Assises de la subsidiarité



Palais du Luxembourg, 24 octobre 2008

LES ASSISES DE LA SUBSIDIARITÉ

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ACTES DES TRAVAUX DE LA

CONFÉRENCE ORGANISÉE
PAR LE SÉNAT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
ET LE COMITÉ DES RÉGIONS DE L'UNION EUROPÉENNE,

LE VENDREDI 24 OCTOBRE 2008, AU SÉNAT

SÉANCE D'OUVERTURE

M. Bernard FRIMAT, Vice-président du Sénat

Mesdames et Messieurs, si vous voulez prendre place. Je vous en remercie.

Monsieur le Président, Messieurs les Ministres, Madame la Commissaire européenne, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Mesdames et Messieurs, chers amis, j'ai le redoutable privilège de vous accueillir aujourd'hui au Palais du Luxembourg pour ces Assises de la subsidiarité, organisées par le Comité des régions en collaboration avec le Sénat.

Je dois vous présenter les excuses du Président Gérard Larcher, qui aurait tellement souhaité pouvoir ouvrir vos travaux, mais qui en est malheureusement empêché. Toutefois, il m'a confié cette tâche, et d'autant plus symbolique, que nos orientations politiques - si vous connaissez un peu la politique française - ne sont pas tout à fait identiques.

Il m'a confié le plaisir de vous lire, selon l'usage, le discours du Président, ce que je vais faire. Après, je me permettrai d'y ajouter quelques mots.

Message de M. Gérard LARCHER, Président du Sénat (lu par M. Bernard FRIMAT, Vice-président du Sénat)

"Le terme de subsidiarité n'est pas immédiatement parlant pour tout le monde. Faire mieux connaître et mieux comprendre ce principe, voilà qui suffirait déjà à justifier la tenue, pour la troisième fois, d'Assises de la subsidiarité, dans les capitales européennes. Car la subsidiarité est bien un concept clé de la construction européenne. C'est un concept opératoire, utile et pratique.

J'imagine aisément ce que dirait un observateur à la fois ignorant et mal intentionné - ce qui n'est pas incompatible - en regardant le programme de vos travaux: "Quoi! Des Ministres, des Commissaires européens, des Parlementaires, des Présidents de régions, des membres de la Cour de Justice, se réunissent pour discuter d'une notion abstraite et obscure, alors que l'Europe et le monde occidental sont entrés dans une crise économique et financière gravissime!" Eh bien non. La subsidiarité ne nous éloigne pas de la réalité ni de l'actualité.

Qu'ont fait les ministres des finances, puis les chefs d'États ou de gouvernements, lorsqu'ils ont élaboré le plan de lutte contre la crise financière? Ils se sont mis d'accord sur un schéma commun, ils ont décidé de l'appliquer en même temps, mais ils ont décidé que chaque État membre mettrait lui-même en oeuvre le plan commun, en tenant compte de la situation spécifique de son système bancaire. Autrement dit, ils ont pleinement appliqué le principe de subsidiarité, en décidant à l'échelon européen ce qui devait l'être, et en laissant aux États membres la marge de manoeuvre indispensable pour s'adapter. Et ce choix de la subsidiarité est pour beaucoup dans la valeur du plan européen.

Les systèmes bancaires ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre. Les banques françaises ne ressemblent pas aux banques allemandes, les banques italiennes ne ressemblent pas aux banques anglaises. Si l'on avait voulu tout régler depuis Bruxelles, l'on aurait obtenu une cotte mal taillée, mal adaptée aux situations réelles.

La subsidiarité est donc la clé de l'efficacité. Se demander comment mieux appliquer ce principe, c'est préparer les voies d'un meilleur fonctionnement de l'Europe. J'observe d'ailleurs que l'évolution va dans ce sens. Lorsqu'on lit les conclusions du dernier Conseil européen, on voit bien que c'est un texte bref, centré sur les questions essentielles: crise financière, paquet énergie- climat, Géorgie, immigration...

Cela m'amène à souligner que la subsidiarité, c'est aussi le moyen pour que l'Europe soit mieux comprise, et mieux acceptée par les citoyens. Bien sûr, la plupart d'entre eux ignorent le mot de subsidiarité. Mais ils aspirent à la chose, ils comprennent que l'Europe s'occupe des grandes questions: lutter contre la crise financière, soutenir la croissance et l'emploi, promouvoir le développement durable, agir face à une crise comme celle de la Géorgie. Mais les mêmes citoyens comprennent mal que l'Europe s'occupe des eaux de baignade ou de la TVA sur la coiffure. Ils veulent que l'Europe se concentre sur ses vraies missions. Ce que les États peuvent faire, il est inutile que l'Europe s'en charge. Mais également, ce que les pouvoirs locaux peuvent faire, il est inutile que les États s'en chargent.

Le principe de subsidiarité n'est pas seulement un principe clé pour les rapports entre l'Union et les États membres. Il est aussi un principe clé au sein des États membres, où il doit inciter à placer les responsabilités le plus près possible du "terrain". Tel est le sens de l'action du Comité des régions, qui ajoute à la subsidiarité une dimension territoriale. Agir le plus près possible des citoyens est une des données essentielles de la démocratie. Elle a d'autant plus de valeur dans un monde devenu trop complexe.

C'est le grand mérite de ces Assises que d'aborder le principe de subsidiarité sous l'angle de la bonne gouvernance, à tous les niveaux de la décision publique, qu'il s'agisse de l'Union Européenne, des États membres, mais aussi des autorités régionales et locales.

Le Sénat français, très attaché au respect des prérogatives des collectivités territoriales dont il est le représentant constitutionnel, ne peut donc qu'applaudir l'orientation générale de vos travaux. Ceux-ci donnent non seulement un éclairage sur le rôle du Comité des régions et des Parlements nationaux - et on sait combien le Sénat français est actif en la matière - mais aussi, et c'est plus original, sur les modalités d'implications des autorités régionales locales dans le processus de décisions communautaires, ainsi que sur la coordination entre les différents niveaux de pouvoirs au sein de chaque État. À cet égard, le témoignage des représentants des différents pays pourra fournir des comparaisons riches d'enseignement.

Je partage, avec les initiateurs de ce colloque, la conviction que la subsidiarité est, à tous les échelons, le principe de base d'une bonne gouvernance, à la fois efficace et démocratique.

C'est dire que vous êtes pleinement fondés à débattre des moyens de mieux traduire ce principe dans la réalité, de mieux contrôler son respect, de l'inscrire pleinement dans la culture politique de l'Union et des États membres. Et je suis certain que vos travaux aideront à y voir plus clair dans ces questions, si importantes pour nous tous."

M. Bernard FRIMAT

Voilà, Mesdames et Messieurs, le message que j'ai lu au nom du Président du Sénat.

Je me permettrai d'ajouter quelques mots sur la subsidiarité. Avant cela, je voudrais dire mon plaisir de retrouver, ce matin, mon ami Michel Delebarre avec qui j'ai une longue histoire commune dans notre région du Nord Pas-de-Calais ainsi que Luc Van Den Brande, votre Président.

Le Nord Pas-de-Calais et la Flandre sont des régions qui se connaissent bien, qui ont une longue pratique de travail en commun dans l'intérêt de leurs habitants.

Sur la subsidiarité, je serai tenté de vous dire que celle-ci peut être une immense chance démocratique dans la mesure où elle peut permettre de faire participer les citoyens à la réalité de la construction européenne et, en conséquence, les aider à rejeter ce sentiment trop souvent dominant que l'Europe leur est étrangère ou pire qu'elle n'est que l'origine des ennuis qu'ils peuvent connaître.

Il est souvent confortable pour un gouvernement national d'inscrire à son actif les avantages issus de l'Europe mais de rejeter toute responsabilité sur les éventuelles contraintes dont "Bruxelles" serait seule responsable. Je pense que cet état d'esprit n'est pas le meilleur pour promouvoir l'idée européenne.

Dans le même temps, cette chance démocratique que constitue la subsidiarité peut devenir un important danger si elle est pervertie et si elle devient un faux-nez, c'est-à-dire si elle devient l'argument pour les gouvernements, les États, de re-centraliser, de re-nationaliser des politiques qui ne trouvent véritablement toute leur signification qu'au niveau européen.

Il ne faut pas que la subsidiarité devienne un prétexte pour dessaisir l'Union européenne de ce qu'elle fait le mieux, et pour se replier sur des États où s'exercerait le seul vrai pouvoir. Voilà, pour moi, les deux bornes entre lesquelles le principe de subsidiarité doit constamment se situer.

Voilà les quelques mots que je souhaitais ajouter au remarquable discours du Président Larcher, dont je vous ai fait lecture. Vous ayant infligé un discours introductif suffisamment long, j'ai l'immense plaisir de passer la parole à Monsieur Jean-Pierre Jouyet, Secrétaire d'Etat chargé des Affaires européennes auprès du ministre des Affaires étrangères et européennes.

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