commission des lois |
Proposition de loi Lutte contre la haine sur internet (Nouvelle lecture) (n° 270 ) |
N° COM-2 30 janvier 2020 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. FRASSA, rapporteur ARTICLE 1ER |
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa
« Art. 6-2. – I. – Aux fins de lutter contre la diffusion en ligne des infractions mentionnées au troisième alinéa du 7 de l’article 6 de la présente loi et au regard de l’intérêt général attaché au respect de la dignité humaine, les opérateurs de plateforme en ligne au sens du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation qui proposent un service de communication au public en ligne reposant sur la mise en relation de plusieurs parties en vue du partage de contenus publics et dont l’activité sur le territoire français dépasse un ou plusieurs seuils déterminés par décret en Conseil d’État sont tenus d’accomplir les diligences et de mettre en œuvre les moyens proportionnés et nécessaires en fonction de la nature du contenu et des informations dont ils disposent pour retirer ou rendre inaccessibles dans les vingt-quatre heures les contenus manifestement illicites qui leur sont notifiés.
Objet
Le présent amendement vise à confirmer l'approche du Sénat en première lecture, qui avait écarté la création d’un nouveau délit de « non-retrait » de tout contenu haineux en 24 heures, lui préférant une obligation de moyens sous le contrôle du régulateur.
Jugé inabouti voire dangereux par de nombreux acteurs tant de la société civile que de l’économie numérique, le dispositif pénal apparaît trop déséquilibré aux dépens de la liberté d’expression (risque de « sur-censure » ou de « sur-blocage » par précaution de propos licites mais polémiques, mise à l’écart du juge judiciaire), juridiquement fragile (problèmes d’imputabilité, d’intentionnalité, d’articulation avec le régime général de la LCEN) et probablement contraire au droit de l’Union européenne (la Commission européenne ayant adressé à la France de longues observations critiques pointant la violation de la directive e-commerce et de la Charte des droits fondamentaux).
Votre rapporteur estime préférable de privilégier les solutions qui conservent toute leur place à la puissance publique – la régulation par le CSA – plutôt que des innovations juridiquement incertaines déléguant toujours plus aux acteurs privés et aux géants américains du numérique la police de la liberté d’expression.
Ainsi, tout en refusant de créer ce nouveau délai couperet pénalement sanctionné au moindre manquement (une obligation de résultat), le présent amendement réaffirme que le délai de 24 heures pour le retrait d’un contenu manifestement haineux doit être un objectif à atteindre pour les grandes plateformes (une obligation de moyens). Le régulateur se voit d'ailleurs confier à cette fin de solides pouvoirs de contrôle (passant au besoin par la communication des algorithmes) et de sanction (jusqu’à 4 % du chiffre d’affaire annuel) afin de s’assurer que les plateformes mettent en oeuvre suffisamment de ressources humaines et techniques pour pouvoir remplir cet objectif.