II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 2857 TOME II (2010-2011)
Observations et décision de la Commission
Le présent article a pour objet d'adapter les règles fiscales applicables aux véhicules de sociétés à la nouvelle terminologie issue de la directive 2007/43/CE du Parlement et du Conseil du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules.
I.- UNE « FAILLE » DANS LES NOUVELLES RÈGLES EUROPÉENNES D'HOMOLOGATION A PERMIS À DES VÉHICULES PARMI LES PLUS POLLUANTS D'ÉCHAPPER À TOUTE TAXATION
A.- LES RÈGLES FISCALES APPLICABLES AUX VÉHICULES DE SOCIÉTÉS
Les véhicules de sociétés sont, en France, l'objet de nombreuses dispositions fiscales parmi lesquelles :
- la taxe sur les véhicules de sociétés (TVS) qui, en application de l'article 1010 du code général des impôts, frappe les sociétés « à raison des véhicules qu'elles utilisent en France quel que soit l'État dans lequel ils sont immatriculés, ou qu'elles possèdent et qui sont immatriculés en France, lorsque ces véhicules sont immatriculés dans la catégorie des voitures particulières au sens du 1 du C de l'annexe II de la directive 70/156 du Conseil du 6 février 1970 concernant le rapprochement des législations des États-membres relatives à la réception des véhicules à moteur et de leurs remorques » ;
- la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d'immatriculation de l'article 1010 bis du même code, qui est due « sur les certificats d'immatriculation [...] des voitures particulières au sens du 1 du C de l'annexe II de la directive 70/156 du Conseil du 6 février 1970 concernant le rapprochement des législations des États-membres relatives à la réception des véhicules à moteur et de leurs remorques » ;
- le « malus automobile » qui, aux termes de l'article 1011 bis du même code, est dû « sur le premier certificat d'immatriculation délivré en France pour une voiture particulière au sens du 1 du C de l'annexe II de la directive 70/156 du Conseil du 6 février 1970 concernant le rapprochement des législations des États-membres relatives à la réception des véhicules à moteur et de leurs remorques » ;
- le « malus » automobile annuel dû par les véhicules « immatriculés dans la catégorie des voitures particulières au sens du 1 du C de l'annexe II de la directive 70/156 du Conseil du 6 février 1970 concernant le rapprochement des législations des États-membres relatives à la réception des véhicules à moteur et de leurs remorques » et émettant plus de 245 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre (article 1011 ter du même code) ;
- enfin, le 4 de l'article 39 du même code n'autorise, pour l'établissement du résultat imposable, l'amortissement des véhicules « immatriculés dans la catégorie des voitures particulières » que dans la limite d'un prix d'acquisition de 18 300 euros, montant ramené à 9 900 euros lorsque les véhicules ont un taux d'émission de dioxyde de carbone supérieur à 200 grammes par kilomètre.
En d'autres termes, tant la TVS que la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d'immatriculation, le « malus » automobile, le « malus » automobile annuel et la limitation des dotations à l'amortissement des véhicules reposent sur une définition des « voitures particulières » découlant de la directive 70/156 et de son annexe II précitées .
B.- UNE « FAILLE » DANS LES NOUVELLES RÈGLES EUROPÉENNES D'HOMOLOGATION DES VÉHICULES
Or, cette directive et son annexe ont été abrogées par la directive 2007/46/CE du 5 septembre 2007 . L'adaptation de la référence à la nouvelle directive dans les articles 39, 1010, 1010 bis , 1011 bis et 1011 ter du code général des impôts se révèle donc nécessaire, non seulement du point de vue strictement rédactionnel mais également en raison d'une disposition particulière de celle-ci qui, en pratique, a pour effet de réduire le champ d'application des dispositions fiscales susmentionnées .
En effet, la directive 2007/46/CE permet aux constructeurs automobiles d'homologuer certains de leurs véhicules « à usages multiples » jusqu'alors classés dans la catégorie des voitures particulières (M1), dans la nouvelle catégorie N1, à la condition toutefois de satisfaire aux caractéristiques suivantes :
- leur poids n'excède pas 3,5 tonnes ;
- ils ne comportent pas plus de six places assises ;
- ils peuvent transporter, une fois la totalité des sièges occupés, autant de bagages ou marchandises que le poids des passagers embarqués.
Si, dans l'esprit des rédacteurs de la directive, la catégorie N1 visait a priori les véhicules utilitaires légers, les caractéristiques exigées pour homologuer un véhicule dans celle-ci était suffisamment larges pour que certains véhicules, auparavant immatriculés dans la catégorie M1, puissent l'être également dans la catégorie N1. C'est le cas notamment de breaks, de monospaces ou de 4x4 comme l'Audi Q7, la Porsche Cayenne, la Citroën C5 Break ou encore la Renault Laguna break , c'est-à-dire de véhicules parmi les plus polluants du marché, ceux-là même que les taxes et limitation susmentionnées - « barèmisées » en fonction des émissions de CO2 - frappent le plus fortement. Ces véhicules, désormais considérés fiscalement comme des véhicules utilitaires, peuvent donc, par décision des constructeurs automobiles, échapper totalement auxdites dispositions fiscales.
C'est d'ailleurs déjà le cas puisque, selon les informations transmises par le ministère de l'Économie, de l'industrie et de l'emploi, plus de 8 000 véhicules vendus depuis le début de l'année ont profité de cette faille 1 ( * ) dans la réglementation européenne pour échapper aux règles fiscales qui, normalement, auraient dû leur être appliquées.
II.- LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE
Afin de soumettre à la TVS les véhicules « abusivement » homologués dans la catégorie N1 susmentionnée et d'empêcher les constructeurs automobiles de les faire échapper à la TVS par ce moyen, les alinéas 11 et 12 du présent article réécrivent le premier alinéa de l'article 1010 du code général des impôts : sa deuxième phrase dispose désormais que seront soumis à la TVS les « véhicules de tourisme », c'est-à-dire, d'une part « les voitures particulières au sens du 1 du C de l'annexe II à la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 septembre 2007 » et, d'autre part, « les véhicules à usages multiples qui, tout en étant classés en catégorie N1 au sens de cette même annexe, sont destinés au transport de voyageurs et de leurs bagages ou de leurs biens ».
Par conséquent, les véhicules homologués dans la catégorie N1, pour autant qu'ils soient destinés au transport des voyageurs et de leurs bagages ou de leurs biens, sont réintégrés dans l'assiette de la TVS .
Par coordination, et dans le même objectif d'éviter aux véhicules actuellement soumis à ces dispositions d'y échapper en raison du changement de catégorie d'homologation, le présent article adapte également la rédaction des dispositions du code général des impôts relatives à la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d'immatriculation, au « malus » automobile, au « malus » automobile annuel et à la limitation des dotations aux amortissements ainsi que celle d'autres dispositions qui s'y réfèrent. De manière systématique, les mots « voitures particulières » ou « voitures de tourisme » sont donc remplacés par les mots « véhicules de tourisme au sens de l'article 1010 » (et, le cas échéant, la référence à la directive est actualisée) dans :
- les a et b et le sixième alinéa du 4 de l'article 39 ( alinéas 1 à 4 ) ;
- l'article 54 bis ( alinéa 5 ) ;
- le 3° du 1 de l'article 93 ( alinéa 6 ) ;
- le 1° de l'article 170 bis ( alinéa 7 ) ;
- le I de l'article 199 undecies B ( alinéas 8 à 10 ) ;
- les I, II et III de l'article 1010 bis ( alinéas 13 à 21 ) ;
- les I, II et III de l'article 1011 bis ( alinéas 22 à 30 ) ;
- le I de l'article 1011 ter ( alinéas 11 à 34 ).
L'ensemble de ces dispositions, comme celles des alinéas 11 et 12 précités, vise donc simplement à maintenir constant le champ d'application des articles susmentionnés nonobstant le changement des catégories d'homologation des véhicules par la directive 2007/46/CE et, par conséquent, à y réintégrer les véhicules « abusivement » classés dans la catégorie N1.
III.- ENTRÉE EN VIGUEUR ET GAIN POUR L'ÉTAT
En application de l'alinéa 35 du présent article, ses dispositions entrent en vigueur dès le 1 er octobre 2010 afin de mettre fin au plus vite à l'effet d'aubaine dont ont bénéficié les véhicules « abusivement » homologués dans la catégorie N1. Le gain pour l'Etat résultant de la réintégration de ces véhicules dans le champ des règles fiscales susmentionnées est estimé à 40 millions d'euros .
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La Commission adopte l'article 10 sans modification .
* 1 Selon les informations transmises par le ministère de l'Économie, de l'industrie et de l'emploi, c'est l'entreprise Renault qui a principalement bénéficié de cette nouvelle possibilité d'homologation, avec 60 % des homologation en catégorie N1.