- Mardi 18 mai 2010
- Dialogue social et fonction publique - Audition de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports
- Dialogue social et fonction publique - Examen du rapport pour avis
- Nomination d'un rapporteur
- Organisme extraparlementaire - Désignation d'un membre
- Questions diverses
- Conclusions de la Mecss sur le rendez-vous 2010 pour les retraites - Communication
- Mercredi 19 mai 2010
Mardi 18 mai 2010
- Présidence de Mme Muguette Dini, présidente -Dialogue social et fonction publique - Audition de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports
Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission procède tout d'abord à l'audition de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports, sur l'article 30 (personnels infirmiers) du projet de loi n° 414 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. - Ce texte répond à un engagement du Président de la République. En effet, l'Université ne reconnaissait pas que les infirmières suivent trois années d'études depuis 1992. J'ai pu faire reconnaître leur diplôme au niveau de la licence. Les autres professions paramédicales seront progressivement réformées de la même manière.
L'article 30 du projet permet la mise en oeuvre du protocole d'accord signé le 2 février dernier avec cinq organisations syndicales. Les étudiants actuellement en première année seront recrutés en catégorie A. J'ai voulu que les infirmières déjà en poste puissent bénéficier de ces évolutions statutaires, mais dans le respect du choix de chacun. Toute infirmière disposera donc de six mois après la publication du décret portant statut de son corps pour décider soit de rester en catégorie B, soit de passer en catégorie A. Très avantageuses, les nouvelles grilles représenteront un gain annuel de 2 000 euros à 3 000 euros de début en fin de carrière. Le régime de retraite sera aligné sur le droit commun, même si l'infirmière était auparavant en position active ; elle pourra partir à soixante ans minimum et soixante-cinq ans au maximum.
Les autres personnels paramédicaux pourront ensuite bénéficier d'un semblable dispositif.
Nous offrons des rémunérations et des pensions plus élevées, ce qui améliore l'attractivité de ces métiers dans le respect des réalités démographiques. L'âge de départ en retraite est aligné sur celui des mêmes professionnels exerçant dans le secteur privé. Le protocole d'accord du 2 février fait l'objet d'un comité de suivi : le dialogue est permanent. Le projet de décret sera examiné par le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière et soumis au Conseil d'Etat dans la deuxième quinzaine de juillet. A partir de début août, les infirmières disposeront bien de six mois pour faire connaître leur choix en fonction de l'ensemble des éléments nécessaires. Nous respectons nos engagements : le reclassement sera rétroactif au 1er décembre 2010.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur de la commission des lois. - Un mot du délai d'option car l'information est capitale, comme on le sait depuis la décentralisation. Il doit donc jouer à partir du moment où les DRH auront fourni toutes les données du choix. Pouvez-nous donner des garanties à cet égard ? Ces opérations doivent se dérouler dans la sérénité.
Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur pour avis. - J'ai travaillé de concert avec Jean-Pierre Vial, rapporteur du texte pour la commission des lois qui en est saisie au fond, et ma préoccupation est la même. La ministre nous a confirmé l'existence d'un délai d'option de six mois et je sais qu'elle tient ses promesses.
L'option offerte aux infirmières est un choix de vie, tous les services des ressources humaines doivent pouvoir transmettre les informations nécessaires pour l'opérer. Pouvez-vous prendre un engagement à cet égard ?
M. Jacky Le Menn. - Je donne acte à la ministre de l'avancée que constitue ce projet de loi. Les infirmières, les personnels paramédicaux demandaient depuis 1992 une reconnaissance statutaire comparable à celle dont les instituteurs avaient bénéficié. C'est donc à porter à votre crédit. En revanche, qu'on ait immédiatement cliqué ce volet statutaire avec la réforme des retraites ne laisse pas de m'étonner car il faudra prendre en considération la pénibilité de la profession d'infirmière. N'est-ce pas ce qui justifiait leur âge de départ en retraite et la bonification d'une année tous les dix ans qui leur est accordée ? On doit aussi tenir compte de la qualité de la vie. L'invalidité touche plus particulièrement ces personnels. A-t-elle disparu par miracle ? Non, et voilà ce qui dresse une très large majorité du personnel soignant contre cet article 30 - hormis le syndicat qui est le mien. L'ensemble du personnel a l'impression qu'on lui fait payer au niveau de la retraite cette reconnaissance statutaire. Or, les infirmières anesthésistes appartenaient déjà à la catégorie A ; elles perdent néanmoins l'avantage d'être classées en personnel actif, d'où des manifestations assez médiatisées. Au total, une bonne avancée immédiatement annulée, voilà comment la réforme est perçue.
M. Gérard Dériot. - Je félicite la ministre d'avoir réglé ce problème. La réforme statutaire forme un tout, avec ses avantages et ses contreparties. Sans doute ne peut-on avoir le beurre et l'argent du beurre. La qualité professionnelle est reconnue et les rémunérations vont avec, mais j'espère que les établissements hospitaliers pourront établir leur budget dans de bonnes conditions.
M. Nicolas About. - Je remercie la ministre d'avoir confirmé la promesse du Président de la République à Clairefontaine. Cela entraîne des droits et des devoirs, et nous ne souhaitons pas qu'il en soit différemment. La pénibilité ne relève pas forcément du débat sur les retraites. Il n'est d'ailleurs pas démontré qu'elle affecte l'espérance de vie en bonne santé, d'autant que les fonctions des infirmières sont très diverses selon leur affectation. Même si je connais leur niveau de technicité, les anesthésistes, auxquels Jacky Le Menn a fait référence, n'accomplissent pas les tâches les plus pénibles.
Nous serons attentifs aux retraites plus tard, dans un autre texte. Ici, il faut accepter la logique de la promotion. Enfin, il importe que le délai de choix ne dure pas trop longtemps et qu'on ne permette pas des allers et retours, dont on a pu mesurer l'inconvénient pour les personnels affectés dans les maisons du handicap.
Mme Isabelle Debré. - Six mois, c'est long et court à la fois. Quels moyens d'information individuelle avez-vous prévus pour que les infirmières aient toutes les cartes en main ? Une fiche explicative a-t-elle été établie ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - En effet, il ne s'agit pas d'un débat sur la retraite des infirmières, mais d'un passage de la catégorie B à la catégorie A, avec ses avantages et accessoires.
Je suis très attachée à la communication et à l'information. On n'a pas forcé le débat : la négociation dure depuis trois ans. Une plaquette tirée à 350 000 exemplaires sera diffusée dans chaque établissement public comme dans les établissements de formation. Un site internet www.lmd.santé.gouv.fr détaillera l'information. La CNRACL mettra à disposition un moteur de calcul simplifié de la pension - c'est très concret. J'ai enfin veillé à la communication par communiqués et entretiens dans la presse spécialisée, par exemple dans la Revue de l'Infirmière. J'ai actionné tous les leviers disponibles.
Que Sylvie Desmarescaux se rassure, les infirmières auront bien un vrai délai de six mois à compter de la publication du décret. Il n'y aura aucun passage en force : cela fait partie du protocole et je veux aussi respecter la date du 1er décembre.
La question de la pénibilité est extrêmement importante, aussi est-elle sur la table du dialogue. Le volet espérance de vie, d'abord. En 2008, celle des infirmières est proche de la moyenne de la population féminine française : vingt-sept ans à soixante ans et vingt-deux ans et demi à soixante-cinq ans. Quant à l'invalidité, le pourcentage de départ pour invalidité est passé de 5,8 % en 1993 à 4,1 % en 2008, ce qui est inférieur à la moyenne de la fonction publique hospitalière. Depuis trois ans, les infirmières se situent en deçà de la moyenne des trois fonctions publiques : ce canard ne doit plus voler !
Je souscris néanmoins à l'idée que la pénibilité ne se quantifie pas uniquement par ces deux critères. Les organisations syndicales parlent de charges lourdes, de travail posté et d'exposition à des agents toxiques. Or seulement 13 % des infirmières sont conduites à porter de lourdes charges ; il en est de même pour le travail posté et l'on peut remédier à leur exposition potentielle aux agents toxiques. C'est donc un débat sur les conditions de travail : remédions à la pénibilité par de vraies mesures car acheter de mauvaises conditions de travail par un abaissement généralisé de l'âge des départs à la retraite serait éthiquement inacceptable.
Il y a certaines indemnités, par exemple pour les toilettes funéraires et les mises en bière, ou pour les infirmières qui exercent à titre exclusif en bloc opératoire ou en service de néonatologie. Cela représente des majorations significatives.
Les anesthésistes étaient et restent l'aristocratie de la profession infirmière. Elles perdent une spécificité mais je n'ai pas de catégorie plus élevée que la catégorie A à proposer. Elles gardent la clause de compétence, des horaires favorables et de meilleures conditions de travail que les autres. Et si elles reçoivent une augmentation de salaire inférieure, c'est en raison du protocole dont elles avaient déjà bénéficié : elles restent les mieux payées de l'hôpital public et certaines organisations en sont convenues.
M. Gérard Dériot. - Et pour ce qui est du financement de la réforme ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Il est bien prévu. Le protocole coûtera 900 millions sur six ans : 100 millions en 2011, 200 millions en 2012, 500 millions en période de plein effet. Il est vrai que les départs en retraite ne profitent pas à la même caisse : la réforme statutaire émarge à l'Ondam, les retraites à la CNRACL et il n'y a pas de fongibilité dans ces circuits financiers. Gardons le bénéfice de cette affaire à la CNRACL qui devra affronter des jours moins faciles.
Dialogue social et fonction publique - Examen du rapport pour avis
Puis la commission procède à l'examen du rapport pour avis de Mme Sylvie Desmarescaux sur l'article 30 (personnels infirmiers) du projet de loi n° 414 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique.
Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur pour avis. - Le Gouvernement a souhaité compléter le projet sur le dialogue social par un volet sur le statut du personnel paramédical, et particulièrement des infirmières, dont 270 000 travaillent à l'hôpital public. Voilà longtemps qu'elles réclamaient à juste titre une revalorisation de leur statut. Les gouvernements qui se sont succédé depuis les années quatre-vingt-dix avaient retardé la réforme mais le Président de la République s'était engagé, en 2007, à la mettre en oeuvre. La revalorisation est statutaire, avec le passage en catégorie A, et financière, avec un gain à terme de 2 118 euros en début de carrière à 3 801 euros en fin de carrière.
S'il paraît peu contestable que le Gouvernement a bien tenu sa promesse, la réforme apparaît plus complexe car le texte introduit un droit d'option : ou bien passer en catégorie A et perdre le droit au départ à la retraite à cinquante-cinq ans et la majoration d'une année pour dix de service, ou bien conserver ces droits mais bénéficier d'une revalorisation de 1 320 euros. Les quatorze syndicats que j'ai auditionnés ne sont pas loin de considérer que la promesse est tenue pour 60 % des infirmières, celles qui ont moins de quarante-cinq ans. Les choses sont plus complexes pour les autres : l'engagement n'est que partiellement respecté. Comment y remédier ? J'ai étudié la faisabilité et le coût d'un amendement autorisant les infirmières ayant quinze années de service à passer en catégorie A tout en gardant le droit de partir à la retraite à cinquante-cinq ans. C'est ce type de dérogation qu'on avait par exemple introduit lors de la création du cadre de professeur des écoles pour les instituteurs en 1991. Malheureusement, son coût serait de 200 millions d'euros par an sur trente ans, soit 6 milliards d'euros.
Je comprends que certaines infirmières ne soient pas satisfaites, mais cette réforme est socialement juste. Les plus jeunes recevront une promotion statutaire et indiciaire mais travailleront plus longtemps ; la revalorisation sera moindre pour les plus âgées, qui conserveront des avantages auxquels les jeunes générations devront renoncer. La réforme coûtera 450 millions en 2015, le recrutement alourdissant son coût de 25 millions jusqu'en 2020. Personne ne peut contester qu'il s'agit d'un effort exceptionnel, qu'il serait aujourd'hui déraisonnable d'accroître.
On peut en revanche en améliorer la mise en oeuvre. La réforme des retraites ne sera pas adoptée avant fin novembre ; elle aura pourtant un impact sur les infirmières, de sorte qu'il ne leur restera que deux mois pour se déterminer en toute connaissance de cause. C'est court. Les organisations syndicales sont unanimes pour demander la prolongation de ce délai et cela a été souligné en commission des lois, notamment par Patrice Gélard. Néanmoins, vous l'avez entendu, le Gouvernement n'est pas favorable à une temporisation.
Mme Raymonde Le Texier. - Parliez-vous du même texte que la ministre ? Je vous félicite de ce rapport qui, dans les limites qui vous sont permises, pointe ce qui ne va pas bien, y compris la question des retraites, évacuées d'une pichenette tout à l'heure. Merci de cette honnêteté.
La ministre nous a démontré que les infirmières ne sont concernées par aucun des trois critères de la pénibilité. Admettons. Mais combien sont-elles à quitter la profession au bout de quelques années ? La pénibilité n'est pas que physique, elle est aussi psychologique, en fonction du type de travail que l'on effectue : n'oublions pas la responsabilité qui est la leur. En milieu hospitalier, elles sont confrontées à la souffrance, à la maladie, et encore à la pression des familles ainsi qu'à celle des médecins qui se reposent sur elles. Quand on est traité comme un citoyen lambda, on vénère l'infirmière parce que le médecin ne passe visiter le malade que cinq minutes chaque matin. Voilà de la vraie pénibilité, et je ne suis pas sûre que l'on puisse l'assumer jusqu'à soixante-cinq ans.
Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur pour avis. - La ministre a souligné ce qu'il en est dans certains services, mais je reconnais qu'aujourd'hui, la pénibilité devient plus psychologique et cette pression quotidienne est très lourde à supporter.
M. Gérard Dériot. - La pénibilité du métier d'infirmière est en effet aujourd'hui avant tout psychologique : les tâches physiques sont davantage dévolues aux aides soignantes, et le métier d'infirmière est devenu plus intellectuel, ce qui justifie leur reclassement. La question de la pénibilité devra être prise en compte dans la discussion sur les retraites.
M. Jacky Le Menn. - Je comprends la logique de segmentation de la ministre, qui évacue la question des retraites, mais en 1991, la difficulté de la tâche des instituteurs fut prise en compte... Il faut discuter de la question de la pénibilité, sans nécessairement la relier à celle de la retraite. Comme l'a souligné Nicolas About, cette pénibilité varie au sein d'un même métier : travailler dans un service de soins palliatifs, par exemple, est difficilement supportable plus de quelques années.
Certes, appliquer le dispositif de 1991 aux 112 000 infirmiers coûterait cher, mais ce serait une forme de reconnaissance. Le personnel paramédical mérite d'être aussi bien défendu que les enseignants. Si les syndicats, à l'exception du syndicat national des cadres hospitaliers (SNCH), ont refusé de siéger au conseil supérieur de la fonction publique hospitalière, c'est à cause de ce problème de simultanéité.
Enfin, pour que la réforme soit acceptée sans douleur, il serait opportun d'allonger le délai de réflexion. Ce serait une marque de considération, notamment pour le personnel plus ancien.
Mme Isabelle Debré. - La pénibilité devrait être prise en compte plus dans la rémunération que pour la retraite. Cela serait plus facile si nous avions un compte notionnel. Le métier d'infirmière est indéniablement pénible. Il faudrait travailler sur l'accompagnement, comme nous le faisons dans nos mairies pour les aides à domicile. Sur la question du délai d'option, je suis pleinement rassurée par l'engagement de la ministre.
Mme Annie David. - Je ne pense pas que le groupe CRC-SPG votera ce texte.
Mme Christiane Kammermann. - Le délai de six mois me paraît suffisant. En raison du surcroît de travail auquel elles ont à faire face, les infirmières ne sont plus toujours ce qu'elles étaient autrefois : j'ai vu des comportements lamentables dans les grands hôpitaux de Paris. Nous manquons d'infirmières.
M. Yves Daudigny. - Pour avoir passé cinquante nuits à l'hôpital, je sais combien la charge psychologique des infirmières est forte et l'attachement des malades qui comptent sur elles au quotidien.
Je comprends que reprendre le dispositif de 1991 coûterait trop cher, mais ne peut-on imaginer une solution intermédiaire, moins coûteuse, qui éviterait de pénaliser les infirmières déjà en place ?
Enfin, je suis favorable à l'allongement du délai pour le droit d'option, que le télescopage avec la réforme des retraites risque de réduire à deux mois seulement.
Mme Françoise Henneron. - Je veux moi aussi féliciter Sylvie Desmarescaux.
Mme Sylvie Desmarescaux, rapporteur pour avis. - Je vous remercie pour vos témoignages. C'est aussi au personnel infirmier que nous avons rendu hommage.
Enfin, n'en déplaise à la ministre, le vote de la réforme des retraites amputera bien le délai de réflexion des infirmières pour exercer le droit d'option.
Mme Muguette Dini, présidente. - Notre rapporteur n'a pas déposé d'amendements sur ce texte. Notre commission étant saisie pour avis, il faudra déposer vos amendements, si vous en avez, auprès de la commission des lois.
La commission donne un avis favorable à l'adoption de l'article 30.
Nomination d'un rapporteur
La commission procède ensuite à la nomination d'un rapporteur.
Alain Gournac est désigné rapporteur sur le projet de loi n° 446 (2009-2010) complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008.
Organisme extraparlementaire - Désignation d'un membre
Puis la commission procède à la désignation d'un candidat pour siéger au sein du conseil supérieur des prestations sociales agricoles.
Jean-Marc Juilhard est désigné.
Questions diverses
La commission procède à la désignation des membres de la mission qui se rendra au Québec en septembre prochain.
Mme Muguette Dini, présidente. - Sur proposition des groupes, la délégation qui se rendra au Québec en septembre prochain sera ainsi composée : Muguette Dini, présidente, Claire-Lise Campion, Christiane Demontès, Alain Gournac, Jean-Marc Juilhard, Isabelle Pasquet et janine Rozier.
Conclusions de la Mecss sur le rendez-vous 2010 pour les retraites - Communication
Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission prend connaissance des conclusions de la Mecss sur le rendez-vous 2010 pour les retraites, présentées par Mme Christiane Demontès et M. Dominique Leclerc, rapporteurs.
Mme Muguette Dini, présidente. - La Mecss vient d'adopter le rapport qu'elle a consacré au rendez-vous 2010 pour les retraites, dont elle a souhaité présenter aussitôt les conclusions à la commission.
Mme Christiane Demontès, rapporteure. - Après quatre mois d'auditions, la Mecss a établi son rapport sur le rendez-vous 2010 pour les retraites qui a pour ambition d'explorer les pistes susceptibles, à court et plus long terme, de régler la situation financière urgente des retraites, et aussi de restaurer le pacte intergénérationnel aujourd'hui gravement compromis.
Les aléas de l'histoire ont conduit à organiser le système de retraite sur une base socioprofessionnelle, ce qui explique, d'ailleurs, sa complexité. Il comprend trois étages :
- les vingt et un régimes de base obligatoires (régime général, RSI, MSA, régimes spéciaux) ;
- les régimes complémentaires obligatoires du secteur privé, notamment l'Agirc et l'Arrco ;
- les dispositifs d'épargne retraite collective et individuelle, comme le Perp ou Perco.
Pour ajouter à la complexité, les techniques de calcul des droits à la retraite diffèrent selon les régimes : les régimes de base fonctionnent en annuités, les régimes complémentaires par points. En outre, les paramètres de calcul des pensions sont encore plus divers, qu'il s'agisse du décompte de la durée d'assurance, du salaire de référence, de l'âge de départ ou du taux de liquidation.
Toutefois, ce système a fait ses preuves en assurant aux retraités un niveau de vie comparable à celui des actifs. Depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, quatre évolutions sont observables :
- l'augmentation du montant des pensions au fil des générations, supérieure à celle de l'inflation ;
- la progression régulière du niveau de vie moyen des retraités depuis 1996 ;
- la quasi-équivalence entre le niveau de vie moyen des retraités et celui des actifs, dès lors qu'on tient compte des revenus du patrimoine, plus élevés chez les retraités ;
- la stabilisation à 10 % du taux de pauvreté des personnes de soixante ans et plus - soit un niveau inférieur à celui de l'ensemble de la population (13 %), et un net recul depuis 1970 où il était de 30 %.
Cependant, ces moyennes masquent des disparités importantes : 10 % des retraités, principalement ceux ayant eu une carrière incomplète et les femmes, perçoivent moins de 913 euros par mois.
La prise de conscience des difficultés démographiques et financières du système de retraite ne date pas d'aujourd'hui. Au cours des vingt dernières années, plusieurs rapports importants y ont été consacrés, qui ont inspiré les grandes réformes successives du système de retraite.
Celle de 1993 a engagé trois évolutions majeures :
- la fixation d'une durée d'assurance de cent soixante trimestres pour liquider une pension à taux plein dans le régime général et les régimes alignés ;
- le calcul de la pension sur la base du salaire des vingt-cinq (et non plus des dix) meilleures années, toujours dans le régime général et les régimes alignés ;
- l'indexation annuelle des pensions sur les prix et non plus sur les salaires.
La deuxième réforme d'ampleur, mise en oeuvre en 2003, a fait de la durée d'assurance le paramètre essentiel d'ajustement du système de retraite, tout en posant le principe d'un rapport constant entre la durée d'activité (deux tiers) et la durée de la retraite (un tiers). Elle a, en outre, aligné la fonction publique sur le secteur privé en termes de durée d'assurance, de calcul de la revalorisation annuelle des pensions et d'instauration progressive d'une surcote et d'une décote. En revanche, elle a laissé intacte une particularité du régime des fonctionnaires : celle du calcul de la pension sur la base des six derniers mois de salaire. Elle a, par ailleurs, mis en place un dispositif de retraite anticipée pour longue carrière, équitable mais coûteux.
La dernière réforme en date est celle des régimes spéciaux, réalisée en 2007 et 2008. Son objectif a été d'harmoniser les principaux paramètres de droit et de calcul appliqués par les régimes spéciaux, la SNCF ou la RATP notamment, avec ceux mis en oeuvre dans la fonction publique.
En définitive, toutes ces réformes ont consisté, pour l'essentiel, à accroître la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une pension de retraite à taux plein. Pourtant, elles n'ont pas permis d'assurer la soutenabilité financière des régimes de retraite : celle-ci est plus menacée que jamais, pour des raisons à la fois structurelles et conjoncturelles.
Le système est, en effet, dans une situation de déséquilibre financier dramatique. Sur les 270 milliards d'euros que la France y consacrera cette année, soit 13 % du Pib, plus de 11 % ne sont désormais plus couverts par les recettes : le besoin de financement de l'ensemble du système de retraite sera de 30 milliards d'euros en 2010, ce qui s'explique principalement par deux facteurs démographiques :
- la dégradation continue du rapport cotisants-retraités, passé de 4 en 1960 à 1,43 aujourd'hui ;
- l'allongement de l'espérance de vie (de six ans depuis les années quatre-vingt).
A quoi s'ajoutent les pertes de recettes résultant de la crise économique du fait de la contraction des recettes assises sur les revenus d'activité.
Les dernières projections financières du Cor font apparaître un besoin de financement de 38 à 40 milliards d'euros par an dès 2015, c'est-à-dire demain. A l'horizon 2050, à législation inchangée, il serait compris entre 72 et 115 milliards en fonction des hypothèses retenues. Une telle évolution n'est simplement pas supportable et menace la survie du système.
Or, les effets à attendre d'une modification des paramètres d'équilibre des régimes de retraite peuvent prendre jusqu'à vingt ans pour être perceptibles, de sorte qu'il est nécessaire d'agir le plus en amont possible. Tel est le premier enjeu du rendez-vous 2010 pour les retraites.
Enfin, nous avons, au-delà de cette approche financière, souhaité insister sur la dimension sociétale du problème des retraites. On observe en effet une grave perte de confiance de la part des jeunes générations.
La norme était celle d'un contrat social passé entre les générations 1 (les parents) et 2 (les enfants). Il engage aujourd'hui la génération 3 (les petits-enfants) car les pensions servies aux retraités actuels sont financées par la dette dont hériteront leurs petits-enfants.
Le risque est réel de voir les jeunes actifs d'aujourd'hui et de demain refuser de cotiser plus et/ou de travailler plus longtemps. Il est impératif de leur redonner confiance. C'est donc par la préparation du système de retraite de 2030 que passe la refondation du pacte intergénérationnel.
La crédibilité du système de retraite est également gravement entamée par la méthode de réforme. Sur le principe, le choix d'un pilotage par rendez-vous quadriennaux retenu en 2003 était judicieux mais par manque de pédagogie et de transparence sur les objectifs qui leur sont assignés, ces rendez-vous sont perçus par l'opinion publique comme anxiogènes, encourageant certains assurés à anticiper leur départ dans la crainte de règles futures plus strictes.
Assurément, repenser la méthode de réforme participe d'une modernisation durable du système de retraite.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. - Ce constat appelle évidemment des réponses. C'est tout l'objectif du rendez-vous 2010 qui doit être l'occasion d'agir de manière déterminée pour rétablir l'équilibre financier du système. La situation actuelle justifie d'utiliser tous les leviers disponibles car aucun n'est à lui seul capable de rétablir les comptes de l'assurance vieillesse, ce que les travaux du Cor ont démontré.
Trois paramètres sont mobilisables : le taux de remplacement et le niveau des pensions, l'âge effectif de départ en retraite, le niveau des recettes du système.
En ce qui concerne le taux de remplacement et le niveau des pensions, si la grande réussite du système de retraite français a été d'assurer aux retraités un niveau de vie proche de celui des actifs, la Mecss n'a pas jugé envisageable de diminuer le montant des pensions. Cela constituerait une régression évidente, d'autant que le niveau relatif des pensions dans le secteur privé, indexé sur les prix, est déjà en diminution.
En revanche, il est souhaitable de réexaminer les règles fiscales dérogatoires dont bénéficient aujourd'hui les retraités.
Deuxième paramètre, l'âge effectif de départ en retraite qui, à l'évidence, est essentiel pour le redressement financier du système de retraite. L'âge de cessation d'activité est, en France, particulièrement bas : 58,3 ans pour le régime général. L'âge de liquidation des droits à la retraite s'établit, pour sa part, autour de soixante et un ans et demi, ce qui montre qu'un grand nombre de salariés n'est plus en activité au moment de la liquidation de la retraite. Compte tenu de la progression continue de l'espérance de vie, il est absolument nécessaire de prolonger la durée d'activité. Deux moyens permettent d'y parvenir :
- augmenter la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein ;
- relever les âges légaux d'ouverture des droits et d'obtention d'une pension à taux plein.
En ce qui concerne la durée de cotisation, la loi de 2003 a posé le principe d'un maintien, au fil du temps, du rapport entre durée de cotisation et durée moyenne de retraite qui est, en gros, l'espérance de vie à soixante ans. En conséquence, la durée de cotisation pour une retraite à taux plein sera de quarante et un ans en 2012. Au-delà, l'évolution prévisible de ce rapport entraînera l'évolution des durées d'assurance requises, qui seront alors fixées par décret.
Selon le Cor, cela pourrait impliquer un passage à quarante et un ans et demi de cotisations en 2020, puis à quarante-deux ans un quart en 2030 et à quarante-trois ans et demi en 2050.
La Mecss a estimé que la méthode posée par la loi de 2003 est pertinente et doit être conservée. La future loi pourrait retenir le principe d'un passage de quarante et un à quarante et un ans et demi de cotisations entre 2012 et 2020.
En matière d'âge légal de départ, la France figure parmi les rares pays qui ont conservé l'âge de la retraite à soixante ans malgré l'allongement de l'espérance de vie. Il est donc légitime de poser la question du relèvement de cet âge minimal.
Mais cette piste se heurte aussitôt au taux d'emploi des seniors, qui reste en France l'un des plus bas des pays développés et qui peut laisser craindre que le report de l'âge légal ne fasse qu'accroître le nombre de chômeurs âgés. Toutefois, les auditions ont montré que l'âge de soixante ans fait lui-même obstacle à l'emploi des seniors, dans la mesure où la proximité de l'âge de la retraite n'encourage pas leur embauche ou leur maintien dans l'emploi.
Aussi, l'âge minimal de départ pourrait faire partie des leviers à activer en 2010, à deux conditions : d'une part, engager une politique très active en faveur de l'emploi des seniors, d'autre part, prendre en compte la pénibilité de certains métiers pour ne pas pénaliser les travailleurs dont elle a réduit l'espérance de vie.
Ceci étant, le relèvement de l'âge effectif de départ en retraite ne sera pas suffisant. Les mesures relatives à l'âge et à la durée de cotisations ne permettraient de couvrir, au mieux, que 50 % des besoins de financement de la seule Cnav à l'horizon 2030. En outre, ces mesures d'âge ont des effets progressifs et laissent entière la question des déficits actuels.
Il est donc indispensable de rechercher de nouvelles recettes sauf à accepter l'accumulation des déficits et la constitution d'une dette sociale considérable, dont la charge reposera sur les générations futures.
Quatrième paramètre, les ressources du système. Ici encore, la mobilisation d'une seule catégorie de ressources ne pourra pas suffire : il ne s'agit pas de trouver quelques dizaines ou centaines de millions d'euros, mais bien plusieurs milliards.
Trois voies sont possibles :
- l'augmentation des cotisations, qui sont la ressource principale des régimes de retraite ;
- l'élargissement de l'assiette des prélèvements ;
- la mobilisation de ressources nouvelles.
En ce qui concerne les cotisations, la loi Fillon prévoyait un redéploiement des cotisations chômage au bénéfice des cotisations vieillesse. Ce transfert n'a pas été possible pour l'instant, mais il ne doit pas pour autant être abandonné et devra être réalisé dès que la situation de l'emploi le permettra. En revanche, augmenter les cotisations ne nous a pas semblé pertinent dans la mesure où elles affectent le coût du travail et la compétitivité des entreprises.
Deuxième levier possible : l'élargissement de l'assiette des cotisations. Celle-ci est aujourd'hui très concentrée sur les revenus du travail, et plus particulièrement sur la partie salariale de ces revenus. Il existe, de plus, de nombreux mécanismes d'exonération, d'exemption ou de réduction, dont le bien-fondé mériterait d'être examiné. Sur ce sujet, la Mecss préconise une annualisation du calcul des exonérations de cotisations, dont on peut attendre 2 milliards d'économies par an.
Naturellement, la recherche de recettes complémentaires passe aussi par la poursuite du réexamen de l'ensemble des niches sociales.
Quelques pistes sont avancées :
- un élargissement de l'assiette du forfait social ;
- un relèvement du taux de ce forfait, dont le montant reste faible ;
- un relèvement du taux spécifique applicable aux attributions de stock-options et d'actions gratuites ;
- une remise à plat de la taxation des indemnités de rupture ;
- la taxation des retraites chapeau.
Enfin, le rééquilibrage du système des retraites doit sans doute passer par la mobilisation de ressources nouvelles. Une première possibilité consisterait à réexaminer les avantages fiscaux spécifiques aux retraités qui bénéficient notamment d'un taux réduit de CSG sur les pensions. La CSG des retraités imposables pourrait être alignée sur celle des actifs, ce qui permettrait d'épargner les petites retraites et rapporterait environ 2 milliards d'euros. Une telle convergence s'inscrirait dans la logique de la CSG qui est censée être un prélèvement universel.
Autre hypothèse : instaurer un prélèvement spécifique sur les revenus du capital, qui s'ajouterait aux prélèvements existants. Relever d'un point le taux global de ces prélèvements rapporterait un peu plus de 1,1 milliard d'euros. Il serait également possible de créer une contribution additionnelle à l'impôt sur le revenu pour les contribuables ayant un revenu particulièrement élevé.
D'autres pistes, plus radicales, ont été évoquées : le remplacement des cotisations sociales actuelles par une autre assiette, qui pourrait être la cotisation sur la valeur ajoutée, la TVA ou la CSG :
- la plus réaliste consisterait probablement à envisager un transfert de cotisations d'assurance maladie vers les régimes de retraite, en gageant ce transfert par une légère augmentation de la CSG au profit de la branche maladie ;
- asseoir les cotisations sociales non plus sur la masse salariale mais sur la valeur ajoutée semble d'un effet particulièrement incertain et pourrait avoir pour conséquence de pénaliser l'investissement ;
- quant à la TVA sociale, elle aurait l'avantage d'avoir un rendement élevé et d'être relativement indolore, mais elle suscite depuis l'origine certaines réserves de la commission des affaires sociales, notamment parce qu'elle présente un risque inflationniste, que les expériences étrangères ne sont pas entièrement probantes et que les risques de fraude sont réels.
En ce qui concerne les autres leviers financiers, le fonds de réserve des retraites, qui dispose actuellement de 33 milliards d'euros, doit être sanctuarisé pour réserver son utilisation à partir de 2020. Quant au fonds de solidarité vieillesse, il est souhaitable qu'il assume le plus possible l'ensemble des avantages non contributifs du système de retraite et bénéficie à cette fin de ressources pérennes.
Enfin, l'épargne retraite ne sera jamais qu'un complément à la retraite par répartition. L'objectif dans ce domaine ne doit pas être de créer de nouveaux produits mais d'assouplir le fonctionnement des contrats existants pour les rendre plus attractifs en visant spécifiquement les jeunes qui doivent être incités à épargner tôt, les salariés des petites et très petites entreprises qui n'ont pas accès à une épargne retraite collective et les personnes aux revenus très modestes. A cet égard, la Mecss se rendra prochainement en Allemagne pour tirer les leçons de la réforme conduite par le ministre Riester en la matière.
Ces actions paramétriques ne seront toutefois efficaces que si politique de l'emploi et retraites sont des sujets traités conjointement.
Ainsi, le rendez-vous 2010 devra aussi prendre en compte la pénibilité du travail, dont les effets sur l'espérance de vie sont clairement établis. Certes, la problématique de la pénibilité relève moins des retraites que des conditions de travail. Mais, à court terme au moins, il est souhaitable qu'elle soit prise en compte dans le volet « retraites », afin d'apporter une réponse aux personnes qui y sont déjà exposées. Sur ce sujet, la proposition de Serge Volkoff, combinant une approche à la fois individuelle et collective, semble pertinente. Un système à trois niveaux pourrait être proposé :
- le premier identifierait les travailleurs qui ne subissent pas la pénibilité ;
- le troisième déterminerait les métiers intrinsèquement pénibles ;
- le niveau intermédiaire conduirait une commission départementale à étudier les dossiers individuels pour identifier ceux qui justifient des mesures particulières de prise en charge.
Au-delà de la pénibilité, une réflexion globale mérite d'être menée sur le rapport au travail dans notre société. Le travail est aujourd'hui trop souvent ressenti comme une source de souffrance, d'où l'aspiration à partir le plus tôt possible à la retraite. Les conclusions de la mission d'information sur le mal-être au travail auront donc une grande importance.
En ce qui concerne l'emploi des seniors, il est évident qu'une politique très active doit être poursuivie si l'on veut éviter que le report de l'âge légal de départ en retraite se traduise par une augmentation du chômage. Pour cela, il faudra mettre fin aux préretraites déguisées, examiner de très près le dispositif de rupture conventionnelle, qui connaît un grand succès et qui risque de devenir une nouvelle voie de sortie du marché du travail pour les seniors. Il faudra surtout promouvoir une meilleure gestion des ressources humaines en fin de vie active. Cela implique de développer les bilans de compétences au cours de la carrière, de promouvoir la validation des acquis de l'expérience, de favoriser la formation des seniors, d'aménager les tâches, les postes et les horaires en fin de vie active.
De nombreuses mesures en ce sens ont déjà été prises et un grand nombre d'accords de branches conclus sur ce sujet. Il faudra néanmoins poursuivre et intensifier cet effort.
Telles sont les pistes que la Mecss propose pour faciliter le rétablissement des comptes du système de retraite.
Au-delà des mesures à effet immédiat, elle a aussi souhaité tracer des perspectives à plus long terme afin de restaurer un pacte intergénérationnel gravement menacé.
Mme Christiane Demontès, rapporteure. - Nous ne pouvons, en effet, limiter l'ambition du rendez-vous 2010 à une modification des paramètres du système. S'interdire toute perspective d'évolutions plus substantielles et pérennes constituerait une double erreur :
- d'une part, attendre le retour à l'équilibre des comptes pour réfléchir à une réforme plus profonde consiste, en fait, à repousser l'échéance pendant des décennies, sinon pour toujours ;
- d'autre part et surtout, le déficit n'est pas le seul mal dont souffrent nos régimes de retraite, trop complexes, opaques et souvent inéquitables.
Il faut ouvrir le débat sur une réforme qui permettrait de moderniser le système, de le rendre plus transparent, plus lisible et plus juste.
En dépit des réformes passées, un certain nombre de règles spécifiques perdurent et la multiplicité des régimes demeure une source de complexité, en particulier pour les assurés ayant relevé de plusieurs régimes au cours de leur carrière professionnelle. Il en résulte aussi l'inconvénient majeur de créer des situations inéquitables entre assurés.
Cinq points sont particulièrement révélateurs de cet état de fait :
- la persistance de règles de calcul des pensions différentes suivant les régimes ;
- l'inégale répartition de l'effort contributif entre les assurés : taux de cotisation variables selon les régimes, assiettes de ces cotisations différentes ;
- la très grande hétérogénéité des droits familiaux et conjugaux (majorations de durée d'assurance, majorations de pension pour trois enfants et plus, pensions de réversion, etc.) ;
- la différence de traitement entre mono et polypensionnés ;
- les mécanismes de compensation entre régimes. Ces transferts financiers, régulièrement critiqués par les régimes eux-mêmes, ne répondent plus à leur objectif initial de stricte compensation des écarts démographiques.
Ce constat plaide, en définitive, pour un rapprochement progressif des règles entre les régimes.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. - Nous considérons que des évolutions plus profondes du système doivent être désormais engagées.
En ce qui concerne les règles de calcul des pensions et les efforts contributifs des régimes, des rapprochements sont souhaitables sur le salaire de référence pris en compte pour le calcul de la pension, les âges d'ouverture des droits et les taux de cotisations.
Naturellement, ces évolutions devront être progressives et tenir compte du fait que les régimes spéciaux ont été réformés il y a seulement deux ans.
Rapprocher les régimes ne signifie pas créer un régime unique, mais opérer des regroupements pouvant avoir un sens. La création d'une caisse unique pour l'ensemble des fonctionnaires mériterait par exemple d'être étudiée. Ces rapprochements pourraient être facilités si les gestionnaires des régimes étaient conduits à échanger régulièrement entre eux sur leurs modes de fonctionnement. A cet égard, le concept de « maison commune des retraites » proposé par la CGT est intéressant. Il serait également important que les architectures des différents régimes soient harmonisées pour accroître la cohérence des gouvernances.
Enfin et surtout, ce rendez-vous doit permettre d'engager la refondation du système, de préparer une réforme structurelle qui ne peut être conduite que sur une période longue d'environ vingt ans. La situation actuelle, caractérisée par la montée sourde de tensions intergénérationnelles, ne peut perdurer. C'est pourquoi la Mecss propose d'envisager le passage progressif à un système par points dans les régimes de base.
Plusieurs avantages peuvent être attendus de cette proposition :
- toutes les cotisations versées au cours d'une carrière donnent des droits à pension et la pension versée est directement dépendante des cotisations accumulées ;
- les éléments de solidarité du système sont isolés et identifiables ;
- un régime par points évite de prendre des engagements qui ne peuvent être tenus : la valeur de service du point, contrôlée par les gestionnaires du régime, devient l'élément central de régulation sans empêcher cependant un relèvement des cotisations. Celles-ci donnent alors de nouveaux droits à pension ;
- ce système est surtout particulièrement lisible pour les assurés, et donc susceptible de rassurer des jeunes générations qui ne croient plus dans notre modèle de retraite.
Progressivement, cette évolution permettrait d'instaurer une retraite « à la carte », les salariés effectuant des choix éclairés entre une durée d'activité plus longue et une meilleure pension ou une durée d'activité plus courte et une pension plus faible.
En tout état de cause, cette proposition doit être le fruit d'un processus de débat bien plus large que la concertation organisée dans le cadre des rendez-vous périodiques sur les retraites. En Suède, le processus de refondation du système s'est étalé sur une quinzaine d'années. Le rendez-vous 2010 pourrait donc être l'occasion de poser le principe de cette réforme et d'engager un grand débat démocratique, peut-être même d'un « Grenelle des retraites » pour obtenir une véritable refondation du pacte intergénérationnel qui a autrefois présidé à la création de l'assurance vieillesse.
M. Guy Fischer. - J'ai voté contre l'adoption du rapport au cours de la réunion de la Mecss. Celui-ci reflète, certes, les nombreuses auditions conduites pour le préparer, mais il contient des propositions inacceptables pour le groupe CRC-SPG qui a élaboré une contribution destinée à être annexée au rapport. Les difficultés actuelles n'ont pas pour fondement essentiel la démographie, comme le Gouvernement ne cesse de le répéter, mais elles résultent d'un financement insuffisant lié à la diminution des recettes. Les multiples exonérations et exemptions de cotisations sociales assèchent, année après année, les comptes de la sécurité sociale et sont de véritables cadeaux au patronat. Cette politique conduit à substituer de plus en plus aux salaires des éléments aléatoires et individualisés, tels que l'intéressement et la participation. Les exonérations de charges sur les plus bas salaires sont de véritables « trappes à bas salaires » qui conduisent à un écrasement des salaires et des retraites. Il convient de revenir sur l'ensemble des dispositifs d'exonérations et d'exemptions, qui ont entraîné un abaissement de 21 % du coût du travail depuis 1992. Plus généralement, la question que le Gouvernement refuse d'aborder est celle du partage des richesses et les mesures envisagées pour relever l'âge de cessation d'activité ne sont pas en mesure de rétablir l'équilibre des comptes. Une augmentation générale de la fiscalité, qui toucherait l'ensemble de la population et notamment les salariés et les retraités, n'est pas acceptable. Petit à petit, on assiste à un transfert du financement de la sécurité sociale des entreprises vers les salariés. Les orientations actuelles du Gouvernement conduisent à douter fortement de sa volonté de préserver le système de retraite, d'autant plus qu'il n'écarte pas une réforme systémique. Or, le passage à un système par points ou à un système en comptes notionnels conduirait à réduire les solidarités et à obliger les salariés à assumer seuls une part toujours plus importante de leur retraite, ce qui justifierait ensuite un passage progressif à la capitalisation. Une telle évolution n'est pas envisageable. En tout état de cause, le groupe CRC-SPG s'opposera à toute remise en cause de la retraite à soixante ans.
M. Alain Vasselle, président de la Mecss. - Par le passé, la sécurité sociale, et notamment l'assurance maladie, ont effectivement subi des pertes de recettes non compensées à cause des exonérations de cotisations sociales décidées par les gouvernements successifs dans le cadre de leur politique de l'emploi. Toutefois, la situation a changé : aujourd'hui, ces exonérations sont, pour l'essentiel, compensées par le budget de l'Etat à l'euro près.
M. Guy Fischer. - Cette compensation est loin d'être totale puisque les exonérations non compensées représentent 2 à 3 milliards d'euros.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Des simulations chiffrées ont-elles été effectuées sur les nouvelles recettes envisagées pour faire face aux déficits ? Par ailleurs, la question de la pénibilité est très liée au mal-être au travail, pour lequel il n'existe pas d'indicateur très précis.
M. Jacky Le Menn. - La fin du rapport montre que la véritable réponse aux difficultés du système de retraites est encore à construire et qu'elle passe par une réforme plus ambitieuse que les modifications périmétriques envisagées. Le report de l'âge légal de départ en retraite n'est aujourd'hui pas acceptable culturellement par les citoyens. Un tel recul impliquerait une politique plus dynamique d'emploi des seniors et pénaliserait les plus modestes qui commencent à travailler le plus tôt et exercent les métiers les plus pénibles.
La prise en compte de la pénibilité est l'une des questions essentielles à résoudre aujourd'hui. Si l'on engageait une réforme beaucoup plus profonde, impliquant par exemple le passage à un système en comptes notionnels, la question de l'âge minimal de départ ne se poserait plus avec la même acuité.
M. Marc Laménie. - Comment pourrait-on simplifier l'architecture des régimes de retraite et parvenir à davantage d'équité ?
Mme Annie David. - Il est impératif de mener une politique d'emploi des seniors beaucoup plus active. Plus généralement, il convient de mettre en oeuvre une véritable politique de plein emploi. Bon nombre de jeunes ne parviennent plus à trouver un emploi avant vingt-trois ou vingt-cinq ans et doivent accepter des emplois précaires, des emplois aidés, qui ne contribuent pas au financement de la protection sociale. La priorité est donc de mettre en oeuvre une politique d'emploi qui permettra d'apporter des recettes nouvelles au système, sans remettre en cause l'âge légal de départ en retraite, ce qui n'empêche pas ceux qui le souhaitent de poursuivre leur activité au-delà de soixante ans.
Mme Janine Rozier. - J'entends bien les propos de Guy Fischer sur le caractère injuste des solutions envisagées pour rééquilibrer les régimes de retraites, mais est-il juste qu'un chauffeur de bus du public parte en retraite plus tôt qu'un chauffeur de bus du privé, ou qu'un cadre du secteur privé paie davantage de cotisations qu'un fonctionnaire de catégorie A ?
M. René Teulade. - Les rapports sur les retraites ont été nombreux depuis vingt ans et beaucoup n'ont pas été suivis d'effet. Ainsi, en 2000, le conseil économique et social a formulé des propositions, qui ont été vivement critiquées par le patronat et n'ont pas été mises en application, alors qu'elles auraient pu contribuer à résoudre les difficultés actuelles. Ce rapport proposait notamment d'alimenter le fonds de réserve des retraites par la cession d'actifs des entreprises nationalisées non soumises à la concurrence. Aujourd'hui, le Cor a établi des projections qui montrent qu'en 2015, le besoin de financement du système de retraite atteindra 40 milliards d'euros. Il convient d'effectuer les simulations nécessaires pour déterminer quelles recettes permettraient de combler ce déficit. Le Cor doit être en mesure de chiffrer l'impact de mesures fiscales éventuelles sur l'équilibre des régimes.
M. Nicolas About. - Il est nécessaire de clarifier le concept de pénibilité car la seule qui mérite une prise en compte au titre des retraites est celle qui entraîne une perte d'espérance de vie. Il faut que les partenaires sociaux définissent, branche par branche, les activités et postes pénibles, les branches devant apporter elles-mêmes des réponses à ces situations. Lorsqu'aucune réponse ne peut être apportée en modifiant les conditions de travail, un fonds de compensation alimenté par les entreprises concernées devrait prendre en charge les éventuels départs anticipés résultant de la pénibilité. Le financement de ces situations ne relève pas de la solidarité nationale, mais bien des entreprises qui ne peuvent ou ne veulent remédier aux situations de pénibilité.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - J'ai apprécié que le rapport fasse des propositions à long terme et je partage le sentiment qu'il est important d'engager immédiatement des convergences entre paramètres et régimes. Le Cor doit aller plus loin dans le chiffrage d'hypothèses pour rééquilibrer les comptes de l'assurance vieillesse en intégrant les différentes mesures d'accroissement des recettes envisageables.
M. Jean Desessard. - Le problème des retraites ne se résume pas à une équation comptable. Il soulève la question du rapport au travail, de la politique de l'emploi, de l'organisation des carrières professionnelles. Tous ces sujets ne seront pas traités dans le cadre de la réforme à venir, qui ne portera que sur les questions financières.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. - Nous avons précisément souhaité ne pas cantonner notre réflexion aux difficultés financières mais aussi aborder les questions d'emploi des seniors et des jeunes et tracer des perspectives à plus long terme. Dans un premier temps, il est nécessaire de faire face à l'urgence que constitue le niveau insoutenable des déficits. Pour conduire cette action, les projections du Cor sont utiles mais elles reposent sur des prévisions qui peuvent être considérées comme optimistes.
En ce qui concerne la pénibilité, la seule qui peut être prise en compte dans le cadre des retraites est bien celle qui porte atteinte à l'espérance de vie. La création d'un fonds de compensation est certainement une piste intéressante à creuser.
Le septième rapport du Cor sur les modalités d'une éventuelle réforme systémique a été élaboré à la demande du Parlement. Il est tout à fait envisageable de solliciter d'autres travaux du Cor, celui-ci pouvant recourir, pour obtenir des éléments chiffrés, à un grand nombre d'organismes spécialisés. En outre, le Cor, en application des missions qui lui sont confiées, est habilité à formuler lui-même des propositions. Le rendez-vous de 2010 doit être l'occasion d'élargir le débat pour pérenniser le système de retraite en engageant des évolutions plus profondes permettant de progresser vers plus de transparence et d'équité.
Mme Christiane Demontès, rapporteure. - Le thème des retraites a été inscrit au programme de travail de la Mecss avant même que soit annoncé le rendez-vous 2010, qui n'était pas prévu par la loi de 2003. Nous n'avions donc pas pour objectif de présenter des propositions complètes en vue de ce rendez-vous, mais bien d'expertiser tous les moyens de faire face à l'urgence financière et de tracer des perspectives pour restaurer le pacte intergénérationnel. Assurément, il conviendrait de disposer de simulations chiffrées précises pour envisager les effets exacts de chaque modification envisageable, notamment en ce qui concerne la recherche de recettes nouvelles. Le rapport insiste surtout sur le fait que le système actuel trouve aujourd'hui ses limites et qu'une véritable réforme est nécessaire. Le but n'est pas de copier un modèle étranger, mais de rechercher une nouvelle architecture adaptée à la culture française en lançant dès à présent un grand débat national sur ce sujet.
La commission prend acte des conclusions du rapport d'information adopté par la Mecss.
Mercredi 19 mai 2010
- Présidence conjointe de Mme Muguette Dini, présidente, et de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances -Contrôle budgétaire de la réforme de l'administration des anciens combattants - Communication
La commission entend, en commun avec la commission des finances, la communication de M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial, et de Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, sur le contrôle budgétaire de la réforme de l'administration des anciens combattants.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - La communication sur la réforme de l'administration des anciens combattants, que vont vous présenter Janine Rozier et Jean-Marc Todeschini, est une coproduction de nos deux commissions et je salue tout particulièrement la présence en force de la commission des affaires sociales dans notre salle.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. - Je me réjouis du travail commun réalisé entre nos deux commissions et je laisse la parole aux rapporteurs.
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur pour la commission des finances. - Les rapporteurs successifs de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » se sont inquiétés à plusieurs reprises de l'ajustement de ses moyens à la diminution inéluctable du nombre d'ayants droit à réparation. Un premier contrôle a été mené, fin 2007, par la commission des finances sur les directions interdépartementales des anciens combattants (DIAC).
Dans le même temps, le premier Conseil de modernisation des politiques publiques décidait, le 12 décembre 2007, de mettre en oeuvre « la rationalisation de l'administration au service des anciens combattants ». La réforme, intervenant dans le cadre de la RGPP, a pour conséquence principale la suppression progressive de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS), d'ici à la fin de 2011. Elle vise principalement à simplifier et moderniser l'organisation de l'administration au service des anciens combattants avec la création d'un point unique d'accueil et de renseignements de proximité, le service départemental de l'Office national des anciens combattants (ONAC).
Le contrôle de 2008 a donc accompagné le début de la réforme. À mi-parcours de sa mise en oeuvre et compte tenu des inquiétudes soulevées par cette décision dans la population combattante comme chez les personnels, il nous a semblé important de nous assurer que les choix retenus permettront bien de garantir la réparation équitable et l'accompagnement de qualité dus à nos anciens combattants et d'assurer le reclassement des personnels concernés par cette mutation.
La DSPRS dispose de services déconcentrés : les dix-huit DIAC, le service des ressortissants résidant à l'étranger de Château-Chinon et les services de Casablanca, de Tunis et d'Alger. Elle exerce également la tutelle sur les deux établissements publics opérateurs du programme : l'ONAC et l'Institution nationale des Invalides (INI). L'Observatoire de la santé des vétérans lui est également rattaché.
Pour mettre en oeuvre cette réforme, deux instances ont été créées : un comité de pilotage, présidé par le directeur de cabinet du Secrétaire d'Etat, et une commission de suivi, présidée par la directrice de la DSPRS. Une direction de projet a été constituée pour coordonner le travail de près de cent personnes réparties en quinze groupes de travail.
Dix missions ont été identifiées parmi celles exercées par la DSPRS, dont une part a été transférée vers l'ONAC qui assure une fonction de guichet unique à l'échelon départemental. Les autres sont reprises soit par d'autres services du ministère de la défense, soit par les établissements publics qui étaient opérateurs rattachés de la direction supprimée.
Les principaux transferts d'effectifs et de crédits ont été actés et un calendrier de fermeture des sites a été défini : il prévoit la fermeture des directions interdépartementales de la DSPRS de manière échelonnée en 2010, et celle des directions interrégionales, du service des ressortissants à l'étranger implanté à Château-Chinon et de l'administration centrale de la DSPRS, à Paris et à Caen, tout au long de l'année 2011
Les organismes « repreneurs des missions » s'organisent progressivement, avec l'aide de la DSPRS, au rythme des fermetures programmées des dix-huit services déconcentrés. Les premiers transferts ont eu lieu dès le 1er janvier 2010.
Nous avons choisi de nous déplacer à Montpellier, le 1er avril, sur un site en cours de fermeture puisqu'elle intervenait le 1er mai. La directrice de l'ONAC s'est montrée confiante dans la capacité du service à remplir sa mission nouvelle de guichet de proximité.
Les responsables de la DIAC, le médiateur mobilité régional de la défense et le secrétaire général de la préfecture de l'Hérault ont évoqué les difficultés de reclassement, liées aux restructurations locales de la défense conjuguées à la situation régionale de l'emploi. Elles ont été confirmées par les représentants du personnel de la DIAC. Selon le dernier recensement transmis par la DSPRS, au 30 avril, veille de la fermeture de la DIAC, sur les cinquante-deux présents au début de l'opération il en restait seize à reclasser.
En ce qui concerne l'ensemble du personnel, sur les 1 352 équivalents temps plein (ETP) affectés par la réforme, 624 auront été supprimés, 210 transférés en interne et 518 transférés aux opérateurs au cours de la période 2008-2012. Ainsi, le montant des transferts s'établit à environ 23 millions d'euros pour les dépenses de personnel à comparer avec les 55,2 millions attribués au même poste selon la loi de règlement des comptes pour 2008.
Il convient également de prendre en compte la réduction des personnels de l'ONAC à hauteur de cent cinquante personnes, dont trente pour le siège, permise par le non remplacement de départs à la retraite. Cette réduction intervient malgré les nouvelles missions qui lui sont confiées. Les économies pour les dépenses de fonctionnement sont plus difficiles à estimer, notamment en raison des transferts. Ainsi, l'ensemble des crédits transférés à l'ONAC s'établit à 13,8 millions d'euros en 2010 et 3 millions en 2011.
Je conclurai, d'une part, en approuvant le schéma retenu, qui prévoit le maintien d'un service de proximité pour la population combattante, tout en confortant le rôle de l'ONAC, d'autre part, en vous exposant mes sujets d'inquiétude, même si nous avons pu constater que cette réforme donne, dans son ensemble, satisfaction à la majorité des associations.
Tout d'abord, je souhaite que cette réforme ne laisse pas des personnels qui s'étaient, depuis des années, investis au service du monde combattant sur le bord du chemin. Je reste donc inquiet quant à la réussite complète du processus de reclassement, même si les autorités qui en ont la charge m'ont paru préoccupées d'aboutir à un minimum de frustrations.
Ensuite, je relève deux points d'achoppement dans cette entreprise : l'inégalité de traitement entre ouvriers de l'État et fonctionnaires en matière d'indemnité de départ volontaire (IDV) et l'existence de sites où les possibilités de reclassement sont amoindries par des restructurations locales d'autres administrations, notamment de la défense, déjà en cours. Je formule le souhait que ces difficultés n'entraînent pas l'application de mesures trop coercitives pour le personnel.
La dernière inquiétude que j'évoquerai porte sur l'avenir de la mission appareillage : sur sa pérennité d'une part, sur le maintien du service de proximité dû à la population handicapée à laquelle elle s'adresse, d'autre part.
Mme Janine Rozier, rapporteur pour la commission des affaires sociales. - Après que Jean-Marc Todeschini vous a rappelé l'historique de la réforme et présenté l'état d'avancement de sa mise en oeuvre, je souhaite revenir sur deux points essentiels : les conditions de reclassement des personnels d'une part, le maintien de la qualité de service pour les usagers, d'autre part.
Grâce au savoir-faire dont le ministère de la défense dispose en matière d'accompagnement des restructurations militaires, le reclassement des personnels concernés par les premières fermetures de directions interdépartementales s'est, jusqu'à présent, déroulé dans des conditions satisfaisantes. Le nouveau dispositif en vigueur depuis 2009 combine en effet incitations financières à la mobilité et au départ et accompagnement personnalisé, au plus près des personnels.
Il est appréciable que tous les personnels, qu'ils relèvent des catégories A, B ou C, profitent du même niveau d'aides à la mobilité, qui varient uniquement en fonction de la situation familiale et de la distance - en particulier selon qu'elle implique ou non un changement de domicile. On regrettera, en revanche, la différence de traitement manifeste entre fonctionnaires et ouvriers de l'État en matière d'IVD : en plus d'un montant d'indemnité plus élevé, les ouvriers de l'État sont les seuls à bénéficier d'une exonération d'impôt sur le revenu et d'un droit à l'indemnisation chômage et peuvent y accéder jusqu'à deux ans avant l'âge d'ouverture du droit à pension, contre cinq ans pour les fonctionnaires. Cette situation crée un fort ressentiment parmi les fonctionnaires et réduit considérablement l'attractivité, pour ces derniers, de cette disposition.
Au-delà des aides matérielles, le dispositif d'accompagnement des restructurations se décline, au niveau local, entre les antennes mobilité reclassement (AMR), chargées du suivi des personnels tout au long du processus, et les commissions locales de restructuration (CLR), instances de concertation avec les organisations syndicales. Il est complété par l'action des sept médiateurs mobilité qui sont chargés de traiter des cas les plus difficiles et d'assurer l'interface avec les administrations d'accueil. Cet accompagnement personnalisé des agents les a protégés, jusqu'à présent, contre les syndromes d'isolement ou d'abandon et certains drames sociaux vécus lors d'autres restructurations.
Au 30 avril 2010, les services de la DSPRS estimaient qu'une solution avait été trouvée ou était en passe de l'être pour 469 agents, soit près de 58 % des 814 effectifs présents au 1er janvier 2009 : 42 agents avaient pris leur retraite, 16 avaient choisi l'IDV, 192 étaient déjà détachés ou mis à disposition et 97 dossiers de reclassement étaient en cours de traitement, tandis que 117 personnes devront avoir pris leur retraite d'ici à 2012 ; les personnels des directions fermées au 1er mars ont été reclassés sans difficulté majeure de même que ceux des directions de Clermont et Rouen, fermées au 1er mai, et les prévisions sur les fermetures à venir sont plutôt optimistes.
A contrario, les conditions de fermeture des sites de Montpellier et, pour l'avenir, de Limoges ou de Château-Chinon sont plus préoccupantes, car marquées par la conjonction de restructurations civiles et militaires qui limitent considérablement les solutions locales de reclassement.
Autre difficulté : le profil des agents de la DSPRS, dont la moyenne d'âge est plus élevée que dans le reste du ministère - cinquante-deux ans contre quarante cinq ans et dix mois - et qui relèvent majoritairement de la catégorie C, supposés moins mobiles, entraînerait de fortes réticences à la mobilité. Cette dernière idée reçue est cependant mise à mal sur le terrain puisque les solutions de reclassement sont parfois plus difficiles à trouver pour les « catégorie B », aux tâches de secrétariat peu différenciées, que pour les « catégorie C », à la technicité recherchée.
En dernier recours, des procédures plus contraignantes peuvent être mises en oeuvre comme le reclassement d'office après trois refus d'affectation, voire, en cas de refus de ce dernier poste, la mise en disponibilité d'office sans traitement.
Le second objectif poursuivi par la réforme a consisté à préserver le droit à réparation dû à nos anciens combattants en confortant l'ONAC dans son ancrage de proximité : au-delà des missions nouvelles qui leur sont confiées, les services départementaux de l'office sont désormais l'interlocuteur privilégié du monde combattant et doivent à ce titre accueillir, informer et orienter les ressortissants dans le nouveau système. À cet égard, on regrettera seulement que les formations à l'accueil et aux nouvelles procédures des personnels de l'ONAC n'aient pas été organisées plus en amont des premières fermetures. L'interconnexion avec les outils de gestion des services repreneurs doit aussi progresser pour assurer le suivi des dossiers.
Grâce à l'appui de pôles de soutien mutualisant les tâches strictement administratives, les services départementaux seront recentrés sur leurs missions de proximité et les temps de traitement réduits.
Au vu, notamment, des premiers retours de terrain, la qualité du service rendu par les nouveaux services repreneurs apparaît aussi préservée. Cette réussite, qu'il faudra toutefois valider sur plus long terme, s'explique d'abord par le caractère progressif de la réforme mais surtout par la logique de métier qui a procédé au choix des services : ainsi, la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS), choisie pour la gestion des soins médicaux gratuits, avait déjà pour mission de rembourser des prestations maladie et maternité et le service des pensions de La Rochelle traitait déjà des pensions d'invalidité des militaires. Certains repreneurs ont dû gérer des difficultés transitoires, par exemple pour résoudre les différences de régimes indemnitaires avec les personnels reclassés - c'est le cas de l'INI pour le rattachement du Centre d'études et de recherche sur l'appareillage des handicapés (CERAH) - ou pour recruter des personnels supplémentaires : les soixante-quinze postes ouverts aux agents de la DSPRS pour gérer les soins médicaux gratuits n'ayant pas été pourvus, la CNMSS a été contrainte d'ouvrir un concours pour quarante postes, avec toutes les charges d'organisation correspondantes. Elle a cependant accueilli très favorablement cette nouvelle activité, dans un contexte marqué par la remise en cause régulière des régimes spéciaux. De la même façon, l'INI voit, avec la reprise du CERAH, sa capacité d'expertise en matière d'appareillage renforcée.
Malgré la satisfaction générale exprimée par la très grande majorité de nos interlocuteurs, plusieurs points particuliers, liés à la réforme elle-même ou aux chantiers de modernisation en cours à l'ONAC, soulèvent encore l'inquiétude des ressortissants et de leurs représentants : outre la crainte que les services de l'office ne disposent pas de moyens humains et matériels suffisants, ceux-ci souhaitent recevoir l'assurance que les dossiers de PMI seront traités avec la même bienveillance que par le passé. Dans les deux cas, rien ne permettait, à la date de notre contrôle, de douter de la qualité du service rendu.
Autre sujet de vive préoccupation : le devenir du réseau de l'appareillage. En reprenant les consultations et prescriptions d'appareillage, le Service de santé des armées (SSA) a mis en place un maillage territorial souple, combinant sites primaires et sites secondaires et préservant la possibilité de consultations à domicile. Or, si la solution retenue a le mérite d'assurer la proximité, plusieurs éléments attestent de son caractère non pérenne : chute d'activité prévisible dans les cinq prochaines années, refus de la CNAM de conventionner, pour ses assurés, avec le nouvel opérateur, prochains départs à la retraite de nombreux médecins et techniciens et mise à disposition par le SSA de praticiens à temps complet auprès d'établissements où ils n'exerceront pourtant qu'une part très minoritaire de leur activité au profit des anciens combattants. Cette problématique se posait déjà, il est vrai, à la DSPRS avant la réforme.
La suppression des « délégués mémoire » et la mise en place de « pôles mémoire » régionalisés, qui fait craindre à certains une baisse de l'activité mémoire de l'office, devraient permettre aux directeurs, par ailleurs déchargés de tâches administratives, d'exercer pleinement leur rôle de chef de file en la matière, avec l'appui des « coordonnateurs mémoire ».
Enfin, et bien que les projets de textes correspondants aient été adoptés à une très large majorité au conseil d'administration de l'ONAC, la création de la fondation « Mémoire et solidarité pour le monde combattant », qui doit reprendre la gestion des établissements médico-sociaux de l'office - écoles de reconversion professionnelle et maisons de retraite - suscite encore, chez une minorité de représentants, la crainte d'une privatisation des établissements ou d'une perte de substance de l'ONAC. De mon point de vue, cette solution a l'avantage de répondre aux difficultés actuelles de gestion des établissements et de leur permettre de faire face aux défis nouveaux du vieillissement, de la dépendance et des handicaps sociaux tout en maintenant un lien fort avec le monde combattant, comme en atteste le fait que les associations resteront majoritaires dans le conseil d'administration de la fondation.
Au terme de cette mission de contrôle budgétaire, il nous est apparu que, dès lors que le reclassement des personnels s'opérait dans des conditions satisfaisantes, chacun avait à gagner dans la réforme :
- le contribuable, d'abord, car la rationalisation administrative doit produire, à terme, des gains financiers et de productivité importants ;
- les ressortissants, ensuite, qui bénéficieront, tout à la fois, du maintien d'un maillage territorial de proximité et de la garantie d'un haut niveau de prestations ;
- les opérateurs, enfin : l'ONAC est consacré dans son rôle de pivot du système quand les autres établissements voient leur capacité d'expertise renforcée.
Ce rapport détaille les interrogations, et parfois les craintes, exprimées par le monde combattant à mesure de l'avancement de la réforme. Nous avons reçu les responsables des principales associations qui ont tous témoigné de leur satisfaction d'avoir un secrétariat d'État bien à eux, en charge de leurs problèmes et à l'écoute de leurs aspirations.
Le monde combattant reste, en tous les cas, très vigilant sur le droit à réparation et attaché au fait que l'ONAC demeure et soit conforté. À part un seul interlocuteur, tous les représentants que nous avons rencontrés étaient sereins et confiants.
M. Gilbert Barbier. - Une question se pose à propos des commissions d'appareillage : ce système paraît aujourd'hui anachronique dans la mesure où il est géré par le service de santé des armées alors que la majorité des appareillés sont désormais des civils. N'y a-t-il pas là une réforme plus profonde à engager quand on connaît la difficulté de personnes handicapées à recourir à un appareillage ? Nous ne mettons pas en cause l'organisation actuelle mais il apparaît un peu surprenant que des commissions qui dépendent du ministère de la défense examinent l'ensemble des dossiers d'appareillage.
M. Guy Fischer. - Ce rapport présente des informations très précises et de nombreux chiffres. Ce contrôle confronte, pour la première fois, une décision prise dans le cadre de la RGPP et son application. Parmi les 1 352 équivalents temps plein dont vous nous avez dit qu'ils étaient affectés par la réforme, combien sont réellement supprimés ? Vous nous avez également indiqué que 210 sont transférés en interne et 518 aux opérateurs sur la période 2008-2012. Je souhaiterais avoir des précisions sur ces chiffres.
Quel est l'impact réel sur le budget ? Le secrétariat d'Etat aux anciens combattants semble a priori sauvé mais qu'en est-il des services départementaux de l'ONAC ? Il n'y a bien souvent que deux ou trois personnes pour assumer le travail et j'en profite pour saluer leur dévouement. Les craintes existent aussi tant sur la pérennité du droit à réparation que sur les conséquences de la suppression des délégués mémoire, à l'heure où nous devons pourtant faire vivre la mémoire.
La reprise de la gestion des établissements médico-sociaux de l'ONAC par la fondation « mémoire et solidarité pour le monde combattant » s'apparente à une privatisation. Quoi qu'il en soit, tous ces renseignements précieux nous serviront sans aucun doute pour préparer les débats budgétaires de l'automne.
Mme Gisèle Printz. - Ma question est simple : est-ce que cette réforme marque le début de la disparition du secrétariat d'Etat aux Anciens combattants ?
M. Claude Jeannerot. - A juste raison, les anciens combattants sont attachés à ce que l'ONAC soit préservé dans son rôle de pivot et que ses activités soient garanties. A-t-on cependant prévu, tout en préservant la spécificité des anciens combattants, la mise en oeuvre de synergies, notamment avec les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ?
M. Marc Laménie. - Je regrette la fermeture de nombreux sites au moment où l'on cherche à promouvoir le devoir de mémoire et où l'on salue le travail des bénévoles ; ceci ne va pas forcément dans le bons sens. Nous sommes conscients de la nécessité de la réforme mais dès lors où l'on touche aux moyens humains, c'est du service de proximité qui disparaît. Dans votre rapport, vous citez le contribuable comme gagnant de la réforme alors que le budget des anciens combattants, qui est déjà en baisse, ne figure pas parmi les plus grandes masses de la loi de finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Il faut saluer le travail remarquable de nos deux rapporteurs et la qualité de leurs communications. Si le budget d'une mission diminue, nous devons nous en réjouir, car c'est le signe que la dépense publique peut refluer. Il a été souligné qu'avec des moyens maîtrisés le service est bien rendu et que l'on a pu assurer le reclassement des personnels sans drames humains. La RGPP est conduite, dans ce cas, avec un grand respect des personnes même si, comme l'ont souligné les rapporteurs, nous devons conjuguer le devoir de mémoire avec un nécessaire et constant devoir de vigilance.
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur pour la commission des finances. -Pour avoir été quatre ans chef de cabinet de Jean-Pierre Masseret, alors secrétaire d'Etat aux anciens combattants, j'ai connu l'adossement du secrétariat d'Etat aux anciens combattants au ministère de la défense ; dans ce cadre, la RGPP apparaît beaucoup plus simple que dans d'autres ministères. Je veux rappeler que la hantise principale de l'époque était de voir le secrétariat d'Etat rattaché au ministère des affaires sociales. En ce qui concerne la baisse des crédits, je vous assure que nous avons pu supprimer de nombreux postes budgétés tout simplement parce qu'ils n'étaient pas occupés dans les faits.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Il existe un côté surréaliste à débattre parfois d'emplois théoriques alors que l'on ne parvient pas à connaître précisément le nombre d'emplois réels dans les ministères.
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur pour la commission des finances. - Il faut rappeler que sans l'adossement au ministère de la défense, la spécificité de l'administration des anciens combattants, qui aurait alors relevé du droit commun, était perdue et c'est la raison pour laquelle le monde combattant l'a soutenu. Nous vivons aujourd'hui la suite de cette réforme et cette administration semble confortée.
Nous avons été surpris par le fait que le personnel des services départementaux de l'ONAC semblait très serein. Il se perçoit notamment comme devant assumer ce rôle de guichet unique, de « boite aux lettres », sans forcément de grands renforts. Il faut également dire que les principales associations d'anciens combattants consultées se sont montrées, devant nous, satisfaites.
Sur la question de la suppression du secrétariat d'Etat aux anciens combattants et de la création de la fondation, il sera temps d'en débattre lorsque le Parlement en sera saisi. Au final, cette réforme, en dehors de difficultés de reclassement, ne devrait pas poser de graves problèmes.
Sur la question de l'appareillage, l'évolution se serait produite même sans la réforme, par le fait de simples considérations démographiques et notamment en raison du départ à la retraite des médecins spécialisés. La possibilité de synergies avec les MDPH doit être examinée avec la plus grande prudence, car il s'agit d'un point très sensible pour les anciens combattants qui ne veulent absolument pas être considérés comme des accidentés civils. Même si certains médecins conventionnent localement avec des structures locales, dont des MDPH, il ne devrait pas y avoir de problèmes majeurs. Peut-être devrons-nous à l'avenir auditionner le président de la fédération nationale des plus grands invalides de guerre ?
Pour répondre directement sur les suppressions d'emplois, celles-ci sont au nombre de 624 suppressions nettes. En ce qui concerne les transferts internes d'emplois, ils sont opérés au sein même du ministère de la défense. Quant aux 518 transferts vers les opérateurs, il s'agit pour l'essentiel de mouvements vers l'ONAC ou le CERAH.
Mme Janine Rozier, rapporteur pour la commission des affaires sociales. - Je suis en total accord avec les propos de Jean-Marc Todeschini et souhaite souligner que les associations que nous avons reçues se sont montrées confiantes et sereines. Nous resterons cependant très vigilants sur les quelques sujets d'inquiétude qu'elles ont évoqués, s'agissant en particulier de l'appareillage.
Concernant les personnels des services départementaux de l'ONAC, il est vrai que certains ne seront composés que de trois ou quatre agents mais d'autres bénéficieront, si les besoins l'exigent, d'effectifs plus importants. Il faut par ailleurs rappeler que l'ONAC est conforté, budget après budget, dans sa mission d'action sociale, en particulier à l'égard des ressortissants les plus démunis ou des veuves, comme en témoigne la hausse, depuis deux ans, de sa subvention d'action sociale.
M. Jacky Le Menn. - Quand on parle de rapprochement avec les MDPH, il s'agit de la gestion des dossiers et non de l'appareillage. On s'aperçoit qu'avec le reformatage du SSA, on se trouvera, à moyen terme, dans une situation de pénurie pour les disciplines d'appareillage qui voient leurs effectifs diminuer, ce qui posera un problème tant pour les bénéficiaires civils que militaires. Certes, il existe une nécessité de rationaliser l'organisation avec moins d'opérateurs. Il y a certainement quelque chose à faire et nous avons intérêt à rassembler les intervenants civilo-militaires dans une même entité.
Mme Janine Rozier, rapporteur pour la commission des affaires sociales. - Nous avons bien entendu évoqué ce sujet dans le rapport.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Sur cette question, ne serait-il pas du rôle des services départementaux des anciens combattants de faire appel aux meilleures compétences ?
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur pour la commission des finances. - Le problème est qu'il existe une réelle pénurie de techniciens et de médecins dans ces spécialités, car très peu d'étudiants s'engagent dans cette filière. Le ministère des anciens combattants gérait déjà l'appareillage au bénéfice de nombreux civils, sans lesquels ce service, et notamment des centres de recherches importants comme le CERAH, ne pourrait plus exister. Cette question n'a pas été traitée par la réforme.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Il existe en effet de nombreux polytraumatisés qui bénéficient de ces appareillages.
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur pour la commission des finances. - Les civils peuvent depuis longtemps utiliser ces structures et leur part a d'ailleurs augmenté régulièrement ; il existe dans le secteur public et privé des médecins d'appareillages. Il va falloir organiser au niveau national un système pouvant répondre à tous les mutilés de la vie et il est clair que le ministère de la défense ne pourra pas payer indéfiniment des médecins mis à disposition dans les hôpitaux qui ne consacrent que 10 % de leur temps aux anciens combattants.
M. René Teulade. - Nous devons rester très vigilants sur l'information des usagers, notamment sur l'appareillage. Sur toutes ces réformes, les élus locaux sont souvent questionnés et pas toujours bien informés.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Afin de permettre la meilleure information possible dans l'ensemble de nos départements et de nos communes, je vous propose d'adopter ce rapport et d'en autoriser la publication. Je tiens également à dire que je me réjouis de ces missions conjointes avec d'autres commissions et j'espère que nous continuerons. Je constate l'unanimité sur l'adoption de ce rapport, qui sera donc publié.
A l'unanimité, les commissions des finances et des affaires sociales donnent acte à M. Jean-Marc Todeschini et à Mme Janine Rozier de leur communication et en autorisent la publication sous la forme d'un rapport d'information.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. - Ces travaux conjoints sont, en effet, fort utiles et nous aurons l'occasion, d'ici à la fin de l'année, d'adopter la même démarche sur la question des régimes spéciaux de retraite de la SNCF et de la RATP ainsi que sur celle de l'évaluation des coûts de l'allocation aux adultes handicapés.
Création des maisons d'assistants maternels - Examen du rapport - Examen des amendements - Adoption du texte de la commission en deuxième lecture
Puis la commission procède à l'examen, en deuxième lecture, du rapport de M. André Lardeux, des amendements et à l'élaboration de son texte pour la proposition de loi n° 425 (2009-2010), modifiée par l'Assemblée nationale, relative à la création des maisons d'assistants maternels et portant diverses dispositions relatives aux assistants maternels.
Mme Muguette Dini, présidente. - La proposition de loi créant les maisons d'assistants maternels et portant diverses dispositions relatives aux assistants maternels, que le Sénat avait adoptée en janvier dernier, nous revient de l'Assemblée nationale pour une deuxième lecture.
M. André Lardeux, rapporteur. - En effet, l'Assemblée nationale l'a examinée le mois dernier, et je me réjouis que l'ordre du jour permette aussi rapidement une deuxième lecture, car le succès de l'expérimentation des maisons d'assistantes maternelles, notamment dans les départements de la Mayenne, de l'Orne ou de la Loire-Atlantique, justifiait leur généralisation. Le texte encadre et sécurise la délégation d'accueil entre les assistantes maternelles, qui constitue le coeur du dispositif dans la mesure où elle permet l'élargissement des horaires d'accueil. Elle ne sera pas rémunérée, de manière à éviter sa requalification en contrat de travail. Cette délégation est déjà pratiquée dans les faits dans la quasi-totalité des cent cinquante maisons présentes dans une quarantaine de départements. Lui donner un fondement légal protègera les présidents de conseils généraux en cas d'accident, ce qui explique sans doute que sept des dix-sept cosignataires de la proposition président des départements.
La question du choix donné aux départements de recourir ou non à une convention a été épineuse. Qu'elle n'ait qu'un caractère facultatif est important pour ne pas perturber un dispositif qui a fait ses preuves. Pourquoi, d'ailleurs, imposer une étape que la loi rendra inutile ?
L'Assemblée nationale a respecté les grands équilibres du texte auquel elle n'a apporté que des modifications mineures. Elle a souhaité l'établissement d'un rapport d'évaluation dans les trois ans de la promulgation de la loi - ce qui pourra rassurer ceux que la formule inquiète encore un peu. Les trois autres aménagements sont plus périphériques. Les députés sont d'abord revenus sur l'aménagement de la formation que nous avions proposé, conformément aux recommandations du rapport de Jean-Marc Juilhard : sans toucher au volume horaire global de celle-ci, nous l'avions répartie différemment et ramené à trente heures la durée de la formation initiale avant l'accueil du premier enfant. L'Assemblée est revenue à la situation actuelle ; je le regrette mais j'en prends acte.
Par ailleurs, elle a prévu la possibilité de majorer par décret l'indemnité de licenciement en cas d'accident du travail ou d'inaptitude professionnelle, ce qui ne posera pas de difficulté.
Enfin, elle a demandé l'élaboration d'un second rapport sur la mise en oeuvre du plan métiers de la petite enfance, ce dont on peut aussi s'accommoder.
En votant ce texte conforme, nous arriverons au terme d'un processus qui aura amené le Parlement à adopter une proposition de loi sénatoriale en cinq mois, ce qui est rare.
Nous n'aurons fait que notre travail de parlementaires mais au vu du nombre d'assistantes maternelles, de parents et de collectivités qui attendent la promulgation du texte, j'ai la faiblesse de croire qu'il n'aura pas été inutile.
Mme Claire-Lise Campion. - Si nous partagions le constat sur le besoin d'accueil, nous différons sur la méthode. Oui, il faut plus de places et des modes de garde innovants ; non, cela ne doit pas se faire au détriment de la qualité de l'accueil.
L'Assemblée nationale est revenue sur certains points, notamment sur la formation, ce qui nous satisfait. Les députés y ont ajouté la mention d'une initiation à l'accueil - nous avions souligné l'intérêt de ce point dès le départ.
En rendant nécessaire l'accord de chaque assistant maternel sur la délégation d'accueil, l'article premier apporte une garantie qui était nécessaire à nos yeux.
Des motifs d'inquiétude subsistent cependant, à commencer par l'absence de projet éducatif et d'établissement.
Mme Isabelle Pasquet. - Le texte a été quelque peu modifié et amélioré, en particulier sur la formation : soixante heures, c'est déjà insuffisant ; alors, trente heures, c'était impensable ! Je rejoins également Claire-Lise Campion pour regretter que la convention reste facultative, alors qu'elle aurait pu garantir des relations claires et un bon fonctionnement collectif autorisant un véritable projet.
Tout l'argumentaire des promoteurs de ce dispositif reposait sur les aspects positifs de l'expérimentation. Nous n'avons en revanche aucun bilan de ce qui n'a pas fonctionné, alors que cela aurait été utile.
Rien n'a changé sur le fond : on en reste à un mode de garde collectif au rabais, comme une crèche, mais avec des garanties en moins.
M. André Lardeux, rapporteur. - J'observe qu'il n'y a pas eu, à l'Assemblée nationale, de remise en cause fondamentale de la philosophie du texte. Je ne pense pas que les craintes sur la qualité de l'accueil soient fondées : voyez ce qui se passe en Mayenne. Quant à la formation, nous n'avions pas touché au volume global mais modulé sa répartition, à la demande d'ailleurs des assistants maternels eux-mêmes. Un compromis a été opéré en faveur du personnel des crèches, je le constate, mais cela ne signifie pas que nous avions fait n'importe quoi au Sénat.
Le nombre de seize enfants qui pourraient être accueillis simultanément dans le groupement reste théorique dans la mesure où l'on élargit les horaires ; il ne faut donc pas imaginer qu'un enfant y restera de l'aube au crépuscule. On devrait plutôt tourner autour de douze enfants présents au même moment.
Le projet éducatif est le même que l'accueil soit en regroupement ou à domicile. En Mayenne comme en Loire-Atlantique, deux départements voisins du mien, deux majorités politiques différentes développent une approche identique et, si le département suit l'opération de très près, tout se passe bien.
Pour ce qui concerne la convention, je rappelle que nous souhaitons tous une décentralisation. Il serait paradoxal que des parlementaires représentant les collectivités territoriales en limitent la libre-administration.
Cette proposition de loi répond à une demande, émanant en particulier de petites collectivités qui ne peuvent financièrement assurer un accueil collectif. Je connais une petite commune qui va supprimer le sien parce qu'il lui revient trop cher. Pour maintenir des capacités d'accueil pour les jeunes enfants, il faut trouver des solutions comme celle-ci.
M. Yves Daudigny. - Lorsque je suis intervenu contre cette proposition, mon opposition ne portait pas sur le principe, mais sur les modalités. Il convient de maintenir la qualité de l'accueil et d'assurer une sécurisation juridique, suivant le souci pris en compte par l'Association des départements de France. Ce dernier reproche n'a plus lieu d'être. J'observe en outre que l'article 3 est important parce qu'il traduit une évolution : il ne s'agit pas de créer des crèches.
Mme Muguette Dini, présidente. - Aucun amendement n'ayant été déposé, je vais mettre aux voix la proposition de loi.
La proposition de loi est adoptée conforme.