Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025

Direction de la Séance

N°I-104 rect. bis

22 novembre 2024

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 143 , 144 )


AMENDEMENT

C Défavorable
G Défavorable
Rejeté

présenté par

MM. KERN, LONGEOT, KLINGER et PELLEVAT, Mme DREXLER, M. MENONVILLE, Mme SOLLOGOUB, MM. WATTEBLED et de NICOLAY, Mmes DOINEAU, HERZOG, DURANTON et HOUSSEAU, MM. DUFFOURG et LEVI, Mme ANTOINE, M. FARGEOT et Mme JACQUEMET


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 22

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° La sous-section 3 de la section 3 du chapitre III du titre Ier du livre II est complétée par un paragraphe ainsi rédigé :

« Paragraphe …

« Redevance pour pollution issue des produits contenant des micropolluants 

« Art. L. 213-10-…. – I.- Sont considérés comme des micropolluants, au sens de cet article :

« 1° Les microfibres plastiques que sont l’acrylique et le polyester ;

« 2° Les métaux que sont le zinc, le cuivre, le plomb, le fer et les phtalates que sont le DEHP (Di-(2-ethylhexyl) terephthalate) ou DEHT ;

« 3° Les détergents et solvants que sont le Chloroforme et le Tétrachloroéthylène ;

« 4° Les substances per- et polyfluoroalkylées.

« Un arrêté du ministre en charge de l’environnement précise la liste des produits relevant des 1° à 4° du présent A au regard de l’évolution de la connaissance sur leur impact éco-toxicologique.

« II. – Est soumise à la redevance pollution micropolluant, la mise sur le marché des produits suivants contenant les substances listées au sein du I :

« 1° Les produits textiles d’habillement, les chaussures ou le linge de maison neufs destinés aux particuliers et les produits textiles neufs pour la maison, à l’exclusion de ceux qui sont des éléments d’ameublement ou destinés à protéger ou à décorer des éléments d’ameublement, au sens du 11° de l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement, en raison des contaminations de l’eau issues du lavage des textiles synthétiques ;

« 2° Les produits d’entretien et ménagers, en raison des rejets dans le réseau ou déversement des produits ;

« 3° Les matériaux en PVC et plastiques alimentaires ou cosmétiques contenant les plastifiants de type phtalates (DEHT, DEHP…).

« Un arrêté du ministre en charge de l’environnement précise la liste des produits relevant des 1° à 3° du présent II soumis à la redevance au regard des critères de concentration des particules listées au présent I et de capacité de transfert dans le milieu aquatique.

« III. – Pour les produits mentionnés au présent II, les taux de redevance pour l’ensemble du territoire national, sont fixés comme tels : 

« 

Substance présente dans le produit

Taux (par substance)

Substances micropolluantes du 1° du présent I

1,2 % du prix du produit hors taxe

Substances micropolluantes du 2° du présent I

0,4 % du prix du produit hors taxe

Substances micropolluantes du 3° du présent I

0,8 % du prix du produit hors taxe

 

Substances micropolluantes du 4° du présent I

1 % du prix du produit hors taxe

« Ces taux sont cumulables dans la limite de 1,5 % du prix du produit hors taxe.

« IV. – La redevance est exigible auprès des personnes qui mettent sur le marché les produits mentionnées du 1° au 3° du présent II à partir du 1er janvier 2024. Le fait générateur de la redevance est alors la mise sur le marché, à titre onéreux ou gratuit, de ces produits.

« V.- Pour les produits mentionnés au II, les sommes collectées permettent de proposer de nouvelles actions ou de renforcer les actions accompagnées par les agences de l’eau dans le domaine de la prévention et des modifications des pratiques mais aussi d’amélioration de la collecte et du traitement des eaux usées.

« VI. – Les distributeurs de produits générant des micropolluants mentionnés au I, font apparaître le montant de la redevance qu’ils ont acquittée au titre du produit distribué sur leurs factures. » ;

2° L’article L. 213-10 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« En application du principe de prévention et du principe de réparation des dommages à l’environnement, l’agence de l’eau établit et perçoit auprès des personnes publiques ou privées des redevances pour atteintes aux ressources en eau, au milieu marin et à la biodiversité, en particulier des redevances pour pollution de l’eau, pour modernisation des réseaux de collecte, pour pollutions diffuses, pour pollution micropolluants, pour prélèvement sur la ressource en eau, pour stockage d’eau en période d’étiage, pour obstacle sur les cours d’eau et pour protection du milieu aquatique.

« Lorsqu’un redevable de bonne foi, à partir d’une présentation écrite, précise et complète de la situation de fait, a demandé à l’agence de l’eau de prendre formellement position sur l’application à sa situation des règles de droit prévues à la présente sous-section, l’agence répond de manière motivée dans un délai de trois mois. La réponse est opposable par le demandeur à l’agence qui l’a émise jusqu’à ce que survienne un changement de fait ou de droit qui en affecte la validité ou jusqu’à ce que l’agence notifie au demandeur une modification de son appréciation.

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article concernant le recouvrement de la redevance pollution micropolluants. »

 

Objet

Les micropolluants des milieux aquatiques sont des substances issues des produits commerciaux ou industriels, composés organiques ou métalliques, susceptibles d’avoir une action toxique pour l’homme et/ou les organismes aquatiques y compris à des concentrations très faibles dans l’eau. L’Agence européenne des produits chimiques en dénombrait plus 20 000 en mai 2018, dans le règlement REACH et plusieurs centaines de nouvelles substances sont mises sur le marché chaque année par les industriels.

Ces micropolluants peuvent se retrouver dans les milieux aquatiques de multiples façons : rejets aqueux des industriels, lessivage des champs et des espaces naturels, rejets dans les eaux usées domestiques de résidus de médicaments, produits d’hygiène corporelle et domestique ou encore par la dégradation de dépôts sauvages directement dans les milieux aquatiques.

La lutte contre les micropolluants constitue une problématique complexe qui nécessite des actions préventives et curatives :

Actions de réduction à la source :

·         Encouragement à l’écoconception, pour limiter le recours aux molécules les plus polluantes

·         Actions de réduction de l’utilisation des produits contenant des micropolluants, par de la communication auprès des consommateurs mais aussi avec un signal prix.

·         Actions de préventions des mésusages, par un rejet inapproprié de certains produits dans l’eau

Actions curatives : il s’agit de mettre en place des équipements et installations qui visent à intercepter et traiter les micropolluants des eaux usées, pluviales et potables selon les enjeux locaux

Les dispositifs de soutien financier existants notamment via les agences de l’eau et quelques Responsabilités Élargies du Producteur concernées à la marge (par exemple Déchets Diffus Spécifiques et Médicaments Non Utilisés) ne couvrent pas ces actions à grande échelle. On est aujourd’hui encore souvent sur des actions menées à titre expérimental et qu’il va maintenant falloir généraliser au niveau national.

En complément et au regard d’une liste de substances et molécules visées par la redevance pour pollutions diffuses assez limitées, il apparaît nécessaire de créer une nouvelle redevance sur les metteurs sur le marché de produits générant des micropolluants hors pesticides (canalisations, produits d’entretien et textiles synthétiques).

Pour cela, il a été nécessaire de réaliser un premier état des lieux global de l’ensemble des principales substances retrouvées en assainissement et en eau potable.

À partir l’enquête sur les pollutions émergentes dans les captages mais également après analyse des résultats de la campagne RSDE STEU 3 et d’études analytiques sur les contaminations des eaux usées domestiques. AMORCE a fait l’inventaire des substances les plus problématiques dans les eaux, et aux vues de ces substances, considère que la priorité d’actions doit se porter sur les matériaux en PVC et plastiques alimentaires ou cosmétiques contenant les plastifiants de type phtalates, produits d’entretien et textiles synthétiques. Pour les autres usages dont les flux ne sont pas disponibles, la réglementation RSDE doit encore poursuivre l’acquisition de connaissances pour établir les établir.

L’objectif de cette nouvelle redevance est de donner un signal prix qui incite à l’écoconception par les industriels ; de mobiliser de nouveaux financements collectés par les agences de l’eau pour soutenir des nouvelles actions des services publics de gestion de l’eau sur l'ensemble du territoire national. A ce titre ce mécanisme est exclu du dispositif de plafond mordant pour permettre de mobiliser des fonds nouveaux. Cette nouvelle redevance est la juste application du principe « pollueur-payeur » dans le domaine de l’eau sur un modèle se rapprochant de la responsabilité élargie des producteurs. Cette redevance permet de financer par l’intermédiaire des Agences de l’eau les actions préventives et curatives.

A l’image du recouvrement de la redevance pollution diffuse, la redevance pollution émergente serait due au moment de la prestation de mise sur le marché :  les redevables de l’ensemble des agences de l’eau adressent leur déclaration à une agence de l’eau désignée pour l'établissement du titre de recettes et le recouvrement de la redevance auprès de ces redevables. La déclaration émise par les redevables comportent différentes informations permettant à l’agence désignée de calculer le montant de la redevance due.

Ainsi, il est proposé qu’une agence de l’eau désignée recouvre les sommes dues auprès des metteurs sur le marché de ces produits générant des micropolluants.

L’objectif de cette redevance est de permettre de couvrir une partie des coûts d’investissement et de fonctionnement des installations de traitement complémentaires des usines de production d’eau potable et de traitement des eaux usées évaluées entre 135M€ et 1,35M€. Dans une première étape, l’objectif est une recette de l’ordre de 500M€ annuelle.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.