Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2025

Direction de la Séance

N°724

14 novembre 2024

(1ère lecture)

(n° 129 , 138 , 130)


AMENDEMENT

C Défavorable
G  

présenté par

Mmes NARASSIGUIN et LE HOUEROU, M. KANNER, Mmes CANALÈS, CONCONNE et FÉRET, MM. FICHET et JOMIER, Mmes LUBIN, POUMIROL et ROSSIGNOL, MM. BOURGI et ROS, Mme LINKENHELD, M. LUREL, Mme BÉLIM, M. FÉRAUD, Mme HARRIBEY, MM. GILLÉ et ZIANE, Mme BROSSEL, MM. FAGNEN et CHANTREL, Mme CONWAY-MOURET, MM. DARRAS, MICHAU, MÉRILLOU et MONTAUGÉ, Mme BONNEFOY, M. ROIRON, Mme BLATRIX CONTAT, M. JEANSANNETAS, Mme Gisèle JOURDA, MM. VAYSSOUZE-FAURE et Michaël WEBER, Mme MONIER, MM. Patrice JOLY, MARIE, TISSOT, DURAIN et CHAILLOU, Mme ARTIGALAS, MM. REDON-SARRAZY, OUIZILLE, PLA, UZENAT

et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain


Article 14

(Annexe)

Consulter le texte de l'article ^

Après l’alinéa 9

Insérer douze alinéas ainsi rédigés :

Au-delà de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’année 2025 consacre la santé mentale comme grande cause nationale. À cette fin, dix grandes mesures traduisent concrètement cet engagement : 

– En urgence, revaloriser les rémunérations des professionnels de la santé mentale, recréer des postes et de l’attractivité ; 

– Construire pour la Nation une vision pluriannuelle de la santé mentale ;

– Aller vers une organisation graduée et décloisonnée de l’offre de soins s’appuyant en priorité sur l’ambulatoire ;

– Mettre en cohérence le financement des acteurs de la santé mentale avec les nouvelles ambitions ; 

– Poursuivre l’objectif « zéro contention, zéro isolement » ; 

– Avoir une attention particulière pour la santé mentale de l’enfant, de l’adolescent et de l’étudiant ;

– Faire de la santé mentale des travailleurs une priorité ;

– Mieux prendre en charge le handicap psychique et les troubles du neurodéveloppement ;

– Répondre à l’éco-anxiété croissante de la population ;

– Développer la prévention et les interventions précoces.

Ces mesures font l’objet d’un financement correspondant et d’une concertation avec les acteurs concernés.

Objet

Cet amendement d’appel vise à faire réellement de la santé mentale une grande cause nationale, en déployant 10 mesures-clés.

Une proposition de loi des députés socialistes déposée en 2023 porte sur la santé mentale. Elle constate tout d’abord que l’état de santé mentale des Françaises et Français se dégrade sévèrement : 

- entre une personne sur cinq et une personne sur trois est concernée par un trouble psychique au cours de sa vie en France;

- plus de 2 millions de Françaises et Français sont pris en charge par les services psychiatriques par an ; 

- les troubles liés à la santé mentale représentent la première source d’arrêt de travail prolongé et 25% des causes d’invalidité en France

Face à un tel constat, les feuilles de route du gouvernement se succèdent, sans résultats.

Dans ce contexte, elle met sur la table une transformation radicale de la philosophie de notre système de santé mentale : analyser finement les pathologies et les besoins des patients pour construire des parcours de prise en charge, associant des équipes pluri-professionnelles, s’appuyant en priorité sur l’ambulatoire.

Cette ambition nouvelle est traduite en 10 grandes mesures :

En urgence, revaloriser les rémunérations des professionnels de la santé mentale, recréer des postes et de l’attractivité : augmenter massivement les rémunérations des professionnels, procéder à un plan massif d’embauche (augmenter d’au moins 20% les effectifs d’internes, créer 5000 postes de psychologues, créer 5postes par service au moins d’infirmiers de pratique avancée, recruter 5000 personnels supplémentaires dans les centres médico-psychologiques), répartir de manière plus juste les postes d’internes, remplacer le dispositif « MonPsy » par une convention de prise en charge négociée entre l’Assurance maladie et les psychologues.

Construire pour la Nation une vision pluriannuelle de la santé mentale : construire une loi de programmation en santé mentale, votée tous les cinq ans, qui sanctuarise le budget de la santé mentale et définit les objectifs de santé mentale à atteindre et les moyens financiers, rattacher directement la Délégation à la santé mentale à la Première ministre et la rendre ainsi interministérielle, créer une Agence nationale pour la recherche, l’innovation et l’évaluation en santé mentale.

Aller vers une organisation graduée et décloisonnée de l’offre de soins s’appuyant en priorité sur l’ambulatoire : lever les barrières entre la psychiatrie et la médecine générale, l’hôpital et l’ambulatoire, le sanitaire le médico-social et le social, ouvrir le secteur sur d’autres acteurs (Éducation nationale, Aide sociale à l’enfance, Protection judiciaire de la jeunesse, bailleurs sociaux, etc.), amplifier l’ambulatoire, consolider et financer suffisamment les conseils locaux de santé mentale et les programmes territoriaux de santé mentale, mettre au cœur de l’offre de soins les droits des usagers et des aidants, créer un service public territorial de la santé mentale.

Mettre en cohérence le financement des acteurs de la santé mentale avec les nouvelles ambitions : augmenter les budgets d’au moins 4 milliards d’euros sur cinq ans, ouvrir la réflexion sur un système de financement des acteurs de santé mentale à plusieurs niveaux (populationnel, qualitatif, basé sur l’innovation, des actions pluri-sectorielles, etc.).

Poursuivre l’objectif « zéro contention, zéro isolement » : à court terme, développer les formations aux prises en charge spécialisées et complexes, construire les plans de crise avec l’usager, expérimenter le contrôle des décisions de contention et d’isolement par un juge des libertés et de la détention qui serait un pair ; à long terme aller vers la fin de la contention grâce au renfort de professionnels et à la prévention.

Avoir une attention particulière pour la santé mentale de l’enfant, de l’adolescent et de l’étudiant : créer au moins 3 postes universitaires en pédopsychiatrie dans chaque faculté de médecine spécialisés respectivement chez les bébés, les enfants et les adolescents, doubler le nombre d’étudiants formés à la pédopsychiatrie, rouvrir des lits d’hospitalisation de pédopsychiatrie, consacrer la pédopsychiatrie comme une spécialité à part entière, créer 15 000 postes de psychologues Éducation nationale, recruter des infirmiers et des assistants sociaux, déployer un programme massif de formation continue et d’accompagnement de la communauté éducative, créer un cours d’éducation à la santé mentale en classe de quatrième, développer les bureaux d’aide psychologique universitaire (BAPU), plus largement sensibiliser ces publics à ce que sont les émotions et à comment les gérer via un cours spécifique.

Faire de la santé mentale des travailleurs une priorité :reconnaître l’épuisement professionnel et la perte de sens au travail comme maladies professionnelles, réarmer la médecine du travail en recréant des postes de psychologues du travail, déployer un plan national de formation à la prévention des troubles psychiques au travail avec un abondement public du Compte personnel de formation (CPF).

Mieux prendre en charge le handicap psychique et les troubles du neurodéveloppement : créer au moins 20 000 solutions supplémentaires dans les lieux de vie et les services d’accompagnement adaptés au handicap psychique (notamment les Foyers d’accueil médicalisés – FAM –, les Maisons d’accueil spécialisées – MAS – et les Services d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés – SAMSAH), structurer des parcours de rétablissement en favorisant les expériences d’ouverture dans la cité, soutenir la recherche sur les maladies psychiques.

Répondre à l’éco-anxiété croissante de la population : former spécifiquement les professionnels à ce type de prise en charge, organiser des temps de détection de l’éco-anxiété dans les écoles, collèges, lycées, universités, et dans les milieux associatifs, construire des parcours spécifiques de prise en charge, aider à la reconversion professionnelle vers un métier en accord avec les valeurs écologiques du patient.

Développer la prévention et les interventions précoces :développer des consultations gratuites de prévention des troubles de santé mentale à plusieurs âges de la vie, plus largement banaliser un point sur la santé mentale lors de consultations de professionnels de santé formés pour cela, allouer des moyens suffisants au numéro national de prévention du suicide (le 3114),entretenir et réparer le lien social en développant la vie associative, en soutenant les activités en clubs sportifs, culturels, et en luttant contre l’isolement, notamment celui des personnes âgées. 

Alors que le Premier ministre a souhaité faire de la santé mentale une grande cause nationale dans son discours de politique générale, il y a urgence à traduire en actes une telle ambition, à y associer les moyens humains et financiers suffisants.

Tel est l’objet du présent amendement.