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Commission spéciale sur la bioéthique

Projet de loi

Bioéthique

(2ème lecture)

(n° 686 rect. )

N° COM-29

14 janvier 2021


 

AMENDEMENT

présenté par

Rejeté

Mme Muriel JOURDA, rapporteur


ARTICLE 1ER


Rédiger ainsi cet article :

I. – Le chapitre Ier du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 2141-2 est ainsi rédigé :

« Art. 2141-2. - I. L’assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l’infertilité d’un couple formé d’un homme et d’une femme dont le caractère pathologique est médicalement diagnostiqué ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité.

« II. Les demandeurs doivent consentir préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination.

« Font obstacle à l’insémination ou au transfert des embryons :

« 1° Le décès d’un des membres du couple ;

« 2° L’introduction d’une demande en divorce ;

« 3° L’introduction d’une demande en séparation de corps ;

« 4° La signature d’une convention de divorce ou de séparation de corps par consentement mutuel selon les modalités prévues à l’article 229-1 du code civil ;

«  5° La cessation de la communauté de vie ;

« 6° La révocation par écrit du consentement prévu au deuxième alinéa du présent article par l’un ou l’autre des membres du couple auprès du médecin chargé de mettre en œuvre l’assistance médicale à la procréation.

« L’accès à l’assistance médicale à la procréation est possible selon des conditions d’âge encadrées par une recommandation de bonnes pratiques fixée par arrêté du ministre en charge de la santé après avis de l’Agence de la biomédecine. Elles prennent en compte les risques médicaux de la procréation liés à l’âge ainsi que l’intérêt de l’enfant à naître.

« Lorsqu'un recueil d'ovocytes a lieu dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation, il peut être proposé de réaliser dans le même temps une autoconservation ovocytaire. » ;

2° Après l’article L. 2141-2, il est inséré un article L. 2141-2-1 ainsi rédigé :

« Tout couple formé de deux femmes répondant aux conditions prévues au II de l’article L. 2141-2 a accès à l’assistance médicale à la procréation selon les modalités prévues au présent chapitre. » ;

3° L’article L. 2141-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les deux membres du couple sont informés des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'accueil d'embryons, notamment des dispositions de l’article L. 2143-2 relatives à l’accès des personnes conçues par assistance médicale à la procréation avec tiers donneur aux données non identifiantes et à l’identité du tiers donneur. » ;

4° L'article L. 2141-7 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Elle est également mise en œuvre dans les cas prévus à l'article L. 2141-2-1.

« Une étude de suivi peut être proposée au couple receveur, qui y consent par écrit."

5° L'article L. 2141-10 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2141-10. – La mise en œuvre de l’assistance médicale à la procréation est précédée d’entretiens particuliers des demandeurs avec les membres de l’équipe médicale clinicobiologique pluridisciplinaire du centre, composée notamment d’un psychiatre ou psychologue spécialisé en psychiatrie ou psychologie de l’enfant et de l’adolescent, le cas échéant extérieur au centre. L’équipe fait appel, en tant que de besoin, à un professionnel inscrit sur la liste mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 411-2 du code de l’action sociale et des familles.

« Le ou les médecins de l'équipe mentionnée au premier alinéa doivent :

« 1° S'assurer de la volonté des deux membres du couple à poursuivre leur projet parental par la voie de l'assistance médicale à la procréation, après leur avoir dispensé l'information prévue au 3° et leur avoir rappelé les possibilités ouvertes par la loi en matière d'adoption ;

« 2° Procéder à une évaluation médicale, psychologique et, en tant que de besoin, sociale, des deux membres du couple ;

« 3° Informer ceux-ci complètement et au regard de l’état des connaissances scientifiques des possibilités de réussite ou d’échec des techniques d’assistance médicale à la procréation, de leurs effets secondaires et de leurs risques à court et à long termes ainsi que de leur pénibilité et des contraintes qu’elles peuvent entraîner ;

« 3° bis En cas d'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur, informer les deux membres du couple des modalités de l'accès aux données non identifiantes et à l'identité du tiers donneur par la personne majeure issue du don ;  

« 4° Informer ceux-ci de l’impossibilité de réaliser un transfert des embryons conservés en cas de rupture du couple ainsi que des dispositions applicables en cas de décès d’un des membres du couple ;

« 5° Leur remettre un dossier-guide comportant notamment :

« a) Le rappel des dispositions législatives et réglementaires relatives à l’assistance médicale à la procréation ;

« b) Un descriptif de ces techniques ;

« c) Le rappel des dispositions législatives et réglementaires relatives à l’adoption ainsi que l’adresse des associations et organismes susceptibles de compléter leur information à ce sujet ;

« d) Des éléments d’information sur l’accès aux données non identifiantes et à l’identité du tiers donneur par la personne majeure issue du don ainsi que la liste des associations et organismes susceptibles de compléter leur information sur ce sujet ;

« e) Des éléments d’information sur les taux de réussite des techniques d’assistance médicale à la procréation, leurs effets secondaires et leurs risques à court et à long termes ainsi que sur l’état des connaissances concernant la santé des enfants ainsi conçus.

« Le consentement du couple est confirmé par écrit à l’expiration d’un délai de réflexion d’un mois à compter de la réalisation des étapes mentionnées aux 1° à 5°.

« L’assistance médicale à la procréation est subordonnée à des règles de sécurité sanitaire.

« Elle ne peut être mise en œuvre par le médecin ayant par ailleurs participé aux entretiens prévus au premier alinéa lorsque les demandeurs ne remplissent pas les conditions prévues au présent titre ou lorsque ce médecin, après concertation au sein de l’équipe clinicobiologique pluridisciplinaire, estime qu’un délai de réflexion supplémentaire est nécessaire aux demandeurs dans l’intérêt de l’enfant à naître.

« Le couple qui, pour procréer, recourt à une assistance médicale nécessitant l’intervention d’un tiers donneur doit préalablement donner, dans les conditions prévues par le code civil, son consentement à un notaire.

« La composition de l’équipe clinicobiologique pluridisciplinaire mentionnée au premier alinéa est fixée par décret en Conseil d’État. »

I bis. L'article L. 160-8 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° La couverture des frais relatifs aux actes et traitements liés à l'assistance médicale à la procréation réalisée en application du I de l'article L. 2141-2 du code de la santé publique.  »

II. – L’article L. 160-14 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 12° est ainsi rédigé :

« 12° Pour les investigations nécessaires au diagnostic et au traitement de l’infertilité ; »

2° Après le 25°, il est inséré un 26° ainsi rédigé :

« 26° Pour l’assistance médicale à la procréation réalisée, en application du I de l'article L. 2141-2 du code de la santé publique, dans les conditions prévues au chapitre Ier du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du même code. »

III. – (Supprimé)

Objet

Comme proposé en première lecture et sur la base des mêmes arguments, cet amendement de repli prévoit l'ouverture de l'accès à l'assistance médicale à la procréation aux couples de femmes.

Même s'il s'agit d'une monoparentalité choisie et non subie, l'accès de l'AMP aux femmes seules soulève de nombreuses interrogations au regard de la plus grande vulnérabilité dans laquelle est placée une personne seule dans l'éducation d'un enfant. Des professionnels de santé entendus ont exprimé à cet égard des avis plus réservés, à l’image du CCNE qui avait préconisé d’accompagner les demandes des femmes seules d’un accompagnement spécifique. 

La rédaction globale ainsi proposée pour l'article 1er emporte d'autres modifications du texte :

- un premier ensemble de modifications reprennent le texte voté par le Sénat en première lecture : le maintien du critère médical d'accès à l'AMP pour les couples hétérosexuels et le fait de réserver les conditions actuelles de prise en charge par la sécurité sociale aux seules AMP fondées sur un tel critère ; le renvoi à une recommandation de bonnes pratiques, plutôt qu'à un décret en Conseil d'Etat, des conditions d'âge pour accéder à l'AMP, afin de laisser plus de souplesse aux équipes médicales dans l'appréciation des situations individuelles ; le maintien du caractère médical de l'équipe pluridisciplinaire du centre d'AMP et la suppression de la référence à un "infirmier ayant une compétence en psychiatrie" pour la remplacer par celle d'un pédopsychiatre ; la substitution de la notion de vérification de la "motivation" des demandeurs par celle consistant à s'assurer de la volonté des deux membres du couple à poursuivre leur projet parental par la voie de l'AMP, après avoir été informés des limites et contraintes de celle-ci et le rétablissement du rappel des possibilités ouvertes par la loi en matière d'adoption, supprimé par le projet de loi ; la suppression de précisions réintroduites par l'Assemblée nationale dont la portée normative est discutable ;

- d'autres modifications portent sur des dispositions introduites par l'Assemblée nationale en deuxième lecture : est ainsi proposée une nouvelle rédaction de l'alinéa consistant à informer les demandeurs, dans le dossier-guide, des "désordres médicaux" induits par l'AMP, en faisant plutôt référence à des éléments d'information sur les risques de ces techniques et l'état des connaissances concernant la santé des enfants ainsi conçus ; est supprimée en outre la motivation par écrit des motifs de report ou de refus de prise en charge par les équipes médicales, modalités qui relèvent plus de la recommandation de bonnes pratiques que de la loi.

La rédaction maintient enfin des ajouts introduits par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, concernant la possibilité de réaliser une autoconservation ovocytaire lors d'une démarche d'AMP (issue à l'origine d'un  amendement voté au Sénat à l'article 2) et l'information des demandeurs, le cas échéant, sur les modalités d'accès à l'identité du tiers donneur.