commission des lois |
Projet de loi Justice XXIème siècle (Nouvelle lecture) (n° 796 ) |
N° COM-55 19 septembre 2016 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. DÉTRAIGNE, rapporteur ARTICLE 14 BIS |
Compléter cet article par deux paragraphes V et VI ainsi rédigés :
V. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le chapitre III du titre Ier du livre Ier est ainsi modifié :
a) L’intitulé est complété par les mots : « et de la collégialité de l’instruction : juridiction d’instruction du premier degré » ;
b) Est insérée une section 1 intitulée : « Du juge d’instruction » et comprenant les articles 49 à 52-1 ;
c) Est ajoutée une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Du collège de l’instruction
« Art. 52-2. – La présente section est applicable au traitement des affaires mentionnées :
- à l’article 704 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’article 704-1 ;
- à l’article 706-2 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’avant-dernier alinéa du I du même article ;
- à l’article 706-16 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’article 706-17 ;
- aux articles 706-73 et 706-73-1 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’article 706-75 ;
- à l’article 706-167 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’article 706-168.
« Art. 52-3. – Un collège de l’instruction est chargé, lorsqu’il est saisi soit à l’initiative du juge d’instruction en charge de la procédure, soit sur requête du procureur de la République, soit sur demande d’une partie déposée selon les modalités prévues par l’avant-dernier alinéa de l’article 81, de prendre une des ordonnances mentionnées à l’article 52-5.
« Art. 52-4. – Le collège de l’instruction est composé de trois juges d’instruction, dont le juge saisi de l’information, président.
« Les deux autres juges sont désignés par le président du tribunal de grande instance. Celui-ci peut établir à cette fin une ordonnance de roulement.
« Lorsque l’information fait l’objet d’une cosaisine, le ou les juges cosaisis font partie du collège de l’instruction. Si plus de trois juges ont été désignés dans le cadre de la cosaisine, l’ordre de leur désignation détermine leur appartenance au collège, sauf décision contraire du président du tribunal de grande instance.
« Lorsque, dans un tribunal de grande instance, le nombre de juges d’instruction ne suffit pas pour composer le collège, l’un des membres du collège peut être désigné parmi les autres juges du siège du tribunal.
« Les membres du collège de l’instruction sont désignés lors de la saisine de celui-ci ; cette désignation vaut également pour les autres saisines qui peuvent intervenir dans le cadre de la même information.
« Les désignations prévues au présent article sont des mesures d’administration judiciaire non susceptibles de recours.
« Art. 52-5. – Lorsqu’il est saisi dans les conditions prévues à l’article 52-3, le collège de l’instruction est compétent pour prendre une des ordonnances suivantes :
« 1° Ordonnance statuant sur la demande d’une personne mise en examen tendant à devenir témoin assisté en application de l’article 80-1-1 ;
« 2° Ordonnance statuant sur une demande d’acte déposée en application des articles 81, 82-1, 82-2 et 167 ;
« 3° Ordonnance statuant sur les demandes des parties déposées après l’avis de fin d’information en application du quatrième alinéa de l’article 175 ;
« 4° Ordonnance statuant sur les demandes relatives au respect du calendrier prévisionnel de l’information, en application de l’article 175-1 ;
« 5° Ordonnance procédant au règlement de l’information en application des articles 176 à 183 ; la demande tendant à la saisine du collège doit alors intervenir dans le délai mentionné au quatrième alinéa de l’article 175.
« Art. 52-6. – Les décisions du collège de l’instruction prévues par l’article 52-5 sont prises par ordonnance motivée signée par le président du collège et mentionnant le nom des deux autres juges faisant partie du collège.
« Art. 52-7. – Les juges du collège de l’instruction ne peuvent, à peine de nullité, participer au jugement des affaires pénales qu’ils ont connues en cette qualité. » ;
2° Au troisième alinéa de l’article 84, après les mots : « du juge chargé de l’information », sont insérés les mots : « ou d’un juge membre du collège de l’instruction » et les mots : « d’instruction » sont supprimés ;
3° L’article 183 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les ordonnances rendues par le collège de l’instruction en application de l’article 52-6 sont notifiées conformément aux dispositions du présent article. » ;
4° À l’intitulé de la section 12 du chapitre Ier du titre III du livre Ier, après les mots : « d’instruction», sont insérés les mots : « ou du collège de l’instruction ou du juge des libertés et de la détention » ;
5° Après l’article 186-5, il est inséré un article 186-6 ainsi rédigé :
« Art. 186-6. – Les articles 186 à 186-5 s’appliquent aux appels formés contre les ordonnances rendues par le collège de l’instruction. »
VI. – Le V du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2017.
Objet
Après avoir envisagé de l'aménager, les députés ont décidé de supprimer les dispositions relatives à la collégialité de l'instruction.
Votre rapporteur est sensible aux arguments mis en avant par les députés lors de ce débat, en particulier le président Dominique Raimbourg qui a noté qu’il convenait de « prendre acte de la difficulté dans laquelle se trouve » l’autorité judiciaire, « de la pénurie dans laquelle elle se débat ». Il estime cependant qu’une voie alternative à la suppression pure et simple de cette réforme pourrait être envisagée afin de faire de la collégialité une faculté supplémentaire s’ajoutant à la pratique de la cosaisine, ainsi que le proposait le projet de loi déposé par le Gouvernement en juillet 2013, mais limitée au traitement des seules affaires les plus complexes relevant de la compétence de juridictions spécialisées disposant d’ores et déjà des moyens humains suffisants en magistrats instructeurs.
Par conséquent, le présent amendement reprend l’économie générale du projet de loi déposé en juillet 2013 tout en limitant la possibilité de mettre en œuvre la collégialité de l’instruction à certaines affaires relevant de la compétence de juridictions spécialisées disposant d’une compétence concurrente dans certaines matières.
Seraient ainsi concernées les affaires relevant de la compétence des juridictions interrégionales spécialisées en matière économique et financière (article 704 du code de procédure pénale) ou dans le domaine de la lutte contre la criminalité et la délinquance organisées (articles 706-73 et 706-73-1 du même code), des pôles de santé publique des tribunaux de grande instance de Paris et Marseille (article 706-2 du même code) et du tribunal de grande instance de Paris en matière de terrorisme (article 706-16 du même code) ou d’infractions relatives à la prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs (article 706-167 du même code).
Comme dans le schéma envisagé par le Gouvernement en juillet 2013, cette collégialité serait facultative car elle ne serait mise en œuvre qu’en cas de demande formulée soit par le juge d’instruction en charge de la procédure, soit par le procureur de la République, soit par les parties. En outre, elle ne trouverait à s’appliquer que pour les actes essentiels de l’instruction :
– ordonnance statuant sur la demande d’une personne mise en examen tendant à devenir témoin assisté ;
– ordonnance statuant sur les demandes d’acte ou d’expertise ;
– ordonnance statuant sur les demandes relatives au respect du calendrier prévisionnel de l’information ;
– ordonnance statuant sur les demandes des parties déposées après l’avis de fin d’information ;
– ordonnance de règlement de l’information.
Une telle faculté permettrait d’expérimenter la collégialité de l’instruction dans le cadre des affaires les plus complexes au sein de juridictions qui sont d’ores et déjà dotées d’un nombre suffisant de magistrats instructeurs et, ainsi, d’apprécier les conséquences concrètes de la collégialité pour le justiciable avant d’envisager son élargissement à d’autres affaires, ce qui supposerait alors de dégager des moyens humains supplémentaires.