- Mardi 2 novembre 2010
- Mercredi 3 novembre 2010
- Contrôle de l'application des lois - Communication et désignation de commissaires chargés de travaux de suivi
- Adaptation de la législation au droit communautaire - Examen du rapport et du texte de la commission
- Loi de finances pour 2011 - Mission Outre-mer - Examen du rapport pour avis
- Organisme extraparlementaire - Désignation de membres
- Loi de finances pour 2011 - Nomination de rapporteurs pour avis
- Avenir de la politique agricole commune - Échange de vues avec les membres français du Parlement européen
Mardi 2 novembre 2010
- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président -Loi de finances pour 2011 - Audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, et de Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat chargée de l'écologie
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. - A travers la réorganisation de mon ministère, nous avons fait le pari de bâtir une ingénierie publique qui gère en bonne intelligence les contradictions d'hier entre écologie, mer, transport, urbanisme, logement, etc. La fusion des équipes est aujourd'hui achevée, intellectuellement et physiquement. Issues de cultures qui s'affrontaient ou s'ignoraient, elles gèrent aujourd'hui en commun les problèmes.
Le mode de financement et de fonctionnement des administrations est cohérent avec les engagements du contrôle : avec une évolution comprise entre 0 % et - 1 %, nous contribuons à la modération budgétaire, ce que la fusion et la réorganisation rendent possibles, puisque les réductions de dépenses de fonctionnement sont significatives.
Nous avons surtout la capacité de mettre en oeuvre les engagements du Grenelle de l'environnement. Le rapport du groupe d'évaluation rendu public ce matin et élaboré par les présidents des différents groupes de travail, dont Nicole Notat, Jean Jouzel, Jean-François Le Grand, Philippe Pelletier ... conclut que 94 % des mesures concrètes, opérationnelles du Grenelle ont été engagées ; les 6 % restant posant des problèmes - questions sur la pertinence, doublons, difficultés majeures. Parmi celles qui sont mises en place, 80 % le sont de façon irréversible et sans difficulté d'exécution ; et 19 % méritent une attention particulière, une mobilisation accrue. L'important est que dans tous les domaines, énergie, bâtiment - 42 % de l'énergie consommée dans le monde - gouvernance, agriculture, biodiversité, une rupture se soit produite. Ce n'est pas moi qui l'affirme, mais le rapport du groupe d'évaluation, élaboré avec le soutien d'Ernst & Young. Nous sommes dans les temps prescrits par le Parlement et très en avance sur nos obligations internationales.
Nous contribuons également à l'effort de réduction des niches fiscales. Et si nous faisons plus que notre part, c'est finalement grâce au succès des mesures prises ! Le bonus-malus écologique sur les voitures, qui n'est pas une mesure fiscale mais une intervention sur les prix avec un impact budgétaire, était un signal adressé aux consommateurs et aux constructeurs. Ces derniers l'ont tellement bien entendu qu'au lieu de diminuer par pallier, à raison de 5 % tous les deux ans, le grammage de carbone, ils le réduisent de 5 % par an ! Ce « verdissement » est une bonne nouvelle pour l'écologie. L'éco-conditionnalité des aides fiscales a également un effet puissant dans le secteur du bâtiment et des chantiers thermiques.
Le programme des mesures inscrites dans le Grenelle de l'environnement représente 400 milliards d'euros dont un peu plus de 17 milliards sont financés par les collectivités les premières années. L'éco-redevance sur les poids lourds prendra le relais au 31 décembre 2011, comme prévu lorsque nous avons reculé d'un an sa mise en oeuvre. Nous sommes en effet passés d'un système fixe par portiques à un système satellitaire : l'appel d'offres a été lancé, la sélection est en cours. Les actions de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) bénéficieront donc des moyens nécessaires sous forme de recettes pérennes. Quant à l'ADEME, des « noisettes » avaient été mises de côté pour des actions à venir. Nous avons bénéficié aussi sur deux ans, à hauteur de 5 milliards d'euros, du plan de relance ; et pour près de 10 milliards, du grand emprunt, dont 6 milliards pour financer la recherche sur le véhicule du futur, le bateau du futur, les batteries, etc.
Les tarifs de rachat des énergies renouvelables évoluent en fonction des coûts de production. Leur diminution est conjointe. Notre objectif est de développer une filière professionnelle et non pas seulement les systèmes d'installation. Nous annoncerons dans quelques jours les tarifs de rachat du gaz issu de la méthanisation agricole, ce qui contribuera, je l'espère, à la généralisation de cette pratique.
Enfin, la réforme des aides à l'accession à la propriété, pilotée par M. Benoist Apparu, atténuera la surchauffe sur les prix du logement.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat. - Un mot du périmètre du budget de l'écologie. Le ministère dans son ensemble contribue à l'effort fiscal, mais une partie des financements du Grenelle ont été préservés. Nous avons choisi d'accroître de 6 % - et de 18 % en budget triennal - les crédits affectés à la prévention des risques, tandis que les crédits de la biodiversité sont stables, les actions concernant les déchets étant financées par des taxes. Après les évènements récents, nous entendons accélérer la mise en oeuvre des plans de prévention contre les risques technologiques et des plans de prévention contre la submersion marine et les crues. Pour la biodiversité, nous faisons face à nos engagements - je rappelle que la stabilité actuelle intervient après trois années de forte progression des crédits, 60 % au total.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. - L'article 13 du projet de loi de finances pour 2011 réduit fortement les avantages fiscaux sur les installations photovoltaïques. Certes, le dispositif a entraîné des effets d'aubaine et des comportements spéculatifs. Il en est résulté, en quelque sorte, une bulle photovoltaïque. Mais combien de projets sérieux, déjà déposés, qui ne se feront pas ! La réduction annoncée du crédit d'impôt a déjà ralenti de 70 % le rythme des commandes. Après la baisse du tarif de rachat de l'électricité et la fin de la défiscalisation dans les DOM, cette nouvelle mesure aggrave le manque de visibilité, d'une façon préjudiciable à toute la filière. Il est parfois nécessaire de corriger des dérives, mais il faut le faire de façon prévisible... Sinon, toute la chaîne est menacée ! L'objectif initial était le développement de toute une filière industrielle, afin de ne plus importer de Chine des panneaux au demeurant de fort mauvaise qualité. Pourquoi ce nouveau coup de frein ? Et comment seront traités les projets déjà déposés ?
La suppression de la défiscalisation outre-mer va frapper le photovoltaïque, mais non la bagasse : ce sera la mort de la filière photovoltaïque outre-mer.
Quel est l'impact de la réforme des retraites sur la Caisse autonome nationale de sécurité sociale des mines, qui représente 94 % des crédits du programme 174 ?
La loi de 2006 sur la transparence et la sécurité nucléaire avait prévu un financement autonome des commissions locales d'information (CLI), par prélèvement sur le produit de la taxe sur les installations nucléaires de base. Pourquoi ce prélèvement n'a-t-il jamais été instauré ?
M. Bruno Sido, rapporteur pour avis. - Le programme 181 concerne la prévention des risques, le 113, la biodiversité. Vous dites vouloir accélérer la mise en oeuvre des plans de prévention : quels moyens y consacrez-vous ? Le fonds Barnier en 2011 devra financer les différents plans, mais aussi le rachat des maisons touchées par la tempête Xynthia. Ses ressources n'y pourvoiront pas ; quelles dispositions prenez-vous pour l'abonder ? L'intégralité des recettes de la nouvelle TGAP sera-t-elle reversée aux collectivités locales ? L'ADEME reçoit 44 millions d'euros supplémentaires : à quoi sont-ils affectés ? Quelles avancées ont été obtenues à Nagoya la semaine dernière ? Quelles sont les conséquences concrètes pour la France ? Enfin, quid de la création d'une agence de la nature ?
M. Louis Nègre, en remplacement de M. Francis Grignon et de M. Charles Revet, rapporteurs pour avis. - Francis Grignon souligne que, cette année encore, l'État subventionne massivement l'AFITF, en attendant la création d'une taxe sur les poids lourds. Si le coût de gestion de celle-ci atteint 200 ou 300 millions d'euros, pour un produit de 1,2 milliard d'euros, la maintiendrez-vous ? Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres » est encore en déficit, alors que ces comptes doivent être à l'équilibre. Comptez-vous conserver ce compte ?
Le groupe de travail sur l'avenir du fret ferroviaire présidé par Francis Grignon a suggéré que des subventions soient versées aux entreprises qui exploitent des lignes à faible trafic, mais à fort impact sur l'aménagement du territoire. Envisagez-vous de créer un compte d'affectation spéciale « Services de transport de marchandises », comme vous le faites pour les « services nationaux de transport conventionné de voyageurs » dans le projet de loi de finances pour 2011 ? La hausse des tarifs de péages de Réseau ferré de France (RFF) est limitée à 140 millions d'euros : est-ce conforme au contrat de performance signé en 2008 ? Pour sa part, Charles Revet vous demande quels crédits vous allez consacrer aux travaux dans les grands ports maritimes. Enfin, concernant le schéma national d'infrastructures de transport, l'Etat présentera-t-il la clé de financement des projets inscrits, à hauteur de 170 millions d'euros ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'Etat. - Quand une voiture est restée longtemps à l'arrêt l'hiver, on démarre au starter, mais après, on roule sans ! Il en va de même pour le photovoltaïque : si l'on combine les différentes mesures, raccordement, tarif de rachat, mesure fiscale, le régime français est le plus favorable au monde. Mais il faut nous adapter, comme l'ont fait les Allemands il y a quelques semaines à la diminution des coûts de production, afin d'éviter la situation espagnole et de rencontrer de réels problèmes de gestion. Ne cédons pas aux pressions de professionnels dont l'appétit de rentabilité croît tandis que les coûts baissent.
Nous cherchons à regrouper à Chambéry et à Grenoble l'ensemble de nos capacités de recherche appliquée, CEA, CNRS, IFP Énergies nouvelles, Institut National de l'Énergie Solaire (INES)... afin de constituer un pôle puissant. Déjà 600 chercheurs ont été regroupés.
Enfin, nous mettrons en place dans les jours prochains un bilan carbone de tous les produits importés. C'est la seule mesure qui garantisse le sérieux de la filière.
Quant aux DOM-TOM, un groupe de travail spécifique a été créé pour suivre de près toutes les évolutions. L'essor d'une énergie locale, non importée, est particulièrement important pour les économies concernées. Je pense à La Réunion. Les députés ont voté, dans le cadre du projet de loi de finances, une automaticité d'application des recommandations de la CRE - depuis dix ans, elle formule moult prescriptions et rien ne bouge ! - assortie d'un plafond pour l'évolution de la contribution au service public de l'électricité (CSPE). Ce sont nos compatriotes qui, en dernier ressort, paient cette contribution.
Il me semble que le prélèvement sur la taxe créée en 2006 garantit le fonctionnement autonome des CLI. La transparence est indispensable au bon fonctionnement du nucléaire... Quant à la Caisse autonome des mines, elle verse une allocation aux actifs dans l'attente de l'ouverture de leurs droits complémentaires. Repousser l'âge de la retraite revient pour l'État à effectuer plus longtemps ces versements. Une expertise est conduite pour en estimer les conséquences. Cependant le programme 174 ne concerne pas des prestations de retraite de la sécurité sociale, mais des avantages en nature, versés aux mineurs - en activité ou à la retraite - et à leurs conjoints, durant toute leur vie. La réforme des retraites n'a aucun impact sur ces prestations.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat. - Il est prévu de réaliser 423 plans de prévention des risques technologiques. En 2007, 34 ont été prescrits, aucun approuvé ; cette année, 335 prescrits, 54 approuvés et nous tiendrons l'objectif qui est de parvenir en fin d'année à 100 % de PPRT prescrits. Pour accélérer la réalisation des plans, nous avons augmenté les crédits, les autorisations d'engagement devant être portés à 100 millions d'euros en 2011, 150 millions en 2012, 200 millions dans deux ans.
Une table ronde sur les risques industriels a mis en lumière les problèmes liés aux prescriptions de travaux dans les logements de particuliers. Nous avons donc porté de 25 à 40 % le crédit d'impôt dans le cadre du Grenelle et nous travaillons à présent avec les industriels et les collectivités afin qu'ils prennent en charge le reste.
Le fonds Barnier est aujourd'hui de 155 millions d'euros, contre 50 en 2006. Cependant il devra cette année financer les plans de prévention, le plan séisme et Xynthia. Le pic lié aux rachats interviendra dans deux ans. Néanmoins la Caisse centrale de réassurance va abonder de 100 millions d'euros le fonds Barnier en 2011.
La TGAP déchets est-elle reversée aux collectivités ? C'était un engagement central du Grenelle. Le plan déchets mis en oeuvre par l'ADEME a permis de recueillir 103 millions d'euros en 2010. Le rendement de la TGAP sera cette année compris entre 80 et 100 millions d'euros. Son produit est affecté à la prévention pour 34 %, au recyclage pour 18 %, pour 18 % aussi à la valorisation organique, le solde se partageant entre valorisation des déchets du BTP et actions menées outre-mer. Les 44 millions supplémentaires de subvention iront, pour une partie, au fonds « chaleur » et, pour l'autre partie, abonderont le plan déchets.
Les négociations de Nagoya portaient sur trois grandes conventions, la première visant à définir 20 objectifs mondiaux pour protéger la biodiversité, la deuxième étant destinée à mobiliser des ressources financières, la troisième traitant de l'accès aux ressources génétiques et au partage des bénéfices réalisés. Et contre toute attente nous avons abouti, parce que nous avons eu une bonne présidence et une volonté commune de conclure. Quand une entreprise prélève pour la médecine ou la cosmétique une ressource génétique, elle doit d'une part en avoir reçu l'autorisation, d'autre part consacrer une part des bénéfices à la protection et au renouvellement de la ressource. L'accord sur cette troisième convention était inespéré et il a été conclu. Il doit encore être ratifié dans les pays signataires, afin d'être mis en place, via un fonds comme l'ont proposé les États africains. Nous apportons notre contribution au lancement de cette structure en la dotant de 1 million d'euros, mais elle a vocation à être financée par des ressources privées. La part de la biodiversité dans les aides publiques est progressivement portée à 10 % : désormais tous les projets aidés par des fonds publics doivent avoir une dimension écologique.
Quant à l'agence de la nature, l'idée n'est pas de fusionner les établissements existants mais de partager certaines fonctions supports ainsi que les connaissances et les expertises. L'agence sera une sorte de holding. Nous comptons réunir des représentants de ces organismes afin de réfléchir ensemble et déboucher sur une proposition de loi l'an prochain.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'Etat. - Le coût de gestion de l'éco-redevance est d'environ 15 % : cela était prévu et ne remet pas en cause la taxe. En Allemagne, ce taux s'élève à 17 %. Sur les trains d'aménagement du territoire et le trafic fret de proximité, le rapport Grignon fait consensus. Ces lignes sont le maillon faible du réseau et elles sont financées en partie par le produit des péages. Il faut associer au financement les conseils régionaux. Mais un CAS est-il nécessaire ? Nous sommes plutôt favorables à la création d'opérateurs de proximité, comme en Auvergne, à La Rochelle, ou dans le Languedoc.
Grâce au bonus-malus, la France possède le parc de véhicules le moins polluant du monde ! Les chiffres sont spectaculaires. Nous tenons compte de ce succès, en cherchant à donner de la visibilité aux constructeurs et en décalant la borne des 5 grammes tous les ans dorénavant et non plus tous les deux ans.
Le schéma national des infrastructures de transport est une présentation stratégique d'un certain nombre d'opérations : celles qui doivent être réalisées sous trois à cinq ans sont, bien sûr, déjà bouclées. Du reste, aucune difficulté insurmontable n'est à déplorer, pas plus sur le canal Seine-Nord que pour le TGV Sud-ouest, ou le Nîmes-Montpellier et les contournements ferroviaires en général.
M. Michel Teston. - Sur le programme 203, relatif aux infrastructures et aux services de transport, vous annoncez une légère hausse, de 0,4 % ; or le bleu budgétaire révèle un recul des crédits de 7 %. Ce sont donc les ressources extrabudgétaires qui progressent. Je songe à la contribution sur les billets de TGV pour financer les trains d'équilibre du territoire. En fin de compte, ce sont les usagers qui paient. Il en va de même pour la régénération des lignes classiques, dont les crédits sont stables : c'est la hausse des tarifs de péage qui financera les travaux, donc la SNCF comme principale utilisatrice des sillons, et in fine, usagers.
Enfin, en 2011 doivent être mis en oeuvre les premiers engagements du Grenelle I. Or les 2,2 milliards d'euros de crédits de paiement se répartissent entre 41 % pour la route et 59 % pour les modes alternatifs. Certes tous les territoires ne peuvent être désenclavés par le train, mais nous sommes loin de l'objectif affiché dans le Grenelle I, à savoir 75 % pour les modes alternatifs...
Mme Odette Herviaux. - Les crédits de la mer sont stables, certes, mais je voudrais vous interroger sur vos choix quant à leur affectation. La sécurité maritime, dans le Grenelle de la mer, faisait l'objet d'une demande quasiment unanime : la sécurité est en effet au centre de toute politique de la mer. Or, en 2010, 190 emplois ont été supprimés et 96 autres le seront en 2011. Une action efficace pour protéger les navires et le littoral exige un engagement plus fort !
Suite aux accords de Nagoya, 10 % des territoires maritimes devraient être protégés. La politique affichée est donc ambitieuse mais elle implique des moyens humains et financiers supplémentaires, puisqu'elle va au-delà de ce que nous faisons pour les aires marines protégées. Alors, quid des enveloppes stables ?
M. Rémy Pointereau. - Le prix de rachat de 62 centimes par kilowattheure du photovoltaïque a créé un effet d'aubaine. Sa diminution, en septembre 2010, à 37 centimes a provoqué une chute vertigineuse des devis et des bons de commandes, de l'ordre d'au moins 70 %. Ceux qui se lancent dans ce secteur n'ont plus aucune visibilité. Vous avez parlé tout à l'heure d'un coup de starter, monsieur le ministre : prenez garde de ne pas « faire caler » le moteur ! Le prix de rachat aurait sans doute dû être moins élevé au départ pour que la chute soit moins brutale. Vous dites que le tarif de rachat doit s'adapter en permanence au prix de production, mais les coûts de production du photovoltaïque européen sont trop élevés par rapport à ceux pratiqués en Asie, même si la qualité n'est pas comparable. Comment voyez-vous les choses pour les douze prochains mois ?
De plus, le photovoltaïque, qui va coûter 300 millions à EDF en raison de ses obligations de rachat, n'est-il pas systématiquement mis en avant pour justifier la hausse des tarifs d'EDF ?
J'en viens au développement de l'éolien : quel est votre point de vue sur l'imposition forfaitaire des entreprises de réseaux (IFER) ? Nous sommes passés d'une dizaine de centimes à 2,9 centimes du kilowatt. Là aussi, il y a un coup de frein, tant sur les retombées fiscales que sur les schémas régionaux des zones de développement éolien. Un tarif à 7 ou 8 centimes permettrait sans doute de relancer l'éolien en motivant les collectivités locales.
Mme Évelyne Didier. - Qu'en est-il du projet d'expérimentation de la taxe poids-lourds en Alsace ? Ne risque-t-on pas de voir le trafic se reporter en Lorraine, notamment sur l'A 31 qui a la particularité d'être gratuite ?
En ce qui concerne RFF, prenons garde de ne pas laisser en déshérence certaines lignes qui, une fois abandonnées, seraient définitivement perdues. C'est un patrimoine à conserver
Pour Nagoya, la question des brevets a-t-elle été évoquée ?
Pouvons-nous parler d'une filière photovoltaïque industrielle naissante en France ? Il me semble que nous nous cantonnons à la revente et aux bureaux d'étude.
Enfin, il y a des communes qui cumulent tous les ennuis : elles peuvent être couvertes par plusieurs plans de prévention des risques miniers (PPRM), PPRT, plans de prévention des risques inondation (PPRI). Nous avions estimé que lorsqu'un PPRM couvrait plus de 50 % du territoire d'une commune, il fallait considérer que son foncier était particulièrement contraint. Va-t-on enfin prendre en compte ces inconvénients ?
M. Serge Dassault. - Quelle est la politique du ministère en ce qui concerne les batteries au lithium équipant les voitures électriques ? Allez-vous laisser les constructeurs acheter des batteries japonaises ou allemandes ? Avez-vous l'intention de développer une batterie française ? A l'heure actuelle, la seule voiture électrique construite par Renault serait équipée d'une batterie japonaise, partiellement financée par la France. Si c'est exact, n'est-il pas temps de faire des économies budgétaires ?
M. Martial Bourquin. - Mes collègues ont dit que la filière photovoltaïque était encore balbutiante. La suppression des avantages fiscaux ne risque-t-elle pas de lui porter un coup fatal ? N'a-t-on pas touché au ressort même de la filière ? Vous avez parlé, monsieur le ministre, de l'implantation d'un grand centre de recherche fondamentale et appliquée aux environs de Grenoble. Mais entre la recherche appliquée et l'industrialisation, il y a souvent un abîme en France !
Ne pourrait-on pas demander à EDF de penser un peu plus à la filière française lorsqu'il s'agit de photovoltaïque ? J'ai vu chez moi trois grands projets se monter, avec des panneaux chinois !
J'en viens à l'application du principe de précaution : dans le cadre de la mission commune d'information sur la désindustrialisation, lorsque nous nous déplaçons en France, on nous interroge sur les lourdeurs administratives dès qu'il s'agit d'agrandir ou d'implanter une entreprise. Comment concilier principe de précaution et bouclage des dossiers en moins de 14 mois ? A l'heure actuelle, de tels dossiers peuvent prendre jusqu'à 30 mois ! Des temps de réponse aussi longs sont une sorte d'encouragement à la délocalisation.
Enfin, le « verdissement » de la législation doit profiter à l'économie et à l'industrie françaises. Je me fais beaucoup de souci pour les logements locatifs, notamment pour les HLM hors ANRU. Les charges d'immeubles dans des quartiers entiers vont bientôt augmenter de façon exponentielle. Les loyers vont s'accroître dans des proportions telles que certains locataires devront partir. L'écologie ne doit pas rester une affaire de « bobos » : quand mettra-t-on en place un grand programme de rénovation pour « verdir » le parc HLM hors ANRU.
En ce qui concerne le ferroutage, je suis très inquiet de voir que nous prenons beaucoup de retard sur les infrastructures : certains faisceaux ne peuvent être développés car les tunnels ne sont pas aux normes. Il faut aller de l'avant car de tels travaux bénéficieraient à nos entreprises de BTP qui en ont bien besoin.
M. Thierry Repentin. - Nous attendons les derniers arbitrages permettant de construire des logements sociaux, avec ou sans panneaux photovoltaïques. Nous espérons que nous allons pouvoir retrouver ces 340 millions qui nous permettraient de construire 20 000 logements supplémentaires par an pendant trois ans.
Quelle ouverture d'esprit manifesterez-vous, madame la secrétaire d'État, pour financer les dispositions nécessaires aux plans de prévention des risques technologiques ? Vous avez indiqué que nous étions passés d'un taux de 25 % à 40 % de crédit d'impôt pour les propriétaires occupants, mais il ne faudrait pas oublier les propriétaires privés bailleurs et les propriétaires sociaux qui sont dans la même situation.
Qu'allez-vous faire, monsieur le ministre, pour que perdure dans notre pays, notamment dans certaines de nos vallées, les industries dont la matière première est l'électricité ? De très vieilles entreprises françaises donnent du travail à des jeunes qui n'ont pas forcément une grande qualification professionnelle. Or, ces entreprises électro-intensives qui produisent de l'aluminium et du silicium - nécessaire au photovoltaïque - s'inquiètent de l'évolution du prix du kilowatt heure.
Les schémas de cohérence territoriale sont importants, notamment en matière d'urbanisation. Les collectivités territoriales doivent respecter certains délais mais elles ne trouvent pas d'urbanistes ni de chargés de mission pour les aider. Ne faudrait-il pas financer en partie ces postes afin d'éviter que les collectivités locales ne traînent trop les pieds ? L'investissement initial serait peu important mais permettrait de réaliser des économies substantielles.
M. Gérard Bailly. - Je suis bien évidemment favorable à la biodiversité, mais pas dans n'importe quelle condition. Dans les exploitations agricoles, puis lorsque les animaux sont transportés et abattus, tout est fait pour éviter de les faire souffrir. C'est pourquoi je ne peux admettre qu'on laisse chaque année 3 300 agneaux se faire égorger par des loups dans nos montagnes. Pourquoi augmenter les sommes allouées aux éleveurs au titre de dédommagement alors qu'il suffirait de s'en prendre à la source du problème ? Vous avez vu les manifestations qui se succèdent sur cette question. Pourquoi laisser souffrir les ovins ? Les éleveurs ne comprennent pas les exigences qu'on leur impose dans leurs exploitations et le laisser-faire des pouvoirs publics dès que les troupeaux partent dans les montagnes.
Un exemple : dans le Jura, nous avons eu l'année dernière une attaque de loups. Avec le préfet, j'ai rencontré une jeune éleveuse de moutons en larmes. Aujourd'hui, son exploitation a disparu : elle a préféré mettre la clé sous la porte plutôt que de revivre une telle expérience traumatisante.
Notre cheptel bovin diminue également, non pas à cause des prédateurs, je vous l'accorde. Mais comment va-t-on entretenir les prairies naturelles, surtout en montagne, s'il n'y a plus d'animaux pour pâturer ?
J'ai lu avec beaucoup d'attention un document intitulé « Pour une politique agricole durable à partir de 2013 » émanant de votre ministère. J'aimerais qu'on m'explique le sens de ce texte abscons. Si vous croyez que vous allez faciliter la tâche des agriculteurs avec de tels documents, vous vous trompez lourdement.
M. Hervé Maurey. - Les professionnels de l'éolien sont inquiets devant certaines dispositions de la loi de finances, notamment en ce qui concerne la répartition de l'IFER entre les diverses collectivités locales et le non-renouvellement de l'amortissement exceptionnel sur un an. Les objectifs fixés par le gouvernement seront-ils vraiment atteints ?
La taxe carbone est-elle définitivement enterrée ? On nous avait dit l'année dernière que cette question pourrait revoir le jour dans le cadre européen, mais les institutions européennes y sont plutôt défavorables.
En ce qui concerne le logement social, la suppression de l'exonération de la contribution sur les revenus locatifs (CRL) au profit des organismes de logement sociaux suscite une grande inquiétude, chez les parlementaires et au sein du mouvement du logement social. Envisagez-vous d'autres solutions ? En sollicitant des « dodus dormants », il serait possible de trouver une recette équivalente en causant un choc moins important au secteur du logement locatif social.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. - Les autoroutes ferroviaires s'imposent comme une alternative économique et écologique d'avenir. Nous en connaissons les avantages, je n'y reviens pas. Mais aujourd'hui, nous avons, en tout et pour tout, l'autoroute ferroviaire alpine, de Chambéry à Turin et l'axe Luxembourg-Perpignan ! L'avenir est plutôt à l'extension et aux connexions de ces autoroutes ferroviaires. Où en est le projet d'extension de l'axe Luxembourg-Perpignan vers Marseille, qui pourrait déboucher sur une autoroute maritime vers le Maghreb ? Où en est le projet de nouvel axe atlantique qui relierait le Pays basque à l'Île-de-France et au Nord-Pas-de-Calais ? Quid de l'axe Lille-Turin via l'autoroute ferroviaire alpine si chère à Thierry Repentin ? Ces projets d'extension sont-ils sur de bons rails ?
M. Louis Nègre, rapporteur pour avis. - Je me félicite du plan digue et des 500 millions d'euros d'investissement. Il y a 48 heures, j'ai dû faire évacuer un camp de nomades trop proche d'un cours d'eau qui débordait à cause des orages. En revanche, tous les bassins de rétention que j'avais mis en place ont très bien fonctionné, ce qui a permis de limiter les dégâts.
J'en viens aux points plus discutables. Une remarque sur la forme : que l'on change de politique sur le photovoltaïque, pourquoi pas ? Mais l'annonce a été faite de façon bien trop brutale. Il aurait fallu être plus progressif.
Lors du premier appel à projet sur les transports en commun en site propre (TCSP), nous avions obtenu 800 millions pour 52 projets. Avec le deuxième appel à projet, nous avons 65 projets et 379 kilomètres, ce qui représente, si l'on prend les mêmes taux de subvention, près d'un milliard d'euros. Mais nous avons entendu évoquer des chiffres bien plus bas. Qu'en est-il réellement alors que 90 % des Français sont très favorables aux tramways ?
Les moyens financiers sont-ils suffisants pour assurer à la fois la réalisation des nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) et la rénovation du réseau existant à un niveau suffisant ?
Enfin, nous souhaiterions, au GART (Groupement des autorités responsables des transports), faire passer à 0,9 % le taux plafond du versement transport pour les communes de moins de 100 000 habitants qui prévoient de réaliser un transport en commun en site propre.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. - En ce qui concerne la taxe poids lourds en Alsace, nous n'avons pas voulu lancer l'expérimentation il y a deux ans pour éviter un trop grand laps de temps entre l'expérimentation et la mise en application nationale. En outre, l'A 35 alsacienne est beaucoup plus proche de son homologue allemande, qui est soumise à l'éco-redevance, que l'autoroute A 31 : le taux de transfert sur l'axe français est donc important.
S'agissant du patrimoine ferroviaire, j'avoue que j'ai été traumatisé par l'abandon de la petite ceinture de Paris et de la gare d'Orsay : ce fut une erreur invraisemblable ! Les procédures d'abandon ou de réaffectation des lignes ferroviaires sont aujourd'hui encadrées, les collectivités locales sont consultées. Je viens d'ailleurs d'inaugurer l'ouverture d'une ligne dans le Haut-Bugey, et je n'oublie pas les Pyrénées.
Le rapport de l'École Polytechnique de Lausanne a fort bien montré le mauvais état de notre patrimoine ferroviaire.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Pas de catastrophisme !
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. - Disons qu'il fallait regarder ce patrimoine de très près... C'est un fait qu'à une époque, on a préféré faire des lignes à grande vitesse plutôt que d'entretenir les lignes intermédiaires. Aujourd'hui, l'effort de rattrapage est très important, mais cela permettra de dédier ces lignes rénovées au fret ferroviaire.
L'autoroute ferroviaire est un outil compatible entre deux mondes, celui de la mobilité - la route - et celui du transfert massif - le rail. A terme, le ferroutage va se développer, et c'est pourquoi nous augmentons les cadences de l'axe Perpignan-Luxembourg.
L'AFIFT finance les principales infrastructures de transports de l'Etat dans le cadre des PPP (partenariats public-privé), avant que l'éco-redevance ne prenne le relais. Nous n'avons donc pas de difficultés particulières dans ce domaine.
Rémy Pointereau et Hervé Maurey m'ont interrogé sur l'IFER. Cette question me pose problème et je ne suis pas sûr que la situation actuelle soit totalement satisfaisante. L'enjeu financier n'est pas considérable, mais dès lors que l'on demande aux collectivités territoriales de participer aux schémas régionaux, il faut qu'elles y soient incitées. Je relayerai vos préoccupations. En revanche, je ne partage pas vos objections sur le recul de l'éolien. Les schémas régionaux étaient obligatoires et ils n'ont pas été mis en place, d'où l'intervention du législateur pour les imposer. Dans les pays européens, l'acceptabilité des éoliennes se réduit de plus en plus, à commencer chez nos voisins immédiats. Il faut éviter les dérives.
Sur le fond, nous sommes toujours très en avance sur nos objectifs, qu'il s'agisse de biomasse, d'éolien ou de photovoltaïque. Sur le photovoltaïque, qu'on le veuille ou non, les opérateurs ont fait tourner les usines chinoises. Je me suis rendu au congrès du syndicat des énergies renouvelables et j'ai dit aux opérateurs qu'ils devaient faire un effort pour éviter un divorce avec les Français. Et c'est pourquoi nous avons proposé un texte imposant de nouvelles normes qui seront qualifiées de protectionnistes. Mais en informant trop longtemps à l'avance, on est sûr de créer immédiatement une bulle. Il faut donc encourager les investissements industriels en menant une politique de long terme. La vraie visibilité, c'est la maîtrise de la filière.
Martial Bourquin m'a interrogé sur les avantages fiscaux, mais il s'agit des particuliers, et non de la filière.
Pour le ferroutage, des études d'aménagement des tunnels sont en cours. Le Grenelle prévoit 300 millions d'euros pour les tunnels et les courbes.
En ce qui concerne l'électro-intensif dans les vallées, il faut prendre garde à la réglementation européenne qui est en cours d'achèvement.
Il faut probablement aider à la mise en place des schémas de cohérence territoriale, qui ne se développent pas tous à la même vitesse sur l'ensemble du territoire. Reste à débattre du concept de potentiel financier, mais il serait effectivement préférable d'instaurer une sorte de péréquation plutôt qu'un prélèvement généralisé.
Louis Nègre m'interroge sur les TCSP : comme la dernière fois, il y aura un accompagnement financier de l'Etat proportionnel au coût global de chaque projet. Je suis stupéfait : personne n'aurait pu imaginer une telle réussite. Lors du premier appel à projet, nous avons enregistré 59 projets pour un montant global de 6,5 milliards d'euros. Actuellement, pour le deuxième appel à projets, on est au même niveau ! Si cela se confirme, nous serons passés en six ans de 329 kilomètres TCSP hors Paris à près de 1 200, voire 1 400 kilomètres. Les transferts modaux vont être considérables. Nous sommes donc sur un accompagnement ouvert et nous nous adapterons au montant des projets. Je rappelle que l'attribution est faite en application de différents critères, de façon pluraliste, en partenariat avec le GART et avec l'accord de parlementaires. Cette procédure n'a fait l'objet d'aucune contestation.
Le sujet des batteries est majeur. La voiture de demain, ce sera d'abord de la batterie. Les équipes de l'INES travaillent sur cette question, en coopération avec le CEA et Renault. Il existe deux types de batteries - à ions et à polymères - et je ne sais laquelle l'emportera. Indiscutablement, la France avait un avantage considérable en la matière il y a une trentaine d'années avec Amiens. Elle ne l'a plus. Tout projet français sur les véhicules du futur pourra bénéficier du grand emprunt.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat. - Nous sommes en train de réformer les centres de sécurité des affaires maritimes, afin de répondre aux objectifs d'Erika III. Les tâches plus administratives de vérification a priori devraient être transférées à des entreprises privées afin de concentrer l'action des services sur le contrôle des navires « poubelles ».
S'agissant des aires marines protégées, deux parcs marins ont été créés, Mayotte et la mer d'Iroise. Nous en avons cinq en cours de création et nous allons ouvrir des postes pour faire face à cette augmentation. Nous avons 89 équivalents temps plein en 2010 et leur nombre passera à 107 en 2011, 120 en 2012 et 134 en 2013. Nous devrions donc pouvoir faire face à ces nouvelles charges.
Evelyne Didier a posé une question très pertinente sur le protocole d'accès partagé des ressources génétiques. Les brevets continueront à être gérés par des accords différents, mais les entreprises devront pouvoir prouver qu'elles ont bien eu un accès juridiquement légal aux ressources génétiques. Un accord prévoit donc que chaque pays décidera du point de contrôle et qu'il pourra procéder à des contrôles frontaliers et prononcer des sanctions si les entreprises ne disposent pas des documents juridiques adéquats.
Les PPR étant contrôlés par le préfet, ce dernier doit veiller à ce que les communes n'aient pas plusieurs PPR différents sur leurs territoires. Il est cependant évident qu'il faut intégrer les risques le plus en amont possible, autant que possible au niveau intercommunal, afin d'alléger ce type de contraintes.
Martial Bourquin m'a interrogé sur le principe de précaution et les procédures trop longues. Il faut séparer les deux sujets : la longueur des procédures n'est pas liée à l'application du principe de précaution. Sur le régime des installations classées, il y a bien eu des cas qui ont nécessité beaucoup de temps. Mais on nous compare toujours aux Allemands qui répondraient dans des délais record. Certes, mais sur une partie du problème seulement. En France, nous traitons de l'intégralité du dossier en une fois, alors qu'en Allemagne, l'accumulation des diverses procédures conduit à des délais globaux à peu près équivalents. En outre, pour répondre à la longueur de traitement, nous avons mis en place le régime d'enregistrement. Enfin, 75 % des dossiers nouveaux sont traités en moins d'un an et nous travaillons à simplifier encore le traitement des petites modifications.
Thierry Repentin m'a interrogé sur mon ouverture d'esprit : il s'agit plutôt d'une question d'ouverture budgétaire, mais nous ne l'avons pas obtenue en arbitrage interministériel, s'agissant des PPRT.
Gérard Bailly a parlé de l'élevage en montagne. Que les choses soient claires : avec Jean-Louis Borloo, nous n'avons pas « amour particulier » pour les loups. Mais cette espèce est protégée par la convention de Berne et par la directive Habitats. On ne peut donc pas envisager de plan de destruction. Il est clair que les loups se développent beaucoup plus rapidement que les ours : à un moment ou à un autre, il faudra adapter la politique de régulation.
Les plans de financement « prédateurs » soutiennent pour l'essentiel le pastoralisme. Par ces financements, on promeut la protection des troupeaux et l'installation de jeunes bergers. Là où les troupeaux sont protégés, les attaques sont moins fréquentes. Notre pastoralisme avait évolué et les troupeaux étaient de moins en moins gardés. Au regard des instances européennes, la présence du loup restera en outre une des principales justifications à l'aide financière au pastoralisme. Enfin, la procédure de tirs d'effarouchement, voire de prélèvement, a été déconcentrée : elle relève désormais du préfet, ce qui permet des décisions bien plus rapides.
Quant au document « Pac 2013 », que j'ai cosigné avec Jean-Louis Borloo, il ne s'agit que de la contribution du ministère à la réflexion en cours : aujourd'hui le deuxième pilier de la PAC (politique agricole commune) n'est pas utilisé parce qu'il est trop compliqué. D'où l'idée d'avoir une approche à trois niveaux : un niveau de base d'aide financière qui constituerait un complément de revenus pour les agriculteurs pour qu'ils puissent vivre de leur activité, puis deux autres niveaux d'aides en fonction de l'excellence environnementale.
Prétendre que l'agriculture peine en France à cause de l'environnement, c'est condamner cette activité. L'agriculture est aujourd'hui fortement dépendante des produits phytosanitaires qui sont eux-mêmes fortement dépendants du prix du pétrole. L'agriculture ne doit donc plus en consommer autant. Nous devons aider les agriculteurs à réduire leurs consommations d'intrants. Il faut en outre que l'on cesse d'accuser l'agriculture d'être à l'origine de pollutions diverses, comme les nitrates ou les pesticides. Dans le cadre du Grenelle de l'environnement, nous avons eu ce dialogue avec les agriculteurs et je n'ai pas noté de difficultés. Restent bien sûr des problèmes à régler, mais nous avons franchi une étape importante.
Le vrai problème pour l'avenir de l'agriculture concerne la formation des prix agricoles au niveau mondial : ne nous trompons donc pas de débat.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Il y aurait beaucoup à dire sur toutes ces questions : les agriculteurs, notamment les céréaliers, ont fait beaucoup d'efforts pour réduire leur consommation de pesticides. Mais une agriculture sans traitement, c'est une utopie. Sur le financement des mises aux normes, de nombreux éleveurs connaissent des difficultés et dans mon département, je déplore deux suicides récents d'éleveurs.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. - Il ne faut pas confondre les engagements agricoles de la France pris au niveau communautaire et les actions menées par le ministère de l'environnement. Ce rapprochement est scandaleusement trop facile. Lorsque la France signe une directive sur le maintient de l'éco-diversité, et que de « petits génies français » imaginent un système de compensation appelé « les bonnes pratiques agricoles », à savoir qu'un pommier égale trois poiriers en échange de deux haies, c'est incompréhensible ! Je veux bien assumer ce qui vient de mon ministère, mais pas ces aberrations.
Mercredi 3 novembre 2010
- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président -Contrôle de l'application des lois - Communication et désignation de commissaires chargés de travaux de suivi
Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission dresse le bilan de l'application des lois relevant de la compétence de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire et désigne des commissaires chargés du suivi de l'application des lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2009-2010.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Il nous appartient de dresser, comme chaque année, le bilan de l'application des lois relevant de la compétence de notre commission. Au cours de l'année parlementaire 2009-2010, dans les domaines qui nous concernent, 10 lois ont été promulguées, contre 5 au cours de 2008-2009 ; 109 textes d'application ont été publiés, contre 71 en 2008-2009, ils se décomposent en 54 décrets en Conseil d'État, 33 décrets simples, 12 arrêtés, 9 rapports et une ordonnance.
Nous ne pouvons que nous réjouir de cet accroissement ; le Gouvernement a poursuivi ses efforts pour réduire le stock de lois en attente de mesures d'application. Le nombre de lois totalement inapplicables tend à diminuer : 7 en 2007-2008, 4 en 2008-2009, 3 aujourd'hui. La mise en oeuvre des lois partiellement applicables s'est globalement améliorée : 18 ont fait l'objet d'une mesure d'exécution au cours de l'année parlementaire 2009-2010 - 14 en 2008-2009. Le taux d'application des lois partiellement applicables a sensiblement augmenté, ainsi la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion est-elle à présent applicable à 80 %, 16 articles étant désormais totalement applicables contre 4 un an plus tôt. Le nombre de lois devenues totalement applicables au cours de l'année parlementaire 2009-2010 a augmenté : 6 en 2008-2009, 7 en 2009-2010. Mentionnons à ce titre la loi du 17 février 2009 pour l'amélioration des programmes de construction et d'investissements publics et privés.
Pour les lois que nous suivons, le délai moyen de publication des textes d'application s'est réduit : 70 % des mesures réglementaires ont été adoptées dans les six mois suivant la promulgation des lois et 8 décrets ont même été pris moins d'un mois après.
Ces améliorations indéniables sont malheureusement ternies par plusieurs éléments inquiétants. Le taux d'application global des 10 lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2009-2010 est de 8 % : sur les 387 mesures réglementaires d'exécution prévues par ces 10 lois, 31 ont été prises. Il est vrai toutefois que les lois appelant le plus grand nombre de mesures d'exécution ont été promulguées seulement en juillet dernier.
Il faut déplorer aussi le nombre encore trop important de lois, 26, partiellement applicables et n'ayant fait l'objet d'aucune nouvelle mesure réglementaire d'exécution cette année. Je citerai la loi du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt, dont l'état d'application n'a pas évolué depuis 2007...
Seulement 7 % des mesures réglementaires résultant d'amendements législatifs d'origine sénatoriale ont été prises au cours de l'année parlementaire, contre 15 % pour les amendements déposés par le Gouvernement.
Enfin, cette année encore, la remise au Parlement des rapports demandés au Gouvernement est aléatoire, voire inexistante : 83 demandés depuis 2006, 17 à peine remis. Sur les 7 rapports prévus par la loi du 3 août 2008 dite Grenelle I, nous n'en avons reçu que deux. Un réel effort s'impose.
Je vous remercie tous pour votre implication dans le contrôle de l'application des lois relevant de notre commission, au sein des groupes de travail auxquels vous participez - celui relatif à l'application de la loi dite LME, dont le rapporteur a été Mme Elisabeth Lamure, par exemple - ou par le biais des questions que vous posez au Gouvernement, tels M. Charles Revet, sur la loi portant réforme portuaire ou M. Dominique Braye dans une question crible thématique sur la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.
Je vous propose enfin de désigner des commissaires chargés d'assurer le suivi de l'application des lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2009-2010 : MM. Gérard César et Charles Revet, rapporteurs, sur la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche ; M. Gérard Cornu, rapporteur, sur la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services ; MM. Dominique Braye, Daniel Dubois, Louis Nègre et Bruno Sido, rapporteurs, sur la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ; M. Claude Biwer, en remplacement de M. Philippe Dominati qui siège désormais à la commission des finances, sur la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation ; M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, sur la loi du 7 juin 2010 autorisant les petits consommateurs domestiques et non domestiques d'électricité et de gaz naturel à accéder ou à retourner au tarif réglementé ; je suivrai quant à moi la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, puisque ce texte a été examiné par une commission spéciale que je présidais et que le rapporteur M. Jean-Pierre Fourcade est à la commission des finances ; M. Bruno Sido, rapporteur sur la loi du 9 mars 2010 visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation ; M. Pierre Hérisson, rapporteur, sur la loi du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales ; M. Bruno Retailleau, rapporteur, sur la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique ; M. Francis Grignon, rapporteur, sur la loi du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports.
M. Daniel Raoul. - La révision constitutionnelle devait entraîner une revalorisation du travail parlementaire : ces chiffres suscitent des interrogations... Pourquoi ne pas retenir le principe de lois « biodégradables », caduques au bout de deux ans en l'absence de publication des mesures d'application ? L'idée de loi partiellement applicable ou non applicable me dérange aussi... Les entreprises, souvent, sont dans l'incertitude : on a fait de la communication sur un texte mais il n'entre jamais en vigueur.
L'inflation du nombre de lois est aussi à incriminer. Du reste, quand examinera-t-on la proposition de loi Warsmann ? Et la proposition Longuet ? J'aimerais aussi avoir une vision globale de la transposition de certaines directives - je songe aux services - éparpillée entre divers véhicules.
M. Jean-Paul Emorine, président. - La difficulté à publier les décrets d'application ne date pas d'aujourd'hui, elle a touché tous les gouvernements. La désignation de commissaires chargés du suivi nous permettra d'interroger le gouvernement. L'administration est souvent lente et provoquer une réunion avec un ministre, c'est lui rendre service ! Quant à la transposition par ordonnances, il s'agit de rattraper le temps perdu ; mais la lecture des textes correspondants n'est pas toujours aisée, j'en conviens.
M. Michel Teston. - Le Parlement est souverain, la seule limite à l'application des lois qu'il vote est le contrôle par le Conseil constitutionnel. Même en l'absence des mesures d'application nécessaires, une loi reste applicable ! La notion de texte partiellement applicable me laisse perplexe.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous devons être toujours plus vigilants dans le contrôle du suivi des lois votées.
M. Roland Courteau. - L'article 55 de la loi sur l'économie numérique attend un décret d'application depuis six ans ! Il fait obligation au gouvernement de publier chaque année la liste des organismes sociaux que l'on doit pouvoir appeler au téléphone gratuitement. Les numéros surtaxés sont en effet pratiqués par les caisses d'allocation familiale ou par Pôle-Emploi : c'est un comble !
M. Pierre Hérisson. - La commission supérieure des communications électroniques et des postes donne un avis sur le budget alloué aux personnes qui bénéficient d'un forfait téléphonique délivré par les CCAS. Les crédits attribués à ce titre à France Télécom ont été sous-consommés. Il y a lieu d'examiner globalement le problème car le système, manifestement, n'a pas fonctionné.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Les textes d'application n'ont pas été publiés en raison du coût de la mesure si les personnes appellent depuis un téléphone portable. Un rapport de l'IGAS a ainsi recommandé l'abrogation (sic) de la disposition législative, ou au moins sa limitation à l'urgence sociale.
M. Pierre Hérisson. - Les crédits correspondants n'ont pas été consommés !
M. Paul Raoult. - C'est une cause déterminante du discrédit que nous manifestent les citoyens. Nous votons des textes puis leur entrée en vigueur est toujours repoussée. Nous passons pour des fantaisistes. On nous interpelle sans cesse sur l'application du Grenelle I et II ! Il y a là un problème de fond. Les parlementaires devraient être les chefs de file de la rédaction des décrets. Je siège à la fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) ainsi qu'à la fédération des parcs naturels régionaux : c'est à elles que sont transmis les projets de décrets et mon rôle là-bas semble plus important qu'ici où, comme parlementaires, nous ne savons pas ce que deviennent les textes que nous avons votés !
La qualité variable du travail des hauts fonctionnaires chargés de la rédaction est aussi en cause. Les jeunes énarques se font les dents sur des dossiers auxquels ils ne connaissent rien - heureusement que les fédérations sont là ! Sans compter les chamailleries dés que plusieurs ministères, ou deux au moins, sont concernés, écologie et urbanisme, par exemple. C'est un freinage extraordinaire !
Nommer des rapporteurs chargés de suivre le travail et si nécessaire d'aiguillonner les ministres est donc une excellente idée. D'autant que nous adoptons souvent les lois à la va-vite en nous contentant d'une rédaction un peu floue et en renvoyant lâchement à un décret. Nous laissons alors les hauts-fonctionnaires décider à notre place. Reprenons la main sur les décrets !
M. Jean-Paul Emorine, président. - Il est normal de consulter les fédérations, anormal de ne pas saisir les commissions parlementaires des projets de décret. A nos rapporteurs d'exploiter la semaine de contrôle et de convier si nécessaire le ministre compétent. Les renvois aux décrets sont légitimes, nous ne voulons pas rédiger des lois bavardes ; à nous d'être vigilants sur la rédaction des textes d'application.
M. Pierre Hérisson. - La loi est d'application générale, les décrets concernent les modalités pratiques. En Suisse, ceux-ci n'existent pas et c'est la loi qui dit tout, mais il faut quatre ans pour l'élaborer ! Je vous indique que la commission supérieure des communications électroniques et des postes, composée de sept députés et sept sénateurs, donne un avis sur tous les décrets d'application relatifs à ce secteur. C'est une sorte de CMP permanente ! Cet exemple de fonctionnement me semble intéressant...
La loi postale votée en février 2010 a élargi les compétences de l'Arcep ; un décret qui devait être publié avant le 31 mars ne l'a pas été, mettant en difficulté le président de l'Autorité. C'est que les ministères étaient en conflit sur la rédaction et que Matignon n'avait pas encore rendu d'arbitrage... A nous de dénoncer de tels dysfonctionnements.
M. Hervé Maurey. - La communication présentée par notre président est sans complaisance et utile. Je suis choqué que des textes votés par les représentants du peuple restent inappliqués. Admettons tout de même que nos lois sont souvent mal écrites, compliquant la tâche des rédacteurs des décrets et nous obligeant à voter ensuite des lois de simplification du droit.
Que les dispositions d'origine parlementaire soient moins mises en oeuvre que celles proposées par le gouvernement n'est pas le fruit du hasard. Nous prenons des initiatives auxquelles le gouvernement n'est pas forcément favorable... Quant aux rapports qui ne sont pas produits, c'est d'autant plus choquant qu'une promesse de rapport sert souvent à obtenir le retrait d'un amendement.
Comment mieux faire ? Suivi par les rapporteurs, auditions des ministres, débats en séance plénière pour dresser le bilan d'une année d'application : nous avons des moyens, soyons imaginatifs !
M. Jean-Paul Emorine, président. - Si un rapporteur constate un blocage, nous pouvons faire monter la pression en invitant le ministre, puis si nécessaire en organisant un débat public.
M. Jacques Muller. - Le consensus entre nous est manifeste. Nous ne pouvons pas accepter que les administrations procèdent à des arbitrages loin de nous. Mais les difficultés actuelles sont forcément liées à l'inflation législative, à la prolifération de lois à caractère essentiellement médiatique, comme celle sur les chiens dangereux, loi de circonstance qui n'est toujours pas appliquée.
M. Gérard Bailly. - Les décrets ou les circulaires sont parfois contraires à l'intention du législateur. Le commissaire qui sera chargé du suivi d'une loi devra s'assurer que l'esprit de nos dispositions est respecté dans la rédaction des textes d'application.
M. Jean-Paul Emorine, président. - La rédaction des décrets peut être habile et contourner trop souvent, par le biais de formules alambiquées, ce que nous avons voulu écrire. A nous d'y faire attention.
M. Daniel Raoul. - Il serait bon de disposer des décrets ou du moins de leurs grandes lignes en même temps que du texte sur lequel nous discutons en séance publique. Nous devrions en prendre connaissance avant le vote sur l'ensemble. L'inertie est la principale force de l'univers et en particulier de certaines administrations centrales. Il convient d'éviter trop d'écart entre la lettre et l'interprétation par les services déconcentrés, ou plutôt les interprétations, variables d'un département à l'autre, je songe à la loi SRU. C'est une très bonne idée que d'élargir les missions du rapporteur chargé du suivi. Inflation de textes dit M. Muller : inflation, aussi, de lois traitant de sujets réglementaires, comme la loi sur le contrôle technique des manèges. Il me semble, enfin, que des présentations sur l'état d'application des textes votés antérieurement seraient plus intéressantes que certains débats récemment tenus dans un hémicycle déserté...
M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous pourrions programmer des débats sur l'application des lois qui intéresseraient l'ensemble de nos collègues. J'ajoute que les rapporteurs désignés aujourd'hui appartiennent tous à la majorité. Un binôme pourrait être formé pour le suivi, avec un co-rapporteur choisi dans l'opposition. J'en présenterai l'idée au prochain Bureau. Le travail à deux est plus stimulant.
M. Daniel Raoul. - Cela pourra vous servir l'an prochain...(Rires)
M. Jean-Paul Emorine, président. - Dés maintenant, pour nous habituer !
M. Bruno Sido. - Lorsque je venais d'arriver au Sénat, j'ai présenté une proposition de loi sur l'itinérance locale qui a été votée à l'unanimité et qui ne nécessitait aucun texte d'application. Patatras : les députés ont ajouté un renvoi à un décret...
Sur la proposition de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit communautaire (DDAC) que nous allons examiner, je vous signale tout de même que le suivi serait une tâche à temps plein pour plusieurs personnes ! Nous légiférons trop et nos administrateurs corrigent nombre d'erreurs matérielles dans les projets du gouvernement : tout le monde est débordé !
M. Jean-Paul Emorine, président. - Globalement nous légiférons bien et nous apportons par voie d'amendement bien des corrections et inflexions aux textes examinés.
M. Gérard Bailly. - J'ai posé une question écrite au ministre de l'écologie sur la sauvegarde des barrages et moulins sur les rivières de France. J'ai reçu en réponse un réquisitoire contre ces ouvrages ! On m'oppose la protection des anguilles ! La réponse ne me semble pas conforme à ce que nous avions dit de la sauvegarde de la production hydroélectrique...
M. Jean-Paul Emorine, président. - Je me souviens parfaitement du débat sur l'effacement des barrages. Plus largement les lois dites Grenelle I et II font l'objet de diverses interprétations possibles. Et certaines associations ont au ministère une influence majeure... Nous avions pourtant cherché à atteindre un équilibre entre des préoccupations économiques, un souci de protection de l'environnement et la volonté de développer les nouvelles énergies.
M. Hervé Maurey. - Les réponses à nos questions écrites sont souvent scandaleuses, un phénoménal exercice de langue de bois. Quand nous attirons l'attention sur un problème réel, on nous décrit par le menu le dispositif, comme si nous ne le connaissions pas. On pourrait dire la même chose des questions orales du mardi et des questions d'actualité au gouvernement.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Les lois Grenelle ont requis quatre rapporteurs et elles bouleversent toute l'activité économique, il faut y être très attentifs. Je vous adresserai copie du rapport, plus détaillé que mon exposé. Ainsi la question de l'article 55 de la loi sur l'économie numérique sera-t-elle résolue dans la proposition de loi de simplification du droit.
La commission adopte la liste des commissaires chargés d'assurer le suivi de l'application des lois promulguées au cours de l'année parlementaire 2009-2010.
Adaptation de la législation au droit communautaire - Examen du rapport et du texte de la commission
La commission procède ensuite à l'examen du rapport et du texte proposé par la commission sur la proposition de loi n° 693 (2009-2010) de MM. Gérard Longuet, Jean Bizet et Jean-Paul Emorine, portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit communautaire.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous sommes très gravement en retard dans la transposition de certaines directives. C'est ce qui motive la proposition de loi que nous allons examiner. Le Gouvernement a souhaité présenter à cette occasion des demandes d'habilitation à procéder à des transpositions par voie d'ordonnance. Nous avons suggéré qu'il le fasse par amendements à examiner en séance publique, et Mme la ministre Valérie Létard nous en présentera le contenu dès ce matin.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Le 6 septembre dernier, MM. Gérard Longuet, Jean Bizet et Jean-Paul Emorine déposaient au Sénat une proposition de loi « portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit communautaire » (DDAC). M. Hubert Haenel relevait déjà, en 2002, dans un rapport d'information consacré à l'amélioration des procédures de transposition des directives communautaires que « les projets de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire permettent d'assurer, à l'occasion d'une même procédure parlementaire, la transposition de plusieurs directives, tout en respectant les droits du Parlement notamment le droit d'amendement ». Il serait aujourd'hui satisfait de constater que le Parlement se préoccupe de la question au point d'être à l'initiative d'une proposition de loi en la matière.
Les huit articles traitent de sujets variés : environnement et climat, professions et activités réglementées, ou encore transports. Dans tous les cas il s'agit de répondre à des retards de transposition de directives. Or ces retards ne sont pas sans conséquences pour notre pays : ils fragilisent sa position dans les négociations communautaires et dans les institutions de l'Union en général ; ils le placent dans une situation délicate au regard des procédures contentieuses qui peuvent être déclenchées, avec le risque d'amendes forfaitaires d'un montant minimum de 10 millions d'euros et d'astreintes journalières comprises entre 13 000 et 785 000 euros par jour de retard, alors que la situation de nos finances publiques est déjà dégradée. De tels retards sont aussi vecteurs d'une forte insécurité juridique, la jurisprudence développée par la Cour de justice de l'Union européenne reconnaissant aux citoyens la possibilité d'attaquer un État pour déficit de transposition ; ils constituent une atteinte à l'esprit communautaire, car la construction européenne repose sur la confiance mutuelle entre les États membres qui ont la responsabilité de la bonne application du droit de l'Union ; ils sont un mauvais signal à l'adresse des pays candidats ou des récents adhérents, à qui l'on a demandé tant d'efforts. Les débats lors de la révision constitutionnelle de 2008 ont, du reste, montré le profond malaise que suscite la tentative de régler le problème en recourant aux ordonnances.
Dès lors, faut-il se satisfaire de voir les parlementaires se saisir de cette question de la transposition des normes communautaire ? Mon sentiment est nuancé. Je me félicite de constater que nos collègues se soucient du respect du droit communautaire, de l'image de la France auprès de ses partenaires et de nos finances publiques. Mais l'initiative parlementaire doit-elle se substituer au Gouvernement en matière de transposition de directives ?
A ce jour, aucun vecteur législatif adéquat n'a été identifié pour adapter notre législation aux dispositions communautaires contenues dans cette proposition de loi. La loi portant engagement national en faveur de l'environnement n'aurait convenu que pour les dispositions à caractère environnemental. Cette proposition de loi apparaît donc comme une option répondant à une nécessité conjoncturelle.
L'article 1er transpose la directive dite « INSPIRE » visant à établir une infrastructure d'information géographique dans l'Union européenne en demandant aux autorités publiques des États membres de mettre en réseau leurs données et de les rendre accessibles au public par voie électronique. L'échéance de transposition était fixée au 15 mai 2009 ; nous avons fait l'objet d'une procédure d'infraction précontentieuse qui a donné lieu à un avis motivé adressé aux autorités françaises le 20 novembre 2009 et une décision de saisine de la Cour de justice le 2 juin 2010. N'attendons pas une condamnation pécuniaire pour réagir.
L'article 2 adapte la législation nationale au Protocole de Kyoto et au règlement du 21 décembre 2004 concernant un système de registres normalisé et sécurisé des permis d'émission. Il s'agit de sécuriser, dans le droit français, la conduite d'opérations portant sur les unités de réduction des émissions dans le cadre des mécanismes d'échange de quotas au niveau international.
Les articles 3, 4 et 5 portent transposition de certains points de la directive « Services » du 12 décembre 2006. L'échéance de transposition était fixée au 28 décembre 2009. L'article 3 adapte le statut des géomètres-experts, l'article 4 concerne la délivrance de l'agrément d'exploitation d'un établissement d'enseignement de la conduite, l'article 5 est relatif à l'exercice de la profession d'expert automobile. Une procédure précontentieuse a été ouverte fin janvier 2010 et un avis motivé adressé aux autorités françaises en juin. A défaut d'une transposition complète de la directive, la prochaine étape sera en toute logique une saisine de la Cour de justice en vue d'une condamnation en manquement.
L'article 6 transpose certaines dispositions de la directive « Classification, étiquetage et emballage des substances et mélanges » du 16 décembre 2008 dont l'échéance de transposition était fixée au 1er avril 2010. Plusieurs adaptations du code de la santé publique sont nécessaires. Une procédure précontentieuse a déjà été ouverte par la Commission européenne et une mise en demeure a été adressée en mai dernier, à laquelle les autorités françaises ont répondu le 10 août. Néanmoins, la transposition complète de la directive nécessite l'adoption de mesures législatives complémentaires. En l'absence de celles-ci, la procédure ouverte ne pourra donc être close et la France s'exposera à une condamnation pécuniaire.
L'article 7 impose des règles nouvelles en matière de sécurité pour les routes d'importance européenne existantes et instaure une évaluation pour les nouvelles. Il fixe en outre les conditions générales pour accéder à la profession d'auditeur de sécurité routière. La transposition doit avoir lieu avant le 19 décembre 2010. Ces nouvelles procédures de sécurité routière ne concernent que l'État et en aucun cas les collectivités territoriales. Cette directive a pour principale conséquence d'introduire dans notre pays l'évaluation en matière de sécurité routière pour les nouveaux projets de routes relevant de la compétence de l'État.
Quant à l'article 8, il donne compétence aux agents de la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes pour rechercher et constater les infractions ou manquements à l'obligation d'information préalable au voyage, qui incombe aux entreprises ferroviaires et aux vendeurs de billets. Le règlement communautaire est entré en vigueur en décembre 2009. Seuls sont concernés pour l'instant les trajets internationaux de voyageurs. Les trajets intérieurs bénéficient d'une dérogation de 5 à 15 ans, introduite lors de l'examen de la loi d'organisation et de régulation des transports ferroviaires, dite loi ORTF, du 9 décembre 2009, parce que la réglementation française est plus protectrice que le droit communautaire en la matière.
Nous avons privilégié la cohérence normative car, phénomène inédit tenant à l'urgence à transposer les directives concernées, de nombreuses dispositions de ce texte figurent également dans d'autres véhicules législatifs. Certaines se trouvent à la fois dans la présente proposition de loi, la proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann de simplification et d'amélioration de la qualité du droit et dans l'ordonnance du 21 octobre 2010 « portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'environnement », prise sur le fondement de l'article 256 de la loi portant engagement national pour l'environnement. Nous avions, en effet, habilité alors le Gouvernement à prendre par ordonnance toutes mesures pour adapter le code de l'environnement au droit communautaire. Je vous proposerai donc de supprimer les doublons ou d'assurer la convergence avec ce que nous avons déjà adopté dans le cadre de la proposition de loi de simplification du droit. Je vous proposerai aussi, sous réserve de corrections rédactionnelles, de ratifier l'ordonnance « DDAC » du 21 octobre 2010 en matière d'environnement, afin de donner force de loi à ses dispositions. Il convient aussi de supprimer, par cohérence, les deux premiers articles de la présente proposition, qui font doublon avec les articles 1er et 10 de l'ordonnance.
Il faut aussi assurer la convergence avec la proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann en apportant les mêmes modifications aux articles 3 et 5 qu'aux articles 10 et 38 de cette proposition de loi, relatifs respectivement au personnel navigant de l'aviation civile et aux procédures de lutte contre les incendies d'aéronefs. Je serai par ailleurs favorable à un amendement du Gouvernement visant à transposer la directive du 23 avril 2009 relative à la promotion de véhicules de transport routier plus économes en énergie, qui impose des critères énergétiques et environnementaux, celle-ci devant être transposée avant le 4 décembre 2010.
C'est finalement un texte juridiquement cohérent dont je vous proposerai l'adoption, sous réserve des modifications que je viens de vous présenter.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État auprès du ministre de l'écologie. - Merci de votre invitation, puisqu'il n'est pas dans les habitudes qu'un ministre assiste à l'examen du rapport sur une proposition de loi. Les délais sont serrés, nous sommes plutôt dans une session de rattrapage. Le Gouvernement soutiendra toutes les propositions de votre rapporteur.
M. Hervé Maurey. - Je suis rapporteur de la proposition de loi Warsmann. Je remercie M. Sido pour la qualité de son rapport. Quand le texte de simplification du droit sera-t-il inscrit à l'ordre du jour de nos travaux ? Compte tenu de ces incertitudes, cela ne me pose aucun problème que certaines dispositions en soient reprises ici. Nous sommes déjà très en retard. On ne peut que regretter la transposition par petits bouts mais à présent que le processus est commencé, quel moyen de changer ?
M. Daniel Raoul. - Cette proposition de loi n'est pas le fruit du hasard, pas plus que la présence de Mme la ministre...
Certaines dispositions qui figuraient dans la proposition Warsmann réapparaissent ici, mais avec des distorsions et non à l'identique. Quelle est la meilleure version ?
Enfin, je voudrais que l'on invoque d'autres arguments que les amendes pour justifier le recours aux ordonnances. Il y a aussi l'urgence, mais sur ce plan, on a quelque difficulté à se repérer, dans cette affaire de ping-pong entre la proposition de loi Warsmann et le présent texte.
M. Jean-Paul Emorine, président. - La proposition Warsmann viendra à son terme dans l'année qui vient, puisque nous ne l'examinons pas en urgence. Le Sénat l'examinera avant la suspension de décembre ou courant 2011.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Le respect du calendrier européen n'est pas assuré si nous inscrivons les dispositions de transposition dans la proposition Warsmann. Sur l'article 3, je précise à M. Raoul que l'amendement de M. Sido rétablit une parfaite conformité de rédaction par rapport à la proposition de simplification du droit.
EXAMEN DES ARTICLES
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'amendement n° 8 tend à ratifier l'ordonnance de transposition de dispositions relatives à l'environnement et à corriger une erreur matérielle.
M. Daniel Raoul. - Nous nous abstiendrons par principe sur toute demande de ratification d'ordonnance.
L'amendement n° 8 est adopté et devient un article additionnel.
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'amendement n° 5 est un amendement de cohérence.
L'amendement n° 5 est adopté.
L'article 1er est en conséquence supprimé.
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'amendement n° 6 est un amendement de cohérence.
L'amendement n° 6 est adopté.
L'article 2 est en conséquence supprimé.
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'amendement n° 7 tend notamment à aligner la rédaction sur l'article 85 de la proposition de loi Warsmann tel que modifié par la commission et à mettre en oeuvre la réforme du « diplômé par le Gouvernement ».
L'amendement n° 7 est adopté.
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
L'article 4 est adopté sans modification.
M. Bruno Sido, rapporteur. - La procédure actuelle d'accès à la profession d'expert en automobile pose un problème d'efficacité et de sécurité juridique. L'article simplifie le système en donnant des compétences accrues à la mission expertise en automobile (Miexa). Mais toute mention de la commission nationale des experts automobile disparaît du code de la route. Notre amendement n° 2, que j'ai du reste modifié pour remplacer « consommateurs » par « associations d'usagers », tend à rétablir la commission dans son rôle consultatif en matière disciplinaire.
M. Daniel Raoul. - Je ne saisis pas la subtilité de la rectification. Les usagers des experts automobiles comprennent-ils les experts en assurance ?
M. Bruno Sido, rapporteur. - Relisez l'amendement, ils sont bien mentionnés.
L'amendement n° 2 est adopté.
L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Les articles 6, 7 et 8 sont adoptés sans modification.
Articles additionnels
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - L'amendement n° 1 du Gouvernement concerne la transposition de la directive de 2009 relative à la promotion des véhicules de transport routier propres et économes en énergie. Il s'agit de faire prendre conscience aux autorités adjudicatrices et aux délégataires d'un service public de transport de l'importance de cette question. La directive impose que des critères énergétiques et environnementaux soient pris en compte, mais elle laisse le choix entre diverses modalités d'application. Il s'agit surtout de sensibiliser les décideurs.
M. Bruno Sido, rapporteur. - La transposition doit intervenir avant le 4 décembre. La directive laisse le choix entre la définition de spécifications techniques précises imposées, des critères de choix, une intégration dans le critère de prix via l'affectation d'un nombre de points, traduits en valeur monétaire. Les modalités sont laissées à la liberté des autorités adjudicatrices. Avis favorable.
M. Daniel Raoul. - Le deuxième alinéa mentionne un arrêté conjoint de deux ministres : dans quel délai sera-t-il élaboré ? Vous auriez pu faire l'économie de ce renvoi à un arrêté, nous aurions gagné du temps !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Pas du tout puisque l'arrêté est prêt - je l'ai adressé en octobre à la commission consultative d'évaluation des normes.
M. Roland Ries. - Je m'exprime ici comme président d'une société d'économie mixte de transport de voyageurs. Je m'étonne de l'amendement du Gouvernement qui vide la directive de sa substance. « Sensibilisation », dit la ministre : mais une directive vise un objectif plus contraignant, elle donne des orientations, destinées à s'appliquer ! Certes, il risque d'en résulter une charge supplémentaire pour les acheteurs mais la puissance publique doit se donner les moyens d'inciter les délégataires d'une mission de transport public à acheter des véhicules moins polluants !
M. Didier Guillaume. - Ne nous ajoutez pas des contraintes...
M. Pierre Hérisson. - Mais si, il le faut !
M. Didier Guillaume. - Une réforme du code des marchés publics est nécessaire, elle a du reste été évoquée par le Président de la République. Pourquoi, dans le Grenelle de l'environnement, le Gouvernement a-t-il rejeté nos propositions tendant à introduire le critère environnemental dans toutes les procédures de marchés publics ? Il faut que nous puissions acheter des produits agricoles locaux.
M. Jean-Paul Emorine, président. - M. Le Maire en a parlé pour les produits alimentaires. Sans réforme du code des marchés publics, tout cela risque cependant de rester lettre morte.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Le code des marchés publics est de nature réglementaire.
Quant à l'arrêté, j'ai le projet en main, je le tiens à votre disposition, il est extrêmement technique.
M. Didier Guillaume. - Alors on ne fait rien ? Rien ne nous empêche d'indiquer dans la loi notre volonté de favoriser la production locale, vertueuse, les circuits courts.
M. Bruno Sido, rapporteur. - Pas d'injonction au Gouvernement ! Je partage votre point de vue mais on ne peut pas, non plus, intervenir en matière réglementaire.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous partageons tous cette préoccupation mais je suis certain que Mme la ministre a bien compris que nous jugeons nécessaire une réforme du code des marchés publics pour recourir aux produits de proximité.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - J'ai bien entendu.
Je précise que l'amendement est conforme à la directive, qui se veut souple, elle ne vise pas à imposer, mais elle autorise aussi un fort durcissement des règles et des sanctions pour encourager les achats vertueux. L'État veut se montrer exemplaire. Mais il respecte la libre administration des collectivités.
L'amendement n° 1 est adopté et devient un article additionnel.
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'amendement n° 3 reprend le contenu de l'article 10 de la proposition de loi de simplification du droit, concernant le personnel navigant de l'aviation civile. C'est qu'il y a urgence à transposer.
L'amendement n° 3 est adopté et devient un article additionnel.
M. Bruno Sido, rapporteur. - L'amendement n° 4 rectifié reprend l'article 38 de la même proposition : il s'agit cette fois des missions de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs.
L'amendement n° 4 rectifié est adopté et devient un article additionnel.
L'ensemble de la proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Présentation par le Gouvernement de demandes d'habilitation
M. Jean-Paul Emorine, président. - Le Gouvernement nous présente aujourd'hui les amendements qu'il défendra en séance publique en vue d'être habilité à prendre par ordonnance les dispositions relatives à la transposition d'une série de directives ainsi que les mesures d'adaptation de la législation correspondantes.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Premièrement, le paquet énergie climat.
La France se doit d'être exemplaire dans la transposition du paquet climat énergie, qu'elle a fortement défendue en décembre 2008 alors qu'elle assurait la présidence de l'Union européenne. Une transposition de la directive dans les meilleurs délais s'impose ! L'énergie produite à partir des biocarburants et autres biocombustibles sera prise en considération dans le décompte des objectifs nationaux sur les énergies renouvelables et sera éligible à une aide financière uniquement si les biocarburants et bioliquides répondent à certains critères - qui s'appliqueront à tous les biocarburants consommés en France, qu'ils soient produits ou non sur le territoire national.
Pour éviter les distorsions de concurrence, les règles d'allocation des quotas gratuits sont fixées au niveau communautaire. Les plans nationaux d'allocation de quotas n'ont plus lieu d'être. En particulier, il ne sera plus délivré de quotas gratuits aux producteurs d'électricité. Afin de se conformer à ces obligations, la France doit insérer dans le code de l'environnement une définition du producteur d'électricité au sens de la directive, supprimer les articles du code relatifs au plan national d'allocation de quotas d'émissions et préciser les dispositions applicables aux allocations de quotas gratuits.
Les fournisseurs de carburant doivent déclarer les émissions de gaz à effet de serre des carburants ou de l'énergie fournis sur l'ensemble du cycle de vie. Et ils doivent réduire progressivement ces émissions de gaz à effet de serre, à hauteur de 10 % par unité d'énergie, le 31 décembre 2020 au plus tard.
Deuxièmement, le marché intérieur de l'énergie.
La demande de transposition par ordonnance porte sur deux directives adoptées en juillet 2009, l'une relative à l'électricité, l'autre au gaz naturel. Elles forment le « troisième paquet énergétique ». Lors de la négociation de ces textes, le Gouvernement français a réussi à imposer la préservation du modèle des entreprises intégrées du secteur de l'énergie, à l'instar de ce qui avait été obtenu pour l'entreprise de transport d'électricité, RTE. Trois groupes français sont principalement concernés, EDF, GDF Suez et Total, ainsi que leurs filiales de transport d'électricité et de gaz, RTE, GRT-Gaz et TIGF. Le choix de cette option doit être effectué au plus tard avant mars 2011, date d'entrée en vigueur des directives. Tout retard exposerait les groupes français à des sanctions européennes. Depuis le premier débat sur le projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, les travaux ont bien progressé. Le Gouvernement a mené une concertation étroite avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE) et les trois groupes industriels. La transposition se fera au plus près des directives : les règles de déontologie, qui s'appliquent à un très petit nombre de salariés et d'administrateurs, préserveront autant que possible la mobilité et les compétences au sein de ces groupes ; les droits et statut des autres employés de ces groupes ne seront aucunement modifiés. L'indépendance des filiales de transport sera étroitement surveillée par le régulateur. Les gestionnaires des réseaux de transport de gaz et d'électricité devront disposer des moyens techniques, humains et financiers pour développer leurs sociétés et notamment élaborer des plans ou schémas de développement de leurs réseaux, soumis au régulateur, procédures qui existent déjà. La CRE pourra éventuellement imposer des investissements sur les réseaux en cas de carence des gestionnaires et recourir à des appels d'offre : sur ce point, le secteur du gaz se rapprochera de celui de l'électricité.
Les compétences de la CRE seront renforcées en matière de tarifs d'utilisation des réseaux et des installations. Mais le Gouvernement conservera un rôle important, il sera consulté tout au long du processus d'élaboration des tarifs et pourra demander au régulateur une nouvelle délibération. Bref, le partage des rôles ne sera guère modifié.
Troisièmement, la sûreté aérienne.
Le nouveau règlement cadre européen est entré en vigueur le 30 avril 2010. L'adaptation est donc urgente, elle conduira du reste à une simplification des exigences imposées aux opérateurs, tout en maintenant un haut niveau de sûreté. La France avait subi dans les années quatre-vingt dix des actes terroristes qui l'avaient conduite à mettre en place des mesures strictes. Nous avons aujourd'hui l'occasion d'apporter une simplification largement souhaitée par l'ensemble des acteurs : par exemple, les agréments plus contraignants imposés par la France ont pénalisé l'industrie française par rapport à ses concurrents européens. Sans brader la sûreté, qui demeure une priorité, un toilettage s'impose dans la crise que traverse le transport aérien.
Quatrièmement, la classification des substances.
Le règlement de décembre 2008 relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges, dit règlement « CLP », sera en vigueur le 1er décembre 2010 pour la partie substances et le 1er juin 2015 pour les mélanges.
Entre ces deux dates, le nouveau règlement et les directives actuelles sont applicables conjointement. Le règlement CLP entraîne une abrogation progressive des directives relatives à la classification, l'étiquetage et l'emballage des substances et préparations dangereuses. Il convient d'harmoniser la terminologie, de conforter le régime de sanctions et de regrouper, au sein du code de la santé publique, tout ce qui concerne les produits chimiques et la toxicovigilance.
Cinquièmement, le paquet maritime.
La France a été particulièrement active dans la négociation du paquet Erika III. Or la transposition doit être opérée avant le 30 novembre 2010. Le droit de l'Union européenne s'adosse, en matière de sécurité maritime, aux conventions internationales prises sous l'égide de l'Organisation maritime internationale et de l'Organisation internationale du travail, qui, elles aussi, évoluent. La législation française doit se mettre au diapason de la directive comme du droit international. A Genève en juin dernier, le Président de la République a du reste promis une transposition rapide.
Sixièmement, les redevances aéroportuaires.
La directive relative aux redevances aéroportuaires doit être transposée avant le 15 mars 2011. Elle établit des principes communs pour la perception de redevances aéroportuaires dans les aéroports communautaires.
Enfin, les produits cosmétiques.
Voilà les amendements que je défendrai en séance publique. La transposition est un travail complexe, lourd, mais essentiel afin que la voix de la France continue à porter dans les enceintes internationales. Or pour mener à bien cette tâche, nous avons besoin du Sénat.
M. Daniel Raoul. - Qu'apporte la transposition par rapport au dernier texte que nous avons adopté sur l'électricité ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Il s'agissait d'organisation du marché, ici nous traitons d'organisation interne des groupes.
M. Roland Ries. - S'agissant de la directive redevances aéroportuaires, pourrez-vous m'apporter des précisions sur la notion de « réseau aéroportuaire », notamment en zone frontalière ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. - Je vous transmettrai ces informations pour Bâle-Mulhouse.
M. Roland Ries. - Et surtout Baden !
Loi de finances pour 2011 - Mission Outre-mer - Examen du rapport pour avis
Au cours d'une deuxième réunion tenue dans l'après-midi, la commission procède à l'examen du rapport pour avis de M. Claude Lise sur les crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2011.
M. Claude Lise, rapporteur pour avis. - Je me réjouis de vous présenter, cette année encore, les crédits de la mission « Outre-mer » inscrits au PLF 2011.
Les outre-mer ont été confrontés début 2009 à une crise sociale d'une ampleur sans précédent. Le Gouvernement a procédé à de nombreuses annonces dans la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM) de mai 2009 puis, le 6 novembre, à l'occasion du premier conseil interministériel de l'outre-mer (CIOM). Au vu des promesses qui ont été faites, le projet de budget est décevant.
Commençons par le bilan de la LODEOM. Si 17 décrets d'application ont été publiés, certains ne l'ont été que plus d'un an après le vote d'une loi présentée en urgence. Plusieurs dispositions centrales restent inapplicables au bout de 18 mois, faute de mesures d'application : l'aide au fret, qui devait compenser les surcoûts liés à l'éloignement de l'hexagone, la création du groupement d'intérêt public (GIP) chargé de reconstituer les titres de propriété des biens fonciers et immobiliers qui en sont dépourvus, ou encore le fonds de continuité territoriale. Enfin, quelques textes d'application posent problème, ainsi que l'ont souligné MM. Bartolone et Yanno dans leur rapport sur l'application de la LODEOM : le décret de 2009 sur le dispositif d'exonération des charges sociales est par exemple flou.
Le CIOM, ensuite, a annoncé 137 mesures, dont le bilan est mitigé. Si je salue notamment la création des groupements d'intervention régionaux (GIR) - concurrence, beaucoup de ces mesures, notamment dans le domaine de l'agriculture, font l'objet de missions ministérielles.
Qu'il s'agisse de la LODEOM ou du CIOM, les résultats des nombreuses annonces tardent donc à se concrétiser.
Les crédits de la mission « Outre-mer » diminuent de 0,5 % en autorisations d'engagement (AE) et de 2,3 % en crédits de paiement (CP). Les outre-mer participent à la politique de rigueur, ce qui est tout à fait normal. Cependant, en équité, il faudrait tenir compte de leur « mal-développement ».
Le programme 138, « Emploi outre-mer » voit ses crédits augmenter de 3 % en AE et de 2,2 % en CP sous l'effet de la montée en puissance du service militaire adapté (SMA). 80 % de ces crédits vont au remboursement des exonérations de charges sociales spécifiques à l'outre-mer. Or les crédits inscrits ne couvriront pas l'ensemble des besoins : la dette de l'État envers les organismes de sécurité sociale augmentera donc ensuite. Si les crédits du SMA progressent de 60 millions en AE et de 50 millions en CP, je crains que le doublement des effectifs ne se réalise au détriment de la qualité de la formation dispensée.
Les AE du programme « Conditions de vie outre-mer » diminuent de 6 % et les CP de 10,4 %. Certes le niveau de la ligne budget unique (LBU) est maintenu en AE, mais les CP accusent un recul de 10 % et même 34 % pour le logement social. Certaines mesures annoncées lors du CIOM ne sont pas effectives ; il en est ainsi de l'assouplissement des obligations de participation ou de garantie des collectivités territoriales dans les opérations de construction de logement social, ce qui freine cette dernière. Il serait en outre bon que les annonces faites au niveau national prennent en compte les réalités ultramarines, ce qui n'est pas le cas du nouveau prêt à taux zéro (PTZ), le PTZ+, prévu par l'article 56 du projet de loi de finances.
La LODEOM visait à un changement de logique ; il s'agissait de passer à un développement endogène, en mettant en place les outils permettant aux outre-mer de rattraper leurs retards et de mettre en avant leurs atouts. On se trouve aujourd'hui dans une logique de « mal-développement » endogène. La défiscalisation en matière de logement social instituée par la LODEOM est actuellement totalement inefficace ; la réforme de la défiscalisation a nui au dynamisme du secteur du BTP ; les procédures d'agrément apparaissent complexes ; le cumul de crédits LBU et de la défiscalisation, indispensable à l'équilibre de nombreuses opérations, donne lieu à des interprétations contradictoires. En conséquence, le dispositif de défiscalisation en matière de logement social n'a permis de construire aucun logement social à ce jour et si 829 ont été agréés au 30 septembre dernier, ils ne sont pas encore sortis de terre.
L'aide à l'investissement outre-mer subit un coup de rabot de 10 % et l'avantage fiscal pour le photovoltaïque est supprimé. Le Gouvernement casse ainsi les outils qu'il avait proposés dans la LODEOM. Le photovoltaïque est particulièrement important - ne donne-t-on pas la Réunion en exemple ? La LODEOM prévoyait un arrêté permettant de limiter les dérives, il n'a pas été publié. Dès lors, le Gouvernement peut difficilement mettre en avant les abus. La suppression de cet avantage fiscal paraît dangereuse et l'amendement adopté à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, n'est pas de nature à nous rassurer : évaluer les effets de la suppression d'ici juin 2011 revient à couper la tête d'un malade en projetant une greffe six mois après... Mieux vaudrait prévoir un plafonnement avec un agrément au premier euro : beaucoup d'opérateurs sont d'ailleurs partisans d'un tel dispositif.
Pour toutes ces raisons, le budget de l'outre-mer n'est pas à la hauteur des défis. L'on peut comprendre qu'il faille participer à la réduction des déficits, mais il s'agit ici de tout un ensemble, et il ne m'est pas possible de proposer un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « outre-mer ».
M. Jean-Paul Emorine, président. - La réduction des déficits n'est pas un exercice aisé. Vous intégrez cette problématique, mais les crédits vous paraissent insuffisants.
M. Daniel Marsin. - Contrairement à mon intention initiale, je ne m'abstiendrai pas, je voterai le rapport. Si l'outre-mer doit participer à l'effort de réduction des déficits, il convient également de tenir compte de la situation réelle. On a étudié celle-ci à l'occasion de la LODEOM et du CIOM, mais le budget est incohérent avec les annonces et l'amertume est à la mesure des espoirs qu'elles avaient suscités. Voyez le photovoltaïque : le soleil est une richesse des outre-mer. Et l'on va supprimer l'avantage fiscal ? Il n'est pas sérieux de proposer la création d'une commission sur le photovoltaïque. Je partage l'avis de Claude Lise. On agit, et puis on crée une mission.
En Guadeloupe, nous avons 20 000 demandes de logement social en instance ; or pas un logement n'a été produit depuis un an car, si 7 000 sont en attente, Bercy bloque tout. J'interpellerai d'ailleurs le Gouvernement demain. Les opérateurs du bâtiment se sont réunis pour décider un blocage des aéroports. Nous allons vers une crise grave, 24 plans sociaux sont en cours. J'aimerais savoir quelle a été la consommation de la LBU en 2009 et 2010. J'aurais tendance à penser qu'elle est proche de zéro, d'où la baisse de 34 % des crédits de paiement. Tout cela remet en cause l'esprit de la LODEOM et conduit à une crise extrêmement grave. Je voterai pour le rapport, dont je soutiens les termes.
M. Roland Courteau. - On supprime la défiscalisation sur le photovoltaïque mais on construit à la Réunion des centrales à gaz qui bénéficient de la défiscalisation. Certes, il y a eu des abus de la part de certains groupes, comme EDF ; il n'y a aujourd'hui pas de plafond et je salue votre proposition d'en instituer un.
La suppression brutale de la défiscalisation ne signe-t-elle pas l'arrêt de mort de la filière photovoltaïque ? Certains chefs d'entreprises m'ont paru bien pessimistes, qu'en pensez-vous ?
M. Daniel Raoul. - Si l'on peut débattre du photovoltaïque quand on importe les panneaux de Chine et qu'il faut dresser un bilan carbone, les collectivités peuvent veiller, au moment de délivrer les permis de construire, à ce que la production d'eau chaude par l'énergie solaire soit prévue. Pourquoi les collectivités ultramarines n'utilisent-elles pas plus cette arme, dont l'on devrait aussi d'ailleurs se servir en métropole ? On aura compris que je plaide pour le solaire thermique.
Lorsque je rapportais ces crédits, l'on parlait déjà de sous-consommation de la LBU. Cependant, ce que vous avez dit de la non-construction m'interpelle : il y a un problème structurel. Pourquoi ce blocage et où se situe-t-il ? Nous devrions étudier cela.
M. Jean-Paul Emorine, président. - J'ai bien saisi la problématique du logement social, qui peut conduire à des situations tendues.
M. Claude Lise, rapporteur pour avis. - M. Marsin a parlé d'incohérence. Voilà le constat que font les élus d'outre-mer : si certains textes avaient par le passé permis des avancées ou suscité des espoirs, la LODEOM devait, tout en apportant des corrections, lancer une nouvelle logique. Les résultats, pourtant, restent assez décevants. On a attendu les décrets d'application plus d'un an et il en manque encore. Au fond, la baisse de 2,3 % des crédits de la mission n'est pas le problème et notre critique concerne l'ensemble de la politique outre-mer.
On nous dit que la LBU n'est pas consommée. En réalité, cela varie beaucoup selon les années et selon les territoires. La Martinique consomme bien ses crédits cette année. Cependant le foncier est rare et cher dans les îles ; il faut aider les collectivités mais on laisse les conseils généraux tout seuls. Nous demandons depuis des années qu'on assouplisse les règles en matière de participation du conseil général dans les opérations de construction de logement social. Les conseils généraux sont asphyxiés - je reviens du congrès de l'Assemblée des départements de France (ADF) où, pour la première fois, l'on a voté une motion à l'unanimité. Mon département fait beaucoup pour le logement, mais on ne peut lui demander de maintenir indéfiniment ce niveau d'effort. Il faudrait d'ailleurs mettre plus sur la réhabilitation. Sur la LBU et la politique du logement outre-mer en général, je vous renvoie au travail de notre ancien collègue Henri Torre, dont les excellents rapports sont toujours d'actualité.
La Réunion est très en avance sur la métropole en matière d'équipement des ménages en chauffe-eaux solaires. Nous essayons d'aller dans ce sens, d'où notre déception devant une mesure qui menace 1 200 entreprises : 90 % des entreprises qui s'occupent de photovoltaïque sont condamnées, seules tiendront celles qui se sont diversifiées. On va tuer un secteur d'avenir qui nous aurait permis de coopérer avec notre environnement.
M. Daniel Marsin. - Nous utilisons le permis de construire de manière règlementaire ; la règlementation thermique et acoustique (RTA-DSM) oblige les constructeurs à prévoir dans les programmes des dispositifs qui entrainent un surcoût de 13 %.
La LBU diminue parce qu'elle n'est pas utilisée.
M. Daniel Raoul. - Pourquoi ?
M. Daniel Marsin. - Parce que, par exemple, la Société immobilière de la Guadeloupe attend l'agrément pour des programmes qui totalisent 2 600 logements et que Bercy bloque les dossiers jusqu'à décourager les constructeurs d'en monter d'autres tant qu'ils ne connaîtront pas la règle du jeu. Finalement, il y a une cohérence dans tout cela : comme les crédits ne sont pas consommés, on diminue la ligne... La procédure de mise en oeuvre de la loi est totalement opaque. Les opérateurs ne demandent pas tant une règle favorable qu'une règle simple. Ce n'est pas être extrémiste que de constater que la Guadeloupe et la Martinique vont vers une crise extrêmement grave. La situation est intenable, et ce n'est pas la circulaire de la Délégation générale à l'outre-mer (DéGéOM) en date du 1er juin 2010 qui va arranger les choses : elle interprète la LODEOM de manière à rendre impossible l'utilisation de la LBU.
M. Claude Lise, rapporteur pour avis. - Je n'avais pas évoqué le cumul de crédits LBU et de la défiscalisation. Au moment du vote de la LODEOM, l'idée était que la défiscalisation devait permettre de faire plus de logement social, mais on en fait maintenant une interprétation qui finit par empêcher la consommation de la LBU parce que beaucoup d'opérations ont besoin des deux dispositifs.
La situation est inquiétante. Il y a eu des embellies par le passé, par exemple avec la loi d'orientation pour l'outre-mer de 2000 ou avec la « loi Girardin », mais la crise est survenue et, en Martinique, 61 % des moins de 25 ans sont aujourd'hui au chômage - on ne comprend pas comment cela n'a pas encore explosé. Les collectivités, qui jouent un rôle d'amortisseur, se sentent impuissantes. On ne se rend pas bien compte de notre situation. Nous ne demandons pas une politique de développement pour l'outre-mer mais une politique de développement de la France dans notre zone. Nous pourrions alors tirer notre épingle du jeu. La Chine, le Japon, l'Allemagne...
M. Daniel Marsin. - Le Canada...
M. Claude Lise, rapporteur pour avis. - ...ont une politique de développement, mais pas la France qui le pourrait historiquement. Nous sommes dans la France, qu'elle se développe chez nous, à moins qu'elle ne souhaite se replier sur la métropole.
M. Gérard César. - Ce n'est pas le cas.
M. Claude Lise, rapporteur pour avis. - On va économiser 230 millions sur le photovoltaïque, mais combien en RMI, en chômage et en dépenses sociales cela va-t-il coûter ? Je ne suis pas persuadé que le calcul de Bercy soit juste. Si l'on décloisonnait les ministères, ils auraient une vision globale. Car ce n'est pas tant le budget que la politique qui est en cause.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Nous pouvons relayer la problématique de la mise en oeuvre de la LODEOM, surtout en matière de logement et en raison d'une situation sociale explosive. Nous comprenons néanmoins la problématique budgétaire. Vous ne proposez pas de donner un avis favorable à ces crédits. Je vais consulter la commission.
La commission émet un avis favorable aux crédits de la mission.
M. Jean-Paul Emorine, président. - Il nous faudra interroger M. Apparu et Mme Penchard sur la problématique du logement social outre-mer.
Organisme extraparlementaire - Désignation de membres
La commission propose ensuite deux candidats appelés à représenter le Sénat au Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire :
M. Jean Boyer en tant que titulaire ;
M. Marc Daunis, en qualité de suppléant.
Loi de finances pour 2011 - Nomination de rapporteurs pour avis
M. Bruno Sido est nommé rapporteur pour avis pour le compte spécial Engagement en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique.
M. Jean-François Mayet est nommé rapporteur pour avis sur l'article 56 du projet de loi de finances, sur les aides à la primo-accession à la propriété de la résidence principale.
- Présidence commune de MM. Jean-Paul Emorine, président, Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, et de MM. Jean Bizet et Pierre Lequillier, présidents respectivement de la commission des affaires européennes du Sénat et de l'Assemblée nationale -
Avenir de la politique agricole commune - Échange de vues avec les membres français du Parlement européen
La commission a rencontré, conjointement avec la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale et les commissions des affaires européennes du Sénat et de l'Assemblée nationale, les membres français du Parlement européen sur l'avenir de la politique agricole commune.
M. Pierre Lequiller, président de la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale. - Tout d'abord un grand merci, en mon nom et en celui du Président Patrick Ollier, d'être venus aujourd'hui à cette réunion conjointe des commissions des affaires européennes de l'Assemblée et du Sénat, avec les membres français du Parlement européen, et élargie aujourd'hui, compte tenu du sujet à l'ordre du jour, l'avenir de la PAC, aux commissions des affaires économiques, de l'Assemblée et du Sénat. Il s'agit de la quatrième réunion de ce genre, tenue à l'occasion des semaines de circonscription du Parlement européen. Sur le fond, nous avons, depuis le 16 février, traité de la stratégie UE 2020, de la proposition de directive relative aux fonds alternatifs, avec en particulier M. Jean Paul Gauzes, de la mise en oeuvre du Paquet Télécom et de l'agenda numérique européen avec, notamment, Mme Catherine Trautman.
Nous avons souhaité ne traiter aujourd'hui qu'un seul sujet. En fin de réunion nous pourrons cependant aborder, si vous le souhaitez, divers points d'actualité et échanger sur la suite de nos travaux.
Je salue la présence parmi nous de notre collègue Mme Monika Panayotova, Présidente de la Commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale de Bulgarie, qui est en France au titre du programme « des personnalités d'avenir » et qui vient de tenir une réunion avec nos collègues du Sénat.
S'il est un sujet sur lequel il était particulièrement important que nous travaillions ensemble en amont, parlementaires nationaux et parlementaires européens, afin de contribuer positivement à la dynamique de la négociation, c'est bien la politique agricole commune. En effet, la Commission européenne présentera en juillet ses propositions législatives et les dispositions du traité de Lisbonne relatives à la codécision trouveront pour la première fois à s'appliquer. La Commission européenne devra compter avec un Parlement européen pleinement colégislateur.
Au moment où s'engagent les négociations sur le prochain cadre financier européen pour 2014-2020, notre travail commun ne sera pas de trop pour défendre une politique agricole forte et compétitive, indispensable pour défendre notre autonomie alimentaire, un développement équilibré de nos territoires et une gestion durable des ressources naturelles.
Nos échanges devraient permettre de cibler les éléments du débat que les parlementaires nationaux souhaiteraient voir mieux relayés au Parlement européen, mais aussi les points sur lesquels les parlementaires européens comptent sur un soutien des parlements nationaux. Je donne la parole au Président Jean Bizet avec lequel nous avons maintenant la tradition de tenir conjointement ces réunions.
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes du Sénat, co-président du groupe de travail du Sénat sur la PAC. - Je voudrais remercier le Président Pierre Lequiller d'avoir organisé cette réunion et saluer également Mme Monika Panayotova qui manie admirablement notre langue et appréhende très bien les sujets européens, comme j'ai pu le constater lors de la réunion de travail à laquelle elle a participé au Sénat.
En mon nom et en celui du Président Jean-Paul Emorine, je voudrais souligner que la PAC est à la veille d'une réforme profonde ; aussi la présente réunion est importante à double titre. Elle est d'abord la reconnaissance du nouveau rôle du Parlement européen dans les affaires agricoles dans la mesure où le traité de Lisbonne a sensiblement renforcé ses compétences. Certains ont même pu avoir des appréhensions à ce sujet. Si l'on savait que le Conseil et les Etats étaient globalement conscients de l'importance de la PAC, on pouvait avoir des doutes sur l'intérêt des parlementaires européens. Or l'activité de la commission de l'agriculture du Parlement européen a levé totalement ces appréhensions. Plusieurs rapports décisifs ont ainsi été publiés depuis six mois : ceux de George Lyon et de Stéphane Le Foll notamment. L'examen public des amendements au rapport Lyon a été suivi dans une salle comble, avec des observateurs de l'Europe entière. Le Parlement européen, sur les questions agricoles, est devenu un décideur à part entière et chacun peut être convaincu que la PAC y a beaucoup d'alliés, du moins à la commission de l'agriculture.
Ensuite, cette réunion couronne une sorte de tournée européenne que le groupe de travail commun à nos deux commissions du Sénat a choisi d'effectuer avant de proposer son rapport. Le Sénat a une longue expérience des questions agricoles. Le premier rapport sur la réforme de la PAC date de 1997 et, depuis, ce sujet est monté en puissance. L'un des rapporteurs de l'époque est devenu le président, tout à la fois de la commission de l'économie et du groupe de travail. Le travail qui était autrefois confié à la seule commission des affaires économiques est aujourd'hui partagé avec la commission des affaires européennes. Cette association est tout à la fois un message et une direction à suivre car la réforme de la PAC ne peut être conçue aujourd'hui sans cette ouverture, sans une démarche d'écoute et d'alliance. C'est dans cet esprit que nous nous sommes rendus récemment en Allemagne et en Pologne avec Mmes Odette Herviaux et Bernadette Bourzai, coprésidentes du groupe de travail ; cette dernière se rendra d'ailleurs demain aux Pays-Bas. Nous avons pu nous rendre compte des attentes de nos partenaires, qui ne sont pas toujours les mêmes que les nôtres. La Pologne notamment ne sera pas un allié facile dans la négociation. Aujourd'hui ce sont les députés européens qui viennent à notre rencontre : c'est le symbole de cette démarche d'écoute et d'alliance que j'évoquais et je voulais les en remercier tout particulièrement.
M. Hervé Gaymard, député, co-rapporteur du groupe de travail de l'Assemblée nationale sur la PAC. - Les parlementaires ici présents - nationaux ou européens - sont tous concernés, avertis et informés des enjeux relatifs à la PAC. Dans le prolongement de ce qu'a dit le président Jean Bizet, ce qui nous intéresse est de connaître l'opinion et l'appréhension qu'en ont les parlementaires européens. En effet, dans la mesure où la procédure de décision est maintenant radicalement différente, il nous faut adapter notre manière de voir et de travailler à cette nouvelle donne institutionnelle. En 2013 nous sortirons d'une période de dix ans de paix budgétaire qui avait été conclue entre le Président de la République française et le chancelier allemand et avalisée par le Conseil des chefs d'Etat et de Gouvernement. Cela avait permis d'aboutir à la réforme de juin 2003 qui était la deuxième grande réforme de la PAC après celle de 1992 et la réforme intermédiaire dite de l'Agenda 2000. Nous allons réformer la PAC concomitamment avec une nouvelle révision des perspectives budgétaires européennes. Nous en sommes donc à un point nodal de l'évolution de la PAC. Dans de telles circonstances, la tentation est grande de se dire que l'on a une page blanche sur laquelle on pourrait réécrire les contours de la PAC. La lecture des différents documents comme celui de la Commission européenne ne peut que susciter l'approbation sur les trois priorités que sont la sécurité alimentaire, avec un accroissement de l'approvisionnement en protéines - ce que l'on dit depuis 50 ans ! -, la gestion durable des ressources naturelles et le développement équilibré des zones rurales. Cependant, le diable se cache dans les détails, sur lesquels il s'agit de se pencher !
A la veille de cette négociation, il est nécessaire que les parlementaires européens nous fassent part des rapports de force, des points de blocage et des possibles terrains d'avancée. Nous, parlementaires français, devons être au clair sur ce que nous voulons. Le débat s'axe autour de questionnements fondamentaux. Le premier est celui du développement rural et des voies et moyens pour parvenir à ce que l'agriculture soit présente et maintenue sur l'ensemble des territoires ruraux. La deuxième série de questionnements a trait aux productions elles mêmes. Sur ce point, il y aura trois grands risques à assurer. Le premier est la gestion des calamités agricoles et de l'aléa climatique, sujet qui ira sans doute en s'accentuant avec le réchauffement climatique. Le deuxième est la couverture du risque sanitaire tel que l'on a connu et appris à gérer pendant les dernières décennies, à travers les crises comme celle de la vache folle. Sur ces deux premiers risques, on pourra trouver un terrain d'entente. Mais le vrai sujet sera celui du risque économique lié à la volatilité des prix. Cette question soulève un débat éminemment idéologique qui a d'ailleurs sous tendu toutes les discussions relatives au couplage-découplage des aides. Une certaine vision des politiques agricoles - ou plutôt d'absence de politique agricole - a conduit à dire qu'il fallait plutôt des aides découplées plutôt que des aides utilisées au moment où l'on en avait le plus besoin afin d'éviter que ces aides ne pèsent sur la formation des prix.
Dans cette négociation, la question de la gestion du risque économique qui entre d'ailleurs en résonance avec une des priorités affirmées par la France dans le cadre du G20, telle que l'a exprimée le Président de la République, sera un des sujets les plus importants pour la pérennité de l'agriculture européenne.
Pour terminer, le texte qui a été négocié entre la France et l'Allemagne me semble parfaitement synthétiser les enjeux de la négociation à venir. On ne peut que se féliciter que l'on ait pu aboutir à un accord franco allemand détaillé sur les priorités qui ne soit pas seulement un accord politique global et de portée générale. L'action du ministre de l'agriculture français pour créer un groupe de pression favorable à une PAC impétueuse et rénovée est donc plutôt de bon augure.
M. Michel Dantin, député européen. - Les discussions sur le futur de la PAC s'engagent dans un contexte radicalement différent par rapport aux négociations précédentes. L'envolée des prix agricoles et des denrées alimentaires en 2007-2008, même si elle a été variable selon les régions et les pays, a durablement marqué les esprits, au-delà du monde agricole, et contribué à replacer au premier plan la question de la sécurité alimentaire de l'Europe et de son autosuffisance. Parallèlement, l'effondrement des prix agricoles en 2009 et la désespérance du monde paysan ont également frappé les esprits, notamment parmi ceux qui n'étaient pas les plus enclins à soutenir le secteur agricole.
C'est dans ce contexte que les trois principaux objectifs assignés à la PAC dans le rapport de George Lyon ont été repris par le commissaire Dacian Ciolos et qu'après 15 ans de domination de la définition de la PAC par une pensée très profondément libérale, pour laquelle le marché représentait l'alpha et l'oméga, on reconnaît de nouveau aujourd'hui la nécessité d'avoir des outils de régulation. Une fois que l'on a dit cela, on a tout dit et rien dit. Car si certains ont en tête les outils qui ont prévalu dans les années 1970-1980, il apparaît impossible désormais d'y recourir et ce pour deux raisons :
- logistiquement, tout d'abord, il est impossible de faire à 27 ce que l'on faisait auparavant à 8 ou 9 ;
- ensuite, nous ne sommes plus dans une économie continentalisée mais dans une économie mondialisée. Ainsi, lorsque l'année dernière, 280 000 tonnes de poudre de lait ont été retirées du marché dans l'Union européenne, ce sont les Australiens et les Néo-Zélandais, qui ont profité, au niveau mondial, de l'embellie provoquée par ce retrait.
Il faut donc procéder autrement. Comme l'a dit le commissaire Ciolos, la Commission a laissé le pouvoir pendant 10 ans à une seule école de pensée selon laquelle le marché devait tout régler et, en conséquence, aucun crédit n'a été dépensé pendant cette période pour étudier de nouveaux outils de régulation. Nous sommes donc aujourd'hui dans l'incapacité de savoir quels outils pourraient être opérationnels d'ici trois ou quatre ans. Compte tenu des échéances de 2013, le commissaire Dacian Ciolos a passé commande d'études à des universités sur le sujet. Mais, pour l'heure, nous ne disposons d'aucun outil concret à mettre en face du terme « régulation ». C'est pour cette raison qu'il faudra avancer notre réflexion pendant les semaines qui viennent.
M. Stéphane Le Foll, député européen. - Sur le calendrier de la réforme tout d'abord, la communication officielle de la Commission est prévue pour le 17 novembre. Dans la foulée, le Parlement européen sera saisi de cette communication, puis le débat législatif sur les quatre textes débutera en juillet 2011. Parallèlement, il y aura le débat, non négligeable, sur les perspectives financières avec un texte du Parlement européen qui devrait également sortir vers juin ou juillet 2011.
S'agissant du contexte, il y a un véritable rapport de force au sein du Parlement européen favorable à une réaffirmation de la PAC comme une politique qui doit rester européenne - ce qui n'était pas gagné - et défavorable à toute tentative de renationalisation et de hausse du cofinancement. Au Parlement européen, il y aura donc une large majorité pour donner à la PAC un budget à la hauteur de ses besoins et refuser une dérive vers une augmentation de la part du cofinancement. C'est déjà un point de départ important.
Concernant les enjeux de la PAC, celle-ci doit d'abord trouver à s'intégrer, comme la politique de cohésion, dans les objectifs de la stratégie 2020, autour des notions de compétitivité, de connaissance et de développement durable. Pour cela, mieux vaut redéfinir et défendre les politiques qui existent, plutôt qu'en inventer de nouvelles. C'est un des axes de discussion majeurs que nous avons au Parlement européen. Pour s'intégrer dans cette stratégie globale, la PAC doit être en mesure de montrer aux citoyens que l'agriculture est en connexion directe avec la question de la sécurité alimentaire et qu'elle constitue un élément moteur du développement durable et de la croissance verte. Les différents rapports qui ont été votés ont, sur ces points, été convergents.
Pour entrer dans des détails un peu plus techniques, je dirais qu'il y a trois enjeux majeurs pour la nouvelle PAC : la régulation, la compensation et la rémunération. En matière de régulation, des mécanismes nouveaux doivent être inventés et certains mécanismes anciens doivent être préservés, alors que l'on a failli perdre tous les mécanismes liés au filet de sécurité dans le cadre du bilan de santé de la PAC, comme le soulignent le rapport de George Lyon et le papier de la Commission qui a « fuité » début octobre. Parmi les mécanismes à inventer dans un contexte nouveau, il y a aujourd'hui des pistes évoquées par la France qui ne sont pas assez relayées au niveau européen, comme la contractualisation qui ne pourra participer à la régulation que s'il y a un cadre européen. Il faut également préserver la politique européenne de stockage public. Il y aura une majorité au Parlement européen en faveur de la régulation. Sur la compensation, il doit y avoir un vrai débat sur les handicaps naturels et les zones défavorisées. La nécessité du maintien d'un certain nombre d'aides couplées doit être reconnue pour servir les objectifs d'occupation de l'espace et du territoire. Là-dessus, il n'est cependant pas certain qu'il y ait une majorité au Parlement européen. Enfin, sur la rémunération, il est impératif de justifier, vis-à-vis des citoyens européens, les aides agricoles par la production de biens publics. Il faut promouvoir le rôle de l'agriculture en matière de protection de l'environnement, de biodiversité, de préservation des ressources naturelles et également en matière de photosynthèse et d'énergie solaire. En la matière, l'agriculture est au coeur du débat et c'est dans ces conditions que l'on arrivera à dégager une majorité au Parlement européen.
M. Patrick Le Hyaric, député européen. - Le Parlement européen est favorable à une augmentation globale du budget de l'Union européenne et donc à une préservation de celui de la PAC : il y a toutefois un risque que les conclusions du Conseil européen du week-end dernier se situent en deçà de ces objectifs et il est nécessaire d'être vigilant ! C'est d'ailleurs un peu toujours la même chose : on se fixe tous les mêmes objectifs et la politique mise en oeuvre est à l'exact opposé de ces objectifs. Aujourd'hui, on se retrouve face aux résultats d'une agriculture intégrée à une économie de marché capitaliste qui élimine les petits et moyens paysans, et contribue à une réduction de la biodiversité et à une diminution du nombre d'habitants dans les territoires ruraux. Une réorientation importante de la PAC et des politiques agricoles nationales est donc nécessaire. Cependant le leitmotiv du moment, de plus en plus invoqué depuis la tenue du SPACE à Rennes au mois de septembre, est la compétitivité de l'agriculture. Or c'est cette recherche de compétitivité qui conduit à la concentration des élevages, à la hausse de la production par vache laitière et qui va à l'encontre de l'emploi, l'environnement et la vie des territoires. Les négociations à l'OMC ne poursuivent pas d'autre objectif, que l'on nous impose à marche forcée.
Face à cela, il faut réaffirmer la nécessité d'un prix de base pour rémunérer le travail paysan : les aides compensatrices et incitatrices sont certes utiles mais elles ne sont pas suffisantes pour rémunérer le travail alors que des investissements de plus en plus élevés sont requis. Aujourd'hui, on est dans un cycle où les agriculteurs travaillent plus pour gagner moins bien leur vie. La crise du lait, mais aussi la crise des céréales, l'ont bien montré. Dans une même commune, celui qui récolte du maïs se trouve dans une situation divergente de celle de l'exploitant qui doit acheter du maïs pour nourrir son bétail. Il convient donc de trouver des mécanismes régulateurs et stabilisateurs à l'intérieur de l'Union.
Dans le cadre des négociations internationales, des objectifs généraux en matière agricole et environnementale doivent être fixés. La souveraineté et la sécurité alimentaire pour tous les pays sont fondamentales. C'est ainsi qu'il ne pourra y avoir de développement harmonieux sans préférence communautaire, sinon le système de libre échange intégral sera tueur pour tout le monde, et notamment pour les plus petits.
Mme Odette Herviaux, sénatrice, co-présidente du groupe de travail du Sénat sur la PAC. - A ce moment du débat, en vue d'éviter les redites, il convient de dresser un point rapide sur les travaux du groupe de travail sur la PAC constitué au Sénat. La demande est aujourd'hui très forte, de la part du nouveau commissaire en charge du dossier, d'avoir des remontées des Etats membres vers la Commission européenne.
Nous produirons un rapport sur la réforme de la PAC après 2013 et nous présenterons, la semaine prochaine, un pré-rapport pour lequel nous nous sommes appuyés sur les auditions et sur de nombreuses visites sur le terrain qui nous ont beaucoup apporté. Ainsi, s'agissant de l'accord franco-allemand, de nombreux éléments nous étaient apparus comme étant conclus a minima alors que le ressenti sur le terrain par nos collègues s'étant rendus en Allemagne n'est pas le même.
Nous avons tenu compte des rapports précédemment cités. De nombreuses questions sont posées pour ajuster cet outil incontournable qu'est la PAC. Quel budget pour une PAC forte ? Comment retrouver l'adhésion des citoyens et des consommateurs dans le domaine de la sécurité alimentaire et dans tout ce qui peut toucher au développement des territoires ? Plusieurs scenarii seront présentés dans le pré-rapport, chaque groupe pouvant ainsi exprimer ses préférences. L'écoconditionnalité et ce que l'on a appelé le verdissement de la PAC, la reconnaissance du rôle des agriculteurs dans la fourniture des biens publics, l'articulation entre les deux piliers dont les contenus ont d'ailleurs évolué et les questions budgétaires seront des thèmes majeurs du rapport. A travers ces différents scénarii possibles, nous espérons élaborer un scénario politique global.
M. Daniel Fasquelle, député, co-rapporteur du groupe de travail de l'Assemblée nationale sur la PAC. - Merci pour l'organisation de cette réunion. Il convient de se féliciter des nouveaux pouvoirs du Parlement européen en matière agricole qui est une des raisons de mon vote en faveur du traité de Lisbonne. L'agriculture doit être une priorité pour l'Union européenne ainsi que pour la France au sein de l'Union, pour des raisons multiples, allant de la souveraineté alimentaire à la satisfaction d'une demande mondiale croissante - la France étant un pays exportateur -, aux priorités d'aménagement du territoire, sans oublier la question du maintien de l'emploi et de la vie dans nos communes, et les préoccupations pour une gestion durable des ressources.
D'autres éléments, à la marge du texte de la Commission européenne, doivent également retenir notre attention. En ce qui concerne le principe de préférence communautaire, que fera-t-on pour protéger nos agriculteurs d'une concurrence déloyale, notamment dans le cadre de négociations au sein de l'OMC ? Lors des négociations internationales, on a fait des concessions préalables et ensuite on a adapté la PAC. Il faut briser ce cycle ! Les niveaux de réglementation sont en outre très variables au sein de l'Union et il convient de restaurer une concurrence intra-européenne loyale. Par ailleurs, en matière de régulation, le droit de la concurrence empêche aujourd'hui les agriculteurs de s'associer pour faire face à la grande distribution. C'est un sujet certes à la marge de la PAC mais qui fait partie de cette nouvelle régulation à inventer et c'est sujet sur lequel on pourrait avancer très vite. Enfin, n'oublions pas le tourisme qui est très lié au développement des territoires ruraux et qui est une source d'emplois non négligeable.
M. Alain Lamassoure, président de la commission des budgets du Parlement européen. - Je voudrais vous faire part d'une bonne nouvelle et d'une suggestion ! Le Parlement européen est dorénavant co-législateur agricole et co-décideur pour le budget de la PAC. Pour le projet de budget 2011, il a voté un budget supérieur de 800 millions d'euros à la proposition initiale de la Commission européenne pour la PAC, proposition qui avait été acceptée par le Gouvernement français. Ce qui va se jouer à moyen terme, le contenu de la future PAC, et ses moyens dépendront du niveau global du financement du budget européen.
Le Parlement européen a compris qu'en 2011, au vu de la situation économique, il ne sera possible que de demander une augmentation du budget très limitée. Cependant, il souhaiterait - pour l'avenir - un accord politique du Conseil afin de travailler, en liaison avec les parlements nationaux, sur le financement futur de l'Union. Une proposition sera faite demain au Conseil et à la Commission en vue de la mise en place d'une conférence financière européenne comprenant des représentants du Conseil, de la Commission européenne, du Parlement européen ainsi que des parlements nationaux. Il s'agira de savoir comment financer durablement les politiques communautaires proprement dites, dont la PAC, ainsi que les grands objectifs communs européens dégagés dans la stratégie Europe 2020, quel partage des rôles établir entre les budgets nationaux et le budget communautaire et enfin, comment financer les augmentations du budget européen sans peser sur les budgets nationaux.
Il conviendra d'oser rouvrir le dossier des ressources propres du budget européen qui avait été ouvert lors du Conseil européen d'Edimbourg en 1992. Nous avons obtenu que le Conseil mette ce problème à l'ordre du jour de sa réunion du 16 décembre et tout soutien des parlementaires nationaux sera bienvenu.
M. Pierre Lequiller, président. - Suite notamment à votre audition devant notre Commission, nous avons d'ores et déjà fait entendre notre voix auprès du Président Bernard Accoyer conjointement avec M. Jérôme Cahuzac, Président de la Commission des finances, ainsi qu'avec M. Gilles Carrez, Rapporteur général de la Commission des finances. Notre objectif est notamment d'assurer un dialogue entre les parlements nationaux et le Parlement européen dans le contexte nouveau du « semestre européen ».
M. Jean-Claude Fruteau, député. - Je partage beaucoup des opinions émises par MM. Hervé Gaymard et Stéphane Le Foll qui participent au consensus autour des objectifs de la PAC. J'ai l'espoir que l'on réfléchisse à une nouvelle PAC de façon positive. En effet, depuis vingt ans, les réformes ont toujours été faites dos au mur, notamment vis-à-vis des exigences de compatibilité avec les règles de l'OMC. Nous avons, cette fois, la possibilité de raisonner différemment. Inscrire la PAC - seule politique commune - dans les objectifs de l'Union pour 2020 est ambitieux et positif. Par ailleurs, pour chaque réforme, le budget a toujours été débattu avant de définir le contenu. Il faudrait que l'on commence par définir les contours de la PAC et, ensuite, établir le montant des ressources à y consacrer pour, ensuite, aborder la négociation du budget. Malgré l'excellente nouvelle présentée par M. Alain Lamassoure, je crains que le contexte de crise ne permette pas l'émergence d'une PAC disposant des moyens nécessaires. Mais il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre !
M. Jacques Myard, député. - Merci d'avoir organisé cette très intéressante réunion. Je rappellerai à M. Michel Dantin l'erreur historique faite sur l'évaluation des besoins mondiaux en produits alimentaires sans qu'ait été prévue - par aucun expert - l'augmentation des demandes chinoise et indienne. On peut ainsi souligner la cécité de la Commission européenne qui avait préconisé une politique de jachère.
La régulation dont on parle reste en réalité un débat franco-français et n'a pas cours à Bruxelles. Et il faut être bien conscient, je le vois dans le cadre du rapport que je suis en train de faire avec Jérôme Lambert sur la politique industrielle, qu'en matière de politique agricole commune, les Français sont les seuls, au niveau européen, à parler de préférence communautaire.
Il faut donc se demander quelle est, dans ce domaine, la marge de manoeuvre réelle car les 800 millions supplémentaires que le Parlement européen a affecté à l'agriculture ne seront sans doute pas acceptés. Je pense qu'il y a trop d'optimisme dans ce domaine.
M. Philippe Juvin, député européen. - Nous ne sommes pas optimistes mais simplement le plus réalistes possible : tout est une affaire de rapports de forces. C'est ainsi que le rapport de M. George Lyon a été accepté à l'unanimité. Tout le monde veut des filets de sécurité et des outils de régulation. La question est de savoir ce que l'on met derrière ! Le Parlement européen est plutôt sur une dynamique positive en faveur de la PAC. Mais il faut tenir compte du fait qu'il existe des différences d'appréciation entre les Etats, entre les Etats agricoles et ceux qui ne le sont pas, entre les nouveaux Etats européens et les anciens. Ce rapport de forces se situant aussi entre les Etats, il nous faut donc trouver des alliés pour éviter un débat franco-français et pour trouver des compromis permettant à la France d'obtenir des résultats positifs. C'est tout le mérite de l'accord franco allemand. La question plus générale est de savoir, finalement, comment faire pour que la France garde une influence à tous les nivaux européens.
Il ne faut pas avoir d'illusions sur le budget. Si l'on admet que le budget de l'Union européenne ne peut augmenter mais que celle-ci a de nouvelles compétences, la question se pose donc de savoir comment les financer et où prendre l'argent. La Grande-Bretagne a dit qu'elle savait où l'on peut trouver cet argent ! Il faut donc trouver des alliés et arrêter de dire qu'il ne faut pas bouger les règles budgétaires, sinon on se retrouvera dans le mur.
Mme Bernadette Bourzai, sénatrice, co-présidente du groupe de travail du Sénat sur la PAC. - Merci tout d'abord aux parlementaires européens pour ses informations. Il faut en effet créer des alliances et rassembler les pays favorables à une PAC forte, comme le font le commissaire Dacian Ciolos et M. Bruno Le Maire et comme l'avait fait également Michel Barnier. Il était ainsi assez intéressant de faire paraître le document de la Commission juste avant les propositions sur les perspectives budgétaires.
Il faut tout d'abord définir un contenu à la PAC, notamment le contenu des premier et deuxième piliers, avant de passer sous la toise budgétaire, comme cela a été le cas en 2001. Ainsi, s'agissant du « verdissement » du premier pilier, jusqu'où peut-on aller pour avoir une alimentation sûre et saine correspondant aux aspirations des consommateurs ? Si l'on met les mesures environnementales dans le premier pilier, que deviendra le deuxième ? Quelle sera l'articulation entre les deux piliers et avec la politique régionale ? Que fera-t-on pour les zones rurales ?
M. Pierre Forgues, député. - Merci d'avoir organisé cette réunion ; il serait aussi intéressant de pouvoir entendre le commissaire européen chargé de l'agriculture. J'aimerais être optimiste dans ce domaine mais le réalisme commande d'être plus mesuré, voire pessimiste. On se trouve devant une équation difficile à résoudre car on est favorable à la mondialisation de l'agriculture dans le cadre de l'OMC, qui empêchera, de ce fait, d'avoir une préférence communautaire, tout en préconisant en même temps une politique agricole commune et en refusant la nationalisation. Le budget européen est alimenté par les pays et, si on a une PAC, il faudra bien que les pays membres s'engagent budgétairement à la financer.
Il ne faut pas se cacher la réalité nationale d'une politique agricole commune. Pour le monde rural, une politique structurelle serait plus nécessaire qu'une politique d'aides directes. Que veut dire une politique européenne compétitive ? Il sera nécessaire de réguler la production mais comment pourra-t-on faire si on ne dispose pas de moyens de stockage ? Cela ne suffira pas car il faudra aussi réguler le commerce des produits agricoles.
M. François Brottes, député. - Je me réjouis de ce rendez-vous et je suggère à nos présidents de prévoir un débat de même intérêt sur la réforme de l'énergie, car c'est un sujet d'une actualité brûlante.
Sur la PAC, tout d'abord je prends note du triptyque de Stéphane Le Foll « régulation-compensation-rémunération » et je poserai cinq questions.
Comment le Parlement européen est-il informé régulièrement de ce qui se dit à l'OMC ?
L'Union européenne n'envoie-t-elle pas un signal contradictoire avec la PAC lorsqu'elle dit qu'il faut renationaliser la politique concernant les OGM, sujet qui n'est pas étranger à l'agriculture ?
Pourquoi résister en permanence sur les questions d'étiquetage ? Aujourd'hui il y a un réel besoin de traçabilité liée notamment à la qualité des produits. On a l'impression que la volonté française en la matière est souvent en contradiction avec ce qui s'observe au niveau européen.
Dans l'idée d'une régulation à venir, pourquoi essayer de casser les interprofessions, fortes en France ? Lorsque les professions se structurent, y compris parfois à l'échelle européenne, y a-t-il une désapprobation au niveau de l'Union et quel est l'avis du Parlement européen ? Il y aurait certainement un problème si on annonçait aux interprofessions qu'elles devaient disparaître dans la future PAC.
Enfin, en matière de politique alimentaire, ne devrait-on pas raisonner par territoire de production agricole afin d'assurer d'abord l'autosuffisance de chaque territoire et seulement ensuite mettre le surplus à la disposition du marché et des secteurs qui ne sont pas en capacité de produire ? Pourquoi n'arrive-t-on pas à trouver des solutions, par exemple avec la restauration collective, pour favoriser les productions locales : il n'y a actuellement pas d'autres solutions que de ne pas respecter les règles de concurrence françaises et européennes !
Ces questions sont à la périphérie du sujet mais en font quand même partie.
M. Jean Gaubert, député. - Je veux d'abord rappeler à quoi sert la PAC : d'abord assurer la sécurité alimentaire en quantité et en qualité, ce qui nous ramène à la question de l'environnement ; ensuite soutenir l'aménagement du territoire, notion plus forte en France qu'ailleurs parce que nous avons des surfaces plus importantes et l'ambition de les occuper complètement, ce qui implique de compenser les handicaps naturels ; enfin rémunérer les producteurs. Sur ce dernier point, tout le monde s'est rendu compte que le système des aides découplées ne suffit pas à assurer le revenu des producteurs, alors qu'un système d'intervention sur le marché portant sur les volumes et les prix est moins cher et était sans doute plus efficace. Malheureusement, il ne peut plus s'appliquer aujourd'hui.
Les orientations de la future PAC doivent insister sur notre position à l'OMC et c'est la clé car si l'Union européenne est ouverte à tous vents, sans aucun contrôle, les choses ne changeront pas. Elles doivent ensuite clarifier le rapport aux règles de concurrence pour déterminer si elles sont le moyen d'atteindre un but ou si elles sont en elles-mêmes le but comme le croient certains. Elles doivent enfin s'attaquer aux distorsions non seulement internationales mais aussi à l'intérieur de l'Union européenne. On parle beaucoup à l'Assemblée nationale des distorsions avec l'Allemagne depuis quelque temps, mais il faut aussi parler des distorsions avec les autres Etats membres, en particulier les nouveaux membres d'Europe centrale. Cela pose la question du rattrapage des moyens financiers pour ces pays.
M. Pierre Lequiller, président. - Je rappelle que les Commissions des affaires européennes du Triangle de Weimar vont se réunir prochainement à l'Assemblée nationale pour parler notamment de la PAC.
M. Jacques Blanc, sénateur. - On a parlé tout à l'heure de compensation et j'insisterai sur la politique en faveur de la montagne. Le traité de Lisbonne a défini un objectif supplémentaire, la cohésion territoriale, mais cet objectif ne se réalisera pas si l'on ne maintient pas l'agriculture dans les zones défavorisées et si l'on ne compense pas ce handicap par une politique spécifique sans laquelle il n'y aura tout simplement plus de vie. Je voudrais connaître la position des parlementaires européens sur ce point, alors qu'on voit par ailleurs des positions qui répondent à nos préoccupations et qu'il faudra épauler.
Je regrette ne pas avoir entendu le débat avec M. Lamassoure sur les ressources propres. Etre contre l'impôt européen est peut-être une erreur, ce serait une erreur en tout cas de ne pas oser poser la question. La conférence sur les ressources permettra d'y voir plus clair sur les perspectives d'avenir. Un désenchantement à l'égard de l'Union européenne apparaîtra s'il n'y a pas un soutien à la PAC, première politique commune européenne, au moment où il faut au contraire retrouver l'espérance.
Je souhaite que le groupe de travail sur la montagne du Sénat puisse travailler avec celui du Parlement européen pour maintenir l'agriculture et la vie sur l'ensemble du territoire.
M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes du Sénat, co-président du groupe de travail du Sénat sur la PAC. - Je veux d'abord souligner deux chiffres. A l'horizon 2020, l'Union européenne comptera quinze millions de consommateurs supplémentaires et aura besoin en conséquence de trente-quatre à trente-cinq millions d'hectares pour couvrir ses besoins alimentaires. Ces chiffres nous font toucher du doigt l'importance de la notion de sécurité alimentaire.
Pour avoir rencontré souvent nos amis allemands, je voudrais insister à nouveau sur le fait qu'il est redevenu politiquement correct d'utiliser les notions de productivité et de compétitivité en agriculture, qui peuvent désormais être considérées comme compatibles avec l'environnement.
Je me félicite par ailleurs de la réflexion menée au Parlement européen à travers les rapports Lyon et Le Foll qui vont tout à fait dans le bon sens.
M. Hervé Gaymard a souligné l'importance de l'accord franco-allemand auquel les pays comptant en agriculture, comme la Pologne ou d'autres, souhaitent s'agréger. Il ne faudra donc pas trop s'éloigner de cette position.
Quant à la préférence communautaire, au risque de choquer certains d'entre vous, elle n'existe plus parce qu'elle s'est érodée depuis 1957, également depuis le début du cycle de Doha entre 2001 et aujourd'hui, en raison de l'évolution de notre société. La donne sociale et environnementale a complètement changé et les vingt-six autres Etats membres ne comprennent pas cette notion. En revanche, on peut arriver aux mêmes solutions si l'on parle du principe de réciprocité. Nous disposons de certains outils pour le mettre en oeuvre, comme l'accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) ou d'autres mesures. Ce serait beaucoup plus constructif.
Enfin, le calendrier des négociations à l'OMC, en sommeil depuis 2001, est très important. Au moment où les Américains commencent à remettre le dossier sur le tapis, les Européens peuvent pour la première fois maîtriser les échéances avec leur réforme de la PAC en 2013. Ils peuvent en effet essayer de demander aux Etats-Unis d'abattre leur jeu avant cette date et de tenir compte de notre réforme de la PAC avant la négociation à l'OMC.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire du Sénat, co-président du groupe de travail du Sénat sur la PAC. - J'avais notamment retenu de la rencontre sur le bilan de santé de la PAC à laquelle j'avais assisté, à l'invitation de M. Michel Barnier, que les vingt-sept Etats membres avaient à peu près la même vision sur l'aménagement du territoire et se montraient en faveur d'une réorientation vers les zones défavorisées à handicap naturel où se pratique l'élevage bovin et ovin. L'occupation des territoires ruraux est déterminante pour notre pays et cette question de la compensation du handicap a été évoquée par M. Stéphane Le Foll. Il faut en effet beaucoup insister pour que la PAC préserve l'occupation des espaces à handicaps naturels, où il y a de l'élevage.
Il faut se poser la question de savoir si, dans un pays comme la France, il est souhaitable de maintenir des références historiques.
S'agissant de la régulation, la contractualisation dont on a beaucoup parlé dans la loi de modernisation de l'agriculture est une notion qui devrait être inscrite durablement dans la politique agricole commune.
Par ailleurs, la protection de l'environnement doit-elle être intégrée dans le premier ou le deuxième pilier pour préserver la ruralité ?
Enfin, il faut conserver une politique agricole commune et faire très attention aux renationalisations qui pourraient détruire en un ou deux cycles une politique qui fait partie de notre histoire.
M. Serge Poignant, député. - Ce genre d'échanges est très intéressant. Il faut défendre la régulation, même si les outils sont difficiles à mettre en oeuvre. Il faut donc développer la contractualisation dans un cadre européen. Il faut aller plus loin dans la recherche pour le développement durable et unir les efforts européens en ce domaine.
Il est possible de concilier compétitivité économique et développement durable si une coordination est établie au niveau européen. Sinon, la concurrence entre pays européens provoquera des problèmes internes chez chacun d'entre eux.
Je prends note du rappel par M. Alain Lamassoure de l'importance de la codécision ainsi que de la conférence financière européenne.
Enfin, je m'interroge sur les manières de coordonner nos efforts pour défendre la PAC, essentielle pour soutenir nos producteurs et assurer la cohésion sociale.
M. William Dumas, député. - En tant qu'élu d'un département viticole, je suis très inquiet de la suppression prévue des droits de plantation au 1er janvier 2016 alors que le système existe dans notre pays depuis 1936 et qu'il a permis de franchir bien des caps difficiles. J'ai peur que notre pays souffre de la concurrence internationale si l'on peut planter n'importe où sans restriction et si l'on fait disparaître un système qui a fait ses preuves et assure justement le développement équilibré de nos territoires, notion dont on parle tant par ailleurs.
Concernant la réglementation des produits phytosanitaires et des pesticides, nous nous battons depuis des années dans ma région pour qu'une même réglementation s'applique en France, en Italie et en Espagne. Je souhaite que la PAC établisse enfin une convergence réglementaire sur ce point pour garantir une concurrence loyale.
M. Pierre Lequiller, président. - M. Philippe-Armand Martin, empêché, m'avait demandé de poser la question des droits de plantation en son nom et je l'associe donc à la question posée par M. William Dumas.
M. Jacques Muller, sénateur. - La question du niveau du budget ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt. Son maintien ne sera possible que si on relégitime la PAC auprès des citoyens et contribuables européens. Je me réjouis du consensus évoqué par M. Hervé Gaymard sur l'autonomie en protéines, la gestion durable des ressources naturelles et l'aménagement équilibré du territoire, mais le diable se niche dans les détails.
Si l'on veut réorienter profondément l'agriculture européenne, cela passera par des ruptures dans la répartition des moyens en s'appuyant sur deux critères pour relégitimer la PAC : d'abord une vraie prise en compte de l'environnement, notamment de la notion de production de biens publics, trop marginale pour l'instant ; ensuite le traitement de la question de l'emploi. L'agriculture est en effet le seul domaine où l'argent public subventionne le capital plutôt que le travail, alors que dans tous les autres secteurs de l'économie il subventionne l'allègement des charges et du coût du travail.
Cette rupture dans la répartition de l'argent public se traduira sur le plan de l'histoire mais aussi sur le plan culturel. Il n'est ainsi pas évident, notamment dans le monde agricole, de reconnaître que l'agriculteur est aussi un producteur de biens publics. Sans que les agriculteurs se sentent cantonnés dans un rôle de jardiniers de l'espace, il faut intégrer le fait qu'ils sont à la fois producteurs et producteurs de biens publics.
Mme Françoise Grossetête, députée européenne. - Comme l'on dit un certain nombre d'intervenants, il se pose un sérieux problème de concurrence à l'intérieur même de l'Union européenne, lié aux différences de compétitivité comme l'illustrent les disparités entre la France et l'Espagne. Sur le terrain, le problème est souvent évoqué par les exploitants agricoles. En la matière, le Parlement français détient une partie de la réponse quand il transpose les directives européennes. La France se veut exemplaire, en rajoute et durcit les textes en matière environnementale, comme la réglementation relative aux produits phytosanitaires. Compte tenu des difficultés ressenties par les agriculteurs, il est indispensable que le Parlement européen et le Parlement français aient plus de contacts lors des transpositions des directives.
La préférence communautaire est un sujet tabou en Europe. Il existe cependant une possibilité de résoudre le problème par le biais de la règle et du principe de réciprocité, dont l'idée commence à germer dans les esprits et dans les institutions européennes. La semaine dernière, un amendement tendant à ce que soit exigée, dans le cadre des négociations entre l'Union européenne et le Mercosur, l'inclusion d'une clause de réciprocité pour l'application des règles sanitaires a recueilli de nombreuses signatures. L'Union européenne est liée par des accords de commerce avec de nombreux pays tiers qui, de pays émergents, sont en fait devenus de véritables puissances économiques. Les relations commerciales ne peuvent plus être appréhendées comme avant et les accords commerciaux doivent être modifiés en conséquence.
Je voudrais vous faire part d'une réflexion. Toute réforme de la PAC ne peut s'imaginer sans une véritable réorganisation de l'agriculture française. Il faut avoir le courage de le dire. L'Allemagne a procédé à une restructuration et devance maintenant la France pour certaines productions comme la tomate.
M. Michel Dantin, député européen. - Dans ce débat, je voudrais vous rassurer : nous ne serons pas candides ! Cependant, il est vrai que par rapport à la période d'il y a dix ans, le climat est plus porteur pour la PAC dans la mesure où la question de l'alimentation est redevenue une préoccupation centrale. Les trois rapports récemment adoptés par le Parlement européen, ceux de George Lyon, de Stéphane Le Foll et de José Bové, fondent en quelque sorte la doctrine à partir de laquelle nous allons travailler. Le Parlement européen a clairement affirmé s'opposer à toute renationalisation de la PAC. Cette politique commune est un grand navire : il n'y aura pas de grand soir et les virages doivent se prendre en fonction du rythme des exploitations agricoles !
Le tourisme rural doit être traité dans le cadre du deuxième pilier.
J'accorde à Jacques Myard qu'aucune prévision n'avait présagé de l'ampleur de la poussée des achats agricoles de la Chine et dans une moindre mesure, de l'Inde.
S'agissant de la question financière, l'accord de 2003 avait été conclu entre deux pays et avait ensuite reçu l'assentiment des treize autres Etats membres. Aujourd'hui, un accord entre deux pays n'est pas suffisant pour fonder un accord à vingt-sept et il faut impérativement y impliquer un Etat nouvellement membre qui soit capable d'entraîner les autres nouveaux adhérents. La Pologne pourrait jouer ce rôle et c'est tout l'intérêt des rencontres comme celles du Triangle de Weimar.
Le document qui a émané de la Commission n'est en tout état de cause pas définitif et va faire l'objet d'un examen attentif par les cabinets des différents autres commissaires.
La notion de « piliers » appelle certaines remarques. En effet, le commissaire Ciolos estime qu'elle peut être source de confusion ; aussi lui ai-je proposé d'utiliser, dans la communication définitive, pour plus de lisibilité, la notion de « bloc » ou d'« ensemble ». Dans l'esprit du commissaire, le premier bloc serait constitué des aides au fonctionnement - aides annuelles au revenu, aides agro-environnementales, indemnités compensatoires de handicaps naturels - faisant l'objet d'un financement européen ou de cofinancement. Le deuxième bloc comprendrait les outils opérationnels pour l'investissement, en agriculture et dans l'agroalimentaire, ainsi que les outils de marché existants à revitaliser ou nouveaux. La logique des deux piliers telle qu'elle était conçue ne prévaudrait plus. S'agissant du « verdissement » des aides, le commissaire Dacian Ciolos a dit à juste titre qu'une politique incomprise par les bénéficiaires n'est pas légitime. Or l'éco-conditionnalité n'a pas prouvé son efficacité opérationnelle ; elle est par ailleurs illisible pour les consommateurs et difficilement compréhensible pour les exploitants agricoles. En conséquence, son idée est de la remplacer par des mesures plus simples, plus lisibles et plus efficaces, comme les bandes enherbées qui ne sont remises en cause par personne. Deux pistes de réflexion sont proposées par le commissaire Ciolos : la rotation des cultures qui serait obligatoire pour obtenir des aides et une prime au pourcentage minimum de maintien des prairies naturelles.
Le débat à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) est pour l'heure gelé et nul ne sait quel sera le calendrier de redémarrage des négociations. Le débat sur les produits alimentaires et la régulation s'est déplacé vers d'autres instances internationales, formellement ou informellement, comme le G20 et le G8. Et l'on peut légitimement se demander si le débat sur l'alimentation ne devrait pas s'engager dans un autre cadre, par exemple, la FAO renouvelée. C'est un débat des temps modernes.
La Commission européenne a fait de la question de la concurrence une fin en soi, nous privant ainsi d'éléments d'intervention en matière agricole. Le commissaire Ciolos, en liaison avec le commissaire chargé de la concurrence et le commissaire chargé du marché intérieur, a engagé une discussion pointue sur ce thème. Le commissaire Joaquim Almunia qui n'y était pas favorable semble avoir évolué et des propositions devraient être faites sous quinze jours. Une fenêtre semble s'ouvrir pour la prise en compte de la spécificité agricole par rapport au droit de la concurrence tel qu'il avait été érigé en dogme.
Trois points du débat seront sans doute difficiles. Le premier est les références historiques dont il faut dire très clairement qu'aucune majorité ne soutiendra leur maintien. Même les exploitants agricoles n'y sont globalement pas favorables car le système est trop compliqué. Par ailleurs, la mise à niveau des aides aux pays nouveaux adhérents devra se faire comme nous nous y étions engagés lors de leur adhésion. Il y a un accord au Parlement européen pour avancer vers une solution de droits à paiement unique (DPU) en deux parties, l'une uniforme et fixe et, l'autre, variable en fonction de la situation économique des différents Etats. Un travail devra donc se faire autour de la façon de calculer cette part variable. Plusieurs critères peuvent être envisagés : PIB, coût salarial à l'hectare, coût horaire de la main-d'oeuvre... Enfin, s'agissant du débat couplage/découplage, le vent favorable à un découplage total des aides semble s'être retourné. Un relatif consensus semble se faire autour du constat que l'abandon de tout lien entre production et aides peut conduire à la disparition de certaines filières. Sans aides couplées à la filière bovine, il n'est qu'à signer tout de suite l'accord avec le Mercosur !
M. Stéphane Le Foll, député européen. - S'agissant de l'OMC, je voudrais attirer l'attention sur le fait que les négociations sont aujourd'hui en panne, mais qu'il y a plus à craindre des accords bilatéraux, du type accord avec le Mercosur, que des initiatives multilatérales, dont on ne sait en outre comment elles seront traitées par les Etats-Unis à la suite des élections de mi-mandat. Par ailleurs, sur ces questions, il y a deux faits nouveaux à prendre en compte :
- le Parlement européen souhaite renégocier les mandats de négociation de la Commission obtenus par elle il y a 10 ans dans l'objectif d'intégrer des clauses relatives aux questions environnementales, d'une part, et aux questions sanitaires, d'autre part, voire sociales ;
- sur l'étiquetage, la prudence doit être de mise. Il y a aujourd'hui une inflation d'informations sur l'étiquette des produits, qui risque de perturber le consommateur. Il faut faire des choix pour éviter de tout renvoyer sur le consommateur.
La compétitivité de l'Union européenne tient à la valeur ajoutée de ses produits : avec trois fois plus d'agriculteurs que les Etats-Unis et deux fois et demi moins de surfaces agricoles, nous produisons quand même une fois et demi fois plus de valeur ajoutée ! Certes, nous ne sommes pas compétitifs sur les grands produits de consommation mais nous sommes capables de valoriser les produits et nous avons une très grande valeur ajoutée sur les produits de qualité. Nous devrons avoir en tête cet axe stratégique sur lequel la France est bien placée.
Il est clair désormais qu'il faut un volet « alimentation » à la PAC qui lui fait actuellement défaut. Ne serait-ce qu'au sein de l'Union, on compte 16 à 17 millions de personnes souffrant de malnutrition. Le PAC doit s'intéresser à la restauration scolaire et appuyer les collectivités dans leurs démarches, afin non seulement de distribuer au moins un repas complet par jour aux enfants mais également de les éduquer au goût et à la diversité de l'alimentation.
Les références historiques sont terminées et il est inutile de se battre sur cette question. Il faut donc trouver d'autres formes de rémunérations, en liaison avec les questions liées à l'environnement.
Favoriser la production de protéines végétales est aujourd'hui un enjeu car les grands flux de protéines végétales ne sont plus entre l'Amérique du Sud et l'Europe mais entre l'Amérique du Sud et la Chine. Il y a donc un espace à prendre. Et pour cela, il faut inciter à la rotation des cultures : c'est ainsi que le Canada est devenu le premier producteur de légumineuses, en aidant à la fixation de l'azote par la culture de légumineuses. On ferait une erreur de ne pas lancer - notamment en France - un grand projet protéinique végétal. Le Parlement européen va d'ailleurs adopter un rapport sur ce point.
Je terminerais sur un sujet qui n'est pas le plus simple : les OGM. La position de la Commission, qui vise à permettre aux Etats membres d'interdire la culture sur leur sol d'OGM autorisés au niveau européen pour des raisons autres que sanitaires ou environnementales, n'est pas acceptable. Les derniers éléments en provenance des Etats-Unis font état d'apparition de résistances au glyphosate. Je pense qu'il faut que le Parlement européen se saisisse du débat autour de quatre points. Les deux premiers tiennent aux considérations environnementales pour lesquelles un pays doit pouvoir refuser un OGM et aux considérations sanitaires quand on utilise des OGM qui intègrent des pesticides. Par ailleurs, les considérations économiques doivent être évoquées au niveau européen : jamais on ne se pose la question de savoir s'il y a un intérêt économique à la culture des OGM ! Enfin, la question de l'existence d'alternatives à l'utilisation des OGM doit être posée. Le débat au niveau européen doit s'articuler autour de ces points pour savoir si l'on doit ou pas autoriser les OGM.
M. Alain Lamassoure, Président de la Commission des budgets du Parlement européen. - Haut les coeurs ! Ne nous comportons pas en forteresse assiégée alors que nous sommes les meilleurs ! L'agriculture française et l'agriculture européenne disposent de tous les atouts pour répondre à une demande mondiale qui, pour la première fois, augmente plus vite que l'offre, contrairement à ce qui s'est passé pendant les cinquante dernières années. Il faut prendre des initiatives en vainqueur, au lieu de quémander des aides ou d'invoquer la préférence communautaire, à l'exemple de ce que fait l'Allemagne avec sa politique industrielle.
Maintenant il faut livrer trois batailles du point de vue de l'opinion publique, dont les deux premières ont été perdues jusqu'à présent :
- au niveau international dans les négociations, il faut combattre l'idée, répandue notamment par Oxfam, selon laquelle la PAC affame l'Afrique et les aides agricoles artificiellement distribuées à nos producteurs empêchent toute agriculture vivrière d'émerger. Cette analyse est contraire à la vérité. Il faut en faire la démonstration ;
- au niveau européen ou national, il faut arrêter avec l'idée selon laquelle l'agriculture pollue et que seule l'agriculture biologique constitue une porte de salut. Ce combat est moins mal engagé ;
- enfin, il faut renoncer à l'idée selon laquelle les agriculteurs pourraient à la fois bénéficier des hausses des prix du marché et d'aides directes non plafonnées basées sur des références historiques, alors qu'il y a plus de 24 millions de chômeurs en Europe.
Pour finir, sur le budget, il y a une chose que vous devez savoir : c'est que, bien que l'on soutienne tous le fait que la PAC, en tant que première et seule politique commune européenne, doive être financée à 100 % par le budget européen, la France n'y a plus directement intérêt. Alors que cela est pleinement valable tant que la France est le premier bénéficiaire économique et budgétaire de la PAC, cela ne sera plus vrai à partir de 2013, voire dès aujourd'hui. En effet, le financement de la PAC intégralement par le budget européen est une contrepartie du chèque britannique, qui est un remboursement de la contribution de la Grande-Bretagne au budget européen initialement financé par l'Allemagne, la Suède ou les Pays-Bas. Mais, aujourd'hui, seule la France, et accessoirement l'Autriche, finance le chèque britannique. Si l'on fait la balance entre la contribution de la France au budget européen et le chèque britannique d'une part, et les aides reçues, d'autre part, on constate que la France y perd. Du seul point de vue Bercy, nous aurions tout intérêt à renationaliser la PAC ! J'ajoute que, pour nos organisations agricoles, Paris est plus près que Bruxelles... Serait-ce donc un drame ? Je vous laisse sur ce point d'interrogation...
M. Pierre Lequiller, président. - ...et d'étonnement ! Je voulais vous dire, au nom des présidents Jean Bizet, Jean-Paul Emorine, Patrick Ollier, et de Serge Poignant, que nous avons trouvé cette réunion très intéressante et de grande qualité. Elle nous conforte dans la conviction qui est la nôtre de l'importance majeure du développement d'un dialogue régulier entre parlementaires nationaux et parlementaires européens sur les principaux sujets d'actualité.