'estiment injustement traités. Pourquoi une deuxième taxe foncière alors qu'ils participent déjà financièrement à la vie de la cité ? Les sénateurs des Français de l'étranger vont déposer un amendement de suppression de l'article 17 : je demande le soutien de notre commission.

M. François Marc. - Pour l'hébergement d'urgence, nous avions affirmé que les crédits prévus étaient insuffisants. C'était bien le cas puisqu'il va falloir rajouter 50 millions. Pour le projet de la Philharmonie de Paris, je ne saurais me prononcer, ne connaissant pas le dossier. Ce qui est sûr, c'est que la partition a mal été exécutée et qu'il faudrait que la budgétisation initiale soit plus proche de la réalité. L'intégration d'études d'impact nous permettrait de mieux évaluer le budget.

La réforme de l'ISF est qualifiée d'ambitieuse et d'équilibrée. Équilibrée ? Notre rapporteur général se pose quelques questions... Ambitieuse ? Certainement pas ! Il s'agit surtout d'un correctif budgétaire à visée électoraliste.

Enfin, il serait utile d'être mieux informé sur la situation de la Grèce, car les rumeurs sont inquiétantes.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. - Le projet de loi de finances rectificative prévoit une indemnisation des victimes du Mediator. Si elles doivent bénéficier d'une réparation pour les préjudices subis, est-il raisonnable de prévoir 5 millions dans le programme 183 ? Les coûts de ce dossier ne sont pas encore quantifiés et les 5 millions ne suffiront sans doute pas. En outre, ne s'agit-il pas ici de modifier le code de la santé publique, ce qui n'a rien à voir avec ce projet de loi de finances rectificative ? Je me tourne vers le rapporteur général.

M. Pierre Jarlier. - Je note avec satisfaction la suppression du bouclier fiscal, même s'il est dommage de le faire aussi tard. Je me félicite aussi de la remontée du plafond de l'ISF, qui permet de régler le problème des propriétaires dont le revenu est modeste - je pense aux zones frontalières comme aux régions côtières. Pour que la réforme soit plus équilibrée et plus lisible, il aurait fallu instaurer une nouvelle tranche d'impôt sur le revenu sur les contribuables les plus fortunés. Enfin, les chèques du bouclier vont-ils continuer à être versés cette année ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Non, il n'y aura plus de chèques, mais une auto liquidation ; une tranche supplémentaire de l'impôt sur le revenu est hors champ du projet de loi de finances rectificative. Madame Des Esgaulx, les 5 millions d'euros pour le Mediator ne suffiront peut-être pas, et selon les hypothèses que l'on retient, 100 millions pourraient être nécessaires à terme. La commission des affaires sociales s'est saisie pour avis de ce projet de loi de finances rectificative : nous l'écouterons avec respect. De fait, certains découpages sont surprenants : ainsi, le Mediator se trouve dans ce collectif alors que la prime de partage de la valeur ajoutée sera dans le projet de loi de financement rectificative alors que ses conséquences sont plus fiscales que sociales. Comment voulez-vous que nous y retrouvions nos petits ?

M. Jean Arthuis, président. - Vous mettez le doigt sur la grande faiblesse de la révision constitutionnelle.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Monsieur Marc, chaque article du projet de loi de finances rectificative comporte une évaluation préalable. En revanche, vous avez raison sur la question de la sous-budgétisation. Je vous proposerai des suppressions indicatives de crédits pour souligner des prévisions insuffisantes.

S'agissant de nos amis établis hors de France, nous examinerons les amendements qui nous serons soumis en séance. Nous réagirons alors avec l'aide du Gouvernement.

M. Fortassin nous a posé une excellente question sur l'incidence budgétaire et financière des prêts à la Grèce. Nous avons versé 4,4 milliards en 2010 et déjà 4,5 milliards en 2011. Notre déficit budgétaire et donc notre dette augmentent. Mais tant que la Grèce nous verse un taux d'intérêt à 5 %, l'opération est positive puisque nous avons emprunté à 2 %. En revanche, nous ne sommes pas sûrs que la Grèce soit un excellent débiteur. En termes maastrichtiens, en ce qui concerne le solde public, cette opération est neutre, pour l'instant.

EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR GÉNÉRAL

Article 4 bis

M. Jean Arthuis, président. - Cet article a vocation à inciter à une révélation plus précoce des dons manuels et à permettre l'évaluation de leur valeur au jour de leur déclaration.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Cet article a été introduit à l'initiative de l'Assemblée nationale. Je propose, dans mon amendement n° 1, d'instaurer un seuil de déclenchement de cette obligation déclarative supplémentaire, fixé à 30 000 euros.

M. Jean Arthuis, président. - N'est-ce pas trop élevé ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Sans doute faut-il le réduire à 15 000 euros, mais on ne peut prévoir une telle obligation dès le premier euro. Les obligations déclaratives actuelles continueraient de s'appliquer pour les dons inférieurs ou égaux à ce seuil.

L'amendement n° 1 ainsi rectifié est adopté.

Article 4 quater

M. Jean Arthuis, président. - Cet article modifie la territorialité du prélèvement exigible sur les sommes versées au décès au titre d'un contrat d'assurance-vie et aménage les modalités de taxation au titre du prélèvement des contrats d'assurance-vie comportant une clause bénéficiaire démembrée.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement n° 2 propose d'améliorer la cohérence entre le barème des droits de succession tel qu'il résulte de ce collectif et le régime fiscal du prélèvement acquitté par le bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie au décès du souscripteur.

Afin de tirer les conséquences du relèvement de cinq points du taux des deux dernières tranches du barème d'imposition, soit 902 838 euros et 1,8 million d'euros, je propose de relever de cinq points également le taux de prélèvement sur l'assurance-vie au décès du souscripteur pour le porter à 25 %.

Cette disposition a été votée par la commission des finances de l'Assemblée nationale, mais repoussée en séance. Nous voulons lui témoigner notre solidarité. On nous dit que le rendement de cette mesure serait faible, de l'ordre de 5 à 8 millions d'euros. Mais est-ce exact ?

M. Jean Arthuis, président. - C'est toujours ça de pris et ce serait logique.

Mme Nicole Bricq. - Je ne suis pas défavorable à cet amendement, d'autant que le modèle économique de l'assurance-vie ne profite pas à l'économie. On nous dit cependant qu'elle est en perte de vitesse ces derniers temps.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - La Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) répète qu'il ne faut surtout pas toucher à quoi que ce soit.

Mme Nicole Bricq. - J'aimerais déjà que ces sociétés remplissent leurs obligations.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Les fluctuations de la collecte des cotisations ne sont pas d'une ampleur telle qu'elles remettent en cause le bien-fondé de notre amendement.

M. Jean-Pierre Fourcade. - A moins qu'elles achètent des actions françaises !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Ce qui n'est pas certain.

L'amendement n° 2 est adopté.

Article 4 quinquies

M. Jean Arthuis, président. - L'article tend à supprimer les commissions chargées de donner un avis sur la valeur des oeuvres d'art en cas de dation.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - C'est l'administration qui devrait alors faire les évaluations : est-elle compétente pour cela ? Ne faut-il pas maintenir ces commissions ?

M. Yann Gaillard. - Bien sûr.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - C'est l'objet de l'amendement n° 3.

L'amendement de suppression n° 3 est adopté.

Article 4 sexies

M. Jean Arthuis, président. - L'article prolonge le délai de transformation des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) en organismes de placement collectif immobilier (OPCI) en franchise d'impôt.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - La loi de finances rectificative pour 2005 avait fixé comme date limite le 18 avril 2012 pour une transformation en franchise d'impôt. Les professionnels veulent repousser cette échéance. Mais rien ne progressera d'ici là ! Je suis partisan d'assumer ce qui a été voté en 2005 au nom d'une meilleure sécurité. Tel est l'objet de mon amendement n° 4.

L'amendement de suppression n° 4 est adopté.

Article 5 bis

M. Jean Arthuis, président. - L'article 5 bis exclut le logement social outre-mer du « rabot » du plafonnement des niches fiscales spécifique à l'outre-mer.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Restons-en à ce que nous avons voté en loi de finances initiale. Une loi de finances rectificative ne doit pas être l'occasion pour ceux qu'une mesure fiscale a mécontentés de remettre le sujet sur le tapis ! Pourquoi compliquer encore un dispositif fiscal dérogatoire ?

L'amendement de suppression n° 5 est adopté.

Article 6

M. Jean Arthuis, président. - Il s'agit des trusts.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement n° 6 est-il d'appel ? Je ne sais pas encore. Il sera au moins un support de discussion avec le Gouvernement sur la reconnaissance, dans notre droit fiscal, de dispositions inspirées de droits étrangers. Les trusts sont utilisés par des sujets fiscaux français pour déléguer la détention de leurs biens, qui échappent ainsi à l'ISF. Le Gouvernement nous présente des dispositions complexes, qui ratissent large, créant des obligations aussi bien pour les constituants que pour les bénéficiaires. Parmi celles-ci figure la création d'un nouveau prélèvement, spécifique aux trusts, dont l'assiette est l'ensemble des droits et biens logés dans de telles structures. Le système est sévère, parce qu'il s'applique à des biens qui auraient eu vocation à être déclarés à l'ISF. Mais si le taux est le même dans les deux cas, 0,5%, où est l'incitation à déclarer à l'ISF ? Si le but est réellement de lutter contre les montages d'optimisation fiscale, il faut fixer un taux plus élevé, 0,7 % par exemple, ce qui correspond à une majoration de 40% - le même qu'en cas de dissimulation à l'ISF.

Mme Nicole Bricq. - Je vous soutiens dans votre volonté d'en savoir plus sur ces montages opaques, véritable trou noir de la fiscalité française. Voyez le rapport établi par l'inspection générale des finances à l'occasion de l'affaire Bettencourt. Les raisons de recourir à un trust sont claires.

L'amendement n° 6 est adopté.

Article 7

M. Jean Arthuis, président. - L'article crée une contribution exceptionnelle des groupes pétroliers.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement n° 7 a pour but d'engager la discussion avec le Gouvernement. Faut-il maintenir la provision pour hausse des prix pour les sociétés pétrolières ? Une ressource exceptionnelle est-elle la plus adaptée pour financer une revalorisation, pérenne, du barème kilométrique ?

M. Jean Arthuis, président. - Il serait intéressant de demander à M. de Margerie comment il gère cela. Que Total ne paye pas d'impôt en France est un scandale. Etre éclairé sur cette optimisation fiscale serait utile, à la veille d'une campagne électorale où il sera sans doute beaucoup question des montages fiscaux...

L'amendement n° 7 est adopté.

Article 7 bis

M. Jean Arthuis, président. - L'article abroge la taxe sur l'achat de services de publicité en ligne.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Par l'amendement de suppression n° 8, nous rétablissons virtuellement la taxe virtuelle sur la publicité en ligne... Lors de notre table ronde, la direction de la législation fiscale nous a dit qu'elle disposera des premiers éléments en avril 2012 : il n'y a donc pas urgence !

M. Jean Arthuis, président. - Est-ce un amendement d'appel ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Nullement ! Nous souhaitons qu'au second semestre, on nous présente mieux qu'une suppression sans contrepartie, qui laisserait penser que sur internet tout est gratuit. Certes, la taxe est stupide ; elle a tout de même l'avantage d'exister en droit, même si concrètement elle n'est que virtuelle. Ne la lâchons pas avant d'obtenir une alternative ! Nous avons réussi à susciter un début de discussion avec le Conseil de l'économie numérique. Jusqu'à présent personne n'a cherché la bonne formule. L'administration traîne des pieds !

M. Jean Arthuis, président. - Les pouvoirs publics devraient négocier avec Google pour que celui-ci accepte de payer l'impôt sur les sociétés. La société réalise 11 milliards de dollars de chiffre d'affaires dans la zone Europe-Moyen-Orient et déclare 4,5 milliards aux Bermudes...

Mme Nicole Bricq. - Qui transitent par l'Irlande !

M. Jean Arthuis, président. - Ce n'est pas pour profiter d'un taux d'imposition sur les bénéfices plus faible, puisque les bénéfices sont logés aux Bermudes et non en Irlande... Les 4,5 milliards transitent aussi par les Pays-Bas pour d'autres avantages. Et nous n'en sommes qu'au début du début de l'optimisation... Nous nous ferons rouler dans la farine par les opérateurs si nous ne réagissons pas.

Quand l'un d'eux fait environ 500 millions d'euros de chiffre d'affaires dans notre pays, il est logique qu'il y acquitte de l'impôt sur les bénéfices. La taxe est stupide, car dans un système de B2B, il est aisé de déplacer un annonceur d'un pays à l'autre... Votre premier objectif a bien été atteint, Monsieur le rapporteur général. C'est le bazar !

M. Jean-Pierre Fourcade. - Qui a suggéré la suppression de la taxe ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Notre collègue députée Laure de La Raudière.

Mme Nicole Bricq. - La taxe est tout de même une arme de dissuasion ! Elle a créé l'émotion.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Elle a réussi à créer le débat au sein du Conseil national du numérique, lequel a une approche plutôt positive.

L'amendement de suppression n° 8 est adopté.

Article 10 et état B annexé

M. Jean Arthuis, président. - L'article procède, au titre du budget général, à des ouvertures et annulations de crédits de paiement et d'autorisations d'engagement conformément à la répartition fixée à l'état B.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement n° 9 propose une réduction indicative de crédits pour marquer notre mécontentement à propos des conditions de gestion du projet de grand auditorium de la Philharmonie de Paris.

M. Yann Gaillard. - Le projet est certes mal géré, mais nous avons besoin d'un grand auditorium qui nous place à l'égal des autres grandes capitales. Il est vrai que le ministre s'est défendu sans beaucoup d'arguments techniques...

M. Jean Arthuis, président. - Il a dit qu'il ne recommencerait pas...

M. Yann Gaillard. - Mais qu'il continuerait !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Si nous entérinons cela, nous ne jouons pas notre rôle. L'amendement est pédagogique.

M. Yann Gaillard. - Une réduction indicative de crédits ne fait pas de mal.

L'amendement n° 9 est adopté.

M. Jean Arthuis, président. - L'amendement n° 10, relatif à la suppression de la majoration des crédits prévus pour l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile, est-il un prolongement du rapport de Pierre Bernard-Reymond et Philippe Dallier sur le même sujet ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Oui, et il tend à une réduction indicative des crédits correspondants du ministère.

Mme Nicole Bricq. - Je voterai contre l'amendement. Je le demande à la décharge du Gouvernement : qui pouvait prévoir ce qui s'est passé en Tunisie, en Libye, et partout ailleurs ?

M. Jean Arthuis, président. - La sous-évaluation est récurrente.

Mme Nicole Bricq. - Mais un tel afflux de réfugiés est inhabituel.

M. Pierre Bernard-Reymond. - C'est une pratique récurrente depuis au moins trois budgets : l'an dernier, la sous-évaluation a représenté un quart du budget, cette année il faut ajouter 50 millions d'euros. Soyons plus insistants !

Mme Nicole Bricq. - Maintiendrez-vous votre amendement en séance ?

L'amendement n° 10 est adopté.

Article 14 quater

M. Jean Arthuis, président. - L'article propose de lisser l'augmentation de la redevance sur les bureaux perçue en Ile-de-France, et de procéder à divers aménagements.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Une réforme de la redevance sur les bureaux en Ile-de-France a été votée dans la loi de finances rectificative de décembre 2010. On nous présente quelques mois après un dispositif dans le dispositif, au profit des communes qui perdent la dotation de solidarité urbaine (DSU) ou l'accès au fonds de solidarité de la région Ile-de-France (FSRIF). L'accès aux dotations est par nature fluctuant. Ajouter ce mécanisme de garantie rend l'ensemble moins lisible pour les entreprises. Gardons-nous de faire une chose, puis son contraire pour atténuer les conséquences ! Mon amendement n° 11 tend à supprimer ce système complexe.

Mme Nicole Bricq. - Le rapporteur général de l'Assemblée nationale a voulu traiter le cas des communes - elles sont tout de même cinquante-quatre - qui perdent le bénéfice des deux dotations. Et vous supprimez cela !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Je supprime l'accessoire et conserve le principal.

Mme Nicole Bricq. - Le zonage de la redevance favorise les communes de l'ouest et défavorise celles de l'est, pourtant moins riches. Le dispositif comporte un double effet pervers et votre amendement ne résout rien.

M. Jean-Pierre Fourcade. - Ne répondons pas à ces allégations.

Mme Nicole Bricq. - Ce ne sont pas des allégations, c'est un constat.

M. Jean-Pierre Fourcade. - Le Comité des finances locales (CFL) prévoit toujours une sortie en sifflet, sur trois ans, des mécanismes de péréquation. Je ne suis pas partisan de cet amendement.

Mme Nicole Bricq. - Mais cinquante-quatre communes en difficulté, ce n'est pas rien !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Pourquoi revenir sur ce que nous avons fait ?

Mme Nicole Bricq. - Parce que nous n'en avons pas mesuré les conséquences !

L'amendement n° 11 est retiré.

Article 14 quinquies

M. Jean Arthuis, président. - L'article supprime l'affectation du tiers du produit de la TGAP « granulats » aux communes.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Avec mon amendement n° 12, il s'agit d'en rester au dispositif dans sa version adoptée en décembre dernier.

L'amendement de suppression n° 12 est adopté.

Article 15

M. Jean Arthuis, président. - L'article aménage la définition des biens professionnels dans le régime de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Nous revenons avec l'amendement n° 13 sur un élargissement de l'exonération d'ISF au titre des biens professionnels. La notion de directeur général délégué n'est pas suffisamment caractérisée en droit, certains directeurs généraux sont mandataires sociaux, d'autres non, et l'on pourrait voir fleurir les directeurs généraux délégués de pure opportunité fiscale... Il est préférable d'en rester au droit actuel, ce que propose cet amendement.

L'amendement n° 13 est adopté.

Article 17

M. Jean Arthuis, président. - L'article institue une taxe sur les résidences secondaires des non-résidents.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Je sollicite la réserve sur cet article.

Le vote sur l'article 17 est réservé.

Article 17 bis

M. Jean Arthuis, président. - L'article modifie les dispositifs d'imposition des prestations de retraite versées sous forme de capital.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'imposition des retraites en capital n'en finit pas de résonner dans les vallées alpines. Nous avons voté en loi de finances initiale la taxation des prestations supplémentaires de retraite, versées en capital, de source étrangère ou française. Sont par là-même soumis à la fiscalité les versements effectués par des régimes de retraite suisses aux frontaliers français qui ont travaillé dans la Confédération.

Ces avantages échappaient jusqu'à présent à toute imposition au titre des revenus. Nous avons prévu, en loi de finances initiale, un étalement de la charge fiscale sur quinze ans. Il est ici proposé de supprimer le prélèvement libératoire de 7,5 %. Car nous avons dans la même loi voté un prélèvement de 14 % sur certaines retraites supplémentaires versées par les entreprises. Il faut le rappeler !

Mme Nicole Bricq. - Il semble qu'environ 90 000 Français soient concernés.

M. Pierre Bernard-Reymond. - Tous n'ont pas des revenus élevés.

Mme Nicole Bricq. - Bien au contraire.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Pas moins que les bénéficiaires de prestations de retraite supplémentaire versées en France !

Mme Nicole Bricq. - Qu'en dit le Gouvernement ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Mon amendement de suppression n° 14 vise à appeler l'attention sur cette disparité. Fallait-il la taire ?

M. Adrien Gouteyron. - Non.

M. Jean Arthuis, président. - Mais l'amendement n'est pas indispensable, il suffit d'une prise de parole ferme sur l'article.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Je peux le retirer. Sans doute le taux du prélèvement libératoire choisi initialement, 14 %, est-il trop élevé.

M. Jean Arthuis, président. - Nous pourrions le fixer à 7,5 % pour tout le monde.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Cela ne serait pas très vertueux sur le plan budgétaire. Peut-être pourrions-nous réserver l'article 17 bis ?

L'amendement n° 14 est retiré.

Le vote sur l'article 17 bis est réservé.

Article 17 ter

M. Jean Arthuis, président. - L'article supprime la condition relative au nombre de salariés que doivent respecter les entreprises permettant à leurs investisseurs de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu ou d'impôt de solidarité sur la fortune.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Avec l'amendement n° 15, refusons de revenir sur une mesure dont nous avons amplement discuté en loi de finances initiale. Les entreprises dans lesquelles il est possible d'investir en bénéficiant d'une réduction d'impôt doivent compter au moins deux salariés.

L'amendement de suppression n°15 est adopté.

Article 17 quater

M. Jean Arthuis, président. - L'article crée un dispositif de réduction d'impôt sur le revenu en faveur des fonds d'investissement de proximité en outre-mer.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement n° 16 tend à supprimer une niche fiscale.

L'amendement de suppression n°16 est adopté.

Article 17 quinquies

M. Jean Arthuis, président. - L'article supprime la subordination au plafond communautaire d'investissements bénéficiant d'aides d'Etat pour les souscriptions au capital d'entreprises solidaires actives en matière de logement social.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement de suppression n° 17 tend à repousser une demande catégorielle qui s'apparente à une niche... et dont la compatibilité avec les lignes directrices de Bruxelles sur les aides d'Etat est loin d'être assurée !

M. Jean Arthuis, président. - Il s'agit pourtant d'une belle cause.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Il n'est pas prouvé que le plafond communautaire de 2,5 milliards d'euros soit saturé ; il est parfaitement possible de segmenter les appels de fonds.

M. Jean Arthuis, président. - La disparition de l'ISF règlerait le problème...

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Ce serait possible, dans un monde meilleur.

M. Jean Arthuis, président. - Je reconnais que votre amendement est orthodoxe.

L'amendement de suppression n° 17 est adopté.

Article 18

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'article 18 prévoit l'imposition des plus-values latentes lors du transfert par les contribuables de leur domicile fiscal hors de France. Mais les parts d'OPVCM sont exclues de l'assiette de l'exit tax. Pourquoi ? Ou bien l'on retient une approche globale et tout le patrimoine transféré est pris en compte, ou bien le dispositif s'applique exclusivement aux biens professionnels. Mais il faut être clair. Tel est le sens de mon amendement n° 18.

M. Jean Arthuis, président. - Il est excellent.

L'amendement n°18 est adopté, ainsi que l'amendement de précision n° 19.

Articles additionnels après l'article 18

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Environ 220 collectivités ont voté sur les taux des impositions locales après le 30 avril. L'amendement n° 20 en tient compte.

L'amendement n° 20 est adopté.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement n° 21 élimine une scorie de la réforme relative à la taxe professionnelle.

Mme Nicole Bricq. - Encore une !

M. François Marc. - Une de plus !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Oui et il y en aura encore à supprimer ! Il faudra dix ans. On a oublié le cas des communes isolées qui ont rejoint un EPCI à fiscalité professionnelle unique au 1er janvier 2011 ainsi que la transformation d'un EPCI à fiscalité additionnelle en EPCI à fiscalité professionnelle unique. La transformation d'une communauté de communes en communauté d'agglomération tombe sous ce registre.

La commune bénéficie deux fois des compensations de la réforme de la taxe professionnelle - à travers l'attribution de compensation et en conservant le bénéfice du fonds national de garantie individuelle de ressources (FNGIR) et la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP). L'amendement n°21 résout ce problème au nom de la cohérence.

L'amendement n° 21 est adopté.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Même chose pour l'amendement n° 22.

M. François Marc. - Les sénatoriales approchent...

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Tant mieux si elles ont pour effet de sensibiliser chacun aux préoccupations des conseils municipaux. Il y a trois ans, vous auriez pu y être sensible.

M. François Marc. - Je suis sensible à la réforme manquée de la taxe professionnelle.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Le Sénat l'a améliorée.

M. François Marc. - Cela aurait été pire sans lui, je le reconnais.

Mme Nicole Bricq. - Le ministre l'a dit hier !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - La compensation des pertes de recettes résultant de la suppression de la taxe professionnelle a été prévue pour les communes, mais non pour les syndicats de communes - qui ne sont pas des EPCI à fiscalité propre. Il en a résulté une rupture d'égalité entre les syndicats à contribution budgétaire et ceux à contribution fiscalisée, qui subissent aujourd'hui des distorsions fiscales et doivent financer leurs besoins sur une base fiscale fortement réduite. La charge pour les petites entreprises, les artisans, augmente.

M. Jean Arthuis, président. - Si les entreprises paient plus que prévu, la collectivité reçoit plus que prévu.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Non... Les entreprises pénalisées sont celles qui ont peu d'équipements et de biens mobiliers, certains artisans, certaines PME, du commerce rural.

M. Adrien Gouteyron. - Quelles sont les entreprises concernées, plus exactement ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Les « Bricomarchés », les artisans, les professionnels qui ont des surfaces de vente importantes et peu d'équipements, en particulier le commerce rural profond.

Mme Nicole Bricq. - Ce n'est pas la ruralité profonde.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Il faudra affiner la rédaction de cet amendement - nous en discutons avec le Gouvernement.

L'amendement n° 22 est adopté.

Article 18 ter

M. Jean Arthuis, président. - L'article concerne le contrôle de l'achat au détail de métaux.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Si l'article 18 ter prévoit des mesures si urgentes, pourquoi attendre juillet 2012 pour les mettre en oeuvre ? L'amendement n° 23 tend à prévoir la date du 1er janvier prochain.

L'amendement n° 23 est adopté.

Article 24

M. Jean Arthuis, président. - L'article crée un fonds finançant des prestations d'accompagnement social de certaines personnes attributaires de logements sociaux ou adaptés.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Je demande la réserve de l'article 24, faute d'une étude suffisante.

Le vote sur l'article 24 est réservé.

Article 28

M. Jean Arthuis, président. - L'article prévoit la saisine individuelle de la Cour des comptes pour un député ou un sénateur.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Je crains qu'une saisine individuelle de la Cour des comptes par chaque député et chaque sénateur - deux demandes par an pour chacun - soit illusoire. La Cour enverra des réponses formelles, tout cela n'est pas raisonnable. L'amendement n° 24 tend à supprimer cette disposition.

L'amendement n° 24 est adopté.

Article 29

M. Jean Arthuis, président. - L'article instaure un recrutement complémentaire sur concours de conseillers de chambre régionale des comptes (CRC).

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement n° 25 tend à réduire la période pendant laquelle est prolongée la procédure dérogatoire de recrutement de magistrats des chambres régionales des comptes. En effet, on n'en a pas évalué toutes les conséquences et la prolonger si longtemps ne serait pas raisonnable. La réforme du code des juridictions financières n'a toujours pas été examinée.

M. Jean Arthuis, président. - On ne saurait la mener par bribes.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Nous ne souhaitons pas tout rejeter, d'autant que les comptes de nos collectivités sont contrôlés par les chambres régionales. Ne laissons pas penser que nous serions assez contents de supprimer la procédure de recrutement.

M. Jean Arthuis, président. - A quand la certification annuelle des comptes ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Autorisons la prorogation de la procédure pendant un an.

L'amendement n° 25 est adopté.

Article 33

M. Jean Arthuis, président. - L'article tend à augmenter l'autorisation de garantie de la France en ce qui concerne les financements obtenus par le Fonds européen de stabilité financière (FESF).

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'article doit être précis et il est nécessaire de faire référence à la date avant laquelle doit intervenir la modification de l'accord-cadre du 7 juin 2010, soit la réunion du Conseil européen le 24 juin 2011. Tel est l'objet de mon amendement n° 26. Si le Conseil échoue, s'il n'y a pas de texte, sans cet amendement notre autorisation de garantie vaudrait tout de même, intemporelle. L'autorisation doit être limitée à ce qui sera décidé lors de la prochaine réunion européenne. Il faudra refaire le point avec le Gouvernement en séance publique.

L'amendement n° 26 est adopté.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'amendement n° 27 supprime un anglicisme en remplaçant « facilité » par « fonds ».

L'amendement n° 27 est adopté.

Article 36

M. Jean Arthuis, président. - L'article instaure un plafond des autorisations d'emplois des autorités publiques indépendantes.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Comment répartir un plafond global entre les diverses autorités ? La rédaction n'est pas aboutie. Elle me fait penser au projet qui avait été imaginé à une époque : des négociations entre les jeunes qui sortaient de l'ENA et les administrations susceptibles de les accueillir... Mon amendement n° 28 corrige cela.

M. Jean-Pierre Fourcade. - L'article 36 suscite une grande émotion. Nous recevons prochainement les dirigeants de l'AMF. Nous les interrogerons à ce sujet.

Mme Nicole Bricq. - Je ne comprends pas la logique de l'amendement : les plafonds d'emplois ont sous votre impulsion, Monsieur Marini, été étendus aux opérateurs.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Les autorités publiques indépendantes (API) ne sont pas des opérateurs.

Mme Nicole Bricq. - On en crée beaucoup et vous étiez défavorable à cette « agenciarisation ». Je ne comprends pas que vous proposiez cela !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Les opérateurs sont des démembrements de l'Etat et celui-ci a la maîtrise de leurs moyens. Les API sont indépendantes de l'exécutif et des administrations ! Imagine-t-on dire à l'AMF combien de personnes elle doit recruter ? Lui imposer une grille approuvée par le ministère des finances ?

Mme Nicole Bricq. - On peut être indépendant tout en bénéficiant des moyens ministériels.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - L'AMF reçoit des financements parafiscaux, avec un plafond approuvé par la loi, afin de préserver ses moyens.

L'amendement n° 28 est adopté.

A l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat d'adopter l'ensemble des articles du projet de loi de finances rectificative pour 2011 ainsi modifiés, à l'exception des articles 17, 17 bis et 24, sur lesquels sa position est réservée jusqu'à la réunion d'examen des amendements extérieurs.

Conventions fiscales - Examen des rapports

La commission procède enfin à l'examen des rapports de M. Adrien Gouteyron, rapporteur, sur les projets de loi :

- n° 375 (2009-2010) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'île de Man en vue d'éviter la double imposition des entreprises exploitant, en trafic international, des navires ou des aéronefs ;

- n° 450 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales ;

- n° 516 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement d'Anguilla relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

- n° 359 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas, au titre des Antilles néerlandaises, relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

- n° 514 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Belize relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

- n° 513 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Sa majesté le Sultan et Yang Di-Pertuan de Brunei Darussalam relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

- n° 360 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des îles Cook relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

- n° 511 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Costa Rica relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

- n° 515 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Commonwealth de la Dominique relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

- n° 512 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Libéria relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur. - La commission des finances a examiné, ces deux dernières années, trente-cinq projets de loi visant à ratifier, soit des conventions relatives à la suppression des doubles impositions, soit des accords d'échange de renseignements en matière fiscale.

Nous examinons aujourd'hui dix accords supplémentaires :

- deux conventions fiscales de suppression des doubles impositions, signées respectivement avec l'île de Man et Hong Kong ;

- huit accords d'échange de renseignements signés avec Anguilla, les Antilles néerlandaises, Belize, Brunei, le Costa Rica, la Dominique, les îles Cook et le Libéria.

Vous me permettrez ensuite de faire un point sur l'état d'avancement de la politique de lutte contre les paradis fiscaux, tant sur le plan multilatéral que français.

Je fais ici référence :

- d'une part, à la mise à jour des listes, celle de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) mais aussi celle de la France ;

- et, d'autre part, aux conséquences qui s'attachent à ces listes, c'est-à-dire l'application automatique des sanctions fiscales françaises aux Etats qui demeurent inscrits sur notre liste et l'examen par les Pairs du Forum mondial de l'OCDE, qui s'est tenu aux Bermudes le 31 mai dernier.

S'agissant des accords de suppression des doubles impositions, celui conclu avec l'île de Man, signé le 26 mars 2009, a pour objet unique d'éviter la double imposition en matière de navigation maritime et aérienne.

Il prévoit, en effet, que les bénéfices qu'une entreprise tire du trafic maritime ou aérien international ne seront imposables que dans le pays où se trouve le siège de direction effective de celle-ci.

Cet accord technique doit, cependant, être conçu comme complétant le lien conventionnel déjà approuvé, en matière d'échange de renseignements, l'an dernier. Les deux conventions sont intrinsèquement liées car l'entrée en vigueur et la pérennité du présent accord sont subordonnées à celles de l'accord d'échange de renseignements.

Quant à l'accord fiscal conclu avec Hong Kong, je tiens à souligner qu'il est l'aboutissement d'un long processus de négociations. Celui-ci a débuté en 2003. Il a tout d'abord permis de négocier les dispositifs anti-abus prévus par la législation française.

La convention n'a pu, toutefois, être paraphée, principalement en raison de l'impossibilité pour Hong Kong de transmettre toutes les informations bancaires utiles ainsi que le prévoit le modèle de l'OCDE.

Cet obstacle à l'échange a été levé en 2009, à la suite de la dynamique initiée par les travaux du sommet du G 20. La législation hongkongaise a été modifiée en conséquence, en janvier 2010. Ces modifications sont entrées en vigueur en mars de l'année dernière. La convention a pu finalement être signée, le 21 octobre 2010.

Cet accord, vous n'en serez pas étonnés, est largement inspiré du modèle de convention fiscale de l'OCDE de 2008.

Il prévoit ainsi une répartition du droit d'imposition entre l'Etat, source des revenus, et celui de la résidence du bénéficiaire, en fonction des revenus.

En l'absence d'un droit exclusif de taxer un revenu, la double imposition qui en résulte est éliminée conformément à la pratique conventionnelle française du crédit d'impôt.

A titre d'illustration, s'agissant des personnes physiques, un résident français imputera, sur l'impôt français, un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt hongkongais qu'il a payé, dans la limite du montant de l'impôt français.

Nous pouvons également nous féliciter d'un certain nombre de dérogations au modèle OCDE intégrées à l'accord à la demande de la France. En effet, non seulement l'accord tend à éliminer les doubles impositions, facteur de développement pour l'investissement de nos sociétés à Hong Kong, mais il vise également à supprimer les situations de double exonération grâce, notamment, à la taxation des bénéficiaires effectifs, et à la reconnaissance des dispositifs anti-abus de notre droit interne...

Enfin, l'accord contient un article permettant un échange de renseignements dans des conditions conformes aux standards les plus récents de l'OCDE, ce qui nous conduit à aborder les huit accords dont l'objet exclusif est cet échange.

Ces huit accords ont été conclus, je le rappelle, avec Anguilla, les Antilles néerlandaises, Belize, Brunei, le Costa Rica, la Dominique, les îles Cook et le Libéria. Ils offrent la possibilité à la France de demander aux autorités de ces Etats et territoires toute information utile à la bonne application de sa loi fiscale interne.

Pourront être sollicités tous renseignements vraisemblablement pertinents pour la détermination, l'établissement et la perception des impôts visés dans l'accord, pour le recouvrement et l'exécution des créances fiscales, ou pour les enquêtes en matière fiscale pénale.

Les demandes pourront concerner toute personne ou entité, y compris les trusts et les fondations. Ce dernier point dépend certes des obligations comptables et statutaires imposées à ces organismes fiscalement transparents.

S'agissant par exemple de Jersey, son premier ministre, Terry Le Sueur, a déclaré le 1er juin dernier, devant notre commission, que l'île pouvait répondre à de telles demandes relatives à la composition des trusts qui y sont établis.

En outre, ces territoires ne pourront pas opposer un éventuel secret bancaire.

Les accords prévoient que ces Etats et territoires doivent adapter leur législation interne afin de conférer un caractère effectif à l'échange d'informations, en rendant l'information accessible, disponible et en mettant en place des mécanismes d'échange d'informations.

L'examen de l'ensemble des dix accords m'a amené tout naturellement à m'interroger sur « l'après ratification » des accords conclus en termes de mise en oeuvre de la coopération fiscale internationale.

J'observe, tout d'abord que la politique conventionnelle française s'inscrit dans le cadre multilatéral de l'OCDE. La France a naturellement négocié avec les territoires qui n'avaient pas conclu les douze accords requis par le Forum mondial de la transparence fiscale pour ne plus figurer sur la liste grise ou noire de l'OCDE, établie le 2 avril 2009.

Ainsi, à cette date, la Dominique, Brunei, Anguilla et le Libéria figuraient sur la « liste grise », dans la mesure où ces pays avaient pris l'engagement auprès de l'OCDE de respecter les standards internationaux d'échange de renseignements, sans les avoir toutefois encore mis en oeuvre. Ils sont, depuis, passés sur la « liste blanche ».

Le Costa Rica, quant lui, était inscrit le 2 avril 2009, sur la « liste noire » dès lors qu'il n'avait pas formellement exprimé un tel engagement. S'il le formalisa dès le 7 avril 2009 afin d'intégrer la liste « grise », il y demeure encore aujourd'hui car des huit Etats et territoires examinés ce matin, il est le seul à n'avoir pas intégré la « liste blanche » de l'OCDE.

Cette observation nous alerte sur le risque d'inertie de certains pays à coopérer fiscalement. C'est pourquoi la France a souhaité élaborer des sanctions fiscales automatiques frappant les acteurs ainsi que les flux transitant par des pays « réticents à la coopération fiscale ».

A cette fin, elle a tout d'abord établi sa propre liste d'Etats et territoires non coopératifs, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2009.

Un pays est qualifié de non coopératif s'il figure sur la dernière liste grise publiée par l'OCDE et s'il n'a pas signé avec la France une convention d'assistance administrative permettant l'échange de renseignements.

La première liste française de ces « paradis fiscaux » a été publiée le 12 février 2010, par arrêté des ministres chargés de l'économie. Elle comptait dix-huit pays dont Anguilla, Belize, Brunei, le Costa Rica, la Dominique, les îles Cook et le Libéria.

Cette liste a été mise à jour le 14 avril 2011. Ainsi Saint-Christophe et Niévès et Sainte-Lucie en ont été retirés alors que les îles Turques et Caïques et Oman y ont été ajoutés.

Pour ces deux pays nouvellement inscrits, les sanctions fiscales ne seront donc applicables qu'au 1er janvier 2012.

En revanche, en ce qui concerne les pays qui n'ont pas été retirés de la liste, tels qu'Anguilla, les sanctions entrent en application automatiquement dès 2011, alors même que nous examinons le projet de loi visant à ratifier l'accord signé avec ce territoire. Seules, l'entrée en vigueur et l'application de l'accord permettront la radiation de la liste française.

Craignant un éventuel effet négatif sur le commerce extérieur français, en raison du maintien d'un Etat sur la liste française, en dépit de ses efforts pour coopérer fiscalement, j'ai exprimé le souhait que la publication de cette liste soit accompagnée de précisions données par l'administration sur l'état d'avancement des actions entreprises par cet Etat, c'est-à-dire la signature, la ratification d'un accord, le changement de sa législation etc. En réponse à ma proposition, l'administration a déclaré réfléchir à l'élaboration d'une instruction fiscale sur ce point précis.

L'enjeu est donc d'importance. Les conséquences de l'inscription sur ces listes sont, en effet, de deux ordres :

- l'application automatique de sanctions fiscales pour la France ;

- la formulation de recommandations par le groupe des pairs du Forum mondial pour l'OCDE.

En ce qui concerne la France, les flux financiers transitant par les pays figurant sur la liste française des territoires non coopératifs sont frappés de diverses dispositions pénalisantes.

Je rappellerai pour mémoire que ces mesures visent, en premier lieu, les résidents de France qui réalisent des transactions avec de tels pays.

Elles se traduisent, notamment, par un renforcement des dispositifs de lutte contre la fraude, par un durcissement du régime d'imposition des plus-values mobilières et immobilières ou encore par le refus du bénéfice du régime mère-fille aux sociétés françaises.

Ces dispositions frappent, en second lieu, les résidents de ces paradis qui bénéficient de flux provenant de France. Elles entraînent l'application de taux majorés de retenue à la source sur les revenus immobiliers et plus-values ainsi que sur les intérêts, dividendes et redevances.

L'action française se conjugue parallèlement avec l'examen conduit par le groupe des pairs du Forum mondial de l'OCDE dont la mission depuis 2009 est d'évaluer l'engagement de se conformer aux standards internationaux de la transparence fiscale, au-delà de l'obligation formelle de signer douze accords pour ne plus figurer sur la liste grise ou noire de l'OCDE.

En effet, si l'établissement des listes a permis essentiellement de signer environ six cents accords permettant l'échange de renseignements, il convient désormais de se référer aux résultats des évaluations menées par le groupe des pairs du Forum mondial, présidé par la France en la personne de François d'Aubert.

Trente-quatre rapports ont été publiés à ce jour, depuis le début de cette évaluation. Les neuf derniers ont été adoptés lors de la réunion du Forum qui s'est tenue aux Bermudes les 31 mai et 1er juin derniers. Ils concernent l'Italie, l'île de Man, la Nouvelle Zélande, les Etats-Unis, La France, la Hongrie, les Philippines, Singapour et la Suisse.

Le rapport sur Jersey, quant à lui, n'a pas pu être adopté, en raison d'une objection mineure soulevée par la Norvège. Il sera à nouveau soumis à l'adoption à la prochaine réunion du Forum en juillet.

Il convient de se féliciter des conclusions du rapport sur la France. Celles-ci font valoir que nous disposons d'un des plus importants réseaux conventionnels. Le cadre légal est satisfaisant. Le rapport recommande néanmoins que les délais de réponse soient raccourcis.

Quant à la Suisse, tout en relevant les progrès réalisés, le groupe des pairs met en exergue les domaines dans lesquels l'engagement de se conformer aux standards internationaux n'est pas totalement satisfait.

Il s'agit notamment des mécanismes d'identification des porteurs de part. Il apparaît également que les autorités suisses n'ont pas totalement accès à l'information bancaire, s'agissant des demandes formulées dans le cadre d'accords entrés en vigueur avant le 1er octobre 2010, sous réserve des cas de fraude.

Enfin, en ce qui concerne l'île de Man, le rapport conclut que les éléments requis sont satisfaits. Il préconise, néanmoins, que soit améliorée la disponibilité des informations comptables des sociétés en commandite.

En conclusion, si les cent un pays membres du Forum mondial sont entrés dans un système de discipline collective, cette évaluation repose sur le consensus.

Il n'existe pas, en effet, d'ordre fiscal international. C'est pourquoi, le réseau d'accords bilatéraux que la France tisse est si important.

L'adoption des dix projets de loi de ratification soumis à votre approbation en constitue donc une toute première étape, absolument indispensable, mais qui devra être suivie d'une vigilance accrue.

En conséquence, je vous propose d'adopter, sans réserve, les présents projets visant à approuver les accords conclus avec Anguilla, les Antilles néerlandaises, Belize, Brunei, le Costa Rica, la Dominique, Hong Kong, l'île de Man, les îles Cook et le Libéria.

Mme Nicole Bricq. - Je remercie le rapporteur d'exercer son droit de suite avec vigilance sur la politique conventionnelle française ainsi qu'en matière de lutte contre les paradis fiscaux. En l'absence éventuelle de débat en séance si aucun groupe n'en fait la demande, je souhaiterais évoquer les points suivants.

S'agissant de la Suisse, j'observe que le président de la République souhaite que la prochaine réunion du G 20, qui se tiendra à Cannes les 3 et 4 novembre 2011, prennent acte des recommandations formulées par le Forum mondial. Quelle sera la position de la France envers la Suisse qui ne respecte pas l'ensemble des standards internationaux de transparence ? Celle-ci figurera-t-elle dans la prochaine liste française des Etats et territoires non coopératifs ?

Par ailleurs, je souhaiterais une communication de votre part sur l'accord en cours de négociation entre la Suisse et l'Allemagne, d'une part, et la Grande Bretagne, d'autre part, dont l'impact sur la position française à Bruxelles pourrait être négatif.

En ce qui concerne les accords soumis à notre examen aujourd'hui, je constate qu'Anguilla, les îles Cook, Brunei et la Dominique demeurent inscrits sur la liste française des paradis fiscaux mise à jour en avril dernier. Il serait avisé de se procurer auprès du ministère de l'économie un bilan de l'application du dispositif de sanctions, voté en loi de finances rectificative en 2009. Il me paraît essentiel d'exercer notre vigilance sur le rendement des sanctions fiscales. Quant à la convention signée avec Hong Kong, celle-ci requiert une surveillance particulière car paradoxalement ce pays ne figure pas sur notre liste.

S'agissant des examens menés par le Forum mondial, je déplore que la méthodologie d'évaluation de la transparence adoptée par le Forum ne prenne pas en compte le nombre de demandes formulées et le montant de l'assiette recouvrée, contrairement à ce que la France a voté en 2009. Ces accords seront-ils examinés en séance ?

M. Jean Arthuis, président. - Ils devraient être inscrits en séance le 13 juillet et adoptés selon la procédure simplifiée, sauf demande de débat. Ce sont des sujets de première importance qui s'inscrivent, cependant, dans un calendrier législatif très chargé.

Mme Nicole Bricq. - La commission des finances du Sénat est la seule à effectuer un travail de réflexion sur ce thème. Quel que soit le résultat des élections sénatoriales, il importe qu'elle poursuive son contrôle.

Le dernier point de mon intervention concerne une dépêche en date de ce matin faisant état d'une transmission de données bancaires en provenance de la Belgique concernant 250 000 comptes étrangers de résidents, à plus de vingt-six pays différents. 100 000 de ces comptes concerneraient des Français, 50 000 des Hollandais, 22 500 des Allemands, 15 000 des Anglais et autant d'Espagnols. Là encore, il serait intéressant d'en obtenir la liste.

M. Joël Bourdin. - Je n'aurai qu'une remarque pour constater que bien que les études d'impact jointes aux projets de loi soient le plus souvent intéressantes - on y apprend notamment que 85 % des activités de Saint-Martin sont constituées par des services -, leur valeur est très inégale.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur. - Ce n'est pas la première fois que Nicole Bricq nous invite à examiner les liens conventionnels qui se tissent entre la Suisse, l'Allemagne et la Grande Bretagne. Cette question mérite, en effet, toute notre attention. S'agissant d'Anguilla, Brunei, les îles Cook et la Dominique, il est malheureusement top tôt pour obtenir des données sur la mise en oeuvre du dispositif voté en 2009 car les sanctions ne sont appliquées que depuis le 1er janvier 2011. Quant à la remarque de notre collègue Joël Bourdin, elle est judicieuse. Il est, en effet, pertinent d'exiger que les études d'impact répondent à un modèle de qualité.

M. Jean Arthuis, président. - Mes chers collègues, nous allons donc émettre un avis tendant à approuver ces dix accords fiscaux. Nous allons convenir que l'approbation puisse se faire sans débat. Je voudrais témoigner enfin toute notre reconnaissance et admiration à notre rapporteur pour son expertise alors que cet examen constitue sa dernière prestation en tant que rapporteur devant notre commission.

La commission adopte :

- le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord avec l'île de Man et le rapport du rapporteur ;

- le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord avec Hong Kong et le rapport du rapporteur ;

- les huit projets de loi d'approbation d'accords d'échange de renseignements en matière fiscale et le rapport du rapporteur commun à ces huit textes.

La commission demande que les dix projets de loi fassent l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique, en application des dispositions de l'article 47 decies du Règlement du Sénat.

Jeudi 16 juin 2011

- Présidence de M. Jean Arthuis, président -

Audition de M. Jean-Pierre Jouyet, président de l'Autorité des marchés financiers (AMF)

La commission procède à l'audition de M. Jean-Pierre Jouyet, président, et de M. Thierry Francq, secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers (AMF), à l'occasion de la remise du rapport annuel de l'AMF.

M. Jean Arthuis, président. - Comme chaque année, nous auditionnons aujourd'hui M. Jean-Pierre Jouyet, président de l'Autorité des marchés financiers (AMF), à l'occasion de la publication de son rapport annuel.

La régulation financière internationale connaît d'importants bouleversements, sur fond d'incertitudes macro-économiques portant en particulier sur la soutenabilité de la dette américaine et de la zone euro. Le G 20 sous présidence française se concentre sur le suivi des mesures décidées lors des précédents sommets, les établissements financiers systémiques et la prévention des nouveaux risques. Ceux-ci concernent en particulier les marchés de matières premières, le « système bancaire de l'ombre » (shadow banking) ou les innovations technologiques en matière de trading.

Les autorités de régulation américaines poursuivent leurs travaux sur les très nombreuses mesures d'application de la loi Dodd-Franck, parfois avec difficulté. L'Union européenne quant à elle s'efforce de mener à bien son programme très ambitieux de rénovation de la législation. Parmi les thèmes à l'ordre du jour : le règlement sur les ventes à découvert et celui sur les infrastructures de marché et dérivés de gré à gré, les mesures d'application des directives sur la gestion alternative et les OPCVM, la révision de la directive « marchés d'instruments financiers » ou de nouvelles initiatives sur les agences de notation et le marché de l'audit.

L'AMF est pleinement impliquée dans le processus international, par ses contributions aux travaux de l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) ou de la nouvelle Autorité européenne des marchés financiers (AEMF). La loi de régulation bancaire et financière d'octobre dernier a considérablement étendu ses missions, et la loi de finances pour 2011 a renforcé ses moyens financiers, après qu'elle a enregistré un déficit de 20 millions d'euros en 2010.

Toutefois deux défis apparaissent aujourd'hui plus complexes à relever : maintenir la « pression réglementaire » sur le long terme dans un contexte de normalisation de l'activité financière et réduire les facultés d'arbitrage juridique susceptibles de réapparaître entre les Etats-Unis, l'Europe et l'Asie.

Ce contexte ayant été brossé à grands traits, je vous passe la parole pour une intervention liminaire.

M. Jean-Pierre Jouyet, président de l'Autorité des marchés financiers. - Je tiens à vous remercier de votre invitation à vous présenter le huitième rapport d'activité annuel de l'Autorité des marchés financiers. C'est toujours un honneur pour moi.

C'est le troisième rapport que je remets aux pouvoirs publics depuis ma prise de fonction. Celui-ci est publié à mi-parcours de mon mandat et juste après que le Collège a été partiellement renouvelé et, grâce au Président du Sénat, en toute parité comme je l'avais souhaité.

Ce rapport donne la mesure du chemin parcouru en deux ans et demi pour réconcilier les épargnants avec les marchés dont nos économies et nos Etats auront le plus grand besoin pour se financer.

L'AMF a acquis une plus grande visibilité. Les banques, françaises et étrangères, les investisseurs étrangers, fonds souverains compris, les grandes entreprises ou les plus petites ont retrouvé le chemin qui mène à l'AMF. Nous avons su nouer des partenariats avec des associations de consommateurs, avec d'autres régulateurs français, en commençant par l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) au travers d'un pôle commun sur la distribution de l'épargne, mais aussi avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE) en ce qui concerne la régulation des marchés de matières premières ou encore avec l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité, notamment sur la question de la commercialisation des produits d'épargne. Nous nouons également des partenariats avec des autorités de régulation étrangères, notamment en Chine, en Russie ou avec des pays du Golfe.

Mais c'est aussi grâce à vous que le bilan de l'AMF est aussi positif puisque vous avez voté la loi de finances 2011 qui nous dote de moyens supplémentaires. La nouvelle assiette de nos recettes nous permettra de résorber un déficit devenu structurel avec la crise et surtout nous rend moins tributaires des aléas du marché. Les dispositions que vous avez prises nous permettront d'éponger ce déficit tout en maintenant une gestion extrêmement rigoureuse. Nos moyens restent comptés au regard de ceux de nos homologues et des enjeux de surveillance de marchés toujours plus rapides, fragmentés et automatisés mais l'effort est important.

Nous ferons un premier bilan de l'utilisation de ces recettes supplémentaires, de l'ordre de 25 millions d'euros, de façon à vous informer sur leur utilisation et à voir si elles ont couvert les différents besoins qui sont les nôtres. Je peux d'ores et déjà vous indiquer que nous investirons en priorité dans le recrutement d'experts spécialisés et dans des outils informatiques nécessaires pour maintenir à niveau notre capacité de surveillance.

Autant nous sommes prêts à rendre des comptes sur chaque euro dépensé - et tel est aussi l'objet de ce rapport -, autant j'ai quelques craintes et incompréhensions par rapport à l'amendement qui a été voté à l'Assemblée nationale lors de l'examen, la semaine dernière, du projet de loi de finances rectificative et qui plafonne nos emplois.

M. Jean Arthuis, président. - La commission des finances a rejeté cette disposition hier matin.

M. Jean-Pierre Jouyet. - Je vous en remercie ! Certes, je comprends bien le débat qui existe sur le nombre d'autorités indépendantes. Toutefois, à partir du moment où elles sont créées, il me semble difficile de vouloir les considérer comme un opérateur de l'Etat, ce qu'elles ne sont précisément pas. Je m'engage en revanche à vous rendre des comptes sur l'utilisation de nos moyens.

Grâce à vous, la loi de régulation bancaire et financière nous aura également donné des pouvoirs accrus, notamment des pouvoirs d'urgence. Surtout, elle parachève la réforme de notre processus répressif, entamée dès le prononcé de la décision EADS, en décembre 2009. Je suis convaincu que la publicité des séances de la Commission des sanctions et des sanctions elles-mêmes aura, à l'usage, un effet dissuasif, car le risque de réputation, dans certains cas, surtout pour les grandes entreprises, est plus redouté encore que la sanction pécuniaire, même si son plafond a été relevé à 100 millions d'euros. Le Collège n'a pas encore eu à jouer de son pouvoir d'appel d'une décision de la Commission des sanctions, mais cela viendra sans doute. En revanche, la procédure de transaction, dont le décret d'application a été examiné hier matin en Conseil d'Etat, sera très vite rodée et je puis vous donner l'assurance que cette procédure sera transparente et aidera à désengorger la Commission des sanctions. Sur la quarantaine de dossiers traités annuellement, environ une dizaine pourrait faire l'objet d'une transaction. Je tiens à rappeler que les dossiers qui portent sur des abus de marché ou des délits d'initié ne peuvent pas faire l'objet de transaction. La nouvelle procédure vise surtout des dossiers de non respect de leurs obligations professionnelles par les intermédiaires ou prestataires financiers régulés par l'AMF, nous permettant de nous concentrer sur les dossiers les plus importants. Cette procédure permet également de rentrer dans une logique d'indemnisation plus rapide de l'épargnant.

Retenez aussi de ce bilan 2010 la prise en compte plus systématique des intérêts des épargnants dans toutes les décisions qui peuvent les affecter. Le bilan de la direction des relations avec les épargnants, direction transversale à l'AMF, désormais pleinement opérationnelle, est à cet égard éloquent.

La difficulté consiste à maintenir le même tempo dans un contexte particulièrement mouvant. Nous devons trouver le bon équilibre entre la poursuite d'une activité soutenue tout en évitant les risques de sur-régulation, c'est-à-dire un risque de tarissement du financement de l'économie.

Quels sont les sujets qui appellent notre vigilance les mois qui viennent ? J'en vois trois principaux que vous retrouverez en filigrane de la cartographie des risques 2011 : l'avenir de la Place de Paris ; l'agenda européen de la régulation ; et la reconquête de l'épargnant/investisseur.

En ce qui concerne l'avenir de la Place de Paris, si le projet de fusion de Nyse-Euronext et Deutsche Börse devait se concrétiser, je comprends qu'il puisse susciter des inquiétudes, mais il ne faut pas les exagérer.

Nous avons à Paris la moitié des grandes capitalisations européennes, c'est un atout important. Les protagonistes de ce rapprochement n'auraient aucun intérêt à s'aliéner ces grands clients, sauf à prendre le risque de les voir partir non pour Francfort... mais pour Londres.

Ensuite, une place ne se réduit pas à une bourse, régulée ou pas. Pour être une place financière de référence dans la compétition internationale, il faut offrir une gamme de services bien plus large. Or la Place de Paris n'est pas la moins bien dotée. Nous sommes un leader européen de la gestion, bien préparé à l'ouverture des frontières européennes grâce à la transposition rapide et modernisatrice de la directive OPCVM IV ; sur les marchés d'actions, toute la logistique, humaine, matérielle et réglementaire est opérationnelle, surtout depuis la création du compartiment professionnel pour les entreprises internationales ; nous avons relancé le marché obligataire primaire en nous alignant sur les conditions offertes au Luxembourg. Nous sommes quasiment prêts à lancer un marché secondaire obligataire, complétant ainsi l'offre de la Place (il s'agit du projet Cassiopée). Nous avons beaucoup travaillé à l'émergence de nouvelles infrastructures techniques, pour enregistrer et compenser les transactions, notamment de dérivés. Nous avons anticipé l'émergence d'un cadre réglementaire européen du marché des quotas de CO2.

Bref, nous avons quelques atouts, et pas des moindres. Encore faut-il la volonté politique pour bien les exploiter.

Cela étant dit, nous avons trois points de vigilance principaux à propos du projet de fusion : nous souhaitons une gouvernance équilibrée de l'entité fusionnée mais aussi le maintien d'une capacité de développement à Paris d'infrastructures de marché et de post-marché (compensation, dépositaire central,...) essentielles pour l'activité de la Place comme pour notre stratégie réglementaire destinée à favoriser les plateformes de négociation transparentes et la compensation de dérivés de gré à gré. Enfin, il est essentiel de préserver des capacités d'accueil sur le marché des petites et moyennes entreprises (PME). C'est peut-être le sujet le plus difficile à régler. Sur tous ces points, nous demandons des garanties. Or nous accorderons les agréments à la nouvelle entité au vu du respect des engagements pris. De même, l'ACP devra donner ou non le statut d'établissement de crédit aux chambres de compensation. Nous disposons donc d'un certain nombre de moyens légaux pour faire en sorte que l'influence de la Place de Paris soit maintenue.

Deuxième sujet de préoccupation immédiate pour l'AMF, l'agenda européen de la régulation. Avec quatre questions sous-jacentes. Tout d'abord, sommes-nous en retard par rapport aux Etats-Unis ? Les Américains ont frappé fort en légiférant en bloc avec le Dodd-Frank Act mais ils doivent maintenant dérouler toute la phase de transposition en mesures techniques et ils prennent du retard sous la pression des lobbies et parce que le texte initial est souvent peu précis, voire inapplicable. Mais il est rassurant de constater que la volonté de l'Administration Obama, notamment du Secrétaire d'Etat au Trésor Timothy Geithner, et des régulateurs sont néanmoins intactes.

Les Européens sont, quant à eux, liés par leur processus décisionnel et par le calendrier des travaux de la Commission qui a saucissonné en plusieurs règlements et directives chaque sujet. Mais, dans l'ensemble, les textes ne souffrent pas de retard excessif et nous cochons petit à petit toutes les cases. Le commissaire Michel Barnier indiquait avant-hier que dix-huit textes étaient en cours de discussion pour tirer les leçons de la crise, dont trois particulièrement importants, sans compter le travail sur les normes comptables : la révision de la directive sur les marchés d'instruments financiers qui devrait intervenir à la fin de l'été ; la révision de la directive transparence ; la révision de la directive abus de marché.

Mais, qu'il s'agisse des Etats-Unis ou de l'Europe, il faut compter au minimum deux, voire trois ans entre le moment où un principe est acté au G 20 et son application effective. Ce fut le cas pour les agences de notation ou les fonds d'investissement spéculatif.

M. Jean Arthuis, président. - Notre commission était récemment en séminaire à Bruxelles et nous avions l'impression qu'une sorte d'inertie affectait les mécanismes de préparation des projets de régulation.

M. Jean-Pierre Jouyet. - Je comprends ce que vous avez pu ressentir parce que ce fut notre crainte à un certain moment. Le départ fut rapide puis il y a eu une sorte de plateau : la première phase a dû être digérée.

Néanmoins, vous connaissez les mécanismes de décision européens qui ne sont pas les plus rapides. En arrière-plan, les institutions communautaires et les pouvoirs publics nationaux se sont aussi focalisés sur la question des dettes souveraines, sujet qui est venu se surajouter aux travaux de régulation.

Pour en avoir débattu avec le commissaire Barnier, chacun se rend compte qu'il y a une seconde étape à franchir et qu'il faut aller vite. Le vrai juge de paix ce sera la révision de la directive « marchés d'instruments financiers » (MIF). C'est à cela que nous verrons si l'Europe a changé et s'est adaptée à l'évolution des marchés, à la spéculation et à la volatilité.

La troisième question porte sur la convergence des normes européennes et américaines. Il y a encore une marge de progrès. Car même si nous apportons des réponses assez proches aux problèmes identifiés en commun, chacun fait selon sa tradition. Vous connaissez la logique de réglementation américaine : elle est d'application extra-territoriale. Ce que nous souhaitons, c'est qu'il y ait une réponse européenne unie, comme l'ont exprimé le Parlement européen ou la Commission. Nous devons avoir les mêmes réflexes que les Etats-Unis, c'est-à-dire veiller à réguler les institutions et les acteurs européens qui travailleraient sur le territoire américain ou en relation avec lui.

C'est un grand progrès auquel je souscris totalement car, à l'asymétrie d'une extraterritorialité unilatérale, je préfère encore une extraterritorialité réciproque, stade nécessaire pour atteindre la signature de vrais accords de reconnaissance mutuelle.

Ce qui nous amène à la quatrième question, la place de l'AEMF. Il y a clairement un risque, celui que les régulateurs nationaux, réunis au sein du Conseil de l'Agence, ne continuent, comme avant, à défendre leurs propres intérêts, c'est-à-dire celui du rendement économique de leur industrie financière nationale, au détriment de la coopération renforcée et de la mutualisation des moyens.

Nous allons devoir apprendre à jouer notre partition. Cette agence est à Paris, ce qui est un atout important. Nous sommes, avec le Royaume-Uni et l'Allemagne, la place financière la plus importante. Mais, dans une Europe à Vingt-Sept, cela ne suffit pas ! Nous devons adapter notre « logiciel » diplomatique d'influence économique à cette Europe, ce qui nous est parfois moins naturel qu'à d'autres. Je suis néanmoins confiant au vue des orientations que dessine depuis peu l'AEMF.

Enfin, le troisième et dernier sujet de vigilance pour le régulateur concerne la reconquête de l'épargnant et de l'investisseur après la très grave crise de confiance.

Le premier terrain d'intervention porte sur la protection de l'épargnant et de l'investisseur. Vous savez que nous avons mis en place des visites mystères, que nous avons participé à la création d'un Observatoire de l'épargne, que nous avons rehaussé les standards professionnels en matière de commercialisation des produits financiers - avec un accent nouveau sur le régime des « biens divers » et autres produits « quasi financiers » - ainsi que sur les enjeux des négociations européennes en cours ou à venir.

J'insisterai sur trois autres enjeux essentiels à la confiance des investisseurs. Le premier d'entre eux s'intéresse à la gouvernance d'entreprise. J'attends beaucoup du groupe de travail dirigé par Olivier Poupart-Lafarge sur le fonctionnement des assemblées générales et l'exercice du droit de vote. L'Union européenne a fait des propositions que d'aucuns jugent audacieuses, notamment sur le fait de savoir si l'assemblée générale doit se prononcer sur la rémunération des administrateurs. Nous n'éviterons pas de nous poser la question en France. J'estime qu'un mécanisme consultatif et ex post permettrait de respecter les prérogatives normales du conseil d'administration et de l'assemblée générale.

Le deuxième enjeu se rapporte à la question des franchissements de seuil. Votre rapporteur général est très sensible à ce sujet et nous espérons avec lui pouvoir saisir une fenêtre de tir dans l'agenda du Parlement pour amender notre législation. Nous ne pouvons pas rester avec des dispositions qui ne sont pas dignes d'une grande démocratie financière. Pour que le marché fonctionne bien il faut que toute influence significative qui s'exerce sur une société cotée apparaisse clairement. C'est l'intérêt des actionnaires, celui de la société mais aussi des intervenants que d'avoir des règles du jeu qui, peu importe les instruments utilisés, soient parfaitement claires.

Enfin, le troisième enjeu a trait à l'indemnisation des préjudices subis par les épargnants. Les pistes de travail esquissées dans le rapport de Martine Ract Madoux et Jacques Delmas-Marsalet pour palier l'insuffisance des voies de réparation actuelles (mise au point d'une méthode de calcul de l'indemnisation, accès du juge civil aux éléments d'enquête recueillis dans le cadre du contrôle d'une société mise en cause, aménagement de l'action en représentation conjointe) doivent être exploitées.

En ce qui concerne la surveillance des marchés, nous avons réorganisé l'AMF : nous disposons désormais d'une nouvelle direction des marchés pour mieux exercer notre fonction de surveillance sur tous les acteurs, tous les marchés et toutes les infrastructures. Dans le même temps, nous étendons progressivement notre dispositif de surveillance automatisé à tous les marchés, en tenant compte des nouvelles techniques de négociation. Mais je suis convaincu que nous devrons pousser plus avant nos réflexions sur les conséquences de la montée en puissance du trading algorithmique. On entend que ces techniques apportent de la liquidité au marché, sans doute, mais ces techniques ne produisent qu'une liquidité artificielle qui peut disparaître en quelques micro-secondes. Américains et Européens sont très sensibilisés à l'influence de ces techniques, d'autant plus qu'elles se développent sur de nouveaux marchés tels que les marchés de matières premières ou de CO2.

Sur ces nouveaux marchés, il nous importe d'avoir accès à un meilleur accès aux données physiques qui existent. Nous ne pouvons pas à nous seuls, régulateurs financiers, malgré la financiarisation dénoncée de ces marchés, mettre un terme à la volatilité excessive et aux comportements parfois très anormaux que l'on rencontre sur ces marchés.

M. Jean Arthuis, président. - Merci d'avoir d'ores et déjà répondu à nombre de questions que nous avions déjà à l'esprit. Vous avez évoqué les opérations de rapprochement entre NYSE-Euronext et Deutsche Börse. J'ai à l'esprit le souvenir des opérations de consolidation des bourses en 2006. Les banques françaises, actionnaires d'Euronext, avaient réalisé leurs plus-values alors même qu'elles auraient dû être les partenaires de la société de bourse et les garants d'une certaine déontologie. N'y a-t-il pas eu, au final, un appauvrissement d'Euronext et de NYSE alors qu'à l'époque nous avions rejeté le rapprochement avec Deutsche Börse ?

M. Jean-Pierre Jouyet. - Vous ne pouvez pas avoir de place financière solide sans un engagement des banques. Si les banques françaises ne sont pas aux cotés du régulateur et ne sont pas impliquées, notamment sur les enjeux industriels qui ont trait à la compensation ou à la centralisation des ordres et des achats, si elles se déportent trop vers le marché de Londres ou d'autres marchés internationaux, nous ne pourrons pas agir à leur place. Je suis, pour ma part, très satisfait de l'implication d'Europlace mais, quelquefois, on a le sentiment que les émetteurs, c'est-à-dire les entreprises cotées à Paris, ont une implication plus forte que nombre d'institutions financières françaises. Vous avez tout à fait raison de signaler qu'il s'agit d'un vrai sujet de préoccupation.

L'ironie de l'histoire, c'est d'avoir parcouru tout ce chemin pour se retrouver dans une situation capitalistique moins favorable que celle qui pouvait nous être proposée dix ans auparavant avec Deutsche Börse.

Enfin, on entend ici et là qu'il faudra surveiller l'influence allemande dans le futur ensemble par rapport aux autres pays membres d'Euronext. Je crois, pour ma part, qu'il faudra surtout prêter attention à l'influence américaine qui va exercer, dans quelques années, sur les différentes places européennes que ce soit Francfort ou Paris.

Le problème avec l'Allemagne, c'est la structure de régulation. La BaFin a moins de pouvoirs que nous sur le contrôle des sociétés de bourse. Nous devons discuter avec les régulateurs du Land de Hesse que nous connaissons mal. Nous avons rencontré le président de Deutsche Börse. En ce qui concerne les intérêts industriels, la discussion fut très rationnelle : nous pouvons facilement discuter et identifier les points de désaccords. En revanche, je suis plus inquiet pour la gouvernance du nouvel ensemble, notamment sur le point de savoir si la partie européenne de celle-ci sera bien assurée.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Pour rester sur la concentration des entreprises de marché, je voudrais insister sur le marché des dérivés sur matières premières, c'est-à-dire le MATIF, car celui-ci me semble être, en soi, un enjeu, par exemple en termes de droit applicable ou de localisation des centres de livraison. Je voudrais par conséquent être assuré que cet enjeu est bien perçu comme tel. Je l'ai évoqué auprès de Mme Lagarde à plusieurs reprises mais je reste vigilant compte tenu du contexte actuel des marchés des matières premières. Nous avons un outil qui a repris de la substance ces dernières années et il serait très dommage de le voir absorber par Londres dans le cadre d'un nouvel ensemble européen. Je me suis d'ailleurs demandé s'il ne serait pas intéressant de susciter une offre de reprise de cet outil de marché.

En ce qui concerne le post-marché et compte tenu du poids des entreprises Eurex et Clearstream et du modèle du silo qui a fait ses preuves sur le plan économique, est-il vraiment possible de maintenir à Paris une activité significative de compensation et de règlement-livraison ?

J'en viens à un autre sujet : les nouvelles pratiques de trading, au coeur de la révision de la directive MIF. Quelle est notre stratégie en ce domaine ? Comment concilier l'inévitable innovation technologique avec les risques et les périls d'une intervention humaine ? Est-ce qu'une limitation du trading haute fréquence serait concevable et si oui, serait-elle favorable ou défavorable aux opérateurs français ?

Vous savez également que la commission des finances s'intéresse de près au nouveau marché des quotas de CO2. Elle y voit tout d'abord une source de valeur : ce sont des nouveaux droits qui apparaissent au bénéfice de l'Etat. Il crée un nouvel actif et fait fonctionner cette nouvelle « planche à billet ». Pouvez-vous nous dire comment se passe la régulation, à laquelle nous avons tenu, entre l'AMF et la CRE ? Comment aboutir à un marché réellement sécurisé ? Est-il possible de garantir la traçabilité de tout ce qui s'échange sur le marché ?

Je terminerai enfin sur le sujet des ventes à découvert. Dans la loi de régulation bancaire et financière, nous avons souhaité un renforcement de la traçabilité des titres en considérant que le statu quo crée des zones d'ombre, voire des trous noirs. Est-ce que le projet de règlement sur les ventes à découvert vous satisfait ? Comment peut-il être amélioré ? La règle d'affectation et de suivi, dite « locate rule », vous paraît-elle pertinente ? Est-ce que vous aurez les moyens de suivre les titres et les multiples opérations en cause ? Est-ce que l'on peut réellement escompter un abaissement du délai de règlement livraison à J + 2 ?

En conclusion, je rappelle que j'ai effectivement l'intention de déposer d'ici le 30 juin une proposition de loi sur certaines questions de droit boursier et visant en particulier à renforcer la transparence dans le domaine des franchissements de seuil. J'ai eu l'occasion d'évoquer ce sujet avec différents acteurs de place. Le texte sera certainement imparfait mais je l'ai bâti sur la base de positions communes avec l'AMF. J'espère également que nous pourrons disposer d'un créneau pour faire progresser notre droit boursier sur ce sujet car, pour la confiance et l'attractivité de la place de Paris, cela me semble nécessaire.

M. Jean-Pierre Jouyet. - Concernant le MATIF, la question est bien de savoir comment on peut le maintenir et le développer à Paris. Je crois que les dirigeants de Deutsche Börse ont bien intégré le savoir-faire de la place de Paris en matière de dérivés sur les céréales. Les discussions sont plus difficiles sur d'autres sujets, en particulier sur les activités de compensation d'Eurex. Elles donnent satisfaction aux utilisateurs des autres Etats, mais nous souhaitons maintenir à Paris des activités de post-marché. Nous devons trouver un accord équilibré, et cela prend du temps. A cet égard, le président Arthuis a raison d'insister sur la nécessaire implication des banques françaises.

Les nouvelles pratiques de trading sont effectivement un sujet important, qui est au coeur de la révision de la directive MIF. Il y a sur ce point un débat au niveau européen : le Royaume-Uni est favorable à ces innovations technologiques, alors que la position française se révèle paradoxalement plus proche des thèses américaines. Que ce soit au niveau national ou européen, l'alternative est simple : soit nous disposerons d'un cadre légal et de moyens techniques qui nous permettrons, en recourant aux sondages et à la technique du faisceau d'indices, de surveiller ces pratiques ; soit il faudra songer à interdire le trading haute fréquence.

M. Jean Arthuis, président. - La question est bien de déterminer dans quelle mesure on peut contrôler les opérations.

M. Jean-Pierre Jouyet. - Tout à fait. Mais nous ne pouvons pas surveiller toutes les opérations qui se réalisent en une fraction de seconde. Récemment, la Commodities and Futures Trading Commission (CFTC), l'autorité américaine de surveillance des produits dérivés, qui dispose d'une longue expérience et dont il n'existe pas l'équivalent en Europe, n'a elle-même pas été en mesure de détecter une anomalie sur le marché du gaz naturel avant un délai de trois jours ! Une éventuelle interdiction du trading haute fréquence devrait cependant être prononcée au niveau international et serait très difficile à obtenir.

Sur les ventes à découvert, je crois que les progrès sont réels. On dispose désormais d'une meilleure traçabilité des titres, l'AEMF a beaucoup travaillé sur le futur règlement européen, et il reste à trouver un accord sur un règlement des transactions en J + 2, ce qui sera probablement difficile.

M. Thierry Francq, secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers. - S'agissant du marché parisien des dérivés sur matières premières, Reto Francioni, président de Deutsche Börse, a été clair et je suis assez confiant sur l'absence de délocalisation d'un marché qui fonctionne et prend de l'importance. Le marché du blé à Paris est, en effet, devenu un véritable marché international et connaît une forte croissance. Je souligne cependant que ce marché, bien que de droit français, est géré et régulé depuis Londres.

Le post-marché constitue l'aspect le plus complexe de l'opération de fusion entre NYSE-Euronext et Deutsche Börse. L'importance des volumes traités par Eurex n'incite pas à l'optimisme sur le maintien d'activités à Paris, mais les questions de concurrence et de risque systémique peuvent limiter le processus. On peut penser que les autorités européennes de la concurrence seront soucieuses de maintenir au moins deux grandes chambres de compensation en Europe, en particulier pour les dérivés de gré à gré appelés à être de plus en plus compensés. Politiquement, l'Allemagne doit également donner des gages à la France. Tout cela peut créer une dynamique positive pour le maintien à Paris d'activités de compensation des actions, y compris celles traitées à Francfort, et le développement de capacités de traitement des dérivés de gré à gré. En revanche, il est clair que la compensation des dérivés cotés se fera à Francfort ; c'est d'ailleurs la raison industrielle de ce rapprochement.

L'espoir n'est donc pas perdu, loin de là, mais tout dépendra des banques françaises qui, semble-t-il, ne jouent pas complètement le jeu...

M. Philippe Marini, rapporteur général. - C'est une litote !

M. Jean Arthuis, président. - C'est scandaleux ! Elles sont parties en courant après avoir réalisé leurs plus-values, et à présent s'en lavent les mains !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Je souhaite insister sur le MATIF. Il ne serait pas absurde que dans le cadre d'une négociation, cette plate-forme soit logée dans une structure ad hoc, dans laquelle un acteur comme la Caisse des dépôts pourrait prendre une participation du quart ou du tiers du capital, pour peser sur les décisions futures.

M. Jean Arthuis, président. - C'est une question stratégique !

M. Jean-Pierre Jouyet. - En effet. Soit on trouve une alliance avec des opérateurs pour conforter le MATIF, soit on envisage une autre solution, telle que celle que suggère le rapporteur général.

M. Thierry Francq. - Il faudrait avant tout demander à la Caisse des dépôts de ne pas se désintéresser du marché Bluenext, car il y a aujourd'hui un risque.

M. Jean Arthuis, président. - En tout cas, notre commission considère comme stratégique la consolidation de la place de Paris, et je tiens à stigmatiser l'attitude honteuse des banques son égard au début des années 2000 !

M. Yvon Collin. - Vos travaux sur les matières premières agricoles ont-ils éveillé vos soupçons sur le rôle de la spéculation dans la volatilité des cours, et quelles sont vos préconisations pour mieux superviser ces marchés et lisser les variations excessives des cours ? Que vous inspire l'évolution des dividendes versés par les sociétés françaises ? Est-elle soutenable financièrement ? Par ailleurs, disposez-vous d'éléments sur l'exposition des intermédiaires financiers aux risques souverains en Europe ? Interdit-elle toute perspective de restructuration de ces dettes ? Enfin, je rappelle que j'avais déposé l'année dernière une proposition de loi sur la taxation des transactions financières, initiative qui avait été considérée comme « prématurée ». Cette idée est-elle toujours d'actualité ?

M. Jean Arthuis, président. - La taxe Tobin est déjà inscrite dans notre droit fiscal, qui prévoit qu'elle ne sera applicable que dès lors qu'un accord international aura été trouvé.

M. Aymeri de Montesquiou. - L'AMF coopère-t-elle avec l'OCDE pour renforcer la transparence des juridictions non coopératives ? Le financement des PME présente de grandes carences dans notre pays, en particulier par rapport à l'Allemagne et l'Italie. Peut-on imaginer d'orienter davantage l'épargne vers ces entreprises ? Concernant l'approvisionnement en matières premières, les contrats à long terme sont-ils contraires aux règles de l'OMC ? Enfin peut-on faire des prévisions sur l'avenir de la Grèce ?

Mme Nicole Bricq. - Le rapport annuel de l'AMF évoque l'indemnisation du préjudice des épargnants et investisseurs, mais ne se prononce pas sur l'opportunité de la mise en place d'une action de groupe. Les documents préparatoires du G 20 n'y font pas non plus référence. L'AMF compte-t-elle faire des propositions ?

En matière de gouvernance des entreprises et d'encadrement des rémunérations, la transposition en France de la directive CRD III a donné lieu à quelques polémiques, et l'AMF a pris des mesures sur la politique de rémunération des sociétés de gestion. Quelle est votre appréciation sur le rapport « équilibré », que mentionne la directive, entre les parties fixe et variable de la rémunération ?

Enfin s'agissant des agences de notation, j'aimerais recueillir vos commentaires sur le rapport du député européen Wolf Klinz, qui propose notamment une double notation et la création d'une fondation européenne, en parallèle de l'AEMF.

M. Jean-Pierre Fourcade. - Quelles sont vos éventuelles difficultés de coordination avec votre homologue britannique ? En matière de protection de l'épargne, l'AMF effectue-t-elle depuis sa création un suivi spécifique des fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI), qui comportent davantage de risques que les fonds classiques ? Concernant l'encadrement des rémunérations, qui relève notamment du code de l'AFEP et du MEDEF, l'AMF s'est-elle rapprochée de l'Agence des participations de l'Etat pour établir une meilleure transparence des rémunérations dans les entreprises à capital public ?

M. Pierre Bernard-Reymond. - Je me fais le porte-parole de Joël Bourdin, qui a dû s'absenter et s'interroge sur le cumul des mandats des administrateurs. Y-a-t-il aujourd'hui une réflexion et des textes en préparation sur ce sujet ?

Je pense qu'il faudra attendre deux ou trois ans pour tirer un vrai bilan des orientations du G 20 et faire la part des décisions réelles, optiques et cosmétiques. Il est souhaitable que, lors de chaque sommet, il soit précisément fait le point sur l'avancement des décisions et que l'on ne se contente pas d'aborder de nouveaux sujets, mais j'ai l'impression qu'on ne prend aujourd'hui pas suffisamment en compte cette dimension du bilan.

Ma question, peut-être hors sujet, a trait à vos fonctions actuelles et antérieures. MM. Trichet et Barnier ont proposé la création d'un poste de ministre des finances de l'Union européenne, sorte d'équivalent pour les finances de Mme Ashton. Que pensez-vous d'un tel saut qualitatif dans l'organisation des pouvoirs de l'Union européenne ?

M. Jean Arthuis, président. - La mission première de l'AMF est de protéger les épargnants, et vous avez constitué en 2010 un pôle commun avec l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP), qui dispose d'un coordonateur mais pas de personnels propres. Quelle a été son activité en 2010 et quelles sont ses perspectives pour 2011 ? Ce pôle ne devrait-il pas, à terme, reprendre les fonctions de médiation et de protection des épargnants actuellement dévolues à l'ACP et à l'AMF ?

La loi de finances pour 2011 a accordé de nouveaux moyens financiers à l'AMF. Les pertes de 2009 et 2010 sont-elles absorbées et les comptes de 2011 seront-ils équilibrés ? Quels sont les effectifs dont vous disposez actuellement et les perspectives pour cette année ?

M. Jean-Pierre Jouyet. - Je vais reprendre rapidement vos nombreuses questions. Sur les marchés de matières premières agricoles, mon sentiment est qu'il existe une dimension spéculative, qui émane tant des opérateurs physiques que financiers, mais qu'on ne peut attribuer à la financiarisation toutes les variations des cours. Les phénomènes climatiques actuels suscitent à la fois des comportements de couverture et de spéculation des opérateurs physiques, la difficulté pour nous étant de bien distinguer les deux dimensions. En revanche, ma grande crainte réside dans la spéculation à venir et les stratégies de certains grands fonds et banques d'investissement, qui vont être propriétaires de stocks et récoltes susceptibles d'être utilisés comme sous-jacents de produits distribués au grand public. On pourrait alors assister à une réédition des subprimes.

Je souhaite donc que le G 20 se saisisse de cette question pour que les établissements financiers puissent être contrôlés. Il faudrait que l'Europe dispose de règles analogues à celles en vigueur aux Etats-Unis, qui prévoient des limites de position à 10 % sur certains marchés.

Concernant le lissage des variations de cours, il faut saisir l'occasion de la nécessaire réforme de la politique agricole commune pour créer un observatoire ou une véritable agence européenne de régulation des matières premières agricoles, qui couvre les dimensions des stocks physiques, financière et commerciale.

En matière de dividendes, il n'y a à ma connaissance pas de réel problème de soutenabilité.

M. Thierry Francq. - Les entreprises cotées françaises se portent plutôt bien et ont maintenu des dividendes assez élevés pendant la crise, ce qui a notamment permis de soutenir la performance du marché des actions sur le moyen terme.

M. Jean Arthuis, président. - C'est un équilibre difficile à trouver.

M. Jean-Pierre Jouyet. - Nous n'avons pas relevé d'anomalies ou de réels excès.

S'agissant des expositions à la Grèce, je serai prudent car je ne suis pas en charge du Trésor ni de la Banque de France. Nous oeuvrons en faveur d'une plus grande transparence des expositions au risque souverain, et le collège de l'ACP, auquel j'ai participé hier, a d'ailleurs examiné au cas par cas les engagements des banques françaises. Il faut également renforcer les stress tests européens pour asseoir leur crédibilité internationale.

Je suis favorable à une taxation des transactions financières, même si je ne crois pas qu'elle puisse vraiment réduire la volatilité. En tout état de cause, il ne serait pas inutile qu'une telle taxe puisse renchérir le coût de certaines transactions, en particulier du trading algorithmique, car il y a là un véritable gisement pour financer d'autres actions ! Une telle taxe serait utile même si elle n'était pas mise en place au niveau international ; l'Europe est en soi un grand bassin et les risques liés à l'arbitrage réglementaire me paraissent réduits.

M. Jean Arthuis, président. - Et elle ne peut pas être mise en oeuvre au niveau infra-européen ?

M. Jean-Pierre Jouyet. - Cela me paraît difficile.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - La Grande-Bretagne va applaudir !

M. Jean-Pierre Jouyet. - Certes, mais l'opinion évolue aussi au Royaume-Uni, compte tenu de sa difficile situation économique et financière. Si la France ne porte pas une telle idée, aucun autre pays ne le fera.

Pour répondre à la question de M. de Montesquiou, je relève que l'AMF était il y a quelques années assez mal équipée sur les centres offshores et la lutte anti-blanchiment. Mais sous l'impulsion du secrétaire général, nous avons développé nos compétences et moyens dans ces domaines et coopérons avec l'OCDE.

M. Thierry Francq. - La coopération boursière fonctionne beaucoup mieux qu'en matière fiscale, y compris avec les pays réputés les plus opaques au plan bancaire. La seule juridiction qui nous pose encore des problèmes est l'Andorre.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Pas le Luxembourg ?

M. Thierry Francq. - Les échanges d'informations avec le Luxembourg ne suscitent pas de difficultés. Celles-ci ont plutôt trait à l'application des règles européennes.

M. Jean-Pierre Jouyet. - C'est un peu la même chose pour la coopération avec les Britanniques. Nous avons des divergences en matière de régulation, mais les échanges d'information et la coopération lors des enquêtes fonctionnent bien. En revanche, nous rencontrons à nouveau des problèmes avec la Suisse.

M. Thierry Francq. - Je crois que cette situation est conjoncturelle et liée au déménagement de l'autorité de régulation. Concernant le Royaume-Uni, la coopération sur le terrain est bonne, et nous avons encore eu un exemple récent sur une affaire d'escroquerie.

M. Jean-Pierre Jouyet. - En ce qui concerne l'orientation de l'épargne vers les PME, j'avais la crainte que le rapprochement avec Deutsche Börse ne produise une réduction du nombre d'entreprises accédant au marché car les opérateurs de bourse considèrent que ce n'est pas rentable. Bien au contraire, les Allemands ont une culture du financement des PME par le marché. Peut-être retirerons de cette coopération quelque chose de bon pour nos entreprises d'autant plus qu'ils ont l'habitude d'une collaboration décentralisée ?

S'agissant des contrats à long terme et de leur compatibilité avec les règles de l'OMC, j'admets ne pas être compétent. Il me semble qu'il faut garder des contrats à long terme pour les matières premières car ils permettent une sécurité d'approvisionnement.

M. Aymeri de Montesquiou. - Le Président Nazarbayev avait proposé des contrats à long terme pour certains produits et on lui a répondu que ce serait contraire aux règles ou, du moins, à l'esprit des règles de l'OMC. Il serait intéressant de savoir ce qu'il en est réellement.

M. Jean-Pierre Jouyet. - Pour répondre à Mme Bricq, il est vrai que nous ne nous sommes pas prononcé sur la question de l'action de groupe car il n'y avait pas d'accord au sein du groupe de travail de l'AMF entre les émetteurs et les représentants des épargnants. Nous avons tout de même dit que nous souhaitions que les mécanismes juridiques français existants soient renforcés.

Mme Nicole Bricq. - Cela ne marche pas !

M. Jean-Pierre Jouyet. - Je crois que la question se reposera dans le cadre des échéances nationales de 2012. Nous serons amenés à trancher cette question.

S'agissant du G 20, depuis Séoul, sont inscrits à son agenda la protection et l'information des épargnants et des consommateurs. Il me semble que c'est un sujet de préoccupation commune car les opinions publiques ont été échaudées.

En matière de gouvernance d'entreprise, la rémunération, notamment son équilibre entre partie fixe et partie variable, doit être corrélée avec les équilibres à moyen terme de l'entreprise. La part fixe peut être importante mais il faut éviter les détournements consistant à abaisser la part variable pour fortement augmenter la part fixe.

Vous m'avez interrogé sur l'idée de créer une fondation européenne de notation. A partir du moment où elle serait indépendante et supervisée, l'idée peut être envisagée. Mais il faut faire attention à ce qu'elle reste indépendante et objective. Autant la notation est nécessaire tant sur la dette privée que sur la dette souveraine - je ne crois que l'on puisse l'interdire sur ce dernier segment - mais, en revanche, ce qui n'est pas normal, c'est la tendance actuelle selon laquelle les agences préfèrent davantage refléter les rumeurs de marché plutôt que d'établir une notation objective.

Mme Nicole Bricq. - Elles sont moutonnières !

M. Jean Arthuis, président. - Ce sont aussi ceux qui prennent connaissance de leurs notes qui sont moutonniers.

M. Jean-Pierre Jouyet. - Oui, comme l'AMF a déjà eu l'occasion de dire : les investisseurs doivent se « désintoxiquer » des notations et effectuer leurs propres diligences.

M. Thierry Francq. - Sur la question des FCPI, il faut admettre qu'il s'agit d'un objet assez difficile à réguler pour nous, notamment parce que nous ne pouvons voir leur résultat qu'au moment de leur liquidation. Nous sommes particulièrement vigilants sur la question des conflits d'intérêts. Nous avons mené plusieurs contrôles récemment et je pense que des procédures de sanction vont être lancées. Ce sont des produits risqués et il est important de montrer que le superviseur est présent parce qu'il y a eu des performances très négatives. Certains fonds ont perdu 99 % de leur valeur. Il est également difficile de faire de la pédagogie sur la prévention des risques lorsque l'avantage fiscal est très élevé, ce qui faire perdre le bon sens à nombre d'investisseurs.

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Du miel ! Une fontaine de miel ! Il faut supprimer les niches !

M. Jean-Pierre Jouyet. - Sur ce type de produits, vous ne faites que vendre l'avantage fiscal.

M. Jean Arthuis, président. - Nous recevons tous des publicités scandaleuses, vous devriez lister les plus calamiteuses et les sanctionner !

M. Jean-Pierre Jouyet. - Nous les surveillons dans le cadre de notre partenariat avec l'autorité de régulation professionnelle de la publicité. Mais je retiens votre idée de faire du « name and shame » sur les mauvaises pratiques publicitaires...

M. Thierry Francq. - Autant nous avons du pouvoir sur les fonds, autant sur les holdings, nous en avons très peu. Or c'est dans les holdings que nous voyons des schémas où il est tout à fait clair que l'avantage fiscal vient essentiellement financer des commissions aux personnes qui montent ces schémas.

En ce qui concerne le pôle commun AMF-ACP, le bilan est contrasté. S'agissant de l'information des épargnants, il est plutôt positif. De même, sur l'obligation de coopération qui découle du pôle, il y a des avancées : nous pouvons maintenant prendre des mesures communes conjointes sur des produits qui sont autant des unités de compte d'assurance que des fonds. J'ai une perception plus mitigée du contrôle conjoint car les deux processus restent autonomes et l'ensemble est lourd et compliqué. Nous avons mené trois contrôles conjoints l'année dernière et ambitionnons d'en réaliser une dizaine, mais je reste assez sceptique sur cette perspective.

En outre, le paysage de la médiation n'est pas homogène et se révèle difficile à comprendre pour les épargnants, car les outils sont distincts selon les produits. Ainsi en matière d'assurance, elle est assurée par la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA). Le rapport de Jacques Delmas-Marsalet et Martine Ract-Madoux appelle à progresser dans la voie de l'harmonisation.

Je retiens néanmoins des aspects très positifs de ce pôle commun, qui a joué un rôle déterminant pour écarter les produits les plus complexes de la commercialisation.

M. Jean-Pierre Jouyet. - On aurait pu aller plus loin dans la rationalisation, mais on a fait preuve de pragmatisme et il faut que ce pôle continue de fonctionner.

La position de l'AMF est claire sur le cumul des mandats des administrateurs : il faut une limitation de leur nombre, un bon équilibre entre la durée et la diversification des administrateurs, et éviter les conflits d'intérêt, notamment avec les banquiers. L'AMF doit clairement disposer du pouvoir de s'assurer qu'il n'y a pas d'interférences, car la gouvernance des entreprises françaises doit encore progresser.

Concernant le G 20, il importe effectivement de conserver les acquis plutôt que de multiplier les idées nouvelles à chaque sommet. Cela suppose d'assurer la continuité de cette instance, par un secrétariat ou via le Conseil de stabilité financière.

S'agissant du risque que constituent les dettes souveraines en Europe, on constate une réelle rupture qualitative entre le projet de l'euro et l'organisation correspondante. Il est nécessaire d'imposer une plus grande discipline économique et financière et d'accepter des transferts au niveau européen. D'une certaine façon, le président de l'Eurogroupe incarne le ministre des finances de la zone euro, mais il importe de ne pas inverser l'ordre des priorités, c'est-à-dire de fixer les règles avant de désigner une personne et de ne pas reproduire le schéma appliqué pour la politique extérieure.

M. Thierry Francq. - Le pôle commun à l'AMF et l'ACP ne dispose pas de moyens ni d'effectifs en propre, mais les directions des contrôles des deux autorités sont plus particulièrement impliquées, soit environ une trentaine d'équivalents temps plein à l'AMF, où d'autres directions sont également sollicitées, et le double à l'ACP.

M. Jean-Pierre Jouyet. - Nous pourrions adresser à la commission des finances un récapitulatif du fonctionnement et des moyens de ce pôle.

M. Thierry Francq. - Le pôle commun établit d'ailleurs un rapport annuel, qui comporte peu d'éléments sur les moyens car ce pôle est un mécanisme de coordination et non une institution.

Sur les comptes de l'AMF, notre budget pour 2011 vise l'équilibre en trésorerie, donc un bénéfice de l'ordre de 1,8 million d'euros.

M. Jean Arthuis, président. - L'AMF dispose en fait d'une importante trésorerie, avec 46 millions d'euros de titres ! Vous pourriez les céder...

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Nous regardons plutôt le bilan et la trésorerie que le compte d'exploitation, pour mieux évaluer les moyens des nombreux opérateurs !

M. Thierry Francq. - Je me suis engagé devant le comité d'audit et le Collège à ce que les comptes soient au moins équilibrés cette année. Nous aurions pu tirer plus tôt la sonnette d'alarme sur notre déficit structurel, mais nous avons retardé l'échéance car nous avions conscience que le niveau de la trésorerie était trop élevé. En termes de bonne gestion, le comité d'audit considère néanmoins que l'autorité doit disposer à tout moment d'une demi-année de fonctionnement en trésorerie, car nous n'avons pas d'activité commerciale. Compte tenu des textes applicables, l'Etat ne pourrait sans doute pas nous apporter une aide temporaire et nous partons du principe que nous devons fonctionner de manière autonome.

M. Jean Arthuis, président. - Au fond, vous avez vendu des titres pour éponger votre déficit.

M. Thierry Francq. - Il y avait en effet trop de trésorerie. Cette situation était liée au fait qu'une des autorités qui a précédé l'AMF était propriétaire d'un de ses immeubles, ce qui n'est plus le cas, et aux « années fastes » des opérations de marché, notamment en 2007 et 2008.

Fin mai de cette année, l'AMF employait 434 personnes, y compris les contrats à durée déterminée, et notre plan stratégique vise un plafond de 469 collaborateurs à la fin de l'année. Nous n'y parviendrons sans doute pas car nous faisons face à un important renouvellement, compte tenu de la reprise du marché du travail dans les secteurs de la finance et de l'informatique. Nous sommes donc confrontés à des difficultés non négligeables de recrutement.

Enfin, concernant le Luxembourg, les nouveaux mécanismes européens permettent désormais de contraindre les Etats membres à appliquer sérieusement les réglementations. Je ne serais pas étonné que l'AMF soit la première autorité nationale à s'en saisir.

M. Jean Arthuis, président. - Nous vous remercions de nous avoir éclairés lors de cette audition. Nous avons bien noté que les infrastructures de marché pouvaient constituer un investissement stratégique. S'agissant des dividendes, Jean-Pierre Fourcade faisait récemment remarquer que l'Etat et la Caisse des dépôts était trop exigeants à l'égard de certaines de leurs participations...

M. Jean-Pierre Jouyet. - C'est un travers ancien !