Mardi 23 juin 2009
- Présidence de M. Claude Birraux, député, président -Obésité - Nomination d'un rapporteur
L'Office a nommé Mme Brigitte Bout, sénateur, vice-président, rapporteur de l'étude demandée par la commission des affaires sociales du Sénat sur « l'état des recherches en matière de prévention et de traitement de l'obésité ».
Les impacts de l'utilisation de la chlordécone et des pesticides aux Antilles - Examen du rapport
Puis, il a entendu le rapport présenté par M. Jean-Yves Le Déaut, député, vice-président, et Mme Catherine Procaccia, sénateur, sur « les impacts de l'utilisation de la chlordécone et des pesticides aux Antilles : bilan et perspectives d'évolution ».
Mme Catherine Procaccia, sénateur, rapporteur, a rappelé que la production de la chlordécone aux Etats-Unis d'Amérique avait donné lieu, en 1975, à un accident industriel qui avait permis de constater la toxicité aiguë de ce pesticide. A la suite de cet événement, la production et la vente de la molécule avaient été interdites aux Etats-Unis en 1976.
Aux Antilles, l'emploi de la chlordécone a été réautorisé en 1981, pour lutter contre un ravageur des bananiers, le charançon noir, dont la multiplication avait été favorisée par les conditions climatiques. L'emploi de la molécule a été définitivement interdit en 1991, mais les stocks restants ont été utilisés jusqu'en septembre 1993.
M. Jean-Yves Le Déaut, député, rapporteur, a souligné la robustesse de la molécule et décrit ses caractéristiques, en particulier, sa grande affinité pour les matières organiques présentes à un taux très élevé dans les sols antillais.
Par ailleurs, compte tenu des particularités de certains argiles antillais, la chlordécone pourrait rester jusqu'à sept siècles dans les sols, d'où elle se diffuse lentement vers les eaux continentales et les milieux marins. Elle se transmet, également, dans des proportions variables aux espèces cultivées.
Mme Catherine Procaccia, sénateur, rapporteur, a dressé un constat inquiétant. Alors qu'environ 1 800 tonnes de chlordécone ont été produites, seules 300 tonnes ont été employées aux Antilles. Et parmi les 1 500 tonnes restantes, une bonne partie a été employée en Allemagne et dans l'ex-bloc communiste pour lutter contre les bio-agresseurs de la pomme de terre.
On se trouve donc potentiellement confronté à un problème environnemental à l'échelle de nombreux pays car la chlordécone, qui n'est plus produite depuis longtemps, ne figure plus - hors les Antilles - dans les plans de contrôle et de surveillance des Etats ; elle est aussi absente du Codex alimentarius mondial.
Les rapporteurs ont alors présenté plusieurs observations sur le volet scientifique du « Plan chlordécone » et, notamment, préconisé :
- d'accélérer la mise au point de la cartographie détaillée de la contamination et d'étendre cette cartographie aux eaux continentales et aux milieux marins ;
- de faire progresser la fiabilité du système d'analyse ;
- d'étendre le « Plan chlordécone » aux produits de la mer et d'accentuer les recherches environnementales dans ce domaine ;
- de surveiller la mise en oeuvre du « Paquet hygiène » qui rend désormais les agriculteurs responsables de leurs mises en culture, sans les contraindre à faire procéder à des analyses de sol ;
- d'établir des référentiels d'imprégnation sanguine pour pouvoir les proposer aux populations les plus exposées ;
- et d'accroître les recherches scientifiques sur la dépollution des sols.
S'agissant des études épidémiologiques dont les résultats seront prochainement connus, M. Jean-Yves Le Déaut, député, rapporteur, a regretté que le Professeur Dominique Belpomme ait refusé - fait sans précédent - d'être entendu par l'Office et rappelé que certains de ses travaux reposaient sur des bases scientifiques peu solides, et étaient très critiqués par les chercheurs en charge des épidémiologies correspondantes.
Hors chlordécone et en attente des résultats de l'étude de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) sur l'exposition des populations antillaises aux pesticides, qui devrait être publiée en 2010, Mme Catherine Procaccia, sénateur, rapporteur, a indiqué que les eaux antillaises étaient contaminées dans une proportion analogue à celles de la métropole. Toutefois, l'exposition alimentaire des populations y semblait moins marquée, tout au moins si on se référait aux contrôles de pesticides effectués par les services de la répression des fraudes. Elle a insisté, également, sur le fait que la réduction du choix de pesticides à la disposition des agriculteurs antillais pouvait avoir un effet pervers, comme par exemple le recours à des produits généralistes, comme le glyphosate, qui activent les biorésistances et sont donc de plus en plus employés.
M. Jean-Yves Le Déaut, député, rapporteur, a rappelé, sur la base de l'avis de l'AFSSA, que le paraquat, dont l'usage est interdit en France depuis juillet 2007, posait surtout des problèmes aux applicateurs.
M. Jean-Yves Le Déaut, député, rapporteur, a exposé les grandes lignes du plan « Ecophyto-Dom » et souhaité qu'un soutien plus actif soit accordé au plan « Banane durable » et, enfin, qu'un centre technique de la banane soit implanté aux Antilles.
Il a aussi indiqué que la crise causée par l'emploi de la chlordécone devait être l'occasion de mener une expertise scientifique sur la toxicologie des polluants organiques persistants aux Antilles et de favoriser la mise à niveau de l'équipement de traitement des déchets ultimes des deux îles.
M. Claude Birraux, député, président, a souhaité que le rapport soit présenté à la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale et au comité de suivi qu'elle a constitué sur ces problèmes.
Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, a rappelé que les plantations de bananes donnaient lieu en Amérique latine à beaucoup d'épandages dont certains se faisaient dans des conditions sanitaires contestables ; elle s'est félicitée de ce que les rapporteurs aient proposé de mieux cerner le risque représenté par la montée des usages du glyphosate.
Après que M. Claude Birraux, député, président, eut regretté que les études épidémiologiques ne soient pas plus développées dans notre pays, M. Jean-Claude Etienne, sénateur, premier vice-président, a fait état de ses interrogations sur la conduite méthodologique de certaines d'entre elles.
L'Office a, alors, adopté le rapport présenté par M. Jean-Yves Le Déaut, député, et Mme Catherine Procaccia, sénateur, sur « les impacts de l'utilisation de la chlordécone et des pesticides aux Antilles : bilan et perspectives d'évolution ».