Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025
Direction de la Séance
N°I-603 rect. ter
22 novembre 2024
(1ère lecture)
PREMIÈRE PARTIE
(n° 143 , 144 )
AMENDEMENT
C | Demande de retrait |
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G | |
Non soutenu |
présenté par
Mmes MORIN-DESAILLY, GUIDEZ, HOUSSEAU et SAINT-PÉ, MM. PERRION et CAMBIER, Mmes PERROT et BILLON, M. Pascal MARTIN, Mmes SOLLOGOUB et VERMEILLET, MM. COURTIAL et CAPO-CANELLAS, Mme HERZOG et MM. CHAUVET, LEVI et DUFFOURG
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 28
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 300 du code général des impôts, il est inséré un article 300-… ainsi rédigé :
« Art. 300-…. – I. – Les opérateurs de vente en ligne exerçant une activité de place de marché ou de revente de livres d’occasion sont soumis à une contribution destinée à compenser le préjudice économique subi par les auteurs de livres et leurs éditeurs en raison de l’exploitation commerciale qui est faite de leurs œuvres par ces opérateurs sans donner lieu à rémunération.
« II. – Cette contribution est assise sur le chiffre d’affaires hors taxes, frais de livraison inclus, réalisé par ces opérateurs pour tout acte de vente de livres d’occasion au profit d’acheteurs établis en France.
« III. – Le taux de cette contribution est déterminé par un arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et du ministre chargé de la culture.
« IV. – Cette contribution est versée annuellement, au plus tard six mois après la date de l’arrêté des comptes, par les opérateurs désignés au I du présent article, auprès d’une société de perception et de répartition des droits régie par le titre II du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle et agréée à cet effet par arrêté du ministre chargé de la culture. »
Objet
Comme le démontre l’étude Le Livre d’occasion, publiée par le ministère de la culture en 2024, le marché de la revente de livres d’occasion connaît une croissance continue et exponentielle depuis ces dix dernières années sous l’effet du développement de plates-formes de vente en ligne généralistes ou spécialisées. Ces plates-formes captent aujourd'hui une part importante de la valeur créée par les auteurs de livres et leurs éditeurs, lesquels ne perçoivent aucune rémunération sur la revente d'occasion des œuvres qu'ils ont créées.
Le modèle économique de certaines de ces plates-formes tend aussi à réduire le livre à un produit d'appel commercialisé (souvent dès le jour même de sa parution) à un prix dérisoire au regard de sa valeur à neuf ou intrinsèque (parfois seulement quelques centimes) : l'essentiel de la marge de ces opérateurs est réalisé sur la refacturation de prestations de services de livraison à domicile ou en points de retrait, dont les tarifs sont préalablement négociés « en gros » et au tarif le plus faible auprès d'entreprises spécialisées.
L’étude du ministère de la culture apporte en outre des éléments venant démentir certaines idées reçues. Le marché du livre d'occasion ne concourt pas, sinon marginalement, au développement de la lecture et à l'accès au livre chez les plus jeunes ou pour les publics qui en sont le plus éloignés :
- 75% des acheteurs de livres d'occasion ont entre 35 et 65 ans, et parmi eux 50% ont entre 50 ans et 65 ans et plus ;
- les CSP+ sont surreprésentés parmi les acheteurs de livres d’occasion (25%) en comparaison de leur place dans la population française ;
- Les « gros lecteurs » sont surreprésentés (+ 9 points) parmi les acheteurs de livres d’occasion, ce qui accroit la tendance au déport des achats de livres neufs vers des livres d'occasion.
La croissance du marché du livre d’occasion, qui concurrence désormais dangereusement celui du livre neuf, et sa concentration entre les mains de quelques opérateurs de vente en ligne menacent aujourd'hui l'équilibre du modèle de financement de la création éditoriale en France, et donc sa richesse et sa diversité.
Dans ce contexte et afin d'assurer aux acteurs de la chaîne du livre la capacité à continuer à financer la création éditoriale sans dépendre de subventions publiques (les aides à l'édition du Centre national du livre représentent seulement 1% du chiffre d'affaires de l'édition française), il est urgent et nécessaire de faire contribuer les opérateurs de revente de livres d'occasion au financement de la création.
Conscient du préjudice économique majeur porté aux auteurs par le marché du livre d'occasion, certains acteurs de ce marché ont d'ores et déjà mis en place ou proposé de mettre en place, une contribution volontaire à destination des auteurs afin de compenser les pertes de revenus induites par leur activité. Afin de ne pas fausser la concurrence entre les acteurs de ce marché, il convient aujourd'hui de généraliser cette contribution à l'ensemble de ses opérateurs.
Cet amendement propose donc l'instauration d'une contribution des plates-formes de vente en ligne de livres d'occasion destinée à compenser le préjudice économique subi par les auteurs de livres à raison de l'exploitation commerciale de leurs œuvres sans donner lieu à rémunération, ainsi que par leurs éditeurs. Les plates-formes contribueront ainsi au financement du renouvellement et de la diversité de la création éditoriale. Cette mesure redistributive vise à assurer la pérennité et l'équilibre de la filière du livre qui repose sur sa capacité à réinvestir une partie de la valeur créée dans le financement de la création et son renouvellement. La survie de notre modèle culturel, qui se caractérise par une production éditoriale abondante et diversifiée, en dépend.
Prenant modèle sur la compensation perçue au titre de la copie privée numérique (Code de la propriété intellectuelle, art. L. 311-1 à L 311-8), il sera procédé au recouvrement de cette contribution par un organisme de gestion collective agréé du secteur du livre, qui sera chargé de la collecter auprès des opérateurs assujettis et d'en répartir les recettes entre auteurs et éditeurs.
Le taux de la contribution, assise sur le chiffre d'affaires hors taxe, frais de livraison facturés aux clients inclus, des opérateurs assujettis, sera déterminé par arrêté ministériel.
Cette mesure ne comporte aucune charge budgétaire, ni incidence administrative pour l’État.
NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.