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commission des lois

Proposition de loi

Condamnés terroristes et lutte antiterroriste

(1ère lecture)

(n° 202 )

N° COM-1

15 janvier 2024


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. DAUBRESSE, rapporteur


ARTICLE 1ER


I. - Alinéas 11 à 13

Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :

 a) Le premier alinéa du I est ainsi modifié :

 - les mots : « état de récidive légale » sont remplacés par les mots : « réitération d’une infraction à caractère terroriste » ;

 - la première occurrence du mot « très » est supprimée ;

 - le mot : « persistante » est remplacé par le mot : « avérée » ;

 - après les mots : « actes de terrorisme », sont insérés les mots : « ou parce qu'elle souffre d'un trouble grave de la personnalité » ;

 - après les mots : « sa réinsertion, », la fin de cet alinéa est ainsi rédigée : « la juridiction régionale de la rétention de sûreté peut, sur réquisitions du procureur de la République et dans les conditions prévues à la présente section, ordonner à son encontre une mesure judiciaire de sûreté comportant une ou plusieurs des obligations mentionnées à l’article 132-44 du code pénal et aux 1°, 8°, 12°, 13°,19°, 20° et 22° de l’article 132-45 du même code. »

 b) Après le même I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

II. – Alinéa 14

Remplacer le mot :

ter

par le mot :

bis

II. – Alinéa 19

Remplacer le mot :

trois

par le mot :

six

Objet

Compte tenu du bilan non-concluant du déploiement de la mesure de prévention de la récidive terroriste près de deux années après son vote au Parlement, cet amendement tend à proposer des évolutions attendues par les services du parquet national antiterroriste (PNAT) comme des juges d’application des peines antiterroristes afin d’améliorer l’opérationnalité de la mesure et son adéquation aux profils des individus concernés.

En premier lieu, il prévoit une nouvelle caractérisation du critère de dangerosité, qui conditionne le prononcé de la mesure de sûreté existante et que la proposition de loi laisse sans modification.

La rédaction actuelle, si elle a le mérite de la précision, apparaît en effet peu opérationnelle. Les critères retenus sont à ce point restrictifs qu’ils se rapprochent de la définition de l’infraction d’association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et rendent de ce fait la mesure quasiment inapplicable voire inopportune – les services du PNAT préférant ouvrir une nouvelle information judiciaire pour de tels faits.

Afin de garantir l’opérationnalité de la mesure, sans la fragiliser sur le plan constitutionnel, il est proposé d’adapter la notion de dangerosité, par trois moyens :

- en abaissant le critère de dangerosité à celui d’un risque élevé de récidive ;

- en visant l’adhésion avérée à une idéologie ou à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme, plutôt qu’une adhésion persistante, particulièrement difficile à caractérisée après une longue période de détention et face à des profils qui font usage de techniques de dissimulation ;

- et, en introduisant un critère alternatif pour caractériser la particulière dangerosité en ajoutant le fait de souffrir de troubles graves de la personnalité, terreau particulièrement favorable à la récidive.

En deuxième lieu, cet amendement élargit l’application de la mesure aux personnes condamnées à des peines supérieures à trois ans, non plus en cas de récidive mais dès réitération d’infractions à caractère terroriste afin de faciliter le prononcé de cette mesure de réinsertion au contenu adaptée à des condamnés présentant des troubles psychiatriques.

En troisième lieu, cet amendement tend à compléter les obligations susceptibles d’être prononcées dans le cadre de la mesure de sûreté créée par la proposition de loi, à la lumière des difficultés rencontrées par les juges d’application des peines spécialisés en matière terroriste pour assurer un suivi adapté à ces profils. Ainsi, il apparaît nécessaire de renforcer tant l’accompagnement médical et psychiatrique, essentiel à la prévention de la récidive, que les obligations de déclaration ou d’autorisation des condamnés dans ce cadre. Pour ce faire, l’amendement prévoit une obligation d’exercice d’activité professionnelle ou de formation, une possibilité d’interdiction par le juge de l’exercice de certaines activités, une obligation d’informer le juge d’application des peines de tout déplacement à l’étranger ou d’obtenir son autorisation préalable pour tout déplacement à l’étranger, une faculté d’interdiction de contacts avec certains condamnés et d’entrer en relation avec certaines personnes ou catégories de personnes, et une injonction de soins, sur le modèle existant pour le suivi socio-judiciaire.

Le présent amendement, de la même manière, supprime du contenu de la proposition de loi certaines mesures, telles que l’interdiction de port d’arme – non nécessaire compte tenu des interdictions déjà en vigueur – ainsi que l’interdiction de paraitre en certains lieux ou d’établir sa résidence dans un lieu donné. Cette modification répond à une exigence constitutionnelle. Saisi de la conformité à la Constitution de l’allongement de la durée des Micas à deux ans, le Conseil constitutionnel a en effet également apprécié la nécessité et la proportionnalité de ces mesures au regard de l’existence de mesures moins attentatoires aux droits et libertés individuelles existantes. Dès lors, un renforcement du volet surveillance de cette mesure de sûreté judiciaire pourrait fragiliser les Micas en dépit de leur bilan opérationnel très positif.

Enfin, dans le souci d’assurer la pleine opérationnalité de la mesure, le présent amendement vise à allonger le délai d’évaluation du condamné quant à l’éligibilité d’une telle mesure de trois à six mois, délai opérationnel minimal compte tenu des délais d’attente pour le placement obligatoire dans un service d’évaluation de la dangerosité de l’intéressé.