commission des lois |
Proposition de loi Protection des lanceurs d'alerte (1ère lecture) (n° 174 ) |
N° COM-23 13 décembre 2021 |
AMENDEMENTprésenté par |
|
||||
Mme DI FOLCO, rapporteur ARTICLE 2 |
I. – Alinéa 3
1° Supprimer les mots :
ou toute personne morale de droit privé à but non lucratif
2° Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi que toute organisation syndicale de salariés ou de fonctionnaires représentative au niveau national ou au niveau de l'entreprise, de l'établissement ou de l'administration concernés ou toute association agréée qui fournit au lanceur d'alerte une telle aide ou qui effectue pour son compte un signalement ou une divulgation
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les conditions de délivrance et de retrait de l'agrément mentionné au 1° du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État, compte tenu notamment de l'objet de l'association concernée et de sa représentativité. »
Objet
Un nouvel équilibre doit être trouvé dans la protection des personnes morales qui aident les lanceurs d'alerte dans leurs démarches.
Le régime actuel de protection des lanceurs d'alerte ne bénéficie qu'aux personnes physiques. Les personnes morales qui révèlent des informations sensibles s'exposent donc à des mesures de rétorsion sans protection particulière ; elles peuvent aussi, lorsque les conditions sont réunies, voir leur responsabilité civile ou pénale engagée. À cet égard, on relèvera que même les syndicats ne jouissent pas d'une liberté d'expression illimitée, comme l'a rappelé la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 5 mars 2008 (n° 06-18.907, sur la responsabilité civile d'un syndicat ayant divulgué des informations confidentielles). Les personnes physiques qui fournissent les informations concernées à la personne morale s'exposent elles-mêmes à des mesures de représailles et des sanctions sans bénéficier du régime de protection des lanceurs d'alerte.
La proposition de loi (qui va au-delà, sur ce point, de la directive du 23 octobre 2019) prévoit cependant que les personnes morales puissent jouir du statut de « facilitateurs », dès lors qu'elles aident un lanceur d'alerte à effectuer un signalement ou une divulgation, les facilitateurs bénéficiant de l'ensemble des protections offertes par le régime.
Toutefois, plusieurs associations et syndicats entendus par le rapporteur déplorent que le texte ne leur permette pas d'effectuer un signalement ou une divulgation en lieu et place du lanceur d'alerte.
Or, pour la plupart d'entre eux, les lanceurs d'alerte ne cherchent pas la lumière. Tout au contraire, ils peuvent être dissuadés de révéler les manquements dont ils ont connaissance, s'ils doivent pour cela s'exposer personnellement. Leur rôle de « garde-fou démocratique et citoyen dans nos États de droit », pour reprendre les termes de l'exposé des motifs, peut donc se trouver entravé.
Afin de combler cette lacune, le présent amendement prévoit qu'un facilitateur, personne morale, puisse effectuer un signalement ou une alerte pour le compte d'un lanceur d'alerte, personne physique. L'un et l'autre bénéficieraient alors de l'ensemble des protections offertes par le régime. (Le retour d'informations à l'issue d'un signalement interne ou externe serait alors adressé à la personne morale, à charge pour celle-ci de le transmettre au lanceur d'alerte, comme il devra être précisé par décret.)
En revanche, il convient que le régime de protection des lanceurs d'alerte et des facilitateurs ne soit pas détourné de ses finalités par des officines cherchant à déstabiliser les entreprises ou les administrations françaises, en vue d'intérêts économiques ou géostratégiques.
C'est pourquoi le présent amendement réserve la protection des facilitateurs à certaines catégories de personnes morales exclusivement, à savoir les organisations syndicales représentatives au niveau national ou local, ainsi que les associations agréées.
Les conditions de l'agrément et de son retrait seraient fixées par voie réglementaire. En tout état de cause, comme l'exige l'article 25-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, les associations devraient, pour être agréées, satisfaire aux conditions suivantes : répondre à un objet d'intérêt général ; présenter un mode de fonctionnement démocratique ; respecter des règles de nature à garantir la transparence financière ; respecter les principes du contrat d'engagement républicain prévu à l'article 10-1 de la même loi.