commission des lois |
Proposition de loi constitutionnelle Compensation des charges applicables aux collectivités territoriales (1ère lecture) (n° 197 ) |
N° COM-1 14 décembre 2015 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. VIAL, rapporteur ARTICLE 1ER |
Rédiger ainsi cet article :
Après l’article 39 de la Constitution, il est inséré un article 39-1 ainsi rédigé :
« Art. 39-1. – Les objectifs de simplification et de clarification du droit s’appliquent à la loi et au règlement, sans préjudice des conditions d’exercice des libertés publiques ou des droits constitutionnellement garantis.
Dans les conditions prévues par une loi organique, toute mesure nouvelle ou toute aggravation d’une mesure portant sur les compétences ou obligations incombant aux collectivités territoriales fait l’objet d’une évaluation préalable. »
Objet
L’article 1er de la proposition de loi constitutionnelle propose d’introduire un mécanisme de « gage » s’appliquant aux projets et propositions de lois ainsi qu’aux amendements parlementaires comme gouvernementaux qui proposeraient la création d’une « contrainte ou d’une charge supplémentaires » s’imposant aux collectivités territoriales. Ces derniers ne pourraient être « mis en discussion » que s’ils prévoyaient simultanément la suppression d’une contrainte ou d’une charge équivalente. En d’autres termes, toute création d'une contrainte ou d'une charge nouvelle devrait être gagée par la suppression d’une contrainte ou d'une charge équivalente.
Cette rédaction soulève plusieurs questions.
Tout d’abord, la rédaction proposée ne permet pas, avec certitude, d’interpréter ce texte comme limitant son application aux seules dispositions représentant une charge budgétaire. En effet, une contrainte peut n’avoir aucune incidence budgétaire, rendant difficile la suppression d’une contrainte équivalente.
Ensuite, elle soulève des questions d’articulation avec d’autres dispositions constitutionnelles. En premier lieu, au regard de l’article 40 de la Constitution, l’article 1er de la proposition de loi constitutionnelle introduit une nouvelle condition de recevabilité des initiatives parlementaires qui s’ajouterait à celles déjà existantes, mais aussi des initiatives gouvernementales. En prévoyant un mécanisme de gage qui autoriserait la discussion d’une disposition créant une charge financière supplémentaire, l’article 1er de la proposition de loi constitutionnelle créerait une contradiction avec l’article 40 de la Constitution.
En effet, une initiative parlementaire introduisant une charge ou une contrainte supplémentaire pour les collectivités territoriales serait recevable dès lors qu’elle serait gagée par la suppression d’une charge ou d’une contrainte équivalente, en termes de coût. En revanche, celles, identiques, mais applicables à d’autres personnes publiques, seraient déclarées irrecevables au regard de l’article 40 de la Constitution. Ainsi, deux dispositions identiques mais s’appliquant à différentes personnes publiques ne seraient pas soumises aux mêmes règles de recevabilité financière et ne subiraient pas le même sort, ce qui soulève un évident problème de cohérence.
Au surplus, paradoxalement, la règle de recevabilité prévue par la proposition de loi constitutionnelle serait moins protectrice des finances locales que l’article 40, puisqu’elle permettrait d’imposer de nouvelles dépenses locales, à condition de les compenser.
En deuxième lieu, la rédaction de l'article ,1er de la proposition de loi constitutionnelle au regard de l’article 39 de la Constitution soulève une difficulté : sur le fondement du troisième alinéa de l’article 39 de la Constitution et en application de l’article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, les projets de loi sont obligatoirement accompagnés d’une étude d’impact. Le Gouvernement est donc déjà soumis à une obligation d’évaluation, dont on peut certes parfois regretter le manque de qualité et de sincérité.
En troisième lieu, elle soulève également une difficulté au regard de l’article 72 de la Constitution : l’application de l’article 1er n’aurait pas permis à votre commission, dans le cadre de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, de confier aux régions une compétence en matière d’accompagnement des demandeurs d’emploi, sauf à supprimer une compétence régionale de charge équivalente. Ainsi, l’article 1er reviendrait à figer les compétences des collectivités territoriales, sans permettre leur renforcement et empêcher tout débat sur l’opportunité de leur en confier de nouvelles.
Pour répondre à ces réserves et tout en poursuivant l'objectif des auteurs de la proposition de loi constitutionnelle, le présent amendement tend à insérer dans la Constitution un nouvel article 39-1 composé de deux alinéas.
Le premier alinéa soumettrait le législateur et le pouvoir réglementaire au respect des principes de simplification et de clarification du droit sans préjudice des conditions d’exercice des libertés publiques ou des droits constitutionnellement garantis. Le pouvoir législatif comme le pouvoir réglementaire seraient tenus de respecter ces principes dans le cadre de leur mission respective.
Le second alinéa prévoit, dans les conditions fixées par une loi organique, toute mesure nouvelle ou toute aggravation d’une mesure nouvelle qui porterait sur les compétences exercées par une ou plusieurs collectivités territoriales devrait faire l’objet d’une évaluation préalable sérieuse et d’une réflexion sur la compensation financière. L’objectif de cette rédaction est, outre le recours à des termes juridiques plus précis et plus appropriés, d’obliger le législateur, dans sa volonté de créer ou d’aggraver une charge pesant sur les collectivités territoriales, à réfléchir aux conséquences techniques et budgétaires d’une telle proposition. Une loi organique serait nécessaire pour préciser les éléments devant figurer dans l’évaluation, les règles encadrant la compensation qui s’inscriraient dans cette disposition. Ainsi, le présent amendement propose d’élever au niveau constitutionnel l’obligation, de niveau organique, d’une évaluation préalable qui s’imposerait également aux initiatives parlementaires dans des conditions à préciser.