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Question de Mme Colombe Brossel (Paris - SER) publiée le 23/05/2024

Question posée en séance publique le 22/05/2024

M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Colombe Brossel. Madame la ministre de l'éducation nationale, depuis le mois de février, pas un jour ne passe sans qu'il y ait un rassemblement, une manifestation, une journée de grève, une opération « collège désert » pour protester contre le prétendu « choc des savoirs ».

Partout en France, enseignants, personnels de direction, inspecteurs, parents d'élèves refusent la mise en oeuvre de groupes de niveaux en français et en mathématiques à la rentrée pour les élèves de sixième et de cinquième. Ils n'en veulent pas, car ils refusent le tri social que, de fait, vous leur imposez d'opérer parmi leurs élèves.

Ils n'en veulent pas, car ils n'en peuvent plus d'être maltraités, avec des annonces perlées alors que les dotations horaires globales ont déjà été notifiées aux établissements. Pour un groupe de niveau en maths, c'est la fin d'une option, c'est la fin du latin ! Pour un groupe de niveau en français, c'est la fin de demi-groupes en langues ou en SVT.

Ils n'en veulent pas, car, à l'heure où mathématiques et français peinent à recruter aux concours, vous en êtes réduite à supplier les professeurs retraités de bien vouloir revenir pour animer ces groupes de niveau.

Ils n'en veulent pas, car votre baguette magique pour mettre en place les groupes de niveaux, c'est l'augmentation des recrutements de contractuels. Confier les plus fragiles aux plus fragiles, il fallait l'inventer...

Madame la ministre, ma question est simple : à l'heure où l'école publique a besoin d'un choc de moyens et de confiance, quand comptez-vous mettre fin aux groupes de niveau ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE-K et GEST.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 23/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 22/05/2024

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Mme Nicole Belloubet, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Brossel, non, non et non !

Non, je ne peux partager votre première analyse sur le choc des savoirs, qui vous conduit à dire qu'il revient à opérer un tri social. J'ai eu l'occasion de le répéter que ce n'était pas le cas.

L'ensemble des dispositifs qui ont été annoncés par Gabriel Attal, dont je prends la suite, visent à faire progresser tous nos élèves. Il s'agit là de notre ambition partagée. Cela se traduit notamment par une méthode particulière, à savoir la mise en place de groupes de besoins en sixième et en cinquième en français et en maths, réellement adaptés aux besoins de nos élèves, suivant une pédagogie différenciée.

Nous avons, pour ce faire, un levier fort : un brassage de ces groupes en cours d'année. C'est important. J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer devant vous à ce sujet.

Non, encore, quant à l'insuffisance des moyens que vous évoquez. Nous avons mis en place des emplois supplémentaires. Un peu plus de 2 200 ETP sont consacrés à la mise en place de ces groupes en sixième et en cinquième, et nous faisons évidemment de notre mieux pour avoir, l'année prochaine, l'ensemble des professeurs présents devant nos élèves. C'est un autre de nos objectifs.

Enfin, non, nous ne supplions pas les gens de venir enseigner dans notre système éducatif. Nous prenons acte d'une tendance qui existe dans tous les pays de l'Union européenne. Je le dis devant vous, la fonction publique dans l'éducation nationale a aujourd'hui du mal à recruter. C'est vrai en France, mais pas seulement.

Autrement dit, ce n'est pas seulement une question de rémunération ! D'ailleurs, vous savez que notre pays a fait un effort extrêmement important depuis 2017 pour améliorer la rémunération de nos enseignants, qui est passée, en début de carrière, de 1 800 à 2 100 euros.

Au reste, la rémunération n'est pas la seule raison pour laquelle nous devons rénover la formation de nos enseignants. Nous mettons en place un effort considérable de formation initiale pour assurer une attractivité du parcours. Le concours se fera à la fin de la troisième année, puis la formation se poursuivra.

Je suis persuadée que cet ensemble de mesures vise à renforcer notre système éducatif. C'est notre seul objectif. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour la réplique.

Mme Colombe Brossel. Madame la ministre, j'entends votre réponse, qui, pour tout vous dire, m'inquiète.

J'ai l'impression qu'il existe un monde parallèle à celui qui sollicite, tous les jours, les parlementaires que nous sommes, en nous alertant sur les structures éducatives et pédagogiques qui doivent être mises à bas pour permettre la mise en place de groupes de niveau dont personne ne voit bien à quoi ils servent, à part à faire du tri social.

Madame la ministre, sur les politiques publiques, quand on a raison seul contre tous, c'est généralement que l'on a tort !

Pas un chercheur en sciences de l'éducation ne soutient vos projets. Cinq anciens directeurs généraux de l'enseignement scolaire (Dgesco), ayant servi des ministres fort différents, sont venus exprimer leur opposition unanime.

M. Mickaël Vallet. Que vous dit le Conseil scientifique de l'éducation nationale ?

Mme Colombe Brossel. Samedi, parents et enseignants seront nombreux dans la rue pour refuser le tri social des élèves. Nous serons nombreux à leurs côtés ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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