III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 25 OCTOBRE 2010
Débats AN première lecture
Séance du lundi 25 octobre 2010
Article 46
Mme la présidente. « Art. 46. Le montant du prélèvement effectué sur les recettes de l'État au titre de la participation de la France au budget de l'Union européenne est évalué pour l'exercice 2011 à 18,235 milliards d'euros.
La parole est à M. Claude Bodin, inscrit sur l'article.
M. Claude Bodin. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les articles 46 et 47 inscrivent dans la loi de finances pour 2011 un prélèvement sur recettes au profit des communautés européennes qui prévoit le versement d'une aide financière pour des programmes de coopération à destination des États souhaitant adhérer à l'Union européenne.
Chaque année, la France verse donc à la Turquie, par le biais de l'Union européenne, près de 127 millions d'euros en vue de son adhésion. Ce pays a ainsi bénéficié, pour la période 2007-2010, de 383 millions d'euros de la part des contribuables français, au titre de l'aide à la pré-adhésion. Au total, il est donc prévu que la France verse à la Turquie 887 millions d'euros de crédits de pré-adhésion.
On peut s'étonner que de telles sommes soient attribuées à la Turquie alors que ce pays a, certes, vocation à construire avec l'Europe une relation privilégiée, mais nullement à devenir membre de l'Union européenne. Le Président de la République s'est clairement prononcé à ce sujet à plusieurs reprises, notamment dans le cadre des élections présidentielles, où il a indiqué : « Je veux une Europe qui ait une existence politique et qui ait une identité, par conséquent une Europe qui ait des frontières. La Turquie, qui n'est pas un pays européen, n'a pas sa place à l'intérieur de l'Union européenne. L'Europe sans frontière, c'est la mort de la grande idée de l'Europe politique. L'Europe sans frontière, c'est le risque de la voir condamnée à devenir une sous-région de l'ONU. Je ne l'accepte pas. »
Je présenterai donc, conjointement avec mon collègue Richard Mallié, un amendement prévoyant de diminuer le prélèvement sur recettes de l'État au titre de la participation de la France au budget des communautés européennes, d'un montant représentant sa part dans l'aide financière de pré-adhésion attribuée à la Turquie, soit environ 16,7 % de l'aide qui sera versée.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Garrigue.
M. Daniel Garrigue. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le débat sur le prélèvement européen a essentiellement porté - ce qui est logique - sur la gouvernance économique de l'Union. Nous avons vécu la crise financière de 2008, puis la crise grecque : à chaque fois, non sans délais, les Européens ont fini par trouver un accord pour affirmer leur solidarité.
Cependant, la question qui se trouve posée aujourd'hui est celle de la mise en oeuvre de mécanismes permanents qui évitent de revenir à ce type de situation. Cette question n'est pas nouvelle. C'est la résolution du Conseil européen d'Amsterdam qui a prévu, en juin 1997, à la fois les programmes de stabilité et la possibilité de recommandations à la majorité qualifiée du Conseil européen ; des sanctions étaient également prévues. Or ces mécanismes, largement occultés, se sont révélés inefficaces.
Nous avons eu le rapport Van Rompuy, nous avons eu les propositions de la Commission, qui posaient certainement des problèmes en termes de succession des volets préventif et correctif, d'automaticité des sanctions et de compétence au stade de la décision - des sujets effectivement difficiles. Beaucoup, dans cet hémicycle, ont salué l'accord franco-allemand de Deauville, qui ne fait pourtant pas l'unanimité en Europe. Je voudrais donc vous poser simplement une question, monsieur le secrétaire d'État : qu'est-ce que l'accord franco-allemand de Deauville apporte de vraiment nouveau et de durable par rapport au Conseil européen d'Amsterdam de juin 1997 ?
Il faudra beaucoup de volonté politique. Nous comptons sur la coopération franco-allemande, mais à condition que le consensus entre nos deux États se fasse sur plus d'Europe, et non pas sur moins d'Europe. Nous souhaitons que les parlements nationaux soient mieux associés, et je suis heureux d'avoir ouvert ce débat la semaine dernière. Cependant, l'enjeu de cette association n'est pas seulement le respect des souverainetés budgétaires, il doit être aussi la condition d'une adhésion plus forte aux ambitions de la construction européenne. Enfin, l'ambition passe également par le budget européen, j'y reviendrai dans un instant.
Mme la présidente. Souhaitez-vous prendre la parole, monsieur le secrétaire d'État ?
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Je crois qu'il ne serait pas convenable de ne pas répondre aux orateurs, madame la présidente, d'autant que nous avons eu un débat très riche. Si le choix d'une séance de lundi après-midi n'a pas permis la présence de députés en quantité, au moins avons-nous eu la qualité comme l'a reconnu l'un des orateurs de l'opposition, que je remercie.
Si vous le voulez bien, je vais essayer de tirer la substantifique moelle de ce débat
Je note que, sur l'essentiel, il existe un vrai consensus dans cet hémicycle, que ce soit sur le besoin d'Europe, sur le fait que l'Europe n'est pas qu'une charge, mais également une nécessité, sur le fait que des disciplines sont nécessaires. C'est un fait, les partisans de notre pays sont d'accord sur la plupart de ces points - seul M. Asensi ayant fait entendre une voix dissonante -, ce dont je me réjouis, car cet indispensable consensus est dans l'intérêt national.
M. Carrez, rapporteur général du budget, a dit des choses extrêmement importantes. Il a ainsi rappelé, comme M. Lequiller, la nécessité de nouvelles règles du jeu pour le parlement national, qui doit intervenir, notamment par le biais des commissions des finances. Il est important que le Parlement et le Gouvernement interviennent de concert dans cette discussion du semestre européen, lors de ce débat mais aussi, probablement, lors d'une conférence budgétaire européenne - ce qui est l'objet d'une excellente proposition de M. Lequiller. Nous avons tout avantage à ce que les parlements européens soient associés aux décisions qui seront prises dans ce domaine.
Vous avez certainement noté le souci du Gouvernement, tout au long de la préparation de ces disciplines nouvelles, de refaire du Conseil un endroit où se prennent les décisions politiques. Comme le disait M. Caresche, il ne faut pas entrer dans ce mécanisme infernal où les sanctions tombent automatiquement, un peu comme les amendes envoyées aux conducteurs flashés par un radar sur l'autoroute, ce qui a pourtant été le cas avec cette règle un peu curieuse de la majorité inversée, permettant que des décisions soient prises au sujet de la gestion du budget ou des orientations politiques sans que les parlements nationaux soient consultés. Fort heureusement, nous sommes revenus à la philosophie qui prévaut dans le traité, en particulier à l'article 126, ce qui me paraît important.
Gilles Carrez a souligné le rôle du Conseil en matière de politique des taux de change, un rôle consacré par l'article 219 du traité. Certes, nous n'allons pas déterminer seuls cette politique des taux de change - il faut tenir compte des décisions prises dans le cadre du G20, notamment à l'issue de la réunion des ministres des finances qui a eu lieu ce week-end, comme l'a dit M. Caresche -, mais nous sommes en phase avec des critères qui doivent nous permettre de démontrer de façon factuelle l'impact des taux de change sur les déséquilibres commerciaux. C'est l'une des clés dont nous devons tenir compte : les excédents des uns font les déficits des autres, et quand les déficits sont causés par les taux de change, il est nécessaire que le Conseil prenne des décisions. Sur ce point, tout le monde n'a peut-être pas les mêmes intérêts en Europe ; en tout état de cause, nous devrons porter une grande attention aux orientations définies dans le cadre du G20.
Vous m'avez demandé si ces considérations et ces agrégats faisaient déjà partie de la politique européenne. Sur ce point, il faudrait interroger ma collègue Christine Lagarde, qui se trouve en première ligne, mais, de la position qui est la mienne, je n'ai pas l'impression que ce soit le cas.
M. Moscovici a lui aussi, pour l'essentiel, confirmé ce consensus. D'ailleurs, je le redis, il est important qu'il y ait en France un consensus sur les grandes lignes de la politique européenne.
Non, l'Europe n'est pas une charge. Mais de là à insister pour que des dépenses nouvelles soient trouvées et que le budget soit plus fourni... Je veux le dire à l'opposition, notamment à M. Moscovici : en réalité, en Europe, je n'ai pas l'impression qu'il y ait aujourd'hui beaucoup d'États qui aient un surplus de trésorerie ou qui veuillent payer plus !
M. Christophe Caresche. C'est justement pour cela qu'il faut des ressources propres !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Je vous entends dire, monsieur Moscovici et monsieur Caresche, qu'il faut dépenser plus, qu'il faut que le budget soit beaucoup plus volontaire, mais je n'ai pas l'impression que vous trouviez beaucoup de candidats autour de la table !
La remise à plat du budget de l'Union, qu'a souhaitée tout à l'heure M. Poniatowski, et que demande aussi l'opposition, ne sera possible qu'à partir du moment où nous serons dans la préparation des prochaines perspectives financières. Vous le savez bien : ce n'est pas en cours d'exercice que l'on peut remettre à plat l'équilibre général du budget européen.
Les dépenses militaires sont un sujet que je soulevais régulièrement lorsque j'étais moi-même parlementaire. Il serait souhaitable, en effet, que la charge, le fardeau de la défense soit mieux réparti à l'intérieur de l'Union. D'ailleurs, la réalité est sans doute pire encore que ne le laissent penser les chiffres cités par M. Poniatowski : c'est quasiment la moitié de l'effort militaire des Vingt-Sept qui est fournie par la France et la Grande-Bretagne seules.
M. Blum critiquait le manque d'enthousiasme dans la relation franco-allemande ; il semblait douter de celle-ci. Je veux lui dire, ainsi qu'à M. Myard, que j'étais hier soir et ce matin à Luxembourg, à une réunion des Vingt-Sept. Eh bien, j'entendais beaucoup de gens critiquer un diktat franco-allemand.
M. Jacques Myard. Bien sûr : nous nous sommes couchés devant Berlin !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. C'est la formule utilisée par un collègue - que je ne citerai pas - dans les couloirs.
La vérité, c'est que ce que l'on nous reproche, monsieur Blum, c'est bien plus de constituer un moteur trop puissant...
M. Jacques Myard. Il n'a plus guère d'essence !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. ...que d'être un moteur incapable de grimper la pente !
En ce qui concerne les attaques contre la zone euro depuis le début de l'année, il faut avoir conscience du fait que, s'il n'y avait pas eu la France et l'Allemagne ensemble, elle aurait probablement éclaté.
M. Jacques Myard. C'est pour ça que Mme Merkel a dit qu'il fallait que la Grèce en sorte ?
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. M. Caresche disait tout à l'heure que, si nous n'avions pas eu l'euro, la crise financière eût été absolument épouvantable pour tous nos pays.
Si nous avons pu surmonter cette crise, malgré, c'est vrai, des différences politiques entre la France et l'Allemagne, c'est parce que nous avons été ensemble.
Que voulez-vous, nous sommes des pays étranges !
Le Bundestag a eu, en effet, un vrai débat pour savoir s'il fallait signer un chèque pour sauver la Grèce. Je rappelle que la moitié de l'argent mis sur la table pour sauver ce pays - sur un total de 80 milliards de crédits européens - a été donnée en gros à cinquante-cinquante par l'Allemagne et la France. Les Allemands ont donc mis quelque temps à se mettre d'accord pour signer ce chèque, alors que les Français l'ont signé, tous bancs de cet hémicycle confondus, en un après-midi.
En revanche, quand il s'agit de passer à un débat sur les économies, et notamment - je donne cet exemple presque au hasard - sur la réforme des retraites, c'est là que la tension apparaît en France, alors qu'en Allemagne on trouve un consensus !
C'est cela, la réalité de l'Europe, mesdames, messieurs les députés : nous avons des pays qui fonctionnent différemment mais, au final, les problèmes sont les mêmes.
Le problème était donc de savoir si le système pouvait survivre à des dérives de la part d'États membres forçant quelqu'un à assurer, derrière, la signature d'un chèque. Il était indispensable d'arriver à des mesures fortes qui, à la fois, pérennisent le système de garantie financière - ce qui n'était pas évident - et imposent une discipline plus grande.
À cet égard, M. Garrigue se demandait tout à l'heure ce qu'apportait Deauville par rapport au sommet précédent. Eh bien, il apporte une chose tout à fait fondamentale. Jusqu'à présent, la solution temporaire - très difficilement acceptable par le gouvernement allemand - consistait à renflouer un État en crise, ce qui va exactement à l'inverse de ce qui est dit dans le traité, celui-ci interdisant un tel renflouement. Or cette solution, de temporaire, va devenir pérenne. C'est cela, l'apport de Deauville.
M. Jacques Myard. Attendez, on n'a pas encore réformé le traité !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. C'est cela qui est proposé par la France et l'Allemagne ensemble ; c'est cela qui va garantir un mécanisme permanent de réponse aux crises, si toutefois ce genre de situation devait se reproduire.
Parallèlement à cela - et non pas en échange de cette décision, comme je l'ai entendu -, la France, aussi bien que l'Allemagne, pense que des sanctions de nature politique seront beaucoup plus efficaces que le fait d'ajouter des contraintes financières à une situation de trésorerie déjà difficile.
L'idée est que, lorsqu'un pays dérape de façon caractérisée, la sanction ne consiste pas seulement à lui imposer des pénalités financières, sachant qu'il est déjà en déficit, mais d'ouvrir un débat sur la question de savoir s'il peut ou non participer aux décisions de la zone monétaire en étant lui-même en dehors des règles.
Cette idée-là, je me permets de vous le dire, n'est pas une idée allemande ou exclusivement allemande ; c'est aussi vraiment une idée française, car c'est ce que pense le Président de la République.
Telles sont les deux propositions que nous mettons dans le paquet de préparation du Conseil de jeudi et vendredi. Elles sont absolument nouvelles par rapport au groupe Van Rompuy. Je dois d'ailleurs vous dire qu'elles ne font pas l'unanimité - c'est un euphémisme - autour de la table du Conseil. Encore une fois, d'aucuns reprochent à la France et à l'Allemagne ensemble de peser trop lourd dans le système. En même temps, c'est la garantie de la pérennité de ce système. Je le redis : la moitié de l'argent qui a été mis sur la table pour sauver la zone euro a été votée par le Bundestag et par votre assemblée.
Monsieur Perruchot, vous savez bien que je ne suis pas à l'origine du choix de cette séance qui se tient un lundi. Nous en parlions avec M. Lequiller : plus il y a de députés, mieux je me porte. (Sourires.) Le débat sur l'Europe concerne tous les Français.
M. Nicolas Perruchot. Hélas !
M. Jacques Myard. Hélas, en effet !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Il est donc important que nous soyons le plus nombreux possible pour en débattre.
Sur le débat que vous avez ouvert concernant l'impôt européen et la contribution nationale, je vois bien quelle est votre idée : au fond, il s'agit de déléguer à l'Europe une partie du droit de lever l'impôt. Mais la difficulté, étant donné les pouvoirs nouveaux du Parlement européen, c'est que vous allez changer la nature de la construction européenne.
M. Charles de Courson. Allons vers une fédération !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. C'est un débat qu'il est loisible d'avoir, monsieur de Courson. Je dirai même qu'il faut avoir ce débat.
Le président de la commission des finances du Parlement européen est un Français, Alain Lamassoure. J'ai commencé, à mon modeste niveau, à organiser des débats entre eurodéputés et députés nationaux. Je crois qu'il est nécessaire que nous ayons ce débat, mais il faut distinguer deux choses. D'une part, il y a les ressources propres de l'Europe et les financements plus ou moins innovants que l'on peut trouver, notamment à travers la taxation des transactions financières.
M. Christophe Caresche. Vous seriez prêt à le faire ?
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Il faut être ouvert à cette question, monsieur Caresche, absolument.
D'autre part, il y a la levée d'un impôt nouveau, ce qui est une autre histoire ; cela appelle un vrai débat de fond sur la nature de la construction européenne. Par ailleurs, cela suppose d'entrer dans un processus dont on ne connaît pas le plafonnement.
À ce sujet, je ne veux pas faire de peine aux décentralisateurs qui se trouvent dans cet hémicycle...
M. Charles de Courson. J'en suis !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. ...mais vous savez bien la difficulté, et notamment vous, monsieur de Courson, qui connaissez bien les finances publiques : il ne faudrait pas que l'État contrôle d'un côté ses finances, tandis que, de l'autre, certains dépensent allègrement. C'est ce qui se passe parfois !
J'ai déjà cité plusieurs fois M. Caresche, pour lui dire à quel point j'ai été frappé par les convergences qui existent entre nous. J'en relèverai encore une autre : il faut naturellement éviter, comme il l'a dit, le risque qu'un assainissement précipité nous conduise à une rechute, à ce que les Américains appellent un double dip .
Il ne sert à rien de cacher qu'il y a en ce moment aux États-Unis des inquiétudes devant les cures d'austérité et les réductions des déficits que l'on observe un peu partout. Les dernières en date, en Grande-Bretagne, sont tellement fortes qu'elles ont envoyé une secousse considérable jusqu'à Washington.
Est-ce que cette cure de réduction des déficits publics - et j'en viens en même temps à ce qu'a dit M. Asensi - constitue un asservissement de nos économies à la logique libérale ? Je pense que ce n'est pas seulement de cela qu'il s'agit. Sur ce point, il faut faire attention. D'ailleurs, cela va peut-être vous surprendre, mais je ne suis pas totalement en désaccord avec vous. Il y a, dans ce que vous disiez, des choses qui me semblent frappées au coin du bon sens.
Il y a évidemment, dans le dérapage du capitalisme mondial, dans sa financiarisation et dans la rapacité des opérateurs financiers, l'une des causes majeures de la crise et des souffrances des peuples, auxquelles - je vous prie de le croire - je ne suis pas aveugle. Mais la solution n'est pas de continuer à dire aux Européens qu'ils peuvent vivre à crédit pour toujours.
La vérité, c'est que nous vivons à l'époque de la mondialisation. Nous, Français, avons vanté la multipolarité depuis des années. Eh bien, ça y est, nous y sommes ! Les Chinois, les Brésiliens ou encore les Turcs, bref des puissances régionales émergentes, travaillent plus et ont plus faim que nous.
Si vous dites aux peuples européens qu'ils peuvent continuer à dépenser allègrement tout en conservant leur modèle social que quelqu'un d'autre va financer, vous les condamnez à des lendemains qui vont déchanter très durement ; vous les condamnez à la faillite.
C'est pour cela que la maîtrise des déficits, la compétitivité de notre industrie, sans oublier les politiques communes que nous devons conduire en matière énergétique, industrielle et agricole - et pour lesquelles nous avons besoin de l'Europe -, sont inséparables de la protection de notre modèle social. C'est pour cela que, comme je l'ai dit tout à l'heure dans mon intervention, il y a une totale cohérence entre l'engagement français en Europe - l'Europe est dans notre intérêt, pour la défense de nos valeurs et de notre modèle social - et notre effort pour rendre plus compétitive notre économie pour les emplois de demain, pour nos enfants.
Jusqu'à un certain point, je vous suis donc, monsieur Asensi ; mais pas jusqu'au bout. Il ne s'agit pas seulement d'une mise au pas des économies européennes sur le modèle néolibéral. Au contraire, nous essayons - et c'est la réponse que je voulais donner à M. Caresche - de réduire les déficits, ce qui est nécessaire, tout en évitant le risque de tuer le début de croissance que nous avons. On observe en effet un taux de croissance de 1,5 % , avec la création de 60 000 voire - bientôt, j'espère - 100 000 emplois cette année, ce qui est mieux que pas mal.
Pourquoi l'Allemagne fait-elle mieux ? On a parlé d'un décrochage ou d'un risque de décrochage par rapport à elle, mais il faut quand même dire la vérité, en l'occurrence qu'un gouvernement socialiste a fait là-bas, il y a dix ans, une cure d'austérité en réformant le coût du travail, le temps de travail et les retraites, ce qui fait qu'aujourd'hui la machine économique allemande est beaucoup plus compétitive que toutes les autres à l'exportation.
M. Christophe Caresche. Mais après, ce gouvernement a perdu les élections !
M. Charles de Courson. Ce n'est pas grave ! L'essentiel, c'est d'avancer.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. C'est vrai qu'il a perdu les élections mais, à l'arrivée, l'Allemagne est à 3,5 % de croissance.
Sa croissance est tirée par les exportations vers les pays émergents et pas du tout, comme on le croit, par celles à l'intérieur de l'Union européenne.
Il n'y a pas d'autre différence entre la France et l'Allemagne qu'un décalage dans le temps du point de vue des réformes.
Je vous réponds donc : non, monsieur Caresche, la France ne se désengage pas de l'Europe.
J'ajoute, monsieur Asensi, par rapport aux réponses que j'ai déjà essayé de vous fournir, que, sur les politiques migratoires, je ne puis qu'être d'accord avec vous : l'argent consacré par l'Europe aux migrations internes, c'est-à-dire à l'aide aux malheureux qui sont censés bénéficier des dispositifs d'inclusion sociale et de l'article 2 du traité de l'Union, doit être effectivement dépensé, et cela d'autant plus que cet argent, nous le donnons !
Quant aux migrations extérieures, c'est un tout autre sujet, dont nous n'avons malheureusement pas le temps de débattre maintenant. Je ne suis pas de ceux qui pensent que l'Union européenne réglera ses problèmes en ouvrant toutes grandes ses portes à l'immigration : une politique migratoire, cela doit se gérer, comme tout autre politique ; lors de la présidence française, nous y avons d'ailleurs beaucoup travaillé.
Monsieur Myard, vous avez absolument raison de soulever les problèmes de la réciprocité, et de la naïveté de l'Union européenne vis-à-vis de ses concurrents étrangers ; vous avez raison de souligner que certains ayatollahs de la Commission sont allés beaucoup trop loin dans la voie du néo-libéralisme et d'une absence de politique industrielle. Le mot même de politique industrielle était d'ailleurs tabou ; jusqu'à une date récente, on ne pouvait pas même évoquer ces sujets !
Mais les esprits évoluent depuis la crise, en particulier sur l'idée de politique industrielle. Nous sommes quelques-uns à nous battre pied à pied, conseil après conseil : j'ai aujourd'hui le sentiment que l'on peut parler de réciprocité ; nous avons utilisé le terme lors du dernier Conseil européen, nous avons utilisé le terme lors des négociations stratégiques avec la Chine. C'est la première fois que la réciprocité est évoquée pour l'accès aux marchés publics ! C'était un tabou pendant longtemps : la Commission considérait cette notion comme du protectionnisme.
La notion de politique industrielle, considérée elle aussi il y a peu comme un gros mot français, est aujourd'hui intégrée aux documents de la Commission et à la stratégie Europe 2020.
Sachez que, sur tous ces points, nous avançons, même si ce n'est pas très facile et même si nous souhaiterions avancer plus vite. Mais enfin, monsieur Myard, la réalité m'oblige à vous dire que les 500 millions d'Européens ne sont pas tous français ; ils ne pensent pas tous comme des Français.
M. Jacques Myard. Il y en a qui ne pensent pas du tout !
M. Charles de Courson. Typique arrogance française ! (Sourires.)
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Il y a des gens qui pensent différemment : des Britanniques, des Suédois, etc.
Je réponds maintenant aux interventions sur l'article 46.
De façon générale, je rappellerai que le budget européen est régi par les mêmes principes que notre budget national, en particulier par celui de la non-affectation des recettes. En conséquence, la contribution française est versée au budget européen dans son ensemble, et il ne nous est pas possible de déterminer l'affectation de notre contribution, de même que nous ne pourrions pas décider de ne pas participer au financement de telle ou telle politique de l'Union européenne.
Sur le fond, je rappelle que la France - à l'époque du président Jacques Chirac - a reconnu à la Turquie le statut de pays candidat.
M. Richard Mallié. Malheureusement !
M. Nicolas Perruchot. Pas les Français !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Le Conseil européen unanime, et donc la France, a reconnu à la Turquie le statut de pays candidat. C'était à Copenhague.
M. Michel Bouvard. C'est comme aux Jeux Olympiques, on peut être candidat sans être retenu !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Comme les autres pays auxquels ce statut a été accordé, la Turquie bénéficie donc d'un programme d'aides financé par le budget communautaire.
Entre 2000 et 2006, elle a reçu au titre du programme d'aide de pré-adhésion près de 1,23 milliard d'euros. L'instrument d'aide de pré-adhésion, qui a remplacé les instruments précédents en 2007, est doté de 4,873 milliards d'euros pour la période 2007-2013. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Voilà ce qui doit aller à la Turquie.
Ces crédits attribués à la Turquie par l'Union européenne, j'insiste sur ce point, ne préjugent en rien de l'issue des négociations engagées avec ce pays en 2005.
Sur cette issue, la position de la France, déterminée par le Président de la République, est connue. Il n'est pas vrai que le maintien de ces crédits entre en contradiction avec les propos du Président de la République : celui-ci sait parfaitement que la France a reconnu le statut de candidat de la Turquie ; il a dit avant son élection, et il l'a redit depuis, et le Gouvernement avec lui, que selon nous, Français, la Turquie n'a pas vocation à rejoindre l'Union. D'autres pays le pensent aussi.
Cela ne remet pas en cause les négociations de candidature, dont nous et les autres pays considérons qu'elles sont dans l'intérêt de la France, dans l'intérêt de la Turquie, dans l'intérêt de l'Europe : elles ont en effet pour résultat de hisser ce partenaire très important de l'Union européenne à un niveau juridique et réglementaire plus élevé.
Voilà pourquoi la Turquie conserve son statut de pays candidat, y compris sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Monsieur Bodin, nous appartenons en gros à la même famille politique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Christophe Caresche. C'est vrai que c'est parfois difficile à voir !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Soyons absolument clairs sur ce point : la Turquie conserve ce statut, même si la France est opposée à l'adhésion de ce pays et qu'elle est plutôt favorable à un partenariat privilégié.
Si vous le souhaitez, je vous ferai passer une réponse écrite plus développée. Mais, pour avoir un tout petit peu travaillé à la relation entre la France et la Turquie, je peux vous dire que cette relation bilatérale est importante, et qu'elle est dans l'intérêt de nos deux pays. Nous en avons convenu ensemble lors de la visite en France, cette année, du Premier ministre Erdoðan et du Président de la République Gül : il y a entre nous un désaccord sur l'aboutissement des négociations - la Turquie veut entrer dans l'Union, nous ne partageons pas ce projet. Nous en avons parlé ouvertement.
Nous sommes cependant parfaitement d'accord pour renforcer nos relations politiques, économiques et stratégiques.
M. Christophe Caresche. Très bien !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. C'est dans l'intérêt de l'Union et dans l'intérêt de la France ; c'est ce que nous faisons.
Il est hors de question pour nous d'accepter de remettre en cause le statut de pays candidat de la Turquie. Je donnerai donc un avis défavorable aux amendements qui ont été déposés sur cet article.
M. Christophe Caresche. C'est clair !
Mme la présidente. L'amendement n° 13 présenté par M. Garrigue, Mme Montchamp, M. Goulard, M. Bernier et M. Grand, est ainsi libellé :
Substituer au mot :
« participation »,
le mot :
« contribution ».
La parole est à M. Daniel Garrigue.
M. Daniel Garrigue. Monsieur le ministre, j'ai noté que selon vous le principal apport du sommet de Deauville était la possibilité de renflouer un État en difficulté, ce que l'on appelle aussi le bailing out . Cela supposera tout de même de modifier les traités, mais c'est très bien. À mon sens, toutefois, ce n'est pas suffisant.
L'amendement n° 13 porte sur le financement du budget européen. Comme d'autres orateurs, je voudrais exprimer ma préoccupation : la France, comme un certain nombre d'autres États, refuse d'augmenter le budget européen. Les arguments invoqués sont, je crois, démagogiques : cette augmentation ne profiterait qu'aux fonctionnaires européens, une partie des crédits ne seraient actuellement pas consommés.
M. Jacques Myard. Mais c'est vrai !
M. Daniel Garrigue. Nous nous trouvons, je le rappelle, à la veille d'un certain nombre de discussions importantes : sur la politique agricole commune, sur les fonds structurels, par exemple. Vous avez parlé des Roms tout à l'heure : si nous voulons imaginer des solutions en Roumanie, cela passera en grande partie par des fonds structurels.
Si nous voulons avoir une politique de recherche et une politique industrielle dignes de ce nom, comment pourrions-nous ne pas augmenter rapidement le budget européen ?
Le problème, c'est celui des ressources propres. Je remarque seulement que, pour la TVA, c'est un peu difficile dans la situation actuelle. D'autre part, il n'y a pas de consensus pour une taxe sur les transactions financières. En revanche, le commissaire européen Michel Barnier vient d'annoncer qu'on devrait aboutir l'an prochain à une assiette uniformisée et consolidée de l'impôt sur les sociétés. Il me semble que cet impôt pourrait constituer la base pour un prélèvement supplémentaire de ressources propres pour le budget européen : une grande partie des actions de l'Union sont menées en direction des entreprises, ce ne serait donc pas illogique.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission des finances a exprimé un avis défavorable.
Cet amendement vise en effet à remplacer le mot « participation » par le mot « contribution » : en filigrane, on aperçoit donc le débat sur les ressources propres que nous avons eu tout à l'heure.
Mais, aujourd'hui, il n'y a pas d'impôt européen. Or le terme de « contribution » laisserait entendre qu'il y aurait des « contributeurs ». Il n'y en a pas : c'est donc bien le terme de « participation » qui doit être utilisé.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État . Même raisonnement et même avis de la part du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Myard.
M. Jacques Myard. Monsieur Garrigue, il ne faut pas avancer masqué. Le problème que vous posez par cet amendement sémantique est tout à fait substantiel : c'est le problème des relations entre notre Parlement et la contribution européenne.
Plus on créera des mécanismes qui échapperont totalement au contrôle de ce Parlement, plus on augmentera la distance entre la représentation nationale et la nécessaire coopération européenne. C'est extrêmement grave ! Au moment où la notion de subsidiarité revient dans le débat grâce au traité de Lisbonne, c'est exactement ce qu'il ne faut pas faire.
Si vous voulez réconcilier la représentation nationale avec la nécessaire coopération et la nécessaire solidarité européennes, notre Parlement doit être au coeur des décisions, et notamment des décisions budgétaires, européennes.
(L'amendement n° 13 n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 73 présenté par M. Mallié, M. Bodin, Mme Marland-Militello, M. Bernier, Mme Besse, Mme Boyer, M. Breton, M. Calméjane, M. Carayon, M. Decool, Mme Delong, M. Depierre, M. Dhuicq, M. Domergue, M. Dord, M. Garraud, M. Gatignol, M. Gest, M. Gilard, M. Ginesy, M. Gonnot, M. Hillmeyer, Mme Joissains-Masini, M. Labaune, M. Lazaro, M. Lezeau, M. Luca, M. Christian Ménard, M. Meunier, M. Mothron, M. Perruchot, Mme Pons, M. Remiller, M. Roatta, Mme Rosso-Debord, M. Siré, M. Souchet, M. Suguenot, M. Teissier, M. Terrot, M. Tian, M. Vanneste, M. Verchère, M. Vitel, M. Michel Voisin, M. Zumkeller et Mme Poletti, est ainsi libellé :
Substituer au nombre :
« 18,235 »,
le nombre :
« 18,106 ».
La parole est à M. Richard Mallié.
M. Richard Mallié. Monsieur le ministre, vous parliez de « réductions massives des déficits » ; monsieur le rapporteur général, vous parliez de « restauration des comptes et des financements, au détriment du reste ». Je vais peut-être vous donner l'occasion de récupérer quelques fonds.
Récemment, le président turc a reproché aux responsables politiques et intellectuels européens un « manque de vision » concernant une éventuelle entrée de la Turquie dans l'Union européenne ; il a imputé à l'Union une part des blocages.
Pour une fois, je partage entièrement ce point de vue de M. Gül et souhaite mettre fin à une certaine hypocrisie européenne. C'est pourquoi, avec Claude Bodin et une cinquantaine de députés, nous avons déposé un amendement visant à supprimer les crédits alloués à la Turquie dans le cadre de l'instrument d'aide à la pré-adhésion.
Chaque année, Claude Bodin l'a rappelé, la France verse indirectement à la Turquie près de 130 millions d'euros en vue de son adhésion. Tous les sondages réalisés en France vont dans le même sens : oui à un partenariat privilégié ; non à une adhésion. Aujourd'hui, seuls 38 % des Turcs sont favorables à une adhésion de leur pays à l'Union européenne.
Le Président de la Commission européenne a même évoqué « de profondes interrogations sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne en raison de différences culturelles ».
À ce constat sans appel s'ajoutent les griefs de la Cour des comptes européenne, qui a épinglé la Turquie au motif que seuls 30 % des objectifs du calendrier de pré-adhésion auraient été atteints. Aux dires mêmes de la Cour des comptes européenne, les fonds qui sont donnés ne servent pratiquement à rien, si ce n'est pour un tiers d'entre eux seulement.
Il est important de mettre un terme à cette incohérence politique et budgétaire.
Même si le porte-parole du commissaire européen au budget a déclaré que le montant du budget 2011 ne pouvait être modifié, sous-entendant que, pour lui, l'Assemblée nationale française était une simple chambre d'enregistrement, l'adoption de cet amendement serait un signal fort envoyé à Bruxelles.
Les symboles sont lourds de sens et l'adoption de cet amendement montrerait à la Commission européenne que l'Assemblée nationale a une profonde conviction à ce sujet et qu'elle a toute légitimité pour l'exprimer publiquement. Les parlementaires français ont leur mot à dire sur ce sujet, mes chers collègues. Envoyons un signal fort, car qui ne dit mot consent.
Je terminerai, monsieur le secrétaire d'État, en vous disant que la position de l'électorat français par rapport à l'Union européenne n'est plus ce qu'elle était en 2005 ; sans doute est-elle pire. Vous l'avez dit vous-même, les esprits évoluent. Mais ils n'ont pas du tout évolué dans votre sens à vous.
M. Catherine Coutelle. Si !
M. Richard Mallié. Ne restez pas dans votre bulle, faites en sorte - je vous le demande solennellement - que cet amendement soit adopté.
M. Régis Juanico. Cela ne dépend pas du secrétaire d'État !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gilles Carrez, rapporteur général . Monsieur Mallié, me situant exclusivement sur le terrain des procédures et sur le plan budgétaire, je ne peux faire autrement que de donner un avis défavorable à votre amendement. Le raisonnement est très simple.
Nous sommes dans le domaine budgétaire. Le Gouvernement a évalué un prélèvement sur recettes pour participer au budget de l'Union européenne. Compte tenu des caractéristiques de ce budget telles qu'on les connaît aujourd'hui, le Gouvernement est obligé d'avoir un prélèvement sur recettes sincère. L'article 6 de la LOLF précise en effet que les « prélèvements sur les recettes de l'État sont, dans leur destination et leur montant, définis et évalués de manière précise et distincte ». L'adoption de cet amendement introduirait un élément d'insincérité budgétaire.
Faut-il ou non dégager des financements au titre d'une éventuelle pré-adhésion de la Turquie ? C'est une question interne au budget européen. La procédure d'élaboration du budget pour 2011 commence. Le Parlement européen va s'en saisir et il regardera évidemment quels ont été les débats dans tel ou tel Parlement national sur ce sujet mais, s'il doit y avoir un réajustement, c'est une question à traiter au sein du budget européen.
Inscrire dans notre budget un prélèvement qui ne correspondrait pas aux engagements que nous avons pris vis-à-vis de l'Europe poserait un problème à deux niveaux : d'une part, au niveau franco-français, de sincérité budgétaire, ce qui est tout de même très ennuyeux ; d'autre part, par rapport aux engagements que nous avons pris de participer au budget européen selon une certaine clef de répartition.
Si la question que vous posez a toute sa légitimité dans le processus d'élaboration du budget, je ne peux, pour des raisons de forme qui me paraissent évidentes, incontournables, que donner un avis défavorable à votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires européennes.
M. Pierre Lequiller, président de la commission des affaires européennes. À ces arguments de forme...
M. Michel Bouvard. Arguments fondamentaux !
M. Pierre Lequiller, président de la commission des affaires européennes. ...je voudrais ajouter, avec toute l'amitié et le respect que j'ai pour M. Bodin et M. Mallié, que, contrairement à ce qu'indique l'exposé des motifs, cet amendement n'est pas cohérent avec la politique européenne du Président de la République et de la France à l'égard des négociations de l'Union européenne avec la Turquie.
M. Christophe Caresche. Il y a des subtilités qui leur ont échappé.
M. Nicolas Perruchot. Pas du tout !
M. Pierre Lequiller, président de la commission des affaires européennes. En effet, nous sommes favorables à la négociation, pour aboutir au partenariat privilégié. Nous avons d'autres partenaires à l'intérieur de l'Europe, l'Autriche par exemple, qui partagent eux aussi cette position.
La France se prononce pour que les négociations aboutissent à un partenariat privilégié et non à une adhésion. D'ailleurs, elle est en faveur de l'ouverture de trente chapitres de la négociation sur trente-cinq, mais elle s'est opposée à l'ouverture de tous les chapitres directement liés à l'adhésion.
Nous souhaitons progresser dans la négociation pour parvenir à un rapprochement plus étroit que l'union douanière avec la Turquie, qui est ce partenariat privilégié prévu par la Constitution.
Il ne faut pas non plus humilier un partenaire essentiel...
Mme Valérie Boyer. Un partenaire qui n'est pas correct ?
M. Pierre Lequiller, président de la commission des affaires européennes. ...sur la scène économique, sur la scène politique, sur la scène diplomatique, pour les relations avec le Proche-Orient, pour les relations avec l'Iran, pour les relations dans toute cette région.
M. Christophe Caresche. Vous avez raison. Ils sont inconscients !
M. Pierre Lequiller, président de la commission des affaires européennes. Moi qui suis hostile à l'entrée de la Turquie - je crois avoir été l'un des tout premiers dans cet hémicycle -, je considère que ce serait une grave erreur de voter cette suppression qui, comme l'a très bien dit le rapporteur général, n'aboutirait pas, dans sa forme, à l'objectif que vous visez.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Je voudrais ajouter pour l'information des députés les éléments suivants :
S'agissant du volume des transferts qui sont prévus dans l'instrument de pré-adhésion sur la Turquie, compte tenu du nombre d'habitants et du niveau de développement, ce que reçoivent les Turcs, c'est 8 euros par habitant, à comparer aux 30 euros pour la Croatie et la Macédoine, qui sont dans des dispositifs analogues.
M. Nicolas Perruchot. Combien d'habitants en Croatie et combien d'habitants en Turquie ?
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Au regard du nombre d'habitants et du niveau de développement, l'écart est celui-là. C'est un fait.
Ensuite, comme l'a dit M. Carrez, il n'y a pas moyen de peser sur l'affectation de ces crédits dans le droit budgétaire européen, pas plus qu'il n'y a de moyens de le faire en droit budgétaire national.
Enfin, vous avez mentionné le rapport de la Cour des comptes européenne. Le rapport adopté le 22 octobre 2009 sur la gestion par la Commission de l'aide de pré-adhésion en faveur de la Turquie relève des déficiences dans la gestion de l'aide, en particulier pour la période 2002-2006, mais elle note également des améliorations sensibles. Cela a d'ailleurs fait l'objet d'un débat au conseil Affaires générales et les États ont adopté des conclusions qui invitent la Commission à prendre des mesures de contrôle supplémentaires.
Sur le fond, je voudrais vous dire, peut-être encore plus nettement que M. Lequiller, que voter cet amendement ne rendrait pas service à la politique étrangère de la France s'agissant de la Turquie.
M. Christophe Caresche. C'est clair !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. On ne saurait se réfugier derrière le Président de la République pour remettre en cause, en réalité, une politique très claire, celle du partenariat privilégié et non de l'adhésion.
La politique conduite par le Gouvernement nommé par le Président de la République dont je suis membre est extrêmement claire : il s'agit de considérer que la négociation d'adhésion continue et de ne pas remettre en cause le statut de candidat de la Turquie tout en disant clairement - beaucoup plus clairement d'ailleurs que la plupart des autres pays européens - que le point d'arrivée ne sera pas l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Le gouvernement turc le sait, tout comme l'opinion publique turque. Notre contribution à l'Union européenne représente quand même une vingtaine de milliards d'euros. Décider d'économiser une portion de cette somme juste pour punir la Turquie serait ressenti comme une humiliation par l'opinion turque. Je ne vous conseille pas une telle décision.
Je comprends bien sûr les raisons de politique intérieure qui animent les auteurs de l'amendement. Je ne vis certainement pas dans une bulle, monsieur Mallié, je connais parfaitement les problèmes auxquels vous faites allusion pour y avoir été confronté dans mon ancienne circonscription. Mais je considère que voter un tel amendement, et je m'adresse à tous les députés de la majorité, serait un mauvais coup porté à la politique étrangère du Président de la République. Je ne peux être plus clair. Après, que chacun prenne ses responsabilités.
Mais qu'on ne vienne pas m'expliquer que c'est cohérent avec ce que dit le Président de la République. C'est tout l'inverse.
Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Perruchot.
M. Nicolas Perruchot. La question qui est posée est importante. Ce n'est ni un détail, ni une lubie de certains parlementaires qui voudraient faire parler d'eux que d'exprimer cet après-midi une différence avec le Gouvernement sur ce qui nous est proposé dans le cadre budgétaire par rapport à nos amis turcs.
Monsieur le secrétaire d'État, vous venez d'évoquer la politique étrangère. Je voudrais donner le sentiment d'un parlementaire français sur ce sujet. Je comprends qu'il puisse y avoir des considérations diplomatiques, mais au moment où l'Europe, avec le traité de Lisbonne et un service diplomatique commun, entend se déployer dans le monde, la politique étrangère de la Turquie est devenue quasiment incompatible avec les intérêts européens, et cela nous interpelle tous.
La Turquie a bien entendu le droit d'avoir sa politique étrangère, elle ne s'en prive pas, d'ailleurs. Pont entre l'Asie et l'Europe, comme elle se définit, soucieuse de n'avoir aucun ennemi à ses frontières alors qu'elle les a longtemps accumulés, elle développe désormais une politique largement dictée par son opinion publique, son voisinage et ses intérêts commerciaux, qui l'éloignent des contorsions qu'elle a dû faire après la Seconde guerre mondiale.
Pour réintégrer le concert européen, il lui a fallu éviter l'isolement, contenir le communisme, moderniser son armée, ce qu'elle fit grâce aux États-unis, à l'OTAN et à l'Union européenne.
Aujourd'hui, les dirigeants turcs, concevez que cela puisse choquer les parlementaires français, multiplient les accords et les visites avec la Syrie, l'Iran...
M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. La France fait pareil !
M. Nicolas Perruchot. ...et le Soudan, et fraye avec les organisations islamistes extrémistes. Désormais, il vaut mieux être le leader de la fierté musulmane que l'exemple de l'islam laïc.
Mme Chantal Brunel et Mme Valérie Boyer. Très juste !
M. Nicolas Perruchot. Sur ce point, nous ne pouvons évidemment pas être d'accord avec nos amis turcs.
Pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, la Turquie a-t-elle voté contre l'Europe et les États-Unis au Conseil de sécurité de l'ONU qui a imposé des sanctions à l'Iran ? C'est une question importante que les parlementaires français que nous sommes devons nous poser.
Pourquoi la Turquie soutient-elle le président du Soudan, qui est poursuivi par la Cour pénale internationale ?
Pourquoi les soldats turcs n'ont-ils pas le droit de combattre en Afghanistan ?
Pourquoi l'Organisation de la conférence islamique, dont elle assure le secrétariat, ainsi que la Ligue arabe, dont elle est observateur, sont si importantes pour sa diplomatie ?
De Turquie, cette politique peut s'expliquer, mais elle n'a rien à voir aujourd'hui avec les intérêts européens, qu'elle contrarie de plus en plus.
Au-delà de la question du prélèvement, qui n'a pas de portée juridique et n'a donc pas autant d'importance qu'on pourrait l'imaginer, chacun sait que l'Union européenne de demain, celle que nous souhaitons, celle que les Français et les Françaises souhaitent, c'est une Union qui a plus besoin de densité que de dilution.
Mme Chantal Brunel. Très bien !
Mme la présidente. Il faut conclure, monsieur Perruchot.
M. Nicolas Perruchot. C'est à cela que nous sommes les uns et les autres très attachés.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Nous sommes d'accord.
M. Nicolas Perruchot. C'est évidemment avec la volonté de défendre la nécessité d'une densité retrouvée plutôt qu'une dilution, qui serait politiquement difficile à vivre pour nous tous, que nous présentons cet amendement.
Mme Chantal Brunel et Mme Valérie Boyer. Très bien !
Mme la présidente. Je rappelle que le temps de parole pour chaque intervention sur les amendements est de deux minutes.
Mme Valérie Boyer. C'était une très bonne intervention, madame la présidente !
Mme la présidente. La parole est à M. Régis Juanico.
M. Régis Juanico. L'amendement présenté par Richard Mallié, Claude Bodin et leurs collègues est particulièrement malvenu, particulièrement malveillant et particulièrement mesquin. D'ailleurs, puisque son objectif est, si j'ai bien compris,de faire réaliser des économies budgétaires à la France, je me demande très naïvement pourquoi, outre la Turquie, d'autres pays candidats à l'adhésion ne seraient pas visés - je pense à l'Islande, à la Croatie ou à la Macédoine - dans la mesure où l'exposé des motifs fait état de l'évocation par M. Barroso de différences culturelles. Des différences culturelles, nous en avons aussi avec les Islandais, les Croates ou les Macédoniens. C'est donc qu'avec la Turquie, il y a quelque chose d'autre, que nous venons d'entendre à l'instant dans la bouche de M. Perruchot lorsqu'il a évoqué la question religieuse, celle de l'islam.
M. Nicolas Perruchot. Ce sont des questions clefs !
M. Régis Juanico. L'Europe, ce n'est pas une question de frontières. (« Bien sûr que si ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) C'est une question d'adhésion à des valeurs, un très haut niveau de démocratie, un haut niveau d'État de droit et de protection sociale. Ces dernières années, nous avons élargi l'Union européenne à des peuples qui sont allés progressivement vers ces valeurs. La Turquie, quant à elle, est candidate depuis 1963. Évidemment les conditions de son adhésion ne sont pas encore réunies et il lui reste encore beaucoup de progrès à faire. Il y a des contentieux territoriaux avec Chypre, l'Arménie. La Turquie doit notamment encore progresser sur la question des droits de l'homme et sur l'État de droit, mais ce qui nous est proposé, c'est un amendement de défiance et de stigmatisation à l'égard de la Turquie, dont on voit bien sur quel raisonnement il repose. Cet amendement est donc malvenu.
On nous dit qu'il faut laisser se dérouler les négociations, mais que l'on sait très bien qu'il n'y aura pas d'adhésion au bout du compte, qu'il y aura seulement un partenariat. Or, si on laisse se dérouler les négociations, c'est que l'on ne peut préjuger leur issue.
M. Christophe Caresche. Très juste !
M. Régis Juanico. À un moment donné, il faut envoyer au peuple turc un signal qui soit non pas un signal de défiance, mais un signal de confiance, parce que lui aussi va connaître le scepticisme. Il faut considérer l'adhésion de la Turquie comme un facteur d'enrichissement culturel et économique pour l'Europe, parce que c'est un pays dont l'économie est très dynamique, mais cela vous ne voulez pas le voir.
Mme Valérie Boyer. Nous le voyons, mais nous ne sommes pas d'accord !
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Brunel.
Mme Chantal Brunel. Monsieur le secrétaire d'État, je fais partie de ceux qui pensent que l'on a fait entrer la Roumanie et la Bulgarie dans l'Europe beaucoup trop tôt, sans avoir bien établi certaines règles. L'on se rend d'ailleurs compte aujourd'hui qu'une grande partie de l'argent donné à la Roumanie n'a pas toujours été utilisé à l'intégration et à la promotion de certaines populations.
M. Nicolas Perruchot. Très juste !
Mme Chantal Brunel. Et l'on découvre le problème aujourd'hui. Nicolas Perruchot s'est remarquablement exprimé et je voudrais seulement préciser deux choses.
Il faut que l'on explique aux Français à quoi vont servir ces 129 millions d'euros, ces 887 millions qui auront été versés entre 2007 et 2013 pour aider la Turquie à réaliser son partenariat avec l'Europe. À quoi cela sert-il ? Cela représente huit euros par Turc. Or on ne peut pas dire que la Turquie ait fait des progrès dans les domaines des droits de l'homme ou de l'égalité.
J'ai beaucoup d'admiration pour la politique étrangère du Président de la République et pour ce qu'il va faire en matière de régulation financière au cours du G 20. Ses positions sont extrêmement courageuses. Je ne voterai donc pas cet amendement, mais il est urgent que la France exige de savoir à quoi sert l'argent. On découvre en effet aujourd'hui que celui donné à la Roumanie n'a pas servi à aider certaines populations à s'intégrer. On sait très bien qu'il y a beaucoup d'évasion. On demande aujourd'hui 129 millions aux Français alors que c'est une période difficile et que certains d'entre eux ne parviennent pas à boucler leurs fins de mois, qu'ils n'ont plus de quoi manger dès le 15 du mois ! Il faut que la France exige qu'on lui dise à quoi sert cet argent. Je trouve donc cet amendement justifié et, si je ne le vote pas, c'est uniquement par solidarité avec la politique étrangère du Président de la République qui mène un combat difficile dans d'autres domaines au G 20.
M. Nicolas Perruchot. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Garrigue.
M. Daniel Garrigue. Le vote de cet amendement serait désastreux.
D'abord, juridiquement cela n'aurait pas de sens puisque l'on ne peut pas voter des dispositions séparant une partie des crédits alors que ceux qui sont inscrits dans le budget européen résultent de décisions auxquelles la France elle-même était partie. Si nous procédions à un tel vote, cette disposition serait écartée par le Conseil constitutionnel ou par la Cour de justice européenne.
Ensuite, et surtout, le message politique porté par cet amendement est déplorable. Une procédure est en cours depuis longtemps et la Turquie fait des efforts pour respecter certains critères avant que nous puissions nous prononcer sur son entrée dans l'Union européenne. J'ajoute que se pose aussi le problème de la capacité de l'Union européenne à accueillir la Turquie et, d'une certaine façon, des critères de l'Europe pour ce faire.
En tout cas, ce qui est sûr, c'est que la Turquie fait d'incontestables efforts. J'y ai séjourné cet été et j'ai pu constater le développement considérable de ce pays, les investissements réalisés dans l'ensemble des régions. Le régime turc est souvent mis en cause, mais il est démocratique. Ce pays essaie de concilier les règles démocratiques et l'islam, dont il a une vision moderne. Il fait des efforts en matière de justice, notamment. Certaines dispositions pénales à l'égard des mineurs ont été récemment adoptées. C'est un pays qui fait des efforts pour reconnaître l'existence des religions minoritaires, notamment les orthodoxes et les catholiques arméniens. Quant à ses positions en matière de politique étrangère, elles sont très proches de celles que la France défendait il n'y a pas si longtemps. J'aimerais d'ailleurs que notre pays défende les mêmes positions que la Turquie sur un certain nombre de dossiers graves ! Adopter cet amendement serait donc une profonde erreur, un message désastreux.
Enfin, sur le plan diplomatique, comment, dans les capitales européennes et en Turquie, ne se poserait-on pas la question de savoir si cet amendement n'est pas en réalité un sous-marin ? S'il était voté, cela affaiblirait considérablement la position de la France vis-à-vis de ses partenaires.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur.
M. Marc Laffineur. Cet amendement ce n'est, ni plus ni moins, que la remise en cause de la totalité de la politique française étrangère et européenne. La position du Président de la République est extrêmement claire.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Très claire !
M. Marc Laffineur. Il a dit qu'il n'était pas question que la Turquie entre dans l'Union européenne, qu'il était pour un partenariat privilégié, mais qu'il fallait continuer à discuter avec ce pays. L'intérêt bien compris des peuples européens, et de nous Français, c'est que la Turquie se rapproche le plus possible des règles européennes. La rejeter serait extrêmement dangereux pour l'équilibre européen et même pour la paix en Europe.
Je comprends que l'on ait pu avoir envie de déposer un tel amendement pour des raisons de politique intérieure, mais le voter mettrait le Président de la République dans de très grandes difficultés.
M. Jean Gaubert. Il l'est déjà !
M. Christophe Caresche. Vous ne devriez pas donner de tels arguments ; nous pourrions être tentés de voter l'amendement !
M. Marc Laffineur. Comment expliquerions-nous aux autres pays qu'un tel amendement a été voté contre le gré du Président de la République alors que nous avons la majorité ? Cela sera impossible, d'autant que nous avons instauré des règles très strictes puisque, de toute façon, toute entrée dans l'Europe sera soumise à un référendum en France. C'est un verrou supplémentaire.
Faisons donc attention à ce que nous allons voter, chers collègues, et ne nous trompons pas ! Si nous votions cet amendement, il se passerait l'inverse de ce qui figure dans l'exposé sommaire : nous mettrions le Président de la République en très grande difficulté !
Mme la présidente. La parole est à M. Robert Lecou.
M. Robert Lecou. L'un des problèmes de l'Europe aujourd'hui c'est sa difficulté à assimiler l'élargissement. Je suis de ceux qui pensent que, dans le concert de la mondialisation, l'Europe doit se faire par cercles concentriques.
Mais si l'Europe est un socle de valeurs culturelles, c'est aussi un territoire et des frontières. À cet égard, je ne suis pas favorable à un nouvel élargissement, car je considère que la Turquie est hors des frontières de l'Europe.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Le Gouvernement aussi ! Ça tombe bien !
M. Robert Lecou. Toutefois, je ne voterai pas l'amendement de Richard Mallié pour diverses raisons. Celles, fondamentales, données par notre rapporteur général méritent d'être entendues et je les retiens. Mais bien d'autres raisons me font dire que nous ne pouvons pas aujourd'hui participer à l'humiliation d'une grande nation, d'un grand pays qui joue un rôle économique de plus en plus important, un grand rôle politique et un rôle diplomatique important au Moyen-Orient. Ce grand pays a vocation à être un partenaire privilégié pour l'Europe et la France, qui en ont besoin.
Voter cet amendement n'irait pas dans le sens des intérêts de la France, pas plus que dans celui des intérêts de l'Europe. Cela ne correspondrait pas du tout à la diplomatie française. Cependant, cela ne m'empêchera pas d'affirmer ici certains points de vue. D'ailleurs, le référendum qui a été inscrit dans la Constitution me paraît la meilleure des garanties pour les Français. Je demande à Richard Mallié de bien réfléchir. Nous pouvons considérer qu'il n'est pas souhaitable que la Turquie intègre l'Europe, mais ne votons pas un amendement qui aurait pour conséquence de l'humilier ! La Turquie est une grande nation, un grand pays !
Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson. J'avais déposé un tel amendement il y a quelques années, mais je l'avais retiré après débat. En effet, la question qui se pose est : à quoi sert l'article 46 ?
M. Jacques Myard. À rien !
M. Charles de Courson. C'est vrai qu'il ne sert à rien, car qu'on le vote ou pas, de toute façon il s'appliquera puisque c'est un engagement international de la France !
M. Jacques Myard. Non !
M. Charles de Courson. Si, monsieur Myard ! Jusqu'à preuve du contraire, les engagements internationaux de la France priment sur le droit national. C'est le peuple français qui en a décidé ainsi.
Ce débat est donc très relatif. Que l'on vote ou pas cet amendement, cela n'a pas de sens techniquement. Le vrai problème est celui de l'attitude de la France à l'égard d'une éventuelle adhésion de la Turquie. Le Président Sarkozy a été très clair. Moi, je fais partie d'une famille politique qui est contre l'adhésion de la Turquie et pour un partenariat privilégié, comme tous les gens de bon sens. En effet, ne nous y trompons pas, une adhésion de la Turquie ce serait l'abandon de la construction d'une Europe politique. Les libre-échangistes ou les nationalistes,...
M. Jacques Myard. Mais c'est fini, ça ! Arrêtez de parler de choses qui n'existent plus !
M. Charles de Courson. ...que j'aime bien - j'aime bien notre collègue Myard - ont le droit de s'exprimer, mais ce n'est pas notre position politique.
M. Jacques Myard. Le centre est nulle part et partout en même temps !
M. Charles de Courson. L'amendement soulève un vrai sujet, mais ce n'est pas le bon moyen. C'est pourquoi, à l'époque, j'avais retiré le mien.
Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Caresche.
M. Christophe Caresche. La question n'est pas de savoir si nous sommes pour ou contre l'adhésion de la Turquie.
M. Charles de Courson et M. Nicolas Perruchot . Bien sûr que si !
M. Christophe Caresche. Non, parce que le processus d'adhésion n'est pas parvenu à son terme ! La question est de savoir si l'on permet à la Turquie de poursuivre ce processus d'adhésion ou si on lui ferme la porte alors même qu'il n'a pas été mené jusqu'au bout.
Je n'ai pas d'idée arrêtée sur la question de savoir s'il faut que la Turquie intègre ou non l'Union européenne, mais je suis certain, comme M. Garrigue, que le fait d'adopter aujourd'hui un amendement qui remet en cause le processus d'adhésion n'est pas acceptable. Ce serait grave, car cela laisserait entendre que l'attitude de la France est dictée par des considérations purement intérieures et ne tient pas compte de la construction européenne. Car c'est aussi cela qui est en cause, et je souhaite pour ma part que la France poursuive la discussion à ce sujet avec ses partenaires européens.
Je voterai donc personnellement contre cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Myard.
M. Jacques Myard. La question de l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne est posée depuis quelque temps dans des termes erronés. En effet, si l'on considère la durée du processus d'adhésion, il est clair que l'Union européenne telle qu'elle existe aujourd'hui n'existera plus dans dix ou quinze ans. C'est une évidence.
Il y a cependant une ambiguïté, et je rejoins sur ce point Richard Mallié, c'est que notre aide à la Turquie est inscrite dans les crédits de préadhésion. C'est une erreur, et il ne faudrait pas parler de préadhésion tant que le processus n'est pas enclenché. Mieux vaudrait donc que Bruxelles inscrive ailleurs ces crédits.
N'oublions pas, quoi qu'il en soit, que la Turquie appartient au système européen : elle appartient au Conseil de l'Europe, à l'OTAN, et est un membre actif de l'Union pour la Méditerranée. Une fois n'est pas coutume, je soutiens donc le Gouvernement lorsqu'il parle de faux signal en matière de politique étrangère.
Mais laissons du temps au temps, car je suis intimement convaincu que, dans quelques années, la question de l'adhésion de la Turquie ne se posera plus dans les mêmes termes.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Bien sûr !
M. Jacques Myard. Cela dit, elle est une grande puissance avec laquelle il faudra compter, n'en déplaise aux uns ou aux autres.
Mme la présidente. La parole est à Mme Muriel Marland-Militello.
Mme Muriel Marland-Militello. Permettez-moi de vous dire que nous sommes en pleine hypocrisie politique et diplomatique, ce qui ne nous honore pas devant nos électeurs et nos concitoyens. Nous votons un budget qui concerne l'intégration de la Turquie à l'Union, alors que nous ne voulons pas l'intégrer !
La chose n'est pas nouvelle ; depuis des années nous en sommes au même point. L'Europe elle-même est obligée de constater que la Turquie ne fait aucun progrès vers l'adhésion. Et pour cause ! Un système parfaitement démocratique et respectueux des droits de l'homme aboutirait immanquablement, chacun le sait, à porter au pouvoir en Turquie des forces pro-islamiques. C'est inhérent au système turc, que je connais parfaitement.
M. Christophe Caresche. Mais non !
Mme Muriel Marland-Militello. Vous êtes donc hypocrites. Vous votez un budget qui prévoit l'intégration sans vouloir cette intégration. En d'autres termes, vous mentez ! Vous mentez à la Turquie, vous vous mentez à vous-mêmes et vous mentez au monde. Ce n'est pas un bon exemple. De surcroît, il s'agit d'un article dont M. de Courson vient de nous démontrer qu'il ne servait à rien ! Je suis contente que cet amendement ait été déposé, ne serait-ce que parce qu'il permet de montrer la réalité de votre hypocrisie ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Chartier.
M. Jérôme Chartier. Si l'objectif de l'amendement défendu par Richard Mallié était de susciter un débat sur l'adhésion de la Turquie, c'est réussi !
Je me réfère pour ma part aux propos tenus par le rapporteur général Gilles Carrez, les seuls légitimes dans ce débat budgétaire. Sur le fond, chacun a son point de vue et a eu l'occasion de l'exprimer. La position du Président de la République et du Gouvernement a été rappelée, celle de l'UMP également. En revanche, nous sommes ici dans le cadre d'une discussion budgétaire, où n'ont pas à figurer des éléments à caractère non législatif comme, en l'espèce, cet amendement, qui n'a pas sa place dans une loi de finances, même s'il soulève des questions légitimes, qui méritent d'être débattues, y compris au sein du Parlement. Tenons-nous en donc aux règles, si l'on ne veut pas donner d'arguments à ceux qui contestent l'utilité des lois.
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Mallié.
M. Richard Mallié. Je ne peux pas laisser passer les propos de M. Chartier sur la nature de mon amendement. À quoi servons-nous donc ? Une de nos missions fondamentales est de voter le budget.
M. Christophe Caresche. Mais pas le budget européen !
M. Richard Mallié. Or il me semble que nous sommes en train de voter le budget, et plus précisément son article 46. J'en déduis donc que nous ne servons à rien, et je siège donc depuis presque quatre heures pour rien !
Cela dit, mon but n'était pas de susciter un débat sur l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, mais de nous inciter à la cohérence. Tous l'ont dit sur les bancs de l'UMP : nous sommes, comme le Président de la République, pour un partenariat privilégié avec la Turquie. Nous ne défendons pas la préadhésion. Les choses sont claires. Muriel Marland-Militello a raison : nous nous mentons à nous-mêmes et nous mentons aux Turcs. Quelle inconséquence !
Quant à l'Union pour la Méditerranée, c'est le remède trouvé par Nicolas Sarkozy au refus d'intégrer la Turquie.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Mais non !
M. Richard Mallié. Mais si ! Je me souviens très bien des débats que nous avons eus sur cette question en 2006.
Quoi qu'il en soit, à quelque chose malheur est bon. Je ne souhaitais pas ce débat, mais il a eu lieu. Chacun s'est exprimé, notamment à gauche, et je suis content d'entendre dire sur ses bancs que l'on défend l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Gaubert.
M. Jean Gaubert. Depuis que ce débat a commencé, on a entendu tout et n'importe quoi. C'est d'autant plus malheureux que Richard Mallié semble ne pas avoir bien compris ce qu'ont dit mes collègues et que je vais répéter. Comme la plupart des parlementaires, les socialistes s'interrogent sur le cas turc. En revanche, nous sommes sûrs d'une chose, c'est que nous avons intérêt à tisser des liens avec la Turquie.
M. Richard Mallié. On a la réponse : c'est le partenariat privilégié !
M. Jean Gaubert. En d'autres temps, il me semble d'ailleurs que la France s'est montrée plus ouverte qu'aujourd'hui, et si l'UMP a décidé de fermer la porte à la Turquie, c'est son problème, mais mieux aurait valu, dans ce cas, qu'elle commence par avoir un débat interne sur ce sujet.
Nous estimons, nous, qu'interrompre les discussions avec les Turcs serait un manquement à la parole donnée par plusieurs gouvernements. Quant aux conclusions de ces discussions, comment les deviner avant d'avoir étudié les éléments de convergence ? On peut aboutir à une adhésion, comme à une aide apportée à la Turquie pour qu'elle devienne le pilier d'une organisation moyen-orientale dont nous avons grandement besoin.
La majorité, quoi qu'il en soit, ferait bien de se concerter pour adopter une position cohérente, surtout dans cette période où le Président de la République prend des initiatives à l'extérieur pour regagner du crédit à l'intérieur. Je crains que le débat que vous avez lancé ne soit un mauvais service que vous lui rendez, à la veille du G8 et du G20.
Mme la présidente. La parole est à M. François Asensi.
M. François Asensi. Je voterai naturellement contre cet amendement, qui constitue un geste inamical envers le peuple turc, au sein duquel existent des forces démocrates et progressistes qui veulent faire avancer la société et souhaitent une coopération intelligente et renforcée avec l'Europe.
L'amendement de M. Mallié est idéologique, et je vois bien, dans le contexte actuel, ce qui peut le motiver.
M. Richard Mallié. Mais ce n'est pas la première année que je le présente !
M. François Asensi. Je ne suis pas sûr néanmoins que, lors des prochaines consultations électorales, les questions d'immigration soient au coeur des préoccupations des Français, mais bien plutôt les questions sociales. Je vous incite donc à la plus grande prudence sur ce sujet.
M. Richard Mallié. C'est l'avenir de l'Europe qui est en jeu !
M. François Asensi. Quoi qu'il en soit, le processus de discussion doit continuer avec la Turquie, avant que nous arrêtions une position définitive. La façon qu'a M. Mallié de dire que la gauche est favorable à l'intégration, tandis que la droite y est défavorable est un peu manichéenne.
Mme la présidente. La parole est à M. François de Rugy.
M. François de Rugy. Merci, madame la présidente, d'avoir autorisé ce débat sur un amendement qui n'est rien d'autre qu'un cavalier. Vous savez fort bien, monsieur Mallié, que ce n'est pas à l'occasion d'un débat budgétaire que doit se poser la question de l'entrée ou non de la Turquie dans l'Union européenne.
M. Nicolas Perruchot. On saisit les occasions qui s'offrent !
M. François de Rugy. Vous parlez de cohérence. Sans doute vous adressez-vous en priorité à vos amis de l'UMP et du Gouvernement. Car c'est vous qui tenez depuis plus de trois ans un double langage. Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était candidat à l'élection présidentielle, a fait campagne, avec force déclarations, contre l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne ; à peine élu, le voilà rangé aux arguments de ses partenaires européens, favorables, eux, sinon à l'entrée de la Turquie dans l'Union, du moins à la poursuite des négociations.
Vous voulez continuer à entretenir la flamme antiturque, mais nous voterons contre votre amendement, monsieur Mallié, car nous refusons de nous situer dans cette perspective. Les écologistes ont toujours été clairs sur le sujet : nous n'avons aucune opposition de principe à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, donc à la poursuite des négociations entre l'Union et la Turquie, lesquelles ont beaucoup fait progresser la Turquie dans nombre de domaines.
Mais pour nous, il y a des préalables à l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne : d'une part, du côté de la Turquie, quant à la reconnaissance du génocide arménien, aux Kurdes et aux questions de ce type ; d'autre part, dans l'Union européenne elle-même : nous dénonçons, une fois de plus, le fait qu'on ait privilégié l'élargissement par rapport à l'approfondissement.
M. Jacques Myard. Ce sont des mots !
M. François de Rugy. Nous avons toujours dit qu'il fallait procéder à l'approfondissement et ensuite seulement à l'élargissement. C'est là un débat sur l'Union européenne, et non sur la Turquie. Nous voterons donc contre cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Pendant ces quatre heures de discussion, nous avons pu mener deux débats passionnants, l'un sur le mécanisme de sauvegarde de la zone euro, sujet important qui fera l'objet d'autres discussions en fin de semaine, et l'autre sur cet amendement de M. Mallié, que je remercie...
M. François de Rugy. Très sincèrement !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. ... d'avoir provoqué une discussion de fond sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Là n'est pas le débat, d'ailleurs. Le Gouvernement est contre l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, les choses sont bien claires.
Mais j'interviens sur deux points. D'abord, madame Marland-Militello, avec toute l'affection que je vous porte, je ne peux pas laisser dire que le Gouvernement ment. Dire de telles choses, ce n'est rendre service ni au Gouvernement, ni au Président de la République, ni à la politique étrangère de la France.
Quelle est notre position ? A Copenhague, la France, comme la quasi-totalité des pays de l'Union, avait accordé le statut de candidat à la Turquie. Ce statut, personne ne l'a remis en cause. Simplement, ce que nous avons dit, c'est que nous sommes contre l'adhésion. La négociation continue car nous considérons qu'il est dans l'intérêt de la France qu'elle continue. C'est aussi dans l'intérêt des Turcs d'élever le niveau de la démocratie chez eux, et ils nous le demandent.
C'est également l'intérêt de nos relations bilatérales. Au passage, je rappelle que la Turquie est un pays où il y a, excusez du peu, une université francophone - j'y ai enseigné - et cinq lycées francophones ; nous y sommes le quatrième investisseur et nous y avons des intérêts économiques stratégiques majeurs. Ce pays se développe avec un taux de croissance de 9 %. C'est une puissance émergente importante sur le continent européen, qu'il nous faut considérer comme tel. En politique étrangère, - monsieur Perruchot, je ne suis pas aveugle sur ce que fait mon homologue Ahmet Davutoglu - nous suivons avec beaucoup de soin le déploiement de l'influence turque depuis le Maghreb et l'Afrique noire jusqu'en Asie centrale.
M. Jacques Myard. Ils défendent leurs intérêts, eux !
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Ce pays aspire à être un hub , comme l'on dit, dans le domaine énergétique. Il a une politique de puissance régionale, avec des positions qui ne sont pas exactement les nôtres par exemple sur l'Iran ou sur l'affaire de la flottille à Gaza. Nous suivons cela avec beaucoup d'attention et nous considérons que la Turquie est un acteur clé en Europe ; là n'est pas la question.
Face à cela, la position du Gouvernement, je le répète, est absolument claire : la France est pour la relation la plus étroite possible, dans le cadre d'un partenariat stratégique, avec la Turquie, comme nous aspirons à un tel partenariat avec l'Ukraine ou avec un grand pays comme la Russie.
Toute autre question sur l'adhésion n'a pas lieu d'être. Maintenant que M. Mallié a obtenu un débat fort intéressant sur ce sujet, je préférerais qu'il retire son amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances.
M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Madame la présidente, je ne veux pas allonger encore le débat, mais je comprends que vous ayez donné la parole à ceux qui voulaient s'exprimer car, contrairement à ce qu'un de nos collègues a dit, l'opposition n'est pas entre la majorité et ceux qui n'approuvent pas sa politique : le clivage existe dans chaque groupe, les uns étant plus sensibles à des arguments de politique et de politique étrangère, d'autres plus enclins à accepter le processus pour des raisons économiques.
En tout cas, cher monsieur Mallié, l'opposition n'est pas entre la gauche et la droite, sinon ce débat aurait été beaucoup plus bref, et tranché beaucoup plus vite.
Si j'interviens, c'est sur la forme, en tant que président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez déclaré qu'accepter ou non cet amendement, c'était accepter ou non la politique étrangère. Un vote sur une ligne budgétaire ne donne pas lieu à la « question de confiance ». A trop vouloir dramatiser, il faut quand même veiller à ne pas aller trop loin. Si le Gouvernement souhaite poser la question de confiance sur ce sujet, c'est davantage du ressort du Président, du Premier ministre et du conseil des ministres que de l'initiative d'un ministre en séance. Ce ne serait d'ailleurs pas forcément très opportun. Il s'agit de voter ou non un amendement. Sur le plan institutionnel, il ne s'agit pas de voter ou pas la confiance à une politique et à un gouvernement.
(L'amendement n° 73 n'est pas adopté.)
(L'article 46 est adopté.)